II. Impacts sur les activités, la participation et la qualité de vie

2019


ANALYSE

5-

Impacts sur les activités
quotidiennes, la participation
et la qualité de vie

La participation et la qualité de vie sont des concepts clés pour comprendre et évaluer les impacts du TDC sur la vie des personnes atteintes. De plus, ces notions jouent un rôle important tant pour établir le diagnostic (particulièrement la participation pour le critère B du DSM) que pour apprécier la nature et l’intensité du handicap et être ainsi en mesure de juger de l’intérêt des interventions et/ou adaptations proposées mais aussi des compensations à mettre en place pour chacun (la participation sociale et la qualité de vie doivent être le but ultime de toute prise en charge). Dans ce chapitre, après une présentation théorique de ces deux notions puis du corpus de publications analysé, nous présenterons les principaux résultats apportés par cette littérature sur les impacts personnels et sociaux du TDC en les distinguant selon les activités et selon les âges. Nous mentionnerons également l’intérêt de la mesure de la participation pour repérer ces troubles avant de souligner un certain nombre de limites à prendre en compte dans les travaux analysés.

Notions préalables

La participation

La participation est habituellement définie comme l’implication de l’individu dans une situation de la vie réelle (CIF, 2001). Elle constitue le versant social du fonctionnement du sujet. À partir de la décennie 1970, le handicap est dissocié de la déficience, indépendamment de sa nature et de sa cause, donnant lieu au concept de « situation de handicap ». En 2001, l’OMS adopte la CIF (Classification internationale du fonctionnement) qui introduit les termes de fonctionnement, activités et participation sociale. Cette classification analyse les situations de handicap selon quatre composants principaux :
• l’organisme (les structures anatomiques et les fonctions physiologiques qui sont plus ou moins déficientes) ;
• la participation (les activités accessibles ou inaccessibles, les actions qui peuvent être accomplies ou non) ;
• les facteurs environnementaux (ce que la société a prévu ou non pour faciliter l’intégration des personnes en situation de handicap) ;
• les facteurs personnels (les situations individuelles).
En 2012, il est apparu que, du fait des caractéristiques évolutives des opportunités, possibilités ou exigences sociales de participation en fonction des âges, il fallait développer une version de la CIF enfants-adolescents (CIF-EA : CIF pour l’enfance et l’adolescence). Plus l’enfant est jeune, plus les opportunités de participer sont susceptibles d’être définies par les parents, les dispensateurs de soins et les prestataires de services. Pour les enfants d’âge scolaire, les environnements de la vie quotidienne sont étroitement connectés à la maison et à l’école.
Les catégories de la CIF-EA peuvent être utilisées pour caractériser des situations individuelles, construire des échantillons pour la recherche, sélectionner les items à évaluer ou encore évaluer des interventions.
La participation est généralement évaluée à partir de questionnaires concernant les habitudes de vie de la personne dans son environnement et son degré de participation sociale. Ces questionnaires sont remplis de préférence avec la personne concernée mais une tierce personne peut les remplir complètement ou partiellement.
Les objectifs de ces questionnaires sont multiples, comportant des applications administratives et politiques (pouvoirs publics) – par exemple pour l’obtention de droits spécifiques en lien avec la reconnaissance du handicap – et cliniques. Concernant les aspects cliniques, on peut souligner une utilisation pour l’évaluation de l’impact du TDC dans la vie quotidienne ainsi que pour l’évaluation et le choix des interventions thérapeutiques et compensations.

La qualité de vie (QDV)

Le concept de qualité de vie est apparu dans les années 1960, « né de la conjonction d’une modification du pronostic des maladies, de la considération de l’autonomie des malades et d’un besoin d’évaluation médicale » (Brousse et Boiseaubert, 2007renvoi vers). Elle tient compte des bénéfices ressentis par les patients, de leur vécu, de leurs besoins et de leurs désirs. C’est donc un concept subjectif qui n’a pas de contour strictement défini. D’après Haelewyck et Magerotte (2000)renvoi vers, les dimensions de la qualité de vie qui sont le plus souvent citées concernent les relations sociales et les interactions, le bien-être psychologique et la satisfaction personnelle, l’emploi, l’autodétermination, l’autonomie et les choix personnels, la compétence personnelle, les habiletés de vie autonome et l’intégration communautaire.
En ce qui concerne la qualité de vie en situation de handicap on retrouve généralement quatre dimensions principales :
• physique : capacités physiques, habiletés, autonomie des gestes de la vie quotidienne ;
• psychologique : émotivité, anxiété, dépression, satisfaction personnelle ;
• somatique : symptômes, douleurs, sommeil, fatigue, etc. ;
• sociale : environnement familial, professionnel et amical, participation à des activités de loisirs, etc.
Ces aspects sont évalués par différents questionnaires (remplis par les parents, les enseignants et/ou les enfants eux-mêmes) dont les items ont été préalablement définis en fonction des objectifs poursuivis (décisionnels ou évaluatifs par rapport à des modalités de prise en charge).
Des conditions de vie objectivement identiques peuvent déterminer des ressentis très différents : la personne est la seule habilitée à juger de sa qualité de vie.
Cela a plusieurs implications pour l’analyse de la littérature. Ce ressenti est fortement dépendant du contexte de vie, de l’environnement social et culturel : les études issues de contextes socio-éducatifs différents doivent donc être interprétées avec un certain recul au regard du contexte français (habitudes de vie, projets de vie familiale, scolarité, etc.). Par ailleurs, le sexe de l’enfant est susceptible d’orienter certains items : le développement tant physique que psychosocial des filles ou des garçons est différent, tout comme les contraintes sociales qui s’appliquent sur les uns et les autres, influençant les représentations, les ressentis et donc les réponses. Ceci est à prendre en compte dans la mesure où beaucoup plus de garçons que de filles souffrent d’un TDC et que les questionnaires (et donc les résultats des études) tiennent peu compte de cette distinction de genre. Enfin, concernant les enfants, ce sont souvent les parents qui apprécient la qualité de vie de l’enfant. Ceci pose problème car des auteurs ont montré (Siméoni et coll., 1999renvoi vers) le peu de concordance entre les jugements émis par les enfants (atteints de maladies chroniques ou en bonne santé) et ceux émis par les proches (parents, enseignants, voire médecin traitant).

Caractéristiques du corpus des publications

Ce chapitre se base sur l’analyse d’un corpus bibliographique composé de 45 articles1 . Son analyse montre que la participation et la QDV des personnes présentant un TDC sont devenues un sujet d’intérêt surtout à partir des années 2008-2010 (figure 5.1Renvoi vers), probablement en lien avec les recommandations de la CIF (2001) et les délais habituels pour se saisir de nouveaux concepts. Les publications proviennent essentiellement de pays de culture anglo-saxonne et d’Israël. On notera (figure 5.2Renvoi vers) qu’il n’y a aucune publication française, ce qui a son importance, puisque les notions de participation et de QDV sont très liées à l’environnement culturel, aux habitudes de vie et aux exigences scolaires selon les pays. Il conviendra donc de rester prudent sur la transposition des résultats dans le contexte français.
Figure 5.1 Évolution du nombre de publications
Figure 5.2 Pays d’où sont issues les publications
L’essentiel des publications concerne les enfants d’âge scolaire (figure 5.3Renvoi vers), de fin de maternelle (4-6 ans) et d’élémentaire (6-13 ans). Une étude est consacrée aux enfants d’âge préscolaire, avant 4 ans (Lau et coll., 2006renvoi vers). Quelques-unes s’intéressent aux jeunes adultes (Allan et Cope, 2004renvoi vers ; Hill et coll., 2011renvoi vers ; Kirby et coll., 2011renvoi vers ; Tal-Saban et coll., 2014renvoi vers). Dans ces études, le sex ratio varie de 3 à 7 garçons pour une fille.
Figure 5.3 Âges des populations étudiées
Sept publications sont des revues de la littérature (Magalhaes et coll., 2011renvoi vers ; Dahan-Oliel et coll., 2012renvoi vers ; Van der Linde et coll., 2013renvoi vers ; Zwicker et coll., 2013renvoi vers ; Kanagasabai et coll., 2014renvoi vers ; Engel-Yeger, 2015renvoi vers ; Gagnon-Roy et coll., 2016renvoi vers). Trois articles ont pour objectif de mettre au point ou valider des questionnaires de participation et QDV pour enfants, dans le but de permettre un repérage précoce (Josman et coll., 2010renvoi vers ; Van der Linde et coll., 2014renvoi vers ; Kennedy-Behr et coll., 2015renvoi vers). Toutes les autres études évaluent quelles sont les activités qui mettent les jeunes présentant un TDC en situation de handicap et quel est leur vécu dans diverses situations.
Pour ces articles le diagnostic de TDC est effectué à partir du score de dégradation au MABC (version 1 ou 2 selon les années, au 5e et/ou au 15e percentile selon les publications) et/ou selon les critères du DSM (4 ou 5 selon l’année de publication). Les sujets diagnostiqués TDC (ou « probables » TDC pour ceux évalués au 15e percentile du MABC) sont comparés à une population-témoin (contrôle) appariée. Les critères d’exclusion « classiques » sont signalés et respectés (déficience intellectuelle, troubles neurologiques et psychiatriques) mais l’exclusion ou l’inclusion d’enfants présentant un TDA/H n’est souvent pas précisée, ce qui pose des problèmes d’interprétation des conclusions. Par ailleurs, l’absence de précisions sur d’éventuels troubles neurovisuels et visuospatiaux, troubles de l’attention, troubles des fonctions exécutives ou encore autres troubles des apprentissages des personnes recrutées pose question puisqu’elle ne permet pas d’évaluer les impacts de ces troubles susceptibles de faire partie du, ou d’être associé au, TDC sur la participation et la qualité de vie. Par exemple, les troubles neuro-visuels ou oculomoteurs et/ou troubles du regard et/ou troubles visuo-moteurs ne sont pas du tout pris en compte (sauf dans la publication concernant le permis de conduire, Kirby et coll., 2011renvoi vers). Pourtant plusieurs travaux de cliniciens (Chatriot et coll. 2010 ; Gaie et coll. 2014) montrent un lien fort entre les plaintes concernant la maladresse, les activités de vie quotidienne, le graphisme et la gêne scolaire d’une part et les troubles visuo-spatiaux d’autre part2 .
Il faut enfin souligner la très grande hétérogénéité des populations considérées, hétérogénéité notée par de nombreux auteurs eux-mêmes : « l’hétérogénéité des enfants avec TDC est attestée par la grande variabilité des performances au quotidien depuis l’échec à de nombreuses tâches jusqu’à des difficultés dans des tâches spécifiques » (Missiuna et coll., 2007renvoi vers). De même, Van Der Linde et coll. (2015)renvoi vers constatent que certains enfants ont des difficultés dans toutes les activités de vie quotidienne, d’autres seulement dans le graphisme, ou dans les jeux de ballons seuls, ou bien uniquement pour utiliser une clé ou découper du papier avec des ciseaux etc. Or, ces importantes discordances inter-individuelles sont souvent lissées dans les conclusions, les résultats étant donnés pour l’ensemble de la cohorte étudiée. Cela souligne aussi l’importance du nombre et du choix des items dans le large panel de questionnaires proposés. Enfin, la proportion des enfants qui présentent un « retard » dans les apprentissages (delay, sans autre précision) varie de 0 à 100 % selon les publications, les critères d’inclusion et d’exclusion des enfants ou le type de questionnaire choisi.
Hormis les revues de la littérature, la plupart des autres publications s’appuient sur des questionnaires proposés aux parents, aux enfants et/ou aux enseignants et parfois sur l’analyse de tâches (jeux, activités) proposées aux enfants. Ces travaux comprennent toujours un groupe contrôle avec des enfants standards appariés en âge, sexe, QI et niveau socio-économique des parents. On note que douze articles n’interrogent que les parents. Notons deux publications qui proposent aussi à l’enseignant un questionnaire de participation et QDV à l’école (Dunford et coll., 2005renvoi vers ; Wang et coll., 2009renvoi vers).
Les divers questionnaires proposés et retrouvés dans la littérature sur le TDC sont extrêmement variés3 . À noter que certains tests portant plus spécifiquement sur la motricité peuvent comporter des items sur les activités de la vie quotidienne comme le Buininks-Osertesky-2 (BOT-2) ou le Test of Gross Motor Development (TGMD).
Pour la participation, sont généralement distingués trois secteurs d’activité :
• les soins personnels (mobilité, hygiène, se nourrir et s’habiller, etc.) ;
• les activités pré’scolaires, scolaires, pré-professionnelles et professionnelles : écriture, travaux manuels, organisation du bureau, cantine, etc. ;
• les loisirs et jeux (jeux de ballon etc.).
Engel-Yeger (2015)renvoi vers, au terme de sa revue de la littérature, recense 8 items fondamentaux concernant la participation : s’occuper de soi ; vivre à la maison ; mobilité ; échanges d’informations et vie sociale ; scolarité ; emploi, travail (scolaire pour les enfants) ; vie économique et vie civique.
Différents critères sont généralement pris en compte concernant la QDV : l’indépendance, le bien-être et le plaisir ou a contrario la déception, la frustration et l’empêchement.
D’une façon générale, il est difficile, dans les articles de dissocier clairement participation et QDV. La plupart cherche à préciser la participation de l’enfant présentant un TDC dans les activités de la vie quotidienne en cernant les activités que l’enfant réalise (avec un certain flou entre ce qui relève de l’activité et ce qui relève de la participation au sens de la CIF) mais évalue aussi son degré de satisfaction (ou celui des parents) quant à la réalisation de cette activité. Si les deux termes – participation et QDV – sont théoriquement bien définis et répondent à des préoccupations différentes, les deux apparaissent ainsi intimement mêlés : la réalisation (activité, performance, participation) est intimement liée au degré de satisfaction ressenti par le sujet.

L’impact personnel et social du TDC selon les activités

Les enfants présentant un TDC apparaissent comme très conscients de leurs difficultés dans les tâches de la vie quotidienne (Engel-Yeger et Hanna, 2010renvoi vers ; Dunford et coll., 2005renvoi vers).
Précisons dès maintenant que certaines activités revêtent pour les enfants présentant un TDC une importance particulière. Par exemple, faire du vélo, accéder à l’écriture cursive ou clavier, faire ses lacets (ou mettre sa combinaison de ski au Canada !). Leur réussite modifie l’insertion sociale, le regard des autres (pairs et adultes) et a un impact décisif sur la qualité de vie des jeunes. Mandich et coll. (2003)renvoi vers considèrent qu’il s’agit quasiment de « rites de passage ». Il est à noter que ces activités sont aussi celles qui sont le plus souvent choisies par les enfants dans le cadre des interventions CO-OP (Cognitive Orientation to daily Occupational Performance)4 .
Les publications montrent que les activités de la vie quotidienne au domicile (se brosser les dents, se coiffer, couper sa viande, se servir à boire, se moucher, se laver les mains, faire ses lacets, s’habiller, dessiner et écrire, etc.) sont impossibles ou difficiles, lentes et de médiocre efficacité pour les enfants présentant un TDC (Dunford et coll., 2005renvoi vers ; Summers et coll., 2008renvoi vers ; Wang et coll., 2009renvoi vers). Ces derniers se révèlent moins autonomes que les enfants au développement typique mais aussi que les enfants souffrant d’un autre trouble « dys » (Bart et coll., 2011renvoi vers). Ils demandent beaucoup plus d’attention, de soins et d’aide de la part de leurs parents que leurs pairs du même âge. Ils participent moins aux tâches familiales et cela est générateur de tensions et conflits (Wuang et coll., 2012renvoi vers). Les parents signalent tout de même qu’ils développent une meilleure autonomie (habillage, hygiène personnelle) aux alentours de 6-9 ans (Summers et coll., 2008renvoi vers). Pour les enfants, une meilleure participation est généralement liée à une estime de soi supérieure (Engel-Yeger et Hanna, 2010renvoi vers).
Les parents sont globalement moins satisfaits de leur qualité de vie que ceux du groupe contrôle (Liberman et coll., 2013renvoi vers). Ils insistent sur la lenteur, pourtant mal repérée dans les différents questionnaires ou protocoles. Les parents développent souvent des stratégies « d’économie gestuelle » pour faciliter le quotidien (vêtements adaptés, faire à la place de l’enfant, éviter certaines activités). Par exemple les parents ne proposent pas d’activités manuelles (graphisme mis à part) ou aident l’enfant lors de l’habillage ou des repas, afin de limiter les conflits, les échecs, les retards et pour préserver une vie de famille satisfaisante (Van der Linde et coll., 2015renvoi vers)
L’efficacité scolaire (ou school productivity) est bien moindre que celle des contrôles, et corrélée à l’importance du trouble moteur (via les résultats au MABC). Les publications parlent de « retard » (delay) sans qu’aucune précision ne soit donnée sur les causes ou la nature de ses retards. De plus, on ne comprend pas clairement si ces problèmes d’apprentissage sont une conséquence directe et spécifiquement liée au TDC, ou au contraire proviennent d’un trouble associé. Dans la rubrique de la participation scolaire, les différentes publications signalent des difficultés concernant le sport et les habiletés physiques, des « difficultés » d’organisation (terme qui n’est jamais précisé5 ) et une difficulté ou une lenteur pour achever les tâches scolaires (voir Magalhaes et coll., 2011 pour une revuerenvoi vers), mais peu d’entre elles concerne les apprentissages proprement dits (langage écrit, nombre et calcul, etc.). Il est donc difficile de savoir s’il s’agit de difficultés scolaires directement liées aux troubles moteurs (lenteur, maladresse, graphisme) et/ou à d’autres troubles qui pourraient être considérés comme des comorbidités (troubles visuo-spatiaux, regards, attention, fonctions exécutives, etc.). En outre il y a un risque important de sous-estimation des troubles scolaires puisque la plupart des publications excluent les learning disabilities (sans préciser vraiment de quoi il s’agit), ou encore les élèves à « besoins éducatifs particuliers ».
En ce qui concerne plus précisément le graphisme manuel, Rosenblum et Livneh-Zirinski (2014)renvoi vers concluent à une corrélation significative entre le profil de vitesse d’écriture des enfants et leurs piètres performances dans les activités de la vie quotidienne. Van der Linde et coll. (2015)renvoi vers rappellent que certains enfants diagnostiqués TDC ne présentent qu’un trouble isolé du graphisme, ce qui conforte la notion de grande hétérogénéité de cette population. Si beaucoup de parents (51 %) sont essentiellement préoccupés par la maladresse motrice, plus de 31 % le sont spécifiquement par le trouble du graphisme. C’est également une inquiétude importante pour plus de 79 % des enseignants (Dunford et coll., 2005renvoi vers). En effet, étant donné l’importance de l’écriture manuscrite dans notre société, aussi bien dans la réussite scolaire que professionnelle, les difficultés à réaliser cette activité peuvent avoir des conséquences personnelles et sociales importantes. Les conséquences à terme peuvent être une baisse d’intérêt pour les tâches scolaires, de l’anxiété, des comportements d’évitement, une dévalorisation, une perte de confiance en soi et même l’échec scolaire (Zesiger, 1995renvoi vers ; Sigurdsson et coll., 2002renvoi vers ; Caçola, 2016renvoi vers).
Enfin, les articles indiquent aussi que les enfants présentant un TDC font moins d’activités physiques, de jeux physiques et de sports que leurs pairs ; ils y sont moins compétents et ont beaucoup de retours négatifs (critiques, moqueries, échecs ; Smyth et Anderson, 2000renvoi vers). Ceci est corrélé à une moindre estime de soi et une moindre confiance en soi, mais aussi à moins d’occasions de contacts sociaux et de relations amicales (isolement) (Jarus et coll., 2011renvoi vers)6 .
La littérature atteste donc que les enfants présentant un TDC ont de faibles performances dans les activités de la vie quotidienne, notamment en contexte scolaire ainsi que dans les activités physiques et qu’il existe généralement, pour eux, une importante restriction dans les activités de la vie quotidienne associée à une limitation de participation dans les domaines de la vie scolaire, familiale et sociale, un isolement et une moindre qualité de vie : mauvaise estime de soi, piètre sentiment de compétence, sentiment de décevoir les parents, vécu de frustration, etc.

L’impact personnel et social du TDC selon les âges

Entre 4 et 6 ans (à la maternelle)

Les jeunes présentant un TDC ont beaucoup moins de plaisir à aller à l’école maternelle que leurs pairs. Ils se sentent plus en difficulté à l’école que les enfants contrôles alors que leurs parents surestiment beaucoup leur bien-être dans le contexte scolaire (Kennedy-Behr et coll., 2015renvoi vers).
Kennedy-Behr et coll. (2011)renvoi vers montrent que ces enfants s’engagent moins dans des jeux matures que leurs pairs (ils jouent à des jeux habituellement pratiqués par des plus jeunes), et qu’ils ont plus d’interactions négatives au cours des jeux libres (récréations). Ils sont souvent sujets à des moqueries, à des rejets du groupe, et sont souvent agressés physiquement ou verbalement, mais ils se montrent également agressifs (Kennedy-Behr et coll., 2013renvoi vers). Ceci est important pour la construction de leur personnalité et leurs modalités relationnelles ultérieures. D’après les auteurs (Kennedy-Berhr et coll., 2015renvoi vers), cela devrait inciter à travailler précocement avec ces enfants sur les interactions sociales et à les aider à affronter les autres.
Les auteurs mentionnent également que dès cet âge les enfants ont une grande conscience de leurs troubles, de leur intensité et de la norme (Dunford et coll., 2005renvoi vers). Leur perception de leurs troubles rejoint celle des enseignants pour les activités scolaires, et celle des parents pour les activités de la vie quotidienne à domicile.
A contrario, les parents et les enseignants minimisent les problèmes de leur enfant présentant un TDC en ce qui concerne les jeux et les loisirs (Dunford et coll., 2005renvoi vers) et les parents ont tendance à surestimer le bien-être des enfants à l’école maternelle. Or, « pour l’enfant TDC, les jeux à l’école ne sont pas des jeux : c’est un dur travail » (Kennedy-Berhr et coll., 2015renvoi vers) !

Entre 6 et 13 ans (à l’école primaire)

À cet âge encore les enfants présentant un TDC se trouvent souvent seuls en récréation, ayant peu d’interaction avec les autres (Smyth et Anderson, 2000renvoi vers), moins bien intégrés dans les équipes de jeux (surtout les garçons) et en particulier les équipes de foot, et ce d’autant plus qu’ils sont plus âgés. On peut se demander si ce constat est en lien avec une exigence plus élevée des enfants envers eux-mêmes et leurs pairs avec l’âge avançant. Les enfants présentant un TDC préfèrent les jeux statiques, sédentaires, les jeux sociaux de règles et d’imagination (dans lesquels ils sont autant impliqués que les enfants standards ; Smyth et Anderson, 2000renvoi vers) et passent beaucoup de temps seuls. Dans cette étude, parmi les 10 enfants dont le score au MABC est inférieur au 5e percentile, 9 passent près de 28 % du temps seuls (contre 8,7 % pour les enfants du groupe contrôle). Ils sont plus souvent spectateurs du jeu des autres (Watkinson et coll., 2001renvoi vers). Poulsen et coll. (2006)renvoi vers constatent la moindre participation et la moindre satisfaction des enfants présentant un TDC dans tous les loisirs physiques, structurés (équipes de foot, de baseball, de cricket, de basket, etc.) ou non (jeux de ballon informels, bricolages, etc.), en groupe ou seuls (gymnastique, trampoline, vélo, etc.). On regrette qu’aucune indication ne soit ici apportée selon le genre.
Poulsen et coll. (2006renvoi vers, 2007renvoi vers) montrent que la moindre participation, l’isolement, la moindre opportunité de relations amicales sont importantes quelle que soit l’intensité du trouble : ils ne retrouvent pas de différence significative selon la sévérité du trouble. Cette étude australienne utilise essentiellement le students’ life satisfaction scale ; le loneliness and social dissatisfaction questionnaire et le leisure diagnostic battery. Au contraire, Wuang et coll. (2012)renvoi vers – utilisant le Health Related Quality of Life (HRQOL, Ravens-Sieberer et Bullinger, 1998renvoi vers) – concluent qu’à Taïwan, le degré de réduction de la qualité de vie, de l’estime de soi et des activités est relié à l’intensité du trouble moteur. Il est à noter que cette étude utilise le Bruininks-Oseretsky Test of Motor Proficiency (BOT, seconde édition) pour poser le diagnostic de TDC et répartit les enfants présentant un TDC en 5 groupes en fonction des scores au BOT. Wang et coll. (2009)renvoi vers trouvaient déjà ce lien en fonction de l’importance du score de dégradation au MABC (au 5e ou au 15e percentile) mais uniquement en ce qui concerne les activités de motricité globale. Pour rendre compte de ces apparentes contradictions, on peut citer Zwicker et coll. (2013)renvoi vers qui concluent à l’issue de leur revue de la littérature : « des résultats différents dans les domaines physique, psychologique et social peuvent être reliés à de nombreux facteurs incluant : la présence ou l’absence de comorbidité, les âges considérés, le recrutement des groupes étudiées (clinique ou à partir de la population), les outils utilisés pour évaluer des domaines similaires, comment le TDC est défini et quel score-seuil est utilisé pour caractériser le trouble moteur ».
Outre le consensus sur les restrictions d’activité et la moindre satisfaction des enfants quant à leur qualité de vie, Zwicker et coll. (2013)renvoi vers soulignent le fait que de nombreuses publications font état d’un niveau élevé d’anxiété/dépression, significativement plus important chez les enfants présentant un TDC que chez leurs pairs standards. Les parents relient cela à la frustration, la mésestime de soi et les fréquentes sources d’insatisfaction.
Wuang et coll. (2012)renvoi vers notent un score très significatif d’anxiété chez les parents (via la passation de la BAI : Beck Anxiety Inventory), ce qui n’est pas le cas avec l’échelle de dépression (pas de différence notable avec les parents des contrôles).
Il est à noter que les difficultés des enfants présentant un TDC dans les activités physiques et sociales sont essentiellement reliées aux contextes de la vie scolaire (Raz-Silbiger et coll., 2015renvoi vers). En effet, en ce qui concerne les loisirs de week-ends et des vacances d’été, les jeunes présentant un TDC passent plus de temps que les enfants standards à des loisirs « non physiques » tels que le club de sciences, la chorale, l’orchestre, le théâtre, etc. « Il est possible que les parents des enfants présentant un TDC encouragent ces activités pour protéger leurs enfants du ridicule, de la frustration et de l’embarras » (Jarus et coll., 2011renvoi vers). Ces « niches » de loisirs sont alors associées à un sentiment positif de compétence, d’estime de soi et de bien-être. Cela contribue à améliorer la perception des enfants présentant un TDC par leurs pairs et favorise leur intégration sociale. Engel-Yeger (2015)renvoi vers confirme que ces enfants peuvent faire l’expérience positive de leurs compétences et de leur efficacité quand ils réalisent des activités qui ne requièrent pas d’habiletés motrices, telles que la lecture, le shopping, etc. Smyth et Anderson (2000)renvoi vers remarquent que « s’il y a moins de demande d’activités physiques quand l’âge augmente, les jeunes devraient alors avoir une meilleure intégration sociale ».
Ces observations montrent à quel point c’est le contexte – plus que l’intensité du trouble – qui génère le handicap, ou au contraire permet de lever les obstacles liés à la déficience.

À l’adolescence

Rigoli et coll. (2012)renvoi vers, étudiant une cohorte d’adolescents présentant un TDC (12-16 ans), mettent en évidence un lien entre diagnostic de TDC, anxiété, dépression et mauvaise image de soi. Ils attribuent ce lien à une cascade de difficultés et d’échecs conduisant ces jeunes à internaliser les incapacités secondaires à leur déficience motrice.

À l’âge adulte

Les difficultés persistent dans la vie quotidienne pour 30 à 70 % des personnes présentant un TDC7 (Cousins et Smyth, 2003renvoi vers ; Kirb et coll., 2011yrenvoi vers). À l’âge adulte, celles-ci souffrent essentiellement d’une faible estime de soi et d’une faible participation sociale avec d’autres jeunes adultes (Hill et coll., 2011renvoi vers). Tal Saban et coll. (2014)renvoi vers constatent également que les jeunes adultes se sentent particulièrement désavantagés en ce qui concerne les contacts sociaux, et ce indépendamment de l’intensité de leur trouble moteur.
Pour cette tranche d’âge, la question du permis de conduire est particulièrement importante, puisque son acquisition est considérée comme un « rite de passage » de l’adolescence à l’âge adulte (indépendance par rapport à la famille, regard des pairs et des adultes, entrée dans le monde professionnel). L’importance culturelle du contexte est donc particulièrement importante. Elle n’est abordée que dans une seule publication (Kirby et coll., 2011renvoi vers) qui constate que moins de 60 % des jeunes présentant un TDC ont appris à conduire (contre plus de 84 % de contrôles). Lorsqu’ils le font, ils mettent plus de temps pour passer le code et pour passer la conduite. Ils conservent des difficultés pour estimer les distances (4 fois plus que les contrôles) et pour se garer (6 fois plus que les contrôles). Ces difficultés sont corrélées à l’échec dans les tâches visuomotrices. Il semble que si la maladresse motrice s’améliore un peu avec l’âge, au contraire les troubles visuels évoluent peu. Enfin, ces jeunes sont particulièrement gênés s’il y a une pression temporelle ou s’ils sont en double tâche. Ils se différencient des TDA/H qui, eux, ont beaucoup d’excès de vitesse, d’accidents et de suspension de permis.
Missiuna et coll (2008)renvoi vers ont montré que les jeunes présentant un TDC (recrutés à l’université) peuvent développer des stratégies de résilience. Il peut s’agir :
• de retrait et d’évitement, en particulier en ce qui concerne les activités physiques, les sports, le travail d’usine, d’artisanat ou de main-d’Ĺ“uvre ;
• de la recherche d’activités compatibles avec leurs capacités : musique, ordinateur, théâtre, arts, lecture, visites, jeux de société, regarder des spectacles sportifs, écriture, jeux vidéo, shopping, métiers sans exigences physiques qui leur permettent de se sentir compétent, etc.
• de l’utilisation systématique de l’humour pour détourner l’attention de leur maladresse, tournant leurs échecs en dérision, « si vous riez de la situation les autres rient avec vous, et non de vous ».
Dans l’ensemble, ces jeunes estiment tous (10 adultes de 19 à 25 ans) que la situation s’améliore à l’âge adulte car ils ont moins d’obligations d’activités physiques, la possibilité d’utiliser leur ordinateur lors des cours en fac, plus d’options dans le choix des disciplines et dans le choix des loisirs. Enfin les relations sociales s’améliorent car elles sont moins liées à la popularité d’une équipe sportive et plus liées à leur personnalité.
Ceci a des implications pour la prise en charge qui doit favoriser la participation sociale et mettre à jour les forces de l’individu, pour renforcer sa confiance en lui et améliorer sa qualité de vie.
Néanmoins, Hill et Brown (2013)renvoi vers, qui ont étudié la santé mentale d’adultes antérieurement diagnostiqués TDC à l’aide d’une échelle de dépression8 , révèlent que ces adultes sont significativement (p < 0,001) plus anxieux et dépressifs que les contrôles appariés, y compris sur le critère de la faible activité physique. Les auteurs posent la question de savoir s’il s’agit là d’une comorbidité, d’un symptôme qui serait partie intégrante du TDC ou d’une conséquence de celui-ci. Dans ce dernier cas, ils soulignent que des actions appropriées de prévention devraient être proposées.
À noter enfin que la question des apprentissages professionnels et de l’emploi (choix, participation, qualité de vie au travail) n’est abordée par aucune des publications identifiées.

La participation aux activités de la vie quotidienne comme outil de repérage des TDC

Certains auteurs proposent d’utiliser la participation des enfants aux activités de la vie quotidienne comme outils de repérage d’un éventuel TDC. Par exemple Josman et coll. (2010)renvoi vers proposent une étude préliminaire à partir de trois épreuves (se faire un sandwich, un chocolat au lait et remplir un petit document en graphisme manuel). La performance de l’enfant est côtée de 1 (quasi-nulle) à 5 (excellente). La validité du test est attestée à la fois par la différence significative de performance à un autre test, leDO-EAT (Goffer, Josman, Rosenblum, 2009renvoi vers et Josman et al., 2010renvoi vers), entre le groupe au développement typique et celui qui présente des difficultés dans les gestes de la vie quotidienne (questionnaire aux parents) et par une corrélation également significative avec les 8 mouvements du MABC (items de dextérité manuelle, de balles, d’équilibre statique et dynamique). Les auteurs concluent que, sous réserve de confirmation sur une plus large population, ce test écologique pourrait être utilisé pour un diagnostic précoce, aux alentours de 5-6 ans1/2. Notons qu’il recrute aussi des enfants présentant des troubles des fonctions exécutives (isolées ou associées au TDC).
D’autres auteurs, utilisant une échelle de jeu (Activity of Daily Living in Physical Play, ADL-PP), proposent de recueillir sur trois jours les activités ludiques pratiquées par les enfants : si un enfant ne prend pas part à 50 % ou plus des activités et jeux caractéristiques de son groupe d’âge et de son sexe, il y a alors interférence avec sa participation aux activités de la vie quotidienne et son intégration sociale ; cela justifierait une exploration médicalisée (Kennedy-Behr et coll., 2011renvoi vers). Par ailleurs, d’après Van der Linde et coll. (2013)renvoi vers le DCDDaily-Q 5-8 ans avec ses épreuves écologiques (couper du pain ouvrir et fermer une boîte, se servir à boire, etc.) pour une durée de passation d’environ 30 minutes, auraient une bonne corrélation avec la MABC-2 et seraient un excellent prédicteur de TDC.

Quelles spécificités pour les enfants présentant un TDC ?

La question se pose de savoir en quoi les difficultés constatées – restriction de participation dans les activités de vie quotidienne, la scolarité et les activités sociales et moindre satisfaction sur la qualité de vie –, sont spécifiques aux TDC ? On peut en effet se demander si elles ne seraient pas communes à l’ensemble des personnes en situation de handicap moteur. La littérature grise comporte quelques éléments significatifs à ce sujet.
Une enquête européenne concernant les enfants avec paralysie cérébrale9 (PC ou IMC) s’intéresse à leur qualité de vie. Il est ici justifié de s’intéresser à la qualité de vie des enfants avec PC dans la mesure où le DSM classe le TDC dans les « troubles moteurs », de même que la CIM 10 (troubles du développement moteur). Enfin, en France, ces jeunes, s’ils doivent bénéficier de dispositifs spécialisés (ULIS-école ou ULIS-collège) sont orientés vers les dispositifs destinés aux jeunes handicapés moteurs (PC et autres). Dans cette étude, on note avec intérêt que les parents de jeunes avec PC signalent que, paradoxalement, « les enfants ayant une atteinte moins sévère de la fonction motrice [desquels les jeunes présentant un TDC peuvent être rapprochés] ont une plus basse qualité de vie à l’école et sont pénalisés dans le domaine de l’acceptation sociale ».
Notons aussi, au sein du rapport du Cnesco 2016, l’estimation de leur qualité de vie à l’école estimée par les enfants eux-mêmes (tous handicaps confondus). Sont relevés un concept de soi social plus négatif (que les enfants tout-venant), davantage de difficultés à initier et maintenir des interactions sociales positives et des difficultés à se faire des amis, plus de rejets par leurs pairs, un sentiment d’isolement, etc. Dans cette littérature récente et concernant le contexte français on retrouve les mêmes limitations et effets négatifs que ceux décrits par les jeunes présentant TDC. Les restrictions de participation et la moindre qualité de vie décrites chez les personnes présentant un TDC semblent donc partagées par des jeunes qui ont des difficultés motrices de différente nature. Cela serait cependant à confirmer par d’autres études, et en étendant les études à d’autres handicaps moteurs.

Principales limites de la littérature

La plupart des études ici analysées concernent des pays de culture anglo-saxonne. Or le contexte social et culturel est différent selon les pays. On note au Royaume-Uni, au Canada, en Australie, aux États-Unis et même en Israël, l’importance des activités physiques et de la participation à des équipes sportives dans le contexte scolaire et extrascolaire, ce qui n’est pas le cas (ou beaucoup moins) en France. Cette nuance est importante dans la mesure où la plupart des études mentionnées s’intéressent aux activités physiques, aux comportements avec des observations dans les cours de récréation ou encore au sport, via des questionnaires. A contrario, en France, l’importance de l’écriture cursive est primordiale et ce dès l’âge de six ans (rite de passage de l’écriture « bâton » à l’écriture cursive en grande section de maternelle ou CP, considéré comme le passage au statut de « grand » ; importance constante de la qualité graphique dans le cursus scolaire et dans la perception de l’enfant par l’enseignant), ce qui n’est le cas dans aucun des pays qui sont à l’origine de ces publications.
Par ailleurs, les études portent plus souvent sur des garçons, les données sur les filles manquent. Or, puisque dans ces études, l’isolement social est lié aux problèmes de coordination motrice et aux jeux moteurs, on peut supposer que l’intégration sociale des filles (qui pratiquent plus des jeux de société et des jeux d’imagination) devrait être de meilleure qualité (Smyth et Anderson, 2000renvoi vers).
Le fait que certains questionnaires de qualité de vie s’adressent aux parents est également une limite, puisqu’il s’agit de sonder le vécu de l’enfant. D’ailleurs, une étude proposant le même questionnaire aux enfants, aux parents et à l’enseignant (Dunford et coll., 2005renvoi vers) montre d’importantes divergences d’opinions : par exemple, les enfants et les adultes partagent rarement les mêmes préoccupations en ce qui concerne les activités de vie quotidienne et les loisirs, problèmes souvent sous-estimés par les parents. Wuang et coll. (2012)renvoi vers précisent que si parents et enfants ont des perceptions proches concernant les activités, le fonctionnement « objectif » (c’est-à-dire le HRQOL), il n’en est pas de même en ce qui concerne les items psycho-sociaux, largement sous-estimés par les parents.
En outre, beaucoup d’études excluent de leur cohorte les jeunes porteurs de TDC qui présentent aussi des « besoins éducatifs spéciaux » et/ou « des troubles spécifiques des apprentissages ». D’où, une sous-estimation des problèmes scolaires qui ne sont pas pris en compte dans l’évaluation de l’exclusion sociale et dans la persistance des problèmes à l’âge adulte (via l’échec scolaire et les restrictions de choix professionnels etc.). On regrette donc que dans les études sur la participation et la qualité de vie, le « retard scolaire » semble être traité soit comme une comorbidité à exclure, soit comme une conséquence globale et peu spécifique (en lien avec la moindre estime de soi, l’isolement etc.). De même les troubles neurovisuels (et/ou spatiaux) ne sont signalés et pris en compte que dans la publication dédiée à la conduite automobile. Aucun lien n’est fait avec les apprentissages scolaires dont on sait pourtant qu’ils sollicitent énormément ces fonctions spatiales. Paradoxalement, l’essentiel de la littérature concerne l’évaluation du déficit de participation et de la QVD dans le contexte de la vie scolaire. Cela est bien sûr capital, puisque l’école est le contexte obligé de la vie de l’enfant (de 3-16 ans, voire plus), 6 h par jour et 4 jours 1/2 par semaine.
La rareté des publications sur la participation/la qualité de vie après intervention (rééducation, aménagements, etc.) est également regrettable. Notons celle de Caçola et coll. (2016)renvoi vers qui compare l’impact de deux programmes d’intervention sur la QDV de jeunes présentant un TDC : le protocole A est centré sur diverses tâches motrices ; dans le programme B, l’enfant choisit les habiletés qu’il veut entraîner. Dans les deux cas, à la fin du programme les jeunes étaient capables de réaliser les tâches entraînées, mais les enfants du programme A manifestaient peu de satisfaction et faisaient preuve d’un plus haut niveau d’anxiété, contrairement à ceux du programme B. Cela indique que l’évaluation des interventions auprès de ces jeunes ne devrait pas seulement prendre en compte la (ou les) performance(s) atteinte(s), mais également leur impact sur la QDV des jeunes.
Enfin, rappelons que la période adulte n’est pas abordée dans ce corpus de publications en termes de vie familiale et d’emploi, probablement car dans un premier temps l’essentiel des recherches s’est centré sur le repérage précoce, le diagnostic, les interventions thérapeutiques chez les petits, puis chez les enfants d’âge scolaire (figure 5.3Renvoi vers). Cependant, ces enfants diagnostiqués TDC ont grandi, et des études longitudinales seraient très utiles pour comprendre l’évolution de ces jeunes, repérer les éléments déterminants dans leur parcours, orienter les actions thérapeutiques, connaître leur devenir à long terme.

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