Trouble développemental de la coordination ou dyspraxie

2019


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Recommandations

Recommandation générale
Le groupe d’experts recommande d’utiliser de manière privilégiée le terme trouble développemental de la coordination (TDC) dans la recherche et en clinique en lien avec les critères du DSM mais en le considérant comme synonyme de dyspraxie

Il existe une certaine variabilité terminologique pour désigner les troubles de la motricité intentionnelle. Ces variations proviennent à la fois des usages présents dans les différentes professions et disciplines qui s’y intéressent, de leur appropriation par la société et de particularités régionales mais également de l’évolution des connaissances et des idées. Dès 1994, dans un souci d’harmonisation et de lisibilité internationale, les experts internationaux de la conférence de consensus de Londres choisissent :
• le terme de Developmental Coordination Disorder alors traduit par trouble de l’acquisition de la coordination (TAC) puis trouble développemental de la coordination (TDC) à partir de 2015 ;
• les critères associés du Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, alors à sa quatrième édition (DSM-IV).
Reconnaissant la nécessité d’une utilisation consensuelle des termes et de l’inscription dans un cadre international, le groupe d’experts recommande d’utiliser le terme TDC dans la recherche et en clinique en lien avec les critères du dernier DSM en vigueur1 . En matière de recherche, cela facilite l’identification des travaux et leur mise en regard les uns avec les autres et permet ainsi de faire progresser les connaissances sur le sujet. Cette utilisation commune favorise également le dialogue entre les acteurs de la recherche académique et les cliniciens.
Néanmoins, les usages sociaux n’ont pas évolué de la même manière que les cadres théoriques et l’appropriation du terme TDC au sein de la société française reste modeste. En effet, le terme dyspraxie est encore souvent privilégié par les personnes concernées (personnes diagnostiquées et leurs familles, associations de familles, mais aussi professionnels impliqués dans les secteurs sanitaire, médico-social, scolaire, etc.). Les usages sociaux rapprochent également ce terme des autres troubles « dys », tels que la dyslexie, la dysorthographie, la dyscalculie ou la dysgraphie, comme l’attestent les regroupements d’associations dans le domaine ou divers rapports sur le sujet.
Le terme dyspraxie, qui renvoie en fait à l’expression plus précise de dyspraxie de développement, désigne un trouble des praxies d’origine développementale. Alors que la littérature reste très hétérogène quant aux similitudes, différences et articulations entre dyspraxie développementale et TDC, et afin que la société s’approprie progressivement le terme de TDC, le groupe d’experts recommande de considérer TDC et dyspraxie comme des équivalents, recouvrant une grande hétérogénéité de profils.

Recommandations d’actions

Le groupe d’experts recommande d’améliorer le diagnostic en permettant une évaluation pluridimensionnelle et individualisée répondant aux critères du DSM à l’aide d’outils standardisés et normés

Le terme TDC recouvre une grande hétérogénéité de tableaux cliniques sans qu’il existe pour l’instant de consensus sur l’identification de sous-types. De fait, le diagnostic de TDC est complexe et requiert d’être individualisé et approfondi.

Réaliser un 1er bilan diagnostique répondant aux critères du DSM

Dans la continuité du consensus de 1994, le groupe d’experts recommande, en cas de suspicion de TDC, de réaliser un 1er bilan diagnostique qui permette de répondre à tous les critères du DSM. Cela implique donc d’intégrer dans la démarche au moins une évaluation standardisée de la coordination, un diagnostic différentiel, la prise en compte de la plainte ainsi que des retentissements sur le quotidien et à l’école qui mettent la personne en situation de handicap. Ce 1er bilan est particulièrement important car il va orienter la suite, et notamment le besoin ou non de bilans complémentaires, mais aussi la prise en charge, ainsi que contribuer à l’attribution éventuelle de droits.
De manière générale, le groupe d’experts recommande de considérer la personne et sa famille au cœur du diagnostic tout au long de la démarche. Le groupe insiste sur l’importance d’évaluer les difficultés rencontrées par la personne et sa famille, les aspects de participation mais aussi de qualité de vie et pas seulement les déficits fonctionnels. Il souligne qu’il importe également de dissocier la plainte de l’enfant des difficultés rapportées par les acteurs de l’environnement (parents, enseignants, etc.). Les plaintes et la perception que l’individu a de son trouble peuvent d’ailleurs influencer la prise en charge en jouant par exemple sur la motivation et l’implication dans une intervention.
Lors de ce 1er bilan, le groupe d’experts recommande plus spécifiquement de :
• rechercher systématiquement, grâce à un examen spécifique, un trouble neurologique de la commande motrice (spasticité même discrète comme dans le cas par exemple de la paralysie cérébrale) et un trouble sensoriel, qui doivent être différenciés du TDC ;
• caractériser finement d’éventuels troubles visuels, proprioceptifs, vestibulaires et cognitifs qui ont un impact sur la motricité ;
• caractériser finement les troubles de l’écriture manuscrite, dans la mesure où leurs répercussions sur la scolarité peuvent être considérables et qu’une évaluation objective est indispensable à la mise en place d’une remédiation efficace.
Lors de ce 1er bilan, le groupe d’experts recommande également de prendre en compte :
• les éventuels troubles associés en portant une attention particulière aux troubles neuro-développementaux fréquemment associés – trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H), troubles du langage et des apprentissages (trouble de la lecture, trouble de l’écriture, trouble du calcul, etc.) – et de pouvoir en repérer les signes ;
• les répercussions psychologiques, en portant une attention particulière aux premiers signes de répercussions sociales et psychologiques afin d’être en mesure de les prévenir ou les prendre en charge le cas échéant.

Intégrer la démarche diagnostique dans un parcours gradué

Le TDC recouvre des situations plus ou moins complexes (sévérité du trouble, troubles associés, etc.) qui requièrent une démarche diagnostique adaptée. De fait, le groupe d’experts recommande d’intégrer la démarche diagnostique dans un parcours gradué en fonction du retentissement du trouble et de la complexité des situations. Compte-tenu de la structuration en 3 niveaux telle que recommandée par la Haute Autorité de santé (2017)2 , le groupe d’experts recommande tout d’abord de garder un suivi et une vigilance pour les enfants qui restent au niveau 1. Ainsi, ces enfants pourront si besoin, être orientés vers les niveaux 2 ou 3 en fonction de l’évolution du trouble et de ses retentissements. Pour les enfants qui sont suivis en niveau 1, avec le 1er bilan diagnostique tel que décrit ci-dessus et la mise en place de l’intervention nécessaire (remédiation, compensation, aménagement de l’environnement familial et scolaire, etc.), le groupe d’experts recommande un nouveau bilan un an à 18 mois plus tard par le psychomotricien ou l’ergothérapeute (avec notamment une attention particulière aux signes neuromoteurs) ainsi qu’une nouvelle évaluation quelques années plus tard. Pour les enfants qui ont été repérés ou pour lesquels il y a eu une plainte relative à des difficultés de coordination sans pour autant que le diagnostic de TDC n’ait été posé (score à un test de motricité juste en-dessous du seuil par exemple), le groupe d’experts recommande aussi de mettre en place un suivi particulier avec des bilans de motricité complémentaires plus spécifiques que ceux adressés à tous ainsi qu’avec des évaluations régulières des répercussions dans la vie quotidienne, à l’école et au domicile. Il s’agit là d’être en mesure de déclencher une nouvelle démarche diagnostique si nécessaire, étant donné que plusieurs enfants présentant un TDC sont capables de compenser pendant plusieurs années leur trouble mais que celui-ci peut devenir un handicap dans certains contextes, par exemple lorsque les exigences scolaires vont s’accentuer.
Le groupe d’experts recommande par ailleurs de compléter l’évaluation motrice approfondie, en fonction des plaintes et de la complexité des profils, par des évaluations des fonctions cognitives (fonctions perceptives, attentionnelles, exécutives, mnésiques, langagières, etc.) avec une attention particulière aux troubles associés fréquents.
Enfin, le groupe d’experts souligne que la prescription systématique d’examens de neuro-imagerie ne se justifie pas pour poser un diagnostic (absence de marqueur spécifique et systématique) mais qu’un examen de neuro-imagerie peut être indiqué dans des cas complexes en fonction des signes cliniques (par exemple pour étayer un diagnostic différentiel ou rechercher des comorbidités à partir du moment où il y a des signes cliniques qui orientent sur d’autres troubles).

Encourager l’utilisation de tests standardisés et normés

Les tests d’évaluation apportent des informations très utiles pour poser un diagnostic et orienter la prise en charge mais aussi faciliter le dialogue entre des professionnels de santé.
Afin de recueillir des mesures fiables, de faciliter l’interprétation des différentes évaluations, et de favoriser ensuite le suivi, le groupe d’experts recommande d’utiliser un outil validé et standardisé pour la population concernée pour évaluer la motricité. En l’absence de gold-standard et dans la mesure où la littérature présente des avantages et des inconvénients pour chaque test analysé (dans les domaines moteur ou neuromoteur)3 , le groupe d’experts ne se prononce pas sur un outil en particulier mais encourage les professionnels à diversifier les tests en cas de doute. Si le test MABC est utilisé, le groupe d’experts recommande de retenir un seuil au 16e percentile, et non au 5e percentile comme c’est encore parfois le cas alors qu’entre 5 et 16, les conséquences sur la vie quotidienne et à l’école peuvent être importantes.
Le groupe d’experts recommande également de compléter l’évaluation du domaine de la motricité par d’autres tests standardisés et normés en fonction des plaintes et de la complexité des profils.
Concernant les retentissements sur les activités et la participation, dans l’attente d’un questionnaire validé, le groupe d’experts recommande que l’exploration du 2e critère du DSM soit réalisée par un professionnel de santé au moment de l’anamnèse en interrogeant l’enfant sur ses activités et sa participation.

Veiller à ce que toute démarche diagnostique soit menée
par des professionnels formés

Le diagnostic de TDC est nécessairement pluridisciplinaire, quelle que soit la complexité des situations.
Le groupe d’experts recommande de veiller à ce que toute démarche diagnostique du TDC soit menée par des professionnels formés à ce trouble qui apportent leur contribution spécifique.
A minima, le groupe d’experts souligne qu’un diagnostic de TDC doit impliquer la contribution d’un spécialiste de la motricité (psychomotricien ou ergothérapeute) ainsi qu’un professionnel de santé, médecin, formé aux troubles du développement, en charge des prescriptions d’évaluations à visée diagnostique et de la coordination du parcours diagnostique. Il peut s’agir d’un médecin généraliste ou d’un médecin spécialiste (pédiatre, neuropédiatre, médecin physique et de réadaptation, médecin scolaire, psychiatre, neuropsychiatre, pédopsychiatre, ou tout autre spécialité médicale) dans la mesure où celui-ci a des connaissances suffisantes sur le TDC. Afin de gagner du temps dans les parcours diagnostiques, il est possible de faire appel à un professionnel de santé formé pour orienter et coordonner les évaluations à visée diagnostique.
Pour les profils plus complexes, le groupe d’experts recommande l’implication d’une équipe pluridisciplinaire intégrant les professionnels mentionnés ci-dessus mais également des spécialistes de santé compétents sur les troubles des apprentissages (dont le TDC) pour réaliser une évaluation des fonctions cognitives plus approfondie. La prise en charge des situations plus complexes doit être coordonnée par un spécialiste de niveau 2 ou 3 (HAS, 2017).

Garantir à tous l’accès à un parcours diagnostic adapté

La méconnaissance du TDC et les difficultés d’accès à des évaluations cliniques creusent les inégalités et retardent le diagnostic et la prise en charge, pouvant entraîner le développement de troubles secondaires et l’aggravation des difficultés scolaires. En particulier, les inégalités en termes de ressources financières conditionnent l’accès au diagnostic.
Le groupe d’experts recommande de faciliter l’accès, pour tous (si plainte ou repérage) et sur tous les territoires, aux professionnels compétents pour établir un diagnostic en fonction de la plainte et de la complexité des situations, et ceci dans les meilleurs délais. Il s’agit d’une part de faciliter l’accès en termes financiers car, actuellement en France, les coûts des bilans et consultations nécessaires sont élevés pour les familles dans la mesure où les principaux professionnels formés sur le TDC (ergothérapeutes, psychomotriciens, neuropsychologues) sont non conventionnés et ne sont donc pas remboursés par la sécurité sociale. Cela entraîne parfois d’importants retards diagnostiques et de prise en charge voire même une orientation vers d’autres professionnels tels que les orthophonistes, non spécialisés dans le domaine de la motricité, ce qui peut avoir pour conséquence une perte de chance pour les enfants présentant un TDC. Il s’agit d’autre part de faciliter l’accès en termes sociaux par un accompagnement des familles (savoir quels professionnels aller voir, quelles sont les ressources sur le territoire, quelles sont les démarches à entamer, les droits, etc.) visant à réduire les inégalités sociales entre les familles aisées et les autres mais aussi les inégalités entre les familles qui connaissent les structures, qui ont des réseaux, qui ont une position active par rapport aux institutions, etc., et les autres.
Afin de mieux couvrir l’ensemble du territoire, il importe aussi de faciliter l’accès géographique aux professionnels concernés et de réduire le temps d’attente pour le diagnostic. En effet, actuellement, certains centres de référence (structures de niveau 3 qui, de plus, ne sont pas tous spécialisés dans l’évaluation du TDC) sont saturés par les demandes auxquelles ils ne peuvent répondre dans un délai raisonnable. Le groupe d’experts recommande donc d’encourager le développement de structures ou d’équipes pluridisciplinaires à visée diagnostique du TDC. Pour les situations très complexes, le groupe d’experts recommande de s’assurer que les centres de référence soient composés d’une équipe pluridisciplinaire intégrant des spécialistes de la motricité (afin de pouvoir diagnostiquer le TDC avec des tests normés).
Enfin, le groupe d’experts recommande de permettre aux professionnels concernés de réaliser des consultations longues pour les évaluations à visée diagnostique (en fonction de chaque situation, plus ou moins complexe) et notamment de les reconnaître sur un plan de compensation financière. Il s’agit ainsi de permettre à ces professionnels de prendre le temps nécessaire pour établir un tableau de sémiologie clinique précis, prendre en compte les aspects de participation, qualité de vie et la perception du trouble mais aussi pour expliquer et accompagner la personne porteuse de TDC et ses proches.

Le groupe d’experts recommande de promouvoir et soutenir les interventions visant la participation et la réalisation d’activités socialement significatives en tenant compte
de la qualité de vie

Concevoir une politique de soutien aux interventions visant
la réalisation d’activités significatives et la participation en tenant compte du profil de l’enfant et de sa qualité de vie ainsi que de celle
de sa famille

Une fois le diagnostic posé, l’enjeu est de mettre en place les interventions adaptées, sachant qu’il n’existe pas d’intervention type dont l’efficacité serait unanimement reconnue.
La littérature scientifique retrouve toutefois une efficacité quel que soit le type d’intervention proposé en comparaison avec une absence d’intervention. Plus précisément, les études offrent un niveau de preuve modéré au niveau de la motricité sur l’efficacité des interventions en groupe portant sur les fonctions motrices. Les enfants avec un profil complexe et sévèrement atteints bénéficient dans une moindre mesure des interventions en groupe. L’efficacité d’interventions individuelles portant sur les fonctions en comparaison avec d’autres interventions n’est pas objectivée par la littérature. En revanche, les interventions visant les activités et la participation et correspondant aux besoins de l’enfant dans son contexte de vie apparaissent prometteuses car elles contribuent à une meilleure qualité de vie de l’enfant et de ses parents. En particulier, l’approche Cognitive Orientation to Occupational Performance (CO-OP) pour les enfants présentant de bonnes compétences verbales offre un niveau de preuve modéré, et ce, uniquement pour la perception subjective des changements mais pas pour la motricité.
Le groupe d’experts recommande de promouvoir des interventions en groupe pour les enfants présentant un TDC modéré ou léger et des interventions individuelles (ou combinant des interventions individuelles et en groupe) pour les autres.
Le groupe d’experts recommande de promouvoir des interventions centrées directement sur l’apprentissage des activités qui sont nécessaires à la scolarité ou à la vie quotidienne et qui ont du sens pour la personne (« activités significatives »). Cela favorise l’implication du sujet dans le processus de l’intervention et favorise une amélioration de la participation et de la qualité de vie, qui reste un des objectifs principaux des interventions. Pour une meilleure efficacité, celles-ci doivent être mises en place en fonction d’objectifs précis, mesurables, atteignables et hiérarchisés avec l’enfant, sa famille ainsi qu’avec le milieu scolaire.
Concernant la fréquence et la durée des interventions, la littérature indique qu’une intervention hebdomadaire est plus efficace qu’une intervention plus espacée et qu’une durée de 12 à 16 séances montre une efficacité plus importante que celle d’une intervention de 4 à 8 séances. À ce sujet, le groupe d’experts recommande de fixer la fréquence et la durée de l’intervention en fonction des objectifs prédéfinis, des besoins de la personne mais aussi des impacts sur la qualité de vie en prenant en compte l’équilibre entre les coûts liés à l’investissement en temps et en énergie et les bénéfices directs sur la qualité de vie.
La littérature atteste de l’importance de la participation de tiers (souvent les parents) à l’intervention car ils peuvent jouer le rôle de relais pour les actions ou stratégies travaillées durant des interventions. Le groupe d’experts recommande donc d’impliquer l’enseignant et la famille dans l’intervention afin de favoriser l’atteinte des objectifs et l’inclusion de l’enfant dans les différents lieux de vie. Cette implication peut se faire en amont de l’intervention pour faciliter sa mise en place, puis durant l’intervention pour un accompagnement dans les lieux de vie de l’enfant (en classe, à la maison, etc.).
À propos de la remédiation de l’écriture manuscrite si la littérature n’apporte pas un niveau de preuve élevé pour les différentes méthodes, plusieurs facteurs de réussite se sont dégagés de l’analyse. S’appuyant sur ces facteurs, le groupe d’experts recommande de :
• concevoir la remédiation en prenant en compte les facteurs endogènes (nature du déficit moteur, intégration visuo-motrice, etc.) et exogènes (manque de pratique, style d’écriture, etc.) des difficultés d’écriture ;
• réaliser des séances courtes et régulières, intégrant de l’écriture, avec des objectifs fixés avec l’enfant et son entourage de manière à ce que les activités réalisées en thérapie puissent être reprises à la maison et à l’école ;
• prendre en compte les articulations entre la remédiation de l’écriture manuscrite et la mise en place d’aménagements nécessaires dans le cadre scolaire, en matière de qualité de vie, afin de ne pas surcharger l’enfant.

Articuler plusieurs types d’interventions en s’inspirant de modèles
de santé publique développés dans d’autres pays et qui intègrent
les facteurs environnementaux

Concernant le domaine de la coordination motrice, plusieurs modèles d’interventions indirectes, ont été développés récemment dans d’autres pays. Ces modèles sont composés d’interventions pouvant être adressées aux parents, aux enseignants ou autres professionnels et prennent en compte des facteurs environnementaux comme les pairs, les professionnels dispensant des offres de loisirs, les politiques et la communauté de manière plus générale. Conçus et/ou implémentés plus récemment, ils n’ont pas encore bénéficié d’études mesurant leur efficacité mais semblent présenter une modélisation intéressante de l’articulation entre plusieurs niveaux d’interventions.
Le groupe d’experts recommande de coordonner plusieurs types d’interventions : des actions pour tous avec les interventions en groupe et individuelles pour les personnes présentant un TDC. Concernant les actions pour tous, il s’agit de renforcer, dans les écoles, la promotion de l’activité physique pour tous afin de soutenir le développement des habiletés fondamentales chez les jeunes enfants et de favoriser le plaisir de bouger. Un éventail d’activités physiques adaptées et structurées peut aussi être proposé aux plus grands. Il s’agit également de renforcer l’éducation des parents de très jeunes enfants afin qu’ils comprennent les besoins et la nécessité des activités faisant intervenir la motricité qu’elle soit fine ou globale. Enfin, il s’agit de prendre en compte les différents professionnels dispensant des loisirs en soutenant le travail en réseau interprofessionnel incluant l’enfant et sa famille comme partenaires actifs.

Suivre régulièrement l’évolution de la symptomatologie et du handicap pour faire évoluer la prise en charge

Des évaluations rigoureuses des interventions dispensées par les professionnels médicaux ou paramédicaux manquent pour suivre au mieux les interventions et leurs effets ainsi que pour orienter la suite des prises en charge.
Le groupe d’experts recommande d’évaluer régulièrement les interventions dispensées afin de les questionner et notamment de les interrompre soit lorsque les objectifs de progression ont été atteints en termes d’activité et de participation, soit en absence de progression après un certain nombre de séances. Dans ce dernier cas, il importe de reconsidérer les moyens d’intervention (par ex. s’orienter vers des moyens de compensation) et la participation de l’enfant et de sa famille en refaisant un point avec le médecin ou spécialiste qui coordonne le parcours de soins.
Le groupe d’experts recommande de mener ces évaluations à la fois sur les fonctions déficitaires mais aussi sur les activités et la participation ainsi que de porter une attention particulière aux répercussions du TDC sur la santé mentale qui peuvent survenir bien après le diagnostic.

Faciliter l’accès à une prise en charge adaptée pour tous

Malgré les dispositions mises en place depuis la loi de 2005 pour les personnes handicapées au travers notamment des Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH), l’accès aux soins et aux compensations n’est pas aisé pour toutes les familles. D’autant que le diagnostic résulte en lui-même d’un parcours qui peut être plus ou moins long.
Le groupe d’experts recommande de faciliter l’accès – en termes économiques, géographiques et d’information – à toutes les personnes et familles concernées, et sur tout le territoire, à des interventions et adaptations nécessaires (dont les compensations).
Par ailleurs, les professionnels médicaux et paramédicaux concernés, en particulier ceux qui exercent en libéral et qui ne sont pas remboursés par la sécurité sociale, n’ont souvent pas les moyens ni le temps d’échanger suffisamment avec les autres professionnels impliqués (ceux de l’école notamment) ou de réaliser des bilans d’évaluation intermédiaires ou finaux.
Le groupe d’experts recommande de donner les moyens – en termes économiques, de temps, de formation, d’outils – aux professionnels concernés pour mettre en place les interventions et adaptations nécessaires, dans une logique pluridisciplinaire (en lien avec l’école notamment) ainsi que de procéder au suivi de la symptomatologie et du handicap (bilans de suivi, nouvelles évaluations, etc.).

Le groupe d’experts recommande de veiller à l’application
de la loi de 2005 sur les personnes handicapées
pour les personnes présentant un TDC,
notamment dans le cadre scolaire

Depuis la loi du 11 février 2005, qui propose la première définition précise du handicap dans un texte juridique de référence, les personnes présentant un TDC – principalement des enfants d’âge scolaire – entrent dans le champ du handicap. Cette loi s’appuie sur un principe d’accessibilité, relevant du droit commun, et un principe de compensation, relevant d’un régime d’exception. Cette loi concerne la scolarité mais aussi l’ensemble de la vie sociale. Si cette loi a permis de nombreuses avancées pour les personnes en situation de handicap, plus de 10 ans après sa promulgation son application reste encore difficile.
Le groupe d’experts recommande de veiller à l’application de la loi de 2005 pour les personnes handicapées et des textes sur le handicap pour les personnes présentant un TDC.

Envisager la question scolaire, au-delà de la remédiation,
de manière à permettre à chaque enfant de mener son projet scolaire
tel qu’inscrit dans la loi de 2005

Les quelques travaux portant sur l’école et les enfants présentant un TDC montrent que l’école inclusive est encore loin d’être une réalité pour beaucoup de ces enfants et que la mise en pratique de ce concept pose de nombreuses difficultés. Notamment, car l’école n’a pas été réformée structurellement pour devenir accessible mais s’est surtout vue adjoindre des moyens pour mettre en œuvre des aides de nature compensatoire. Il en résulte que la qualité de vie des enfants présentant un TDC est particulièrement affectée en milieu scolaire.
Le groupe d’experts recommande de penser le handicap en amont de toutes politiques scolaires pour aller vers une école véritablement inclusive qui permette l’accessibilité à l’enseignement (accessibilité au sens fort du terme, c’est-à-dire accès au savoir) et aux examens tel qu’inscrit dans la loi de 2005. Cela pourrait passer par une intégration plus marquée de la question du handicap dans les formations des enseignants et dans les processus de recrutement, par une réflexion en amont sur la pédagogie, sur les évaluations, sur la mise en œuvre des aides adéquates, sur l’accessibilité des manuels scolaires et autres supports pédagogiques, etc. Autant de pistes pour lesquelles la recherche pourrait aussi apporter des réponses.
À plus court terme, le groupe d’experts recommande de faciliter la mise en place des aménagements nécessaires dans le cadre scolaire (moyens de compensation et adaptations) pour permettre les apprentissages pendant les enseignements et au moment des examens académiques et des concours depuis la maternelle jusqu’à l’enseignement supérieur, en passant par les formations professionnelles, les grandes écoles, etc. Cela implique notamment de penser et prévoir les aménagements pendant les enseignements et les examens en continuité malgré des voies de décision actuellement différentes. Pour la mise en place des aménagements, il importe de prendre en compte les difficultés motrices dont celles d’écriture manuscrite (évaluer le caractère fonctionnel de cette écriture en situation de classe) et de graphisme, les difficultés cognitives associées en lien avec les aspects scolaires (troubles de la perception visuo-spatiale et de l’attention entre autres) mais aussi la lenteur et fatigabilité. Concernant ces derniers points, le groupe d’experts rappelle par exemple que pour certains enfants le temps plein est compliqué et peut appeler à un aménagement de l’emploi du temps scolaire en lien avec son projet de vie.
Face au constat d’un manque de coordination entre les acteurs concernés par la mise en place des aménagements, le groupe d’experts recommande de favoriser le dialogue entre professionnels des différents secteurs (professionnels de santé, maisons départementales des personnes handicapées – MDPH, Éducation nationale) et les familles pour bien articuler les différentes interventions avec les aménagements en fonction des profils tout en prenant en compte la qualité de vie de l’enfant. Une personne référente semble indispensable pour faire le lien entre les différents acteurs (dont la famille), s’assurer de la bonne collaboration entre les professionnels et garantir la cohérence entre la mise en place des aménagements et les interventions thérapeutiques. Pour les enfants qui relèvent d’un droit d’exception et pour lesquels un projet personnalisé de scolarisation (PPS) a été mis en place, l’enseignant référent est le plus à même de remplir ce rôle. Le groupe d’experts recommande donc de donner à l’enseignant référent les moyens et le temps nécessaire pour réaliser cette mission de coordination, au-delà du seul lien entre la famille et l’école. Pour ces enfants, le groupe d’experts recommande également de promouvoir les équipes de suivi de la scolarité comme des lieux d’échanges entre tous les acteurs impliqués et de s’assurer que ces acteurs puissent y assister. Il peut notamment s’agir de réfléchir à une valorisation du temps passé par chacun dans ces réunions. Pour les enfants qui relèvent du droit commun et pour lesquels un dispositif d’aménagement pédagogique (plan d’accompagnement personnalisé – PAP) a été mis en place, il importe également qu’une personne soit identifiée pour faire le lien entre les différents acteurs concernés et soit en mesure de mener concrètement à bien cette mission. Il importe enfin que les acteurs impliqués puissent saisir clairement la distinction et les enjeux des deux dispositifs (PAP ou PPS) pour les enfants, en fonction des situations. Par exemple, un PAP peut être adopté par choix de l’enfant et de sa famille ou alors dans l’attente d’un PPS.

Soutenir la mise en place des aménagements nécessaires
par les enseignants et l’institution scolaire

Une majorité d’enseignants ne se considère pas assez compétente pour mettre en place l’école inclusive et se sent souvent démunie face aux situations pratiques qu’ils rencontrent avec des enfants en situation de handicap.
Outre la formation, le groupe d’experts recommande de mettre en place des dispositifs de soutien aux professionnels de l’école et l’allocation des moyens nécessaires pour faciliter la mise en place des aménagements. Il peut par exemple s’agir de personnes ressources, de l’identification de ressources pédagogiques, du développement et de propositions d’outils concrets pour accompagner les préconisations (par ex. manuels scolaires utilisables par les élèves présentant un TDC, création de banques d’exercices utilisables à la fois par les élèves présentant un TDC et par le reste de la classe, outils numériques accessibles pour tous les enfants en termes visuels mais aussi d’utilisabilité, etc.).

Développer les pratiques physiques et sportives inclusives dans le cadre scolaire mais aussi dans les loisirs

Les activités physiques, dans le cadre scolaire et dans les loisirs, sont l’autre domaine dans lequel la participation et la qualité de vie des personnes présentant un TDC apparaissent particulièrement affectées. Dans des sociétés qui valorisent le sport performant et compétitif, les enfants présentant un TDC sont souvent exclus des activités physiques, et ce même en cours de récréation, ce qui a des impacts négatifs sur leur estime de soi et leur confiance en eux, contribue à les isoler et peut même participer au développement de troubles psychologiques secondaires. Par ailleurs, la littérature souligne les risques liés à l’inactivité physique (obésité, maladies cardio-vasculaires, etc.) pour les enfants présentant un TDC.
Or, l’accès aux loisirs est un des éléments de l’insertion citoyenne et sociale qui fait l’objet d’une partie spécifique de la loi de 2005 sur les personnes handicapées. Celle-ci mentionne notamment l’obligation d’une mise en accessibilité de l’ensemble des établissements recevant du public dont les lieux de loisirs.
Le groupe d’experts recommande de promouvoir les pratiques physiques et sportives inclusives dans le cadre scolaire ainsi que dans les loisirs. En effet, les pratiques physiques et sportives inclusives (activités physiques adaptées, activités physiques à finalité ludique, sports collaboratifs) peuvent favoriser la réalisation d’activités physiques et la participation des enfants présentant un TDC avec des impacts positifs sur l’épanouissement, l’estime de soi mais aussi la diminution des facteurs de risques d’obésité et de maladies cardio-vasculaires liées à l’inactivité. Il s’agit ainsi de promouvoir un modèle qui se centre sur le plaisir pris à la pratique (et non sur la performance et la compétitivité), modèle qui apparaît notamment comme un vecteur de l’engagement durable dans une activité. Cela implique à la fois des formations et une réflexion sur les conditions de mise en œuvre de ces pratiques inclusives avec les différents acteurs impliqués (Éducation nationale, éducation populaire, jeunesse, sport, cohésion sociale, recherche, etc.) à laquelle la recherche pourrait contribuer.

Permettre à toutes les MDPH d’accorder toute son importance
à l’évaluation des situations de handicap en complément de l’évaluation médicale et administrative

Créées à la suite de la loi de 2005 sur les personnes handicapées, les MDPH ont notamment pour mission de décider des attributions de droits et prestations relatifs au handicap et à sa compensation par l’analyse des demandes et dossiers transmis par les familles. Elles constituent donc un interlocuteur important pour les personnes présentant un TDC et leurs familles et un chaînon clé dans les parcours de santé de ces personnes.
La littérature montre pourtant que les MDPH ont souvent à traiter un nombre considérable de dossiers au regard des moyens dont elles disposent. De plus, les logiques qui président à l’évaluation du handicap semblent accorder plus de poids aux dimensions médicales et administratives qu’à la dimension sociale, alors que cette dernière est prépondérante dans la définition du handicap. Il peut en résulter un déséquilibre dans les critères pris en compte pour statuer sur l’attribution des droits et prestations. Par ailleurs, une certaine hétérogénéité entre territoires est constatée dans le fonctionnement des MDPH, qui sont placées sous la tutelle des départements.
Le groupe d’experts souligne la nécessité pour les équipes pluridisciplinaires de toutes les MDPH d’accorder toute son importance à l’évaluation des situations de handicap rencontrées par les personnes en complément de l’évaluation médicale et administrative. Cela peut notamment passer par l’allocation de moyens humains, par de la formation des membres des équipes pluridisciplinaires pour qu’ils soient en mesure d’évaluer les situations de handicap générées par le TDC en croisant plusieurs types d’informations, ou encore par l’intégration systématique d’éléments permettant d’évaluer le handicap du point de vue social dans les certificats communiqués aux MDPH comme par exemple grâce aux guides d’évaluation des besoins de compensation des personnes handicapées (GEVA et GEVA-Sco).

Le groupe d’experts recommande de sensibiliser et former les acteurs pour faciliter le repérage et le diagnostic
avec des tests standardisés et normés mais aussi favoriser l’inclusion des personnes présentant un TDC

La méconnaissance du TDC par certains professionnels (enseignants, médecins généralistes, psychologues, etc.), mais aussi plus largement au sein de la société, participe à retarder les diagnostics et donc les prises en charge des personnes présentant un TDC ainsi qu’à générer des situations d’exclusion.

Accroître la vigilance des professionnels et des parents
pour favoriser le repérage

Il existe un véritable enjeu autour du repérage pour les enfants qui sont gênés à l’école ou dans la vie quotidienne par des difficultés de coordination. En effet, pour ces enfants l’importance du repérage réside dans la possibilité offerte de déclencher plus rapidement une démarche diagnostique et de mettre en place un suivi et un accompagnement. Il permet également de réduire les pertes de chance pour les enfants présentant un TDC et de limiter le développement de troubles secondaires par une prise en charge plus rapide.
Le groupe d’experts recommande de sensibiliser les professionnels de santé (notamment de 1er recours), les enseignants, les professionnels des loisirs et les parents au TDC pour faciliter le repérage. Cette sensibilisation peut notamment passer par la conception de campagnes d’information sur le TDC, grand public ou ciblées vers certains professionnels.
Il s’agit notamment de promouvoir une vigilance vis-à-vis de la motricité de la part des professionnels scolaires et de santé de 1er recours, en particulier aux alentours de 5-6 ans lors du passage maternelle-primaire. À ce sujet, le groupe d’experts recommande d’encourager les enseignants de maternelle et du primaire à proposer des activités motrices chez les enfants, ce qui, en plus de stimuler la motricité, permet de pouvoir repérer ceux qui ont des difficultés. Une fois qu’il a identifié un enfant présentant des difficultés motrices, l’enseignant doit pouvoir l’orienter vers les professionnels compétents. Le groupe d’experts recommande également d’encourager les professionnels de santé de 1er recours à remplir minutieusement le carnet de santé, en particulier pour les examens demandés les 6 premières années concernant la motricité fine et globale.
La sensibilisation des orthophonistes apparaît particulièrement importante dans la mesure où ces professionnels reçoivent de nombreux enfants présentant un TDC. L’orthophoniste doit donc être vigilant sur les aspects moteurs (poser les questions permettant de repérer des troubles dans ce domaine) et pouvoir orienter les individus dépistés vers des professionnels de santé spécialistes du domaine moteur (psychomotricien, ergothérapeute).

Former les professionnels de 1er recours pour faciliter le diagnostic
et la prise en charge

Pour les professionnels de 1er recours, qui suivent régulièrement les enfants mais qui sont aussi consultés si des difficultés sont identifiées, il existe un enjeu de formation qui dépasse la seule sensibilisation.
Le groupe d’experts recommande de former les professionnels de santé de 1er recours (médecins, pédiatres, psychologues, etc.) sur le développement moteur. Cela permettra tout d’abord de faciliter le repérage et le dépistage. Il s’agit notamment de leur donner des repères développementaux précis, de les former à des tests standardisés et normés en France, de les alerter sur la fréquence importante du TDC chez les prématurés, etc. Cette formation doit aussi permettre à ces professionnels (en se plaçant au niveau 1 du parcours de santé gradué) de solliciter et interpréter les évaluations nécessaires au diagnostic de TDC ainsi que de coordonner et suivre les parcours de santé pour ceux qui sont médecins.
Au regard de la diversité d’outils utilisés pour les évaluations de la motricité, le groupe d’experts recommande de former les professionnels impliqués dans le diagnostic et la prise en charge (médecins, pédiatres, neuropsychologues, psychomotriciens, ergothérapeutes, enseignants en activités physiques adaptées, etc.) à utiliser des tests standardisés et normés sur des populations françaises. Il importe d’inclure ce type de module dans les formations initiales et continues pour favoriser notamment la mise à jour des connaissances dans un domaine encore en pleine évolution.
Plus généralement, le groupe d’experts recommande d’encourager la formation continue des professionnels de santé impliqués dans le diagnostic et la prise en charge du TDC afin de favoriser la mise à jour des connaissances dans la mesure où il s’agit d’un domaine encore en pleine évolution.

Sensibiliser et former les acteurs de l’enseignement et des loisirs
pour favoriser l’inclusion

Les enfants présentant un TDC se retrouvent souvent incompris par leurs pairs mais aussi par les enseignants qui ne perçoivent pas forcément qu’ils se trouvent en situation de handicap, ce qui peut contribuer à ce que la situation se dégrade.
Le groupe d’experts recommande de sensibiliser les acteurs de l’enseignement au sens large (dont les élèves et les parents) sur le handicap et plus précisément sur le fait que les enfants présentant un TDC sont en situation de handicap à l’école. Mieux informer sur cette situation (en plus des adaptations et compensations nécessaires) permet de favoriser l’inclusion des enfants mais aussi de diminuer les situations d’isolement social, de favoriser l’estime de soi et de réduire les risques de développer des troubles secondaires tels que l’anxiété et la dépression. L’objectif est aussi de favoriser les échanges avec les professionnels du monde sanitaire pour une meilleure intégration des stratégies de remédiation et compensation entreprises par les thérapeutes, qu’elles soient directement destinées au cadre scolaire ou non. Enfin, la sensibilisation en direction des enseignants vise à ce qu’ils intègrent, et ne remettent pas en question, la nécessité d’une compensation (si validée par la MDPH) en complément des adaptations pédagogiques.
La majorité des enseignants ne se sentant pas compétents pour mettre en place l’école inclusive, le groupe d’experts recommande de les former sur le TDC pour la mise en place des mesures pédagogiques nécessaires (en complément des compensations du handicap, définies par les MDPH, et du travail interdisciplinaire avec d’autres professionnels du TDC). Cette formation doit s’inscrire dans les formations initiales au travers d’un module conséquent sur les « troubles des apprentissages » ou « troubles du neuro-développement » et être intégrée dans le programme des concours, plus précisément, dans le cadrage national en direction des Écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE). Elle doit aussi s’inscrire dans les formations continues (par des outils en ligne par exemple).
Trop souvent encore, les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH ou AVS), ne sont pas assez formés et ne connaissent que trop peu les troubles des élèves qu’ils accompagnent. Il en résulte des difficultés pour accompagner et aider l’enfant. Le groupe d’experts recommande de former les AESH et les AVS sur le TDC et sur les adaptations possibles dans le cadre scolaire au bénéfice des enfants.
Enfin, il existe peu de propositions d’activités physiques inclusives, que ce soit dans le cadre scolaire ou dans les loisirs.Le groupe d’experts recommande de sensibiliser et former des enseignants et des professionnels des loisirs à proposer des activités inclusives qui peuvent être adaptées en fonction des difficultés motrices.

Recommandations de recherche

Le groupe d’experts recommande de soutenir une recherche de qualité en encourageant les équipes pluridisciplinaires
et facilitant l’accès aux données et aux infrastructures nécessaires

La littérature scientifique sur le TDC est de qualité très inégale, avec des biais méthodologiques récurrents, et appelle à une certaine vigilance dans l’interprétation des résultats.
Afin d’obtenir des résultats plus robustes et de favoriser les comparaisons entre travaux, le groupe d’experts recommande de soutenir une recherche respectueuse des standards méthodologiques avec :
• une définition précise de la population recrutée et des critères d’inclusion-exclusion (lieu de recrutement, outils et seuils utilisés, etc.) ;
• un respect de l’ensemble des critères du DSM en vigueur pour l’identification des individus présentant un TDC ;
• des renseignements sur les éventuels troubles associés ;
• un effectif suffisant au regard des objectifs attendus, des études de réplication, etc.
Cela peut passer par des appels à projets de recherche fléchés sur le TDC ou des axes bien identifiés dans des appels à projets plus généraux.
Le TDC et les personnes présentant un TDC sont des « objets de recherche » complexes qui appellent à la pluridisciplinarité. Or, trop souvent les chercheurs restent au sein de leur communauté disciplinaire avec leurs supports de publications spécifiques. Le groupe d’experts recommande d’encourager les alliances entre diverses disciplines, plus particulièrement entre recherche fondamentale et clinique mais aussi avec la recherche en sciences sociales dans des équipes pluridisciplinaires permettant l’articulation entre différents types de connaissances scientifiques. Les approches écologiques (en situation ou contextualisées dans les cadres scolaire, familial, de loisir, etc.) et qualitatives, très insuffisantes pour l’instant, méritent particulièrement d’être soutenues.
S’il existe de nombreuses données exploitables pour produire des connaissances sur le TDC, les chercheurs ont des difficultés pour y accéder. Le groupe d’experts recommande de faciliter l’accès des chercheurs aux données des institutions (MDPH, Éducation nationale, études épidémiologiques et suivis des cohortes, etc.) pour mener des recherches publiques, par une meilleure information sur les données existantes et par des possibilités d’accès facilitées (avec les précautions nécessaires).
Il n’existe pas de véritable étude épidémiologique sur le TDC dans le contexte français. L’accès à certaines données et les moyens de les compléter et de les exploiter pourrait permettre de pallier à ce manque. Le groupe d’experts recommande de développer des études épidémiologiques sur le TDC en France pour bénéficier d’une meilleure connaissance des populations concernées.
Plus largement, le groupe d’experts recommande de permettre l’accès à une infrastructure de recherche nationale de type cohorte et pouvoir intégrer des paramètres spécifiques dédiés au TDC dans le protocole expérimental. Des équipes pluridisciplinaires (fondamentales, cliniques mais aussi en sciences humaines et sociales) pourraient ainsi mener des études longitudinales permettant notamment d’explorer la dynamique des mécanismes sous-jacents au TDC au cours du développement ainsi que de suivre les trajectoires des individus notamment en matière d’orientation d’étude et/ou de parcours professionnel. Une infrastructure de ce type permettrait notamment de répondre aux besoins de puissance statistique nécessaire pour résoudre notamment les problèmes des résultats discordants de la littérature et faciliter la détection de sous-types de TDC sur lequels reposent des enjeux de recherche mais aussi sociétaux importants. Les études longitudinales permises par une telle infrastructure permettraient d’une part de récupérer et/ou recueillir des données à des périodes critiques en cours de développement (petite enfance : « 3 ans » ; installation des grandes acquisitions scolaires : « 5-8 ans » ; et leur consolidation ; devenir des personnes présentant un TDC à l’adolescence jusqu’à l’âge adulte), notamment par la mise en place d’interventions spécifiques de recherche à des périodes clés (protocole expérimental ou/et clinique, enregistrements de corrélats cérébraux, questionnaires, entretiens compréhensifs, etc.). D’autre part ces études pourraient répondre au besoin de données qualitatives sur les trajectoires des personnes présentant un TDC, entre autres, pour appréhender plus finement les parcours de soin et de santé, les parcours scolaires et saisir par exemple si certains facteurs sociaux sont liés à des parcours particuliers. Une telle infrastructure favoriserait également le croisement et la corrélation des données issues des différents champs d’étude tels que les aspects sensorimoteurs, cognitifs, cérébraux, génétiques, scolaires, de prise en charge, etc., mais aussi le croisement des données expérimentales et qualitatives, essentiels pour faire avancer les connaissances dans le champ du TDC.

Le groupe d’experts recommande de renforcer
les recherches expérimentales et cliniques pour caractériser la grande hétérogénéité du TDC, comprendre les mécanismes et les corrélats cérébraux et génétiques sous-jacents

Si d’indéniables avancées ont été réalisées depuis quelques dizaines d’années, il reste encore beaucoup à faire pour mieux caractériser la diversité de profils recouverte par le terme TDC ainsi que les mécanismes et corrélats sous-jacents.
Le groupe d’experts recommande de renforcer les études pour caractériser l’hétérogénéité des tableaux cliniques, mettre en évidence ce qui est, ou non, spécifique au TDC et établir des sous-types. Il s’agit de soutenir des études intégrant des évaluations multidimensionnelles qui croisent les différents domaines évalués (ensemble des fonctions cérébrales impliquées) grâce à des outils standardisés et normés. Le groupe d’experts recommande en particulier d’approfondir les connaissances sur les articulations entre troubles perceptifs et TDC pour identifier dans quelle mesure ils sont caractéristiques d’un sous-groupe de TDC ou relèvent d’une autre pathologie. Le groupe d’experts recommande également d’approfondir les recherches sur les troubles de l’écriture et notamment sur la spécificité de ces troubles chez les enfants présentant un TDC par rapport à ceux qui présentent d’autres troubles neuro-développementaux (TDA/H, dyslexie, etc.).
Le groupe d’experts recommande de renforcer les recherches sur les mécanismes cognitifs sous-jacents au TDC et les conditions dans lesquelles les troubles apparaissent :
• sur la perception, et notamment sur le couplage perception-action. Une grande hétérogénéité est constatée dans les déficits neuro-visuels, et leur impact sur la motricité n’est pas encore clairement établi ;
• sur différentes formes d’attention (soutenue, préparatoire, divisée, sélective) pour lesquelles il existe peu d’études. Pour l’attention divisée, il importe notamment de développer des études contrôlées, avec notamment un examen précis de la 2e tâche dans les situations de double tâche. Il convient également de préciser les liens entre attention et motricité dans le TDC ;
• sur les apprentissages et les différents types de mémoire pour lesquels les résultats ne sont pour l’instant pas unanimes. Il s’agira ici de mettre en évidence les conditions et contextes dans lesquels les difficultés d’apprentissage se manifestent.
Le groupe d’experts recommande de renforcer les recherches dans le champ de la sensorimotricité. Avec l’évolution des concepts et théories du contrôle moteur et, plus récemment, des techniques d’imagerie permettant un nouvel accès aux corrélats cérébraux sous-jacents, la littérature internationale sur les troubles sensorimoteurs des enfants porteurs d’un TDC présente aujourd’hui des hypothèses prometteuses pour comprendre les mécanismes du TDC, notamment les hypothèses d’un déficit du couplage perception-action ou d’un déficit des modèles internes. Ces hypothèses doivent maintenant être approfondies. Cela peut passer par des études qui évaluent le couplage perception-action, notamment dans la perception visuo-spatiale pour tester la voie visuelle dorsale impliquée à la fois dans la perception et l’action. Une autre piste serait de mener des travaux sur l’imagerie motrice – qui est affectée de manière hétérogène chez les personnes présentant un TDC – afin de mieux comprendre les représentations sensorimotrices et le développement proprioceptif en lien direct avec la construction du schéma corporel. Plus généralement, il importe d’aborder l’apprentissage sensorimoteur dans toute sa complexité en associant plus fréquemment le développement sensorimoteur et le développement des fonctions exécutives, notamment inhibition, mémoire de travail, représentation interne et anticipation.
Pour mieux comprendre les corrélats cérébraux sous-jacents au TDC et notamment déterminer les régions impliquées et la construction de leurs réseaux fonctionnels, les attentes envers la neuro-imagerie sont importantes. Pour autant, les travaux existants sont très récents, encore peu nombreux et souffrent de multiples problèmes méthodologiques. Le groupe d’experts recommande de poursuivre l’effort de recherche en neuro-imagerie pour identifier les corrélats neuronaux des déficits associés au TDC avec une grande vigilance méthodologique pour identifier des résultats fiables (taille des échantillons à augmenter, écarts d’âge, critères d’inclusion et d’exclusion, etc.). Il pourrait être particulièrement intéressant de constituer progressivement une banque d’images cérébrales structurales et fonctionnelles d’enfants présentant un TDC (avec et sans troubles associés) à des fins de recherche (et non de diagnostic). Les études sur les corrélats cérébraux du TDC avec d’autres techniques d’explorations cérébrales sont à encourager (EEG quel que soit l’âge, stimulation magnétique transcrâcienne chez l’adulte présentant un TDC, etc.).
À ce jour, quelques gènes candidats pour les troubles de la coordination motrice ont été proposés et offrent des gènes candidats potentiels pour le TDC. Le groupe d’experts recommande de développer les recherches concernant la génétique du TDC. Les récentes études particulièrement prometteuses soulignent la nécessité d’études génétiques sur de larges cohortes de patients présentant un TDC. Il serait en particulier important de mener ces analyses génétiques auprès d’enfants présentant un TDC isolé, et dont le diagnostic de TDC est fiable, afin de pouvoir identifier les gènes impliqués spécifiquement dans ce trouble et de les différencier de ceux impliqués dans d’autres troubles associés, en particulier le TDA/H. Dans ce contexte, la constitution d’une banque de données de matériel génétique d’enfants diagnostiqués avec un TDC et de leur famille (avec et sans troubles associés) représenterait un outil précieux de recherche (et non de diagnostic). Le groupe d’experts recommande donc d’encourager les services de génétique à mettre des ressources humaines sur les troubles neuro-développementaux, dont le TDC, et récupérer ce type de données (via des cohortes, des consultations génétiques, etc.).

Le groupe d’experts recommande de développer
des recherches pour mieux cerner les répercussions du TDC
sur la participation et le vécu des individus

La littérature scientifique rapporte que la participation et la qualité de vie des personnes présentant un TDC sont clairement impactées, en particulier dans le contexte scolaire et concernant les activités physiques. Néanmoins, l’importance du contexte, notamment le contexte national (dans ses dimensions politique, culturelle et institutionnelle) pour la participation et la qualité de vie mis en regard avec la rareté des publications françaises sur ce sujet invite à une certaine prudence dans l’interprétation des résultats avancés. Le groupe d’experts recommande de développer des études de participation et qualité de vie en France dans différents contextes (en milieu scolaire et hors milieu scolaire, mais aussi en milieu professionnel) pour identifier quelles sont les spécificités françaises et mieux comprendre les contextes et mécanismes qui aboutissent à une limitation de la participation et une moindre satisfaction de la qualité de vie.
Par ailleurs, la qualité de vie est une notion subjective, dont la mesure est généralement recueillie par un questionnaire préétabli, sans adaptation spécifique au TDC. En complément de cette approche, le groupe d’experts recommande de développer des recherches recourant à des approches qualitatives (comptes rendus d’observations, entretiens longs, etc.) pour saisir également les représentations et les vécus des personnes présentant un TDC et acquérir ainsi une compréhension plus fine des situations.
Concernant plus spécifiquement l’activité physique, la littérature se contente souvent de décrire et identifier les liens entre les activités physiques et un certain nombre de caractéristiques qui seraient particulièrement altérées chez les enfants porteurs de TDC (masse corporelle, système cardio-vasculaire, consommation d’oxygène en fonction du degré d’activité, etc.) grâce à diverses mesures. Or la compréhension de ce qui fonde ce déficit d’activité paraît particulièrement pertinente et nécessaire mais est pourtant peu explorée. Le groupe d’experts recommande de développer des recherches qualitatives sur l’activité physique, en particulier sur :
• les impacts de différents types, et conditions de pratique, d’activités physiques sur la participation, la qualité de vie et le bien-être ;
• les activités socialement significatives pour les enfants (ce à quoi les enfants jouent, qui a du sens pour eux, auquel ils prennent du plaisir à jouer et qu’ils désirent pratiquer) dont on sait qu’elles ont un rôle sur le développement de la motricité, sur la perception de soi et les relations aux autres ;
• sur les conditions de mise en œuvre d’activités physiques et de sport inclusifs qui favorisent la participation des personnes présentant un TDC.

Le groupe d’experts recommande de renforcer
les recherches sur les adolescents et adultes
présentant un TDC

II existe peu de recherches sur les adolescents et adultes présentant un TDC. Il s’agit pourtant d’un enjeu de connaissance à plusieurs niveaux :
• au niveau clinique pour le diagnostic et la prise en charge, en particulier pour les adolescents (certains sont repérés tardivement car ils ont mis en place des stratégies de compensation propres qui ne suffisent plus avec l’augmentation des exigences scolaires par exemple) dans la mesure où il y a peu d’outils correspondant à cette tranche d’âge et pas de parcours de santé identifié ;
• au niveau expérimental pour étudier les aspects cognitivo-moteurs chez le jeune adulte présentant un TDC (modèle plus stabilisé que chez l’enfant et l’adolescent) et ses évolutions jusqu’au grand âge ;
• au niveau social concernant i) la prise en charge et l’accompagnement, en particulier à propos des orientations scolaires et des parcours professionnels, ii) l’information et la formation des enseignants, iii) les situations de handicap et les vécus en fonction des environnements (par ex. : difficultés rencontrées à l’université ou dans d’autres filières de formation, recours à la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) dans le cadre professionnel ?), et iv) les stratégies de résilience, de compensation et d’adaptations mises en place (leurs réussites et échecs, etc.).
Pour répondre à ces enjeux, le groupe d’experts recommande de renforcer les recherches sur les adolescents et adultes présentant un TDC, tant au niveau expérimental que de la recherche clinique ou de la recherche en sciences humaines et sociales.

Le groupe d’experts recommande de renforcer les recherches sur les outils d’évaluation par rapport au TDC concernant les études sensorimotrices, cognitives et les corrélats cérébraux mais aussi la participation et la qualité de vie

Bien que plusieurs outils existent pour évaluer différentes fonctions sur les plans neuromoteur, sensori-moteur, moteur et cognitif, aucun n’est unanimement reconnu pour le diagnostic du TDC. Par ailleurs, pour les fonctions cérébrales, les tests standardisés ne couvrent pas toute l’ontogénèse ce qui limite la mise en évidence de la maturation cérébrale des fonctions altérées par le TDC. Il n’existe pas non plus d’outil validé qui présenterait une plus grande sensibilité permettant, non pas d’établir un diagnostic mais de suivre plus précisément les impacts d’interventions menées auprès des personnes présentant un TDC.
Plusieurs outils existent concernant la participation et la qualité de vie, mais ne sont ni traduits en français ni normés pour une population française et aucun n’apparaît complètement satisfaisant pour évaluer la participation et la qualité de vie des personnes présentant un TDC, aucun des questionnaires existant n’étant spécifique à ce trouble.
Le groupe d’experts recommande de :
• réaliser des études de validité culturelle et produire des données normées pour une population française, allant de l’enfance à l’âge adulte, pour les outils en langue anglaise ;
• étendre les tests standardisés tout au long de l’ontogénèse (enfant mais aussi jeune enfant, adolescents et jeunes adultes) ;
• développer et encourager des études de validité envers le TDC pour les outils existants en français ;
• soutenir la recherche et le développement d’outils standardisés, à étalonner et adapter avec une population française, pour les évaluations utiles pour le diagnostic, mais aussi pour évaluer les impacts d’interventions (la sensibilité recherchée n’est pas forcément la même) ;
• réaliser des études analysant la sensibilité des tests ou questionnaires existants pour objectiver des changements après une intervention ;
• développer des recherches pour valider des questionnaires destinés aux enfants, parents, enseignants et tenant compte des difficultés de la vie quotidienne et scolaire ainsi que de la qualité de vie des personnes vivant avec un TDC.
S’il existe des tests pour l’évaluation de l’imagerie motrice chez l’adulte, aucun n’a pour l’instant été développé pour l’enfant. Au regard des hypothèses prometteuses portant sur un déficit des modèles internes et de l’imagerie motrice, le groupe d’experts recommande de soutenir un travail de recherche développementale pour construire (puis étalonner et valider) des outils d’évaluation des modèles internes en s’inspirant de tests existants déjà pour l’adulte. Cela faciliterait le recueil de données pour tester ensuite l’hypothèse du déficit des modèles internes.
Le développement de technologies offre de nouvelles opportunités dans le domaine de l’évaluation du TDC. Néanmoins, la recherche ne s’est pas encore emparée de ce sujet. Le groupe d’experts recommande de mener des recherches prospectives sur l’intérêt d’outils d’évaluation avec des notations et cotations automatisées ou de nouveaux outils connectés plus ergonomiques en soutien aux professionnels de santé, dans l’optique de permettre un gain de temps et de minimiser les biais d’erreurs face à une demande croissante d’évaluation, ainsi que d’enrichir les données de la recherche sur le TDC. Il ne s’agit en aucun cas de se substituer aux professionnels compétents mais de les appuyer dans leur pratique de contribution au diagnostic.

Le groupe d’experts recommande de poursuivre
les recherches pour évaluer les interventions les plus pertinentes en fonction des profils et les modèles d’organisation des prestations les plus efficients

Si la littérature scientifique atteste de l’efficacité des interventions proposées aux personnes présentant un TDC en comparaison de l’absence d’interventions, les résultats restent limités lorsqu’il s’agit d’identifier quelles sont les interventions les plus adaptées selon les types de profils. Le groupe d’experts recommande de développer des recherches pour évaluer les interventions les plus pertinentes en fonction des profils et précise que ces évaluations doivent intégrer des mesures de résultats non seulement sur les fonctions mais également sur les activités et la participation (avant/après) ainsi que sur la qualité de vie, ce qui n’est souvent pas le cas dans la littérature existante.
Concernant plus spécifiquement la remédiation de l’écriture manuscrite, la littérature n’apporte pas un niveau de preuve suffisant pour recommander un ou plusieurs types de remédiation ou pour orienter vers certains types de compensations. Au regard des enjeux portant sur l’écriture manuscrite, le groupe d’experts recommande de développer des recherches sur la validité et l’efficacité de la remédiation de l’écriture et des compensations habituellement préconisées.
Enfin, la plupart des travaux évaluent l’efficacité des interventions en mesurant uniquement les performances motrices sans s’intéresser aux fonctions cognitives impliquées, encore moins à la structure ou au fonctionnement cérébral. Le groupe d’experts recommande de développer des recherches pour comprendre comment les interventions (en psychomotricité, activités physiques adaptées, ergothérapie, etc.) peuvent moduler les déficits de certaines fonctions cognitives (notamment les fonctions exécutives et l’imagerie motrice) mais aussi les fonctions psychoaffectives, ainsi que les corrélats cérébraux associés.

Le groupe d’experts recommande de développer des travaux en sciences sociales sur les modes de prise en charge
et les acteurs

Il existe peu de publications scientifiques en sciences sociales concernant les personnes présentant un TDC ou leur prise en charge. Les enjeux de connaissances sont pourtant multiples pour une meilleure compréhension des situations dans l’optique d’une amélioration des parcours de santé. Ces enjeux se situent tant au niveau des politiques publiques et de leur application, que du fonctionnement et des pratiques des institutions et acteurs concernés en passant par les aspects économiques liés au TDC ou encore les trajectoires des personnes présentant un TDC.
Le groupe d’experts recommande de produire des recherches sur les politiques publiques qui ne portent pas seulement sur le handicap en général, de manière transversale, mais envisagent les spécificités des différentes catégories de handicap, notamment les troubles des apprentissages et les TDC. Il pourrait par exemple s’agir d’étudier les mises en œuvre locales des politiques publiques du handicap dans le cas des TDC pour rendre compte des spécificités aux échelles régionale et départementale.
Le groupe d’experts recommande de produire des états des lieux des territoires sur les acteurs et institutions impliqués autour du TDC ainsi que sur leurs pratiques et fonctionnement avec des données quantitatives et qualitatives. Il importe notamment d’apporter des connaissances sur l’articulation entre les acteurs sanitaires, médico-sociaux et ceux de l’Éducation nationale au travers des parcours de santé et de scolarité d’enfants présentant un TDC, la fluidité de ces parcours, impliquant de multiples acteurs, étant un enjeu particulièrement important pour les familles concernées. Des travaux sur les MDPH permettraient par ailleurs de mieux caractériser les différents parcours afin de lutter contre les disparités géographiques. Ces travaux pourraient éventuellement être utiles dans la perspective de concertations territoriales entre les différents acteurs afin de fluidifier les parcours.
Aucune étude en sciences économiques n’aborde la question des coûts ou des pratiques financières liés au TDC. Or, les aspects économiques ressortent régulièrement comme des freins ou des blocages à l’accès au diagnostic ou à une prise en charge adaptée. Le groupe d’experts recommande d’évaluer les coûts du diagnostic et de la prise en charge, les usages et pratiques de financement qui permettent ou non d’accéder au diagnostic, aux soins, aux adaptations et compensations ainsi que les trajectoires des enfants au travers des coûts, dans une perspective quantitative. Ce type de travaux permettrait notamment d’éclairer un des aspects importants des inégalités sociales dans le TDC.
Afin de saisir les trajectoires des personnes porteuses de TDC dans leur complexité et en articulant des dimensions sanitaires, scolaires et professionnelles, le groupe d’experts recommande de produire des recherches quantitatives et qualitatives sur ces trajectoires. Celles-ci pourraient s’appuyer sur une cohorte, comme indiqué précédemment, mais pas uniquement. L’enjeu est notamment d’être en mesure d’identifier d’éventuelles ruptures ou bifurcations de trajectoires récurrentes ainsi que des facteurs de « succès » ou d’« échecs » des parcours.
Une littérature à l’interface entre littérature professionnelle et scientifique a permis de saisir quelques pratiques professionnelles. La littérature sur ce sujet reste néanmoins très sporadique et ses résultats limités alors que le paysage des professionnels impliqués dans le TDC est encore méconnu. Le groupe d’experts recommande de produire des recherches sur la division du travail et les acteurs en présence autour des TDC. Du côté des professionnels, il s’agit notamment d’étudier les professions paramédicales investies dans le diagnostic et la prise en charge des TDC (notamment les ergothérapeutes et psychomotriciens), en portant une attention non seulement au travail prescrit (décrets de compétences etc.) mais aussi au travail réel (modalités de travail concrètes). La division du travail et les modes de coordination informelle à l’intérieur et à l’extérieur des établissements ou institutions (centres de références, centres médico-psycho-pédagogiques – CMPP) ou des instances ou réunions (équipes de suivi de scolarisation dans les établissements scolaires, CDAPH ou équipes pluridisciplinaires dans les MDPH) méritent aussi d’être analysés, tout comme les acteurs profanes que sont les parents, mais aussi les associations, par une analyse du travail qu’ils effectuent en amont du diagnostic ainsi que dans la coordination des pratiques de rééducation, d’adaptation et de compensation. Les interactions (dans le temps notamment) entre les professionnels et les profanes ainsi qu’entre les familles et les institutions, constituent d’ailleurs un objet de recherche particulièrement intéressant lorsque l’on connaît la rhétorique du « parcours du combattant » utilisée par les associations de familles pour décrire les parcours de santé et de scolarité et notamment les relations que les familles ont avec l’école (les enseignants, l’institution et ses procédures, etc.).
Enfin, il n’existe pas de littérature sur ces associations de familles, qui sont pourtant particulièrement présentes auprès des familles concernées sur différents territoires ainsi que dans le paysage politique. Le groupe d’experts recommande d’étudier l’histoire, les mobilisations et les revendications des associations en faveur de la « dyspraxie » et leur articulation avec la cause des « dys ».

Le groupe d’experts recommande de développer
des recherches sur les situations de handicap
en milieu scolaire pour les personnes présentant un TDC
et sur l’école inclusive

Les travaux rapportant une participation limitée des enfants présentant un TDC dans le cadre scolaire amènent à interroger le rôle de l’école dans la transformation du trouble en handicap. Or, les travaux sur l’école, qui plus est menés majoritairement en contexte anglophone, ne permettent ni de comprendre précisément de quelle situation de limitation il s’agit, ni ce qui crée ces situations de limitation. L’enjeu est pourtant de disposer d’éléments de compréhension des dysfonctionnements qui produisent des mises à l’écart des enfants présentant un TDC, pour contribuer au cheminement vers une école inclusive en capacité d’accueillir tous les enfants, telle que promue par la loi de 2005 sur les personnes handicapées. Ces éléments pourraient d’ailleurs alimenter les formations des enseignants de manière concrète. Le groupe d’experts recommande de produire des recherches qualitatives pour saisir comment les troubles fonctionnels du TDC se transforment en handicap au sein de l’école et comment celle-ci peut limiter ces situations de handicap. Il s’agit d’observer et d’analyser comment l’école accueille ces élèves, de la maternelle à l’université en passant par les filières techniques et d’apprentissage : comment se font la prise en compte et l’accompagnement tout au long de la scolarité, avant puis après le diagnostic et dans les cas de PPS comme de PPA ; comment l’école met, ou non, en œuvre les stratégies inclusives et les aménagements ; quels sont les usages des outils de compensation, et leurs impacts ; quelles autres stratégies sont mises en place, etc. Il s’agit aussi d’évaluer spécifiquement les répercussions des difficultés issues du trouble (fatigabilité, lenteur, mises à l’écart...) dans le cadre de l’enseignement ordinaire. Enfin, il importe d’effectuer un suivi dans le temps et de travailler sur les transitions et notamment sur la manière dont se poursuit la carrière des enfants vivant avec un TDC au moment de l’entrée dans la vie adulte (16-25 ans) que cette carrière emprunte les voix de l’apprentissage et de la professionnalisation ou qu’elle se poursuive dans l’enseignement supérieur. Dans une logique transversale suivant les parcours des individus, ces approches pourraient permettre de saisir non seulement comment se produisent les difficultés en milieu scolaire ordinaire mais aussi les adaptations et compensations qui ont fonctionné, ou non, ainsi que la manière avec laquelle les enfants vivant avec un TDC parviennent à surmonter les difficultés dont les stratégies qu’ils déploient pour compenser ce que l’école produit sur eux comme handicap.
Concernant les adaptations mises en œuvre au sein de l’école, la littérature scientifique est pauvre. Elle ne présente que quelques pratiques professionnelles concernant la mise en place d’un ordinateur pour compenser l’écriture manuscrite ainsi que quelques approches plus globales dont l’objectif est de permettre à l’enfant d’apprendre à l’école sans être gêné par son trouble de coordination. Les besoins en méthodes et outils de compensation pour les élèves comme pour les enseignants sont pourtant importants. Le groupe d’experts recommande de développer et évaluer des méthodes et outils de compensation en milieu scolaire pour compenser les difficultés d’écriture manuscrite mais aussi celles induites par le trouble dans d’autres domaines (lecture, géométrie, mathématiques, etc.).

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