2008


ANALYSE

12-

Stratégies fondées sur le risque lié aux sites industriels

Les activités industrielles d’extraction, de traitement et d’utilisation du plomb provoquent le rejet de dérivés du plomb dans l’environnement (InVS, 2002renvoi vers; Laperche et coll., 2004renvoi vers). Il s’agit principalement de rejets atmosphériques sous forme particulaire, qui peuvent être canalisés ou diffus, et dont les retombées vont provoquer une pollution des sols environnant la source d’émission. La mobilisation des poussières extérieures liée à l’activité des installations ne doit pas non plus être négligée : déplacement de camions, retour des travailleurs au domicile (Roscoe et coll., 1999renvoi vers), réenvol de tas de minerai ou de déchets. Les émissions dans les eaux de surface ou les eaux souterraines sont généralement faibles.
Le plomb contenu dans le sol et les poussières est accessible aux jeunes enfants qui peuvent absorber de façon habituelle plusieurs dizaines de milligrammes de poussières par jour (Duggan et Inskip, 1985renvoi vers; Lanphear et coll., 1998renvoi vers; Inserm, 1999renvoi vers). En effet, les jeunes enfants explorent leur environnement avec les mains et la bouche (Roels et coll., 1980renvoi vers; Tulve et coll., 2002renvoi vers; Nielsen et Kristiansen, 2005renvoi vers) et si l’inhalation peut constituer une voie d’apport significative autour des sites en activité, l’ingestion de sol et des poussières constituent chez l’enfant la voie d’absorption la plus importante (figure 12.1Renvoi vers). La biodisponibilité (National Research Council, 2003renvoi vers) joue donc un rôle majeur dans l’exposition de l’enfant.
La contamination par le plomb des végétaux cultivés localement est généralement relativement faible, en comparaison d’autres métaux lourds comme le cadmium, mais peut être significative dans les cas de forte diffusion. Par ailleurs, des travaux américains ont montré que la contamination des aliments manipulés au cours des repas par les poussières du logement ou présentes sur les mains de l’enfant peut être significative (Freeman et coll., 1997renvoi vers et 2001renvoi vers; Melnyk et coll., 2000renvoi vers).
Le groupe d’experts réuni par l’Inserm en 1999 a recommandé « un dépistage systématique des enfants dans les zones à risque (habitats dégradés ou sites industriels) identifiées par des enquêtes environnementales » (Inserm, 1999renvoi vers). L’application de ces recommandations aux enfants vivant autour de sites industriels nécessite :
• un recensement des sites potentiellement pollués en relation avec leur activité actuelle ou passée ;
• des mesures des concentrations de plomb dans les différents compartiments de l’environnement et une analyse de la pertinence de la mise en place d’un dépistage (InVS, 2002renvoi vers; Glorennec, 2006arenvoi vers ; Glorennec et coll., 2006renvoi vers; Glorennec et Declercq, 2007renvoi vers) ;
• la mise en place d’un programme de dépistage si cela est jugé pertinent (InVS, 2001renvoi vers).
Ces différentes activités ne peuvent être jugées acceptables sur un plan éthique que si des actions de prévention primaire, visant à réduire l’exposition de l’enfant aux dérivés du plomb, sont également mises en œuvre.
Figure 12.1 Modalités d’exposition de l’enfant aux dérivés du plomb autour de sites industriels

Inventaire des sites industriels concernés

Un premier recensement des sites industriels concernés a été réalisé en 1999 par les Amis de la terre France (1999renvoi vers), sous forme d’un inventaire national (territoire métropolitain) et d’une cartographie des « industries transformant le plomb ». Le nombre de sites industriels concernés était estimé à environ 500. La Direction de la prévention de la pollution et des risques (DPPR) du ministère de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement a lancé, le 20 septembre 1999, une enquête sur les installations classées de fabrication d’alliages, de valorisation des déchets métalliques ou manipulant du plomb, du cadmium ou du mercure1 ce qui l’a conduite à établir une liste de 48 « établissements prioritaires pour leurs rejets en plomb pour l’année 2000 »2 . Cette liste a été ensuite élargie à l’ensemble des installations dont le flux global de plomb (émissions canalisées ou diffuses) était supérieur au seuil de collecte défini pour le recensement des principaux rejets industriels de France (300 kg/an) et toutes les installations pour lesquelles un impact sur la santé des riverains ou des salariés était « avéré », soit 61 établissements3 présentés dans les tableaux 12.I renvoi vers 12.IIrenvoi vers (voir également figure 12.2Renvoi vers). L’action pluri-annuelle entreprise par la DPPR pour mieux connaître les émissions industrielles de plomb a été poursuivie durant les années ultérieures, en élargissant l’inventaire aux installations classées ayant cessé leur activité (voir par exemple le site du ministère de l’Écologie et du Développement durable : accueil/risques et pollutions/sites et sol pollués/les sites pollués au plomb). Le bilan publié en 2006 (Ministère de l’Écologie et du Développement durable, 2006renvoi vers) recense 387 « installations en fonctionnement ou ayant cessé récemment leur activité, pour lesquelles une contamination des sols par le plomb est possible du fait de leurs activités présentes ou passées ». À la fin du premier semestre 2006, des diagnostics devaient avoir été imposés par les préfets pour vérifier l’état des sols pour 316 installations (82 %). Au 1er mars 2006, des actions complémentaires avaient été engagées pour 150 installations (études complémentaires pour 83 sites, travaux et mesures de mise en sécurité pour 27 sites, mesures de surveillance environnementale, de surveillance à l’émission et de réduction des émissions pour 29 sites).
Le document du ministère de l’Écologie et du Développement durable (2006renvoi vers) ne présente pas la liste des installations concernées.
En ce qui concerne les sites anciens dont l’activité a été interrompue, une interrogation de la base de données Basol4 sur les sites et sols pollués (ou potentiellement pollués) appelant une action des pouvoirs publics, à titre préventif ou curatif réalisée le 5 janvier 2007, permet de compter 695 sites en utilisant comme critère de requête « polluant : plomb » et 5 sites seulement en y ajoutant le critère « impact : santé ». Ces 5 sites sont :
• l’ancienne mine de fluorine de Nizerolles (03) ;
• l’usine Métal Blanc de Bourg-Fidèle (08) (site en activité) ;
• l’ancienne cartonnerie Voisin et Pascal de Fos-sur-Mer (13) ;
• le site de la Platinerie à Hayange (27) ;
• le site Metaleurop Nord de Noyelles-Godault (62).

Tableau 12.I Liste des établissements classés prioritaires pour leurs rejets de plomb dans l’atmosphère*

Établissement
Secteur d’activité
SGE à Crouy (02)
Installation destinée à la fabrication du verre
Métal Blanc à Bourg Fidèle (08)
Installation de recyclage des batteries au plomb
Cristalleries Royales à Bayel (10)
Installation destinée à la fabrication du verre
SETCM à Meyreuil (13)
Installation de combustion
SOLLAC à Fos sur Mer (13)
Installation d’agglomération de minerai
SGE à Cognac (16)
Installation destinée à la fabrication du verre
Tamaris Industries à Alès (30)
Fonderie de métaux ferreux
Ugine à Laudun (30)
Aciérie électrique
STCM à Toulouse (31)
Installation de recyclage des batteries au plomb
BSN Glasspack à Vayres (33)
Installation destinée à la fabrication du verre
Ascométal Allevard à Le Cheylas (38)
Aciérie électrique
Marra Recycling à Pontcharra (38)
Installation de traitement de déchets métalliques
Wheelabrator à Le Cheylas (38)
Aciérie électrique
ADA à Tarnos (40)
Aciérie électrique
Usinor Industeel à Rive de Giers (42)
Aciérie électrique
BSN Glasspack à Veauche (42)
Installation destinée à la fabrication du verre
SGE à Saint Romain le Puy (42)
Installation destinée à la fabrication du verre
CFEC à Outarville (45)
Fabrication de piles ou accumulateurs
STCM - site B1 à Bazoches (45)
Installation de recyclage des batteries au plomb
STCM - site B2 à Bazoches (45)
Installation de recyclage des batteries au plomb
Sadefa à Fumel (47)
Fonderie de métaux ferreux
BSN Glasspack à Reims (51)
Installation destinée à la fabrication du verre
SGE à Oiry (51)
Installation destinée à la fabrication du verre
VMC à Reims (51)
Installation destinée à la fabrication du verre
SOREMO à Villiers le Sec (52)
Installation de fusion de métaux non ferreux
Valfond à St Dizier (52)
Fonderie de métaux ferreux
SAM à Neuves Maisons (54)
Aciérie électrique
St Gobain PAM à Pont-a-Mousson (54)
Installation d’agglomération de minerai
Ascométal à Hagondange (57)
Aciérie électrique
DELPHI à Sarreguemines (57)
Fabrication de piles ou accumulateurs
SOLLAC à Rombas (57)
Installation d’agglomération de minerai
Unimétal à Gandrange (57)
Aciérie électrique
Ascométal à Leffrinckoucke (59)
Aciérie électrique
Cappelle à Halluin (59)
Fabrication de pigments de peinture
CEAC à Lille (59)
Fabrication de piles ou accumulateurs
LME à Trith Saint Léger (59)
Aciérie électrique
Metaleurop à Escaudoeuvres (59)
Installation de recyclage des batteries au plomb
RDME à Grande Synthe (59)
Installation d’agglomération de minerai
SOLLAC à Grande Synthe (59)
Installation d’agglomération de minerai
V&M France à Saint Saulve (59)
Aciérie électrique
APSM à Brenouille (60)
Installation de recyclage des batteries au plomb
Le Plomb Français à Estrees St Denis (60)
Installation de traitement de déchets métalliques
Penarroya Oxide à Rieux (60)
Installation de fusion de métaux non ferreux
Ciments d’Origny à Dannes (62)
Cimenterie
Ciments d’Origny à Lumbres (62)
Cimenterie
Hawker à Arras (62)
Fabrication de piles ou accumulateurs
Metaleurop à Noyelles Godault (62)
Installation de fusion de métaux non ferreux
Ugine à Isbergues (62)
Aciérie électrique
BSN Verdôme à Puy Guillaume (63)
Installation destinée à la fabrication du verre
Metaleurop à Arnas (69)
Installation de recyclage des batteries au plomb
SGE à Chalon (71)
Installation destinée à la fabrication du verre
Ugine Savoie à Ugine (73)
Aciérie électrique
Promotrame à Longroy (76)
Installation de traitement de déchets métalliques
SAM à Montereau (77)
Aciérie électrique
Thomson Videoglass à Bagneaux (77)
Installation destinée à la fabrication du verre
ALPA à Gargenville (78)
Aciérie électrique
ITON à Bonnières (78)
Aciérie électrique
VOA à Albi (81)
Installation destinée à la fabrication du verre
BSN Glasspack à Gironcourt (88)
Installation destinée à la fabrication du verre
CEAC à Auxerre (89)
Fabrication de piles ou accumulateurs
CEAC à Nanterre (92)
Fabrication de piles ou accumulateurs

* Circulaire du 18 février 2002 relative à l’action nationale de l’inspection des installations classées pour l’année 2001. Réduction des pollutions par les métaux toxiques. Maîtrise des émissions diffuses. Liste des établissements prioritaires pour leurs rejets de plomb dans l’atmosphère. Paris, Ministère de l’aménagement du territoire et de l’environnement, 2002 http://aida.ineris.fr/textes/circulaires/text4174.htm

Tableau 12.II Classement par secteur d’activité des établissements jugés prioritaires pour leurs rejets de plomb dans l’atmosphère*

Secteur d’activité
Nombre
Aciérie électrique
16
Installation destinée à la fabrication du verre
14
Installation de recyclage des batteries au plomb
7
Fabrication de piles ou accumulateurs
6
Installation d’agglomération de minerai
5
Fonderie de métaux ferreux
3
Installation de fusion de métaux non ferreux
3
Installation de traitement de déchets métalliques
3
Cimenterie
2
Fabrication de pigments de peinture
1
Installation de combustion
1
Total
61

* Circulaire du 18 février 2002 relative à l’action nationale de l’inspection des installations classées pour l’année 2001. Réduction des pollutions par les métaux toxiques. Maîtrise des émissions diffuses. Liste des établissements prioritaires pour leurs rejets de plomb dans l’atmosphère. Paris, Ministère de l’aménagement du territoire et de l’environnement, 2002 http://aida.ineris.fr/textes/circulaires/text4174.htm

Figure 12.2 Cartographie des établissements jugés prioritaires pour leurs rejets de plomb dans l’atmosphère
Il n’a pas été possible d’interroger la base Basias5 , inventaire d’anciens sites industriels et activités de service selon une approche comparable car l’interface disponible ne le permet pas. Le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a été chargé par le ministère de l’Écologie et du Développement durable de recenser les sites potentiellement concernés dans cette base de données6 .

Commentaires sur les données disponibles en France

La consultation des différentes ressources documentaires sur le sujet est un exercice difficile et la séparation entre les sites en activité et les sites anciens n’est pas toujours évidente. Il s’avère en l’état impossible d’établir une liste fiable des installations dont l’activité actuelle ou passée pourrait jouer un rôle dans l’exposition des enfants riverains ou des enfants des travailleurs. Les efforts de la DPPR dans le recensement des sites devraient être encouragés et en particulier, la liste des 387 installations en activité ou dont l’activité a cessé récemment devrait être rendue disponible.
D’autre part, il conviendrait de suivre avec attention les résultats de l’étude pilote entreprise par la Cellule interrégionale d’épidémiologie (Cire) Nord sur le recensement systématique des sites industriels (en activité ou non) potentiellement pollués au plomb dans la région Nord-Pas-de-Calais à partir des bases administratives disponibles (Erouart et coll., 2006a renvoi verset brenvoi vers) : Drire (base Gidic et connaissances des inspecteurs : 56 sites), Basol (32 sites), Basias (9 sites) et circulaires sus-mentionnées (1 site), soit un total de 100 sites sélectionnés. Le classement réalisé à partir des données disponibles sur les différents sites a conduit à considérer 21 sites méritant des investigations complémentaires (en cours).
En l’état actuel des connaissances, il paraît réaliste de penser que le nombre de sites potentiellement concernés en France métropolitaine est de plusieurs centaines.

Circonstances de déclenchement d’une campagne de dosage de la plombémie

La décision de réaliser une campagne de dosage de la plombémie devrait théoriquement être prise après évaluation de la contamination des différents compartiments de l’environnement (Laperche et coll., 2004renvoi vers) et analyse des résultats afin de juger de la pertinence de cette campagne. Ce jugement doit se baser sur une modélisation des plombémies attendues chez les enfants riverains du site et/ou dont les parents travaillent sur le site. Différents modèles peuvent être utilisés dans ce but (Glorennec et Declercq, 2007renvoi vers) :
• une relation empirique entre les concentrations dans les milieux, en particulier le sol, et la plombémie de l’enfant (Inserm, 1999renvoi vers) ;
• un modèle simple proposé par l’InVS (2002renvoi vers) ;
• un modèle toxicocinétique plus élaboré, comme le modèle IEUBK (Integrated Exposure Uptake Biokinetic Model) de l’Environmental Protection Agency (EPA) (White et coll., 1998renvoi vers), qui permet de prendre en compte la non linéarité de certains phénomènes toxicocinétiques.
Glorennec a examiné la performance de ces différentes méthodes et a montré l’intérêt du modèle InVS et du modèle IEUBK pour aider à la décision (Glorennec et Declercq, 2007renvoi vers). Le choix des critères pour prendre la décision ou non de mettre en œuvre une campagne de dosage de la plombémie reste cependant délicat : nombre attendu de cas de saturnisme infantile ; effet sur la plombémie moyenne ou sur les plombémies maximales attendues ; à partir de combien de cas attendus ou de quel niveau de plombémie est-il raisonnable de décider une campagne ? De plus, la prise en compte des incertitudes, en particulier sur la biodisponibilité, paraît souhaitable pour guider la décision (Glorennec, 2006brenvoi vers). Enfin, la réalisation éventuelle d’une campagne de dosage de la plombémie ne devrait pas retarder la mise en œuvre des mesures de prévention primaire adéquates (traitement du site et de son environnement) (Laperche et coll., 2004renvoi vers).
Girard (2005renvoi vers) a étudié le cas de 27 sites industriels pour lesquels la question du déclenchement d’une éventuelle campagne de dosage de la plombémie s’est posée entre 2002 et 2005, en enquêtant auprès des Ddass. Pour 12 de ces sites, la méthodologie de l’InVS (2002renvoi vers) a été appliquée, parfois complétée par une modélisation des plombémies attendues avec le modèle IEUBK (White et coll., 1998renvoi vers) de l’EPA. Cette analyse, pour 6 sites, a conclu à la mise en place d’une campagne. Dans 2 sites, la mise en place d’une campagne n’a pas été jugée pertinente et, pour les 4 autres, l’analyse a mis en évidence la nécessité de réaliser des mesures environnementales complémentaires (voir par exemple, Prouvost et Declercq, 2003renvoi vers). En ce qui concerne les 15 autres sites, la décision de mettre en œuvre ou non une campagne a été prise dans 9 cas après analyse des résultats d’une évaluation des risques (ESR7 ou EDR8 ) et dans 4 cas en l’absence de toute analyse préalable9 . L’auteur pointe la confusion souvent présente entre les objectifs d’une évaluation quantitative des risques sanitaires (volet sanitaire d’une étude d’impact) qui peut conduire à des actions techniques de réduction des risques et ceux d’une analyse visant à évaluer la pertinence de la mise en place d’une campagne de dosage de la plombémie, et rappelle à juste titre que des actions techniques peuvent être justifiées même en l’absence de plombémie >100 µg/l.

Bilan des campagnes de dosage de la plombémie autour de sites industriels réalisées en France

Depuis 1995, 13 campagnes de dosages de la plombémie autour de sites industriels ont été réalisées en France et 5 993 enfants ont eu un dosage de la plombémie. Les résultats, chez les enfants de différentes classes d’âge, sont détaillés en fonction des différents sites industriels.

Usine Metaleurop-Nord, Noyelles-Godault, Pas-de-Calais

L’usine Metaleurop-Nord était implantée à Noyelles-Godault depuis 1894 et était la plus importante unité de fusion primaire d’Europe. Malgré une très importante réduction des émissions de plomb (de plus de 140 tonnes par an en rejets canalisés en 1978 à environ 20 tonnes en 2002), les émissions atmosphériques restaient importantes et étaient associées à une contamination importante et large des sols : la teneur en plomb dépassait 1 000 µg/g sur plus d’un km2 autour du site. Une première campagne de dosage de la plombémie a été réalisée en 1995 dans le cadre de la mise en place d’un programme de prévention du saturnisme infantile, à l’initiative de la Ddass du Pas-de-Calais et de l’ORS Nord-Pas-de-Calais. Elle visait les enfants de 6 mois à 6 ans des 3 communes les plus proches du site. Cette campagne a touché 621 enfants, avec un taux de participation estimé à environ un tiers. Les résultats de cette campagne montrent que 13 % des enfants (soit 81 enfants) avaient une plombémie >100 µg/l ; à Evin-Malmaison, la commune sous les vents dominants, ce taux atteint 17 % (Declercq et coll., 1995renvoi vers).
Devant l’absence de relais par les professionnels de santé, la Ddass du Pas-de-Calais a conclu à la nécessité de mettre en place un dispostif actif pérenne pour assurer le dépistage du saturnisme infantile dans l’environnement du site. Un dispositif pilote, visant les enfants inscrits pour la première fois à l’école maternelle, a été expérimenté en 1999-2000 dans les 5 communes les plus proches du site. Parmi les 345 enfants visés, 270 (78,3 %) ont pu être touchés et parmi ceux-ci, 30 (11,1 %) avaient une plombémie >100 µg/l (31,9 % à Evin-Malmaison) (Declercq et Beaubois, 2000renvoi vers). Le dispositif a été renouvelé de manière pérenne à partir de 2001 et élargi à 4 communes du Nord, sur la base des résultats de mesures de concentration de plomb dans le sol10 .
Les résultats sont restés sensiblement comparables d’une campagne à l’autre (tableau 12.III) et ce malgré les mesures de réduction des émissions mises en œuvre (Declercq et coll., 2003renvoi vers). L’usine a cessé brutalement ses activités en janvier 2003. Dès la campagne suivante, durant l’année scolaire 2003-2004, une chute importante des plombémies a été observée (figure 12.3Renvoi vers) : la prévalence du saturnisme infantile n’était plus que de 2,4 % dans les 5 communes du Pas-de-Calais (1,4 % dans l’ensemble des 9 communes visées par la campagne). La plombémie des enfants reste cependant plus élevée parmi les enfants à proximité du site (Declercq et coll., 2006renvoi vers). Une modélisation de l’exposition au plomb de l’enfant réalisée avant la fermeture du site à partir des données environnementales disponibles avait montré l’importance du sol et des poussières dans l’exposition de l’enfant mais n’avait pas permis d’anticiper l’importance de la baisse des plombémies (Prouvost et coll., 2003renvoi vers). En plus de ce programme de dépistage, il faut signaler l’étude épidémiologique réalisée par l’équipe universitaire Santé-travail de Lille en 1996-1997, qui avait porté sur 200 enfants de 8 à 11 ans des 10 communes proches du site : 13 enfants (6,5 %) avaient une plombémie ≥ 100 µg/l (Leroyer et coll., 2000renvoi vers).

Tableau 12.III Campagnes de dosage de la plombémie autour de sites industriels réalisées en France (1995-2006)

Site
Localisation
Type d’activité
Année (nombre de communes)
Population visée (âges)
Nombre de plombémies (Pb) (%)
Pb ≥ 100 μg/l (%)
Moyenne1 Pb (μg/l)
Pb max (μg/l)
Metaleurop-Nord
Fonderie de plomb
1995 (3)
6 mois–6 ans
621 ( 33)
91 (13,0)
48
395
  
1999–2000 (5)
345 (2–4 ans)
270 (78,3)
30 (11,1)
52
479
Noyelles-Godault (62)
 
2001–2002 (5)
392 (2–4 ans)
342 (87,2)
34 (10,3)
49
225
  
2002–2003 (5)
377 (2–4 ans)
307 (82,5)
34 (11,1)
52
251
  
2003–2004 (5)
407 (2–4 ans)
332 (81,6)
8 (2,4)
33
119
  
2003–2004 (9)
719 (2–4 ans)
576 (80,1)
8 (1,4)
30
119
  
2004–2005 (5)
365 (2–4 ans)
300 (82,2)
6 (2,0)
26
247
  
2004–2005 (9)
680 (2–4 ans)
535 (78,7)
10 (1,9)
25
247
  
2005–2006 (3)
223 (2–4 ans)
199 (89,2)
1 (0,5)
34
117
  
1996–1997
? (8–11 ans)
200
13 (6,5)
40
?
  
(10)
     
CFEC et STCM
Fabrication et recyclage de batteries
1995–1996
? (6 mois–6 ans)
125
24 (19,2)
?
<210
Outarville et Bazoches (45)
 
2001
? (6 mois–6 ans)
34
7 (20,6)
55,4
163
        
Métal Blanc
Recyclage de batteries
1998
32 (1–11 ans)
96 (72,7)
21 (21,9)
78
265
Bourg-Fidèle (08)
 
2000
67
29 (43,3)
2 (6,9)
(1–6 ans)
?
  
2002
145 (1–11 ans)
97 (66,9)
11 (11,3)
? 56
201
TPC Seurre
Composants électroniques
1999
355 (moins de
297 (83,7)
24 (8,1)
38,4
182
Seurre (21)
  
12 ans ?)
    
Metaleurop
Recyclage de batteries
1999
? (moins de
626 (90)
16 (2,6)
39,5
150
Arnas
  
13 ans ?)
    
Arnas (69)
  
? (1–6 ans)
188
9 (4,8)
43,0
?
Trémuson-Plérin
Ancienne mine
2001
?
29
1 (3,4)
?
?
Trémuson, Plérin (22)
       
        
Fonderie d’Us
Ancienne fonderie
2003
37 (1–12 ans)
33 (89,2)
2 (6,1)
?
?
Dampont, Closeaux (95)
  
27 (1–6 ans)
25 (92,6)
2 (8,0)
32,1
<200
La Poudrette Pavillons-sous-Bois (93)
Ancienne décharge
2004
? (1–10 ans)
196
0 (0,0)
14,4
94
CEAC Vierzon (18)
Fabrication de batteries
2004
?
10
0 (0,0)
?
?
CEAC Lille (59)
Fabrication de batteries
2003–2004
1 452 (4 mois–7 ans)
1 213 (83,5)
9 (0,7)
24,1
198
La Papeterie Saint-Laurent-le-Minier (30)
Ancien site minier
2005
73 (6 mois–17 ans)
41 (56,1)
2 (4,9)
Médiane < 10
<180
Tréfimétaux Couéron (44)
Ancienne fonderie
2005
100
64 (64,0)
0 (0,0)
?
?
Poteries Soufflenheim (67)
Poterie
2005
70
53 (75,7)
1 (1,9)
?
172

1 Moyenne géométrique

Figure 12.3 Évolution des plombémies des enfants autour du site Metaleurop de Noyelles-Godault

Usines CFEC, Outarville et STCM, Bazoches-les-Gallerandes, Loiret

Une campagne de dosage de la plombémie a été réalisée en 1995-1996 auprès des enfants de 6 mois à 6 ans des salariés de 2 entreprises du Loiret, l’usine de fabrication de batteries CFEC d’Outarville et l’usine STCM de recyclage des batteries de Bazoches. Parmi les 125 enfants concernés par cette campagne, 24 (19,2 %) avaient une plombémie >100 µg/l (Laforest et coll., 1999renvoi vers). Une nouvelle campagne a été mise en œuvre en 2001 à l’initiative de la Cire Centre-Ouest : elle a concerné 34 enfants de 6 mois à 6 ans, dont 7 (20,6 %) avaient une plombémie >100 µg/l (InVS, 2006renvoi vers; Bretin, 2007renvoi vers). Une nouvelle campagne a été mise en œuvre en 2001 à l’initiative de la Cire Centre-Ouest : elle a concerné 34 enfants de 6 mois à 6 ans, dont 7 (20,6 %) avaient une plombémie >100 µg/l (Ledrans et coll., 1999renvoi vers; InVS, 2006renvoi vers).

Usine Métal Blanc, Bourg-Fidèle, Ardennes

À la suite de la découverte d’une contamination des sols et des végétaux autour de l’usine de recyclage de batteries Métal Blanc de Bourg-Fidèle, une première campagne de dosage de la plombémie a été réalisée en 1998 auprès des 132 enfants de 1 à 11 ans résidant dans la commune ou dont l’un des parents travaillait sur le site. Parmi les 96 participants (72,7 %), 21 (21,9 %) avaient une plombémie >100 µg/l. En juin 2000, un dosage de la plombémie a été réalisé pour 29 enfants (43,3 % des 67 invités) qui n’avaient pas encore subi l’examen (nouveaux arrivants dans la commune, enfants de moins d’1 an ou n’ayant pas participé lors de la première campagne) : 2 enfants (6,9 %) avaient une plombémie >100 µg/l. Après la mise en place de mesures de réduction des émissions et de traitement du site, une nouvelle campagne a été réalisée en 2002 auprès des enfants de 1 à 11 ans habitant, scolarisés ou gardés dans la commune ou dont l’un des parents travaillait sur le site. Sur 145 enfants, 97 (66,9 %) ont participé à la campagne et 11 (11,3 %) avaient une plombémie >100 µg/l (Ledrans et coll., 1999renvoi vers; Schmitt et coll., 2002renvoi vers).

Usine TPC de Seurre, Côte d’Or

Après la découverte d’une pollution des sols par le plomb autour de l’usine de fabrication de composants électroniques de la sociéte TPC à Seurre (21), une campagne de dosage de la plombémie a été réalisée en 1999 auprès des enfants résidant, scolarisés ou gardés dans un périmètre déterminé à partir des données disponibles sur les concentrations de plomb dans le sol (soit 355 enfants visés). Un dosage de la plombémie a pu être réalisé pour 297 enfants de moins de 12 ans (83,7 %) : 24 enfants (8,1 %) avaient une plombémie >100 µg/l (InVS, 1999renvoi vers).

Usine Metaleurop, Arnas, Rhône

Après la constatation d’une contamination par le plomb des sols et des végétaux autour de l’usine Metaleurop d’Arnas (recyclage de batterie), une campagne de dosage de la plombémie a été réalisée parmi les enfants résidant, scolarisés ou gardés à moins d’1 km du site ou dont l’un des parents travaillait sur le site : la participation ne peut être établie précisément mais paraît importante (probablement de l’ordre de 90 %). Sur 626 enfants, 16 (2,6 %) avaient une plombémie >100 µg/l (9 enfants sur 188 entre 1 et 6 ans soit 4,8 %) (Fabres et coll., 1999renvoi vers).

Ancien site minier de Trémuson-Plérin, Côtes d’Armor

Les résultats d’analyses environnementales et d’une modélisation de la plombémie attendue (Glorennec et Julien-Robert, 2001renvoi vers) dans la population riveraine de l’ancien site minier du village « Les Mines », près des communes de Trémuson et Plérin dans les Côtes d’Armor, ont conduit à la mise en œuvre d’une campagne de dosage de la plombémie en 2001. Parmi 29 enfants, un enfant (3,4 %) avait une plombémie >100 µg/l (InVS, 2006renvoi vers; Bretin, 2007renvoi vers).

Usine d’Us, Val d’Oise

Les résultats d’analyses de plomb dans les sols et les végétaux autour de l’ancienne fonderie d’Us, dont l’activité avait cessé en 2000, ont motivé la réalisation d’une campagne de dosage de la plombémie. Cette campagne concernait théoriquement les enfants de 6 ans ou moins des 2 hameaux situés à moins de 500 m du site (soit 27 enfants), mais la présentation publique du dispositif a indiqué que les enfants de plus de 6 ans seraient également accueillis. Finalement, un dosage de la plombémie a été réalisé pour 33 des 37 enfants de 12 ans ou moins (89,2 %), et pour 25 enfants de 6 ans ou moins sur 27 (92,6 %). Sur 33 enfants, 2 (6,1 %) avaient une plombémie >100 µg/l, soit 2 enfants sur 25 de moins de 6 ans (8,0 %) (Ddass du Val d’Oise, 2003renvoi vers).

Site de la Poudrette, Pavillons-sous-Bois, Seine-Saint-Denis

À la suite des résultats d’une Évaluation détaillée des risques (EDR) autour de l’ancienne décharge de la Poudrette, à Pavillons-sous-bois, un dosage de la plombémie a été réalisé parmi 196 enfants de 1 à 10 ans. Aucun enfant n’avait de plombémie >100 µg/l (Bretin, 2007renvoi vers).

Usine CEAC de Vierzon, Cher

Un dosage de la plombémie a été réalisé chez 10 enfants résidant à proximité de l’usine de fabrication de batteries CEAC de Vierzon en 2004 : aucun enfant n’avait de plombémie >100 µg/l (Bretin, 2007renvoi vers).

Usine CEAC de Lille, Nord

Sur une initiative de l’équipe universitaire Santé-travail de Lille, une campagne de dosage de la plombémie a été réalisée entre novembre 2003 et décembre 2004 parmi les enfants de moins de 7 ans scolarisés dans les 12 écoles maternelles ou accueillis dans les 2 crèches situées dans un rayon d’1 km autour de l’usine de fabrication de batteries CEAC de Lille. Le dosage a pu être réalisé pour 1 213 enfants sur 1 452 (83,5 %). Seulement 9 enfants (0,7 %) avaient une plombémie >100 µg/l (Nisse et coll., 2005renvoi vers), alors que les résultats des analyses de plomb dans le sol et les poussières témoignaient d’une contamination significative mais très hétérogène, probablement en relation avec des sources multiples de contamination.

Site minier de Saint-Laurent-le-Minier, Gard

Après la découverte en 2004 d’une contamination des sols par le plomb (et d’autres contaminants comme l’arsenic) autour de l’ancien site minier de La Papeterie, une modélisation de la plombémie attendue selon la méthodologie proposée par l’InVS (2002renvoi vers) a été réalisée et ses résultats ont motivé une campagne de dosage de la plombémie auprès de tous les enfants et adolescents (6 mois-17 ans) et des femmes enceintes ou allaitantes domiciliés dans la commune de Saint-Laurent-le-Minier. En ce qui concerne les enfants, la plombémie a pu être mesurée pour 41 (16 enfants de moins de 7 ans) sur 73 (56,1 % pour l’ensemble des enfants et 80 % des enfants de moins de 7 ans). Deux enfants (4,9 %), tous les deux âgés de moins de 7 ans (soit 12,5 % dans cette classe d’âge), avaient une plombémie >100 µg/l. Une femme enceinte et 2 femmes allaitantes ont participé à la campagne et avaient toutes les 3 une plombémie inférieure à 100 µg/l (Cicchelero, 2006renvoi vers).

Ancienne fonderie de Couéron, Loire-Atlantique

Une campagne de dosage de la plombémie a été réalisée, en 2005, auprès de 64 enfants vivant à proximité d’une ancienne fonderie de plomb puis de cuivre (fermée en 1989) : aucun enfant n’avait une plombémie >100 µg/l (Bretin, 2007renvoi vers).

Poteries de Soufflenheim, Bas-Rhin

Après signalement de 3 cas de saturnisme à la Ddass, 53 enfants (au départ des enfants de potiers mais en fait 2 classes d’école maternelle, soit 70 enfants) ont subi un dosage de la plombémie, en 2005. Un seul enfant (1,9 %) avait une plombémie >100 µg/l (plombémie maximale : 172 µg/l) (Girard, 2005renvoi vers; Bretin, 2007renvoi vers).

Commentaires du bilan des campagnes de dépistage

En termes d’évaluation de la prévalence du saturnisme infantile autour de sites industriels, entre 1995 et 2006, 5 993 enfants riverains de 13 sites industriels11 (dont plus de la moitié autour du site Metaleurop de Noyelles-Godault) ont subi un dosage de la plombémie. Pour 341 de ces enfants (soit 5,7 %), la plombémie était >100 µg/l12 .
Ces résultats témoignent d’un effort important pour mieux connaître l’imprégnation par le plomb des jeunes enfants autour des sites industriels. Cependant, étant donné le nombre de sites potentiellement concernés (probablement de l’ordre de plusieurs centaines) et le caractère non systématique des activités de dosage de la plombémie, ces données ne peuvent prétendre à l’exhaustivité. Elles ne permettent donc pas d’estimer le nombre d’enfants concernés en France, en l’absence de données sur les effectifs d’enfants riverains de sites industriels et en raison de probables variations importantes dans les circonstances ou les modalités d’exposition (site en activité ou non, type d’activité, quantités rejetées, modalités de rejets).
Ces résultats confirment l’impact de ces installations sur l’imprégnation en plomb des enfants, même si les résultats observés ne sont pas toujours aussi préoccupants que ce qui a été observé autour du site Metaleurop de Noyelles-Godault avant la cessation des activités ou autour du site Métal Blanc de Bourg-Fidèle et si les niveaux de plombémie atteints restent inférieurs à ce qui a pu être observé lors de contaminations liées aux peintures au plomb dans un habitat dégradé ou autour de sites industriels de l’est de l’Union européenne (voir par exemple, Fischer et coll., 2002renvoi vers). Autour des sites industriels, les enfants habitant le plus près du site et/ou dont un des parents travaille sur le site ont généralement une plombémie significativement plus élevée, ce qui confirme le rôle du site industriel comme source d’exposition. Cependant, les données environnementales disponibles au cours de ces différentes campagnes n’ont pas permis d’analyser les relations entre concentration en plomb dans le sol et plombémie de l’enfant, comme cela a pu être fait dans des travaux américains (Lanphear et coll., 1998renvoi vers) ou australiens (Willmore et coll., 2006renvoi vers).
En ce qui concerne la qualification qu’il convient de donner à ces campagnes de dosage de la plombémie, le terme de dépistage peut paraître le plus souvent inadéquat, si on se réfère aux critères de l’OMS (Wilson et Junger, 1968renvoi vers), en particulier au critère de continuité (Oberlé et coll., 2006renvoi vers). En effet, à l’exception des activités mises en place autour du site Metaleurop de Noyelles-Godault, qui ont pu bénéficier d’une pérennité relative depuis le milieu des années 1990, la plupart des activités décrites ont été ponctuelles.
L’examen des documents décrivant ces activités, quand il a été possible, confirme que si la prise en charge des cas dépistés a bien été prévue et mise en œuvre, les objectifs présentés sont le plus souvent de nature cognitive et visent à apprécier la prévalence du saturnisme dans l’environnement de sites (cf. ci-dessus). Il semble que la plupart du temps les résultats obtenus aient été alors utilisés, au moins partiellement, dans l’évaluation et la gestion des risques sanitaires autour de ces sites, ce qui n’est pas sans poser un certain nombre de problèmes. L’absence ou le nombre jugé faible de cas de saturnisme caractérisé (plombémie ≥ 100 µg/l) a pu parfois entrer en contradiction avec les résultats d’une évaluation quantitative des risques sanitaires et éventuellement faire renoncer à imposer des mesures de prévention, cela alors même que l’impact de l’activité sur l’imprégnation par le plomb des enfants riverains pouvait être objectivé et que des effets sur la santé des dérivés du plomb ont pu être observés à des niveaux de plombémie inférieurs à 100 µg/l (Canfield et coll., 2003renvoi vers; Lanphear et coll., 2005renvoi vers). La gestion des risques autour de ces sites ne doit donc pas reposer uniquement sur l’utilisation de la valeur de 100 µg/l qui n’est pas une valeur seuil de plombémie mais un niveau justifiant une prise en charge individuelle de l’enfant. D’autre part, il nous paraît inacceptable d’utiliser la réalisation d’un examen invasif chez des jeunes enfants comme seule base pour guider la gestion des risques autour de ce type d’installation ou comme seule réponse aux inquiétudes de la population.
Enfin, la réalisation de campagnes d’évaluation de plombémies a pu être utilisée dans une optique de surveillance et d’évaluation des mesures de prévention. Cela ne va pas non plus sans poser un certain nombre de problèmes : prise en compte des facteurs de confusion, limitations statistiques (Mushak, 2003renvoi vers; Lorenzana et coll., 2003renvoi vers). Ainsi, les campagnes répétées autour du site Métal Blanc de Bourg-Fidèle (Schmitt et coll., 2002renvoi vers) ont montré une baisse moyenne des plombémies sans pouvoir réellement conclure sur l’effet des mesures de prévention mises en œuvre. Les campagnes répétées autour du site Metaleurop de Noyelles-Godault ont permis d’observer une remarquable stabilité des plombémies des enfants malgré le déploiement d’un certain nombre de mesures de prévention, dont l’efficacité pouvait donc être jugée insuffisante. En revanche, la cessation des activités du site en janvier s’est accompagnée d’une brusque chute des plombémies, qui n’avait pas été anticipée à partir d’une modélisation de l’exposition de l’enfant (Prouvost et coll., 2003renvoi vers). Hilts (2003renvoi vers) a également observé une baisse des plombémies des enfants autour du site de Trail (Colombie Britannique), après réduction des émissions, qui était plus importante que ne l’avait prévu un exercice de modélisation.
En conclusion, ces résultats discordants pointent la nécessité, pour réduire l’exposition au plomb des enfants, de mieux connaître les modalités de contamination des enfants autour des sites industriels et en particulier d’identifier les sources les plus actives de plomb mobile et biodisponible.

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