2011


ANALYSE

6-

Conséquences sur la santé mentale

Les problèmes de santé mentale en lien avec le travail prennent une importance qui semble actuellement grandissante dans notre société. Parmi les populations salariées, de nombreux médecins du travail rapportent une fréquence de plus en plus élevée de problèmes de santé mentale au travail. Il est probable que les professions indépendantes n’échappent pas à cette situation. Parallèlement à cette prise de conscience sur le terrain, la littérature épidémiologique dans ce domaine, véritablement initiée depuis la fin des années 1970, s’est depuis considérablement enrichie pour aboutir aujourd’hui à un nombre très important d’études permettant d’engranger certaines connaissances solides.
Ce chapitre, après une rapide mise au point sur la définition des concepts abordés, présentera une synthèse des résultats épidémiologiques sur les liens entre les expositions psychosociales au travail et des indicateurs de santé mentale (symptômes, pathologies mentales, problèmes d’alcool, troubles du sommeil et suicide). La dernière partie du chapitre abordera la situation chez les indépendants, malgré la rareté des données épidémiologiques. Par ailleurs, les mécanismes physiopathologiques ne seront pas abordés ici ; ils font l’objet d’un chapitre dédié.

Définitions des concepts utilisés

La notion de santé mentale est très vaste. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) considère que « posséder une bonne santé mentale, c’est parvenir à établir un équilibre entre tous les aspects de sa vie : physique, psychologique, spirituel, social et économique ». En épidémiologie, l’atteinte de la santé mentale fait référence à une altération de l’état de santé dont le degré d’intensité varie depuis la présence de divers symptômes relatifs à la sphère mentale jusqu’à l’existence de pathologies psychiatriques avérées. Dans le champ qui nous occupe ici (santé mentale et activité professionnelle), les syndromes dépressifs sont de très loin les plus étudiés.

Outils de mesure de la santé mentale en épidémiologie

Le recueil de données distingue classiquement deux types d’outils, les listes de symptômes et les outils d’entretien dits « diagnostic » (Kovess, 1996renvoi vers). Les premiers sont les plus utilisés ; le recours aux outils « diagnostics », plus contraignant de par sa longueur et la nécessité de l’intervention d’un tiers, est plus récent et moins répandu. Les listes de symptômes sont généralement proposées en autoquestionnaire. Elles ne permettent pas de porter un diagnostic et recensent généralement des symptômes physiques et psychiques décrits dans l’anxiété et la dépression. Le General Health Questionnaire (GHQ) (Goldberg et Hillier, 1979renvoi vers) et le Center for Epidemiologic Studies Depression Scale (CES-D) (Fuhrer et Rouillon, 1989renvoi vers) sont les questionnaires les plus utilisés dans la littérature épidémiologique. Les outils diagnostics sont des instruments administrés par un tiers permettant une interview « en profondeur », destinés à couvrir toutes les pathologies psychiatriques et à fournir des diagnostics. Le Composite Interview Diagnostic Schedule (CIDI) (Kessler et Ustun, 2004renvoi vers) et le Mini International Neuropsychiatric Interview (MINI) (Sheehan et coll., 1998renvoi vers) en sont les deux principaux représentants en épidémiologie. Enfin, plus récemment, les études s’appuient aussi sur des diagnostics cliniques établis dans le cadre d’hospitalisations ou de consultations spécialisées.
On notera qu’il existe également des échelles passant en revue un ensemble de symptômes de stress perçu tels que des manifestations cardiovasculaires (tachycardie, sueurs...), digestives (coliques, maux d’estomac...), émotionnelles (nervosité, hypersensibilité, angoisse...) ou comportementales (troubles alimentaires, conduites addictives...). La présentation de ces échelles est abordée dans le chapitre sur les facteurs de stress et les mécanismes psychologiques.

Outils de mesure des expositions professionnelles

Pour ce qui est des expositions professionnelles, le terme de stress, tantôt employé pour désigner un facteur d’exposition ou un effet sur la santé ne sera pas utilisé pour caractériser les expositions. On préfèrera le terme d’expositions psychosociales au travail, exposition aux facteurs de risque psychosociaux au travail.
Les études épidémiologiques en santé mentale analysées dans ce chapitre s’appuient très majoritairement, comme c’est le cas pour les autres champs de morbidité, sur deux modèles d’exposition aux facteurs psychosociaux au travail, les modèles de Karasek (déséquilibre demande psychologique/latitude décisionnelle) et de Siegrist (déséquilibre effort/récompense). Les travaux intégrant d’autres concepts plus récents, tels que la justice organisationnelle ou l’insécurité d’emploi, seront également abordés. L’ensemble de ces concepts est présenté de manière détaillée dans le chapitre sur les modèles et concepts pour l’évaluation des facteurs psychosociaux au travail en épidémiologie.

Expositions psychosociales au travail et troubles dépressifs et anxio-dépressifs

La littérature épidémiologique dispose aujourd’hui d’un important corpus d’études, méthodologiquement rigoureuses, permettant de considérer qu’il existe des liens entre des expositions professionnelles psychosociales et une altération de la santé mentale, principalement au travers d’une symptomatologie dépressive. De plus, la plupart des auteurs s’accordent sur la nature causale de ces liens, bien qu’il persiste encore quelques réticences.

Données épidémiologiques

En 2008, trois revues de la littérature épidémiologique sont parues dans ce champ (Bonde, 2008renvoi vers ; Netterstrom et coll., 2008renvoi vers ; Siegrist, 2008renvoi vers). Ces revues, basées exclusivement sur des études longitudinales de bonne qualité (entre 12 et 14 selon les auteurs), concluent toutes les trois au rôle prédictif, toutefois modéré, de certaines expositions psychosociales au travail, sur la survenue de syndromes dépressifs. Par ailleurs, ces synthèses de littérature viennent compléter la méta-analyse de Stansfeld et Candy menée en 2006 sur le sujet. Leurs résultats respectifs sont tout à fait convergents (Stansfeld et Candy, 2006renvoi vers). Les expositions psychosociales explorées sont pour l’essentiel issues du questionnaire de Karasek. Les syndromes dépressifs sont évalués, à peu près à part équivalente, sur la base des symptômes dépressifs issus d’autoquestionnaires et des diagnostics de dépression issus de critères du Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (DSM). Du fait de critères d’inclusion légèrement différents selon les auteurs, les résultats ne sont pas strictement superposables mais leurs conclusions demeurent très similaires. Les valeurs des risques moyens sont présentées dans le tableau 6.Irenvoi vers (estimés pour deux revues de littérature). Dans la plupart des études considérées, les risques sont inférieurs à 2 et le plus souvent inférieurs à 1,5. À noter que les risques associés à d’autres atteintes de la santé, en particulier les maladies cardiovasculaires, sont de même ordre de grandeur. Les auteurs s’accordent sur le rôle prédictif supérieur de la combinaison des dimensions, sous la forme de job strain (demande psychologique élevée combinée à une faible latitude décisionnelle) ou d’iso-strain (job strain combiné à un faible soutien social) par rapport à l’introduction des dimensions de manière indépendante. En revanche, la compilation de ces études prospectives montre que le poids attribuable à chacune des dimensions du modèle n’est pas toujours consensuel. Il est possible que celui-ci varie dans le temps du fait de l’évolution du monde du travail, en particulier pour le soutien social, mais aussi selon les populations étudiées, notamment pour la dimension « latitude décisionnelle » (Netterstrom et coll., 2008renvoi vers). Par ailleurs, l’intensité des risques ne semble pas varier selon le sexe (Netterstrom et coll., 2008renvoi vers).

Tableau 6.I Risques de troubles dépressifs associés aux dimensions du modèle de Karasek

 
Risques estimés selon les expositionsa
 
Fortes exigences
Faible latitude
Faible soutien
Job strain
Bonde, 2008renvoi vers
1,31 (1,08-1,59)
1,20 (1,08-1,39)
1,44 (1,24-1,68)
-
Stansfeld et Candy, 2006renvoi vers
1,39 (1,15-1,68)
1,23 (1,08-1,40)
1,32 (1,21-1,44)
1,81 (1,06-3,1)

aOdds ratio ou risques relatifs (intervalle de confiance à 95 %)

Le nombre d’études disponibles ayant recours au modèle de Siegrist n’autorise pas pour l’instant la conduite de méta-analyses ou de synthèses réellement pertinentes. Pour autant, les études prospectives utilisant ce modèle ont été en forte augmentation ces dernières années et celles-ci permettent déjà de dégager des premiers enseignements. Signalons cependant que la synthèse des résultats des études utilisant le modèle de Siegrist se heurte à l’hétérogénéité dans le traitement des réponses. À ce propos, Niedhammer et coll. (2004)renvoi vers ont montré que l’intensité des associations pouvait différer selon la manière de formuler le score du déséquilibre (ratio en continu, en quartiles, supérieur à 1...). Il s’agit probablement d’éléments à prendre en considération pour les études futures. Le tableau 6.IIrenvoi vers présente des résultats issus d’études longitudinales. Les liens mis en évidence entre les dimensions explorées par Siegrist et les troubles dépressifs semblent plus constants et d’une intensité plus élevée que ceux rapportés pour le modèle de Karasek (Siegrist, 2008renvoi vers). Le rôle prédictif du modèle de Siegrist probablement supérieur à celui de Karasek semble se retrouver aussi pour les pathologies cardiovasculaires.

Tableau 6.II Risques de troubles dépressifs associés aux dimensions du modèle de Siegrist

 
Déséquilibre Efforts/Récompensesa
Mesure santé mentale
Ratio Efforts/récompenses
Godin et coll., 2005renvoi vers
   
Hommes
2,8 (1,3-5,7)
Symptômes dépressifs
Quartile supérieur
Femmes
4,6 (2,3-9,0)
Symptômes dépressifs
Quartile supérieur
Stansfeld et coll., 1999renvoi vers
   
Hommes
2,6 (1,8-3,6)
GHQc
Définition imprécise
Femmes
1,7 (1,0-2,9)
GHQc
Définition imprécise
Kivimäki et coll., 2007renvoi vers
2,8 (1,6-2,1)
GHQc
Quartile supérieur
 
1,5 (1,2-1,8)
Diagnostic médecin
Quartile supérieur
Stansfeld et Candy, 2006renvoi versb
1,8 (1,4-2,3)
  

aOdds ratio ou risques relatifs (intervalle de confiance à 95 %) ; b Méta-analyse, 2 études : Godin et coll., 2005 et Stansfeld et coll., 1999 ; c GHQ : General Health Questionnaire

Les relations entre expositions psychosociales et troubles dépressifs mises en évidence par les études épidémiologiques sont sous-tendues par les mécanismes neurobiologiques du stress chronique qui fragiliseraient le psychisme des sujets les rendant plus vulnérables à la dépression (voir le chapitre sur les mécanismes associant stress et pathologies).

Limites et réserves sur la causalité

La nature causale de la relation entre expositions psychosociales au travail et altération de la santé mentale demeure cependant encore parfois discutée, notamment par Bonde en raison des limites des études épidémiologiques dans ce domaine. La non indépendance des mesures d’exposition et de santé (circularité des données) (Waldenstrom et coll., 2008renvoi vers ; Wieclaw et coll., 2008renvoi vers), la non prise en compte de certains facteurs de confusion personnels (Macleod et coll., 2001renvoi vers), l’hétérogénéité des outils utilisés, tant pour la mesure de l’exposition que pour celle de la santé et le schéma d’étude transversal sont les principales limites régulièrement mises en avant (Virtanen, 2008renvoi vers). Certaines de ces limites sont plus facilement contournables. Les études de type longitudinal sont toujours encouragées et ne sont désormais pas rares. Le problème de circularité des données demeure assez récurrent même si l’établissement du diagnostic de santé psychique par une tierce personne peut y pallier. De même, le recours à une mesure de la santé plus objective via, par exemple les arrêts maladies pour problème dépressif, commence à apparaître et donne des résultats plutôt concluants. L’étude longitudinale menée par Inoue et coll. (2009) montre qu’une latitude décisionnelle élevée au travail est associée à un risque moindre d’arrêt maladie de longue durée. Enfin, quelques auteurs ont montré que l’effet « reverse » (ou réciproque) dans la relation facteurs psychosociaux au travail et santé mentale pouvait être modeste (De Lange et coll., 2009renvoi vers).
Deux éléments font souvent l’objet de larges débats quant à leur rôle dans la relation entre expositions psychosociales au travail et atteintes de la santé mentale : il s’agit du type de personnalité (affect négatif, pauvre estime de soi...) et de l’existence d’antécédents psychiatriques. Les études introduisant des variables de personnalité montrent que les liens existent indépendamment du type de personnalité (Stansfeld et coll., 1999renvoi vers ; Tennant, 2001renvoi vers ; Paterniti et coll., 2002renvoi vers ; Melchior et coll., 2007renvoi vers). Par ailleurs, pour ce qui concerne la prise en compte de l’existence d’antécédents psychiatriques personnels (et familiaux) voire même l’exclusion dans les analyses de ces personnes, celle-ci semble nécessaire afin de ne pas biaiser l’interprétation des résultats (Melchior et coll., 2007renvoi vers ; Stansfeld et coll., 2008renvoi vers). Les études montrent qu’en effet, l’existence d’antécédents psychiatriques est très prédictive de la survenue d’un nouvel épisode d’atteinte de la santé psychique. Le problème est assez similaire pour la prise en compte d’événements potentiellement traumatisants, soit survenus récemment, soit survenus dans l’enfance. L’intensité de leur association avec les problèmes de santé mentale est généralement forte, ce qui justifie leur prise en compte comme facteur d’ajustement.
Les modifications engendrées par la conduite d’actions de prévention constituent un argument supplémentaire dans la mise en évidence d’une relation causale. Malheureusement, dans ce domaine, force est de constater que les études qui évaluent l’efficacité de ces actions sont encore peu nombreuses.
Enfin, il existe encore un déficit de connaissance quant aux effets liés à la durée et l’intensité des expositions en cause.
Au final, même si pour de très nombreux auteurs les expositions psychosociales au travail peuvent générer des troubles dépressifs, ces mêmes auteurs soulignent également la nécessité de considérer que l’existence préalable (au cours du parcours scolaire par exemple ou à l’entrée dans la vie active) de troubles de santé mentale peut induire une sélection à l’emploi et conduire à occuper des emplois plus exposés aux risques psychosociaux. Ainsi, des personnes ayant rencontré des difficultés pour mener à bien un parcours scolaire ou une formation professionnelle peuvent être amenées à occuper des emplois moins favorisés socialement et donc généralement plus exposés aux contraintes psychosociales. Cet autre sens du lien entre santé mentale et expositions psychosociales au travail ne doit pas être négligé (de Lange et coll., 2005renvoi vers ; Stansfeld et coll., 2008renvoi vers ; Dalgard et coll., 2009renvoi vers).

Études introduisant des éléments novateurs enrichissant le débat

Afin d’enrichir les connaissances et de mieux éclairer les problèmes de causalité dans ce champ, certaines études font appel à des schémas d’étude plus originaux dont les résultats restent néanmoins à confirmer.
Ainsi, certaines études longitudinales ont pu inclure plusieurs mesures d’expositions psychosociales et décrire les conséquences de leurs évolutions dans le temps sur les troubles dépressifs. Globalement, les liens mis en évidence sont d’autant plus forts que les expositions sont prolongées ; de plus, les liens les plus forts sont observés pour les expositions les plus récentes (Godin et coll., 2005renvoi vers ; Clays et coll., 2007renvoi vers ; Wang et coll., 2009renvoi vers).
La recherche de modification d’effet par l’introduction dans les analyses de la classe sociale ou d’un indice de niveau économique a été conduite par certains auteurs (Tennant, 2001renvoi vers ; Wege et coll., 2008renvoi vers ; Cohidon et coll., 2009arenvoi vers ; Simmons et Swanberg, 2009renvoi vers). Ces études suggèrent que l’intensité des liens observés entre expositions psychosociales au travail et santé mentale puisse différer selon la classe sociale ou un indice de niveau économique. L’étude de Simmons et Swanberg décrit des liens significatifs entre les fortes exigences, le faible soutien social et l’existence de symptômes dépressifs, chez les travailleurs « non pauvres » ; en revanche, cette association disparaît au profit d’un lien avec l’insécurité d’emploi chez les travailleurs pauvres (Simmons et Swanberg, 2009renvoi vers). Cohidon et coll. (2009a)renvoi vers observent, dans une étude transversale, que seule la dimension du soutien social est associée à une symptomatologie dépressive au sein de chacun des groupes socioprofessionnels (cadres, professions intermédiaires, employés et ouvriers). De tels résultats avaient été décrits par Tennant (2001)renvoi vers. Ils ont également été rapportés par Wege et coll. (2008)renvoi vers, cette fois en utilisant le modèle de Siegrist.

Études incluant de nouveaux concepts sur les expositions psychosociales

Les études prenant en compte des facteurs psychosociaux autres que ceux inclus dans les modèles de Karasek et de Siegrist, sont pour l’instant bien moins fréquentes et ne permettent pas encore de généraliser les résultats. Cependant, plusieurs d’entre elles ayant recours à des schémas d’étude de bonne qualité montrent des résultats convaincants. L’étude longitudinale de Ferrie et coll. (2006)renvoi vers décrit le rôle prédictif de l’injustice relationnelle dans le travail sur la survenue d’un mal-être psychologique. De plus, cette étude montre les effets respectivement bénéfiques et délétères sur la santé psychique d’une réduction de l’exposition d’une part et d’une aggravation de cette exposition d’autre part. Concernant l’exposition à la violence au travail (en interne), Kivimäki et coll. (2003)renvoi vers rapportent dans une étude prospective, une forte association (OR=4,81 ; IC 95 % [2,46-9,40]) avec la survenue d’une dépression dans les deux années suivant la mesure de l’exposition.
L’insécurité d’emploi est également un concept introduit récemment dans les études et qui prend de plus en plus d’importance compte tenu de la conjoncture actuelle. En 2006, Stansfeld et Candy rapportaient un risque moyen associé à l’insécurité d’emploi (calculé sur deux études) de 1,33 (IC 95 % [1,06-1,37]) pour la présence de symptômes anxio-dépressifs (Stansfeld et Candy, 2006renvoi vers). L’étude prospective de Rugulies et coll. menée sur une cohorte de plus de 4 000 travailleurs danois décrit une prévalence deux fois supérieure (RR=2,09 ; IC 95 % [1,04-4,20]) de symptômes dépressifs parmi les hommes exposés à une insécurité d’emploi (Rugulies et coll., 2006renvoi vers).
Enfin, il paraît intéressant de signaler que les études combinant plusieurs outils de mesure des expositions commencent à se multiplier et que leurs résultats semblent justifier ces combinaisons (De Jonge et coll., 2000renvoi vers ; Tsutsumi et coll., 2001renvoi vers ; Godin et Kittel, 2004renvoi vers ; Ylipaavalniemi et coll., 2005renvoi vers ; Kivimäki et coll., 2007renvoi vers ; Dragano et coll., 2008renvoi vers). Kivimäki a par exemple montré le pouvoir prédictif supérieur sur les symptômes dépressifs de l’exposition simultanée au déséquilibre efforts/récompenses et à l’injustice organisationnelle, par rapport à leur prise en compte isolée. Il est vrai d’ailleurs que la plupart des auteurs s’accordent déjà sur le caractère incomplet des deux modèles de référence tels ceux de Karasek et de Siegrist. Des travaux pluridisciplinaires psychosociologique et psychométrique doivent être développés avant de pouvoir proposer des outils plus adaptés aux changements du monde du travail.
Pour ce qui concerne les troubles anxieux, ils sont la plupart du temps simultanément explorés avec les symptômes dépressifs (comme dans le questionnaire GHQ). En revanche, les études sur les troubles anxieux pris isolément sont encore trop peu nombreuses et non convergentes pour tirer des conclusions (Plaisier et coll., 2007renvoi vers ; Waldenstrom et coll., 2008renvoi vers ; Wieclaw et coll., 2008renvoi vers). Ainsi, les études de Plaisier et coll. (2007)renvoi vers et Waldenstrom et coll. (2008)renvoi vers rapportent un excès de risque non significatif entre les fortes exigences et les troubles anxieux. Ce risque augmente et devient significatif dans le cas d’une association avec des troubles dépressifs. L’étude de Wieclaw et coll. (2008)renvoi vers montre le rôle prédictif de la faible latitude décisionnelle sur la survenue de troubles anxieux mais, en revanche dans cette étude, l’exposition à une forte demande est associée à une diminution de l’anxiété.

Expositions psychosociales au travail et autres effets liés à la santé mentale

Concernant d’autres indicateurs classiquement inclus dans les études relatives à la sphère mentale, telles les conduites addictives ou les troubles du sommeil (qui peuvent faire partie d’un état de stress chronique), la littérature épidémiologique est moins abondante et généralement moins concluante.

Troubles du sommeil

Concernant le lien entre expositions psychosociales et troubles du sommeil, il existe trop peu d’études épidémiologiques et encore trop de résultats divergents pour tirer des conclusions générales. De plus, la plupart des études disponibles sont de type transversal et ne permettent pas de se prononcer sur la causalité (Linton, 2004renvoi vers ; Akerstedt, 2006renvoi vers).
Parmi les études transversales, les facteurs psychosociaux au travail les plus souvent associés à des troubles du sommeil sont les fortes exigences (modèle de Karasek) et le déséquilibre effort/récompense (modèle de Siegrist). Quelques études longitudinales disponibles permettent d’envisager sérieusement un rôle prédictif sur la survenue de troubles du sommeil. Ainsi Linton (2004)renvoi vers montre, dans un suivi d’une année, un risque deux fois plus élevé de développer des troubles du sommeil lors d’une exposition au job strain. Un faible soutien social au travail serait également prédictif de tels troubles (OR=1,64 ; IC 95 % [1,06-2,54]). Dans un suivi d’une cohorte de travailleurs danois (environ 2 000 personnes), Rugulies et coll. (2009)renvoi vers décrivent l’effet de l’exposition au déséquilibre effort/récompense sur les difficultés d’endormissement et de ré-endormissement mais uniquement chez les hommes. Enfin, l’étude longitudinale d’Ota et coll. (2009)renvoi vers est intéressante dans le sens où elle explore non seulement la survenue des troubles du sommeil mais également leur persistance en fonction d’expositions psychosociales au travail via les questionnaires de Karasek et de Siegrist. De plus, l’insomnie est définie en référence aux critères précis de la Classification internationale des maladies (CIM-10) et du DSM-IV. Les résultats montrent l’effet d’un faible soutien social au travail et de l’exposition au déséquilibre effort/récompense sur la persistance des insomnies (pas de liens observés avec le job strain) ; en revanche, la survenue d’insomnies est liée à l’exposition au job strain et au surinvestissement dans le travail. L’interprétation de ces résultats n’est pas simple. Les résultats assez hétérogènes de ces quelques études justifient pleinement la conduite de nouvelles études.

Conduites addictives

Problèmes d’alcool

Les indicateurs sanitaires utilisés pour décrire les problèmes d’alcool sont assez hétérogènes. Ils peuvent être soit relatifs à des consommations (combinant plus ou moins fréquence et quantité) soit plus globalement explorer un problème d’alcool tel qu’une consommation nocive ou une dépendance.
Une revue de la littérature a été menée en 2006 par Siegrist et Rodel sur 18 études à la fois longitudinales (6/18) et transversales (Siegrist et Rodel, 2006renvoi vers). Environ la moitié seulement de ces études décrit un rôle prédictif significatif des contraintes psychosociales au travail sur les problèmes d’alcool. On notera par ailleurs que la proportion d’études concluant dans ce sens est supérieure parmi les études prospectives (par rapport aux études transversales).
Deux études méritent d’être soulignées. Dans l’étude prospective de Head et coll. sur la cohorte des fonctionnaires britanniques Whitehall, les expositions psychosociales ont été mesurées à la fois par le questionnaire de Siegrist et celui de Karasek. Seuls les salariés (hommes) exposés au déséquilibre effort/récompense présentent un excès de risque de dépendance alcoolique (OR=1,93 ; IC 95 % [1,4-2,7]). Aucune association n’est observée avec les dimensions de Karasek (Head et coll., 2004renvoi vers). En revanche, Hemmingsson et Lundberg, dans une étude longitudinale menée auprès de 50 000 jeunes hommes, décrivent le rôle prédictif de l’exposition au travail dit « passif », défini par une faible latitude décisionnelle combiné à une faible demande, sur la survenue de troubles liés à une alcoolisation chronique excessive (RR=1,7 ; IC 95 % [1,2-2,3]) (Hemmingsson et Lundberg, 1998renvoi vers). Il apparaît nécessaire d’améliorer les connaissances dans ce domaine.

Consommation de psychotropes

La consommation de psychotropes commence désormais à être utilisée comme indicateur d’atteinte de la sphère mentale en épidémiologie de la santé au travail. Bien qu’il s’agisse la plupart du temps de données déclaratives de consommation, celles-ci sont souvent considérées comme plus objectives qu’un questionnaire de symptômes. En 2004, Pelfrene et coll. ont décrit l’association entre l’exposition au job strain (fortes exigences et faible latitude décisionnelle) et la consommation de benzodiazépines mais dans le cadre d’une analyse transversale (Pelfrene et coll., 2004renvoi vers). En revanche, l’étude longitudinale de Virtanen et coll. rapporte que les hommes exposés au job strain ou à de fortes exigences présentent un risque accru de consommation d’antidépresseurs (Virtanen et coll., 2007renvoi vers). L’étude de Bœuf-Cazou et coll. menée dans la cohorte VISAT montre le rôle prédictif de la faible latitude décisionnelle et des faibles récompenses sur l’initiation d’une consommation de psychotropes, mais uniquement chez les femmes (Bœuf-Cazou et coll., 2010renvoi vers). Pour ce qui concerne le passage à la chronicité d’une consommation de psychotropes, l’étude de Marchand et coll. ne décrit qu’un lien avec le nombre d’heures travaillées (pas de liens avec les expositions psychosociales de Karasek) (Marchand et coll., 2010renvoi vers). Les études doivent encore se multiplier pour permettre la généralisation des résultats.

Mortalité par suicide

Pour ce qui est de la mortalité par suicide, très peu de données épidémiologiques permettent actuellement de documenter le lien entre les actes suicidaires et les conditions de travail. L’essentiel des travaux existants fait état de différences de taux de mortalité par suicide entre professions. Les résultats ne sont cependant pas toujours convergents selon les études qui sont par ailleurs, parfois entachées de sérieuses limites. Seules les professions du domaine de la santé ainsi que les agriculteurs semblent présenter assez systématiquement des excès de risques (Conroy, 1989renvoi vers ; Boxer et coll., 1995renvoi vers ; Kposowa, 1999renvoi vers ; van Wijngaarden, 2003renvoi vers). De tels résultats sont également observés sur les données françaises (Cohidon et coll., 2010arenvoi vers). La description de la mortalité par suicide selon les grandes catégories socioprofessionnelles (tableau 6.IIIrenvoi vers) montre un excès de risque des agriculteurs, des ouvriers et des employés par rapport aux cadres (Cohidon et coll., 2010brenvoi vers). Les hypothèses explicatives avancées et relatives au travail portent principalement sur l’accessibilité des moyens de suicide de certains secteurs d’activité tels que la santé (Boxer et coll., 1995renvoi vers ; Hawton et Heering, 1995 ; Stack, 2001renvoi vers ; Agerbo et coll., 2007renvoi vers), l’agriculture (Boxer et coll., 1995renvoi vers ; Stark, 2006renvoi vers) ou encore la police (Hem et coll., 2001renvoi vers) et l’armée (Mahon et coll., 2005renvoi vers) mais aussi sur les expositions psychosociales. Dans ce dernier domaine, on peut souligner l’étude de Tsutsumi qui a suivi 3 000 hommes sur 9 ans autour de cette question. Les données montrent que les hommes exposés à une faible latitude décisionnelle présentaient un risque de décès par suicide quatre fois plus élevé que les autres (RR=4,1 ; IC 95 % [1,3-12,8]). Aucun lien avec une exposition aux fortes exigences n’était observé (Tsutsumi et coll., 2007renvoi vers). Citons également l’étude de cohorte menée sur près de 100 000 infirmières américaines. Celles déclarant un stress professionnel sévère présentent un risque deux fois plus élevé de décès par suicide. Les résultats ne sont cependant pas significatifs, probablement par manque de puissance statistique (Feskanich et coll., 2002renvoi vers). Enfin, une hypothèse émergente impliquerait certaines expositions professionnelles chimiques (pesticides, solvants...) dans la survenue de suicide (van Wijngaarden, 2003renvoi vers).

Tableau 6.III Risques relatifs (RR) de décès prématuré par suicide chez les hommes selon la dernière catégorie sociale connue en tant qu’actif occupé, ajustés sur l’âge, le dernier secteur d’activité connu et la période (d’après Cohidon et coll., 2010brenvoi vers)

 
Hommes
Dernière catégorie sociale connue en tant qu’actif occupé
Décès (N)
PAa
RR
IC 95 %
Agriculteurs exploitants
127
289 192
2,77
1,74-4,42
Artisans, commerçants, chefs d’entreprise
92
319 053
1,81
1,30-2,52
Cadres et professions intellectuelles supérieures
61
378 137
1  
 
Professions intermédiaires
136
645 948
1,37
1,01-1,86
Employés
141
423 514
2,34
1,73-3,18
Ouvriers
557
1 584 266
2,45
1,86-3,23

a Personnes-années

Expositions psychosociales et santé mentale chez les indépendants

Face à la rareté des études épidémiologiques menées spécifiquement dans des populations d’indépendants ou comparant les salariés aux indépendants, une première approche sera de décrire cette population en termes de prévalence de troubles de santé mentale et de la comparer aux autres catégories socioprofessionnelles. Dans un second temps, seront évoquées les quelques études pouvant apporter des éléments chez les indépendants.

Santé mentale des indépendants par rapport aux autres catégories socioprofessionnelles

L’enquête « Santé mentale en population générale : images et réalités » permet d’obtenir des prévalences de différents troubles psychiatriques (mesurés par l’outil diagnostic Mini) selon les catégories socioprofessionnelles (premier niveau de la classification) en France (Cohidon et coll., 2009brenvoi vers). Celles-ci sont présentées dans le tableau 6.IVrenvoi vers. Les catégories d’indépendants semblent occuper une position intermédiaire en termes de prévalence d’épisode dépressif et de troubles anxieux, entre les catégories de salariées les moins favorisées (employés et ouvriers) et les plus favorisées (les cadres). On peut regretter de ne pas pouvoir décliner ces prévalences selon un niveau plus fin de catégories socioprofessionnelles. De plus, la catégorie des « artisans-commerçants » ne regroupe pas l’ensemble des indépendants puisque les professions libérales sont incluses dans la catégorie des cadres.
Une autre enquête nationale, l’Enquête décennale santé, permet des descriptions un peu plus fines selon le second niveau de la classification des catégories (Cohidon et coll., 2007renvoi vers). Ici l’outil utilisé est le CES-D (Center for Epidemiologic Studies Depression scale) qui explore un ensemble de symptômes dépressifs et non un diagnostic de dépression caractérisée. Les professions libérales rapportent une faible prévalence de symptômes dépressifs (6,1 % versus 11,7 % pour l’ensemble des hommes actifs). Chez les hommes, les commerçants présentent en revanche, une prévalence élevée de symptômes dépressifs par rapport aux autres catégories professionnelles (17,7 %). Les femmes indépendantes, en revanche, déclarent très peu souffrir de problèmes dépressifs (4,0 %). L’interprétation de ces résultats est loin d’être évidente. On pourrait supposer que la décision de se lancer dans une profession indépendante est mûrement réfléchie chez les femmes (en particulier dans l’artisanat et le commerce) et que seules les femmes « solides psychologiquement » s’y aventurent. Les résultats doivent cependant être relativisés en raison de la faiblesse des effectifs.

Tableau 6.IV Prévalence (%) de troubles psychiatriques selon la catégorie socioprofessionnelle (Enquête Santé mentale en population générale, extrait de Cohidon et coll., 2009brenvoi vers)

 
N
Épisode dépressif récent
Troubles de l’humeur (au moins un)
Troubles anxieux (au moins un)
Problèmes d’alcool
Catégorie socioprofessionnelle
H
F
H
F
H
F
H
F
H
F
Agriculteurs exploitants
307
105
3,3
9,9
4,6
12,8
12,1
15,1
3,5
0,8
Artisans, commerçants, chefs d’entreprise
904
596
7,8
11,6
9,6
13,6
16,4
22,8
6,7
1,8
Cadres et professions intellectuelles supérieures
1 598
1 175
5,0
7,8
7,8
9,9
13,7
20,0
4,2
1,5
Professions intermédiaires
1 849
2 774
5,9
8,3
8,4
11,0
14,8
20,9
5,1
1,2
Employés
2 537
4 091
9,5
12,9
12,5
16,1
20,9
29,3
8,1
1,5
Ouvriers
3 773
1 377
8,8
13,9
11,3
16,4
19,8
29,0
10,3
3,2

F : Femme ; H : Homme

Pour ce qui concerne la mortalité par suicide, les analyses des données françaises ne décrivent pas d’excès de risque (chez les hommes) dans la catégorie socioprofessionnelle des artisans-commerçants et chefs d’entreprise, en position intermédiaire par rapport aux cadres et aux employés et ouvriers (tableau 6.IIIrenvoi vers) (Cohidon et coll., 2010brenvoi vers).
En revanche, quelques études internationales décrivent un risque plus élevé chez les dentistes et les médecins (Boxer et coll., 1995renvoi vers), en particulier chez les femmes (Hawton et coll., 2001renvoi vers ; Schernhammer et Coldiz, 2004renvoi vers ; Petersen et Burnett, 2008renvoi vers). Notons cependant que dans ces études, la distinction selon le statut des médecins (salarié ou libéral) n’est généralement pas faite.
Enfin, rappelons que ces données sont purement descriptives et n’explorent pas directement et exclusivement des situations de travail. Derrière ces regroupements en catégories socioprofessionnelles, il y a effectivement des types d’emplois et des conditions de travail mais aussi des éléments d’ordre sociologique tels par exemple que les comportements ou les styles de vie.

Santé psychique des indépendants en lien avec leurs conditions de travail

L’étude australienne de Parslow et coll. (2004)renvoi vers avait pour objectif de comparer des salariés à des indépendants en termes d’expositions psychosociales et de conséquences sanitaires. Les résultats ne montrent pas de différence significative sur la prévalence de symptômes dépressifs ni anxieux. Pour ce qui concerne les expositions, on n’observe pas de différence de perception de la sécurité d’emploi entre indépendants et salariés. En revanche, les indépendants rapportent une latitude décisionnelle supérieure et des exigences de travail plus acceptables (chez les femmes seulement). L’étude décrit également des liens entre la santé psychique et certaines expositions psychosociales au travail (fortes exigences, faible utilisation des compétences, sentiment d’insécurité) mais l’intensité de ces liens ne diffère pas selon le statut de salarié ou d’indépendant. Cette étude, malgré ses limites (faibles effectifs d’indépendants et nature transversale), apporte quelques éléments de connaissance pouvant alimenter ce débat. Il serait souhaitable de poursuivre ce type d’étude comparative entre les salariés et les indépendants.
Par ailleurs, des études sur les conditions de travail décrivent des fréquences de forte exposition à certains facteurs psychosociaux ou organisationnels chez les indépendants. Il s’agit principalement d’un temps de travail élevé, d’horaires atypiques peu conciliables avec la vie privée et d’un faible soutien social du fait du statut fréquent de travailleur isolé. Ces expositions plus spécifiques des travailleurs indépendants peuvent être envisagées comme potentiellement génératrices d’atteintes de la santé psychique pour ces populations. L’étude longitudinale de Virtanen et coll. (2009)renvoi vers a rapporté le rôle prédictif du temps de travail excessif sur les difficultés d’endormissement et le raccourcissement du temps de sommeil. Cependant, l’importante autonomie décisionnelle pourrait venir contrebalancer les effets de ces contraintes (Parslow et coll., 2004renvoi vers).
Enfin, certaines études ont montré que le fait d’occuper un emploi exposant à la violence (en interne ou en externe de par un contact avec le public) était un facteur de risque de développer des troubles dépressifs (Wieclaw et coll., 2006renvoi vers). On imagine que certaines professions d’indépendants telles que les commerçants, les artisans et certaines professions libérales puissent se trouver dans cette situation.
En conclusion, les données de la littérature épidémiologique sont globalement en accord avec l’existence de liens causaux entre certaines expositions psychosociales au travail (fortes exigences, faible latitude décisionnelle, faible soutien social, efforts importants et faibles récompenses...) et la survenue de certains troubles de santé mentale, principalement de nature dépressive. Pour ce qui concerne la population particulière des indépendants, force est de constater que les données épidémiologiques dans ce champ sont trop limitées pour en tirer des conclusions. Rappelons seulement que la santé mentale de ces catégories de travailleurs ne semble pas particulièrement détériorée par rapport à d’autres catégories professionnelles telles que les salariés ouvriers et les employés.
Par ailleurs, la conduite d’études épidémiologiques auprès de ces populations se heurte à certaines difficultés. Une première difficulté provient de la mauvaise adéquation des modèles d’exposition psychosociale au travail, développés pour des salariés, aux contraintes des travailleurs indépendants. Le développement d’outils de mesure de l’exposition plus adaptés pourrait constituer une première étape utile. De plus, l’hétérogénéité des emplois au sein même de la « grande catégorie » des indépendants pourrait gêner la généralisation de résultats épidémiologiques issus d’études menées au sein d’une profession à l’ensemble des indépendants.

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