2011


ANALYSE

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Âge de la puberté

Une diminution particulièrement importante de l’âge des premières règles est observée dans la plupart des pays occidentaux. Cependant, la variabilité interindividuelle peut atteindre 4-5 ans et dépend de facteurs génétiques et environnementaux et probablement des interactions entre ces deux types de facteurs. Ce chapitre s’appuie sur les données de l’expertise collective Inserm « Croissance et puberté » (Inserm, 2007renvoi vers).
Une meilleure compréhension des liens entre l’initiation de la puberté, les facteurs d’environnement et la survenue de maladies touchant la croissance et/ou la maturation sexuelle passe nécessairement par la mise en place d’études épidémiologiques longitudinales à grande échelle comprenant une approche clinique, biologique et génétique.
Le développement de nouveaux modèles d’étude des anomalies de la croissance et de la différenciation sexuelle (en particulier modèles animaux génétiquement modifiés et/ou exposés à divers facteurs d’environnements à différents stades du développement) devrait permettre de tester plusieurs hypothèses concernant la régulation de ces fonctions physiologiques importantes.

Développement pubertaire

La puberté correspond à l’activation de la fonction hypothalamo-hypophyso-gonadique, aboutissant au développement complet des caractères sexuels, à l’acquisition de la taille définitive, de la fonction de reproduction et de la fertilité. Les différents stades du développement pubertaire sont définis selon la classification de Tanner portant sur les caractères sexuels secondaires (tableau 4.Irenvoi vers).

Tableau 4.I Classification de Tanner des stades de développement pubertaire

Stades de développement pubertaire
Pilosité pubienne garçons et filles
P1 Absence de pilosité
P2 Quelques poils longs sur le pubis
P3 Pilosité pubienne au-dessus de la symphyse
P4 Pilosité pubienne fournie
P5 La pilosité s’étend à la racine des cuisses et s’allonge vers l’ombilic chez le garçon
Développement mammaire
S1 ou B1 Absence de développement mammaire
S2 ou B2 Petit bourgeon mammaire avec élargissement de l’aréole
S3 ou B3 La glande mammaire dépasse la surface de l’aréole
S4 ou B4 Développement maximum du sein (apparition d’un sillon sous-mammaire), saillie de l’aréole et du mamelon sur la glande
S5 ou B5 Aspects adulte, disparition de la saillie de l’aréole
Développement des organes génitaux externes du garçon
G1 Testicules et verge de taille infantile
G2 Augmentation du volume testiculaire de 4 à 6 ml (L 25 à 30 mm)
G3 Continuation de l’accroissement testiculaire de 6 à 12 ml (L 30-40 mm), accroissement de la verge
G4 Accroissement testiculaire de 12 à 16 ml (L 40-50 mm) et de la verge
G5 Morphologie adulte
Chez la fille, la première manifestation pubertaire est le développement des glandes mammaires qui commence en moyenne à partir de 10,5/11 ans. Viennent ensuite le développement de la pilosité pubienne et axillaire, les modifications de la vulve et enfin les premières règles (ménarche) qui apparaissent en moyenne autour de 13 ans, entre 2 et 2,5 ans après l’apparition des premiers signes pubertaires. Leur date de survenue est considérée comme physiologique entre 10 et 15,5 ans. La puberté chez la fille se situe pour un âge osseux de 11 ans (10 à 12 ans) correspondant à l’apparition du sésamoïde du pouce.
Chez le garçon, le premier signe de puberté est l’augmentation du volume testiculaire qui se produit en moyenne vers l’âge de 12-13 ans. Les autres signes de maturation pubertaires sont le développement de la pilosité pubienne et axillaire, l’augmentation de la taille de la verge. La puberté chez le garçon se situe pour un âge osseux de 13 ans correspondant à l’apparition du sésamoïde du pouce.
En Europe, l’âge des premières règles est en moyenne à 12 ans en Italie, 12,6 ans en France et 13,5 ans en Allemagne. Concernant les garçons, différentes études américaines et européennes s’accordent sur un âge moyen de 11,6 ans pour le stade G2.

Tendances séculaires

Entre le milieu du 19e siècle et le milieu du 20e siècle, l’âge moyen des premières règles a particulièrement diminué, passant de 17 ans à 14 ans aux États-Unis et dans plusieurs pays de l’Europe de l’Ouest. Cependant, la courbe de cette évolution varie d’un pays à l’autre : une diminution de 0,3 ans par décennie a été calculée pour les données norvégiennes et finlandaises et dans les études prospectives américaines (figure 4.1Renvoi vers). En France, la diminution est estimée à 0,175 an par décennie.
Figure 4.1 Évolution séculaire de l’âge des premières règles dans 4 pays
Il faut noter l’existence d’un gradient Nord-Sud au 19e siècle avec un âge de ménarche plus bas dans les pays du sud de l’Europe (France) que dans les pays du nord (Scandinavie). Mais, les études réalisées après 1960 dans ces pays tendent à montrer, une stabilisation voire un arrêt de la diminution de l’âge de la puberté. Cependant, dans d’autres pays (Inde, Chine, Bulgarie) la diminution est aussi importante qu’elle l’était dans les pays occidentaux avant 1960. Ces évolutions sont en concordance avec l’évolution des conditions de vie dans les différents pays. L’évolution séculaire de l’âge des premières règles serait associée à l’élévation de l’indice de masse corporelle.
Des études se sont intéressées à l’évolution séculaire de marqueurs tels que le développement mammaire (filles) ou des organes génitaux (garçons). En Suède et en Grande-Bretagne, le développement mammaire est plus précoce en 1980 que dans les années 1960 ou 1970. Ces données soulignent d’une part l’existence de variations d’un pays à l’autre et d’autre part montrent l’importance du marqueur utilisé pour évaluer l’évolution de l’âge de la puberté (ménarche, différents stades de Tanner).
Les études épidémiologiques ont tenté d’isoler différents facteurs corrélés avec des variations de l’âge de la puberté, essentiellement chez les filles. Les filles vivant dans des milieux dits « privilégiés » au sein de pays en voie de développement (Asie, Afrique, Amérique du sud) ont un âge moyen de la ménarche comparable à celui des filles des pays occidentaux du pourtour méditerranéen mais différent de celui des filles vivant dans les mêmes pays dans des conditions moins privilégiées. Ceci indique bien l’influence des conditions socio-économiques. Une relation entre le poids corporel et l’âge de survenue de la puberté a été suggérée par différentes études. Les filles qui ont une puberté précoce sont plus souvent obèses que les filles qui ont une puberté tardive alors que l’inverse est observé chez les garçons. Un indice de masse corporelle élevé dès 36 mois est associé avec une puberté précoce chez les filles américaines.
Des situations de stress physique et psychologique peuvent entraîner un retard pubertaire et un renversement de la tendance séculaire comme cela a été observé en temps de guerre en Croatie et en Bosnie. Cependant, d’autres situations de stress peuvent à l’inverse induire une puberté précoce (immigration, adoption, défaut d’attachement parental). La différence d’impact des composants de la situation de stress suggère une hétérogénéité de la réponse neuroendocrine à ces différents facteurs.
De nombreuses études se sont intéressées aux relations entre l’exposition fœtale et périnatale à des produits chimiques perturbateurs endocriniens (pesticides, DDT) et la puberté précoce. Mais, il est difficile d’isoler les agents chimiques présents dans l’environnement pour connaître leurs effets respectifs sur le système endocrinien.
Au total, l’âge de la puberté est un processus physiologique complexe soumis à tout un spectre de facteurs corrélés (figure 4.2Renvoi vers).
La littérature concernant les relations entre obésité et puberté indique clairement, chez les filles, l’existence d’une corrélation positive entre surcharge pondérale et maturation sexuelle précoce. La difficulté à déterminer le sens de la relation entre surcharge adipeuse et maturation sexuelle suggère qu’il s’agit d’une relation bidirectionnelle, dans laquelle l’accumulation de graisse au moment de la puberté pourrait dépendre des hormones sexuelles (les niveaux d’œstrogènes), mais la quantité de graisse accumulée pourrait elle-même précipiter la maturation sexuelle.
Figure 4.2 Facteurs génétiques et environnementaux influençant l’âge de la puberté (d’après Parent et coll., 2003renvoi vers)

Bibliographie

[1]INSERM.Croissance et puberté : Évolutions séculaires, facteurs environnementaux et génétiques. Collection Expertise Collective, Éditions Inserm; 2007; Retour vers
[2] PARENT AS, TEILMANN G, JUUL A, SKAKKEBAEK NE, TOPPARI J, BOURGUIGNON JP. The timing of normal puberty and the age limits of sexual precocity: variations around the world, secular trends, and changes after migration. Endocr Rev. 2003; 24:668-693Retour vers

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