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Med Sci (Paris). 2003 October; 19(10): 1003–1010.
Published online 2003 October 15. doi: 10.1051/medsci/200319101003.

Le génie tissulaire au service de la compréhension du vivant

Véronique Moulin,1,2 Francine Goulet,1,2 François Berthod,1,2 Lucie Germain,1,2 and François A. Auger1,2

1Laboratoire d’organogenèse expérimentale (LOEX), Hôpital du Saint-Sacrement, Centre hospitalier affilié universitaire de Québec, 1050, Chemin Sainte-Foy, Québec, Canada G1S 4L8
2Départements de chirurgie et de physiothérapie, Faculté de médecine, Université Laval, Québec, Canada
 

La complexité des organismes vivants est remarquable et fait intervenir simultanément un grand nombre de systèmes de régulation permettant un contrôle très fin des différents paramètres physiologiques. Cependant, les boucles de régulation présentent parfois des anomalies qui engendrent des maladies. La connaissance des différents mécanismes existant in vivo est donc primordiale pour comprendre les dérèglements liés aux diverses maladies, afin d’envisager le développement d’interventions thérapeutiques efficaces.

Les premières études physiologiques ont été réalisées in vivo chez des animaux et des humains. Elles ont permis de comprendre certains mécanismes macroscopiques du vivant (circulation et épuration du sang), ainsi que certains mécanismes microscopiques (ajout d’une molécule ou d’un tissu et observation de son effet). Cependant, ces études ont été limitées par le nombre important de paramètres intervenant in vivo pour un mécanisme donné. Pour palier ces inconvénients, les études in vitro, c’està- dire utilisant des cellules humaines isolées et mises en culture, sont de plus en plus nombreuses. Ces études sont très intéressantes en ce qu’elles ont permis, là encore, d’étudier et d’élucider un certain nombre de mécanismes. Mais elles présentent le problème inverse des études réalisées sur le vivant: les modèles sont trop simples et ne reflètent pas, ou pas assez, les phénomènes observés in vivo. De plus, ces cellules sont très souvent cultivées en monocouche, ce qui ne reproduit pas l’environnement habituel des cellules dans l’organisme humain où elles se déploient généralement dans une structure tridimensionnelle.

Le génie tissulaire est une discipline en plein essor. Nouveau champ de connaissance, il tire parti de la capacité des cellules vivantes, qu’elles soient en présence ou non de biomatériaux, de s’assembler en un tissu tridimensionnel. Il ouvre une voie intéressante permettant aux chercheurs d’étudier les cellules dans un contexte proche de celui que l’on trouve in vivo. C’est donc un avantage par rapport à la culture classique de cellule in vitro. Les tissus ainsi créés sont cependant plus simples que ceux provenant des systèmes in vivo, car les conditions générales, ainsi que le nombre de types cellulaires et de paramètres, sont plus restreints et par là mieux maîtrisés.

Les cellules jouent à saute-mouton

Outre son rôle esthétique, la peau prévient la perte de fluides corporels et l’entrée de toxines et de microorganismes dans le corps, la perte de son intégrité ayant évidemment des conséquences néfastes. La réponse du corps à toute lésion est cruciale. Ce rôle de barrière étant assuré par l’épiderme, c’est celui-ci qui doit être restauré le plus rapidement possible. Le recouvrement de la lésion par les cellules épithéliales s’effectue par migration et prolifération des kératinocytes à partir des bords de la plaie. Une fois le recouvrement de la plaie terminé, les kératinocytes se différencient pour former les différentes couches de l’épiderme et permettent à celui-ci de retrouver sa fonction de barrière. Beaucoup de données sont disponibles à propos de ces mécanismes [ 17]. Cependant, le mode de migration des kératinocytes dans la plaie n’était encore récemment expliqué que par des hypothèses sans preuve formelle [ 8, 9].

Grâce au génie tissulaire, nous avons construit un modèle tridimensionnel de plaie cutanée [ 10] (Figure 1). Pour commencer, nous avons reconstitué une peau humaine dont les caractéristiques sont très proches de la peau in vivo [ 11]. Pour cela, nous avons extrait les cellules humaines provenant du derme, les fibroblastes, et celles provenant de l’épiderme, les kératinocytes. Les fibroblastes ont été cultivés en présence d’acide ascorbique pendant 28jours. Les cellules sont alors entourées de matrice et forment un feuillet manipulable. Deux de ces feuillets ont été superposés afin de former un derme sur lequel ont été ensemencés et cultivés des kératinocytes. L’ensemble a ensuite été placé à l’interface air-liquide afin d’obtenir un épiderme bien différencié comportant toutes les couches d’un épiderme normal (Figure 2). Une plaie a alors été créée en utilisant un poinçon à biopsie de 6 mm de diamètre. Pour permettre aux cellules épithéliales de migrer, un 3e feuillet dermique a été ajouté sous la peau lésée avant de remettre le tout en culture (Figure 1). Les résultats obtenus ont permis de comprendre les mécanismes de la migration des kératinocytes dans la plaie. La réépithélialisation s’effectue grâce à l’intervention de deux mécanismes complémentaires, en fonction de l’emplacement des cellules dans l’épiderme en régénération.

Aux bords de la plaie initiale, les résultats histologiques ont montré une avancée de l’épiderme non lésé dans la plaie (Figure 2E, entre la marge de la plaie au niveau du derme et la coupure franche de l’épiderme plus avancée dans la plaie). Cette avancée est plus importante dans les couches supérieures constituées de cellules anucléées mortes que dans les couches les plus basses contenant les cellules vivantes. Ces résultats, associés à ceux obtenus en immunohistologie, nous ont amené à conclure à une avancée de l’épiderme grâce à la pression mitotique. En effet, les cellules basales sont en perpétuelle division, engendrant un renouvellement constant de l’épiderme. Les cellules formées lors de la division, faute de place au niveau de la couche basale, montent vers les couches supérieures en se différenciant peu à peu, puis meurent avant de désquamer. L’espace libéré lors de la formation de la plaie permet aux nouvelles cellules de se déplacer non pas de bas en haut, mais de côté, produisant ainsi l’avancée épidermique visible histologiquement. Ce mécanisme n’avait jamais été noté lors des études réalisées in vivo, car la formation de croûtes sur les plaies associée à une contraction importante du derme (surtout chez les animaux) ne permettaient pas de visualiser ce phénomène. Ce mécanisme semble peu important, mais sur une plaie de 6 mm de diamètre, il a permis après trois jours de recouvrir environ 30% de la surface de la plaie. Il est donc probablement important à l’échelle des plaies de petite surface telles que les incisions.

Le second mécanisme conduisant à la réépithélialisation se trouve à l’extrémité de l’épiderme: il s’agit de la langue de migration. Histologiquement, la langue de migration est très fine et constituée de quelques cellules d’épaisseur. Les kératinocytes immédiatement situées derrière et au-dessus de la cellule basale la plus avancée dans la plaie sont allongés. Leurs cytoplasmes sont partiellement à hauteur de la couche suprabasale, mais la partie la plus avancée dans la plaie est en contact avec le feuillet dermique. Ces cellules suprabasales migrent donc au-dessus des cellules basales déjà en contact avec la matrice extracellulaire par un mouvement de saute-mouton (Figures 2C et 2D).

La réépithélialisation est donc un processus qui fait appel à deux mécanismes de migration cellulaire à deux endroits différents de la plaie: mécanisme de migration par feuillets sur les bords de la plaie, et migration par saute-mouton dans la langue de migration. Il est fort probable que ces mécanismes soient réglés par différents facteurs de croissance [ 12], mais également par le type de matrice extracellulaire sur laquelle les cellules migrent. De nombreuses études restent encore à mener pour bien comprendre l’ensemble des mécanismes en jeu, mais nous avons désormais, grâce au génie tissulaire, un outil permettant d’aller plus loin dans la compréhension fine de ces processus.

Les cellules communiquent en permanence

Combien de fois nous lavons-nous les mains dans une journée ? À chaque lavage, un bon nombre de cellules épithéliales de surface sont éliminées selon un processus normalement prévu par la nature. Ainsi, chaque jour, notre peau répond à cette perte cellulaire en produisant de nouveaux kératinocytes. Si ce renouvellement tissulaire semble aller de soi, il implique beaucoup d’étapes physiologiques qui dépendent, notamment, des interactions cellulaires s’effectuant entre les couches de cellules cutanées. Nous savons que les fibroblastes dermiques ont la capacité de stimuler la croissance des kératinocytes en coculture directe ou dans des peaux reconstruites [ 1316]. Quels sont les facteurs mis en jeu dans ces interactions dermo-épidermiques ?

Bien que la nature de tous ces facteurs ne soit pas encore connue, plusieurs cytokines sécrétées par les kératinocytes en culture ont été identifiées: TGF (transforming growth factor) α, IL (interleukine)-1, IL-3-like-factor, IL-6, IL-8, GM-CSF (granulocytemacrophage colony stimulating factor), TNF (tumor necrosis factor) α, IFN (interféron) α, IGF (insulin-like growth factor) [ 1719]. Des travaux ont déjà établi l’existence d’échanges de facteurs sécrétés par les fibroblastes et les kératinocytes [ 20, 21], tels le KGF (keratinocyte growth factor) et le FGF (fibroblast growth factor) 7. Nous avons confirmé ces observations, et sommes allés un peu plus loin par le biais du système de la coculture indirecte [ 22]. Cette technique a pour objectif de cultiver au moins deux types cellulaires différents, partageant le même milieu de culture mais n’étant pas en contact direct. Le principal intérêt de cette méthode est de pouvoir étudier et purifier les protéines sécrétées et échangées par les cellules afin de connaître leur nature et leurs effets.

Les travaux réalisés dans notre laboratoire ont révélé l’importance des échanges entre les cellules du derme et de l’épiderme [22]. D’abord, les kératinocytes grandissent deux à trois fois plus vite lorsqu’ils sont cultivés en coculture indirecte avec les fibroblastes. Nous savons que les kératinocytes requièrent normalement la présence de différents additifs dans le milieu de culture pour que leur aspect morphologique et leur taux de croissance soient maintenus in vitro [ 23] (Figure 3A). Il a été fort intéressant de constater que les échanges de facteurs de croissance entre les différents types de cellules pouvaient remplacer les additifs habituellement essentiels au maintien de l’état des kératinocytes. En effet, en absence de sérum, d’EGF (epidermal growth factor) et d’hydrocortisone, les kératinocytes conservent leur morphologie, augmentent leur vitesse de croissance de 3 à 5 fois et forment de belles colonies compactes (Figure 3C) lorsqu’ils sont cultivés en présence de fibroblastes dermiques. En revanche, en leur absence, les kératinocytes vieillissent rapidement, comme le démontre la présence de dômes cellulaires cornifiés (blanchâtres) au centre des colonies (Figure 3B). Il s’agit d’une première étape - elle est désormais franchie - vers la compréhension des interactions dermo-épidermiques, mais surtout de leur fonction sur le renouvellement de l’épiderme. Nous avons aussi mis en évidence l’induction d’un facteur de croissance de 40kDa sécrété par les fibroblastes dermiques, qui semble jouer un rôle dans la stimulation de la croissance des kératinocytes [22].

Ce facteur de croissance est actuellement en cours de purification, de même que d’autres facteurs produits par les cellules cutanées au sein de notre système de coculture indirecte. Nous espérons pouvoir isoler ces facteurs dans un avenir proche afin de les utiliser pour stimuler la croissance des kératinocytes et accélérer la production de feuillets épidermiques autologues pour le traitement des grands brûlés. De plus, nous pourrons optimiser la production de peaux reconstruites (épiderme et derme) en modulant les concentrations des facteurs de croissance ajoutés dans le milieu de culture, en fonction des étapes de production [13]. À la lumière de résultats publiés précédemment, il semble que les interactions épithélium-mésenchyme puissent aussi être étudiées en culture en utilisant des cellules d’origine tumorale [ 2426]. Il n’est donc pas utopique de penser que la découverte de nouveaux facteurs de croissance pourrait avoir de nombreuses applications thérapeutiques, non seulement en dermatologie, mais aussi dans d’autres systèmes organiques connexes.

Garder un greffon vivant : un problème d’irrigation

Une des difficultés majeures dans la transplantation d’organes reconstruits par génie tissulaire est la vascularisation des implants. En effet, lorsqu’un tissu est greffé dans l’organisme, il faut qu’il soit vascularisé très rapidement dans toute son épaisseur, sinon les portions non vascularisées se nécroseront du fait d’une nutrition, d’une oxygénation et d’une évacuation des produits du catabolisme déficientes. Or, la néovascularisation, c’est-à-dire la progression dans le greffon de nouveaux vaisseaux sanguins issus du réseau vasculaire de l’hôte, est un processus lent. Le temps nécessaire augmente avec la distance à parcourir, c’est-à-dire l’épaisseur du tissu. En transplantant sur la souris immunodéficiente des peaux reconstruites humaines d’environ 1 mm d’épaisseur, nous avons confirmé que la diffusion passive de nutriments pouvait palier sur de courtes distances l’absence d’un réseau vasculaire [ 27, 28]. Dans ce modèle, la reconstruction d’un réseau vasculaire dans toute l’épaisseur du greffon prend environ 15 jours, pendant lesquels la simple diffusion passive d’exsudat issu de la plaie suffit à nourrir le greffon. Cette diffusion ne permet toutefois pas de nourrir les tissus sur de grandes distances. La transplantation des peaux reconstruites, à peine plus épaisses, mais d’une surface nettement plus élevée, est accompagnée de nécrose. L’irrigation continuelle du greffon avec un milieu de nutrition en application topique est possible, mais cette solution est difficilement praticable en clinique et elle augmente notablement les risques d’infection [ 29]. Or, comment se fait-il qu’il soit possible de transplanter des autogreffes de peau pleine épaisseur (jusqu’à 5 mm, par exemple) sans rencontrer de problème de nécrose ? Lorsqu’on transplante sur une plaie un tissu contenant déjà un réseau vasculaire établi, comme c’est le cas d’une autogreffe de peau, les vaisseaux sanguins du greffon ont la capacité de se reconnecter avec le réseau vasculaire de l’hôte. Il s’agit d’une anastomose spontanée des deux systèmes vasculaires, qui permet en 2 à 5 jours de rétablir une circulation sanguine dans tout le greffon, quelle que soit son épaisseur [ 30, 31]: ce phénomène s’appelle l’inosculation.

Nous avons voulu tirer profit de ce processus en mettant au point, pour la première fois, une peau reconstruite in vitro contenant un réseau vasculaire préétabli. Notre démarche a consisté à ajouter des cellules endothéliales humaines dans notre modèle de peau reconstruite constitué de fibroblastes cultivés dans une éponge de collagène, modèle qui avait déjà fait ses preuves, aussi bien in vitro qu’in vivo [27, 32, 33]. Les cellules endothéliales humaines, pourtant réputées réfractaires aux manipulations in vitro, ont spontanément formé des tubules caractérisés par une lumière interne. L’observation en microscopie électronique à transmission a démontré que les tubes étaient formés par des cellules jointives contenant des corps de Weibel-Pallade, signature caractéristique des cellules endothéliales, et que ces cellules délimitaient une lumière interne contenant quelques débris cellulaires, mais exempte de matrice extracellulaire, ce qui suggérait que ces tubes étaient clos. Ces observations ont été confirmées par des marquages en immunofluorescence utilisant des anticorps spécifiques des cellules endothéliales (comme des anticorps anti-PECAM (platelet/endothelial cell adhesion molecule)-1 ou anti-facteur von Willebrand), qui ont permis d’observer la distribution de ces structures pseudocapillaires dans le modèle de peau reconstruite endothélialisée [ 34] (Figure 4). L’analyse par microscopie confocale des tubes a permis de démontrer que ces pseudocapillaires observés en coupes transversales ou longitudinales ne correspondaient pas à de simples tronçons isolés, mais qu’ils formaient des ramifications dans la majeure partie de l’épaisseur de la peau reconstruite endothélialisée, ce qui indiquait qu’un réseau vasculaire tridimensionnel complexe avait été reconstruit dans un organe in vitro.

Une dernière question demeure néanmoins: ce réseau permettra-t-il d’assurer une anastomose de ses pseudocapillaires avec le réseau vasculaire de l’hôte après implantation de la peau reconstruite endothélialisée in vivo ? Nous travaillons actuellement à répondre à cette interrogation. Les expériences préliminaires réalisées indiquent que la présence de ce réseau préétabli permet d’accélérer la vitesse de revascularisation et que la reconnexion des pseudocapillaires avec la circulation sanguine de l’hôte est possible, selon des modalités comparables à celles observées avec une greffe de peau humaine. Un tel résultat est extrêmement encourageant et aura un impact majeur dans le développement du génie tissulaire, en permettant de produire des organes plus épais sans courir le risque qu’ils subissent une nécrose du fait d’une insuffisance de vascularisation.

Les cellules souches : usines du vivant

Véritable usine de fabrication de l’épithélium cutané, les cellules souches, grâce à leur grand potentiel de multiplication, assurent le maintien de l’épiderme dont le renouvellement s’effectue tous les 28 jours. L’étude des cellules souches a pour objectif de mieux comprendre les mécanismes de renouvellement normal des tissus, ainsi que leur régénération après une blessure.

Les données expérimentales suggèrent que les cellules souches de l’épithélium cutané sont situées dans le renflement des follicules pileux, pour les endroits du corps où la peau contient des poils, et dans le creux des papilles dermiques de la peau glabre (paume des mains et plante des pieds) [ 35, 36] (Figure 5). L’identification d’une protéine structurale, la kératine 19, présente dans le cytoplasme des cellules souches, mais généralement absente dans les autres cellules de l’épithélium cutané, nous a permis de mieux les caractériser [ 37]. Cette kératine procure des propriétés particulières aux cellules qui l’expriment [ 38]. Les résultats montrent que la peau des enfants contient un plus grand nombre de cellules souches que celles des adultes. Ainsi, la quantité d’épithélium pouvant être produite à partir d’une petite biopsie de la surface d’un timbre est beaucoup plus grande pour un enfant (1 x 1032 cellules, pouvant couvrir 1 x 1017 km2) que pour un adulte (quelques mètres carrés seulement) [ 39].

Le génie tissulaire a permis de confirmer l’importance de la membrane basale, structure permettant l’attachement de l’épiderme au derme afin d’assurer la conservation des cellules souches dans la couche basale. En effet, une migration anormale de cellules souches vers la surface de l’épiderme, conduisant à leur perte, est observée dans les équivalents cutanés produits par la méthode des gels de collagène dans des conditions où la membrane basale n’est pas complètement structurée [ 40]. En revanche, les peaux reconstruites par la méthode d’autoassemblage présentent une membrane basale complète (Figure 5D), qui favorise l’attachement des cellules souches comme l’attachement des cellules de l’épiderme au derme.

Le développement de méthodes favorisant la conservation des cellules souches en culture a permis la production d’épidermes, cultivés à partir de cellules autologues (c’est-à-dire provenant du patient), destinés à la greffe des grands brûlés (Figure 5B) [ 4143]. Ces cultures sont greffées sur les plaies afin de régénérer l’épiderme de façon permanente. La nature autologue des cellules prévient le rejet des cellules épidermiques, qui sont immunogéniques. L’utilisation de cellules souches embryonnaires produira des organes allogéniques et, par conséquent, ne résoudra pas les problèmes associés au rejet des greffes. C’est pourquoi il est primordial de poursuivre l’étude des cellules souches présentes chez les adultes. De plus, les cellules souches embryonnaires se différencient facilement en plusieurs types de cellules, et la maîtrise parfaite de leur différenciation afin d’obtenir le type cellulaire désiré est l’un des défis qu’il faudra surmonter avant de les utiliser en clinique.

Les modèles développés par génie tissulaire fournissent de nouveaux outils pour l’étude des caractéristiques des cellules souches, ainsi que de leur potentiel de différenciation in vitro. Ils pourront s’appliquer à d’autres organes, notamment à la cornée. La persistance des cellules souches dans les tissus reconstruits et la possibilité d’y transférer des gènes lors de la culture in vitro ouvrent des perspectives d’application en thérapie génique.

Conclusion

Le génie tissulaire est un nouveau domaine ayant permis de franchir une nouvelle étape dans l’étude des mécanismes physiologiques du vivant. Cette approche permet d’étudier en profondeur des mécanismes délicats à mettre en évidence in vivo ou in vitro avec des cultures en monocouche. Cette compréhension ouvrira de nouvelles voies thérapeutiques dont devraient bénéficier un grand nombre de patients de demain.

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