II. Épidémiologie

2013


ANALYSE

15-

Troubles cognitifs

Au cours du traitement de l’information, le cerveau met en œuvre des processus divers et complexes impliquant notamment la mémoire, l’attention, le jugement, la compréhension et le raisonnement, afin de produire des réponses adaptées. Un certain nombre d’agents environnementaux sont suspectés de perturber le bon fonctionnement du système nerveux central. Il s’agit en particulier d’agents minéraux tels que l’aluminium, l’arsenic, le plomb, le mercure, le manganèse, de solvants organiques divers tels que les alcools, les cétones, les glycols, de gaz comme le monoxyde de carbone ou encore de pesticides. Ces effets ont été largement documentés en milieu professionnel pour certains neurotoxiques tels que les solvants organiques susceptibles d’induire des troubles neurocomportementaux caractérisés.
Cependant, de nombreuses incertitudes persistent, à la fois sur l’éventail des expositions professionnelles pouvant perturber le fonctionnement du système nerveux central, sur la réversibilité des troubles survenant lors d’intoxications aiguës massives, et sur la survenue de troubles chroniques à la suite d’expositions modérées mais répétées. Par ailleurs, les troubles cognitifs accompagnent ou sont prédictifs de maladies neuro-dégénératives, telles que la maladie de Parkinson et la maladie d’Alzheimer, ce qui suggère l’existence possible de facteurs étiologiques et/ou des mécanismes communs.
Les tests neuropsychologiques permettant de mesurer, de manière standardisée et normalisée, les capacités de mémoire, de langage, d’attention, de perception sont nombreux et sont utilisés aussi bien à des fins cliniques que de recherche. De manière schématique, il existe des échelles qui mesurent le fonctionnement cognitif global et d’autres qui explorent un secteur cognitif de manière approfondie mais, les différentes fonctions ne sont jamais complètement dissociées. De plus, selon les caractéristiques des populations étudiées (niveau d’études, langages) et/ou les finalités des études, le nombre de tests et le contenu même de ceux-ci donnent fréquemment lieu à des versions adaptées. Il faut noter qu’une des difficultés de ces études est la prise en compte du niveau d’éducation, fortement lié aux performances cognitives. Si cette prise en compte est imparfaite, un biais résiduel sous-estimant ou surestimant les associations pourrait persister.

Exposition aiguë aux pesticides : études transversales comparant des personnes ayant été intoxiquées à des personnes non intoxiquées

Le possible impact des pesticides sur le fonctionnement cérébral a été évoqué en raison de l’identification clinique d’altérations chroniques des fonctions cognitives chez certains patients dans les suites d’intoxications aiguës par des organophosphorés. En effet, le mode d’action même de ces substances vis-à-vis des insectes, basé sur l’inhibition de l’acétylcholinestérase (AChE)1 , laissait craindre des effets similaires chez l’Homme. Aussi les premières études d’observation visaient à étudier la fréquence de manifestations neurologiques chroniques à distance d’intoxications aiguës par ces substances.
Il y a une vingtaine d’années, trois études américaines (Colorado/Texas, deux en Californie) et une étude au Nicaragua, selon un schéma transversal, ont comparé les performances aux tests neurocomportementaux de personnes ayant subi une intoxication massive par des organophosphorés et identifiées par des centres hospitaliers, aux performances des proches de ces patients n’ayant pas été eux-mêmes intoxiqués (Savage et coll., 1988renvoi vers ; Rosenstock et coll., 1991renvoi vers ; Reidy et coll., 1992renvoi vers ; Steenland et coll., 1994renvoi vers) (tableau 15.Irenvoi vers). Ces études ont mis en évidence un abaissement des performances aux tests neurocomportementaux chez les sujets ayant été intoxiqués par des organophosphorés concernant diverses fonctions cognitives, notamment l’attention visuelle, la mémoire et l’abstraction. Cependant, le délai entre l’intoxication et l’examen cognitif était très variable (de quelques mois à plusieurs années voire décennies), de même que la nature des organophosphorés impliqués dans l’intoxication, et le mode d’intoxication.

Tableau 15.I Études épidémiologiques portant sur le lien entre pesticides et troubles cognitifs

Référence
Pays
Population étudiée
Méthodologie de l’étude
Définition de la pathologie
Fréquence/Probabilité/Durée d’exposition
Méthode d’estimation de l’exposition
Facteurs d’ajustement
Résultats
Études transversales : intoxiqués/non intoxiqués
Savage et coll., 1988renvoi vers
États-Unis
(Colorado et Texas)
100 paires d’individus appariés
Intoxiqués : OPa, 16-70 ans, >3 mois avant entretien, sans antécédents neurologiques, alcool…
Non intoxiqués : proches des intoxiqués et sources variées
Examen neurologique, EEG
Tests neurocomportementaux (WAIS…)
Tests de personnalité
Tests réalisés en moyenne 9 ans après l’intoxication
Diversité des contextes professionnels
Intoxications aiguës :
méthylparathion, parathion, disyston, malathion, mévinphos, bildrine, TEPP, dioxathion, DEF, Phorate
AChE et niveau en organochlorés
Âge, sexe, niveau d’études, profession, ethnie
EEG : pas de différence significative
Examen clinique : pas de différence
Performances abaissées aux tests pour des fonctions cognitives variées
Rosenstock et coll., 1991renvoi vers
Nicaragua
1986-1988
Intoxiqués : hommes de 15-44 ans hospitalisés pour intoxication aiguë aux OP hors suicide (N=36)
Non intoxiqués : proches des intoxiqués (N=25)
Tests neurocomportementaux : sous groupe de tests d’une batterie de tests de l’OMS et autres tests
Questionnaire de 16 items pour les symptômes
Tests réalisés en moyenne 2 ans après l’intoxication
69 % des non intoxiqués et 100 % des intoxiqués ont une exposition professionnelle
Intoxication aiguë
Peu d’exposition professionnelle dans les trois mois avant les tests (N=9)
Âge, niveau d’études, alcool
Détérioration des performances chez les personnes intoxiquées
Davantage de symptômes rapportés parmi les intoxiqués
Reidy et coll., 1992renvoi vers
États-Unis (Californie)
Intoxiqués : hommes hispaniques ayant subi deux intoxications : mévinphos en 1981 ; mévinphos, méthomyl, manèbe en 1984
Non intoxiqués : ouvriers usine d’emballage
Tests neurocomportementaux Espagnol
Tests réalisés 2 ans après le 2e épisode d’intoxication
Échelles d’anxiété et de dépression
45 % d’intoxiqués ont travaillé ≥16 ans en agriculture
Intoxication au mévinphos, méthomyl, manèbe
Caractéristiques des deux groupes sont identiques (âges, niveau d’étude, et consommation d’alcool)
Performances abaissées chez les intoxiqués aux tests de vitesse motrice, coordination, mémoire visio-spatiale
Élévation des scores d’anxiété et de dépression chez les exposés
Plus de symptômes
Steenland et coll., 1994renvoi vers
États-Unis (Californie)
Intoxiqués : OP, 1982-1990, hommes ≥ 16 ans, prise en charge médicale. Cas certains ou probables selon symptômes AChE…
Non intoxiqués : proches des intoxiqués
Conduction nerveuse
Sensibilité vibratoire
8 tests neurocomportementaux : Anglais/Espagnol + 2 autres tests
Stabilité posturale
Examen neurologique
 
Intoxications aiguës :
chlorpyrifos, diazinon, diméthoate, déméton méthyl, mévinphos, parathion, phosalone, autres
Âge, ethnie, IMC, niveau études, langue, sommeil, alcool, tabac, café, médicaments
Performances abaissées
Toutes intoxications (certaines + probables) : attention visuelle
Intoxications certaines : sensibilité vibratoire
Intoxication + hospitalisation : attention visuelle, test Symbol Digit, sensibilité vibratoire
Plus net si davantage de jours d’arrêt de travail. Pas de différence en fonction de l’année d’intoxication
Nishiwaki et coll., 2001renvoi vers
Tokyo
Intoxiqués par le gaz sarin (OP) lors de l’attentat de Tokyo en 1995
Intoxiqués : 27 personnels de secours + 30 policiers
Non intoxiqués : 52 personnes des mêmes services
5 tests neurocomportementaux : Finger Tapping, temps de réaction simple, temps de réaction au choix, Digit Span, Benton
Évaluation du stress traumatique
Questionnaire de santé générale
Délai d’environ 3 ans depuis l’attentat
Intoxication au gaz sarin
Forte si hospitalisation (N=25)
Faible si seulement consultation (N=29)
Âge, tabac, alcool, niveau d’études, autres produits chimiques
Moins bonne performance au Digit Span (à rebours) chez les intoxiqués, en particulier chez les fortement intoxiqués, quelques performances abaissées aux autres tests mais différences non significatives
Wesseling et coll., 2002renvoi vers
Costa Rica
Plantations de bananes, Hommes 15-55 ans sans Antécédents neurologiques
Intoxiqués : OP/carbamates (N=81)
Non intoxiqués : tirés au sort dans les bananeraies (N=130)
Pas d’hospitalisation pour ces intoxications
Questionnaires de symptômes neurologiques
Batterie de tests : mémoire, attention, facultés psychomotrices et visuomotrices, langage, affect
 
Intoxications
OP : terbufos, phénamiphos, éthoprophos, diazinon, cadusaphos, chlorpyriphos ;
Carbamates : carbofuran, oxamyl
Histoire professionnelle détaillée
Index d’exposition=nb j/an x nb an x % expo/emploi x EPI
Exposition récente <3 mois
AChE plasmatique
Acuité visuelle, âge, niveau d’études, alcool, tabac, heure test, solvants, sommeil, médicament, caféine…
Performances abaissées à 13 tests sur 14 pour les sujets intoxiqués, mais surtout pour les tests psychomoteurs et visiomoteurs, moins net avec les carbamates qu’avec les OP
Plus grande fréquence des symptômes neuropsychiatriques
Roldan Tapia et coll., 2006renvoi vers
Espagne (Sud)
1997
Intoxiqués : hommes hospitalisés pour intoxication aiguë hors suicide par OP/carbamates dans les 3 mois, 16-66 ans, score MMS ≥ 28 (N=24)
Non intoxiqués : hommes dans les serres exposés chroniquement
Non exposés : hommes n’ayant jamais eu de contact avec les OP/carbamates (pour plus de détails, voir Roldan Tapia et coll., 2005renvoi vers)
Tests neurocomportementaux : batterie de tests de l’OMS + autres tests (Stroop, TMT, WAIS, test des similitudes, Digit Span, Rey, Benton…)
Pour intoxiqués : 3 mois après l’intoxication puis à 1 an
Pour non intoxiqués : 2/7 jours après traitement et à 6 mois
 
Exposition professionnelle
Intoxications aiguës (*), symptômes, score de Glasgow
OP : malathion, diméthoate, méthamidophos*, phénamiphos*, fosétyl
Carbamates : oxamyl, méthomyl*, mancozèbe
Endosulfan* (OC), cypermethrine, permethrine*, abamectine
BuChE sérique
Âge, niveau d’études, traumatisme crânien, antécédents neurologiques, médicaments, alcool, tabac…
Chez les personnes ayant été intoxiquées, détérioration des performances comparables à celles observées chez les personnes exposées 10 ans et plus
Détériorations perception et facultés visuoconstructives
Pas de lien entre symptômes et concentration de BuChE sérique, alors que celle-ci est associée au nombre d’épisodes d’intoxications aiguës
Études transversales : exposés/non exposés
Rodnitzky, 1975renvoi vers
États-Unis
Exposés : 12 agriculteurs + 11 applicateurs professionnels d’OP (OP dans les 15 j, >500 acres)
Non exposés : agriculteurs n’appliquant aucun pesticide (N=23)
Mémoire verbale (avec distracteur), vigilance (tests de réaction), langage, proprioception
 
AChE plasmatique et globulaire
Âge, niveau d’études
Baisse de l’AChE chez les exposés
Pas de différence de performance entre les deux groupes
Korsak et Sato, 1977renvoi vers
Hawaï
Exposés (OP) : 32 hommes étudiés en deux classes (faible/forte exposition)
Tests neurocomportementaux : Finger Tapping + autre test de motricité, Trail Making B et autre test de mémoire, test visuo-moteur, échelle de dépression
EEG
 
AChE plasmatique
Coexposition aux OC (mesure de la dieldrine) et des carbamates
Exposition domestique prise en compte
Score d’exposition chronique intégrant durée, nombre de jour/an, âge
Âge, ethnie
Baisse des performances aux tests visuomoteur et Trail Making B pour les sujets ayant un score d’exposition élevé
Quelques modifications de l’EEG en zone frontale
Maizlish et coll., 1987renvoi vers
États-Unis (Californie)
Applicateurs : employés en charge de la lutte contre la coccinelle japonaise en 1985 (granulés de diazinon)
Non applicateurs : personnel chargé de la supervision du programme
7 tests neurocomportementaux : performance continue, coordination main-œil, Symbol Digit, perception et mémoire visuelle, test de vocabulaire, Finger Tapping
Examen clinique
Questionnaire incluant 18 symptômes
Durée moyenne du programme : 39 jours
Métabolites urinaires des OP : DETP, DMTP avant et après le poste de travail (jour des tests)
Contamination externe : badge passif pour mesurer le diazinon, lavage de mains, contamination respiratoire
Âge, sexe, niveau d’études, neurotoxiques, alcool, médicament, café, tabac
Dose externe : 1,5 mg chez applicateurs et 0,02 mg chez non applicateurs
DETP : différences entre les 2 groupes, plus marqués après le poste
Différences de performances entre applicateurs et non applicateurs et avant/après exposition, mais pas de relation avec la dose de DETP
Misra et coll., 1994renvoi vers
Inde
Exposés : ouvriers appliquant du fenthion pulvérisé à dos 5 à 6 h/j jusqu’à la veille des tests (N=32)
Non exposés : employés de l’hôpital (N=25)
Examen clinique
Tests : Benton, Wechsler, Alexander Passalong (facultés créatives) et dextérité (coordination)
EEG : enregistrement des potentiels évoqués lors d’un test de reconnaissance auditive
 
AChE sérique
Âge, sexe, niveau d’études, catégorie socioéconomique
Altération des performances cognitives : de la mémoire, en particulier visuelle
Influence de l’âge sur les potentiels évoqués mais pas de lien avec les performances cognitives
Abaissement de l’AChE sans lien avec les performances
Ames et coll., 1995renvoi vers
États-Unis (Californie)
Sous-échantillon d’hommes d’une étude du NIOSH
Exposés : 45 travailleurs avec antécédents d’abaissement de l’AChE (mais sans intoxication aiguë franche)
Non exposés : proches des exposés (N=90)
8 tests neurocomportementaux, conduction nerveuse, sensibilité vibrotactile, équilibre postural, examen clinique
1 exposé/2 non exposés
Exposition professionnelle déterminée par le dosage de AChE globulaires et plasmatiques. Définition à partir de prélèvements antérieurs réalisés en 1985, 1988, 1989
Âge, langage, niveau d’études, tabagisme, prise récente d’alcool, thé, café, heures de sommeil, IMC
Pas de détérioration des performances aux tests neurocomportementaux chez les personnes exposées aux pesticides inhibant AChE
Stephens et coll.,
1995renvoi vers
Royaume-
Uni
Devon, Cumbria, Pays de Galle du Nord Hommes 16-65 ans, pas d’antécédents neurologiques
Exposés : éleveurs de ≥ 50 moutons (listes professionnelles)
Non exposés : ouvriers de carrière
Questionnaire de santé pour détecter problème psychiatrique : 30 items
Questionnaire mémoire subjective : 43 items
Tests cognitifs mémoire court terme, attention soutenue, vitesse de traitement de l’information, mémoire long terme
 
Questionnaire professionnel
Index d’exposition=nb moyen moutons/an x nb bains/an x nb années OP
Dialkylphosphates urinaires
Pas d’exposition récente (<2 mois)
Âge, niveau d’études, latéralité, alcool, tabac, infection virale, caféine, langue, heure du test
Ralentissement des performances aux tests chez les exposés, allongement du temps de réaction, difficultés dans les tâches d’attention soutenue et de traitement de l’information. Ralentissement plus prononcé pour les tests les plus difficiles chez les personnes les plus exposées. Plus grande vulnérabilité aux troubles psychiatriques
Cole et coll., 1997renvoi vers
Équateur
Producteurs de pommes de terre : des applicateurs de pesticides (N=123), des ouvriers travaillant dans les champs (N=28), des personnes consommatrices de pommes de terre (N=23) et des non exposés (N=72).
16-65 ans, au moins 4 ans d’étude
10 tests neurocomportementaux
Z score=(score prédit (/âge et niveau d’études) - score brut)/déviation standard chez les témoins
2 exposés pour 1 non exposé
Pesticides déclarés (noms, années, nb d’heures au cours du dernier mois)
Relevé auprès de l’exploitation des pesticides utilisés au cours des 6 derniers mois : dithiocarbamates, carbamates, organophosphorés (méthamidophos)
Dosage des AChE globulaires
Âge, sexe, niveau d’études, antécédents d’intoxication, alcool, antécédents de traumatisme crânien
Performances abaissées parmi la population agricole par rapport aux non exposés
Altération de l’attention et de la mémoire visuo-spatiale
Fiedler et coll., 1997renvoi vers
États-Unis (New Jersey)
Exposés : hommes blancs (N=57), arboriculture
Non exposés : hommes blancs (N=23) dans la culture de cranberries, petits commerçants (N=20)
Tests neurocomporte-mentaux : temps de réaction simple, performance continue, Stroop, coordination visuomotrice, Grooved Pegboard, Trails A et B, Digit Symbol et Digit Span, fluidité verbale, mémoire visuelle…
Tests neuropsychiatriques
Examen clinique neurologique
 
Calendrier professionnel vie entière
Index cumulé au cours de la vie prenant en compte la surface de la ferme, le type de tâches effectuées et le type de matériel employé, EPI
Antécédents d’intoxication aiguë
AChE globulaire
Âge, niveau d’études, facultés intellectuelles, antécédents médicaux, alcool, neurotoxiques
Pas de différence dans les performances sauf pour le temps de réaction, allongé chez les personnes exposées, avec un temps légèrement augmenté pour les plus exposés par rapport au moins exposés (définition des classes à partir de l’index cumulé)
London et coll., 1997renvoi vers
Afrique du Sud (Western cape)
Saison de traitement des fruits 1993
Hommes dits « de couleur » dans 113 fermes rattachées à 3 coopératives de fruits
Applicateurs (N=231)
Non applicateurs (N=115)
Tests neurocomportementaux de la batterie de l’OMS
Sensibilité vibratoire
2 exposés pour 1 non exposé
Durée moyenne d’exposition 20 ans
Exposition professionnelle
Calendrier professionnel
Tâches : expositions directes, indirectes
Matrice emploi exposition OP
Exposition environnementale : usage domestique, jardinage, résidence près zone traitée
AChE plasmatique/exposition récente aux OP
Âge, niveau d’études, tabac, alcool, traumatisme crânien, médicaments…
Exposition récente
Antécédents d’intoxication
Pas d’effet net de l’exposition sur la sensibilité vibratoire
Lien peu clair avec les performances aux tests
Donc globalement peu d’arguments en faveur de l’effet des expositions chroniques
Gomes et coll., 1998renvoi vers
Émirats Arabes
Migrants pakistanais, indiens, bangladais…
Exposés : ouvriers agricoles (N=226)
Non exposés : ouvriers industriels, services (N=226)
+ 92 « nouveaux » ouvriers agricoles
Questionnaire sur troubles de mémoire, troubles coordination
Tests : Digit Symbol Test, Aiming Test
Symptômes
Durée moyenne d’exposition 27 ans
AChE sérique
Non pas d’ajustement
Plus de symptômes chez les exposés
Baisse de l’AChE chez les exposés
Baisse importante des performances aux tests, corrélée avec le niveau d’AChE
Steenland et coll., 2000renvoi vers
États-Unis (Caroline du Nord)
Exposés : applicateurs de termiticides (liste de professionnels)
≥ 1 année, 1987-1997 (N=193)
Non exposés : proches des exposés appariés (N=106), ouvriers d’état (N=83)
Examen clinique
Tests neurocompor-tementaux : vocabulaire, Digit Span, attention soutenue, temps de réaction, Symbol Digit Test, mémoire visuelle…
Tremblement, sensibilité vibratoire, troubles équilibre, dextérité, coordination, vision, olfaction, vitesse de conduction
Questionnaire symptômes 24 items
Durée médiane de travail : 1,8 ans
Autres situations de traitement professionnel
Durée d’exposition au chlorpyrifos, chlordane, autres pesticides
Exposition récente oui/non
Antécédents d’intoxication au chlorpyrifos
Susceptibilité génétique Cellules buccales : génotype pour PON (paraoxonase)
Mesure TCP urinaire
Alcool, âge, race, niveau d’études, tabac, IMC, sommeil, alcool, solvants, café
TCP élevé dans urines des utilisateurs actuels
Pas d’impact sur la vitesse de conduction
Impact mineur sur l’équilibre, pas d’impact sur le tremblement et la sensibilité vibratoire. Pas de différence à l’examen clinique
Pas de différence aux tests neurocomportementaux
Mais davantage de symptômes rapportés par les personnes exposées
Van Wendel de Joode et coll., 2001renvoi vers
Costa Rica
Hommes 55-70 ans
Exposés : applicateurs de DDT (lutte contre malaria), ≥ 2 ans entre 1950 et 1997 (N=27)
Non exposés : gardes et conducteurs (N=27)
Exclus : antécédents neurologiques, exposition récente
Examen clinique
Questionnaire de symptômes
17 tests neurocomportementaux
5 années d’exposition au DDT en moyenne et 4 années aux OP
Histoire professionnelle
Deux niveaux d’exposition au DDT : haut et bas (années application)
Niveau d’études, tabac, alcool, malaria, caféine, solvants, IMC, habitude de vie, médicaments, état clinique…
Performances abaissées chez les exposés, en particulier pour l’attention verbale et la vitesse visuomotrice et sequencing, et pour les personnes les plus exposées. Plus de symptômes chez les exposés. Relation dose-effet pour les tests et pour les symptômes. Relation non expliquée par les OP
Farahat et coll., 2003renvoi vers
Égypte
Culture du coton, année 2000, en période de traitement.
Dix sites de la région de Menoufiya
Exposés : 52 hommes applicateurs
Non exposés : 50 employés de bureau
Exclusion de travailleurs saisonniers, <12 ans d’études, antécédents médicaux…
Examen neurologique des fonctions sensorielles et motrices
Tests neurocomportementaux : test des similitudes, Digit Symbol, Trail making, attention, Benton, mémoire…
Test de personnalité
 
Pas d’antécédents d’intoxication
Exposition professionnelle : pulvérisation à dos ou tracteurs d’OP (profénofos, chlorpyrifos, triaziphos, phorate), carbamates (carbaryl, thiodicarb), pyréthrinoïdes (esfenvalérate) et autres divers, de juin à septembre
AChE sérique
IMC, tabac, alcool, thé, café
Abaissement AChE sérique si exposition
Baisse des performances aux tests chez les exposés, non corrélée au niveau d’AChE, mais fonction de la durée d’exposition
Prévalence plus importante de symptômes neurologiques chez les exposés
Tests de personnalité : score de névrose plus élevé chez les exposés
Kamel et coll., 2003renvoi vers
États-Unis (Floride du centre)
1996-1997, deux communes, tirage au sort sur les listes Credit Union
28-55 ans
Exclusion : diabète, épilepsie, accident vasculaire cérébral
Exposés : 288 ouvriers agricoles (>1 mois)
Non exposés : 51 autres
Anglais et espagnol courants
Batterie de 8 tests dont 2 cognitifs (Digit Span, Symbol Digit Latency), motricité, sensibilité, équilibre…
16 années d’exposition en moyenne
Exposition professionnelle : calendrier professionnel (nombre d’années, tâches l’année précédente, travail avant 14 ans, travail saisonnier), détails pour certaines cultures (fougères ornementales, pépinières, récolte de citrons), quantification du nombre d’années de travail, antécédents d’intoxication aiguë
Âge, sexe, ethnie, niveau d’études, langage, tabagisme, alcool, traumatisme crânien, médicaments, acuité visuelle…
Globalement abaissement des tests chez les exposés, plus net si exposition l’année précédente mais possible confusion avec durée et autres variables. Pas d’effet du travail avant 14 ans.
Effet plus net dans les plantations de fougères ornementales
Résultat inchangé en excluant les 19 cas d’intoxication aiguë
Kilburn, 2004renvoi vers
États-Unis (Californie)
Exposés : personnel de bord de vols long courrier, ayant pulvérisé des insecticides (pyréthrinoïdes) (N=33)
Non exposés : listes électorales d’une ville de l’Arizona (N=202)
Tests neurocomportementaux (N=26), symptômes (N=35), échelle d’humeur, équilibre, acuité visuelle, audition, fonction pulmonaire…
 
Exposition professionnelle : les pyréthrinoïdes auraient été les plus utilisés
Niveau d’études, expositions chimiques, antécédents
Chez les exposés, altération de l’équilibre, de la force de préhension et de la discrimination des couleurs. Quelques anomalies neurocomportementales également
Stephens et Sreenivasan, 2004renvoi vers
Royaume-
Uni
Exposés : ouvriers arboriculture, ayant participé à une étude précédente (N=37)
Non exposés : ouvriers porcherie (N=26), ouvriers bâtiment (N=31)
7 tests neurocomportementaux informatisés et 2 questionnaires (Subjective Memory Questionnaire,General Health Questionnaire)
Chlorpyrifos
Mesure des métabolites urinaires (DEP, DETP) lors de l’entretien et précédemment en période de traitement
Historique des emplois avec exposition aux pesticides
Pas d’exposition aiguë, pas d’antécédents d’intoxication
Alcool, niveau d’études, âge
Baisse des performances (et ralentissement) chez les ouvriers de l’arboriculture par rapport aux ouvriers du bâtiment. Baisse également observée chez les ouvriers des porcheries
Pas de relation dose-effet
Roldan-
Tapia et coll., 2005renvoi vers
Espagne (Sud)
Mars/Avril 1998 (période de traitement)
Exposés : applicateurs hommes dans serres horticoles (N=40)
Non exposés : hôtellerie, techniciens maintenance, ouvriers usines, agents de sécurité (N=26)
Tests neurocomportementaux de la batterie de l’OMS et autres tests : Stroop, TMT, WAIS, test des similitudes, Digit Span, Rey, Benton
2/7 j après dernier traitement
Durée moyenne exposition : 10,9 ans
Exposition professionnelle : calendrier professionnel et symptômes associés, nombre d’années d’utilisation des OP et des carbamates
BuChE sérique au moment de l’entretien comme mesure de l’exposition actuelle
Âge, niveau d’études, traumatisme crânien, antécédents neurologiques, médicaments, alcool, tabac…
Détérioration des performances aux tests (perception, mémoire visuelle, temps de traitement des tâches…) chez les personnes exposées aux pesticides 10 ans et plus
Pas de lien avec l’inhibition de AChE au moment de l’entretien
Rothlein et coll., 2006renvoi vers
États-Unis (Oregon)
Exposés : Hispaniques 20-52 ans, travail en arboriculture, enfants inclus dans étude (N=92)
Non exposés : ouvriers de Newport (tourisme), pas en agriculture dans les 3 derniers mois, 18-50 ans, pas d’antécédents d’intoxication, bas niveau d’études (N=45)
Tests neurocomportementaux : Finger Tapping, temps de réaction, Symbol Digit, Digit Span, attention sélective, 16 items résumés en un index
 
Biomarqueurs urinaires : prélèvement avant les tests neurocomportementaux puis à l’automne, dosage de 5 dialkylphosphates (N=172)
Poussière de maison (N=26 foyers) : azinphos-méthyl, chlorpyrifos, phosmet, diazinon, malathion, méthyl parathion
Âge, sexe, niveau d’études
Corrélation entre les niveaux urinaires et les mesures environnementales
Performances plus basses chez les exposés
Corrélation entre le niveau de performance et le niveau de métabolites urinaires
Rohlman et coll., 2007renvoi vers
États-Unis (Oregon)
Été 2004, adolescents (12-18 ans) et adultes (19-60 ans) hispaniques
Exposés travail agricole (N=119)
Non exposés : pas de travail actuel en agriculture (N=56)
Tests neurocomportementaux Anglais/Espagnol
Finger Tapping, Symbol Digit, temps réaction, Digit Span, attention sélective, mémoire visuelle…
38/175 personnes avaient réalisé des traitements au cours de leur vie
Durée d’exposition en agriculture
Exposition au cours du dernier mois
Avoir manipulé des pesticides : déclaratif
Biomarqueurs d’exposition et ADN collectés
Âge, niveau d’études, sexe
Baisse des performances avec nombre d’années en agriculture, pour les tests de mémoire visuelle, traitement information, temps de réaction, attention sélective
Interaction avec le sexe, pas de différence d’effet chez les adolescents
Manipulation de pesticides associée à la diminution des performances
Mackenzie-
Ross et coll., 2010renvoi vers
Angleterre du Nord et Sud Ouest
Exposés (OP) : éleveurs de moutons âgés de 18-78 ans sélectionnés à partir de fichiers professionnels et via les médias (N=127), actifs ou retraités, ayant changé ou arrêté pour cause médicale
Non exposés : policiers ruraux (fichiers professionnels + médias) (N=78)
Critères inclusion : ≥ 5 ans d’exposition aux OP avant 1991, pas d’antécédents d’intoxication aiguë, neurologiques ou alcool
Tests neurocomportementaux : mémoire de travail, visuelle, auditive, vitesse de réponse, motricité fine, flexibilité, stratégie, facultés verbales, visuo-spatiales, raisonnement…
Plus de 20 ans d’exposition en moyenne, et dernière exposition remonte en moyenne à 10 ans
Exposition professionnelle : calendrier professionnel, caractéristiques de l’exposition à partir de symptômes associés (syndromes pseudo grippaux), prise en compte de la durée d’exposition
Polymorphismes PON1 (paraoxonase)
Apparié sur niveau d’études, sexe, QI
Ajustement sur âge, dépression, anxiété
Altération de la mémoire, vitesse de réponse, motricité fine, flexibilité, stratégie chez les éleveurs en activité et retraités que l’on compare aux policiers ou aux normes en population
Pas de mise en évidence du rôle des polymorphismes génétiques
Rôle de la durée d’exposition
Études de suivi : exposés/non exposés
Daniell et coll., 1992renvoi vers
États-Unis
Avant/après saison
Exposés : ouvriers (N=49) de vergers (N=16)
Non exposés : ouvriers d’abattoirs (N=40) ont participé aux deux évaluations avant (janvier/février) et après (septembre/octobre) la saison
Batterie « Neurobehavioral Evaluation System » informatisée, Anglais/ Espagnol, dont Finger Tapping, coordination main/œil, test réaction, Symbol Digit Test
Dans groupe « exposés » : seulement deux sujets sans exposition directe
Questionnaire sur les opérations de traitement, EPI
Trois ouvriers avec des antécédents d’intoxication aiguë
Mesure de l’AChE
Azinphos méthyl majoritaire
Antécédents médicaux, alcool, neurotoxiques, sommeil, café, niveau d’études, ethnie, langue
Analyse exposés/non exposés avant saison : pas de différence de performances après prise en compte de la langue et du niveau d’études
Analyse avant/après saison : quelques différences chez sujets parlant espagnol, disparaissant après prise en compte des performances avant saison
Bazylewicz-
Walczak et coll., 1999renvoi vers
Pologne
Avant/après saison
Entreprises jardinage
Exposées : femmes employées au jardinage (N=26)
Non exposées : femmes employées dans des cantines, cuisines, travaux administratifs (N=25)
6 tests neurocomportementaux, 2 questionnaires sur les symptômes (humeur, et questionnaire finlandais sur les symptômes subjectifs) administrés avant et après période de traitement
1 exposé pour 1 non exposé
Organophosphorés appliqués dans les serres : les plus fréquents : dichlorvos, méthamidophos, méthidathion, pirimiphos-méthyl
Mesures air de la serre en 5 points à 4 moments de la journée
Mesure sur vêtements, eau de lavage des mains
Index d’exposition sommant exposition dermale (~98 %) et respiratoire
Âge, sexe, niveau études, lieu de résidence
Pas de détérioration dans la comparaison avant/après saison de traitement
Performances abaissées dans le groupe exposé par rapport au groupe non exposé : allongement des temps de réaction, instabilité motrice (et troubles de l’humeur)
Salvi et coll., 2003renvoi vers
Brésil
Ouvriers du tabac
Exposés : utilisation d’un OP depuis 3 mois, et en particulier la veille (N=37)
Non exposés : pas d’utilisation d’OP dans les 3 mois (N=25)
Évaluation psychiatrique : MINI
Échelle pour Parkinson
Tests : MMS et Word Span Test en période d’exposition puis après 3 mois d’arrêt
 
Précisions sur l’utilisation des OP : dates, Epi, substance
Chlorpyrifos, acéphate
Antécédents d’intoxication aiguë
Activité AChE
Alcool, tabac
Pas de lien avec AChE
Signes de parkinsonisme
Pas de modification des performances aux tests en fonction de l’exposition
Études de cohortes prospectives
Bosma et coll., 2000renvoi vers
Pays-Bas
Maastricht Aging Study
1 069 personnes âgées de 50 à 80 ans à l’inclusion
838 personnes au suivi à 3 ans
5 tests neurocomportementaux
Détérioration si au moins deux performances dans le décile inférieur
2,2 % soit 17 personnes se déclarant exposées
Auto-déclaration de l’exposition
Questionnaire professionnel : calcul d’une probabilité d’exposition à partir des codes de profession
Alcool, tabagisme, médicaments, antécédents familiaux de démence, maladies cardiovasculaires, charge mentale
Analyse transversale
Auto-déclaration : OR=4,9 ; IC 95 % [1,5-16,1]
À partir questionnaire professionnel : OR=1,5 ; IC 95 % [1,0-2,1]
Analyse longitudinale
Auto-déclaration : OR=3,1 ; IC 95 % [0,5-18,4]
À partir questionnaire professionnel : OR=2,0 ; IC 95 % [1,3-3,2]
Baldi et coll., 2001renvoi vers et 2011renvoi vers
France
Affiliés à la Mutualité Sociale Agricole, exposés aux pesticides (directement ou indirectement) et non exposés
N=917 à l’inclusion, N=650 au suivi
(Cohorte Phytoner)
9 tests neurocomportementaux
Exposition directe (traitements) : 58 %
Exposition indirecte (réentrée) : 19 %
Calendrier professionnel
Questionnaires spécifiques sur les tâches agricoles réalisées, matériel utilisé…
Âge, sexe, niveau d’études, alcool, dépression, tabagisme
Performances abaissées chez les personnes exposées, à l’inclusion et au suivi à 4 ans (OR>2)
Influence de l’exposition sur le MMSE et le test de Stroop au suivi à 4 ans
Delgado et coll.,
2004renvoi vers
Nicaragua
Exposés : patients hospitalisés (1992-1996) pour une intoxication aiguë par un OP dans 2 hôpitaux
Non exposés : employés de coopératives de pêche et élevage non intoxiqués
1er examen d’hospitalisation : 1 à 31 jours après intoxication
2e examen : + 24 à 180 jours
3e examen : + 416 à 1 251 jours
Test de mémoire verbale
Digit symbol Test
Symptômes : questionnaire Q16
77 exposés dont 62 revus aux 1er et 2e suivis et 53 au 3e suivi
39 non exposés dont 28 au 3e suivi
Antécédents d’intoxication par OP (vérification au domicile/lieu de travail de la personne pour les 2/3), prise en compte du niveau de sévérité (modéré ou sévère) et des circonstances (professionnelles/suicides)
Exposition professionnelle : nombre total de jours d’exposition aux OP
AChE globulaire
Âge, niveau d’études, alcool habitudes de vie, antécédents d’intoxications
Perturbation de la mémoire verbale précocement après l’intoxication mais apparente récupération. Troubles visuomoteurs persistent chez les exposés. Symptômes neuropsychiatriques apparaissent plus tardivement.
Starks et coll., 2012renvoi vers
États-Unis (Iowa et Caroline du Nord)
Agricultural Health Study Applicateurs professionnels de pesticides (N=701) résidant à moins de 150 miles d’un centre où les tests étaient réalisés. Exclusion des patients atteints de SLA, Parkinson, autres maladies, ou ayant eu une intoxication aiguë
9 tests neurocomportementaux
 
Exposition professionnelle :
16 organophosphorés (questionnaire + entretien) : nombre de jours cumulés au cours de la vie pour 16 OP pour lesquels il y avait plus de 50 exposés et pour 4 carbamates (aldicarbe, benomyl, carbaryl, carbofuran)
Âge, taille, niveau d’études, état de résidence, alcool, tabac, caféine, traumatisme crânien, utilisation d’antidépresseurs, autres toxiques (solvants organiques, fumées de soudure,…)
Acuité visuelle et test de lecture
Association positive avec 3 tests mais négative avec 6 autres tests n
Baisse de performance (1 ou plusieurs tests) associée avec des pesticides spécifiques (éthoprop, malathion, disulfoton, terbufos)
Inversement, une augmentation des performances est constatée avec d’autres pesticides ainsi qu’une variation selon l’état de résidence

AChE : Acétylcholinestérase ; BuChE : Butyrylcholinesterase ; DEP : Diéthylphosphate ; DETP : Diéthylthiophosphate ; EEG : Électroencéphalogramme ; EPI : Equipement de protection individuelle ; IMC : Indice de masse corporelle ; MINI : Mini-International Neuropsychiatric Interview ; MMS : Mini-Mental State ; NIOSH : National Institute for Occupational Safety and Health ; OP : Organophosphorés ; OMS : Organisation mondiale de la santé ; TCP : 3,5,6-trichloro-2-pyridinol ; TMT : Trail Making Test ; WAIS : Wechsler Adull Intelligence Scale

Plus récemment, dans une étude menée selon le même schéma, chez des ouvriers travaillant dans des bananeraies au Costa Rica, un abaissement des performances aux tests a été observé chez des ouvriers intoxiqués par des inhibiteurs de l’acétylcholinestérase comparés à ceux non intoxiqués (Wesseling et coll., 2002renvoi vers). Les effets semblaient plus prononcés pour les personnes intoxiquées par des organophosphorés par rapport à ceux qui l’avaient été par un carbamate (carbofuran, oxamyl). Une étude comparable a également été réalisée plus récemment dans le sud de l’Espagne, en adjoignant aux groupes de personnes intoxiquées et non intoxiquées par des organophophorés, un groupe de personnes exposées à ces substances de manière chronique par leur activité professionnelle dans des serres horticoles (Roldan Tapia et coll., 2006renvoi vers). Une baisse des performances était là aussi observée chez les personnes ayant subi une intoxication, et celle-ci était comparable à celle des personnes exposées professionnellement pour des durées de 10 années ou plus, sans manifestation d’intoxication aiguë. Enfin, dans les suites d’un attentat au gaz sarin (organophosphoré) dans le métro de Tokyo, des troubles de la mémoire ont été observés trois ans après l’événement parmi les personnes ayant subi une intoxication (Nishiwaki et coll., 2001renvoi vers).
En résumé, les études tendent à montrer une baisse des performances chez les personnes ayant subi une intoxication, et d’après une étude, elle est comparable à celle des personnes exposées professionnellement pendant 10 années ou plus.

Exposition chronique aux pesticides : études transversales comparant des personnes exposées de manière chronique à des personnes non exposées

Une quinzaine d’études ont également adopté un schéma transversal, non plus pour déceler les effets retardés sur les fonctions cognitives d’expositions massives, mais pour rechercher l’effet d’expositions chroniques, essentiellement professionnelles. Ces études comparaient à un temps donné, un groupe de sujets exposés de manière prolongée aux pesticides à un groupe de sujets non exposés. La grande majorité de ces études se sont focalisées sur les organophosphorés ou autres inhibiteurs de l’acétylcholinestérase, tels que les insecticides carbamates. Seules cinq études se sont également intéressées à d’autres substances : une étude a porté sur des ouvriers exposés aux pesticides utilisés dans la culture de fougères, d’agrumes et de pépinières (Kamel et coll., 2003renvoi vers), une autre sur des expositions agricoles non spécifiques (Rohlman et coll., 2007renvoi vers), deux ont inclus des expositions aux organochlorés (Steenland et coll., 2000renvoi vers ; Van Wendel de Joode et coll., 2001renvoi vers), et une dernière étude portait sur le personnel de bord des avions afin d’observer les effets des expositions aux pyréthrinoïdes (Kilburn, 2004renvoi vers).
Ces études se sont déroulées dans des contextes très divers, mais généralement spécifiques et caractérisés par l’importance de la lutte contre les insectes : culture du coton en Égypte (Farahat et coll., 2003renvoi vers) ; culture des fruits en Afrique du Sud (London et coll., 1997renvoi vers), au sud de l’Espagne (Roldan Tapia et coll., 2005renvoi vers), au Costa Rica (Wesseling et coll., 2002renvoi vers), au Royaume-Uni (Stephens et Sreenivasan, 2004renvoi vers) et dans l’Oregon (Rothlein et coll., 2006renvoi vers) ; culture des légumes en Équateur (Cole et coll., 1997renvoi vers) ; désinsectisation des moutons au Royaume-Uni (Stephens et coll., 1995renvoi vers ; Mackenzie-Ross et coll., 2010renvoi vers), désinsectisation dans le cadre de la lutte contre la malaria au Costa Rica (Van Wendel de Joode et coll., 2001renvoi vers) ou utilisation de termiticides en Caroline du Nord (Steenland et coll., 2000renvoi vers).
L’évaluation portait sur un nombre limité de personnes exposées, parfois inférieur à 50. Seules trois études incluaient plus de 200 personnes exposées (London et coll., 1997renvoi vers ; Gomes 1998renvoi vers, Kamel et coll., 2003renvoi vers). Toutes ont procédé par des entretiens en face à face au cours desquels une série de tests neurocomportementaux a été administrée. Ces tests étaient divers et en nombre variable, incluant parfois la batterie proposée par l’OMS en 1987 (Neurobehavioral Core Test Battery). La diversité des atteintes neurotoxiques susceptibles d’être identifiées en présence de pesticides, et l’évolution permanente des connaissances dans le domaine de la neuropsychologie, ont conduit les chercheurs à compléter ou remplacer cette batterie « de base » par des tests explorant des domaines spécifiques du système nerveux central. Compte tenu de cette diversité, il n’est pas facile d’effectuer des comparaisons dans les tests utilisés, qui, même sous des appellations identiques pouvaient faire appel à des protocoles différents. Les domaines explorés étaient notamment l’aptitude intellectuelle globale, l’attention, la concentration, l’orientation, la mémoire, la perception visuelle, les aptitudes constructives et motrices, le langage… À ces tests neurocomportementaux, d’autres explorations du système nerveux étaient ajoutées dans certaines études : tests de conduction nerveuse, de sensibilité vibratoire, d’équilibre postural, questionnaire sur les symptômes neurologiques, évaluation de personnalité, électroencéphalogramme (Korsak et Sato, 1977renvoi vers ; Misra et coll., 1994renvoi vers).
Concernant l’exposition, elle pouvait être déterminée par des dosages biologiques (mesure de l’acétylcholinestérase globulaire et/ou plasmatique, butylcholinestérase plasmatique, métabolites urinaires des organophosphorés), et/ou par des questionnaires retraçant un historique professionnel de durée variable (de quelques mois à l’ensemble de la carrière). Ces marqueurs biologiques ne sont cependant le reflet que d’expositions récentes et ne traduisent aucunement les expositions sur l’ensemble de la vie professionnelle des individus. L’étude de Rothlein et coll. (2006renvoi vers) recherchait également des métabolites dans l’environnement domestique (poussières de maison). Les antécédents d’intoxication aiguë récente ou ancienne étaient généralement recherchés, parfois objectivés par des mesures de l’acétylcholinestérase, afin de les distinguer des expositions chroniques sans épisode aigu.
Certaines de ces études transversales n’ont pas mis en évidence d’association entre l’exposition et les performances cognitives (Rodnitzky, 1975renvoi vers ; London et coll., 1997renvoi vers ; Fiedler et coll., 1997renvoi vers ; Ames et coll., 1995renvoi vers ; Steenland et coll., 2000renvoi vers). Ces résultats négatifs peuvent traduire une réelle absence d’effet mais pourraient aussi s’expliquer par une insuffisance de contraste d’exposition entre les groupes étudiés et/ou un délai insuffisant entre l’exposition et la mesure des performances. La plupart des études ont cependant conclu à des altérations modérées des performances aux tests, impliquant en particulier l’attention, chez des sujets exposés professionnellement de manière chronique aux pesticides (tableau 15.Irenvoi vers).
En résumé, les études ont pris en considération des expositions professionnelles aux pesticides et en particulier aux organophosphorés dans des contextes très divers. Une majorité de ces études rapportent des altérations modérées des performances aux tests d’attention.

Exposition aiguë ou chronique aux pesticides : études de suivi (avant/après exposition) et études de cohorte

Peu d’études ont pris en considération la dimension longitudinale de l’impact des pesticides sur les fonctions cognitives et cherché à caractériser les performances chez un même sujet à plusieurs temps de son parcours professionnel.
Une étude a procédé à une comparaison avant et après une journée de traitement comportant une utilisation de pesticides organophosphorés en Californie lors d’une campagne de désinsectisation par le diazinon contre les coccinelles (Maizlish et coll., 1987renvoi vers). Trois autres études ont comparé les performances avant et après une saison de traitement par des organophosphorés chez des ouvriers travaillant dans des vergers (Daniell et coll., 1992renvoi vers), dans le contexte d’entreprises de jardinage en Pologne (Bazylewicz-Walckzak et coll., 1999renvoi vers) ou dans des plantations de tabac (Salvi et coll., 2003renvoi vers). Aucune de ces études n’a pu conclure à une modification significative des performances cognitives après une journée ou une saison de traitement, même si la comparaison avec un groupe non exposé mettait en évidence des différences avec les sujets exposés.
Par ailleurs, quatre cohortes ont permis d’étudier de manière longitudinale des effets à plus long terme, l’une en population générale au Pays-Bas (Bosma et coll., 2000renvoi vers), la seconde dans le secteur viticole en France (Baldi et coll., 2001renvoi vers et 2011renvoi vers), la troisième portant sur des personnes ayant été (ou non) intoxiquées par des organophosphorés au Nicaragua (Delgado et coll., 2004renvoi vers), enfin l’Agricultural Heath Study aux États-Unis (Starks et coll., 2012renvoi vers).
La cohorte menée aux Pays-Bas portait sur 1 069 personnes âgées de 50 à 80 ans à l’inclusion, réinterrogées après 3 ans de suivi. La dégradation des performances cognitives a été évaluée par une série de tests neurocomportementaux effectués à l’inclusion et au suivi. L’analyse longitudinale mettait en évidence un lien entre l’exposition professionnelle aux pesticides et la dégradation des performances cognitives, avec un risque non significatif pour les personnes déclarant avoir utilisé des pesticides, et un risque significatif (OR=2,0 (IC 95 % [1,3-3,2]) dans les analyses prenant en compte la probabilité d’exposition estimée à partir du calendrier professionnel des individus (Bosma et coll., 2000renvoi vers).
La cohorte française Phytoner en Gironde incluait 917 salariés affiliés à la Mutualité Sociale Agricole et mettait en évidence dès l’inclusion un risque accru de performances abaissées chez les sujets exposés aux pesticides par rapport à ceux qui ne l’étaient pas (Baldi et coll., 2001renvoi vers). Ce résultat était confirmé par le suivi à 4 ans de la cohorte qui de plus mettait en évidence une dégradation plus marquée au cours du temps de certains tests (MMSE et test de Stroop) chez les personnes exposées (Baldi et coll., 2011renvoi vers).
La cohorte du Nicaragua incluait 77 personnes ayant subi une intoxication aux organophosphorés avec hospitalisation et 39 personnes non exposées, les deux groupes ayant été testés à l’inclusion, puis lors de deux suivis (entre 24 et 180 jours, et entre 416 et 1 251 jours). Chez les personnes intoxiquées, des perturbations transitoires de la mémoire verbale et des troubles visuo-moteurs persistants étaient observés (Delgado et coll., 2004renvoi vers).
Sur un sous échantillon de l’Agricultural Health Study (N=701), des tests neurocomportementaux ont été administrés afin d’étudier la relation entre performances et expositions à 16 organophosphorés distincts, notamment le nombre de jours cumulés au cours de la vie. Les résultats obtenus étaient peu concordants : des baisses de performances en particulier aux tests de vitesse motrice et de perception visuelle étaient observées avec deux organophosphorés alors que pour 5 autres molécules des améliorations des performances étaient mises en évidence. De plus, des divergences étaient observées entre les deux États participant à la cohorte (Starks et coll., 2012renvoi vers).
En résumé, certaines études ayant effectué une analyse longitudinale mettent en évidence un lien entre l’exposition professionnelle aux pesticides et la dégradation des performances cognitives. En Gironde, la cohorte française Phytoner constate une baisse des performances cognitives à l’inclusion et au suivi chez les personnes exposées.

Exposition chronique aux pesticides : revues de la littérature

Entre 2002 et 2012, quatre revues et une méta-analyse ont été réalisées concernant les effets des pesticides sur le fonctionnement du système nerveux central (tableau 15.IIrenvoi vers). Les deux premières ne précisaient pas de stratégie de recherche concernant les articles inclus (Jamal et coll., 2002renvoi vers ; Kamel et Hoppin, 2004renvoi vers), alors que les trois plus récentes précisaient des mots clés, ciblant des pathologies neurocomportementales (Colosio et coll., 2009renvoi vers ; Rohlman et coll., 2011renvoi vers ; Ismail et coll., 2012renvoi vers). Seule la revue de Kamel et Hoppin n’était pas centrée sur les organophosphorés et examinait des effets neurologiques divers incluant également les pathologies neurodégénératives. Les quatre autres synthétisaient les études portant sur les effets chroniques des organophosphorés avec ou sans manifestation aiguë ; la revue de Rohlman et coll. (2011renvoi vers) était en lien avec les niveaux de biomarqueurs plasmatiques ou urinaires.

Tableau 15.II Revues et méta-analyse sur la relation entre exposition aux pesticides et troubles cognitifs

Référence
Stratégie de recherche
Exclusion
Nombre articles
Principales conclusions
Jamal et coll., 2002renvoi vers
Revue
Non précisée
Inclut des études expérimentales
Revue des études portant sur les troubles neuropsychiatriques chroniques induits par les OP, avec ou sans intoxication aiguë
 
N=11 sur les troubles liés à des intoxications aiguës
N=31 sur les troubles sans intoxication aiguë
En présence d’intoxication aiguë, toutes les études mettent en évidence des associations positives
En l’absence d’intoxication aiguë, toutes les études expérimentales mettent en évidence un lien, et 80 % des études d’observation
Kamel et Hoppin, 2004renvoi vers
Revue
Non précisée
Revue générale des études épidémiologiques portant sur l’association entre pesticides et trouble ou maladie neurologique
Enfants <18 ans
N=21 sur troubles cognitifs
N=17 sur troubles psychomoteurs
Cognition : 16 études positives soit 76 %
Psychomotricité : 14 positives soit 82 %
Colosio et coll., 2009renvoi vers
Revue
Pubmed jusqu’en Mai 2008
Mots clés utilisés : « Behaviour », « Neurobehavioural », « Cognitive function », « Memory », « Attention », « Sensory motor », « Psychological changes » et « Pesticides », et substances séparément (OP, carbamates, fumigants, pyréthrinoïdes, certains OC)
Revues, articles méthodologiques
Prise en considération des OP
N=34 au total mais ne sont analysées que les études ayant porté sur OP
Résultats centrés sur OP
Pour la cognition, 19 articles dont 9 (47 %) trouvent une association positive et 4 ne concluent pas
Rohlman et coll., 2011renvoi vers
Revue
1950-Octobre 2010
Mots clés utilisés : « Pesticides » et « neurobehavioral » 
Limites : « Human »
Pas de critère d’âge
Étude du lien avec les biomarqueurs concernant les OP
Pas de données sur OP
Expositions aiguës ou intoxications
N=24 au total
19 études (79 %) trouvent des altérations des performances en lien avec les OP
18 études permettent d’analyser le lien entre biomarqueurs (12 dans le sang, 6 dans les urines) et performances neurocomportementales.
AChE : 7 (58 %) études montrent un abaissement chez les exposés, mais une seule fois corrélée avec les résultats aux tests
Métabolites urinaires : cohérence avec les expositions dans 5 études (83 %) mais une seule étude montre un lien avec les performances
Ismail et coll., 2012renvoi vers
Méta-analyse
1966-decembre 2010
Neurobehavioral, neuropsychological, memory, attention, sustained attention, divided attention, concentration, vigilance, visuomemory, visuospatial, cognitive, verbal, psychomotor, problem solving, response speed, coordination, hand-eye coordination, coding, complex functioning, motivation, learning, dexterity, perception, expressive language, WAIS-R, WISC-III, adolescent(s), child, children, adult, farmers, applying, agriculture, working, pesticides, organophosphates, insecticide, cotton fields, AChE inhibiting insecticide, outcomes, evaluation, effects, impact, assessment
Pas de données OP
Expositions aiguës ou intoxications
Utilisation de tests neuro-comportementaux déjà utilisés par au moins 3 autres études
Existence de données quantitatives
N=23 dont 17 retenues dans les analyses. Celles-ci ont été divisées en 21 groupes d’individus et analysées pour 23 paramètres neurocomportementaux
Quinze des 23 paramètres montrent des baisses de performances parmi les exposés
Hétérogénéité entre les études non résolue en considérant salariés/exploitants, mode de passation des tests (avec ou sans ordinateur) ou en prenant en compte la durée d’exposition, l’âge, la proportion d’hommes ou la qualité des études

AChE : Acétylcholinestérase ; OC : Organochlorés ; OP : Organophosphorés

Jamal et coll. (2002renvoi vers) observent qu’en présence de manifestations aiguës de neurotoxicité, la totalité des études (N=11) mettait en évidence un lien entre une exposition chronique aux organophosphorés et la survenue de troubles cognitifs, et qu’en l’absence de ces manifestations (N=31), l’ensemble des études expérimentales et 80 % des études épidémiologiques concluaient également positivement.
Kamel et Hoppin concluent dans le même sens, à la fois concernant la cognition (16 études positives soit 76 %) et la psychomotricité (14 études positives soit 82 %), de même que Rohlman et coll. (2011renvoi vers) qui identifient également une majorité d’études associant l’exposition aux organophosphorés à des altérations des performances cognitives (79 %).
Cependant, la synthèse de Rohlman et coll. (2011renvoi vers) souligne que le niveau des biomarqueurs étudiés (AChE ou métabolites urinaires) n’est qu’exceptionnellement corrélé aux effets observés. Le constat de Colosio et coll. (2009renvoi vers) est moins net : son analyse restreinte aux organophosphorés n’identifie que 9 études positives (47 %), soit moins que d’études non concluantes (N=4) ou négatives (N=6).
À partir de 17 études, Ismail met en évidence une baisse des performances aux tests explorant l’attention, les capacités visio-motrices, l’abstraction verbale, et la perception, mais il souligne l’hétérogénéité des études (Ismail et coll., 2012renvoi vers).
En résumé, la plupart des revues de littérature suggèrent un lien entre une exposition chronique aux organophosphorés et la survenue de troubles cognitifs avec ou sans manifestation aiguë sans toutefois de corrélation avec le niveau des biomarqueurs étudiés. Une première méta-analyse rassemblant la majorité des études de cohortes (applicateurs et agriculteurs) confirme une augmentation significative de certains déficits cognitifs (attention, capacités visuo-motrices, abstraction verbale, perception) chez les agriculteurs après une exposition chronique aux pesticides.
En conclusion, à ce jour, près d’une quarantaine d’études épidémiologiques ont recherché des effets sur les fonctions neurologiques centrales des sujets professionnellement exposés aux pesticides. La majorité de ces études sont de nature transversale, comparant les performances cognitives en fonction du statut oui/non vis-à-vis de l’exposition aux pesticides. Une partie d’entre elles portait sur des populations intoxiquées de manière aiguë par des organophosphorés, et une autre partie, plus nombreuse, sur des expositions chroniques sans manifestation aiguë. Quelques études ont adopté un schéma longitudinal. Globalement, comme en attestent les synthèses réalisées sur ce sujet, les études tendent à mettre en évidence des altérations des performances chez les personnes exposées, de manière plus claire chez celles avec des antécédents d’intoxication aiguë. Les altérations observées concernaient un éventail large de fonctions neurologiques centrales. Il pouvait s’agir dans le domaine cognitif de détérioration de l’attention, de la mémoire, de l’apprentissage, ou encore des difficultés motrices et/ou sensorielles. Très peu d’études se sont intéressées à des pesticides autres que les organophosphorés et/ou les carbamates, mais elles ont également montré des associations positives. Ces études reposent sur des tests neurocomportementaux se déroulant lors d’entrevues en face à face. Cette approche limite le nombre de sujets interrogés (rarement plus de quelques dizaines), mais permet une meilleure détermination des expositions, réalisée soit par questionnaire, soit par la mesure de biomarqueurs d’effets (AChE) ou d’exposition (métabolites urinaires). Néanmoins, comme l’ont montré Rohlman et coll. (2011renvoi vers) dans leur récente synthèse, ces niveaux en biomarqueurs n’étaient qu’exceptionnellement corrélés aux effets de santé observés, ce qui s’explique aisément par leur brève demi-vie. Dans quelques études, des efforts spécifiques ont été développés pour quantifier les expositions soit à partir de la simple durée des expositions, soit par le développement d’index fondés sur des observations de terrain, ou sur la mise au point de matrices. Certaines de ces études ont montré qu’une durée d’exposition d’au moins dix années semblait nécessaire pour voir apparaître les troubles. Par ailleurs, plusieurs études ont montré que les expositions les plus élevées, sur la base d’index prenant en compte les intensités liées aux tâches, s’accompagnaient d’une détérioration plus nette des performances. La mise en évidence de ces baisses de performance peut laisser craindre des détériorations s’aggravant au cours du temps, susceptibles de prédire ou d’accompagner des pathologies neuro-dégénératives telles que la maladie d’Alzheimer.

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