I. Expologie

2013


ANALYSE

3-

Méthodes et outils de mesure de l’exposition dans les études épidémiologiques

La connaissance des expositions est un élément clé en épidémiologie environnementale et professionnelle. Les études épidémiologiques procèdent par comparaison de groupes : comparaison des expositions de sujets malades et non malades dans les études cas-témoins, comparaison de la fréquence de maladie chez des sujets exposés et non exposés dans les études de cohorte. Quel que soit le schéma d’étude, la validité des résultats obtenus dépendra de la capacité à bien classer les sujets dans les groupes et donc à correctement définir leurs expositions. De plus, l’appréciation de la nature causale des associations étudiées repose sur un faisceau d’arguments parmi lesquels la mise en évidence de relations dose-effet joue un rôle important. Cette mise en évidence nécessite bien évidemment de pouvoir quantifier les expositions afin de déterminer des niveaux de risque en fonction des doses.
Lorsque l’étude s’intéresse à des pathologies à temps de latence long, comme des cancers ou des maladies neurodégénératives, il doit être pris en compte des expositions très anciennes et cumulées au cours du temps, ce qui augmente, sensiblement la diversité des produits potentiellement utilisés. Un mauvais recueil de l’information peut biaiser l’association entre l’exposition et la maladie. Les erreurs de mesure de l’exposition vont engendrer des biais de classement, certains sujets de l’étude pouvant être classés comme exposés alors qu’ils ne le sont pas, et inversement. On parle d’erreurs différentielles lorsque les erreurs d’évaluation diffèrent selon certaines caractéristiques des sujets (par exemple, sujets malades versus sujets non malades), et d’erreurs non différentielles lorsque que les erreurs d’évaluation des expositions n’affectent pas un groupe de sujets particuliers. Les conséquences sur les conclusions des études seront alors différentes (InVS et coll., 2006renvoi vers) :
• lorsque les erreurs de classement sont différentielles, le sens du biais (surestimation ou sous-estimation de l’association) est inconnu ;
• lorsqu’elles sont non différentielles, elles conduisent à une sous-estimation de l’association, qui peut être substantielle.
La recherche d’une relation dose-effet ou exposition-réponse rend d’autant plus importante la qualité de ces évaluations et la diminution des biais.
L’objectif des études d’exposition est de caractériser avec le plus de précision possible les groupes de population (exposées versus non exposées), les produits, substances, voire molécules en cause, et de quantifier, si possible, cette exposition par une estimation de l’intensité, de la durée et fréquence d’exposition et reconstituer l’historique d’exposition.

Difficultés méthodologiques d’une reconstitution historique des expositions aux pesticides

Si les difficultés liées à la mesure de l’exposition sont communes à l’étude de toutes les nuisances environnementales et professionnelles, un certain nombre de particularités inhérentes à la nature et aux usages des pesticides amplifient ces difficultés.
Parmi les particularités des expositions aux pesticides, on peut citer :
• l’hétérogénéité des activités et pratiques agricoles, liée à la diversité des cultures et élevages présents sur notre territoire et leur évolution au cours des dernières décennies ;
• les variations au cours du temps des produits disponibles sur le marché et de leur préconisation ;
• la multiplicité des matières actives (plus de 1 000 homologuées à ce jour), des associations de matières actives, d’adjuvants, d’impuretés de fabrication, dans les produits commercialisés (plus de 10 000 produits différents) ;
• l’usage concomitant de plusieurs produits dans une même saison de traitement, et d’un nombre encore plus grand au cours d’une vie professionnelle ;
• l’absence de traçabilité ou d’archivage organisé des utilisations ;
• la diversité des pratiques individuelles et entre exploitations (matériels, itinéraires techniques, main d’œuvre…) ;
• la méconnaissance des substances manipulées pour une partie des utilisateurs, en particulier les salariés qui ne sont pas en charge des commandes de produit et de la planification des traitements.
L’exposition peut être appréhendée selon deux approches : l’une directe par des mesures d’échantillons (prélèvements biologiques, contaminations cutanées, mesures dans l’environnement…), l’autre indirecte qui estimera le niveau d’exposition à l’aide d’outils tels que des questionnaires, des systèmes d’informations géographiques, de matrices emploi-expositions… et tentera de reconstituer l’historique de l’exposition.

Hétérogénéité des produits, des activités, des pratiques agricoles

Les pesticides, principalement de nature minérale jusque dans les années 1950, ont connu à partir du développement de la chimie organique, une progression majeure du tonnage utilisé ainsi qu’une forte diversification en termes de nature de produits. La diversité des molécules s’accompagne d’une hétérogénéité en termes de mécanismes d’action et de toxicité potentielle. Il importe de définir aussi précisément que possible les familles ou les molécules impliquées dans les effets de santé étudiés de manière à argumenter la plausibilité biologique des associations observées et à orienter la prévention vers les molécules responsables des effets.
Mais la reconstitution de l’historique d’utilisation des produits pour un individu donné revêt une grande complexité. À titre d’illustration, le tableau 3.Irenvoi vers présente le dénombrement des spécialités commerciales utilisées par un agriculteur bas-normand au cours de sa vie professionnelle (entre 1964 et 1997). Celui-ci avait traité à partir de 1978 pendant 19 ans, les cultures de blé, maïs, orge et betteraves et avait également appliqué des pesticides sur des prairies, dans la cour et sur les talus. Au total, il a ainsi été amené à utiliser 50 produits commerciaux herbicides, 28 fongicides et 31 insecticides différents, chacun de ces produits comportant 1 à 3 matières actives.

Tableau 3.I Nombre de produits commerciaux pesticides utilisées par un agriculteur bas-normand sur une ferme de polyculture au cours de sa vie professionnelle (Lebailly, communication personnelle)

Culture
Herbicides
Fongicides
Insecticides
Total
Blé
13
11
13
37
Maïs
10
0
4
14
Orge
12
11
0
23
Betteraves
15
6
14
35
Comme dans beaucoup de pays, il n’est pas gardé en France de mémoire « organisée » de l’utilisation des produits pesticides au cours du temps. Seule la Californie s’est dotée depuis 1990 d’un programme visant à enregistrer de manière exhaustive les utilisations agricoles de pesticides (incluant les élevages), mais aussi les utilisations non agricoles (espaces verts, terrains de golf, voiries…), sur la base d’une déclaration mensuelle obligatoire par les utilisateurs. Les données de cette base, organisée à une échelle géographique fine, sont même directement consultables en ligne1 .

Approches par mesures directes de la contamination externe et interne

Mesures de contamination externe

Peu d’études ont été développées pour connaître les niveaux d’exposition réels des populations exposées lors de l’utilisation des substances ou après les traitements (contact avec les cultures traitées par exemple). Il s’agit pourtant d’un élément essentiel à la définition de l’exposition au cours de la vie professionnelle et à la recherche de relation dose-effet. Cette démarche nécessite de pouvoir déterminer les paramètres pertinents par rapport au niveau d’exposition.
Dans le cadre des utilisations agricoles, des données de contamination cutanée, associées aux caractéristiques des tâches exposantes existent dans le cadre des modèles utilisés pour l’homologation des substances. Cependant, ces modèles ne représentent pas nécessairement l’ensemble des pratiques agricoles, ni des cultures existantes, et ils ne sont pas facilement utilisables dans le cadre d’études épidémiologiques. Quelques études de terrain indépendantes de l’industrie ont été conduites dans l’objectif de produire des données utiles à la détermination des expositions en conditions réelles d’utilisation. C’est le cas de l’étude Pestexpo en France, qui à partir de journées d’observation en grande culture, viticulture et maraîchage, a produit des mesures de contamination cutanée, associées à un grand nombre de caractéristiques des opérateurs, des exploitations, du matériel et de la culture traitée. Ces données permettent de documenter les niveaux d’exposition et d’élaborer des algorithmes d’exposition aux pesticides utilisés dans le milieu agricole en France (Baldi et coll., 2006renvoi vers et 2012 renvoi vers ; Lebailly et coll., 2009renvoi vers).
Ces données montrent l’importance de certaines tâches rarement prises en compte dans l’estimation de l’exposition des individus, telles que les opérations de nettoyage, les phases de ré-entrée dans les cultures en période de traitement et jusqu’à la récolte. D’autres études de ce type ont été initiées en France en pomiculture (Grimbuhler et coll., 2009renvoi vers) et dans le secteur des espaces verts (Cnam, Angers).
En population générale, plusieurs études ont documenté les différents modes de contamination externe en mesurant les concentrations de pesticides dans les poussières des résidences ou dans l’air intérieur, dans l’air à proximité de zones agricoles, dans l’eau ou dans les aliments, ou en montrant l’apport au lieu de résidence par les occupants utilisant des pesticides au travail comme les agriculteurs.

Mesures biologiques

Les mesures de pesticides et de leurs métabolites dans les différentes matrices biologiques cumulent l’ensemble des voies d’exposition, sans distinction particulière. Les échantillons biologiques les plus étudiés sont le sang et l’urine.
Cette approche suppose une connaissance de la pharmacocinétique des différents pesticides, de leur métabolisme et éventuellement de leurs métabolites ainsi que de disposer de techniques de mesures appropriées. La plupart des pesticides ont une demi-vie d’élimination relativement courte (de l’ordre de quelques jours) et doivent être mesurés peu de temps après l’exposition. Cette caractéristique restreint les mesures aux expositions récentes ou aux expositions chroniques.
Quelques pesticides peuvent néanmoins être mesurés longtemps après l’exposition. C’est le cas des organochlorés, certains de leurs métabolites persistant dans les tissus adipeux. Il est théoriquement possible, à partir de la connaissance de la demi-vie de ces métabolites et des facteurs individuels influençant l’excrétion de ces produits (allaitement, amaigrissement…) et à partir d’une mesure biologique actuelle, de reconstituer le niveau d’imprégnation probable à des périodes clés du passé. Cet exercice a été conduit dans le cadre d’une étude sur les cancers du sein pour estimer les expositions durant la puberté à partir d’une mesure au moment du diagnostic (Verner et coll., 2011renvoi vers).
L’interprétation des relations entre les mesures effectuées et les niveaux d’exposition cumulée doit toutefois être prudente (Abbott et coll., 1968renvoi vers) : une étude menée en Grande-Bretagne a montré une certaine uniformité des contaminations à la dieldrine, entre individus alors que les mesures concernant le DDT étaient plus variables. La dieldrine est initialement distribuée dans l’ensemble de l’organisme puis se relocalise principalement dans les graisses créant un équilibre entre les compartiments de rétention (graisse, cerveau, foie) et le sang dans la proportion de 156/1 (Hunter et Robinson, 1967renvoi vers). Mais la bioaccumulation et le taux d’élimination de la dieldrine dépendent de la masse graisseuse de chaque individu (Ineris, 2011renvoi vers) : les personnes ayant une plus grande masse graisseuse présentent une plus grande quantité de dieldrine totale mais les plus fortes concentrations de dieldrine sont observées dans les adipocytes des sujets maigres. Les variations temporelles individuelles des masses graisseuses rendent les interprétations des mesures complexes.
Les mesures biologiques ne peuvent être appliquées qu’aux pesticides dont la pharmacocinétique est connue et à ceux pour lesquels des techniques de mesures ont été développées. Il est à noter que les études pharmacocinétiques sont souvent réalisées chez les animaux et la question se pose quant aux extrapolations du modèle animal à l’Homme. Les relations entre expositions à divers pesticides et mesures de métabolites ont été étudiées chez l’animal et l’Homme (Woollen, 1993renvoi vers) démontrant le risque d’erreur lié à une extrapolation entre espèces. À titre d’exemple, une autre étude (Wilkes et coll., 1993renvoi vers portant sur les expositions à la cyperméthrine (un insecticide) et au molinate (un herbicide) montre que les extrapolations du modèle animal à l’Homme peuvent être incorrectes, les relations entre les doses de pesticides absorbés et les quantités de métabolites mesurés pouvant différer de manière importante entre les deux modèles.
Par ailleurs, le recueil des différentes ponctions biologiques doit être accepté par les participants et nécessite leur présence. Le coût financier lié aux analyses mais aussi à la logistique à mettre en place notamment dans le cas de grands effectifs, est aussi un frein au développement de ces méthodes.
Enfin, ces mesures donnent une valeur déterminée à un instant donné, limitant leur intérêt dans les études rétrospectives.
Les mesures biologiques peuvent concerner également certains marqueurs d’effet comme la mesure de l’activité de l’acétylcholinestérase dans le sang ou le plasma qui évalue l’activité biologique résultante des expositions aux organophosphorés et aux carbamates, inhibiteurs de cet enzyme (Peoples et Knaak, 1982renvoi vers). Il est nécessaire de mesurer le niveau de base de l’activité enzymatique avant la période d’utilisation des pesticides pour la comparer aux mesures ultérieures. Ces mesures ont lieu généralement moins de 24 heures après chaque tâche exposante.
D’autres études mentionnent l’identification de biomarqueurs d’effet comme les aberrations chromosomiques, adduits aux protéines… permettant de mieux évaluer le potentiel toxique des produits. Cependant, ces approches rendent compte d’une exposition à un ensemble de produits toxiques mais pas forcément de celle liée spécifiquement aux pesticides.

Approches indirectes permettant d’estimer l’exposition

En l’absence de mesures réelles disponibles de contamination, les études épidémiologiques doivent donc se doter d’outils permettant de déterminer les populations exposées versus non exposées, les niveaux d’exposition, la nature des produits utilisés, et de reconstituer l’historique des expositions aux pesticides.

Intitulés de professions et calendriers professionnels

La plupart des études épidémiologiques réalisées en milieu professionnel se sont contentées de distinguer les individus en « exposés » et « non exposés » aux pesticides de manière globale, sans précision sur la famille ou la matière active. Cette distinction peut être faite avec plus ou moins de précision. Elle peut reposer sur des éléments succincts concernant l’activité professionnelle, comme les intitulés de professions, parfois disponibles dans une base informatisée (données administratives, registres ou certificats de décès dans certains pays), ou recueillis à partir d’un questionnaire succinct.
L’analyse à partir des intitulés de profession peut permettre de distinguer des excès de risque pour certaines professions, dans certains secteurs d’activité. L’information peut refléter la dernière profession exercée, la profession la plus longtemps exercée, ou encore la profession déclarée par le sujet, sans autre précision sur sa durée ou sur ce qu’elle représente par rapport à l’ensemble du parcours professionnel.
Cependant, l’intitulé de profession peut être un indicateur imparfait des expositions aux pesticides. À titre d’exemple, une étude australienne a comparé l’estimation de l’exposition aux pesticides fondée sur les intitulés d’emploi à celle d’une expertise détaillée des questionnaires individuels sur les pesticides (MacFarlane et coll., 2009renvoi vers). Elle a montré que, si la plupart des emplois possiblement exposés étaient agricoles (68,8 %), la majorité des emplois agricoles ne comportaient pas d’exposition aux pesticides (78,3 %). Cette discordance entre intitulé d’emploi agricole et exposition aux pesticides serait plus marquée pour les activités d’élevage et pour les périodes les plus anciennes.
De manière plus fine, l’information concernant des emplois exposants peut être extraite de calendriers professionnels détaillés et complets sur l’ensemble de la carrière des individus, spécifiant les noms précis de l’ensemble des emplois et des secteurs d’activité, les dates d’exercice des emplois et d’éventuels détails sur les tâches réalisées. Il est dans ce cas possible de prendre en compte aussi bien des expositions directes (manipulation de pesticides par la personne elle-même) ou des expositions indirectes (emploi dans un environnement de travail où des pesticides sont présents). Ainsi, une personne déclarant un emploi de secrétaire-comptable pourra être considérée différemment vis-à-vis de son exposition aux pesticides s’il est précisé que cet emploi était situé sur une exploitation agricole ou dans un établissement bancaire. La précision des dates doit permettre en outre de classer en non exposées des personnes ayant exercé un emploi dans une période où certains pesticides n’étaient pas utilisés : un agriculteur dans les années 1950 et 1960 ne sera pas classé exposé aux pyréthrinoïdes de synthèse, mis sur le marché à la fin des années 1970.

Questionnaires

L’usage d’un questionnaire d’exposition est une méthode classique en épidémiologie environnementale et professionnelle. Il peut s’agir soit d’auto-questionnaires, les sujets remplissant eux-mêmes le questionnaire envoyé à leur domicile, ou fourni lors d’une visite médicale, par exemple ; soit de questionnaires remplis par un enquêteur spécialement formé et entraîné au cours d’une entrevue en face à face avec le sujet, ou par entretien téléphonique.
Si les auto-questionnaires sont une solution pratique de recueil de données, ils doivent rester simples dans leur conception, c’est-à-dire faciliter le remplissage sans trop de difficulté afin de s’assurer d’un bon taux de réponse et d’éviter des documents partiellement remplis, difficiles à interpréter, ou le risque d’entraîner un refus de participation. Pour faciliter ce remplissage, certaines études mettent en place une aide par téléphone. L’aide d’un enquêteur permet d’approfondir les questions, d’obtenir des informations plus complètes et limite les non réponses. Si l’intervention d’un enquêteur peut paraître une bonne solution pour améliorer la collecte d’information, il est important que ce dernier ne biaise pas les réponses. En effet, un enquêteur peut influencer de manière consciente ou, le plus souvent, inconsciente, le sujet interrogé lorsqu’il a connaissance de son statut pathologique (malade ou non malade) lors des études cas-témoins : l’enquêteur peut être amené à rechercher de manière plus intensive des expositions chez les personnes atteintes de la pathologie étudiée. Il peut exister également des différences de pratiques entre différents enquêteurs d’une même étude entraînant de fait des biais dans la qualité des réponses. La formation de ces derniers est donc un préalable indispensable.
Il n’existe pas de questionnaire type. Chacun est adapté en fonction des hypothèses de départ et de la méthodologie globale adoptée. Les questionnaires sont donc plus ou moins complexes. Habituellement, les études épidémiologiques en lien avec les populations professionnelles interrogent l’historique professionnel du sujet, et constituent ainsi une liste de ses emplois successifs (Tanner et coll., 2009renvoi vers). Comme indiqué précédemment, un simple intitulé d’emploi ne caractérise pas de manière suffisamment précise les expositions aux pesticides.
Bien souvent, seule la déclaration d’un emploi agricole est prise en considération. Bien des tâches exposantes sont réalisées sur des fermes en dehors des emplois : notamment travail familial – fréquemment réalisé dès l’enfance en milieu agricole, conjoints non déclarés comme travaillant sur la ferme, travaux saisonniers, périodes d’apprentissage ou de stage. À l’inverse, certains emplois agricoles ne sont pas toujours associés à l’utilisation de pesticides (ostréiculture,…). Par ailleurs, d’autres secteurs de professions non agricoles peuvent impliquer l’utilisation de pesticides : espaces verts (jardiniers, paysagistes, fleuristes, pépiniéristes, employés de collectivité et autres personnes en charge du traitement des terrains de sport, des voies ferrées, de la voirie), secteur du bois (charpentiers, menuisiers, traverses SNCF, poteaux électriques, ouvriers de scierie, commerce du bois…), et hygiène publique (désinsectisation de locaux publics ou privés, vétérinaires, pompiers, travailleurs sociaux…).
Pour améliorer la caractérisation des expositions aux pesticides, les questionnaires peuvent comporter des items spécifiques. Il peut s’agir de questions dichotomiques simples comme l’usage ou non de pesticides domestiques ou lors d’activités professionnelles (questions de type oui/non) complétées par le nombre d’années concernées.
Les questions précises sur l’utilisation des pesticides (nom du produit commercial, de la substance active, du ravageur ciblé…) ou plus ouvertes (par exemple, « listez les pesticides que vous avez utilisés au cours de votre carrière professionnelle ») restent complexes. Si les agriculteurs sont généralement capables de citer un certain nombre de molécules, probablement les plus communes ou celles qui ont été le plus longtemps commercialisées, l’exhaustivité paraît difficile à atteindre en raison du grand nombre de molécules utilisées au cours d’une vie professionnelle. Il apparaît que la mémorisation des substances varie avec l’importance de la menace agronomique que représente leur cible. Ainsi pour un viticulteur, les fongicides seront mentionnés prioritairement, et parmi eux, ceux qui luttent contre le mildiou, une maladie susceptible de ruiner la récolte et qui occasionne une pression répétée au cours de la saison, alors que le traitement herbicide sera moins spontanément rapporté car considéré comme moins prioritaire.
Dans certains contextes, la reconstitution des substances utilisées paraît encore plus aléatoire. C’est le cas pour les salariés qui ne sont pas en charge de la commande des pesticides, ni de la planification de leur utilisation. Ils ne sont généralement pas en mesure de citer les molécules qu’ils ont appliquées. C’est aussi le cas des personnes qui interviennent dans des cultures traitées sur le végétal sans connaitre les produits utilisés avant leur passage. Enfin, si les pesticides sont suspectés d’entraîner des troubles cognitifs, et en particulier des troubles de la mémoire, la validité du recueil ainsi obtenu peut évidemment être mise en doute. En population générale, cette reconstitution des produits pesticides utilisés au cours de la vie, par eux-mêmes ou par leur entourage, à partir de leur simple mémoire, apparaît quasiment irréalisable.
Une autre possibilité est de proposer aux personnes une liste préétablie de produits potentiellement utilisés. En milieu agricole, c’est ainsi qu’a procédé l’Agricultural Health Study, en sélectionnant une cinquantaine de molécules à partir des données de vente dans les deux États de l’étude (Iowa et Caroline du Nord), avant l’inclusion. Cette sélection permet de disposer de la même information pour l’ensemble des participants et reste gérable en durée dans le cadre d’un questionnaire auprès des personnes. La principale difficulté d’une telle sélection concerne la pertinence des critères de choix. La quantité vendue, qui certes augmente la probabilité pour les agriculteurs d’être exposés à un pesticide, n’est pas nécessairement corrélée à la toxicité de la molécule. Un choix sur une toxicité appréciée a priori, en amont de l’étude, pose également problème : elle suppose que les informations dont on dispose en matière de toxicité sont équivalentes pour toutes les molécules. Or certains pesticides ont donné lieu à très peu de recherches quand d’autres, généralement les plus anciens, ont été l’objet de très nombreux travaux résultant inévitablement en la mise en évidence d’un ou plusieurs effets toxiques. À titre d’exemple, les organochlorés et les organophosphorés, commercialisés depuis plus de 50 ans (et pour une bonne part retirés du marché) bénéficient d’une littérature scientifique très abondante : de ce simple fait, la connaissance de certains mécanismes d’action les concernant encourage encore aujourd’hui de nouveaux travaux, quand d’autres molécules, comme certains fongicides pour lesquels peu de données toxicologiques sont disponibles sont de ce fait beaucoup moins étudiés. De nombreuses listes prioritaires de pesticides ont été établies par divers organismes, sur des critères divers, de tonnages ou de toxicité, s’inspirant fréquemment les unes les autres. Il convient de garder ces limites en tête dans la mise en place d’étude sur des pesticides ciblés : les molécules pour lesquelles des données existent, ne sont pas nécessairement celles posant le plus de problèmes en matière d’exposition et/ou de santé dans un contexte donné à une période donnée.
En revanche, ce type de questionnaire peut être performant lorsque l’on s’intéresse à un faible nombre de produits (étude sur un type particulier de produit, une culture déterminée….). Certaines études préfèrent s’en tenir aux expositions aux pesticides de manière globale ou en précisant seulement les grands groupes : herbicides, fongicides et insecticides. L’absence d’information sur les matières actives aura comme conséquence l’impossibilité pour l’étude de mettre en lumière une substance active particulière.
Au-delà de l’interrogation de l’individu sur son usage des pesticides au sein de l’entreprise ou au domicile, des questions peuvent viser par exemple à identifier l’existence de tâches exposantes effectuées (préparation des produits, application des pesticides, nettoyage ou maintenance du matériel de traitement utilisant les pesticides) et la durée et fréquence de ces tâches. Pour les professionnels de l’agriculture, les questions peuvent aussi porter sur les cultures avec lesquelles ils ont été en contact, les méthodes d’application ou encore le type de matériel utilisé et les équipements de protection individuelle. À titre d’exemple, une étude cas-témoins dans l’État de Washington s’intéressant à l’exposition aux pesticides et à la maladie de Parkinson (Firestone et coll., 2005renvoi vers) a utilisé un questionnaire professionnel dans lequel on demandait aux sujets s’ils avaient « personnellement travaillé avec des machines d’épandage de pesticides, ou épandu des pesticides, ou bien travaillé dans une zone récemment traitée ». Une liste des substances était alors proposée. Dans un autre exemple concernant l’exposition domestique aux pesticides, des questions concernaient l’utilisation des pesticides par le sujet dans ou autour du domicile et une liste de produits commerciaux était proposée. Une étude s’intéressant aux expositions aux pesticides des enfants, a interrogé leurs mères sur l’utilisation d’insecticides domestiques, la pulvérisation de pesticides dans le jardin, le travail exposant des parents, le contact de l’enfant avec des herbicides ou des insecticides ou encore le traitement de la maison par un professionnel (Buckley et coll., 2000renvoi vers).
Le remplissage d’un questionnaire, par le sujet ou par l’intermédiaire d’un enquêteur, ne permet pas toujours de s’assurer de la qualité des données renseignées d’autant plus si les réponses attendues doivent être précises. Les performances des questionnaires utilisés dans les études épidémiologiques n’ont été que rarement évaluées. Dans le cadre de l’AHS, la fiabilité d’un questionnaire concernant l’auto-déclaration des pesticides par 4 088 applicateurs de l’Iowa a été évaluée par une double administration à un an d’intervalle (Blair et coll., 2002renvoi vers). La concordance des réponses entre les deux questionnaires était bonne (entre 70 % et plus de 90 %) pour les questions portant sur le fait d’avoir ou non appliqué des pesticides et pour certaines pratiques d’application. Elle ne variait pas selon l’âge des sujets, le niveau d’études ou la taille de l’exploitation. En revanche, la concordance était moins bonne, de l’ordre de 50 % à 60 %, pour les questions concernant la durée, la fréquence ou la date de début d’utilisation de ces pesticides. Certaines circonstances rendent impossible l’entretien auprès des personnes (décès, troubles de mémoire conséquents…). La fiabilité des réponses des proches (conjoint le plus souvent), a également été évaluée auprès d’agriculteurs de l’Iowa (AHS) (Brown et coll., 1991renvoi vers). La concordance était satisfaisante pour les questions en oui/non concernant l’usage des pesticides (83 à 100 %). En revanche, elle l’était moins pour les réponses à des questions plus précises, comme par exemple le nombre de jours d’utilisation des pesticides.
Dans une étude cas-témoins sur la maladie de Parkinson (Galanaud et coll., 2005renvoi vers), réalisée auprès d’assurés de la Mutualité sociale agricole (MSA), l’auto-questionnaire qui comprenait des questions sur le contact ou non avec des pesticides durant l’activité professionnelle, les produits utilisés et le type d’usage, a été complété par un questionnaire spécifique rempli par un médecin du travail de la MSA lors d’une visite au domicile. Seules les personnes ayant répondu être exposées aux pesticides ont reçu la visite du médecin. Les auteurs précisent que parmi les sujets déclarant utiliser professionnellement des pesticides, 20 % n’en utilisaient en fait pas.
Concernant l’exposition au domicile, la plupart des études épidémiologiques repose sur des questionnaires, même si récemment l’évaluation de l’exposition a été complétée par des mesures dans les poussières ou dans l’air intérieur (Loffredo et coll. 2001renvoi vers ; Brender et coll. 2010renvoi vers ; Dugas et coll. 2010renvoi vers ; Farooq et coll. 2010renvoi vers ; Turner et coll. 2010renvoi vers). Dans le but de mieux identifier les produits utilisés (insecticides, herbicides, rodenticides…) et éventuellement la classe chimique de ces produits, l’interrogatoire porte sur la cible à traiter (mauvaises herbes, insectes volants, insectes rampants…), le lieu de l’application, l’utilisateur (le répondant, un membre de la famille ou un professionnel), la fréquence d’utilisation, la forme du produit (spray, poudre, bâtonnet…), et si possible le nom du produit.
Le problème de mémoire est l’inconvénient majeur de ces questionnaires notamment quand ils sont rétrospectifs. Une inspection des produits stockés dans les maisons peut être un moyen de compléter les informations obtenues à partir de ces questionnaires.

Expertise des réponses

Les questionnaires remplis peuvent faire l’objet d’une analyse approfondie par des experts permettant de les vérifier, de repérer les indications erronées, et éventuellement de les corriger. Ces experts disposent d’une expérience dans le domaine des pesticides afin de documenter des niveaux d’exposition. La démarche consiste par exemple, à soumettre à un panel d’experts les calendriers professionnels des sujets d’une étude, et à leur demander de se prononcer individu par individu sur la notion d’exposition à la nuisance considérée, sur la base des informations recueillies dans l’étude, et à partir de leur connaissance du terrain.
Par exemple, dans une étude sur exposition professionnelle et maladie de Parkinson (Firestone et coll., 2010renvoi vers), l’analyse des réponses aux questions concernant notamment les expositions aux pesticides pour tous les emplois d’une durée de plus de 6 mois, par un hygiéniste industriel, a mis en évidence une sous-estimation des expositions, démontrant l’intérêt de l’expertise des dossiers. Dans cette étude, les données d’exposition avaient été recueillies par des interviews en face à face avec le même enquêteur.
Les expertises apportent donc une valeur ajoutée aux données recueillies par questionnaire. Elles permettent de pointer les discordances entre les faits annoncés et les réalités du terrain, et de compléter et préciser certaines informations. Même si le processus s’efforce d’expliciter les choix et de multiplier les avis, la démarche d’expertise reste un processus subjectif, dépendant largement des personnes sollicitées, et n’assurant pas une parfaite reproductibilité.
En résumé, les questionnaires concernant les pesticides sont limités à la bonne connaissance des expositions passées par les sujets ou leurs proches. L’analyse des questionnaires par un expert est un moyen d’améliorer la qualité de ces réponses. Cette expertise fine et complète est cependant difficile à mettre en œuvre en raison de la très grande diversité des pesticides, de la variabilité de leur usage au cours du temps et selon les pratiques agricoles, mais surtout de la disponibilité des experts pour réaliser ce travail complexe. Cette démarche est difficilement envisageable dans les études sur des populations importantes et pour l’obtention d’informations fines sur l’ensemble des pesticides. Enfin, comme dans toutes les études épidémiologiques, notamment les études cas-témoins, il existe un risque d’erreur de classement différentiel : surévaluation de l’exposition par une personne atteinte par la pathologie étudiée, enquêteur influencé par la connaissance du statut pathologique du sujet. Il est nécessaire de mettre en place des pratiques permettant de diminuer ces biais : absence de connaissance du statut pathologique par l’enquêteur, expertise des questionnaires par un collège d’experts sans connaissance de ce statut…

Matrices emplois / cultures / tâches / expositions

Les matrices emplois-exposition sont des bases de données qui permettent à partir de l’intitulé d’un emploi (généralement un couple branche d’activité et type de profession) d’attribuer des indicateurs d’exposition aux nuisances considérées. Elles ont été proposées à la fin des années 1980 pour documenter les expositions aux cancérogènes professionnels (Hoar et coll., 1980renvoi vers). Une matrice emploi-exposition peut être schématiquement décrite comme une table de correspondance dont les lignes contiennent des intitulés d’emploi et dont les colonnes correspondent aux nuisances (Bouyer et Hémon, 1993renvoi vers). À l’intersection de chaque ligne et de chaque colonne sont renseignés des paramètres d’exposition visant à quantifier l’exposition en termes, par exemple, de probabilité, d’intensité, de fréquence d’exposition. Les caractéristiques des emplois et des expositions ayant évolué au cours du temps, les matrices prennent habituellement en compte ces évolutions en caractérisant les expositions en fonction des années ou de périodes historiques déterminées. Un troisième axe, correspondant au temps (défini en périodes ou en années), s’ajoute alors dans les matrices dites « historisées ». Les matrices peuvent être généralistes ou spécifiques de secteurs d’activité tels que l’agriculture.
Les matrices peuvent être réalisées a priori : l’ensemble des emplois considérés sont étudiés et leurs expositions d’intérêt évaluées. Elles peuvent aussi être réalisées a posteriori : elles sont construites à partir de données individuelles d’exposition recueillies dans des études ayant réalisées une analyse détaillée de l’exposition en fonction de l’emploi.
Les matrices en lien avec les expositions aux pesticides peuvent proposer des niveaux de précision sur l’emploi plus importants que le simple intitulé (par exemple, ouvrier agricole en viticulture). Ainsi, certaines matrices détaillent les activités par le poste attribué au sein de l’entreprise (par exemple, cueilleurs), par les tâches effectuées (nettoyage des cuves), par l’atelier (ensachage), ou encore par les cultures agricoles considérées (maïs grain) : dans ce dernier cas, on parle de matrices cultures-expositions. Les matrices peuvent aussi être adaptées aux contextes locaux et donc à certaines régions. De même, la nuisance est plus ou moins détaillée. Il peut s’agir des pesticides en général, des groupes de pesticides (herbicide, fongicide, insecticide…), des familles chimiques (organophosphorés, organochlorés…) ou encore des substances actives précises (parathion, malathion…).
Les choix effectués lors de la réalisation des matrices dépendent des objectifs fixés en amont. En effet, si l’augmentation de la précision des variables des matrices permet a priori une évaluation plus fine des expositions, elle nécessite que les études épidémiologiques ou les programmes de surveillance de la santé concernés, disposent des informations nécessaires auprès de chaque individu de l’étude (type de cultures, tâches effectuées dans l’emploi…).
À chaque couple emploi-tâche-culture/nuisance, pour chacune des dates déterminées, correspond une ou des variables d’exposition. Les matrices diffèrent sensiblement selon le type de variables présentées.
Les indices d’expositions les plus simples correspondent à des variables qualitatives indiquant la présence ou l’absence de l’exposition (indice de type oui/non). D’autres indices, appelés semi-quantitatifs, permettent de distinguer des niveaux d’expositions (faible, moyenne ou forte exposition). Enfin, les matrices les plus complètes présentent des indices d’expositions quantitatifs, tels que la fréquence (nombre de jours d’exposition par an), l’intensité (quantité en mg/heure) ou la probabilité d’exposition (proportion de personnes exposées aux pesticides)… Le choix des indices est fonction des objectifs initiaux des matrices mais également des contraintes liées à leur conception. La conception d’une matrice est un travail généralement long d’autant plus si les informations nécessaires à leur réalisation sont manquantes ou difficiles d’accès (absence de base de données sur les usages de pesticides, manque d’étude de métrologie). Si leur réalisation peut parfois être un exercice difficile, en revanche, elles permettent par la suite d’évaluer les expositions de manière rapide et fiable. En effet, il suffit alors de connaître les emplois exercés ou les cultures traitées au cours de la carrière professionnelle des sujets pour leur attribuer les expositions aux pesticides correspondantes. Or, ces informations sont relativement faciles à obtenir. L’histoire professionnelle peut éventuellement être disponible de manière indirecte dans des bases de données administratives, ou renseignée par questionnaires directement auprès des sujets. Cependant, dans certains cas, ces informations manquent : les bases de données médico-administratives françaises ne fournissant en général que le dernier emploi ou difficulté à contacter les sujets (ou leur famille en cas de décès). L’obtention de ces données est d’autant plus complexe que les variables d’entrée de la matrice sont précises (c’est-à-dire tâches précises effectuées dans l’emploi).
Les matrices générales peuvent s’appliquer dans des études cas-témoins ayant relevé et codé les calendriers professionnels des individus. Ainsi la matrice finlandaise FINJEM donne une estimation par emploi des expositions aux pesticides selon de grandes catégories (insecticides, fongicides, herbicides) (Kauppinen et coll., 1998renvoi vers). Elle apprécie par ailleurs les expositions à l’arsenic. Elle a été utilisée de nombreuses fois dans des études cas-témoins portant sur les cancers2 . En Suède, la matrice initialement développée par Plato et Steineck comportait diverses nuisances professionnelles parmi lesquelles les créosotes, les dérivés de phénols, puis les pesticides/herbicides et l’arsenic (Plato et Steineck, 1993renvoi vers). Elle a été mise en relation avec les cancers de la thyroïde, les cancers de l’enfant, et récemment avec les troubles parkinsoniens. De la même manière, la matrice développée par Pannett et coll. (1985renvoi vers) au Royaume-Uni qui comportait les herbicides et les dérivés de l’arsenic, a été utilisée dans des études sur le cancer.
Quelques matrices spécifiques du milieu agricole ont été développées (tableau 3.IIrenvoi vers : voir en fin de chapitre). Ainsi, une équipe italienne a développé une matrice culture-exposition prenant en compte 14 zones géographiques et 10 cultures (Miligi et coll., 1993renvoi vers). L’exposition était déterminée par une variable qualitative indiquant la présence ou l’absence d’exposition à 440 substances actives recensées au cours d’une période de 40 ans. L’équipe a ensuite comparé l’évaluation des expositions par l’usage de cette matrice et par la mise en place d’une expertise par un collège d’experts. Dans ce cadre, elle a calculé une sensibilité variant de 83,3 % à 100 % alors que la spécificité variait de 66,2 % à 95,8 %.

Tableau 3.II Présentation des principales matrices agricoles

Référence
Pays
Emploi/Tâches considérées
Périodes
Pesticidesa
Sources des informations
Paramètres
Validation
Utilisation/Applications
London et Myers, 1998renvoi vers
Afrique du Sud
Arboriculture (pommes) + autres (viticulture, blé, agrumes, pommes de terre)
Préparation (dehors/dedans)
Application (selon matériel)
Expositions indirectes
Trempage animaux
Maintenance
Pas de dimension historique
Organophosphorés
Pas de détail par matière active
Données de ventes (kg/ha)
Expertise
Questionnaires (N=164)
Intensité
En kg
En équivalent biologiques basés sur DL50
Poids selon les tâches
Mesure de cholinestérases érythrocytaires
Répétition à 3 mois du questionnaire (N=29)
Effets neurologiques
Index cumulé et intensité moyenne sur la vie Intégration d’autres paramètres (expositions récentes, EPI, expérience, usage domestique, eau boisson)
Daures et coll., 1993renvoi vers
France
Viticulture, Hérault
1950-1958
1958-1965
1965-1970
1970-1978
1978-1988
Produits solides
Produits liquides
I, F, H et familles
117 matières actives
Entretien auprès de 85 viticulteurs et relevés de leurs achats
Probabilité par période : nombre d’années utilisation ou travail
Intensité : quantité moyenne/ha
Expertise Agronome de l’Institut Technique de la Vigne et du Vin (ITV France)
Calcul d’un index d’exposition cumulée :
quantité/ha x surface x durée x probabilité
Miligi et coll., 1993renvoi vers
Italie
Polyculture méditerranéenne
(blé, maïs, riz, avoine, fleurs, olives, arboriculture, betteraves, légumes, vignes)
14 zones géographiques
1950-1990
440 matières actives
Expertise d’agronomes
Données ventes nationales
Probabilité (oui/non) par matière active
Pas d’intensité ni de fréquence
Historiques de 26 agriculteurs
Sensibilité=78,6 %
Spécificité=54,8 %
Cancers (Miligi et coll., 2006renvoi vers)
Nanni et coll., 1993renvoi vers
Italie
Polyculture (céréales, arboriculture, betteraves, raisin, fraises, légumes, semences)
Pas de dimension historique
Nuisibles et matières actives
Détails pour parathion, mancozèbe et DDT
Matrice a posteriori
Intensité en kg/ha
Fréquence en nombre de traitement/an
Questionnaires auprès de 140 personnes
Dose cumulée (kg utilisés pendant la vie)
Étude sur lymphomes et sarcomes (Nanni et coll., 1996renvoi vers)
Young et coll., 2004renvoi vers
États-Unis, Californie
Agriculture (raisin, agrumes, maïs, amandes, noisettes, avocat, luzerne, olives, sapins Noël, sorgho)
Préparation/ Application/ Plantation, labour, cueillette, taille…
Tri, chargement, transport…
1974-1989
1990-1999
Triazines : atrazine, simazine, cyanazine
Données d’utilisation de la base de Californie sur les pesticides
Intensité : quantité/ha
Poids selon les cultures et selon les tâches
À faire
Cancer de l’ovaire (Young et coll., 2004renvoi vers)
Définition d’un index par triazine, en continu et en quartiles (non, bas, moyen, haut)
Wood et coll., 2002renvoi vers
Canada, Colombie britannique
Agriculture : 45 circonstances combinant l’intitulé d’emploi (N=6), la culture, la région (N=8) et la tâche (traitement, ré-entrée)
1950-1998
180 matières actives
familles de pesticides
Avis d’experts et calendriers de traitement (N=129)
Données de la PHED
Intensité dose absorbée
1) ré-entrée : équation ; 2) application base PHED
Probabilité : <33 %, 34-66 %, >67 %
Fréquence Nombre de jours de traitement
Niveau danger : dose absorbée/dose de référence
À faire
Application sur cancer de la prostate (Band et coll., 2011renvoi vers)
Dick et coll., 2010
Angleterre, Écosse
Tâches exposant aux pesticides définies par la combinaison (N=81) d’un Usage x Nuisible x Période année
Usage : culture, élevage, collectivités, aquaculture, usages domestiques, forêt, jardinage, divers
1945-2005 par décades : 50/60/70/80/
90/00
Niveau/famille
Insecticides : OP, OC, Carbamates, Autres
Herbicides :
C1 (atrazine, simazine…)
D (diquat, paraquat),
O (2,4-D, mecoprop,…), Autres (glyphosate, linuron, diuron, dinoseb)
Fongicides : carbamates (dont dithio), autres
Avicides
Rodenticides
Expertise
Questionnaires de l’étude Géo parkinson (N=290)
Exposition cutanée et respiratoire
Intensité : score de 0 à 4 basé sur un % de la VLE pour l’inhalation et sur la contamination cutanée potentielle d’après une étude australienne pour l’exposition cutanée
À faire
Non

a Les matrices ne tiennent pas compte d’autres agents sauf dans l’étude de Wood et coll. (2002renvoi vers) où les agents biologiques et physiques sont pris en compte (N=110)
I : insecticide ; F : fongicides ; H : herbicides ; EPI : équipement de protection individuelle ; OC : organochlorés ; OP : organophosphorés ; VLE : valeur limite d’émission ; PHED : North American Pesticide Handlers Exposure Database

Une autre équipe italienne (Nanni et coll., 1993renvoi vers) a développé une matrice culture-exposition et a comparé son utilisation à la saisie d’un auto-questionnaire dans le cadre d’une étude cas-témoins. L’originalité de cette matrice réside dans sa construction réalisée, pour chaque culture concernée, à partir des maladies et des ravageurs. Une liste des substances actives a été établie et des variables d’exposition ont été attribuées par un spécialiste de la protection des cultures. Ces variables concernent les quantités de produits utilisés et le nombre de traitements annuels. L’utilisation de cette matrice a permis d’améliorer sensiblement la qualité des évaluations des expositions issues du questionnaire. Ainsi, le taux de non-réponses concernant les substances actives utilisées est passé de 44 % pour l’auto-questionnaire à 9 % après utilisation de la matrice. De même, le taux de non-réponses sur les doses appliquées est passé de 97 % à 17 %. Si l’application de cette matrice a permis d’améliorer grandement l’évaluation des expositions obtenue par le questionnaire, il faut noter que l’absence de certaines données recueillies en amont ne permet pas l’utilisation de la matrice et maintient un certain nombre de non-réponses.
En France, une matrice concernant la viticulture a été réalisée dans le département de l’Hérault (Daurès et coll., 1993renvoi vers). Les données constituant la matrice étaient issues du recueil de registres d’utilisation des pesticides obtenus auprès de 85 propriétaires viticulteurs du département. Au total, 238 produits commerciaux et 117 substances actives ont été considérés. Des informations sur les quantités appliquées par hectare et par an, sur la forme du produit (liquide ou poudre) et sur une période de 1950 à 1988 (subdivisée en cinq périodes considérées comme homogènes en termes de disponibilité des produits phytopharmaceutiques) ont été saisies. Les données de la matrice ont été validées par un groupe d’experts (ingénieurs spécialistes). Cette matrice a été ensuite mise à jour sur la période 1990-2000 et étendue aux départements du Gard et de l’Aude.
Une autre matrice, appelée Pestimat, a été initiée en France au début des années 2000 par une équipe de l’Université de Bordeaux et une équipe de l’Université de Caen dans l’objectif de reconstituer les expositions aux pesticides des utilisateurs agricoles de pesticides depuis 1950 (Baldi et coll., 2009renvoi vers). Elle s’appuie sur des sources multiples de données (données du Ministère de l’Agriculture sur l’homologation des substances, index phytosanitaires édités par l’Acta, avertissements agricoles émis par les Services régionaux de la protection des végétaux, données d’un panel d’agriculteurs transmises par l’UIPP, calendriers de traitement tenus par les agriculteurs, questionnaires dirigés pour les années anciennes) qui ont été exploitées par culture et par année pour chaque matière active. La première version de la matrice inclut le blé, l’orge, le maïs, la vigne et la pomiculture. Elle est constituée de 24 tables incluant 529 matières actives sur la période 1950-2010, parmi lesquelles 160 fongicides, 160 herbicides et 209 insecticides. À partir des informations recueillies, la matrice attribue au sein d’une culture pour une matière active donnée et pour chaque année à partir de 1950, la proportion d’agriculteurs l’ayant utilisée, le nombre de traitements annuels et une notion d’intensité (dose par hectare).
Le Département santé travail de l’Institut de veille sanitaire réalise une matrice cultures-expositions aux pesticides (InVS et coll., 2008renvoi vers) en association avec l’Unité mixte de recherche épidémiologique et de surveillance en transport, santé et environnement (Université Claude Bernard Lyon 1 et Ifsttar). Cette matrice Matphyto détaille l’utilisation rétrospective des pesticides (herbicides, fongicides, insecticides, familles chimiques et principales substances actives) selon les cultures agricoles et selon un découpage géographique national large. Elle se base principalement sur des données bibliographiques à dominante technique (index Acta, revue spécialisée, rapports techniques…), des statistiques agricoles et l’expertise de professionnels. Les trois variables annuelles d’exposition fournies par cette matrice sont une probabilité, une fréquence et une intensité d’exposition. Matphyto a vocation à couvrir l’ensemble du territoire pour les principales cultures agricoles au cours des cinquante dernières années et à être largement diffusée.
En Afrique du Sud, une matrice emploi-exposition aux organophosphorés a été développée chez des travailleurs de l’arboriculture (London et Myers, 1998renvoi vers). Cette matrice a été réalisée à partir de données issues de l’industrie sur l’utilisation des pesticides et analysées par un collège d’experts. Des facteurs de pondération des expositions, attribués aux différentes tâches, ont été développés par des experts en hygiène industrielle. L’étude a ensuite validé l’estimation des expositions fournie par la matrice par des mesures de marqueurs biologiques d’exposition aux organophosphorés. La répétabilité de l’utilisation de cette matrice a été vérifiée par questionnaires remplis par quelques participants de l’étude (29 sujets) à trois mois d’intervalle. L’étude a conclu d’une part à une bonne répétabilité de la méthode, et d’autre part à une bonne validité de l’évaluation de l’exposition à partir de la matrice.
Cette démarche a également été suivie en Californie afin de déterminer l’exposition de travailleuses agricoles aux triazines : des index ont été construits en attribuant un poids à chaque tâche, et en prenant en compte la quantité de matière active à l’hectare (Young et coll., 2004renvoi vers). Enfin, une matrice intégrant des tâches rencontrées dans 45 cultures et élevages entre 1950 et 1998 en Colombie britannique a été développée afin de déterminer le niveau et la fréquence d’exposition à des nuisances agricoles chimiques (notamment les pesticides), physiques et biologiques, ainsi qu’un niveau de risque s’appuyant sur la toxicité des substances (Wood et coll., 2002renvoi vers).
En résumé, l’objectif des matrices est d’attribuer de manière individuelle des indicateurs d’exposition aux pesticides à partir d’informations de finesse variable obtenues par ailleurs (questionnaire, expertise, données médico-administratives…). Si la construction d’une matrice peut être longue, l’attribution d’indicateurs d’exposition peut être rapide et selon une méthode identique pour tous les individus, limitant les biais de classement différentiels. Cependant, le principal défaut des matrices est la non différenciation des expositions au sein d’un même emploi (ou tâche, ou culture) : l’ensemble des individus répondant à des caractéristiques communes auront des données d’exposition identiques. Les matrices ne prennent donc pas en compte les variabilités d’exposition intra ou inter-individuelles. En revanche, elles améliorent de manière substantielle les évaluations des expositions obtenues à partir de questionnaires simples, ces derniers permettant d’interroger les individus sur des items faciles à obtenir (à partir de variables dichotomiques ou de la description simple des emplois, des tâches ou des cultures par exemple) et compensant les difficultés des sujets pour se remémorer les noms des produits, des substances actives ou les dates d’utilisation.

Création de score pour estimer l’exposition cumulée

L’utilisation des différents outils (questionnaires, expertises, matrices, biomarqueurs…) aboutit à l’attribution d’indicateurs individuels d’exposition. Un modèle mathématique peut combiner l’ensemble de ces indicateurs pour attribuer à chaque sujet une valeur d’exposition cumulée ou score. Ce traitement des données est réalisé par différents algorithmes de conception et de complexité très variables selon les études. Les paramètres pris en compte dans ces calculs sont soit issus de mesures effectuées sur le terrain permettant de définir des facteurs de pondération adaptés aux spécificités de l’étude ou aux spécificités des pratiques agricoles locales, soit déterminés selon des critères simples ou de manière plus arbitraire. Quelques illustrations de scores plus ou moins complexes sont présentées ci-dessous.
Une première étude de ce type a été réalisée aux Pays-Bas en floriculture au début des années 1990 (Brouwer et coll., 1994renvoi vers). L’algorithme proposé prenait en compte certaines caractéristiques de l’exploitation agricole telles que la surface cultivée, et le nombre de phases de traitement réalisées dans la journée.
Une étude cas-témoins au Québec s’est intéressée aux expositions environnementales aux pesticides et à la maladie d’Alzheimer (Gauthier et coll., 2001renvoi vers). Les auteurs ont recherché l’historique d’utilisation des pesticides dans la région étudiée à partir des données des statistiques canadiennes concernant les épandages d’herbicides et d’insecticides entre les années 1971 et 1991. L’indicateur d’exposition environnementale retenu était la proportion de surface traitée annuellement dans la zone d’étude. Les auteurs ont ensuite évalué les expositions cumulées aux pesticides pour chaque participant en fonction des lieux de résidences. Ils ont également pris en compte les facteurs confondants ainsi que les expositions professionnelles qui concernaient les pesticides mais aussi d’autres substances neurotoxiques comme le plomb, le mercure, l’aluminium… L’exposition a été établie par un hygiéniste industriel en utilisant les histoires professionnelles (recueillies par questionnaire) et une matrice emploi-exposition développée par le National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH). Un algorithme prenant en compte les détails disponibles de chaque emploi (type d’emploi et durée, intensité et fréquence d’exposition) a permis l’attribution à chaque sujet d’un score d’évaluation de l’exposition cumulée vie-entière.
Une étude française sur la mortalité par cancer de travailleurs municipaux chargés de la dératisation, de la désinfection, ou de la désinsectisation a évalué les expositions des travailleurs à quatre nuisances (Ambroise et coll., 2005renvoi vers) : le formaldéhyde, l’oxyde d’éthylène, les insecticides et les rodenticides. L’absence de données rétrospectives d’exposition a amené les auteurs de l’étude à mettre en place une matrice emploi-exposition, prenant en compte quatre catégories d’emploi, de l’opérateur au superviseur. Celle-ci, élaborée par deux épidémiologistes et un hygiéniste, évalue les expositions selon une intensité d’exposition (valeur de 0, à 9) et selon une fréquence d’exposition (pourcentage du temps passé dans l’emploi). Une dose d’exposition cumulée vie-entière a été ensuite calculée pour chaque sujet en sommant le produit de l’intensité par la fréquence et par la durée pour chaque emploi.
Dans une étude portant sur des applicateurs de pesticides de l’État de Washington, les auteurs ont élaboré un index cumulé d’exposition aux organophosphorés et au N-méthyl-carbamate (Hofmann et coll., 2010renvoi vers) à partir de trois scores : l’un caractérisant la toxicité des produits, le second lié aux activités professionnelles et le troisième lié au port d’EPI. Ces deux derniers scores étaient inspirés d’une méthode d’évaluation quantitative des expositions aux pesticides développée dans le cadre de l’AHS (Dosemeci et coll., 2002renvoi vers). À titre d’exemple, le score concernant l’utilisation d’EPI variait de 0 pour un travailleur équipé d’un équipement complet à 14 pour un travailleur ne portant aucun équipement. Les expositions ont été évaluées sur les 30 derniers jours de travail et comparées aux mesures de biomarqueurs d’exposition (inhibition de la butylcholinestérase). À partir de cette méthode de calcul de score, l’étude montre que certains paramètres de travail influent fortement sur les taux de contamination mesurés. Ainsi, les activités de mélange, de chargement et de nettoyage des équipements de pulvérisation sont significativement liées à une baisse de l’activité des cholinestérases. À l’inverse, certaines pratiques entraînent une plus faible exposition, comme le port de masque complet, de chaussures résistantes aux produits chimiques et un stockage des EPI dans le lieu de travail (en comparaison à un stockage au domicile).
À partir des données de la cohorte de l’AHS, une méthode d’estimation quantitative des expositions aux pesticides a été élaborée (Dosemeci et coll., 2002renvoi vers). Un premier questionnaire de recrutement (concernant les 58 000 applicateurs de pesticides de la cohorte) a permis d’obtenir des informations sur l’utilisation de 22 pesticides et sur les conditions d’exposition : conditions de mélange, durée de traitement, fréquence d’application, type d’application, port d’EPI. Un deuxième questionnaire, envoyé à domicile, a permis de compléter certaines informations avec des questions sur le nettoyage du matériel après épandage, et d’apporter des précisions sur les pratiques professionnelles et sur l’hygiène individuelle ainsi que sur l’usage de 28 pesticides supplémentaires. Le taux de retour de ce questionnaire a atteint 40 %. À l’issue de ce recueil de données, les auteurs ont mis en place deux algorithmes pour calculer un niveau d’exposition cumulée : un algorithme général et un algorithme détaillé (tableau 3.IIIrenvoi vers). Le premier est construit en prenant en compte les données du questionnaire de recrutement et comprend quatre variables basiques : le mélange de pesticides, la méthode d’application, la réparation ou la maintenance du matériel et l’utilisation d’EPI. L’analyse de la littérature et l’expertise de professionnels ont permis d’attribuer des scores à chaque critère pris en compte et pour leurs différentes modalités. Ainsi, par exemple, le score de l’indicateur « méthode d’application » est de 1 pour un épandage aérien, et de 9 pour un épandage avec un pulvérisateur à main. Le deuxième algorithme complexifie le premier grâce aux données du deuxième questionnaire et à la prise en compte des variables suivantes : système ouvert ou fermé lors de la préparation de la bouillie, utilisation de tracteurs avec cabines et filtres, fréquence de nettoyage du matériel, fréquence de changement de gants usagés, hygiène personnelle et changement de vêtement.

Tableau 3.III Exemple de deux algorithmes mis en place pour le calcul d’un niveau d’exposition cumulée (d’après Dosemeci et coll., 2002renvoi vers)

Algorithme général
Intensity Level=(Mix+Appl+Repair)*PPE
Algorithme détaillé
Intensity Level=[(Mix*Enclosed)+(Appl*Cab)+
Repair +Wash]*PPE*Repl*Hyg*Spill
Mix = mixing status
Appl = application method
Repair = repair status
PPE = Personal Protective Equipment use
Enclosed = Using enclosed mixing system
Cab = Tractor with enclosed cab and/or charcoal filter
Wash = Status of washing pesticide equipment after application
Repl = Replacing old gloves
Hyg = Personal hygiene: changing into clean clothes and washing hands or taking bath/shower
Spill = Changing clothes after a spill
En utilisant les niveaux d’exposition issus de ces deux algorithmes pour chaque année considérée, une exposition cumulée a été calculée pour chaque sujet de l’étude et pour chaque pesticide. La méthode était illustrée par des applications à l’herbicide 2,4-D et à l’insecticide chlorpyrifos.
Le développement de cette méthode relativement complexe, prenant en compte un grand nombre de déterminants d’exposition, montre que la concordance entre les résultats obtenus par l’intermédiaire des deux algorithmes est bonne. Bien que basé sur un nombre d’informations sur les expositions plus restreint, l’algorithme général est jugé satisfaisant.
Cette méthode d’évaluation a par ailleurs été reprise dans d’autres études (Bonner et coll., 2007renvoi vers ; Christensen et coll., 2010renvoi vers ; Dennis et coll., 2010renvoi vers). Enfin, les auteurs rappellent que la variabilité inter-opérateurs est importante et qu’elle ne peut être prise en compte dans ce type d’algorithme.

Méthodes d’estimation des expositions aux pesticides dues aux activités agricoles par une approche géographique

L’étude de la contribution possible à l’exposition de la population générale aux pesticides, des dérives aériennes lors des épandages de pesticides à proximité ou après volatilisation, nécessite la mise en place d’outils géographiques dans lesquels le lieu de résidence (ou de travail) des sujets est localisé et un indice de sa proximité à la source d’exposition est estimé.
Historiquement, la distance du lieu de résidence à un champ agricole, telle que rapportée directement par le sujet, était la mesure d’exposition utilisée dans les études épidémiologiques. Depuis, les données d’utilisations agricoles de pesticides et d’occupation du sol disponibles en Europe et en Amérique du Nord ont permis d’améliorer la précision de ces mesures.
Les données d’utilisations agricoles de pesticides proviennent généralement soit de déclarations faites par les agriculteurs, soit d’enquêtes nationales (recensement agricole) ou régionales réalisées auprès des agriculteurs ou encore de dires d’experts. Lorsque ces données ne sont pas disponibles, l’occupation du sol est utilisée comme « proxy » pour évaluer l’exposition aux pesticides due aux activités agricoles à proximité. Elle provient principalement de recensements agricoles, d’images satellites, de photographies aériennes, ou de cartes d’occupation du sol (souvent produites à partir des images satellites).
À partir de ces deux sources de données (occupation du sol et utilisations agricoles de pesticides), des mesures d’exposition (écologiques) ont été construites à des échelles telles que la commune (ou le comté, équivalent du canton, aux États-Unis). Le niveau d’exposition aux pesticides agricoles, identique pour tous les sujets de la commune, est alors évalué selon les études, par la présence de cultures dans la commune ou le pourcentage de surface cultivée, par un score tenant compte de la surface de la culture et de la prédominance de cette même culture, par la combinaison des surfaces cultivées et de la quantité de pesticides utilisés sur ces cultures ou par les quantités de pesticides agricoles utilisés.
Plus récemment, des mesures d’exposition semi-individuelles ont été construites grâce à la géolocalisation des lieux de résidences des sujets en parallèle à la disponibilité de Systèmes d’Informations Géographiques (SIG) répertoriant les données disponibles sur l’occupation des sols (localisation des cultures) et, dans certains pays, l’utilisation agricole de pesticides. En Europe, une base de données géographiques appelée CorineLand Cover est disponible pour 1990, 2000 et 20063 . Elle est issue du traitement et de la photo-interprétation des images satellites et fournit l’inventaire de l’occupation des terres à l’échelle de 1 : 100 000. On dispose également pour toute l’Europe d’un système d’identification des exploitations agricoles construit sur la base des documents cartographiques (cadastre, photographies aériennes ou images satellites) à une échelle d’au moins 1 : 10 0004 . En France, ce système est appelé registre parcellaire graphique agricole. Il est basé sur les déclarations volontaires des agriculteurs des surfaces de leurs exploitations et types de culture et il est mis à jour annuellement depuis 2004 à une échelle de 1 : 5 000. Cependant, les données les plus précises utilisées dans les études épidémiologiques sont celles de Californie. La Californie dispose depuis 1972 d’une base de données intitulée PUR (Pesticide Use Report) rapportant le type et la quantité de pesticides utilisés, la date des applications et le type de culture traitée, selon une grille constituée de carrés d’un mile de côté (1 609 m). En parallèle, des cartes des parcelles agricoles sont produites tous les 5-7 ans par le CDWR (California Department of Water Resources). Ainsi, le niveau d’exposition aux pesticides utilisés sur les champs agricoles à proximité du lieu de résidence peut être évalué par la surface de cultures ou la quantité de pesticides agricoles utilisés ou la combinaison des deux dans un rayon donné (le plus souvent 250 m, 500 m ou 1 km) autour du lieu de résidence (Xiang et coll., 2000renvoi vers ; Meyer et coll., 2006renvoi vers ; Rull et coll., 2006renvoi vers ; Nuckols et coll., 2007renvoi vers).
L’accès à des données d’utilisations de pesticides sur une base géographique est un préalable nécessaire à une bonne recherche épidémiologique. La prise en compte des conditions météorologiques, de l’altitude, du relief, des budgets espace-temps des sujets (temps passé sur le lieu de travail en particulier) est à l’origine de développements en cours qui pourront améliorer les mesures épidémiologiques indirecte de l’exposition résidentielle de proximité aux pesticides agricoles.

Validation des outils et méthodes

Pour valider les différentes méthodes décrites dans ce chapitre, il conviendrait de comparer les informations obtenues à l’aide des différents outils (questionnaires, expertise de calendriers professionnels, données métrologiques, matrice emploi-exposition générale, matrices développées dans le cadre de l’agriculture) à une méthode de référence, tel que cela a pu être parfois fait dans le cadre général de l’estimation des expositions professionnelles (Teschke et coll., 2002renvoi vers). Or, concernant les pesticides, aucun de ces outils n’est aujourd’hui considéré comme une méthode de référence. Des comparaisons ont parfois été effectuées entre matrices et calendriers de traitement d’agriculteurs par exemple (Miligi et coll., 1993renvoi vers ; Nanni et coll., 1993renvoi vers), ou encore à l’aide de dosages biologiques spécifiques tels que par exemple les acétylcholinestérases pour la matrice sur les organophosphorés de London (London et coll., 1998renvoi vers). L’estimation de l’exposition aux insecticides par la matrice Finjem a également été comparée à celle d’un panel de trois experts : le degré de concordance ne dépassait pas 0,46, légèrement plus élevé que ceux qui étaient calculés entre la réponse aux questionnaires et la matrice (kappa=0,38) et entre la réponse aux questionnaires et l’expertise (kappa=0,44) (Benke et coll., 2001renvoi vers). Blair a pour sa part évalué l’auto-déclaration de pesticides par les participants à une étude en regard de l’information obtenue chez les distributeurs, et trouvé une concordance de 59 % pour les herbicides et les insecticides (Blair et Zahm, 1993renvoi vers).
En conclusion, les études épidémiologiques s’attachent à collecter des informations précises et complètes sur les expositions aux pesticides. Or, les caractéristiques d’usages de ces derniers (évolution au cours du temps, hétérogénéité des méthodes d’épandage, du type de produit…) impliquent des difficultés majeures pour l’obtention de ces données.
Les marqueurs biologiques permettent de mesurer ce que l’organisme a réellement absorbé et englobent les contributions des expositions pulmonaires, orale et cutanée. Cependant, la surveillance biologique nécessite une compréhension des phénomènes pharmacocinétiques qui sont impliqués dans le métabolisme du pesticide. Elle est donc limitée à certains produits dont le métabolisme est connu et qui génèrent des métabolites mesurables. De même, ces mesures ont un intérêt limité dans les études rétrospectives d’effets avec de longs temps de latence à l’exception des substances persistantes comme les organochlorés.
De nouvelles stratégies se sont développées au cours du temps pour optimiser les méthodes de mesure de l’exposition aux pesticides : amélioration des questionnaires, prise en compte d’un plus large éventail de circonstances exposantes, mise au point de matrices, développement d’index d’exposition, de marqueurs biologiques d’exposition, approche géographique. Ces stratégies permettent de mieux apprécier les paramètres d’exposition des groupes étudiés, aussi bien sur le plan quantitatif que qualitatif. Elles améliorent donc nettement la validité interne des études épidémiologiques ou toxicologiques et accroissent leur capacité à mettre en évidence des risques de maladies. La validation de ces outils reste cependant une nécessité méthodologique.
L’utilisation de ces outils dépendra de différents critères et notamment des caractéristiques de l’étude (rétrospective ou prospective), des hypothèses de travail concernant les déterminants de l’exposition et sur lesquels on souhaite obtenir des données, du type d’information mobilisable (est-ce que les sujets pourront être interrogés, existe-t-il une base de données sur les expositions anciennes…). L’ensemble des méthodes décrites peuvent naturellement être combinées entre elles.

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