Des anomalies majeures de l’expression rénale de rénine ont été observées chez tous les patients : augmentation de l’expression dans la plupart des cas (Figure 1B), absence complète de rénine dans 3 familles [
8,
9]. Cette dernière observation désignait le gène REN codant la rénine comme le premier candidat pour la maladie. Effectivement, dans ces 3 familles consanguines, des mutations homozygotes du gène REN ont été identifiées. Et comme le suggérait l’absence de rénine, il s’agit de mutations « perte de fonction » : mutation non-sens dans une famille, mutations dans les sites d’épissage, décalant le cadre de lecture dans les deux autres. Le séquençage systématique de REN a permis d’identifier en outre, chez un patient d’une famille non consanguine, des mutations hétérozygotes composites : une mutation dans le site donneur d’épissage, et une mutation faux sens particulièrement intéressante car touchant l’acide aspartique 104, dans le site catalytique actif de l’enzyme, indispensable au clivage de l’angiotensinogène libérant l’angiotensine I. Cette seconde mutation permet la production de rénine, mais d’une rénine inactive, production très augmentée, par perte de la régulation négative de sa synthèse par l’AII.
Une mutation du gène AGT, codant l’angiotensinogène, a été détectée à l’état homozygote dans une famille consanguine. Cette mutation ponctuelle, du dernier nucléotide de l’exon 3, affecte le site donneur d’épissage, et entraîne théoriquement la synthèse d’une protéine ayant perdu une partie de son domaine serpine. Elle s’accompagne d’une production rénale massive de rénine, probablement par défaut d’AII, des études in vitro, ayant montré que l’intégrité du domaine serpine était nécessaire à l’interaction entre la rénine et l’angiotensinogène.
Des mutations du gène ACE ont également été identifiées : (1) délétion homozygote de 4 nucléotides, dans l’exon 8 du gène, chez 2 patients appartenant à une famille consanguine ; la protéine, si elle est produite, est non fonctionnelle car amputée de son 2e domaine catalytique, de ses séquences transmembranaire et intracytoplasmique ; (2) mutation stop dans l’exon 5, à l’état hétérozygote, dans une famille non consanguine. La rénine est intensément exprimée chez ces patients. Enfin, un fœtus surexprimant la rénine a été trouvé hétérozygote composite pour le gène AGTR1 : deux mutations, une insertion d’un T et une mutation faux sens affectant une thréonine très conservée, sont présumées affecter la fonction du récepteur AT1.
Enfin, aucune mutation n’a été détectée dans une famille, suggérant que, peut-être, d’autres gènes encore pouvaient être impliqués dans cette pathologie. Les gènes codant le récepteur AT2, et le récepteur de la rénine - récemment identifiés et localisés sur le chromosome X -, n’ont pas été étudiés chez le patient de cette dernière famille puisqu’il était de sexe féminin.
Ainsi, la DTR est liée à des mutations touchant l’un ou l’autre des gènes du SRA et résultant en l’absence ou l’inefficacité de l’angiotensine II [9]. C’est la première identification de néphropathie mendélienne liée à ces gènes. Elle souligne l’importance du système dans le développement du rein fœtal humain. Son mécanisme d’action reste cependant à préciser en tenant compte des fonctions multiples de l’angiotensine II : peptide vasoactif, mais également facteur de croissance tubulaire. Le développement de DTR secondaire à l’ischémie rénale [3, 4], situation qui s’accompagne d’une stimulation du SRA, suggère que c’est par le maintien d’une pression de perfusion rénale efficace que l’angiotensine II intervient dans le développement rénal. Le phénotype observé chez les patients atteints de DTR autosomique récessif est plus sévère que celui décrit chez les souris dont les différents gènes du SRA ont été invalidés. Il est très homogène, quel que soit le gène muté. Cela indique qu’il n’y a pas de redondance dans le SRA et que les voies alternes de génération de l’angiotensine II, décrites in vitro, sont inefficaces.