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Med Sci (Paris). 2008 August; 24(8-9): 679.
Published online 2008 August 15. doi: 10.1051/medsci/20082489679.

Haemophilus influenza b : la lutte avance…

Caroline Charlier-Woerther* and Olivier Lortholary

Centre d’Infectiologie Necker-Pasteur, Hôpital Necker-Enfants malades, 149, rue de Sèvres, 75743 Paris Cedex 15, France.
Institut Pasteur, 25, rue Docteur Roux, 75015 Paris, France
Corresponding author.

MeSH keywords: Brésil, Enfant, Infections à Haemophilus, Vaccins antihaemophilus, Haemophilus influenzae type B, Humains, Venezuela

 

Avec à son actif un bilan de 400 000 décès annuels par méningite ou pneumopathie, Haemophilus influenza de type b (Hib) figure en bonne place parmi les pathogènes « tueurs d’enfants » comme les agents de la tuberculose ou du paludisme. Il est aussi responsable d’une morbidité infantile majeure sous la forme d’épiglottites, de septicémies, d’arthrites et surtout de séquelles neurologiques sévères affectant jusqu’à 30 % des enfants survivant à une méningite. Un vaccin polysaccharidique conjugué très bien toléré et efficace contre 95 % des formes invasives est commercialisé depuis 1987, et la vaccination universelle des enfants contre Hib est considérée comme une priorité majeure par l’OMS. Dans une étude récente publiée dans PLoS Medicine, C. Danovaro-Holliday et al. établissent un état des lieux extrêmement encourageant des résultats et défis de la politique vaccinale menée contre Hib sur l’ensemble du continent américain depuis 20 ans [ 1].

Si l’on considère l’ensemble Amérique latine et Caraïbes, l’incidence annuelle de méningites à Hib avant l’introduction du vaccin était de 35/100 000 enfants (soit 20 000 épisodes/an), la majorité survenant pendant la première année de vie.

La mise en place d’une politique vaccinale systématique des enfants s’est appuyée sur l’aide du PAHO (pan american health organization), bureau régional de l’OMS qui facilite notamment l’achat des vaccins et recueille les données de surveillance (incidence, couverture vaccinale).

En 2006, tous les pays américains en dehors d’Haïti avaient inclus Hib dans leur politique vaccinale, certains dès 1986 (Canada) et la majorité entre 1998 et 2000. Ce vaccin était le plus souvent administré en 3 injections sous forme pentavalente couplées aux vaccins contre DTP et hépatite B, ce qui permettait une réduction des coûts (3,92 $ par injection) et des injections (donc des effets secondaires et de l’inobservance). Le taux de couverture vaccinale est passé de 78 % (2000) à 94 % en 2006, juste sous le seuil de 95 % recommandé par l’OMS. Cette vaccination a permis une réduction drastique du nombre de méningites, de 85 % à l’échelle continentale, avec une réduction du nombre de cas annuels rapportés entre 2000 et 2005 de 92 à 30 au Brésil, et de 44 à 2 au Vénézuela, sans réduction du nombre de pneumocoques ou de méningocoques isolés au cours de la même période. La vaccination s’est également accompagnée d’une réduction significative du nombre de pneumopathies radiologiques de 30 % au Brésil, de 55 % en Colombie. Parmi les éléments ayant permis la mise en place de cette stratégie vaccinale, les auteurs soulignent l’importance d’une volonté politique forte, l’existence de données solides soulignant l’importance de la morbi-mortalité liée à Hib et l’impact favorable de politiques vaccinales, la diffusion de ces données et de l’expérience acquise parmi les pays concernés. Ils insistent également sur les efforts mis en jeu par la PAHO pour assurer la viabilité financière du projet au moment d’introduire le surcoût d’une vaccination supplémentaire [ 2, 3].

Parmi les questions en suspens persistent la nécessité d’assurer une couverture vaccinale satisfaisante dans tous les districts, celle d’effectuer une surveillance correcte et complète des cas de Hib au même titre que des autres agents responsables de pneumopathies ou de méningites, ce qui n’est pas encore le cas actuellement.

Cependant, ces résultats majeurs montrent comment, à l’échelle continentale, volonté politique forte et mise en Ĺ“uvre réelle de moyens satisfaisants permettent la réduction majeure de la morbi-mortalité associée à un pathogène ; ils font de cette stratégie un modèle exportable pour d’autres politiques d’introduction vaccinale, dans d’autres régions du globe.

References
1.
Danovaro-Holliday MC, Garcia S, de Quadros C, et al. Progress in vaccination against Haemophilus influenzae type b in the Americas. PLos Med 2008; 5 : e87.
2.
Hanslik T, Boëlle PY. L’évaluation du rapport risque/bénéfice des stratégies de vaccination. Med Sci (Paris) 2007; 23 : 391–8.
3.
Duclos P, Okwo-Bele JM. Recommandations et politiques vaccinales mondiales : le rôle de l’OMS. Med Sci (Paris) 2007; 23 : 409–16.