Sida
La recherche vaccinale à l’honneur

1er décembre 2011, journée mondiale de lutte contre le sida. Où en est la recherche ? Deux résultats sont particulièrement prometteurs et concernent la mise au point de vaccins préventifs.

Le sida est une maladie sexuellement transmissible », déclare Morgane BomselMorgane Bomsel
Unité 1016 Inserm / Paris 5
, chercheuse à l’Institut Cochin. Derrière cette déclaration qui sonne comme une évidence se cache un message : la plupart du temps, c’est au niveau des muqueuses (génitale, orale ou anale) que le virus trouve le moyen d’entrer dans l’organisme. C’est donc là qu’il faut le bloquer. En s’appuyant sur une publication de 1996, où une équipe canadienne relate des résultats surprenants - des femmes ayant des rapports non protégés réguliers avec des hommes séropositifs échappent à la contamination et ont développé des anticorps muqueux dirigés contre des protéines de l’enveloppe du VIH-, Morgane Bomsel met alors au point un vaccin : un virosomeVirosome
Pseudo-particules virales, qui miment le mode de pénétration cellulaire du virus dont ils portent les antigènes.
exposant à l’extérieur de son enveloppe gp41, la plus conservée des protéines de sur face des différentes souches du virus. Après avoir été vac cinées, cinq singes femelles ont été exposées 13 fois au virus par inoculation vaginale. Et elles ont été protégées de l’infection, en dé veloppant des anticorps muqueux dirigés contre gp41 ! « L’étude pré-clinique de ce vaccin est en cours et semble prometteuse », souffle la chercheuse. Parité oblige, Morgane Bomsel s’intéresse aussi à la contamination masculine. « Il faut absolument comprendre comment le virus entre pour pouvoir établir une stratégie vaccinale efficace. » Alors que la circoncision protège à 50 % de l’infection, ses travaux montrent effectivement, qu’au niveau du prépuce, les cellules infectées produisent des cytokines, attirant ainsi des cellules de LangheransCellules de Langherans
Cellules présentatrices d’antigènes présentes dans les muqueuses
qui captent le virus, le transmettent aux lymphocytes TCD4+ qui le disséminent dans l’organisme. Mais qu’en est-il des autres 50 %, ceux qui ne sont pas protégés par l’absence de prépuce ? Mor gane Bomsel a découvert qu’une zone de l’urètre, située à 2-3 cm du gland, est étonnamment perméable au virus. Ici, ce sont les macrophages qui permettraient l’entrée du VIH et pourraient en être ainsi un réservoir.
Les virosomes exposant le système gp41 induisent une réaction contre le VIH.
Ⓒ Frédérique Koulikoff/Inserm
Autre stratégie vaccinale explorée, celle de Monsef BenkiraneMonsef Benkirane
Institut de génétique humaine, UPR 1142, CNRS
 : « Nous avons identifié le facteur de restriction cellulaire, SAMHD1, qui empêche l’infection des cellules dendritiquesCellules dendritiques
Cellules présentatrices d’antigènes dont le rôle est d’initier des réponses immunes adaptatives.
par la souche VIH1, mais pas par la souche VIH2.
 » Ce facteur empêcherait l’accumulation d’ADN viral de souche VIH1. Mais, fausse bonne nouvelle ! Car si la cellule dendritique n’est pas infectée complètement, elle ne reconnaît pas le VIH1 comme un agent pathogène. Au contraire, elle va même jusqu’à le transporter dans les ganglions où il peut alors infecter toutes les cellules. « À l’inverse, VIH2 possède une protéine, Vpx, qui lui permet de contrecarrer l’action de SAMHD1, mais elle n’existe pas chez VIH1. L’identification de ce nouveau facteur de restriction à l’infection par VIH1 ouvre un champ d’application incroyable : pourquoi ne contourne-t-il pas cette protéine ? N’a-t-il pas eu le temps de muter ? Ou bien n’est-ce pas bénéfique pour sa dispersion ? » Répondre à ces interrogations offrira autant de pistes de stratégies vaccinales.

Julie Coquart

Page spéciale : JOURNÉE MONDIALE DE LUTTE CONTRE LE SIDA