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Med Sci (Paris). 33(6–7): 673.
doi: 10.1051/medsci/20173306027.

Un malentendu

Bertrand Jordan1***

1UMR 7268 ADÉS, Aix-Marseille, Université/EFS/CNRS, Espace éthique méditerranéen, hôpital d’adultes la Timone, 264, rue Saint-Pierre, 13385Marseille Cedex 05, France ; CoReBio PACA, case 901, parc scientifique de Luminy, 13288Marseille Cedex 09, France
Corresponding author.
 

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La réaction de Laurence Monnais à ma critique de son article met en évidence des malentendus que je souhaite expliciter brièvement. Je souligne pour commencer que je ne mets nullement en doute ses compétences et ses connaissances d’historienne, ni le fait que ce type de réflexion ait tout à fait sa place dans médecine/sciences. Ce qui m’a dérangé dans son texte est l’absence de différenciation entre la médecine fondée sur les preuves (la médecine-science, la médecine moderne) et des approches « alternatives » au mieux non prouvées et souvent irrationnelles. La médecine moderne n’est pas sans défauts et la science sur laquelle elle est fondée n’est pas idéologiquement neutre (j’ai aussi lu Latour…). Elle offre néanmoins aux malades une efficacité et une sécurité sans commune mesure avec celle de pratiques qui, au mieux, reviennent à une manière sophistiquée de faire jouer l’effet placebo [1, 2] (). Or il se trouve qu’à l’heure actuelle les médecines « alternatives » sont portées par un fort courant anti-science et anti-autorités, qui s’exprime très largement sur Internet et dans la presse. Cela amène certains malades à délaisser des traitements efficaces (même si leur efficacité est relative et leur toxicité réelle) pour des approches qui leur promettent une guérison rapide, sur la base de résultats anecdotiques et/ou de théories d’ordre magique. Cela incite également une partie de la population à refuser les vaccinations, avec les conséquences que l’on peut appréhender en ce moment, avec les pics de rougeole récemment réapparus en Allemagne et en Californie. Il me semble donc important qu’un texte paraissant dans une revue de référence comme médecine/sciences ne donne pas prise à cette confusion. Sans nier le moins du monde l’intérêt d’une telle approche historique des relations entre la médecine « officielle » et ses franges, je persiste à penser que l’article de Laurence Monnais aurait gagné à faire clairement la distinction entre les thérapies dont l’efficacité est prouvée et celles qui reposent sur la tradition, sur des récits invérifiables, ou qui invoquent des théories contraires à toutes les connaissances actuelles.

(→) Voir la Nouvelle de P. Tétreault et A.V. Apkarian, page 599 de ce numéro

Liens d’intérêt

L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.

References
1.
Price DD, Finniss DG, Benedetti F. A comprehensive review of the placebo effect: recent advances and current thought . Annu Rev Psychol. 2008; ; 59 : :565.–590.
2.
Tétreault P, Apkarian AV. Prédire la réponse placebo grâce à l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle . Med Sci (Paris). 2017; ; 33 : :599.–602.