2008


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Synthèse
L’activité physique peut s’effectuer dans différents contextes. Elle peut être liée à l’activité professionnelle, se pratiquer à l’occasion de loisirs ou au cours de travaux domestiques et également s’intégrer aux déplacements.
Pour une grande partie de la population, l’exercice physique n’est plus aujourd’hui associé aux activités professionnelles et aux déplacements de la vie quotidienne. L’accroissement du travail sédentaire et des activités récréatives physiquement passives (télévision, jeux vidéo...) a diminué la dépense énergétique venant équilibrer les apports. L’activité physique dépend donc principalement chez l’adulte de sa motivation à la pratiquer au cours de ses loisirs de manière spontanée ou dans un club ou une association sportive. Le nombre de pratiquants hors club est beaucoup plus important qu’autrefois ; on constate qu’un pratiquant sur quatre accomplit aujourd’hui sa pratique dans un cadre associatif contre un sur deux en 1985.
La France se caractérise par une multitude d’initiatives locales qui, par leurs objectifs et leurs impacts, favorisent bien « un sport pour tous ». Cependant, comment s’articule la problématique de la santé avec les autres objectifs de l’activité sportive ? La prise en considération de l’activité physique comme composante essentielle de la santé apparaît encore timide.
La question est de savoir comment l’impulsion donnée au niveau de l’État et le déploiement des initiatives locales peuvent endiguer la généralisation de la sédentarité.
De façon générale, les modèles utilisés dans les interventions sont des modèles « socio-écologiques » du comportement, qui renvoient aux interactions dynamiques entre les individus et leur environnement physique et socio-culturel.
Par ailleurs, les messages de promotion doivent être fondés sur le bilan critique des travaux scientifiques qui ont étudié les effets de l’activité physique et sportive sur la qualité de vie et la morbi-mortalité. De même, il est important de connaître par quels mécanismes l’activité physique agit sur les grandes fonctions de l’organisme. C’est à partir de ces connaissances que des recommandations pour l’activité physique et les modalités de sa pratique en population générale peuvent être élaborées.
Les travaux étudiant l’effet de l’activité physique dans les populations atteintes de pathologies chroniques et chez les personnes âgées se sont très largement développés ces dernières années. Ils ont permis d’aboutir à la définition de recommandations spécifiques et consensuelles au plan international.

Un peu d’histoire permet de comprendre la situation française en matière de sport et d’activité physique

Les origines du « sport », en France, sont à la fois anciennes et multiples (instruction militaire, gymnastique scolaire, sports athlétiques...). Au tout début des années 1920, les politiques publiques en matière de sport croisent une autre histoire débutée dans les années 1880, celle de la pratique sportive par le biais des clubs (pour l’essentiel les Athletics importés d’Outre-Manche). Composantes importantes de la société civile, les associations sportives continuent à se développer, tant elles sont soucieuses de leur autonomie, voire même de leur indépendance. Au contact de la puissance publique, ces associations vont contribuer au développement d’un nouvel espace culturel et éducatif autour du sport fait de participation sociale, d’initiative, de concertation et de contractualisation.
Le contexte socio-historique de la pratique sportive en France peut se subdiviser schématiquement en deux grandes phases d’évolution :
• une phase initiale de développement des clubs civils qui est antérieure à l’implication directe de la puissance publique dans le domaine sportif (1880-1920) ;
• une longue période de soutien – et d’accompagnement par étapes successives – de l’action sportive des clubs civils par les pouvoirs publics (à partir des années 1920) jusqu’à aujourd’hui. Les années 2000 témoignent d’une différenciation sociale des formes de l’activité sportive, avec des pratiquants de plus en plus nombreux, tandis que les aides de la puissance publique (l’État, les communes, les autres collectivités territoriales) n’ont jamais été aussi importantes.
Pendant la phase initiale au cours de laquelle la pratique sportive se structure en France, différentes activités physiques comme la gymnastique, le tir, l’escrime, la vélocipédie, le canotage ou encore l’aviron sont bien établies et précèdent l’implantation des sports athlétiques. Traditionnellement, l’Armée fait appel depuis longtemps à de nombreux exercices physiques comme la marche, la nage, l’escrime, l’équitation, la gymnastique... La gymnastique est également pratiquée et enseignée au sein de l’institution scolaire (en particulier dans les collèges et les lycées) qui au début des années 1890 va progressivement s’ouvrir aux jeux de plein air. Ainsi, l’Annuaire de la jeunesse1 , qui est une sorte de guide des études et de répertoire des établissements d’enseignement, se fait l’écho de tensions et d’oppositions : « La question de l’éducation physique peut revêtir trois aspects principaux ; on peut la considérer au point de vue athlétique, au point de vue militaire, au point de vue hygiénique ».
La deuxième période se caractérise par quelques étapes clé au cours desquelles on peut distinguer trois modèles successifs de l’organisation des activités sportives. Jusqu’au milieu des années 1920, le modèle le plus répandu est celui du club sportif (qui est souvent un club omnisports). Dans la mesure du possible, ce club s’efforce de devenir propriétaire de ses propres installations (siège, terrains de sports, vestiaire avec douches et sanitaires). Il s’agit du modèle associatif patrimonial. Après les élections municipales de 1925, diverses municipalités conquises par la gauche développent un équipement communal (stade, gymnase, piscine, salle dite d’éducation physique et de gymnastique médicale, centres aérés...). C’est le modèle municipal d’équipement communal. Le gouvernement du Front populaire favorisera la généralisation de ces initiatives afin de les étendre à l’ensemble du territoire (pour l’essentiel des communes urbaines). Durant l’entre-deux-guerres, les directions de quelques grandes entreprises vont inscrire l’éducation physique, les sports et le contrôle médical au programme de leurs œuvres sociales. Ce modèle paternaliste s’inscrit souvent dans une gestion globale – et contrôlée – des salariés de l’entreprise2 .
En résumant l’enchaînement des faits politiques, à la veille de l’avènement de la Ve République (1958), l’essentiel de la pratique sportive se limite aux jeunes, principalement la jeunesse scolarisée, avec un net avantage pour les garçons par rapport aux filles. Les années 1960 vont connaître plusieurs changements :
• la modernisation du « système sportif » engagée par Maurice Herzog, alors ministre des Sports ;
• la crise du modèle associatif patrimonial dont les installations sportives ne peuvent répondre à la demande sociale ;
• la mise en place d’une politique municipale d’équipement sportif communal (surtout dans les banlieues où l’habitat collectif est dense).
Ainsi, un troisième modèle d’organisation de la pratique sportive se met en place, celui d’une coopération normalisée. Dans ce modèle, la municipalité fournit les équipements sportifs, rémunère les agents chargés de leur maintenance et distribue les subventions aux clubs. De leur côté, les clubs sportifs favorisent l’encadrement bénévole et la transmission, par l’apprentissage des disciplines sportives, de modèles de culture sportive. Coexistent un modèle « communal », qui reconnaît la prépondérance des municipalités dans l’action sportive locale, et un modèle « libéral » qui privilégie son propre réseau d’influence sans s’opposer cependant au pluralisme associatif.
Durant les années 1980, le modèle prévalent depuis une vingtaine d’années est traversé par diverses tensions. Il connaît tout à la fois une crise d’identité (avec la montée du professionnalisme et l’importance des enjeux financiers), de croissance (avec l’augmentation des adeptes d’activités physiques et sportives), de légitimité idéologique également. En effet, de « nouveaux publics » apparaissent (gymnastique volontaire, activités sportives de loisir...) et demandent de meilleures conditions pour accéder aux installations sportives (vestiaires, piscine, gymnase...) et leurs associations souhaitent bénéficier d’une subvention annuelle honorable. Par ailleurs, la massification de la pratique sportive, en particulier au cours des loisirs, conduit à l’accroissement du nombre d’accidents et de traumatismes. Ce phénomène est préoccupant pour le corps médical et a un coût important pour la sécurité sociale, les mutuelles et les assurances. La mise en place de programmes successifs de prévention de la délinquance juvénile par le sport dans les quartiers dits « sensibles » va couvrir un domaine d’animation qui n’a aucun équivalent dans les décennies passées.
Les clubs sportifs d’entreprise et l’activité sociale des comités d’entreprise composent un autre modèle d’organisation destiné à promouvoir les activités physiques et sportives. Leur essor contribue à la démocratisation des loisirs et à l’innovation pédagogique, voire même à la recherche3 . À partir de la fin des années 1980, ces clubs vont être touchés par les transformations de la vie économique et la baisse, sensible à l’échelle du pays, d’une implication des syndicats.
La pratique sportive comprend aujourd’hui la pratique sportive de masse organisée par les clubs, le sport de haut niveau qui relève désormais de clubs plus ou moins professionnels et l’activité physique des sportifs non affiliés à une association. À ces composantes, vient s’ajouter le sport scolaire pratiqué sur une base volontaire dans les établissements de l’enseignement secondaire (en dehors, donc, des heures obligatoires d’éducation physique et sportive ou EPS). Mentionnons également l’émergence de la pratique des sports de pleine nature qui ne nécessitent pas d’affiliation à un club ou une fédération mais qui ont toutes les caractéristiques d’une pratique sportive notamment par le niveau de technicité (alpinisme, parapente, planche à voile...). Ces pratiques correspondant à des classes d’âge et des milieux socio-culturels déterminés s’inscrivent parfois dans des traditions régionales (par exemple le rugby dans le Sud-Ouest).
À l’échelle de la commune, en dehors du sport professionnel, on peut identifier plusieurs types de « services » publics qui recoupent les modèles déjà présentés :
• un courant associatif simple : c’est le modèle le plus ancien mais il peut s’agir aussi d’un courant émergent lié à l’initiative prise par un groupe de personnes ;
• un courant associatif contractuel structuré sur la base d’une convention d’objectifs liant le(s) club(s) et la municipalité ;
• un modèle municipal de service direct à la personne, service qui vient compléter le modèle précédent comme la mise sur pied d’une école municipale de natation, d’une école multisports encadrée par des agents municipaux...
L’offre commerciale d’initiative privée (gymnases clubs, clubs de remise en forme...) constitue un autre modèle d’organisation. Cette offre lucrative s’adapte bien à l’évolution de la demande sociale : diversification des services, convivialité, proximité du lieu de travail.
Un nouveau modèle appelé « l’individualisme sportif de masse »4 se dessine. Il pourrait être à l’origine de changements significatifs dans l’amélioration du cadre de vie. Les sportifs (individus, famille, groupe d’amis) revendiquent dans les villes la mise en place d’un réseau cohérent de pistes cyclables, l’aménagement de parcours (pour la course à pied, le roller, la marche) dans les parcs et jardins publics, le long des rives de fleuves ou d’axes rayonnants protégés et réservés donnant accès aux espaces péri-urbains.
Grâce à l’éducation physique et sportive (une discipline d’enseignement) et au sport scolaire (pratiqué dans le cadre des « associations sportives » qui reposent sur l’adhésion volontaire des collégiens et lycéens), les jeunes sont aujourd’hui plus nombreux à pouvoir se familiariser à diverses activités physiques et sportives. Dans le même temps, on constate dans les clubs une baisse des prises de licence sportive par les adolescents des deux sexes. Peut-être conçoivent-ils autrement que dans le sport leur sociabilité culturelle ?
Au niveau de la population générale, de grandes différences s’observent dans les manières de concevoir les activités physiques et sportives, dans leur inscription quotidienne ou hebdomadaire et dans le cadre des loisirs. Cependant, les différents espaces-temps sociaux (le travail, la famille, les loisirs, les transports et les déplacements), et leur maîtrise, sont difficiles à caractériser et ne peuvent être décrits dans quelques tendances-types. On sait néanmoins que le cadre de vie (le lieu de résidence) reste une variable « synthétique » fort pertinente liée en partie aux efforts accomplis par les communes, les départements et les régions.
La situation observée localement en France se relie à d’autres plans de référence : contrat entre l’État (le ministère5 ) et le CNOSF6 (et les fédérations nationales), relayé et complété par une relation tripartite au niveau des régions (DRJS7 , CREPS8 , Conseil régional et CROS9 ) ou au niveau des départements (DDJS10 , Conseil général et CDOS11 ).

Qu’en est-il dans les autres pays par comparaison avec la France ?

En France, c’est en 1978 que le ministère de la Jeunesse et des Sports a créé un département « Sport pour tous ». Ce dernier ne faisait que refléter une aspiration de la population perceptible dans l’évolution des comportements en faveur d’activités physiques récréatives. La loi de 1984, dans son article 1er, insiste sur le principe d’une accession de tous à la culture sportive. Pour autant, il semble manquer à l’ambition ministérielle une ligne d’action ferme, originale, spécifique et inscrite dans la durée. Actuellement, la prise de conscience de l’intérêt de l’activité physique pour la santé se fait jour. Le CNOSF, les fédérations sportives et les collectivités territoriales s’impliquent, avec le soutien du Ministère, dans les différents programmes « Sport pour tous ». La France présente une multitude d’initiatives locales qui, par leurs objectifs et leurs impacts, entrent dans l’objectif « Sport pour tous ». Cependant, la prise en considération de l’activité physique comme composante essentielle de la santé reste encore timide.
L’Espagne et le Portugal, pays dans lesquels un état alors non démocratique a longtemps exercé une forte emprise sur le mouvement sportif, ont depuis développé, principalement dans les grandes villes, des politiques d’équipement sportif, de soutien aux associations et de valorisation directe des programmes « Sport pour tous ». Ces politiques n’ont en rien entravé des activités de type privé lucratif.
L’Italie est un cas un peu particulier puisque le Comité national olympique italien constitué sous Mussolini, tient une place prépondérante en faveur du sport de compétition et de haut niveau. Pour autant, la fédéralisation du sport pour tous (avec l’Unione Italiana Sport Popolare) a su diversifier ses actions auxquelles ont adhéré les nouveaux publics du sport et des activités physiques de détente.
Dans plusieurs pays de l’Europe du Nord, l’État a choisi d’attribuer le statut d’agent contractuel à l’ensemble du secteur associatif et non pas de manière exclusive aux seules fédérations sportives nationales (qui auraient pu revendiquer un contrat d’exclusivité). Cette situation correspond à ce qu’on appelle habituellement le « modèle scandinave » (« the Scandinavian Model »). Il concerne le Danemark, la Finlande, la Norvège et la Suède.
En Allemagne, ce sont les gouvernements régionaux, les « Länder », qui sont en charge du développement du sport pour tous par leur soutien aux initiatives locales, sur fond de crise de l’État Providence.
La situation de la Grande-Bretagne est spécifique avec un État faiblement interventionniste, au profit d’initiatives de la société civile et des acteurs du marché. En outre, la Grande-Bretagne est souvent considérée comme « le pays sportif par excellence »... Cependant, en Grande-Bretagne, on ne confond pas les différents modèles d’activité physique, y compris dans leurs correspondances au plan ministériel.
L’expérience des États-Unis et celle du Canada présentent-elles des traits similaires à la situation britannique ? Dans ces deux pays, le sport d’un côté et les activités physiques de loisirs de l’autre, ont été pris en considération bien plus tôt qu’en Europe.
Pour les États-Unis, l’activité sportive est un élément majeur des loisirs. Cependant, à partir des années 1960, au-delà des périodes de renoncement au sport (fin du système scolaire ou vers la quarantaine), une nette diminution globale de la pratique sportive a été constatée. Le modèle du sport de compétition, trop exigeant, expliquait en partie cette désaffection massive. Pour comprendre le phénomène, les agences gouvernementales ont diligenté des enquêtes nationales et dans les années 1970 et 1980, de grands instituts de recherches ont fait des études afin de mieux cerner les nouvelles tendances. Parmi celles-ci, la randonnée, le vélo ou des activités d’extérieur, à proximité du lieu de résidence, figurent en bonne place.
En 1943, le gouvernement canadien a édicté le premier « National Physical Fitness Act », accompagné de la création du « National Physical Fitness Council ». Depuis, la mobilisation des pouvoirs publics a connu des fluctuations, importante durant les années 1960 et au début des années 1970, mais en retrait une dizaine d’années plus tard... Cependant au début des années 1980, les statistiques fournies par le gouvernement canadien font apparaître l’importance croissante des activités physiques (marche, vélo, natation, « jogging », course à pied, jardinage, entretien physique chez soi...). Du fait de l’étendue de leurs territoires respectifs, les États-Unis comme le Canada, connaissent des situations locales qui peuvent être très contrastées. Ces différences sont liées à des facteurs historiques, au lieu de résidence (cadre urbain ou non), au développement industriel, à des particularités climatiques et au niveau des ressources financières.
Le contexte socio-historique de la pratique des activités sportives d’un pays correspond à une réalité singulière. La façon de concevoir l’activité physique récréative dépend du type de relation qu’entretient la population « sportive » avec les initiatives des associations ou encore avec les mesures prises par les pouvoirs publics.

En France, les politiques sont-elles orientées vers la promotion du sport pour la santé ?

Les politiques du sport en France reposent sur le principe de l’accessibilité du plus grand nombre aux activités physiques et sportives. Elles doivent être en mesure de reconnaître la valeur d’excellence qu’incarnent les meilleurs, ceux qui représenteront la France dans les compétitions internationales mais aussi les inconvénients et les éventuels effets néfastes pour la santé de ne pas accéder à la culture physique et sportive.
Les pouvoirs publics définissent l’intérêt général en matière de politique sportive. Cela se traduit par la construction d’installations sportives, par la formation d’agents d’encadrement et par l’affectation de moyens financiers. L’objectif à atteindre est celui de la pratique d’activités physiques et sportives par le plus grand nombre de citoyens. D’un côté, les champions qui contribuent au rayonnement du pays, sont accueillis au sein d’institutions spécialisées disposant d’entraîneurs, de médecins, de kinésithérapeutes, voire de psychologues, et de moyens financiers importants. De l’autre, existent de fait des situations particulières comme l’absence d’activité sportive de jeunes dans les « quartiers sensibles » et la quasi-exclusion des individus handicapés. Les pouvoirs publics ont la volonté de prendre en charge ces situations par la mise en œuvre de programmes « sport et réinsertion sociale des jeunes » ou encore « sport adapté ». Ces programmes nécessitent des moyens humains comme les éducateurs « socio-sportifs » et également financiers...
Les politiques du sport en France possèdent ainsi un double ancrage : au niveau des valeurs (conception universaliste doublée de la prise en considération des particularités) et de l’organisation (administration, matériel et moyens humains).
Historiquement, l’effort du ministère des Sports a d’abord intéressé des publics dits « captifs » : jeunes scolarisés, jeunes appelés sous les drapeaux, licenciés dans les clubs. Il faut attendre le milieu des années 1930, pour que le déséquilibre de traitement entre garçons et filles vis-à-vis de l’éducation physique et sportive (EPS) soit corrigé. À cette époque, la valorisation de la nature et de la vie en plein air favorise la promotion de l’exercice physique qui se voit affranchi d’une pratique centrée sur la compétition. L’ère des loisirs, qui s’ouvre à partir des années 1960, stimule l’essor des pratiques sportives autonomes et de plus en plus affirmées dans les différentes couches de la population, telles celles du « deuxième âge » (les personnes déjà trop âgées pour la compétition en club, par exemple), et également du « troisième âge » appelée aussi les seniors.
Les efforts en matière de politiques du sport peuvent varier d’intensité en fonction des époques ou des conjonctures. Le statut du « Ministère des sports », son rang au sein du gouvernement, la définition précise de ses domaines de compétence et, le cas échéant, son rattachement ministériel de tutelle sont autant de précieux indices de l’importance accordée à la relation entre pratique sportive et santé. Comment au fil du temps, cette relation a-t-elle été perçue et comment a-t-elle évolué ?
À la fin de la première guerre mondiale, Henry Paté (1919) en sa qualité de président du Comité national de l’éducation physique et sportive et d’hygiène sociale déclare solennellement « La France réclame la création de piscines, de terrains de jeux, de stades dans toutes les communes, la transformation de tous nos établissements scolaires en foyers de propagande d’hygiène et de diffusion de la joie saine des exercices physiques ».
Cependant, en ces années d’immédiat après guerre, de fortes tensions témoignent de luttes d’influence entre diverses institutions : le ministère de la Guerre (qui est en charge de l’École de Joinville), le ministère de la Santé publique et de l’Hygiène sociale et le ministère de l’Instruction publique. Le corps médical est en charge de la rééducation physique et des gymnastiques dites « corrective », « respiratoire », et orthopédique ».
L’année 1925 marque une étape décisive dans la structuration des premières politiques sportives mises en œuvre par les municipalités, en particulier dans celles qui se veulent progressistes. Les salles (ou gymnases) destinées à l’éducation physique, à la rééducation physique font partie du programme d’équipement communal. Les enjeux locaux ne sont pas l’exacte transposition des enjeux nationaux. D’une façon générale, la valorisation de la culture sportive éclipse les velléités patriotiques d’une éducation physique utilitariste et « militaire ».
Au tout début des années 1930, se pose clairement la question de la création d’un ministère des Sports de plein exercice. Durant la brève période du gouvernement de Front populaire (1936-1938), l’éducation physique et sportive de la jeunesse est largement valorisée. Dans le premier gouvernement de Front populaire, le sous-secrétariat d’État à l’organisation des Loisirs et Sports, confié à Léo Lagrange, est rattaché au ministère de la Santé publique. Léo Lagrange insiste sur l’accès de tous les jeunes à l’éducation sportive, accès dont le Brevet sportif populaire constitue un indicateur pertinent ; « Son but, en donnant aux Français et aux Françaises le souci de leur santé et de leur développement physique, est de leur faire subir des épreuves dont les conditions sont suffisantes pour témoigner d’un bon état physique ». À cette époque, se met en place de manière efficace une articulation entre la politique conduite par l’État et celle développée au niveau local, dans les villes en particulier.
Dès 1946, la mise en place d’un Comité national du plein air (pour la promotion des activités de pleine nature) et le développement des institutions de plein air (colonies de vacances, camps de vacances, colonies sanitaires, écoles de plein air, préventoriums...) renouent avec l’esprit du Front Populaire. Ces décisions contribuent à populariser les activités physiques, en particulier auprès des Mouvements de jeunesse et d’éducation populaire.
Au niveau ministériel, outre un rattachement fréquent au ministère de l’Éducation nationale, l’éducation physique et les sports vont connaître un « statut » variable : à la fin de l’année 1947, ce domaine de compétences, confié à un directeur général, est absorbé par le ministère de la Jeunesse, des Arts et des Lettres ; en 1950, en revanche, ce domaine est inclus dans un secrétariat d’État à l’enseignement technique, à la jeunesse et aux sports.
Dans les années 1950, le Dr Encausse, un scientifique en charge du Bureau médical du Haut commissariat à la jeunesse et aux sports (dirigé par Maurice Herzog), développe ses idées dans un ouvrage « Sport et santé » (1952, 1962) qui étudie d’un côté, l’influence des activités physiques et sportives sur l’organisme ; de l’autre, l’organisation administrative, technique et pratique du contrôle médical des activités physiques et sportives.
La « sportisation » de la culture physique et de l’exercice va aller crescendo tout au long des années 1960 et durant la décennie suivante. Le sport de compétition possède une légitimité idéologique qui occulte quelque peu les autres pratiques. À l’époque, les fédérations affinitaires et multisports, les responsables de clubs, les associations de jeunesse et d’éducation populaire se sont effacés devant le modèle sportif défendu par les fédérations unisports. Cependant, outre les sportifs « déclarés » (licenciés en clubs), il existe des « sportifs » (qui s’auto-déclarent comme tels) qui ne sont pas affiliés. Il existe aussi une catégorie de « non sportifs » qui, pour la majorité d’entre eux, ne s’adonnent à aucune activité physique. Cette disparité renvoie à une question sociale d’actualité. En 1968, la Fédération française des offices municipaux des sports choisit d’aborder le thème du « Sport pour tous » à l’occasion de son congrès annuel.
La loi « relative au développement de l’éducation physique et du sport » du 29 octobre 1975, dite « loi Mazeaud » constitue un jalon important. Cette loi est destinée principalement à accompagner, sur le plan de l’organisation, les transformations de l’activité sportive en France. Elle souligne que « l’entreprise apparaît devoir être une des structures privilégiées pour le développement du sport pour tous » (titre II). En revanche, la loi est relativement discrète sur la place des activités physiques et leur importance pour l’entretien de la santé. Les « Journées nationales » animées conjointement par les services du ministère, les clubs et les localités (par exemple l’opération « Parcours du cœur »), ne semblent pas avoir un impact significatif et durable sur les comportements individuels. La France n’est-elle pas en train d’accumuler du retard par rapport à certains pays voisins ?
Au tout début des années 1980, est votée la « Loi Avice » du 16 juillet 1984, relative à l’organisation et à la promotion des activités physiques et sportives. Des changements culturels se combinent à une crise de l’« État Providence » et à des signes tangibles de récession économique. Les activités physiques et sportives progressent, les vacances sportives également bien que des inégalités sociales persistent ou se modifient, inégalités en partie liées à la complexité croissante des flux migratoires. L’action des comités d’entreprise d’envergure est alors à son zénith. Elle contribue à la démocratisation des activités physiques et sportives et à celle des séjours de vacances.
Dans les années qui suivent, les difficultés économiques et la montée du chômage vont contrarier cet élan novateur. La priorité est accordée aux activités sportives des jeunes dans les quartiers dits « sensibles » (programmes interministériels « Vacances et loisirs pour tous », « Loisirs quotidiens des jeunes »).
Le statut du « ministère » des sports connaît des variations au fil du temps : parfois ministère de plein exercice, parfois un secrétariat d’État, avec à sa tête une personnalité ayant un statut de délégué auprès du Premier ministre.
La décentralisation, qui devient effective avec les lois de 1982 et de 1983, se traduit par une redistribution des rôles entre l’État, les départements et les régions. Quelques départements n’avaient pas attendu pour mettre en œuvre des actions en faveur du développement de la pratique sportive chez les jeunes. La décentralisation apporte aux régions une compétence nouvelle qui est complémentaire de celle déterminante des communes.
En 1996, Roger Bambuck note que « le rôle de l’État s’est profondément transformé : de tuteur, il est devenu partenaire » (Secrétariat d’État chargé de la jeunesse et des sports). Les politiques sportives territoriales (les départements, les régions) prennent des orientations nouvelles conciliant aménagement des territoires, développement durable et mise en valeur touristique des espaces de pleine nature et des pratiques sportives. Posent-elles la question de la santé des populations ? Quelques initiatives isolées, comme les opérations (colloques, journées de formation, actions sur le terrain) organisées par l’Office départemental des sports de l’Hérault, sont observées. Le rôle des centres médico-sportifs est à l’époque remis en avant.
Les initiatives ministérielles en faveur d’une activité physique et sportive pour le plus grand nombre se multiplient, mais la question de la santé n’occupe pas une place centrale au sein de l’action du ministère. Plus précisément, les objectifs de cohésion sociale et de solidarité l’emportent sur les questions de prise en charge de la santé. L’analyse des rapports d’activité du ministère qui, depuis 1994, font état de l’action développée l’année précédente, est particulièrement éclairante. La première mention explicite de la santé se trouve dans le Rapport annuel de septembre 1996. On y apprend que la « Mission de médecine du sport et de la lutte anti-dopage s’est engagée en 1995 dans une démarche visant à favoriser la pratique sportive dans un but de santé ». Dans les années suivantes, la lutte antidopage mobilise l’essentiel des énergies. Une première loi anti-dopage est promulguée le 1er juin 1965, au nom de la préservation de la santé des sportifs et de la défense de l’éthique et du principe d’égalité des compétiteurs dans le sport. Elle sera suivie de deux autres lois en 1975 et 1989.
Le rapport d’activité 2004 (ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Vie associative, 2004) décrit en détail deux orientations du ministère : d’une part, ce document fait état de « la promotion de la santé par le sport » qui reprend le programme engagé l’année précédente. Le CREPS d’Houlgate est désormais investi du statut de site pilote national pour les actions « sport-santé » ; d’autre part, il évoque longuement « la prévention des conduites à risque » à destination des jeunes, prévention relayée par les DRJS12 et DDJS13 en partenariat avec le secteur associatif.
La mobilisation autour des questions de « santé » en relation avec l’activité physique et sportive connaît une vraie impulsion donnée par les pouvoirs publics. Elle semble bien ancrée dans les esprits et perdurer comme en témoigne le nouveau « ministère de la Santé, de la Jeunesse et des Sports » constitué au lendemain des élections présidentielles de mai 2007.

L’état des lieux de la pratique dans la population dépend fortement de la définition donnée à l’activité physique

L’évaluation du niveau de pratique physique et sportive est, en France, une préoccupation récente puisqu’elle remonte aux années 1980. Les évaluations disponibles proviennent de sources diverses qui fondent leurs estimations sur des définitions et critères variables : la réalité observée (sport ou activité physique), le phénomène à mesurer (niveau d’activité ou taux de pénétration des disciplines), la période de temps considérée (semaine ou année). Ces différences conduisent à l’évidence à des estimations très variables.
Une première enquête de l’Insee sur les loisirs menée en 1967 a interrogé les Français sur leur pratique sportive : elle montre que 39 % des Français âgés d’au moins 14 ans pratiquent un sport. Une autre, réalisée vingt ans plus tard, évalue sur les mêmes bases, le taux de sportifs à 48 %. Cette augmentation correspond à une forte croissance du nombre des licenciés dans les associations sportives, au développement de pratiques physiques non sportives et à une politique d’encouragement du sport.
Les enquêtes réalisées en 1987 et 2000 par l’Insep et le ministère de la Jeunesse et des Sports, celle menée en 2003 à la fois par l’Insee, les ministères de la Jeunesse et des Sports et de la Culture prennent en compte la diversification des pratiques physiques. Ainsi, elles demandent aux personnes interrogées si elles se sont livrées à une activité physique ou sportive au moins une fois dans l’année écoulée. Ces enquêtes situent alors le taux de pratique physique ou sportive entre 73 %, en 1987, et 84 %, en 2000, de l’ensemble de la population âgée de 15 à 75 ans. Les enquêtes de l’Insep permettent de mesurer l’importance des différentes activités physiques ou sportives et d’évaluer l’intensité de la pratique (fréquence dans le temps). Si 36 millions de Français déclarent avoir pratiqué au moins une fois dans l’année une activité physique ou sportive, ils ne sont plus que 14 millions à pratiquer plus d’une fois par semaine. De l’ordre de 10 000 à 12 000 personnes sont des sportifs de haut niveau amateurs et professionnels qui consacrent l’essentiel de leur temps au sport.
Niveaux de participation aux activités physiques et sportives en France selon l’enquête Insep, ministère de la Jeunesse et des Sports en 2000
De son côté, l’Inpes dans le Baromètre Santé14 évalue le niveau d’activité physique à l’aide du questionnaire IPAQ (International Physical Activity Questionnaire) qui permet de comparer l’activité physique de la population considérée à celle d’autres pays selon des normes proposées par les différents organismes de santé publique. Dans ce cadre, les activités physiques sont classées en diverses catégories : activité intense, dont fait partie le sport, et activité modérée, avec une durée minimum de dix minutes par semaine en deçà de laquelle l’activité n’est pas prise en compte. Ainsi, l’enquête 2005 du Baromètre Santé montre les faits suivants : pendant la semaine précédant l’enquête, 45,7 % des Français âgés de 15 à 74 ans ont pratiqué une activité physique à un niveau entraînant des bénéfices pour la santé, soit plus de 10 minutes, 19 % de personnes ont pratiqué plus de deux heures une activité intensive et 42 % se situent en dessous de 10 minutes.
Il est intéressant de rapprocher ces deux types de données : en 2005, un peu plus de 80 % des Français âgés de plus de 15 ans se sont livrés (au moins une fois) dans l’année à une activité physique ou sportive, et plus de la moitié de la population a une activité physique insuffisante si l’on se réfère aux recommandations de santé publique publiées par divers organismes nationaux et internationaux.
Selon les enquêtes du ministère de la Jeunesse et des Sports, les activités les plus populaires pratiquées par plus de 10 millions de personnes sont, dans l’ordre, la marche et la natation sous leurs différentes modalités puis le vélo. Suivent la course à pied, les jeux de boules, les activités gymniques et les sports d’hiver. Dans ce classement, parmi les sports organisés, figure au premier plan le football avec cinq millions de pratiquants suivi du tennis avec quatre millions d’adeptes.
La transformation remarquable des activités sportives a provoqué une perte du monopole des fédérations sur le développement des nouvelles pratiques. Bien que le nombre de licences délivrées par les fédérations ait augmenté entre 1950 et 2006 (de deux à quatorze millions), le nombre des pratiquants a augmenté plus vite que le nombre des licenciés. En 1985, pour une personne sur deux, l’activité se faisait dans un cadre associatif ; aujourd’hui, cette proportion est passée à une personne sur quatre.
Deux objectifs paraissent dominer l’entrée dans la pratique sportive. D’un côté, la recherche du bien-être et d’un équilibre personnel, liée à des préoccupations de santé ou du besoin d’exercice. De l’autre, l’affirmation d’une forme de sociabilité, celle des liens familiaux ou amicaux, loin devant la recherche de la performance ou la compétition et loin plus encore de la prise de risque.
Si les enquêtes d’accidentologie sont trop peu développées, les accidents de sport (juste après les accidents de la vie domestique) ont un poids élevé dans les accidents de la vie quotidienne colligés par la Caisse nationale d’assurance maladie15 (22 % des accidents de la vie courante concernent spécialement les jeunes de 14 à 24 ans lors de la pratique de sports collectifs). Plusieurs explications peuvent être avancées. Un plus grand nombre de pratiquants conduit à l’évidence à un plus grand nombre d’accidents ; l’activité physique fait courir divers risques à des pratiquants peu préparés, même lors d’activités comme la randonnée ; les sports de pleine nature comme les sports de glisse, qui sont pratiqués majoritairement par des jeunes garçons en dehors des associations sportives, exposent à un risque élevé d’accidents lié à une prise de risque accrue. Des comportements à risque comme des désordres alimentaires ou la consommation de médicaments ne sont pas anodins par rapport à une pratique intensive d’un sport.
Comment se situe la France par rapport aux autres pays européens en matière d’activité physique chez les jeunes ? L’étude internationale Health Behaviour in School-aged Children (HBSC) 2001-2002 a comparé la pratique d’activité physique chez les pré-adolescents dans plusieurs pays européens et américains.
Proportion d’enfants scolarisés âgés de 11 ans dont la pratique sportive (de modérée à intensive) est conforme aux recommandations (d’après Currie et coll., 2004 ; Étude HBSC 2001-2002 ; OMS, 2004)
L’activité physique est déterminée à partir de deux questions posées aux enfants : la première concerne le nombre de jours où une activité physique d’au moins 60 minutes a été pratiquée durant les 7 jours précédant l’enquête ; la seconde se rapporte au nombre de jours où ils ont une activité physique pendant au moins 60 minutes au cours d’une semaine typique. Cette activité physique varie largement d’un pays à l’autre. En France, 11 % des filles et 25 % des garçons de 11 ans ont une activité physique conforme aux recommandations ; en Irlande, les chiffres s’élèvent respectivement à 51 % et 61 %.
Récemment, les premiers résultats de l’Étude nationale nutrition santé (ENNS) ont été rendus publics16 . Cette étude fournit des données sur l’activité physique dans une population d’adultes (18-74 ans) et d’enfants (3­17 ans) vivant en France métropolitaine en 2006. Selon les données du questionnaire de l’IPAQ (International Physical Activity Questionnaire), les deux tiers des adultes (63 %) pratiquent l’équivalent d’un minimum de 30 min par jour d’activité physique modérée au moins 5 jours par semaine, avec une proportion comparable chez les hommes et chez les femmes ; ce volume d’activité physique est atteint chez 71 % des adolescents de 15­17 ans, les garçons ayant un niveau un peu plus élevé que les filles. Selon les données du questionnaire YRBSS (Youth Risk Behaviour Surveillance System17 ), 60 % des adolescents de 11-14 ans effectuent un minimum de 30 min par jour d’activité physique d’intensité modérée 5 jours par semaine tandis que 39 % des adolescents de 11-14 ans pratiquent l’équivalent d’un minimum de 30 min d’activité physique chaque jour de la semaine.

La pratique d’une activité physique ou sportive est influencée par les facteurs d’insertion sociale qui jouent sur les motivations individuelles

La plupart des études font rarement la distinction entre les activités sportives et l’activité physique en général et de même tiennent peu compte des dépenses énergétiques dues au travail, aux transports ou aux activités domestiques (ménage, bricolage, jardinage...).
La pratique des activités sportives de loisirs varie d’abord en fonction de l’âge et du sexe : les enfants, les adolescents et les jeunes adultes pratiquent plus que leurs aînés, les garçons plus que les filles. Interviennent également des variables socioéconomiques.
La première variable est le niveau de diplôme. Les personnes qui sont les plus nombreuses à pratiquer des activités physiques sont celles qui ont fait au moins une ou deux années d’études après le baccalauréat (88 % de pratiquants en 2003), suivies de celles qui ont un diplôme inférieur au baccalauréat (79 % de pratiquants parmi les CAP, BEP, BEPC) et, enfin, de celles n’ayant aucun diplôme (45 % de pratiquants). Le diplôme intervient dans les différences de pratique entre hommes et femmes. Ces dernières, lorsqu’elles ont fait des études supérieures, ont pratiquement le même niveau de pratique sportive que les hommes. Le facteur diplôme n’intervient pas sur les pratiques masculines.
La deuxième variable est le niveau de revenus des personnes. Le coût est un élément déterminant dans les populations les plus fragilisées. Le niveau de revenus a également une influence sur le type de pratique : les individus les plus aisés ont une activité physique davantage dans des structures institutionnelles (clubs, salles...), et de ce fait ont une pratique plus régulière.
La troisième variable est le lieu de résidence et l’accès à un environnement favorable (équipements, mais aussi parcs, voies cyclables...). Ce n’est pas tant le clivage entre urbain et rural qui joue que le taux d’équipement ou l’accès à des lieux permettant les pratiques physiques de loisirs. Les habitants des quartiers moins favorisés ont des représentations moins positives de leur environnement que ceux des zones favorisées, tant au niveau de l’attractivité qu’au niveau de la sécurité. Cette perception joue négativement et tend à limiter les activités physiques de loisirs dans le quartier. C’est surtout vrai pour les femmes et les enfants.
Une quatrième variable s’établit au croisement des catégories socioprofessionnelles et des cycles de la vie familiale qui définissent le temps disponible pour les loisirs. Avoir des enfants en bas âge, travailler dans une petite entreprise ou être à son compte sont des situations qui réduisent la probabilité d’un exercice physique régulier. Cependant, disposer de temps libre ne suffit pas à favoriser la pratique physique et sportive. Une organisation temporelle plus propice à cette pratique est reconnue chez les personnes à diplôme et à statut socioprofessionnel élevés.
Ces quatre grandes variables sont moins bien établies lorsque l’on considère la totalité des domaines d’activité, y compris les dépenses énergétiques associées au travail, au transport ou aux activités domestiques. Ainsi, les deux catégories socioprofessionnelles qui ont les plus grandes chances d’avoir une activité physique favorable à la santé (c’est-à-dire l’équivalent de 10 000 pas par jour) sont les ouvriers et plus encore les agriculteurs et exploitants qui ont par ailleurs le moins de chances d’avoir une activité sportive habituelle. À l’inverse, c’est chez les employés, les professions intermédiaires, les cadres et les professions intellectuelles qui ont une plus grande possibilité de pratiquer une activité sportive que l’on constate une baisse de l’activité physique dans les activités quotidiennes. Le fait de disposer de revenus supérieurs à 1 500 euros par mois et d’un diplôme supérieur au baccalauréat diminue les probabilités d’avoir une pratique physique favorable à la santé dans les activités quotidiennes. De même, si, en milieu rural, les chances de pratiquer une activité sportive sont moins importantes qu’en milieu urbain (villes d’au moins 100 000 habitants), celles d’avoir un niveau d’activité physique favorable à la santé sont plus importantes à partir de 200 000 habitants. Enfin, alors que, pour les adultes, la présence d’un enfant de moins de 14 ans au foyer ne joue pas sur le fait d’avoir ou non une activité physique bénéfique pour la santé, elle diminue les chances d’avoir une activité sportive régulière.
Pourcentage de pratiquants d’une activité sportive par catégorie socioprofessionnelle (d’après Guilbert et coll., 2001, Baromètre santé 2000)
Ce sont les contextes sociaux d’où émergent les styles de vie qui semblent les plus à même d’expliquer les décalages entre pratiques sportives et niveau d’activité physique. En fait, les différentes études examinées montrent clairement qu’il ne suffit pas de considérer les types de métiers, certes importants pour l’effort physique accompli dans le cadre du travail, mais aussi les engagements professionnels et la culture des individus.
Les femmes font plus souvent du sport pour des raisons de santé ou d’apparence, les hommes le font plus pour le plaisir et la compétition. L’âge intervient car plus l’on vieillit, plus on fait du sport pour la santé. Dans la population adulte, le contexte social joue un rôle plus important : plus l’on a de proches qui pratiquent une activité physique et sportive, plus grandes sont les chances de pratiquer soi-même. Pour les seniors, les raisons de moindre pratique sont principalement les problèmes de santé et le fait de s’estimer trop âgé pour avoir une activité physique et sportive. Ceci est surtout vrai chez les femmes.
Les motivations des adolescents pour le sport sont d’abord liées au désir de se défouler, de se détendre et de s’amuser. Viennent ensuite le fait d’apprendre, de maîtriser une technique, de sortir et de s’occuper. Les trois motifs d’abandon les plus cités sont une médiocre maîtrise de la technique, le sentiment de ne pas être bon (davantage pour les garçons) et les contraintes de l’entraînement (davantage pour les filles). Un niveau élevé de diplôme et une pratique physique et sportive régulière des parents augmentent les probabilités de pratique chez leurs enfants. Un faible niveau de revenus des parents fait baisser les pratiques des filles bien plus que celles des garçons.
Que ce soit au niveau des motivations ou des grands déterminismes socioéconomiques, la pratique d’activités physiques et sportives est liée au niveau d’insertion sociale. Ainsi, les femmes au foyer, les célibataires avec enfants et les actifs à la recherche d’un emploi sont plus nombreux à déclarer ne pratiquer aucune activité physique ou sportive.

Des changements environnementaux sont susceptibles de moduler le niveau d’activité physique pour tous

Des déterminants environnementaux sont susceptibles de jouer en faveur ou en défaveur de l’activité physique « ordinaire » (pour distinguer celle-ci de l’activité physique récréative et/ou sportive). Les enquêtes qui abordent ce type de question sont récentes et relativement nombreuses. Il s’agit d’un nouveau domaine d’investigation exploré par diverses disciplines comme des enquêtes sociologiques et des études d’aménagement du territoire et d’urbanisme... En majorité, il s’agit de travaux réalisés dans le cadre urbain anglophone et américanophone et qui s’intéressent aux déplacements à pied, à la marche soutenue ou à l’utilisation du vélo. Il s’agit de ce que les anglophones désignent par les « daily routines » ou « routine activities ». L’idée est de substituer des espaces-temps de liaison passifs à des séquences actives de déplacements ou d’introduire dans ces espaces-temps une composante de véritable activité physique. Cette idée est probablement un axe d’innovation culturelle. Son développement en France en est à ses débuts.
Les environnements – essentiellement urbains – peuvent être classés en fonction de différents critères. La situation socio-géographique au sein des trames urbaines est l’un de ces critères qui permettent de distinguer : centres d’agglomération, banlieues urbaines d’agglomération, petites villes isolées... D’autres critères sont plutôt de type morphologique : densité urbaine, réseaux de voies piétonnes ou de pistes cyclables, répartition des parcs publics, réseaux des transports en commun, dimension esthétique du bâti, qualité « humaine » des espaces, localisation des commerces, des services...
D’autres critères enfin sont liés aux représentations sociales et à la perception que les individus ou les groupes (les personnes âgées, les parents se plaçant du point de vue de leurs enfants, par exemple) se font de l’environnement urbain. Celui-ci est un « espace » qui inclut le lieu d’habitation, le lieu de travail, les sites des commerces ou services divers, les établissements scolaires... Cet espace peut être perçu comme « sécurisé » ou non. Des trottoirs aménagés le long de façades d’immeubles jugées agréables (boutiques, vitrines de magasins attrayantes et éclairées la nuit, aménagements de verdure...), des pistes cyclables protégées (du trafic automobile), contribuent à une bonne « image » du quartier qui inspire confiance et au sentiment de qualité de l’environnement.
Un certain nombre de travaux soulignent d’emblée le déclin de l’activité physique ordinaire au profit de l’usage de l’automobile, de la télévision, des jeux vidéos, d’Internet... dans la vie quotidienne. D’autres (Canada, États-Unis, Australie...) ont mis en évidence l’impact positif des aménagements de l’environnement urbain (trottoirs, bancs publics, allées piétonnes, pistes cyclables protégées...) sur le fait de se déplacer à pied ou en vélo.
Les modélisations de l’environnement sont relativement complexes et les méthodologies loin d’être unifiées. Les spécialistes reconnaissent de façon unanime que les facteurs de l’environnement sont déterminants dans les opérations de promotion de la santé. Certaines études montrent que la qualité de l’environnement permet de mieux comprendre pourquoi, à l’échelle d’une localité, il y a pratique ou non d’une activité physique. Un environnement défini objectivement (par l’enquêteur) et perçu subjectivement (par les enquêtés) comme un cadre favorable aux déplacements à pied, à l’utilisation de la bicyclette, est effectivement stimulant et incitatif pour le développement d’une activité physique. Des auteurs américains ont pu faire la différence entre un type de villes approprié à la marche et un type de ville inapproprié à cet usage. Aux Pays-Bas, pour de courts déplacements (un rayon de 300 mètres, un rayon de 500 mètres...), la fréquentation des espaces verts et de loisirs est associée à l’usage de la bicyclette.
En s’appuyant sur la plupart des enquêtes examinées, on peut considérer que la qualité de l’environnement est un facteur incitatif pour l’activité physique ordinaire. Les instruments permettant de caractériser des environnements les plus propices à une activité physique ordinaire sont au point mais des enquêtes restent à faire. En effet, quelques analyses montrent que les variables sociologiques (par exemple le niveau d’étude, le niveau culturel...) joueraient un rôle plus important que le facteur contextuel (l’environnement).
Les études portant sur les zones rurales ou celles qui comparent plusieurs environnements (la ville, la banlieue, la campagne) sont plus rares. Certaines montrent que les adultes habitant en zone rurale (même de niveau modeste) s’adonnent à une activité physique s’ils disposent à proximité de chez eux des espaces adéquats (trottoirs en bon état, allées aménagées pour la marche et la promenade, en particulier). Ainsi, on constate que les personnes qui habitent à proximité d’équipements destinés aux activités physiques les utilisent volontiers.
On manque encore de travaux approfondis et détaillés sur l’éventail des motivations relatives aux activités physiques (marche, bicyclette...) qui pourraient prendre place au niveau des déplacements quotidiens et ordinaires des personnes. Plusieurs enquêtes évoquent les « unités » de temps ou de distance sur lesquelles pourrait s’opérer une substitution de l’automobile au profit de la marche ou du vélo.
Ces aspects recoupent les orientations et/ou constats consignés dans la brochure Physical activity and health on Europe. Evidence for action (HEPA, 2006)18 à propos des facteurs environnementaux. La densité urbaine, la répartition géographique des services, les voies de circulation réservées pour les piétons ou pour les cyclistes, et les représentations sociales associées à ces aspects, sont des facteurs qu’il convient de maîtriser pour concevoir une amélioration des mentalités.
Cet environnement objectivement incitatif ne sera utilisé par les individus ou les groupes qu’avec la mise en place d’opérations de sensibilisation proposées à l’initiative des institutions en charge de la santé des populations. Les programmes les plus mobilisateurs articulent un niveau national, avec des relais médiatiques, et une appropriation à l’échelle locale, voire micro-locale. En France, d’après les témoignages d’expériences publiés et consultés, cette appropriation volontariste s’appuie souvent sur la vie associative. Les questions de « la santé par l’exercice physique », telles qu’elles sont relayées par les fédérations affinitaires, multisports et scolaires, y gardent sans doute une indispensable part de convivialité et de sociabilité récréative.

La promotion de la santé par l’activité physique s’inscrit dans une politique de changement des comportements et d’aménagement urbain

Les interventions en matière de promotion de l’activité physique se situent à deux niveaux. Elles concernent d’une part, les motivations des individus pour l’amélioration de la santé ou l’apparence physique et d’autre part, les facteurs de l’environnement qui à travers des aménagements incitatifs peuvent favoriser les activités physiques et sportives.
En matière de motivations individuelles, ces interventions sont généralement fondées sur le modèle « transthéorique » de changement des comportements, modèle originellement conçu pour l’arrêt de la consommation de tabac. Ce modèle décrit les éléments qui permettent de mieux rendre compte de la progression vers une activité physique propice à la santé. Il s’agit des étapes de changement (indifférence, ambivalence, décision, action et maintien), des variables psychosociales (prise de conscience, confiance en soi, ouverture sociale...) et des obstacles au changement (douleur, inconfort, solitude...). Si l’intérêt théorique de ce modèle est avéré, ses applications pratiques sont plus limitées. Elles se révèlent efficaces dans le court terme ou sur le passage précis d’une étape à une autre, les actions suivant ce modèle le sont moins dans le long terme ou sur la totalité des étapes.
L’efficacité des campagnes générales de promotion de l’activité physique est liée au conseil personnalisé et à la prise en compte du mode de vie des populations concernées.
On retrouve dans le chapitre des obstacles à l’activité physique, le manque de temps et d’intérêt évoqué au niveau des motivations, mais aussi les déterminismes socioéconomiques cités plus haut : statut dans le travail, prise en compte de l’environnement (sécurité et disponibilité d’équipements), temps disponible. D’une certaine manière, il apparaît que la pratique d’activités physiques et sportives n’échappe pas aux grands mécanismes de domination sociale : accès aux diplômes et à l’emploi, revenus, sexe et âge.
Les aménagements en matière d’environnement concernent d’abord les éléments du cadre de vie, en particulier les caractéristiques de l’espace parcouru dans les itinéraires habituels pour se rendre au travail, à l’école (pour les plus jeunes), pour s’approvisionner dans les magasins et pour d’autres obligations. L’autre facteur porte sur une action volontariste (messages, signalétique, recommandations...) qui met en avant et promeut le caractère incitatif de l’environnement.
Les stratégies de promotion de l’activité physique incluent la mise en place de campagnes de communication-santé. De telles campagnes sont susceptibles d’influencer la perception des publics, en rapport avec des enjeux de politique de santé, et de renforcer des liens organisationnels. Encore faut-il que ces communications soient efficaces et adaptées à la population cible. Il faut par exemple des repères faciles à mémoriser, des consignes claires sur les efforts à consentir (30 minutes par jour, à prendre sur les temps de déplacements quotidiens ; 400 mètres correspondent à 5 minutes de marche).
L’impact de la communication (messages, slogans, formules choc...) est efficace dans la mesure où le message passe par des initiatives concrètes sur le terrain, avec si possible un caractère ludique.
Les éléments de l’environnement qui sont en faveur de l’activité physique peuvent être schématisés. Dans la partie inférieure figurent les caractéristiques relatives au cadre de vie et à son appropriation ; dans la partie supérieure, les médiations et les vecteurs de mobilisation accrue que sont les messages et préconisations diverses.
Facteurs environnementaux et leur impact sur la pratique de l’activité physique
En France, aujourd’hui, les politiques d’aménagement du territoire prennent en considération la question des déplacements quotidiens à pied ou à vélo. La multiplication des allées piétonnes, dans les centres-villes, le développement des pistes cyclables et leur mise en réseau au niveau inter-communal ou péri-urbain et l’aménagement de parcours de jogging sont des signes tangibles de cette prise en considération des déplacements. Des politiques volontaristes de limitation de la circulation automobile, à l’échelle de villes comme Paris, Lyon, Bordeaux, se traduisent par un service de mise à disposition de vélos, loués ponctuellement pour une somme modique.

Les études d’intervention montrent qu’il est possible d’augmenter l’activité physique de la population

De façon générale, les modèles utilisés dans les interventions sont des modèles « socio-écologiques » du comportement, qui renvoient aux interactions dynamiques entre les individus et leur environnement physique et socio-culturel. Si des facteurs intrapersonnels tels que les attitudes, les valeurs, les attentes positives, les capacités et les compétences peuvent être importants au niveau individuel, des facteurs qui touchent l’environnement social et physique semblent plus appropriés au niveau de la population.
Une approche intégrée de la promotion de l’activité physique, centrée sur les changements, s’impose plus au niveau des populations qu’au niveau individuel.
Effets des changements dans l’environnement social et physique sur les profils d’activité physique au niveau de la population
En tant que comportement, l’activité physique a la particularité de prendre place dans des lieux ou circonstances bien définies. Les notions de micro- et macro-environnement sont importantes pour bien identifier les possibilités d’intervention.
Les interventions qui ont déjà montré une certaine efficacité ou paraissent prometteuses, devraient être développées en priorité : éducation/activité physique à l’école, approches intégrées sur le lieu de travail, transport « actif » dans les stratégies de planification urbaine et d’aménagement du territoire qui doivent favoriser l’activité physique au quotidien. Les études préalables qui cherchent à identifier les relations entre environnement « construit » et habitudes individuelles d’activité physique sont récentes et peu développées, particulièrement en France.
Les actions peuvent intéresser des « secteurs » (par exemple, le système des transports, le système éducatif au sens large, le secteur de la santé...) ou des « lieux » (par exemple, l’école, l’entreprise, toutes les infrastructures sportives...).
La nécessité dans ce domaine d’une approche intégrée, multisectorielle, avec un fort engagement au niveau local est reconnue. Les professionnels de santé peuvent jouer un rôle moteur dans ce processus intégré en permettant au dialogue de s’établir entre les secteurs et partenaires impliqués et pour élaborer des instruments d’évaluation adaptés. L’évaluation est une priorité et doit être mise en œuvre à plusieurs niveaux : l’impact des interventions, la mise en place des actions, et l’analyse coûts-bénéfices. Il n’est pas aisé de trouver le juste équilibre entre les stratégies centrées sur les changements du comportement individuel et celles portant sur les modifications de l’environnement (au sens large). Cependant, certaines mesures éducatives demeurent inefficaces en l’absence d’une action préalable sur l’environnement de vie des personnes. Ainsi, promouvoir les déplacements à pied n’a de sens que si la sécurité des personnes est assurée.

Promotion de l’activité physique chez l’adulte. Interventions d’efficacité prouvée (d’après Kahn et coll., 2002 ; Hilldson et coll., 2006)

Actions d’information
Campagnes au niveau des communautés
Panneaux pour encourager l’usage des escaliers
Actions sur le comportement individuel ou de groupe
Changements de comportement-santé adapté au niveau individuel
Soutien par l’entourage, l’environnement social au niveau de la communauté
Actions sur l’environnement au sens large
Création ou facilitation de l’accès aux sites et équipements d’activité physique, combinée à une information pour y accéder
Un certain nombre de pays ont une expérience ancienne en matière de promotion de l’activité physique. L’analyse des stratégies mises en place montre les limites d’une approche uniquement fondée sur les campagnes d’information (communication isolée) et la nécessité d’une approche intégrée pour la promotion de l’activité physique. La Finlande a été le premier pays européen à développer une telle approche intégrée de promotion de la santé par l’activité physique. Un modèle général utilisé par l’Institut finlandais de la santé publique pour illustrer le rôle de l’individu et de la société dans les comportements de santé peut être adapté aux comportements d’activité physique.
Dans une approche systématique fondée sur des arguments scientifiques établis, la question clé est non seulement de mieux comprendre les nombreux déterminants des comportements d’activité physique, mais aussi de définir la place de la communication sur les principes et les mécanismes de la promotion de la santé à travers l’activité physique. Pour aider à la réflexion et au développement d’initiatives nouvelles dans ce domaine, le réseau européen pour la promotion de la santé par l’activité physique (HEPA Europe) a développé un modèle général de promotion de l’activité physique. Les deux éléments de base du cadre proposé sont d’une part un enchaînement de différents niveaux de promotion de la santé par le sport qui commence par un processus politique et qui se termine avec la santé, et d’autre part une structure globale cyclique avec l’évaluation comme lien clé.
Pour classer les interventions de promotion de l’activité physique, le réseau européen HEPA propose les 4 groupes suivants : des activités structurées telles que des classes d’éducation physique, des activités dans des environnements attrayants, du conseil et du coaching, des campagnes d’information et de l’événementiel. La mise en place de ces mesures nécessite une bonne coordination, la formation de médiateurs ou incitateurs ainsi qu’un soutien financier ou technique. Les interventions peuvent être décrites par secteur impliqué (tel que la santé, le sport ou le secteur des transports) et en fonction du niveau géographique, du local à l’international. Afin de fournir un retour sur les mécanismes des initiatives et pour éviter les situations où l’activisme prend le dessus, l’évaluation de ces interventions est un point capital.
Vue d’ensemble du cadre de HEPA Europe pour la promotion de l’activité physique
Le rôle des sports est souvent discuté dans la promotion de la santé par l’activité physique. Dans les quelques pays où une augmentation de l’activité physique a été observée, ce résultat est plus attribué aux sports et aux activités de loisir qu’à un véritable accroissement des activités physiques de la vie quotidienne.
Alors que la plupart des mesures de promotion de l’activité physique deviennent opérationnelles au niveau local, l’approche nationale reste d’une grande importance pour le soutien politique, mais aussi pour la coordination des campagnes et des programmes. La Finlande et plus tard le Royaume-Uni et les Pays-Bas ont été les premiers pays européens à développer des stratégies nationales de promotion de l’activité physique pour la santé. D’autres les ont rejoints depuis et leur rapports sont répertoriés dans l’inventaire des documents des politiques de promotion HEPA Europe19 .
Les organisations internationales sont également essentielles pour promouvoir le concept d’activité physique régulière pour la santé. L’OMS a joué un rôle important avec l’initiative globale OMS pour une vie active, la journée « bouger pour la santé » et la stratégie globale de 2004 pour la nutrition, l’activité physique et la santé ainsi que la conférence ministérielle européenne de 2006 pour contrecarrer l’obésité. Le réseau HEPA Europe travaille étroitement avec le bureau régional européen de l’OMS (situé à Rome) et contribue à la diffusion des connaissances sur les effets de l’activité physique sur la santé et sur l’efficacité des approches de promotion de l’activité physique afin de contribuer au développement et à la mise en place de politiques nationales.
La demande au niveau de la population est importante et les expériences menées en Finlande et au Canada en particulier montrent qu’une approche intégrée sur le long terme peut être un succès au niveau national.

Évaluer l’impact de l’activité physique sur la santé nécessite de disposer d’outils pertinents de mesure des niveaux de cette activité

L’activité physique prend place principalement dans quatre contextes : activité occupationnelle (rémunérée ou non), loisirs, domicile, déplacements. Elle se caractérise également par son type, sa durée, sa fréquence et son intensité. Les conditions sociales dans lesquelles elle est pratiquée, les variations saisonnières ont également leur importance pour sa mesure. L’activité physique a un coût énergétique qui peut être traduit en dépense énergétique, elle-même dépendante de facteurs tels que la masse corporelle, le rendement du mouvement, l’efficacité du mouvement. Contrairement aux méthodes de mesure de la dépense énergétique, les méthodes de mesure de l’activité physique permettent de recueillir les différentes caractéristiques de l’activité physique, voire d’extrapoler la dépense énergétique liée à l’activité physique. Les indicateurs obtenus au moyen de ces différentes méthodes peuvent être un score, une appartenance à un groupe prédéfini, un temps ou une dépense énergétique.
Plusieurs méthodes permettent de mesurer l’activité physique : l’observation, le journal, le rappel d’activité et l’actimétrie. L’observation permet de caractériser la pratique et de quantifier les différents paramètres de l’activité physique à partir de grilles d’observation remplies par des observateurs entraînés. Le journal est une méthode déclarative qui consiste en un relevé régulier de l’activité physique par le sujet. Le rappel d’activité est également une méthode déclarative qui se présente sous la forme d’un questionnaire rempli par le sujet lui-même, au cours d’un entretien ou en auto-administration, ou par une tierce personne (enseignant, assistante maternelle, conjoint...). Les questionnaires sont souvent utilisés dans des études épidémiologiques pour classer les sujets selon leur niveau d’activité physique habituel. Ils peuvent être sous la forme papier, assistée par ordinateur, à remplir sur le web et leurs périodes de rappel sont variables pouvant s’étendre sur la vie du sujet. L’actimétrie est un dispositif permettant de quantifier le mouvement. Nous disposons actuellement d’appareils portables qui permettent d’enregistrer les variations de vitesse des membres ou de la masse corporelle afin de rendre compte de l’activité physique, voire de l’énergie dépensée au cours d’activités variées. Il existe deux principes de mesure de l’activité physique au moyen de détecteurs de mouvements. Le premier repose sur le principe du comptage des pas au moyen d’un podomètre. Le second intègre l’accélération du mouvement quantifiée à l’aide d’un accéléromètre.
Les méthodes de mesure de la dépense énergétique incluent essentiellement la calorimétrie indirecte et la fréquence cardiaque. La calorimétrie indirecte comprend la méthode de l’eau doublement marquée, reconnue comme critère de référence pour l’évaluation de la dépense énergétique en situation réelle, et la consommation d’oxygène. La fréquence cardiaque est directement liée à la consommation d’oxygène et permet de calculer une dépense énergétique, déterminée individuellement à partir d’équations de régression. L’utilisation de ce paramètre combiné avec un accéléromètre donne des résultats intéressants et prometteurs. Les méthodes de mesure de la dépense énergétique fournissent des données sur une période de temps limitée ; elles sont utiles en tant que critère d’évaluation d’autres méthodes lorsque la dépense énergétique est considérée comme critère de référence. D’autres paramètres physiologiques tels que la température corporelle, la pression artérielle, la fréquence respiratoire, l’importance de la sudation sont aussi liés à la dépense énergétique et peuvent être enregistrés par des équipements portés par le sujet. Cependant, ces paramètres sont limités en précision et/ou faisabilité pour estimer la dépense énergétique et non adaptés pour mesurer l’activité physique. Néanmoins, ils sont potentiellement intéressants et utiles dans le cadre d’un système de surveillance.

Principales méthodes de mesure de l’activité physique habituelle et paramètres mesurés

Méthodes/Instruments de mesure
Paramètres mesurés
Calorimétrie indirecte :
Eau doublement marquée
Échanges gazeux

Dépense énergétique totale
VO2
Observation, journal, rappel :
Carnets
Questionnaires

Activité physique (type, intensité, durée, fréquence)
Dépense énergétique liée à l’activité (calculée)
Actimétrie :
Podomètre
Accéléromètre

Nombre de pas, distance parcourue (estimée)
Activité et intensité sous forme d’accélération exprimée en « coups/min » en fonction du temps
Dépense énergétique liée à l’activité (calculée)
Fréquence cardiaque :
Cardiofréquencemètre

Activité et intensité sous forme de battements/min
VO2 ou dépense énergétique liée à l’activité (calculée)
La multiplicité et la diversité des méthodes et instruments reflètent l’intérêt mais également la complexité de la mesure des activités physiques. Cette mesure est rendue difficile par la variété des activités et par les conditions de pratique. Les diverses méthodes de mesure utilisent généralement des composants différents de l’activité physique et ne sont donc pas toujours comparables. La combinaison de méthodes offre la possibilité de recueillir une quantité accrue d’informations et d’augmenter la précision de ces informations. L’applicabilité d’un instrument de mesure peut s’apprécier au travers de 5 critères : le coût financier ou le coût en temps pour l’investigateur et le sujet, l’acceptabilité, le caractère intrusif ou la capacité à modifier l’activité du sujet, la fiabilité et la validité. Toutefois, le choix d’une méthode dépend avant tout du contexte et de l’objectif de la mesure.
Par ailleurs, on assiste à l’apparition des méthodes de mesure de comportement sédentaire et des mesures indirectes de l’activité physique fondées sur les environnements favorables à l’activité physique et leur fréquentation (installations et équipements sportifs, parcs, pistes de marche ou cyclables), ainsi que sur la perception de ces environnements par le sujet.

Les études épidémiologiques montrent que l’activité physique régulière diminue la mortalité

L’activité physique ou sportive est considérée comme un facteur a priori favorable à la santé. Les effets bénéfiques sur la santé des activités physiques et sportives sont connus depuis l’Antiquité. Au XIXe siècle, les premiers travaux scientifiques, réalisés en 1843 à Londres, montraient que les taux de mortalité de personnes sédentaires étaient plus élevés que ceux de travailleurs physiquement actifs. Au début des années 1950, des auteurs comparant 30 000 chauffeurs de bus (supposés peu actifs physiquement) à 20 000 contrôleurs (supposés actifs) trouvaient que ces derniers étaient moins exposés à la survenue d’infarctus du myocarde. Dès la fin des années 1980, un nombre conséquent de travaux semblent conforter la relation entre activité physique et réduction de la mortalité prématurée (toutes causes confondues).
Les études en population générale, publiées ces dernières années et portant sur au moins 5 000 personnes et suivies pendant au moins 5 ans dans différents pays (États-Unis, Canada, Grande-Bretagne, Danemark, Finlande, Japon, Hong Kong...) montrent de façon concordante un risque relatif de décès moindre chez les personnes physiquement actives par rapport aux personnes inactives. Ce résultat est retrouvé quel que soit l’âge et quelle que soit la cause du décès. Il apparaît plus probant pour les hommes que pour les femmes. Une réduction de la mortalité générale comprise entre 2 % et 58 % est observée selon le type et le niveau d’activité considérée et selon les études. Il faut souligner combien il est difficile d’isoler l’effet spécifique de l’activité physique tant cette activité est associée à une hygiène de vie plus globale et par ailleurs la mortalité est un indicateur qui dépasse la seule activité physique car il intègre de nombreux facteurs (socioéconomiques, santé mentale...).
Les travaux qui ont évalué des niveaux d’activité physique montrent une relation inverse dose-réponse entre l’activité physique et la mortalité. Ces études ont souvent distingué trois groupes de personnes selon l’intensité de leur activité : peu actifs ; modérément actifs ; très actifs. L’activité physique n’étant pas quantifiée de façon précise au niveau de son intensité, sa fréquence et sa durée, il est difficile de définir un seuil utile à atteindre pour infléchir la mortalité. Cependant, il a été observé qu’une dépense énergétique de 1 000 kcal à 1 700 kcal par semaine serait associée à une réduction significative de la mortalité.
Une étude prospective publiée fin 2007 et portant sur 250 000 personnes, a tenu compte de très nombreux facteurs d’ajustement. Elle montre qu’une pratique à un niveau voisin de celui des recommandations pour l’activité d’intensité modérée (au moins 3 heures par semaine) ou pour l’activité d’intensité élevée (au moins 20 minutes 3 fois par semaine) entraîne une réduction du risque de mortalité de l’ordre de 30 %.
Quelques auteurs se sont attachés à analyser les effets des changements de pratique sur la mortalité toutes causes confondues. Leurs études montrent que les sujets devenus actifs ou qui ont augmenté l’intensité de leur pratique ont un taux de mortalité inférieur à celui de ceux qui sont restés inactifs ou qui n’ont pas modifié l’intensité de leur pratique. Enfin, l’une des études suggère que les activités passées ne sont pas, à elles seules, protectrices et que le bénéfice est perdu par la cessation d’activité physique.
La mortalité cardiovasculaire étant la plus élevée, beaucoup de travaux se sont intéressés à sa relation avec l’activité physique. La plupart des études suggèrent une relation inverse entre l’activité physique et le taux de mortalité prématurée par maladie cardiovasculaire en particulier par maladie coronarienne. Chez les sujets présentant des risques de maladie cardiovasculaire et physiquement actifs, la mortalité cardiovasculaire apparaît moindre que chez ceux qui ne sont pas actifs, il en est de même pour les personnes diabétiques. Le risque de décès par cancer est également diminué chez les personnes actives (activité modérée ou intense) par rapport aux non actifs.
Il reste à préciser, pour les personnes en bonne santé comme pour celles présentant des facteurs de risques, le niveau et le type d’activité physique pour obtenir un bénéfice optimal en terme de réduction de mortalité et d’allongement de l’espérance de vie.

La pratique régulière d’activités physiques d’intensité modérée contribue au bien-être et à la qualité de vie

L’OMS définit la santé comme « pleine jouissance du bien-être social, mental et physique ». Le bien-être est une notion complexe, plurifactorielle, mal définie, qui ne se réduit pas au simple fait de se sentir bien. Cet état psychologique est constamment en évolution et en construction tout au long de notre vie, il est la résultante de quatre dimensions :
• le bien-être émotionnel (trait et état d’anxiété, stress, tension, état et trait de dépression, angoisse, confusion, énergie, vigueur, fatigue, émotions, optimisme...) ;
• les perceptions de soi (compétences, estime globale de soi, image du corps, perception de sa condition physique, perception de maîtrise de soi, attribution causale des succès et des échecs...) ;
• le bien-être physique (douleur, perception des troubles somatiques, état de santé...) ;
• le bien-être perçu (qualité de vie, bien-être subjectif, sens à sa vie...).
Le bien-être est mesuré à partir d’échelles qui rendent compte globalement de ces quatre dimensions ou plus spécifiquement de certains facteurs : anxiété, estime de soi, dépression, sentiment de maîtrise...
L’activité physique régulière et d’intensité modérée a un effet bénéfique sur le bien-être (sentiment de compétence, image de soi, faible anxiété) des personnes âgées entre 55 et 75 ans sans pathologie. Les études montrent en particulier qu’une pratique physique ou sportive augmente faiblement mais significativement le niveau d’estime de soi. Cette augmentation est plus nettement mise en évidence au niveau des populations présentant au départ une mauvaise estime d’eux-mêmes.
Un large consensus existe sur le rôle bénéfique de l’activité physique chez les adolescents en pleine période de bouleversement pubertaire corporel et psychique. Les répercussions positives se situent en particulier au niveau du stress, du bien-être, de l’image de soi, du fonctionnement social... Là également, les effets de l’activité physique sur l’estime de soi sont plus importants chez les adolescents qui souffrent d’une faible estime d’eux-mêmes.
Chez les personnes déficientes mentales, les travaux de recherche indiquent que la participation aux activités physiques est un facteur de développement du bien-être. Cependant, des suivis longitudinaux sur plusieurs années d’adolescent(e)s présentant des troubles du comportement ou déficients intellectuels légers pratiquant des sports collectifs relativisent l’importance des répercussions. Les effets sur l’estime de soi semblent plus probants sur les sujets déficients intellectuels moyens placés en établissement spécialisé et présentant à la base, une faible estime de soi. L’implication dans les activités sportives « adaptées » semble intéressante pour la motivation, la socialisation, le plaisir partagé et le regard positif des pairs et des parents. Cependant, la pédagogie doit être adaptée et la participation aux compétitions accompagnée psychologiquement.
Les recherches contrôlées sur d’autres populations spécifiques (malades chroniques) restent insuffisantes et trop diverses pour affirmer autre chose que des bénéfices potentiels sont attendus et que les programmes de rééducation par l’activité physique doivent être développés.
Les travaux récents considèrent que l’activité physique agit principalement et plus significativement sur la valeur physique perçue et ses composantes (compétence sportive, force, condition physique, apparence physique). L’estime globale de soi qui dépend de beaucoup d’autres facteurs (sociaux, familiaux, professionnels) sera influencée par le soi physique en fonction de l’importance de la « corporéité » dans la vie des sujets et des facteurs environnementaux (pairs, parents, enseignants), d’où son extrême variabilité dans le temps.
La notion de qualité de vie est aujourd’hui définie par l’OMS comme « la perception qu’un individu a de sa place dans la vie, dans le contexte de la culture, et du système de valeurs dans lequel il vit, en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes ».
Aujourd’hui, la qualité de vie liée à la santé (Health Related Quality of Life) est celle qui est le plus usitée dans le domaine de l’activité physique et la santé. Elle correspond à la satisfaction du sujet par rapport à sa vie quotidienne (autonomie, symptômes physiques, état psychologique, sexualité, image de soi, relations sociales, problèmes matériels, loisir).
La qualité de vie liée à la santé s’évalue par entretien, par questionnaire (auto ou hétéro passation) ou par des échelles de sensations subjectives. Les questionnaires génériques sont utilisés afin de comparer des niveaux entre populations ou les bénéfices d’une intervention (activité physique, médicament, chirurgie...). Des questionnaires spécifiques sont développés pour les populations atteintes de pathologies.
Chez les malades chroniques, les personnes en situation de handicap et les personnes âgées, les bénéfices de l’exercice (ou d’une phase de rééducation/réadaptation incluant le réentraînement à l’effort) sur la qualité de vie globale sont largement démontrés.
Dans la population des sujets âgés de 18 à 64 ans sans trouble de santé, les participants aux activités de loisir ont un score de qualité de vie significativement plus élevé que les non actifs. Il existe une corrélation significative entre la participation aux activités physiques de loisir et la satisfaction de vie en particulier au niveau de la population féminine et des adolescents. La pratique des activités physiques de loisir en famille augmente le sentiment de bien-être et d’une bonne qualité de vie des parents et des enfants.
La pratique régulière d’activités physiques d’intensité modérée contribue au bien-être subjectif et à la qualité de vie globale en agissant sur les facteurs qui interviennent dans les différentes dimensions intégrées (expériences affectives positives par l’intégration au groupe ou regard positif de l’autre, baisse du niveau de stress, satisfaction par rapport au corps, satisfaction par la participation active à la vie sociale). Ces répercussions psychiques sont constatées aussi bien au niveau de populations pathologiques que non pathologiques.

Les études confirment que l’activité physique conditionne la fonction musculaire

Le muscle squelettique est le seul organe qui assure le travail biomécanique de la locomotion. Il est capable de transformer l’énergie biochimique contenue dans les substrats énergétiques en énergie mécanique. Chez l’homme, le niveau d’activité physique influence la masse musculaire totale, ses propriétés métaboliques et contractiles et son évolution en fonction des différentes étapes de la vie. Le maintien d’une fonction musculaire normale est indispensable à la vie de relation et à l’autonomie fonctionnelle. Par ailleurs, le muscle est la « plaque tournante » du métabolisme, dans la mesure où le volume et l’activité musculaires jouent un rôle dans la prévention des maladies métaboliques. Il s’adapte sous l’effet de l’entraînement physique à travers des modifications de la typologie musculaire, du volume musculaire, du nombre et de la compartimentation des mitochondries ainsi que des propriétés des enzymes clés du métabolisme énergétique. Le déterminisme de la masse musculaire résulte d’un équilibre entre les processus de synthèse et de dégradation qui agissent selon des voies indépendantes.
Les médiateurs de la croissance musculaire en réponse à l’exercice sont :
• les contraintes mécaniques ;
• les facteurs métaboliques ;
• les facteurs nerveux ;
• les hormones ;
• le type de nutrition.
Les contraintes mécaniques s’exercent au niveau des structures membranaires. Elles peuvent être passives en réponse à l’étirement du muscle ou actives liées au raccourcissement lors de la contraction. Elles sont relayées au niveau de la membrane par les intégrines, des molécules d’adhésions. Ces protéines agissent sur des facteurs de transduction, les Mitogen Activated Protein Kinase (MAPK), qui activent des facteurs de transcription régulant l’expression du génome. D’autres capteurs de tension sont situés à l’intérieur de la machine contractile comme la titine, une protéine du cytosquelette. Ils ont pour but d’intégrer les contraintes mécaniques subies par les protéines contractiles. Sur un plan pratique, la connaissance des facteurs mécaniques permet d’adapter la prescription d’une activité physique dont le but est de favoriser le développement musculaire. Dans cette perspective, il faut proposer des activités qui imposent un niveau de contraintes mécaniques suffisant et acceptable par le sujet.
Les facteurs métaboliques peuvent également stimuler la croissance musculaire. Le débit d’énergie de la contraction musculaire aboutit à une diminution de la charge énergétique intramusculaire. Il en résulte une augmentation du rapport AMP/ATP. L’activation d’un système enzymatique l’Adenine Mono Phosphate Kinase (AMPK) est considérée comme le capteur du statut énergétique de la cellule. Ce système agit en augmentant les synthèses protéiques musculaires. L’autre facteur métabolique qui agit sur le développement musculaire est influencé par le niveau de l’oxygénation musculaire ; il s’agit de l’Hypoxic Inductible Factor (HIF) qui favorise la biogenèse des mitochondries. La connaissance du rôle exact de ces facteurs métaboliques montre que l’adaptation du muscle à l’entraînement physique est obtenue au prix d’une contrainte métabolique importante.
La commande nerveuse de la motricité agit initialement sur l’entrée de calcium dans la cellule musculaire. La modulation des flux de calcium active des phosphatases, les calcineurines, qui en fin de chaîne activent le facteur de transcription nucléaire NFAT (Nuclear Factor of Activated T cells). Un élément important de la transmission du message nerveux via la calcineurine est représenté par les myogénines, protéines qui régulent l’expression génique des protéines musculaires. Cette cascade d’événements agit sur la différenciation métabolique et structurale des muscles. L’augmentation de la synthèse des chaînes de la myosine de type lent et la biogenèse mitochondriale en réponse à l’entraînement physique sont dans une grande partie dépendantes de l’activation des voies de signalisation calcique.
De nombreuses hormones jouent un rôle sur le développement musculaire. De façon schématique, on peut distinguer les axes hormonaux impliqués dans le développement de la masse musculaire et les hormones qui agissent sur la différenciation du tissu musculaire. L’augmentation de la masse musculaire résulte de l’action coordonnée des hormones stéroïdiennes (principalement la testostérone), de l’hormone de croissance (GH) et de l’insuline. Le rôle des stéroïdes sur le développement musculaire s’exerce à toutes les étapes de la vie. L’influence de ces hormones est particulièrement marquée lors de la puberté chez le garçon. La baisse physiologique de l’ensemble des stéroïdes au cours du vieillissement dans les deux sexes serait aussi associée à une réduction de la masse musculaire et à une augmentation concomitante de la masse grasse. La réponse de l’axe somatotrope est importante sous l’effet de l’exercice musculaire et de l’entraînement. La production de l’Insulin Growth Factor I (IGF­I) est stimulée lors de l’exercice physique et joue un rôle sur la réponse de l’anabolisme musculaire. L’IGF-I joue un rôle particulier dans la prolifération des cellules musculaires des sujets âgés soumis à un entraînement physique. La réponse hormonale pour un même niveau d’entraînement physique est influencée par l’âge, le statut nutritionnel et le niveau de récupération par rapport aux exercices précédents. Tous ces éléments doivent être pris en compte si l’objectif de l’entraînement est d’améliorer la fonction musculaire.
Il est actuellement bien démontré que la croissance musculaire d’un organisme dépend à la fois de l’apport protéique et de l’apport calorique total. L’existence d’un seuil au-dessous duquel la croissance musculaire s’arrête puis devient négative a permis de définir des minima d’apport. Ce minimum d’apport protéique est actuellement estimé à 0,80 g.kg-1 de poids corporel par jour pour l’homme adulte. Ce besoin est augmenté par l’entraînement physique et il est supérieur pour les entraînements en endurance comparés aux entraînements en force, mais il ne doit pas dépasser 2 g.kg-1 par jour.
Il a été suggéré que l’augmentation du niveau d’activité physique pouvait augmenter le stress oxydatif au niveau des muscles. Cette hypothèse repose sur les relations existant entre l’augmentation du métabolisme oxydatif et la génération de radicaux libres. Ces derniers sont susceptibles de favoriser des lésions musculaires ou vasculaires. Leur action a été évoquée dans le mécanisme des douleurs musculaires résultant d’une activité physique intense et prolongée. Le rôle exact du stress oxydatif fait l’objet d’un débat entretenu par les difficultés méthodologiques pour sa mesure. Il semble cependant bien établi que l’entraînement physique augmente considérablement les défenses antioxydantes. Des travaux récents montrent que l’entraînement en endurance augmente la capacité antioxydante de façon telle que la supplémentation nutritionnelle en composés antioxydants est inutile voire dangereuse chez ces sujets. Au total, un entraînement physique bien conduit est un moyen efficace de lutte contre le stress oxydatif.
De nombreuses études réalisées chez l’Homme et l’animal ont permis de montrer que la contraction musculaire stimulait le transport de glucose musculaire indépendamment de l’insuline. Ces effets s’expliquent par l’existence de deux types de transporteurs de glucose musculaire (GLUT-4) : l’un est stimulé par l’insuline et l’autre par la contraction musculaire. Sous l’action de l’insuline, ces transporteurs de glucose stockés sous forme de vésicules intra-cellulaires vont être activés et les vésicules de GLUT-4 vont migrer vers la membrane cellulaire. L’exercice stimule le transport du glucose par une voie indépendante de l’insuline qui implique une protéine kinase dépendante de l’AMP (AMPK). Lors de l’exercice, la consommation d’ATP active l’AMPK qui induit la translocation, vers la membrane plasmique, d’un lot spécifique de transporteurs GLUT-4 indépendants de l’insuline. La translocation favorise l’entrée du glucose dans la cellule musculaire.
Par ailleurs, la période post-exercice est caractérisée par une augmentation de la sensibilité musculaire à l’insuline. Ceci entraîne une augmentation de la captation du glucose qui dure plusieurs heures après l’arrêt d’une simple séance d’exercice chez le sujet sain comme chez le diabétique de type 2. Ce phénomène est localisé aux seuls muscles mobilisés pendant l’exercice et dépend en partie de l’importance de la déplétion en glycogène. L’augmentation de la sensibilité musculaire à l’insuline dure en moyenne 48 h chez les sujets ayant une alimentation normale. Elle est associée à un accroissement du nombre de vésicules de GLUT-4 présentes à la surface la membrane cellulaire. La prise d’une ration riche en glucides en post-exercice, qui induit une surcompensation en glycogène, prévient l’augmentation de la réponse à l’insuline. À l’inverse, celle-ci persiste plusieurs jours si la surcompensation en glycogène est prévenue par une alimentation pauvre en glucides.
Il est bien établi que l’entraînement en endurance augmente la sensibilité à l’insuline chez le sujet sain ou insulino-résistant, normoglycémique ou diabétique de type 2. Ces données ont été obtenues en comparant des sujets sédentaires à des sujets entraînés en endurance ou lors d’études d’intervention dans lesquelles des sujets sédentaires ont été soumis à un entraînement. Ainsi, la captation du glucose chez les mêmes sujets avant et après 6 semaines d’entraînement en endurance est augmentée de 30 % à 40 %. Cet effet s’observe 48 à 72 h après l’arrêt de l’exercice, ce qui permet d’exclure un effet persistant du dernier exercice réalisé.
L’entraînement exerce de multiples effets. Il provoque une augmentation de la signalisation post récepteur de l’insuline, de GLUT-4 et du transport du glucose, de l’activité de la glycogène synthétase et de l’hexokinase (glycolyse), ce qui accroît la capacité oxydative du muscle, enfin une augmentation de la quantité de glucose et d’insuline délivrée au muscle (augmentation de la densité capillaire) ; il diminue la libération et augmente la clairance des acides gras libres (AGL) ; il modifie la composition musculaire (augmentation de la proportion de fibres oxydatives de type I).
La connaissance des différents mécanismes permet d’adapter l’entraînement physique dans le but d’optimiser le volume et la fonction musculaires. L’entraînement en musculation impose de fortes contraintes mécaniques, augmente avec efficacité la masse musculaire. Il est particulièrement utile pour prévenir la perte physiologique de la masse musculaire due au vieillissement. L’entraînement en endurance impose des contraintes métaboliques ; il est utile dans le cadre de la prévention des maladies cardiovasculaires et métaboliques car l’adaptation musculaire agit sur les mécanismes qui favorisent l’apparition de ces affections. Un entraînement physique adapté peut être proposé dans la prise en charge thérapeutique de certaines myopathies. La prescription de l’activité physique doit être adaptée à chaque type de myopathie en fonction de sa physiopathologie et de son degré d’évolutivité. Elle pourra combiner une part d’activité en endurance ou en musculation. Dans le cadre des myopathies mitochondriales pour lesquelles l’atteinte concerne essentiellement la fonction métabolique du muscle, il a été mis en évidence une amélioration des capacités fonctionnelles sous l’effet de plans d’entraînement mixtes avec entraînement en endurance et en force. Dans le cadre général des dystrophies musculaires où l’atteinte concerne les structures du muscle, les entraînements en force semblent efficaces sur la prévention de la diminution de la force musculaire. Dans ce cas précis, une action bénéfique de l’entraînement physique sur la capacité des muscles respiratoires a été bien mise en évidence. L’entraînement physique des sujets porteurs de myopathies doit être rigoureusement suivi par l’évolution des marqueurs biologiques de lésions musculaires.

L’activité physique contribue à l’acquisition et au maintien du capital osseux mais pas dans n’importe quelles conditions

Le squelette est constitué de pièces osseuses articulées qui, sous l’action des muscles, permettent à l’être humain de se déplacer. Cette fonction soumet le squelette à des contraintes mécaniques qui s’intensifient avec la croissance, du fait de l’augmentation des dimensions corporelles et de la masse musculaire. Au cours du développement, la taille et la morphologie des pièces osseuses évoluent afin de s’adapter aux contraintes mécaniques.
La petite enfance est caractérisée par une accrétion osseuse rapide du fait d’une croissance staturale importante. Le deuxième pic d’accrétion osseuse a lieu lors de la puberté. À peu près un quart de la masse osseuse adulte est acquis durant les deux années qui encadrent le second pic d’accrétion osseuse au moment où le taux de minéralisation osseuse est le plus important. Le pic de minéralisation osseuse intervient 6 mois à 18 mois après le pic de croissance staturale. Ce décalage est à l’origine d’une période de relative fragilité du squelette, vers 12­14 ans chez les garçons et 10,5-11,5 ans chez les filles. À cette période, on observe une incidence plus élevée des fractures.
Lors de la fusion des cartilages de conjugaison, la densité minérale osseuse atteint 90 à 95 % de sa valeur maximale. L’âge du pic de masse osseuse intervient entre 20 et 30 ans et varie en fonction du sexe et du site considéré.
L’augmentation du contenu minéral osseux au cours de la croissance est davantage le résultat d’une augmentation des dimensions des pièces osseuses que d’une augmentation de la densité minérale osseuse volumique.
La formation du tissu osseux est régulée par des facteurs mécaniques, hormonaux et énergétiques. Avant la puberté, la croissance est surtout régulée par l’hormone de croissance et l’IGF-I (Insulin-like Growth Factor-I) alors que pendant et après la puberté, ce sont les stéroïdes sexuels qui exercent une influence prédominante. Les œstrogènes (dans les deux sexes), associés à l’hormone de croissance et l’IGF-I, initient les trois ou quatre années de forte croissance osseuse pendant lesquelles le squelette double sa masse. D’autres hormones (parathormone, calcitriol ou 1,25-dihydroxyvitamine D, vitamine D, calcitonine, hormones thyroïdiennes) sont impliquées dans la régulation du métabolisme osseux.
L’apport énergétique total ainsi que les apports protéiques et calciques sont des régulateurs-clés du développement musculo-squelettique, plus précisément dans le cas de carences. Les enfants et adolescents dont les apports calciques sont insuffisants risquent d’atteindre un pic de masse osseuse plus faible. En France, les apports calciques recommandés pour des personnes de 10 à 18 ans s’élèvent à 1 200 mg/j. Au-delà d’une valeur oscillant entre 800 et 1 200 mg/j, toute augmentation supplémentaire de la consommation calcique ne semble pas avoir d’effet sur le tissu osseux.
L’activité physique, par les contraintes mécaniques qu’elle exerce sur le squelette, induit la formation du tissu osseux. Ce phénomène est maintenant bien établi depuis les années 1970.
Durant la croissance, l’activité physique joue un rôle important dans l’acquisition du capital osseux. La période d’intervention optimale correspond à celle où survient le pic de vélocité d’accrétion calcique osseuse, c’est-à-dire entre 11 et 14 ans chez la fille, 13 et 17 ans chez le garçon (en fait, cette période correspond à l’activation hormonale de la puberté).
Plus la pratique est précoce, plus l’influence sur le capital osseux est importante. L’activité physique exerce un effet ostéogénique d’autant plus fort que les contraintes mécaniques varient et s’éloignent des contraintes habituelles de la marche ou de la course. Cet effet est particulièrement observé chez l’enfant pré-pubère et plus en début qu’en fin de puberté. La véritable prévention de la perte osseuse se joue donc pendant la croissance.
La pratique physique agit à la fois sur la masse osseuse, sa densité et sur la texture (macro- et micro-architectures). On observe également des bénéfices sur les propriétés mécaniques de l’os (augmentation de la résistance à la fracture). Une pratique sportive multi-activités semble correspondre au meilleur bénéfice attendu durant la croissance.
Les activités physiques et sportives caractérisées par des impacts ou des contraintes (Peak Strain score) sont plus efficaces que des pratiques qualifiées de véloces (augmentation de la densité minérale osseuse de 20 à 33 % selon les sites osseux chez des gymnastes comparées à des nageuses et des témoins). La natation qui se pratique dans un environnement hypogravitaire, ne semble pas avoir d’effet, ce qui est conforme aux résultats observés chez les spationautes. Les pratiques douces (scolaires ou récréatives), bien que moins efficaces, permettent tout de même d’obtenir des résultats significatifs.
Lorsque la pratique physique débute après que le pic de masse osseuse soit atteint (entre 20 et 25 ans environ), si elle ne conduit pas à un gain osseux elle contribue néanmoins au ralentissement de la perte osseuse. Pour certains auteurs, le capital osseux acquis durant l’enfance se maintient à l’âge adulte, seulement s’il y a continuité de l’entraînement. Pour d’autres, le bilan adulte reste lié aux caractéristiques de la pratique effectuée durant l’enfance (type, âge de début de pratique, fréquence, intensité...). Certaines études montrent que chez les sportives de haut niveau, la densité minérale osseuse reste élevée même après un arrêt complet de l’entraînement (suivi de 12 années chez des gymnastes).
Cependant, une pratique intensive peut entraîner des risques de traumatismes ostéoarticulaires voire des dérèglements hormonaux, surtout lorsqu’elle est associée à un déficit de la balance énergétique chez la jeune fille (généralement activités à dominante esthétique).
Il a été montré une relation entre la densité minérale osseuse et le risque de fracture. Par exemple, chez l’enfant prépubère une densité minérale osseuse dans le tercile inférieur augmente le risque de fracture. La pratique physique, en améliorant la densité minérale osseuse, contribue à la prévention des fractures.
L’activité physique agit en association avec d’autres facteurs au niveau de la constitution du capital osseux. Une potentialisation est observée avec des apports nutritionnels suffisants, particulièrement une supplémentation en calcium et/ou protéines.

En protégeant les vaisseaux, l’activité physique contribue à la prévention des maladies cardiovasculaires

Beaucoup de maladies cardiovasculaires ont pour origine l’altération des fonctions de la paroi des vaisseaux.
L’endothélium est la monocouche de cellules tapissant la surface interne (intima) de tous les vaisseaux. Longtemps considéré comme une simple « enveloppe » impliquée dans les processus d’hémostase, l’endothélium s’avère être une glande endocrine et aussi un intégrateur des processus tissulaires sous-jacents. Ainsi, le monoxyde d’azote (NO) est un messager radicalaire produit en permanence par l’endothélium et qui remplit localement de nombreuses fonctions dont les mieux reconnues sont la relaxation des cellules musculaires lisses sous-jacentes et l’inhibition de l’agrégation plaquettaire. L’endothélium produit d’autres substances à action vasodilatatrice (comme la prostacycline) ou vasoconstrictrice (comme l’endothéline, mais dont l’expression est réprimée dans des conditions physiologiques). L’endothélium est influencé en permanence par l’écoulement du sang (flux-dépendance) et par la présence de médiateurs neurohormonaux. Ainsi, l’augmentation du débit sanguin provoque un frottement plus élevé du sang sur l’endothélium (cisaillement endothélial) et très vite une hausse de la production de NO à l’origine d’une vasodilatation flux- et endothélium-dépendante (du fait de la relaxation par le NO des cellules musculaires lisses vasculaires sous-jacentes).
L’endothélium peut exprimer des molécules dites d’adhérence qui, comme leur nom l’indique, favorisent le recrutement et le passage de leucocytes circulants dans l’intima. Il joue un rôle déterminant au cours des processus inflammatoires et contrôle, en outre, pour une large part, le passage inter- et transcellulaire des nombreux nutriments et hormones circulantes.
Enfin, l’endothélium intervient dans la coagulation sanguine en empêchant l’exposition du sous-endothélium, thrombogène, aux facteurs circulants de la coagulation ainsi qu’en synthétisant un certain nombre de facteurs anti- ou procoagulants.
Il est admis depuis plusieurs années que l’entraînement physique est associé à une augmentation du calibre vasculaire.
Par exemple, des données autopsiques et des études angiographiques indiquent la présence d’artères coronaires ayant un diamètre élargi chez les athlètes. Ces modifications vasculaires structurales (augmentation du diamètre luminal) pourraient ainsi constituer une réponse adaptative permettant de limiter le cisaillement endothélial au cours des exercices musculaires répétés. Cependant, les effets favorables de la pratique d’une activité physique en endurance sur la fonction endothéliale peuvent être dans certains cas limités. Ainsi, une étude récente indique que la pratique d’une activité physique de façon trop régulière et trop intensive est susceptible de diminuer la réponse vasculaire au NO du fait d’un remodelage de la paroi vasculaire et/ou d’une désensibilisation du muscle lisse vasculaire au NO, ou encore d’une production accrue de radicaux libres oxygénés.
Avec l’avancée en âge, en présence ou non d’une hypertension artérielle, il existe une altération de la fonction endothéliale via une altération de la voie du NO et une production de radicaux libres qui compromettent secondairement la disponibilité en NO, ainsi qu’un état inflammatoire chronique de bas grade qui modifie également la biodisponibilité de NO. Cette anomalie prédomine au niveau des artères plutôt que des artérioles, et contribue à favoriser le développement de l’athérome. L’entraînement en endurance atténue la diminution de la réponse vasodilatatrice musculaire qui évolue avec l’avancée en âge. On sait désormais qu’il est possible de limiter ces modifications par la pratique d’une activité physique.
La majorité des études réalisées chez des sujets porteurs de pathologies caractérisées par une altération de la vasodilatation NO-dépendante (hypertension, hypercholestérolémie, diabète...) ont démontré une amélioration de cette fonction dans les gros vaisseaux et les vaisseaux résistifs par l’exercice physique, tandis qu’une telle amélioration chez des sujets sains est moins souvent observée.
Tenant compte des liens physiopathologiques et pronostiques forts entre les anomalies fonctionnelles et structurales vasculaires et la survenue d’événements cardiovasculaires, la pratique d’une activité physique régulière apparaît essentielle pour la prise en charge des patients porteurs de ces pathologies. Cependant, des incertitudes demeurent sur, non seulement les mécanismes (par exemple le NO) mis en jeu par l’activité physique, mais également sur la définition de l’intensité et des modalités d’exercice optimales.

L’activité physique entraîne des effets variables sur le système immunitaire

De nombreuses études se sont attachées à comprendre la relation entre infection, paramètres immunitaires et intensité de l’exercice physique. La pratique d’un exercice physique modéré peut représenter un moyen de prévention contre certaines maladies dans lesquelles le système immunitaire est impliqué. Des phénomènes de leucocytose survenant au cours de l’exercice puis de lymphopénie post-exercice sont largement décrits dans la littérature, ils constituent la réponse biphasique à l’exercice intense. Le retour aux valeurs basales des cellules immunocompétentes est obtenu plusieurs heures après la fin d’un exercice très intense. Il est établi que le cortisol et les catécholamines sont des médiateurs importants de ces réponses. C’est ainsi que l’injection de noradrénaline est capable de mimer l’exercice, avec une rapide diminution du nombre des lymphocytes et une augmentation permanente de celui des neutrophiles 2 h après injection. L’exercice aigu est à l’origine de changements dans le nombre et la distribution relative des sous-types lymphocytaires. Ces changements sont généralement transitoires.
Des approches longitudinales et croisées ont été réalisées pour l’étude de la réponse immunitaire pendant l’entraînement physique, chez l’athlète. Dans les études croisées, les paramètres immunitaires (incidence des maladies, numération et fonction lymphocytaire T) sont comparés entre athlètes et sujets sédentaires, ou bien par rapport à des valeurs de référence. Aucune différence n’est apparue entre les groupes de niveau différent d’entraînement. Les études longitudinales ont permis de suivre des paramètres immunitaires dans le temps, pendant la durée de l’entraînement par exemple, et les valeurs sont comparées entre différents types d’entraînement (modéré versus intense, entraînement versus compétition). Les résultats convergents montrent que les relations entre l’entraînement physique et les paramètres immunitaires suivent une courbe en U inversé. Le statut immunitaire s’améliore sous l’effet d’un entraînement modéré puis se dégrade pour des entraînements intenses. L’entraînement intense, même sur de courtes périodes, peut être responsable d’une augmentation de la fréquence des infections respiratoires. Ainsi, l’incidence des infections respiratoires est supérieure à 40 % chez des nageurs de compétition suivis sur 4 semaines d’entraînement intense. La fréquence plutôt que la gravité des infections respiratoires apparaît accrue chez les athlètes comparés aux sédentaires. En revanche, l’entraînement modéré n’accroît pas et peut même réduire les risques d’infections respiratoires. Ces données mettent bien en évidence le fait qu’un entraînement modéré stimule la fonction immunitaire, alors qu’un entraînement intense l’inhibe.
Le vieillissement du système immunitaire est caractérisé par un déclin progressif de la réponse aux antigènes exogènes. Il a été démontré que l’augmentation du niveau d’activité physique de sujets âgés prévient le déclin des fonctions immunitaires. La réponse vaccinale à la vaccination antigrippale est supérieure chez les sujets entraînés âgés. La réponse d’hypersensibilité retardée après la sensibilisation à un nouvel antigène, qui reflète les fonctions de mémorisation des lymphocytes T, est plus forte chez les sujets actifs les plus entraînés. L’ensemble de ces données souligne l’intérêt de maintenir un niveau d’activité élevé pour prévenir les effets néfastes du vieillissement sur les fonctions immunitaires.

L’activité physique contribue au bon fonctionnement du cerveau

L’activité physique régulière apporte une protection remarquable contre les lésions cérébrales dans différentes localisations anatomiques (hippocampe, cortex moteur, pédoncules cérébraux, cervelet). Cette observation a été faite pour différentes étiologies (utilisation de toxiques, ischémie focale ou bien lésions secondaires à une pathologie neurodégénérative innée). L’exercice réduit, voire bloque, l’altération ou la perte neuronale quel que soit le type de lésions provoquées chez l’animal, et favorise la récupération des performances comportementales et/ou motrices. Ces effets s’accompagnent d’une augmentation du BDNF (Brain-Derived Neurotrophic Factor) et de l’IGF-I (Insulin-like Growth Factor-I) dans les zones cérébrales concernées.
Les neurotrophines et plus particulièrement le BDNF et le NGF (Nerve Growth Factor) jouent un rôle critique dans la modulation de la plasticité synaptique du cerveau adulte. Elles sont exprimées dans de nombreuses régions du système nerveux central et périphérique et assurent la survie des neurones du système nerveux. La synthèse et la libération du NGF et du BDNF par les neurones sont sous le contrôle de l’activité neuronale.
La capacité du BDNF à moduler la plasticité synaptique dans le cerveau adulte a été mise en évidence dans de nombreuses études : le BDNF régule le branchement et le remodelage des axones et dendrites, la synaptogenèse dans l’arborisation des terminaisons axonales, l’efficacité de la transmission synaptique et la maturation fonctionnelle de synapses inhibitrices et excitatrices. La délétion ou l’inhibition du gène codant le BDNF induit un déficit dans la LTP (Long Term Potentiation), le corrélat électrophysiologique de l’apprentissage et la mémoire. Ce déficit dans la fonction synaptique peut être amendé par l’application exogène ou la surexpression de BDNF.
La neurogenèse existe tout au long de la vie chez l’animal adulte (souris, rat, oiseaux, primates) et chez l’homme. Exposer des rats adultes à un environnement enrichi ou leur donner un accès volontaire à une roue d’activité augmente la neurogenèse dans l’hippocampe (gyrus dentelé) dont témoigne un accroissement de la performance dans des tâches spécifiques liées à la mémoire spatiale. Les changements au niveau de la neurogenèse s’accompagnent de l’induction/expression de la LTP et d’une augmentation concomitante de l’expression de BDNF. Comme ces observations sont confinées au gyrus dentelé, cela suggère fortement que ces modifications jouent un rôle dans la régulation de la plasticité structurale et fonctionnelle. La preuve en est apportée par la contre expérience : si on bloque l’action du BDNF, on empêche le gain d’apprentissage et de mémoire induit par l’exercice. La traduction fonctionnelle est une baisse des performances cognitives.
L’exercice musculaire augmente la production de BDNF dans d’autres régions que l’hippocampe et, en particulier, dans des régions du cerveau directement impliquées dans l’activité motrice (cortex moteur et striatum), dans la corne antérieure de la moelle épinière, et les muscles squelettiques. Le BDNF joue un rôle dans le développement des connexions fonctionnelles entre le muscle squelettique et la moelle épinière. Ainsi, le BDNF et d’autres neurotrophines produits dans le muscle squelettique pourraient amplifier le potentiel d’innervation des motoneurones et jouer un rôle critique dans la plasticité de la synapse neuromusculaire.
Après lésion médullaire chez le rat, l’ARNm du BDNF et du GNDF (glial cell line) est augmenté de 11 et 14 fois, respectivement, dans le muscle soléaire des animaux soumis à un programme d’entraînement, ce qui suggère que le BDNF et le GDNF produits et libérés par le muscle pourraient être impliqués dans la plasticité spinale.
L’activité physique régulière renforce également l’unité neurovasculaire par au moins deux mécanismes : accroissement de l’angiogenèse et de l’astroglie.
L’action de l’activité physique sur le cerveau concerne également les pathologies dégénératives : vieillissement physiologique et maladie d’Alzheimer.
Le vieillissement s’accompagne de modifications morphologiques de l’hippocampe, structure cérébrale impliquée dans l’apprentissage et la mémoire chez l’Homme. De plus, la neurogenèse hippocampale est diminuée avec l’âge.
En expérimentation animale, il est bien démontré que la capacité à acquérir de nouvelles tâches chez le rat diminue avec l’âge. Chez l’Homme, l’imagerie a mis en évidence une atrophie hippocampale chez le sujet âgé.
Ces conséquences délétères du vieillissement peuvent être prévenues, voire sont réversibles. Les sujets âgés qui ont pratiqué une activité physique régulière tout au long de leur vie ont une perte de tissu cérébral moindre que les sujets sédentaires et ont de meilleures performances cognitives.
Chez des souris âgées soumises à un protocole d’entraînement, il a été mis en évidence une réversibilité de 50 % de la perte neuronale au niveau de l’hippocampe par rapport aux souris contrôles sédentaires du même âge. Ces souris actives présentent également une neurogenèse hippocampale et des capacités d’apprentissage augmentées par rapport aux souris sédentaires. Fait notable, les souris âgées entraînées apprennent plus vite (spatial learning) que les souris jeunes sédentaires.
Dans un modèle de maladie d’Alzheimer (souris TgCRND8), il a été montré que l’activité physique volontaire diminue significativement la charge en plaques de substances amyloïdes β. L’activité physique pourrait représenter une stratégie comportementale simple dans la résistance au développement de la maladie d’Alzheimer. Des études récentes suggèrent en effet que l’activité physique régulière pourrait retarder la survenue et/ou ralentir la progression de la maladie d’Alzheimer.
Le principal médiateur de la neuroprotection associée à l’exercice est l’IGF-I, une hormone qui a un effet neurotrophique très puissant et joue un rôle de médiateur de la plupart des effets de l’exercice musculaire sur le cerveau (stimule l’entrée du calcium, du glucose...). L’exercice musculaire accroît la quantité d’ARNm de l’IGF-I au niveau cérébral et la quantité d’IGF-I. Cet effet est médié par le récepteur de l’IGF-I. L’inhibition de l’activation du récepteur de l’IGF-I avec l’exercice abolit les effets de l’exercice sur la synthèse de BDNF et annule l’augmentation des performances cognitives des rats. L’exercice musculaire prévient et protège le cerveau des lésions en augmentant également la captation de l’IGF-I circulant par le cerveau.
Les mécanismes d’action de l’IGF-I intra-cérébral sont bien démontrés et pourraient potentiellement être mobilisés sous l’effet de l’activité physique. Ils incluent : l’apoptose et des protéines impliquées dans la neurogenèse, l’homéostasie calcique et l’augmentation du métabolisme du glucose par les neurones. L’IGF-I pourrait agir sur l’angiogenèse et la captation d’oxygène par les neurones et intervenir également dans la modulation de l’excitabilité neuronale par l’intermédiaire des canaux ioniques, des récepteurs au glutamate ou de la taille des synapses.

Des facteurs génétiques pourraient conditionner l’effet de l’activité physique

Il existe des différences interindividuelles considérables dans la réponse à l’exercice physique, autant sur le plan de l’endurance cardio-respiratoire que sur le plan de l’amélioration du profil de risque. L’identification des gènes et de leurs mutations impliqués dans la réponse à l’entraînement est fondamentale pour la compréhension du rôle de l’exercice sur la santé des différentes populations et sur le développement du potentiel de performance physique des athlètes.
Le niveau d’hétérogénéité de la réponse de la capacité aérobie à l’entraînement physique sous l’effet des facteurs génétiques dans la population générale a été mis en évidence par une grande étude débutée en 1992 aux États-Unis. Cette étude Heritage (Health Risk Factors Exercise Training and Genetics) tente d’établir des liaisons entre le patrimoine génétique et la performance. Un autre aspect majeur sur le plan de la santé est de vérifier dans quelle mesure le patrimoine génétique peut influencer la réponse positive à l’entraînement.
Le criblage génomique réalisé sur la consommation maximale d’oxygène et la réponse à l’entraînement a permis d’identifier 4 loci reliés à la VO2 max à l’état sédentaire, loci situés sur les chromosomes 4, 8, 11 et 14, et par ailleurs 5 loci reliés à la consommation maximale d’oxygène à l’entraînement situés sur les chromosomes 1, 2, 4, 6 et 11. Au total, 56 polymorphismes au sein de 34 gènes candidats ont été identifiés. Des études d’association et de liaison génétique avec un certain nombre de ces gènes candidats ont été réalisées. Ceci a permis de préciser la contribution du gène ACE (enzyme de conversion de l’angiotensine) à la performance aérobie. Le gène ACE est responsable de la conversion de l’angiotensine I en angiotensine II, un important vasoconstricteur impliqué dans la régulation de la tension artérielle et également dans la croissance tissulaire. La variabilité de l’expression du gène ACE a été proposée comme le facteur majeur de la capacité aérobie. Le gène ACE est exprimé dans plusieurs tissus, dont le muscle squelettique, et peut donc être considéré, en raison de son action sur la croissance tissulaire, comme un gène candidat de la performance. Les porteurs de l’allèle I du polymorphisme ACE I/D seraient avantagés au plan de l’endurance cardio-respiratoire.
D’autres gènes présentent un polymorphisme lié à la performance : gène de la créatine kinase musculaire (CCK) ; gène de l’alpha 3 actinine musculaire (ACTN3) ; gène de l’adénosine monophosphate déaminase (AMPD) ; gène de l’interleukine 6 (IL6).
Les 37 gènes codant les protéines impliquées dans la production d’ATP peuvent être considérés comme des gènes candidats de la performance. Les sujets porteurs de mutations au sein de la sous-unité 5 de la NADH déshydrogénase (MTND5) ont un VO2 max plus élevé que les sujets non porteurs de ces mutations. La créatine kinase musculaire (CKMM) est une enzyme importante pour la production d’ATP dans la cellule musculaire. Les résultats de l’étude Heritage montrent que le polymorphisme de la créatine kinase musculaire rend compte de 9 % de la variance observée dans les changements de VO2 max sous l’effet de l’entraînement.
Un facteur déterminant de la santé est le niveau d’activité physique spontanée. Il a été démontré qu’il existe de fortes variations individuelles de ce paramètre. La comparaison de paires de jumeaux a permis de mettre en évidence une forte héritabilité du niveau d’activité physique spontanée. Cependant, le rôle confondant des facteurs familiaux, culturels et environnementaux a justifié des études complémentaires. Une étude a montré que le patrimoine génétique expliquait aussi bien la participation à des activités physiques de loisir que des activités physiques sportives, cette association semblant plus forte chez les hommes. Un autre facteur important concerne la composition corporelle. Plusieurs gènes sont mis en cause dans la variation de la composition corporelle avec l’entraînement physique. En accord avec la fonction métabolique du système sympathique, il a été montré que des mutations du récepteur β-adrénergique (ADRB3) pouvaient influencer la réponse de la masse grasse à l’exercice physique. Le polymorphisme du gène codant la protéine de couplage UCP3 est également associé au niveau de réponse de la composition corporelle à l’exercice musculaire. Les résultats de l’étude Heritage ont permis de montrer que le polymorphisme du gène de l’IGF-I était associé au gain de masse maigre sous l’effet de l’entraînement.
Dans le domaine des facteurs hormonaux, les effets de l’activité physique sur l’action de l’insuline ont été reliés au polymorphisme du récepteur β-adrénergique ADRB3, et du polymorphisme de l’ACE. Récemment, il a été démontré que le polymorphisme du gène de l’interleukine-6 pouvait influencer l’index de tolérance au glucose.
Sur le plan des risques cardiovasculaires, plusieurs études ont mis en évidence l’association entre les variations du génome, la réponse à l’activité physique des lipides sanguins et des facteurs de l’hémostase. Il existe une interaction entre le niveau d’activité physique, le niveau d’expression du gène codant l’apolipoprotéine E et le profil lipoprotéique.
À propos de la régulation de la pression artérielle, il a été initialement proposé que le polymorphisme du gène de l’ACE pouvait expliquer la variabilité individuelle de la réponse de la pression sanguine à l’entraînement. Cependant, les résultats de publications récentes ne confirment pas cette relation.
Les résultats accumulés à ce jour sur les bases génétiques de la performance permettent de conclure à la présence de ressemblances familiales pour la plupart des indicateurs de performance mesurés sans entraînement préalable et en réponse à l’entraînement physique. Les estimations d’héritabilité varient de 25 à 50 % pour la consommation d’oxygène (mesurée pour un effort maximal ou sous-maximal) et de 40 à 70 % pour les propriétés métaboliques du muscle squelettique.
Les quelques études sur les fondements moléculaires de la performance aérobie ont révélé des associations positives avec certains gènes candidats. L’interaction entre la variabilité de certains gènes et la réponse au niveau d’activité physique est bien démontrée pour la composition corporelle, le métabolisme lipoprotéique, la sensibilité à l’insuline.

L’activité physique est la meilleure prévention des maladies cardiovasculaires et constitue un élément important de leur traitement

Les maladies cardiovasculaires d’origine athéromateuse représentent un problème médico-économique majeur en France. Elles restent en effet la première cause de mortalité et leur incidence est sans cesse croissante.
Plusieurs enquêtes longitudinales permettent d’étudier le lien entre l’activité physique et les pathologies cardiovasculaires d’origine athéromateuse. La majorité de ces études se focalisent sur le lien « à moyen terme » (entre 5 et 10 ans). Elles sont en majorité non européennes et tiennent compte de nombreux facteurs de confusion (sexe, âge, IMC, consommation de substances psychoactives, tension artérielle, cholestérol, diabète, cancer, mode de vie dont le niveau d’éducation, les habitudes alimentaires, les antécédents familiaux et le stress et bien-être). Le facteur « activité physique » s’avère moins explicatif que d’autres facteurs dans la survenue de maladies cardiovasculaires d’origine athéromateuse, comme la consommation de tabac, l’obésité, l’hypertension, le diabète... Cependant, le cumul des facteurs de risque est en soi un facteur de risque cardiovasculaire, surtout chez les hommes jeunes.
L’activité physique est désormais recommandée dans le domaine des maladies cardiovasculaires, à la fois pour prévenir leur survenue et pour en limiter les conséquences lorsqu’elles sont installées. Les principales affections concernées sont la coronaropathie, l’insuffisance cardiaque chronique et l’artériopathie des membres inférieurs, alors que les preuves expérimentales de l’impact de l’activité physique sur les maladies cérébro-vasculaires demeurent insuffisantes.
Même si les mécanismes – notamment moléculaires – sous-tendant l’impact de l’activité physique sur l’évolution de la maladie athéromateuse, sont encore à élucider, il existe des preuves expérimentales de l’efficacité de l’activité physique sur différents facteurs fortement corrélés à ces maladies.
Le diabète de type 2 en est un exemple particulièrement explicite dans la mesure où l’activité physique permet à elle seule de prévenir sa survenue dans près de 60 % des cas chez des sujets présentant une intolérance au glucose. Lorsque le diabète est installé, l’activité physique facilite l’homéostasie glycémique à la fois sur le versant hyper- et hypoglycémique. Elle peut ainsi permettre d’alléger le traitement médicamenteux. Elle retarde l’apparition des complications dégénératives qui font la gravité de la maladie diabétique. La réduction de l’insulino-résistance, l’amélioration du transport et de l’utilisation du glucose musculaire et la diminution de la production hépatique de glucose expliquent, au moins en partie, ces effets. En conséquence, l’activité physique est actuellement considérée comme un objectif prioritaire en politique de santé dans la lutte contre la pandémie représentée par le diabète de type 2.
L’activité physique réduit la pression artérielle chez les patients hypertendus, en moyenne de 11 mmHg pour la pression artérielle systolique et de 8 mmHg pour la pression diastolique. Elle réduit dans les mêmes proportions l’hypertension artérielle d’effort. Elle permet de différer, voire de rendre inutile, le traitement médicamenteux d’une hypertension artérielle de diagnostic récent. Les mécanismes expliquant cet effet sont là encore incomplètement connus. Cependant, une diminution des résistances artérielles périphériques, une réduction de la dysfonction endothéliale et des anomalies neuro-hormonales liées à l’hypertension artérielle, ainsi qu’une augmentation de la sensibilité à l’insuline (impliquée dans la pathogénie de l’hypertension artérielle) ont été démontrées.
Par ailleurs, l’activité physique concourt à l’amélioration du profil lipidique sérique avec une diminution en moyenne de 3,7 % du taux de triglycérides, de 5 % du taux de LDL-cholestérol et une augmentation de 4,6 % du taux de HDL-cholestérol. Elle participe, avec le régime, au contrôle de la surcharge pondérale, avec augmentation de la masse maigre et réduction de l’adiposité abdominale. Elle facilite le sevrage tabagique et permet une réduction du syndrome dépressif, identifié comme un facteur de risque fort et fréquent au cours d’événements cardiovasculaires majeurs et un facteur péjoratif du pronostic. Enfin, l’activité physique améliore l’hypercoagulabilité et l’inflammation, impliquées dans la physiopathologie de l’athérome.
Lorsque la maladie cardiovasculaire est installée, l’activité physique a un impact important sur l’évolution de la maladie. Elle agit sur l’amélioration de l’insulino-résistance, de la dysfonction endothéliale et des anomalies neuro-hormonales.
Un des effets les plus spectaculaires est la réduction de la mortalité de 25 à 35 % chez les patients atteints d’une maladie coronarienne. Une réduction des signes cliniques (tels que l’angor, la dyspnée ou la claudication artérielle) et une augmentation des capacités physiques sont associées. L’activité physique permet donc de prolonger l’espérance de vie dans de meilleures conditions.
Les modalités de l’activité physique recommandée au cours des maladies cardiovasculaires associent des exercices globaux (recrutant des territoires musculaires importants) et des exercices plus analytiques (nombre limité de muscles) développés contre une résistance au mouvement. La question du niveau le plus approprié de l’intensité de ces exercices reste posée. Un niveau minimal est cependant requis afin d’obtenir un impact sur la morbi-mortalité. Il est proche des 50 % des capacités maximales mesurables par un test d’effort de chaque sujet. Il est possible alors de rester à ce niveau d’entraînement, en se limitant à une amélioration des performances aérobies. Si, en revanche, un recrutement partiel du métabolisme anaérobie avec un gain en force musculaire plus important est recherché, le niveau sera plus élevé sans cependant atteindre les capacités maximales pour lesquelles le risque de complication est le plus fort. La durée minimale d’une séance d’exercice doit être de 30 minutes. La fréquence préconisée habituellement est quotidienne, ou au minimum 5 jours par semaine, pour l’entraînement global, et au minimum 2 séances par semaine pour le renforcement musculaire contre résistance. Les types d’exercices possibles sont très variés, adaptables aux goûts, à l’âge et aux aptitudes d’un grand nombre de sujets : marche, course, vélo, natation, gymnastique, activités sportives diverses, utilisation de différents ergomètres ou système de musculation... Les modalités tiendront compte du contexte : activité physique dans le cadre d’une prévention primaire ou secondaire. Dans ce dernier cas, une évaluation médicale préalable sera nécessaire afin de permettre une stratification du risque et une adaptation des exercices notamment au cours de l’insuffisance cardiaque pour laquelle une plus grande progressivité et une surveillance régulière sont nécessaires.
Les risques de l’activité physique au cours des maladies cardiovasculaires sont prioritairement représentés par les complications cardiaques et surviennent essentiellement lorsque les efforts sont intenses et inadaptés aux capacités réelles du sujet. Ainsi, ils sont très réduits lorsque l’entraînement est effectué dans le cadre de programmes supervisés (réadaptation). Il s’agit surtout de complications coronaires thrombotiques survenant sur une plaque d’athérome « instable » (non protégée par une fibrose et qui va donc se fissurer) et à l’origine d’accidents ischémiques myocardiques pouvant être dramatiques. Le caractère instable de la plaque d’athérome n’atteint pas le plus souvent les lésions coronaires les plus sténosantes, qui sont pourtant celles qui sont dépistables actuellement en pratique courante par la méthode d’imagerie de référence qu’est la coronarographie. De même, un test d’effort recherchera une ischémie myocardique d’effort en relation avec une sténose coronaire serrée mais ne pourra pas contribuer à la découverte d’une telle plaque vulnérable. La prudence reste donc de règle et impose d’éviter des efforts violents tout en respectant les contre-indications à l’entraînement physique que sont essentiellement l’angor instable, l’insuffisance cardiaque décompensée, l’hypertension artérielle sévère, les troubles du rythme cardiaque complexes, le rétrécissement valvulaire aortique serré, toute affection inflammatoire ou infectieuse évolutive. Les complications musculo-squelettiques liées à l’exercice au cours des maladies cardiovasculaires sont rares à condition que l’activité physique soit individualisée c’est-à-dire adaptée à l’âge et aux capacités de chaque sujet.

L’activité physique est un traitement à part entière de la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO)

Les relations entre activité physique et maladie respiratoire sont étroites. L’activité physique est l’outil thérapeutique le plus performant dans le traitement de la dyspnée et de la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO), la maladie respiratoire des fumeurs dont la prévalence est galopante (3e rang mondial des maladies mortelles en 2020). Il semble qu’elle puisse également jouer un rôle dans la prévention de cette maladie ou de ses complications. À l’opposé, chez l’athlète, le sport de haut niveau induit une hypoxémie et peut conduire à des asthmes graves chez des sujets non allergiques.
Les études sur l’efficacité de l’activité physique pour prévenir les maladies respiratoires sont rares et la BPCO concentre la quasi-totalité des travaux. Deux études récentes sur un grand nombre de sujets apportent des éléments de preuve convaincants. Dans une première étude, un suivi de 6 790 sujets sur 11 ans a montré que les fumeurs actifs pratiquant une activité physique égale ou supérieure à 2 heures par semaine ont un risque réduit de développer une BPCO comparativement aux fumeurs dont la quantité d’activité physique est inférieure à ce seuil. La même équipe suivant 2 386 patients atteints de BPCO pendant 20 ans, avait précédemment montré, pour cette même quantité d’activité physique, une réduction de 40 % des hospitalisations et de la mortalité d’origine respiratoire.
Le recours à l’activité physique comme outil thérapeutique provient du modèle initial, défini dans les années 1980, du cercle vicieux du déconditionnement ou spirale de la dyspnée. Le malade respiratoire, essoufflé en raison de sa maladie (part respiratoire de la dyspnée) cesse toute activité, ce qui conduit à un « déconditionnement » c’est-à-dire à une perte des fibres et des enzymes de la voie métabolique musculaire oxydative. Tout exercice est alors essentiellement réalisé avec les fibres lactiques. Directement ou indirectement, l’acide lactique formé stimule alors les centres respiratoires ce qui aggrave la dyspnée préexistante (part musculaire de la dyspnée). Le réentraînement à l’effort a donc pour objectif de restaurer la voie oxydative afin d’interrompre ce cercle vicieux. Il diminue la dyspnée des patients en améliorant sa part musculaire, sans modification de la fonction respiratoire globale. Ce modèle, aujourd’hui démontré, est actuellement complété. La BPCO est une maladie inflammatoire à tous les niveaux : respiratoire, sanguin, musculaire... L’activité physique a un effet anti-inflammatoire et anti-oxydant qui participe nécessairement, à côté d’autres phénomènes, à l’amélioration de l’état de ces patients.
Les effets du réentraînement à l’effort chez le patient présentant une BPCO ont fait l’objet de dizaines d’études contrôlées qui depuis 1996 ont été compilées sous forme de méta-analyse ou analysées en termes d’« evidence-based medicine ». Les résultats sont particulièrement remarquables : la dyspnée, la tolérance à l’effort, la qualité de vie et le nombre d’exacerbations sont améliorés au niveau le plus élevé (A) en terme d’« evidence-based medicine ».
Les dernières recommandations sur le réentraînement à l’effort chez le patient atteint de BPCO s’accordent avec la notion de 2 heures d’activité physique par semaine, à pratiquer régulièrement et de façon permanente. Les désaccords portent sur le niveau d’intensité. Les partisans d’une intensité élevée arguent des meilleurs résultats à court terme. Ceux d’une intensité modérée insistent sur la fidélisation des patients obtenue par cette démarche, qui induit des résultats cliniquement pertinents.
Les études sur les autres affections respiratoires sont insuffisantes pour réaliser des méta-analyses. Toutefois, elles montrent des résultats équivalents à ceux obtenus pour la BPCO. Une mention spéciale pour la maladie asthmatique : l’époque où l’on signait des certificats de contre-indication à la pratique sportive est lointaine, c’est même actuellement une faute professionnelle. Comme conséquence, les asthmatiques sont beaucoup moins « déconditionnés » que dans le passé. Dans ces conditions, l’activité physique ne peut pas être une prescription au sens formel du terme dans l’asthme, en revanche elle doit être largement recommandée.
Le sport de haut niveau peut être à l’origine d’une hypoxémie induite par l’exercice (HIE) qui apparaît chez les 2/3 d’athlètes endurants, jeunes, de haut niveau. À partir de 40 ans, elle est quasiment constante et devient systématique chez les simples cyclotouristes de 60 ans. Cette HIE totalement asymptomatique est probablement la conséquence au moins partielle d’altérations à type de sub-œdème du parenchyme pulmonaire. Il ne semble pas y avoir de retentissement à long terme de l’hypoxémie induite par l’exercice. Il n’en est pas de même pour l’asthme du sportif qui apparaît chez les sportifs non allergiques, de haut niveau, matures (environ 25 ans), perturbe leurs performances et qui est difficile à juguler. L’abrasion des voies aériennes par des hyper-ventilations extrêmes et répétées serait à l’origine de cette forme clinique particulière de l’asthme.

La pratique régulière d’une activité physique et sportive permet de limiter le gain de poids et participe à son contrôle

L’activité physique modérée est un facteur important de maintien du poids corporel. Il est essentiel de distinguer d’une part, les effets de l’activité physique en termes de prévention du gain de poids, et, d’autre part, son rôle dans la prise en charge des sujets en excès de poids. Les facteurs en cause dans la prise de poids et le développement de l’obésité sont multiples et intriqués (facteurs biologiques, comportementaux, sociétaux) et l’activité physique est un des éléments pouvant influencer le bilan d’énergie et l’état de santé, en association avec les habitudes alimentaires. De même en matière de traitement de l’obésité, les conseils d’activité physique occupent une place importante dans le cadre général d’une prise en charge globale associant des conseils alimentaires et un soutien psychologique.
Les résultats des études d’observation disponibles actuellement indiquent que l’activité physique peut jouer un rôle d’atténuation du gain de poids au cours du temps chez l’adulte, l’adolescent et l’enfant, sans toutefois permettre de prévenir complètement le phénomène, ni promouvoir une perte de poids au niveau des populations. De façon intéressante, il a été montré, chez l’adulte, que des activités d’intensité modérée de la vie quotidienne, telles qu’aller au travail en marchant ou en vélo, étaient inversement associées au gain de poids après plusieurs années de suivi. Quelques études suggèrent de plus une relation inverse entre le niveau habituel d’activité physique et la localisation abdominale de la graisse. Il est établi que l’accumulation abdominale de graisse est associée au développement de pathologies métaboliques (diabète de type 2) et cardiovasculaires (maladie coronaire).
Le comportement sédentaire est un autre aspect important en relation avec l’obésité. La sédentarité correspond à des comportements passifs tels que regarder un écran, travailler sur ordinateur, lire, téléphoner... L’inactivité physique quant à elle renvoie à un état dans lequel les mouvements corporels sont réduits au minimum. Après prise en compte de l’activité physique et des habitudes alimentaires, certains comportements sédentaires de l’adulte, de l’adolescent ou de l’enfant, tels que le temps passé assis à regarder la télévision, assis au travail ou en conduisant, sont chacun liés au risque d’obésité. De plus, en matière de prévention de la prise de poids chez l’enfant, la lutte contre la sédentarité (réduction, mais pas nécessairement suppression, du temps passé à regarder la télévision et à jouer aux jeux vidéo) est une stratégie dont l’efficacité a été prouvée, complémentaire des actions centrées sur la promotion de l’activité physique.
La recommandation actuelle pour la population générale adulte est de pratiquer une activité physique régulière au moins équivalente à 30 minutes de marche à un bon pas (marche rapide) par jour. Chez l’enfant, il est recommandé de pratiquer au moins 60 minutes d’activité physique d’intensité modérée à élevée par jour. Ces recommandations visent de façon générale une croissance harmonieuse (chez l’enfant) et la prévention des principales pathologies chroniques (chez l’adulte). Elles s’appliquent également à la prévention du gain de poids. Cependant, un volume (durée, intensité) d’activité plus important pourrait être nécessaire dans ce but spécifique. Ceci a conduit à proposer chez l’adulte une augmentation de la durée (par ex. au moins 45 à 60 min d’activité d’intensité modérée par jour) et/ou de l’intensité, ou une diminution des apports énergétiques, pour la prévention du gain de poids.
Les effets bénéfiques de l’activité physique chez les personnes en excès de poids sont multiples. Dans le cadre de la prise en charge des adultes et des enfants obèses, il est essentiel de différencier les effets de l’activité physique sur la perte de poids, d’amplitude modeste, des effets sur le maintien du poids après perte de poids initiale, d’importance majeure, ainsi que les effets bénéfiques d’amélioration des comorbidités de l’obésité.
Le maintien d’une perte de poids après amaigrissement initial, ou une moindre reprise de poids, représente un des intérêts majeurs de l’activité physique en cas d’excès de poids. Le seuil d’activité qui permettrait d’obtenir cet effet est très discuté. Dans cette situation, 60 à 90 minutes d’activité d’intensité modérée par jour, ou une durée plus courte d’activité d’intensité plus élevée, seraient nécessaires chez l’adulte, ce qui représente un volume conséquent d’activité. Il faut surtout noter que l’effet majeur de l’activité physique dans ce domaine n’est pas la perte de poids mais la non reprise de poids. De façon très générale, la perte de poids obtenue en associant un régime et un programme d’activité physique est supérieure à celle résultant du régime seul. Mais la différence entre les deux modalités est faible, de l’ordre de quelques kilos seulement. L’effet de l’activité physique sur la perte de poids reste donc le plus souvent modeste. Une explication en est que la dépense énergétique supplémentaire induite par l’activité physique reste quantitativement limitée. Pour obtenir une perte de poids importante avec l’activité physique seule, il faudrait pratiquer plusieurs heures d’entraînement intensif par jour ! Toutefois, même une activité d’intensité modérée, en endurance, peut augmenter la contribution des lipides à la dépense d’énergie et participer à l’amélioration de la composition corporelle.
Le but recherché est de perdre de la masse grasse corporelle en conservant la masse non grasse (ou masse maigre, dont les muscles sont un des constituants majeurs). Il est connu que la perte de masse maigre sous régime seul est de l’ordre de 25 % du poids perdu. Quand le régime est associé à un programme d’activité physique de type endurance, cette perte de masse maigre est réduite de moitié. Cet effet sur la composition du poids perdu est important à plusieurs titres. D’une part, la masse maigre est le déterminant majeur de la dépense énergétique de repos, c’est-à-dire la dépense de base nécessaire au fonctionnement de l’organisme. Une diminution de masse maigre entraîne une réduction de la dépense énergétique et cette situation peut favoriser la reprise de poids ultérieure. D’autre part, une importante diminution de masse maigre, en particulier la composante musculaire, peut sérieusement altérer les capacités fonctionnelles et donc la mobilité, ce qui est l’inverse du but recherché.
Différentes anomalies liées au syndrome de résistance à l’insuline (hyperglycémie, augmentation des triglycérides et baisse du cholestérol-HDL protecteur, augmentation de la pression artérielle) associées à l’obésité sont améliorées par la pratique régulière d’une activité physique d’intensité modérée. Le point important dans ce domaine est que ces modifications favorables de la sensibilité à l’insuline, de la tolérance au glucose et du profil lipidique sous l’effet d’un entraînement régulier peuvent être observées indépendamment des modifications du poids ou de la masse grasse et en l’absence de modifications majeures de la capacité cardio-respiratoire (VO2 max). De façon intéressante également, les résultats de certaines études épidémiologiques prospectives chez l’adulte suggèrent que les sujets corpulents (« fat ») avec une bonne capacité physique (« fit ») ont un risque de mortalité totale et cardiovasculaire plus faible que les sujets de corpulence normale mais dont la capacité physique est la plus faible.
De façon générale, l’activité physique d’intensité modérée a des effets positifs sur le plan psychologique en améliorant l’humeur, la sensation de bien-être et l’estime de soi. Ces bénéfices psychologiques pourraient être associés à une meilleure adhérence aux conseils diététiques, ce qui demande cependant à être mieux documenté.
La difficulté dans tous les cas est d’inciter des « inactifs et sédentaires » à reprendre goût au mouvement et à devenir au moins modérément actifs, de façon régulière et à long terme dans leur vie quotidienne. Il s’agit d’intégrer l’activité physique dans le registre du bien-être autant que dans celui de l’amélioration de l’état de santé, grâce au côté ludique de l’activité physique en particulier chez l’enfant. L’individualisation des conseils d’activité physique est une notion centrale dans cette prise en charge, la progressivité également. La limitation (et non la suppression) du temps consacré aux occupations sédentaires est une mesure importante. Chez l’enfant, elle a des effets sur le maintien du poids après amaigrissement. Le volume global d’activité physique paraît actuellement plus important que l’intensité. Un premier objectif est d’atteindre les recommandations d’activité physique pour la population générale, puis, d’augmenter la durée et/ou l’intensité en fonction des possibilités individuelles. Chez les enfants, la participation des parents à la prise en charge est essentielle.

L’activité physique réduit le risque de développer un cancer du sein et du côlon

Les cancers pour lesquels un effet préventif de l’activité physique régulière a été recherché sont les cancers les plus fréquents car ce sont ceux pour lesquels nous disposons d’études sur de grandes cohortes.
C’est pour le cancer du côlon qu’il existe le plus grand nombre de preuves de l’effet préventif de l’activité physique. Sur les 51 études portant sur le cancer du côlon et le cancer colo-rectal, 43 ont démontré une diminution du risque chez les sujets ayant l’activité physique la plus importante avec une réduction moyenne de 40 à 50 %. Sur les 29 études ayant recherché un effet dose-réponse, 25 ont démontré qu’une augmentation du niveau d’activité physique était associée à une diminution du risque. Cet effet protecteur n’est en revanche pas retrouvé pour le cancer du rectum.
Concernant le cancer du sein, sur les 44 études effectuées en 2002, 32 ont démontré une diminution du risque chez les sujets ayant l’activité physique la plus importante. En 2006, 45/64 études ont démontré une diminution du risque chez les sujets ayant l’activité physique la plus importante avec une réduction moyenne de 30 à 40 %. Sur les 23 études ayant recherché un effet dose-réponse, 20 ont démontré qu’une augmentation du niveau d’activité physique était associée à une diminution du risque. Il est difficile de donner une quantité minimale d’exercice pour obtenir une protection car différents types d’activité physique peuvent être efficaces : marche, activité physique intense de courte durée, activité physique ménagère... Néanmoins, si on considère uniquement une activité de type marche, le seuil minimum efficace se situe autour de 4 h de marche par semaine. Chez des femmes préalablement traitées pour un cancer du sein (stade I, II ou III), des études récentes montrent qu’une activité physique de type marche (3 à 5 h par semaine) diminue le risque de décès ou de récidive de 20 à 50 %.
En 2003, sur les 23 études sur le cancer du poumon, la plupart ont démontré une diminution du risque chez les sujets ayant l’activité physique la plus importante avec une réduction moyenne de 20 % (allant de 20 à 60 %) mais une étude a rapporté une augmentation du risque de 40 %. Dans la plupart des études, le rôle du tabac a été contrôlé. Néanmoins, la plupart du temps les sujets sportifs sont non fumeurs et ont donc une faible incidence du cancer du poumon. Deux études ont montré une réduction du risque de cancer du poumon chez les sujets sportifs fumeurs. Ce rôle protecteur de l’activité physique reste à démontrer chez la femme.
Concernant le cancer de la prostate, sur les 37 études publiées, la moitié ont montré que l’activité physique diminuait le risque de cancer de la prostate de 10 à 30 % avec une relation dose-réponse retrouvée dans 10 études sur 19. Mais les résultats des différentes études sont encore trop contradictoires (certaines études rapportent une augmentation du risque de cancer de la prostate avec l’activité physique) pour en tirer une conclusion définitive.
En matière de cancer de l’endomètre, une revue récente de 2007 indique que 14 études sur 18 montrent une réduction du risque de 30 % en moyenne (une relation dose-réponse est rapportée dans 7 études sur 13). D’après les résultats de plusieurs autres études récentes, il semble que l’activité physique exerce un effet protecteur probable vis-à-vis du cancer de l’endomètre.
Il existe d’autres cancers pour lesquels quelques publications mettent en évidence un rôle protecteur possible de l’activité physique (cancer de l’ovaire, de l’estomac...) mais les données sont insuffisantes pour en tirer des conclusions sur les relations de causalité.
En résumé, d’après les définitions développées par le Fond de recherche mondial sur le cancer et l’Institut américain de recherche sur le cancer (niveau d’évidence scientifique allant de « convaincant » à « probable », « limité » puis « insuffisant »), l’activité physique a un effet préventif convaincant sur le cancer du côlon, et probable sur le cancer du sein (chez les femmes ménopausées) et le cancer de l’endomètre. En revanche, les preuves sont limitées pour les cancers du poumon et de la prostate. Pour les autres cancers, cet effet reste à démontrer. Le plus souvent, un effet dose-réponse est observé pour une activité d’intensité modérée à élevée, une activité physique trop intense n’engendrant pas des bénéfices plus importants. Pendant et après le traitement, une activité physique adaptée d’intensité faible à modérée améliore la qualité de vie et diminue la sensation de fatigue.
Les mécanismes sous-tendant l’effet bénéfique de l’activité physique sur la prévention de certains cancers commencent à être identifiés. Cet effet bénéfique fait intervenir soit des effets systémiques de l’activité physique soit, dans le cas du cancer du côlon, des effets locaux.
Un des effets systémiques de l’activité physique est la diminution de la fraction biologiquement active (fraction libre) des hormones sexuelles. Cet effet bénéfique s’exerce sur les cancers hormono-dépendants (sein, endomètre, prostate). L’activité physique régulière diminue le risque de survenue de ces cancers en réduisant la production endogène des œstrogènes mais aussi en augmentant la SHBG (Sex Hormone Binding Globulin). La SHBG, en se liant à l’œstradiol ou à la testostérone, diminue leur fraction libre donc biologiquement active. La production de SHBG est aussi dépendante de la diététique (régime normo- ou hypocalorique, alimentation riche en fibres...) et les effets de l’activité physique sont parfois confondus avec ceux de la diététique.
Un autre effet systémique de l’activité physique régulière est la diminution de l’insuline et de l’IGF-I. L’obésité et la sédentarité induisent une insulino-résistance et un hyperinsulinisme compensatoire. L’insulino-résistance est associée à une cohorte d’altérations métaboliques définissant le syndrome métabolique et conduisant à une diminution de la SHBG et des protéines liant l’IGF (IGF-BP) et donc à une augmentation de la fraction libre, biologiquement active, des hormones liées à ces protéines (IGF-I pour les IGF-BP, œstradiol et androgènes pour la SHBG).
Pour le cancer du côlon, les effets protecteurs de l’activité physique régulière font intervenir des mécanismes locaux. Deux types de mécanismes ont été proposés :
• l’augmentation de la motilité intestinale induisant une réduction du temps de transit gastro-intestinal et donc une diminution de l’opportunité pour les cancérogènes d’être en contact avec la muqueuse colique et le contenu fécal ;
• les modifications des concentrations de prostaglandines : augmentation des prostaglandines PGF qui inhibent la prolifération des cellules coliques et augmentent la motilité intestinale. En revanche, l’activité physique n’augmente pas le taux de prostaglandines PGE2 qui, au contraire, stimulent la prolifération des cellules coliques.
D’autres mécanismes biologiques ont été proposés tels que la diminution du stress oxydatif et des effets sur l’immunité. Il est évident que les effets bénéfiques de l’activité physique sont dépendants de mécanismes multiples intriqués entre eux. Néanmoins, le niveau de preuves scientifiques pour chacun d’entre eux reste discuté et des recherches sont nécessaires pour déterminer quels sont les mécanismes de prévention pour chaque type de cancer.
Par ailleurs, les mécanismes des effets bénéfiques de l’activité physique régulière sur la survie après traitement d’un cancer et surtout sur la qualité de vie (diminution de l’asthénie post-traitement, amélioration des symptômes secondaires au traitement) restent à déterminer (en plus de la nécessité de savoir quand débuter l’activité physique par rapport au traitement, et à quelle dose : durée et intensité).

L’activité physique, pratiquée de façon régulière, agit dans la prévention et le traitement des maladies ostéoarticulaires et dégénératives

La pratique régulière d’une activité physique est maintenant reconnue comme faisant partie intégrante de la prise en charge thérapeutique du handicap, des maladies chroniques et dégénératives.
Le maintien d’un certain niveau d’activité physique est efficace contre les effets délétères de l’immobilisation sur la structure des ligaments et des tendons (qui s’exprime par une baisse du seuil de rupture, une perte d’élasticité aggravée par l’âge).
Les effets positifs de l’activité physique ont été démontrés vis-à-vis de la prise en charge de la lombalgie chronique (ce qui n’est en revanche pas retrouvé dans le cas de la lombalgie aiguë).
En ce qui concerne la pathologie rhumatismale, les bienfaits de l’activité physique sont maintenant prouvés, pour les syndromes inflammatoires, et tout particulièrement la polyarthrite rhumatoïde. Des résultats de même niveau de preuve ont été récemment rapportés pour la prise en charge de la fibromyalgie, à l’inverse du syndrome de fatigue chronique, pour lequel l’activité physique semble sans effet réel.
Il faut insister tout particulièrement sur le problème majeur de santé publique que représente l’arthrose. Si la pratique modérée et régulière du sport ne représente pas, à elle seule, un facteur favorisant le développement de cette pathologie, il n’en est pas de même de la pratique intensive. Ceci est maintenant bien démontré, d’autant plus que les sujets présentent des anomalies morphologiques préexistantes (genou et hanche en particulier), et qu’ils ont été précédemment victimes d’un traumatisme articulaire. Cette dernière constatation conduit à insister sur le respect des temps de cicatrisation, et la nécessité d’une reprise progressive du sport après blessure. Des études complémentaires devront être conduites dans ce sens.
Ces constatations ne doivent toutefois pas conduire à des conclusions erronées quant à la place des activités physiques vis-à-vis de la prise en charge de la pathologie arthrosique (qui concerne, à des degrés variés, la quasi-totalité de la population au-delà de 65 ans). En effet, de nombreuses études publiées au cours des dernières années concluent toutes, avec un niveau de preuve très élevé, aux bienfaits d’une activité physique adaptée (nécessitant de respecter les poussées de la maladie), tant sur la douleur, que la force et, plus généralement sur la qualité de vie.
Quelles que soient les pathologies, et tout particulièrement pour la prise en charge du patient arthrosique, il faudrait préciser quels sont les programmes les plus efficaces (en particulier de musculation voire de rééducation) en termes de durée et fréquence. Par ailleurs, la relation entre l’intensité et l’effet bénéfique de l’exercice pour ces pathologies reste à élucider. Un autre point majeur et pour lequel les données actuelles de la littérature sont très partielles concerne l’adhésion à ces programmes des patients (souvent isolés et âgés) à moyen et long terme. Le taux d’abandon est le plus souvent élevé et les effets bénéfiques, en conséquence, limités dans le temps, tout particulièrement pour les sujets n’ayant aucun passé de pratique sportive.
L’activité physique est devenue progressivement un des moyens privilégiés de rééducation des personnes handicapées mais a fait l’objet de peu d’études contrôlées. Pour toutes les populations handicapées physiques, l’activité physique apporte un sentiment de maîtrise du corps (réel ou fantasmé) qui joue un rôle très important sur la qualité de vie. Les recherches à partir d’échantillons importants ont montré les répercussions psychosociales du réentraînement à l’effort en phase d’hospitalisation au niveau de la reprise du sport, de sa poursuite, sur les demandes d’aide médicale, sur l’insertion professionnelle, sur l’autonomie motrice. Les auteurs démontrent que les blessés médullaires, le plus souvent des adultes jeunes, ayant effectué un réentraînement à l’effort lors de leur séjour en centre de rééducation bénéficient d’une qualité de vie plus grande dans les cinq années post trauma. Il en est de même pour l’amélioration des capacités physiologiques. Par ailleurs, les personnes présentant un handicap physique s’investissent de plus en plus dans le sport de compétition en retirant tous les avantages individuels et sociaux mais en prenant parfois les risques inhérents à l’excès de cet engagement.
Récemment, plusieurs publications ont mis en évidence le bienfait de l’activité physique vis-à-vis de la prise en charge des maladies dégénératives neurologiques (sclérose en plaques, maladie de Parkinson, voire maladie d’Alzheimer). Il s’agit là d’un nouveau champ d’investigation majeur pour les années à venir, en lien direct avec les progrès thérapeutiques observés vis-à-vis de ces maladies neurologiques, et le vieillissement de la population.

L’activité physique pratiquée de façon excessive augmente les risques de traumatismes

La pratique régulière d’une activité physique peut être responsable d’un risque potentiel de blessure, variable quant au type et à la gravité, en fonction de la discipline sportive, de l’âge et des conditions de pratique notamment.
La notion même de traumatisme doit toujours être précisée (blessure nécessitant ou non une prise en charge médicale, voire une hospitalisation, s’accompagnant ou non d’une modification ou d’un arrêt de l’activité physique, voire d’un arrêt de travail). Il faut, par ailleurs, bien différencier les lésions aiguës des lésions chroniques ou de surmenage.
Les lésions aiguës conduisent dans leur grande majorité à un arrêt du sport, voire une hospitalisation (toutefois moins fréquente comparée aux accidents de la vie quotidienne). La gravité potentielle et l’impact financier qui en découlent font qu’à ce jour certains sports ont fait l’objet de nombreuses publications, alors que d’autres ont été peu ou pas étudiés. Les traumatismes crâniens, les fractures et luxations des membres supérieurs sont retrouvés principalement lors de la pratique des sports de glisse (patinage, ski, snow-board), du vélo et des sports sur roulettes (patins, skate-board). De même, le rugby à XV (22 blessures pour 1 000 heures de jeu) a fait l’objet de plusieurs publications et de recommandations précises pour éviter les traumatismes graves du rachis cervical, notamment. La rupture du ligament croisé antérieur du genou (qui conduit le plus souvent à une intervention chirurgicale) a été particulièrement décrite en sports collectifs (football : 0,1 rupture pour 1 000 heures de jeu ; hand-ball : 9,7 ruptures pour 1 000 heures de jeu) et lors de la pratique du ski alpin (et ceci quel que soit le niveau technique). Pour ce dernier, le nombre de ruptures annuelles a été estimé à 16 000 en France, pour 55 millions de skieurs-jours. Ce risque est en moyenne trois fois plus élevé chez les femmes, comparativement aux hommes, quel que soit le sport étudié. L’entorse de cheville est particulièrement fréquente en sport collectif, le risque relatif étant de 2,81 pour les basketteuses, contre 1,15 pour les footballeurs (hommes ou femmes), comparé à un groupe référence.
Ces lésions aiguës peuvent être en partie prévenues par les modifications des règles du jeu (c’est le cas du rugby), par le port du casque et de protections (coudières, gants, genouillères) lors de la pratique du vélo et des sports de glisse notamment. Ces mesures ont prouvé leur efficacité, de même que le port d’attelle de cheville pour prévenir la récidive des entorses. Enfin, la prévention de ces blessures peut être envisagée au travers de la modification des programmes d’entraînement. Il a été ainsi montré que le risque de rupture du ligament croisé du genou chez la femme peut être divisé par 3 ou 4 en appliquant des programmes de musculation dynamique et de proprioception en volley-ball et football. Il serait souhaitable que les mêmes études concernent d’autres sports à risque comme le judo et le ski. Il faut par ailleurs, tout particulièrement insister sur le dépistage d’anomalies morphologiques susceptibles de favoriser les lésions, et sur le respect des temps de cicatrisation notamment dans le cadre de la pratique sportive intensive. Comme l’ont démontré de nombreuses études, la survenue d’un premier accident favorise la récidive et les complications éventuelles.
Les lésions chroniques ou de surmenage sont très spécifiques de la pratique sportive et du geste réalisé. Elles se rapprochent en cela des troubles musculo-squelettiques décrits en médecine du travail. Ces blessures entraînent rarement une prise en charge médicale lourde, mais conduisent quasi systématiquement à un arrêt des activités physiques et sportives allant de quelques jours à plusieurs mois. À ce jour, tous les sports n’ont pas fait l’objet d’une même attention. On peut remarquer que la pratique de la natation conduit à l’apparition fréquente de tendinites de l’épaule (jusqu’à 21 % de l’ensemble des blessures dans certaines études). La pratique du cyclisme est responsable de fréquentes tendinopathies au niveau du genou (13 pour 100 000 km parcourus). Il en est de même pour la course à pied, discipline qui a fait l’objet du plus grand nombre d’études (plus de 10 études prospectives référencées à ce jour). On retrouve pour cette discipline, en premier lieu les syndromes rotuliens, les tendinites du genou et de la cheville et les fractures de fatigue qui représentent en athlétisme 8 à 20 % des blessures selon les études, contre 1 % en moyenne pour les autres sports.
Chez l’enfant en croissance, l’attention doit être tout particulièrement portée sur les risques de surmenage des cartilages de croissance (épiphysaires et apophysaires) encore appelés ostéochondroses, beaucoup plus fréquents que les lésions ligamentaires, musculaires ou tendineuses, retrouvées chez l’adulte. Cette période de la vie impose donc une surveillance particulière (qui n’est pas, à ce jour réalisée pour tous les sports). En effet, à l’inverse des adultes le risque traumatique est proportionnellement plus élevé lors de l’entraînement que pendant la compétition. Ceci a été particulièrement bien démontré par des études réalisées auprès de jeunes footballeurs ayant une pratique sportive intensive. La surveillance médicale chez les garçons et les filles en période de croissance doit donc être particulièrement renforcée pour éviter les séquelles articulaires et tendineuses à l’âge adulte. Elle devrait intégrer notamment la notion de quantité et d’intensité d’entraînement. De même, et de façon plus large, la prévention chez l’enfant et l’adolescent sportif doit intégrer l’étude du geste lui-même, du matériel utilisé et ceci en fonction du sport pratiqué (sols, chaussures, raquette par exemple).
Ceci conduit à la nécessité d’appréhender le plus précisément possible la notion de bénéfice/risque, qui n’a pas, à ce jour, été évaluée de façon exhaustive, tout particulièrement en fonction du type de sport pratiqué, de l’intensité, de la fréquence, et de l’âge du sportif.

L’activité physique est un facteur d’équilibre de la santé mentale

L’anxiété et le stress sont les conséquences de notre société dont les valeurs reposent sur la performance et la compétition. Aussitôt, on perçoit que le sport de compétition est lui-même un facteur de stress, ce qui est confirmé par les travaux expérimentaux qui ont mis en évidence une augmentation de l’anxiété suite à des programmes d’entraînement de forte intensité, ou des situations sportives entraînant des échecs répétés. La pratique sportive intensive peut provoquer des réactions de stress particulièrement au niveau des populations anxieuses, fragiles, en faible condition physique ou âgées.
Inversement, les relations entre la pratique d’une activité physique de loisir de faible intensité et la réduction de l’anxiété ont été mises en évidence au niveau de la population générale adulte. Les revues de littérature concluent que l’exercice physique est associé à la réduction de l’anxiété et à ses indicateurs physiologiques. Les niveaux de preuve sont considérés comme faibles ou modérés mais significatifs. Il apparaît que cette réduction d’anxiété est principalement constatée au niveau de populations en faible condition physique et avec un fort niveau d’anxiété.
Chez les individus non anxieux, les effets se feraient sentir au niveau de « l’anxiété d’état » (passagère, situationnelle) tout au long de la durée de l’activité et persisteraient globalement pendant deux heures après la fin de l’activité. Si la réduction de l’anxiété d’état est retrouvée dans la plupart des travaux, cette réduction est plutôt corrélée avec un exercice d’intensité modérée ou faible, le type d’activité (aérobie ou résistance) ne semble pas jouer un rôle prépondérant.
Chez les sujets présentant une anxiété forte ou modérée, l’anxiété d’état peut être également diminuée. Le faible nombre de travaux portant sur les populations présentant des troubles anxieux profonds ne permet pas de conclure autrement que de proposer l’activité physique comme « complémentaire » aux thérapies classiques.
La dépression concerne aujourd’hui près de 15 % de la population. On sait que la dépression touche l’image de soi et du corps et de nombreuses études ont cherché comment l’inactivité était associée à la dépression et inversement comment une pratique régulière était en corrélation avec un faible score de dépression. Les études épidémiologiques transversales et longitudinales, nombreuses sur ce thème (plus de 1 000 articles en 2001), ont montré que les « actifs » avaient un score de dépression plus faible que les « non actifs » aux divers inventaires de dépression (sans que l’on puisse cependant déterminer le sens de cette relation). Certains auteurs ne trouvent pas de liaison avec la pratique sportive, après ajustement selon l’âge, le sexe et la classe sociale, alors que d’autres trouvent un risque de dépression diminué parmi les jeunes qui font un sport collectif (mais de nouveau, on peut penser que les jeunes qui s’orientent vers les sports collectifs sont moins déprimés que ceux qui s’orientent vers un sport individuel).
Les méta-analyses qui ont été réalisées de 1990 à 2006 sur des populations très diverses mettent en évidence des résultats convergents : la pratique d’activité physique ponctuelle ou durable entraîne une diminution du niveau de dépression mesuré par les différentes échelles ou questionnaires. L’effet est significatif mais faible. Cet effet « limité » dans la démonstration de la preuve provient en particulier du faible nombre de sujets composant les protocoles expérimentaux, de l’extrême diversité des populations, des types d’interventions, des méthodologies d’évaluation...
Les travaux comparant les effets d’une thérapie par l’activité physique à un traitement médicamenteux, à une thérapie comportementale, à une thérapie analytique ou à des traitements mixtes sont assez peu nombreux mais ils constatent une même réduction du niveau de dépression quelle que soit la forme de thérapie à la fin d’un suivi de 3 à 4 mois. Le type d’exercice ne semble pas jouer un rôle prépondérant mais l’environnement paraît important (présence d’un coach individuel ou pratique en petit groupe). La réduction du score est particulièrement visible sur les dépressions de niveau modéré mais les effets semblent se réduire avec le temps. Une récente méta-analyse confirme que l’ensemble des travaux est trop hétérogène au niveau des groupes, des pratiques, de la durée, des traitements pour pouvoir conclure que l’activité physique est un traitement plus efficace de la dépression en comparaison avec d’autres protocoles. Cependant, les effets positifs sont largement démontrés au niveau des répercussions secondaires de la maladie, de la condition physique, de la qualité de vie. L’activité physique devrait pouvoir être proposée dans toute prise en charge de la dépression.
Une modélisation de l’intervention en activité physique pour diminuer les niveaux d’anxiété et de dépression a été proposée : travail de type aérobie ou en résistance ; 3 fois à 5 fois par semaine ; intensité modérée : séquences de 30 minutes ; engagement supérieur à 12 semaines (effet à partir de 8 semaines) ; travail en groupe ou individuel avec un coach.
Les mécanismes d’action restent très discutés. Certains auteurs argumentent sur l’importance des facteurs psychologiques : regard positif des autres, rupture par rapport aux pensées négatives, nouvelles compétences, rencontres, sentiment de maîtrise, effet de distraction, diminution de l’anxiété corporelle... Selon d’autres chercheurs, les facteurs physiologiques sont prépondérants et l’amélioration de la condition physique est le point de départ de ces évolutions. Les endomorphines et la concentration de monoamines sont également à prendre en compte ainsi que les sécrétions hormonales mobilisées par le stress (cortisol). Les facteurs en jeu sont très certainement multifactoriels et varient en fonction du type d’activité, de l’intensité de la pratique, de la durée, de la présence de participants, de spectateurs...
Au niveau des populations présentant des troubles mentaux sévères tels que autisme ou schizophrénie, on constate un faible nombre de recherches contrôlées et une diversité de résultats. Les auteurs d’une récente méta-analyse estiment, qu’au regard du faible nombre de publications et malgré les résultats positifs mis « cliniquement » en évidence, ils ne peuvent tirer de conclusions « scientifiquement validées » sur les effets thérapeutiques de l’activité physique chez les schizophrènes. Il faut souligner cependant le mauvais état de santé des personnes atteintes de schizophrénie dont 89 % sont inactives. Leur style de vie mériterait d’être modifié et l’activité physique leur est particulièrement recommandée. Elle pourrait être un complément à prôner tant son action sur le plan de l’amélioration de la qualité de vie semble évidente. Il n’y a pas de contre-indications majeures à associer les traitements médicamenteux et la pratique physique de loisir.
D’autres publications ont relaté les bienfaits de l’activité physique (judo, escalade, natation, danse...) chez les adolescents autistes. Notons également que la participation d’enfants et d’adultes autistes à une activité commune avec d’autres dans le cadre d’activités sportives leur procure un sentiment valorisant d’appartenir à des groupes et facilite leur intégration sociale.

L’activité physique intensive peut-elle devenir une addiction ?

Au début des années 1970, seul un petit nombre d’individus qualifiés « d’idiosyncrasiques » dans le New England Journal of Medicine s’adonnaient au « jogging ». Quinze années plus tard, le Health Science Center de l’Université d’Arizona estimait le nombre des coureurs américains à 31 millions et le marché émergent ainsi généré à des milliards de dollars. En même temps, de plus en plus de preuves étaient fournies, par la littérature scientifique et médicale internationale, des bénéfices physiologiques et psychologiques de cette massification de l’exercice physique, et des théories tentaient d’expliquer ces bénéfices. Simultanément apparaissait, dans cette littérature, la description clinique du phénomène d’addiction à l’exercice physique, terme que l’on doit à Baekeland (1970) qui le premier publia une étude sur les effets psychologiques de la cessation d’activité sportive, notamment sur le sommeil. C’est d’ailleurs ces épisodes d’arrêt forcé qui ont permis d’observer un syndrome de sevrage typique des addictions en général, incluant irritabilité, troubles du sommeil, états dépressifs, troubles alimentaires accompagnés d’un niveau élevé de culpabilité, le tout accroché à des symptômes somatiques divers.
Cependant, les effets positifs de l’activité ont abouti à ce que, pendant longtemps, on a considéré cette addiction comme une « addiction positive » définie comme une dépendance psychologique et physique, mais caractérisée « positive » car les sujets en tireraient des bénéfices au plan du bien-être physique et psychologique. Toutefois, et là réside le cœur du problème, il peut alors s’opérer un glissement vers une relation à l’activité d’ordre obsessionnelle. Le fait de placer l’activité physique au dessus des autres considérations de la vie de tous les jours entraînerait alors le basculement, chez certains sujets, de « l’addiction positive » à « l’addiction négative », c’est-à-dire à une véritable dépendance.
Il serait important de connaître les facteurs de vulnérabilité à ce glissement. Le problème posé est d’ordre principalement méthodologique car il s’agit de définir des critères et de valider des instruments de mesure de cette addiction négative.
Les signes cliniques pour décrire l’addiction à l’activité physique ont été mis en relation avec les critères des addictions aux substances. La validité de cette relation repose cependant sur la validation des critères de dépendance à l’activité physique. Or, force est de constater l’extrême hétérogénéité des outils de mesure. Les termes utilisés eux-mêmes recouvrent indifféremment des concepts, des critères et des variables alors qu’ils concernent des soubassements théoriques différents. De même, une dizaine d’échelles de mesures est utilisée depuis 1979 pour mesurer l’addiction sans toujours une bonne validation des items.
Les travaux les plus récents ont cependant pu affiner et valider ces critères. On observe :
• une réduction du répertoire des exercices jusqu’à une activité physique stéréotypée et journalière ;
• cette activité est plus investie que toute autre ;
• une augmentation de la tolérance de l’intensité de l’activité physique ;
• des symptômes de sevrage lors de l’arrêt volontaire ou contraint ;
• une atténuation ou une disparition des symptômes de sevrage à la reprise ;
• une perception subjective d’un besoin compulsif d’exercice ;
• la réinstallation de l’activité compulsive après une interruption ;
• la poursuite de l’activité en dépit de maladies et une négligence des avis médicaux ;
• des difficultés (liées à l’exercice) ou conflits avec la famille, les amis ou le travail ;
• l’auto-obligation de perdre du poids.
Au plan de la vulnérabilité interindividuelle, des travaux récents ont pu estimer à 4 % environ, dans la population sportive générale, la proportion de sujets susceptibles de « glisser » vers l’addiction. Cependant, le genre (filles moins vulnérables), mais également le type de sport pratiqué (solitaire ou en équipe...), le niveau de pratique, mais également des facteurs plus psychologiques comme l’environnement socio-familial ou la recherche de sensations sont autant de facteurs amplifiant ou limitant cette vulnérabilité. Ces données suggèrent fortement que dans la genèse et dans l’expression de ces phénomènes, il ne s’agirait pas d’une liaison monofactorielle simple, mais que nous aurions affaire à une étiologie multifactorielle qu’il conviendrait d’appréhender dans toute sa complexité.
Une conséquence de taille de ce type d’addiction et qui découle d’un phénomène observé dans les addictions chimiques, est la question de la polyconsommation. Une éventuelle addiction à l’activité physique, si elle se confirmait, constituerait-elle ou non un facteur de vulnérabilité à la consommation de substances telles que l’alcool, le tabac ou des substances illicites ? Ce problème a donné lieu à une littérature assez importante tant par des études en population (la dernière enquête en date a été menée en 2006 en France en région PACA) que sur des modèles animaux. Bien qu’il soit difficile de fixer nettement la frontière entre activités physiques récréative et intensive (surtout pour la course de fond et le body building), certains travaux sur l’humain et l’animal ont pu distinguer les effets positifs et négatifs de l’une et de l’autre, dans le sens où la première (l’activité récréative modérée) rendrait moins « vulnérable » (voire protectrice) que la seconde (l’activité intense) à la consommation d’alcool et de substances illicites.
Des liens ont été mis en évidence entre pratique sportive compétitive et violences, consommation de substances psychoactives. Ces liens persistent après ajustement sur le sexe, l’âge et la classe sociale. Plus que la pratique en soi, c’est le stress qui pourrait être en cause dans ce lien mais le stress n’est-il pas inhérent au sport de compétition ?
La pratique sportive de compétition qui concerne une faible partie de la population n’est pas sans risque au niveau des répercussions psychologiques négatives et de l’émergence de troubles psychopathologiques. Ces troubles sont peu décrits dans la littérature scientifique, les sportifs de haut niveau n’étant pas suivis d’une manière régulière au niveau psychologique (contrairement au suivi médical et biologique). La plupart des travaux portent sur les adolescents sportifs. On constate que les troubles alimentaires sont plus fréquents chez les sportifs comparés aux non sportifs. Certains facteurs de risque ont été identifiés (instabilité pondérale, crainte de la puberté, image du corps négative, échecs...). Les comportements à risque sont retrouvés chez les jeunes pratiquant des sports de compétitions (violence, alcoolisation, consommation de drogues illicites, utilisation de médicaments psychostimulants, dopants, prises de risque excessives en sport...) ; ils sont associés à une recherche de sensation et à une faible perception du danger. Les troubles anxieux et dépressifs liés à la pratique intensive et ses contraintes ont été peu étudiés sinon lors de situations de crise (blessure, sevrage du mouvement). Le devenir des athlètes en fin de carrière ou les problèmes de reconversion ont fait l’objet de peu de recherches. Un type de personnalité de certains sportifs de compétition caractérisé par la restriction des affects avec un fonctionnement psychologique de type « opératoire » (alexithymie) ou de type « narcissique » expliquerait certaines conduites à risque et psychopathologies spécifiques. Les connaissances sur la psychopathologie des sportifs restent très fragmentaires.
On insistera enfin sur le fait que la fraction minoritaire de sujets vulnérables à l’addiction, et partant à son cortège de désordres associés, concerne particulièrement une importante population de sujets pratiquant de manière intensive la course de fond, voire la course marathonienne, et le body building (sports pour lesquels le recueil de données est significatif). Or ces adeptes, malgré un entraînement de type professionnel, restent des sportifs « amateurs » sans licence, pratiquant en dehors de tout club, et de toute fédération, et par conséquent privés de tout encadrement institutionnel sportif et médical capable de dépister, diagnostiquer et suivre ceux qui s’avéreraient vulnérables à cette addiction.

L’activité physique et sportive est un facteur de développement chez l’enfant et l’adolescent mais elle comporte également des risques

L’activité sportive est considérée chez l’enfant et l’adolescent à la fois comme un moyen de lutte contre le surpoids et l’obésité, l’ennui, le désinvestissement scolaire et social. Elle permettrait, par ailleurs, de canaliser l’agressivité, de maîtriser l’attention, de développer des habilités cognitives et sociales, de s’adapter à des situations nouvelles et de gagner en estime de soi. Ces avantages existeraient quelle que soit la discipline pratiquée.
Quant à la pratique du sport de haut niveau, si elle est jugée globalement bénéfique, elle comporte aussi des risques, tant au niveau physique (risque d’accidents, risque d’entraînement excessif ou « overtraining symptom ») que psychologique (pression de réussite interne et externe, érosion de l’estime de soi en cas d’échecs répétés, implication trop exclusive dans la discipline choisie).
Les études concordent pour conclure que la pratique sportive est plus fréquente chez les garçons que les filles, écart qui augmente avec l’âge. L’activité physique des enfants est associée à celle des parents, et ce indépendamment du statut socioéconomique.
La pratique diminue avec l’âge pour tous, mais plus pour les filles que pour les garçons. Ce déclin de l’activité sportive des filles a été observé dans la plupart des pays et également en France. Il semble résulter de l’effet des variables sociales et environnementales, plus que de la motivation ou le profil de perception de soi. La perception du risque d’accident par les parents est un des facteurs explicatifs. Un quart des parents découragent leurs enfants de 5-12 ans de pratiquer des sports à haut risque d’accidents. Cette attitude parentale concerne plus les garçons (35 %) que les filles (17 %), probablement parce que les garçons choisissent des sports plus à risque d’accident.
Il y a un « continuum » entre la pratique sportive juvénile et la pratique à l’âge adulte. Une activité physique durant l’enfance augmente les chances d’une activité physique durant l’âge adulte.
De nombreuses études mettent en évidence un lien positif entre pratique sportive et bien-être psychologique (emotional well-being). Cependant, le lien entre activité sportive et bien-être des adolescents n’est pas simple à étudier car de nombreux facteurs de confusion peuvent influencer la pratique sportive tout comme le sentiment de bien-être. Une étude montre cependant que l’activité sportive joue un rôle plus important sur le bien-être que des variables scolaires (note scolaire en mathématiques, ambiance scolaire).
Les jeunes qui ont une activité physique ont une meilleure image d’eux-mêmes et une moindre anxiété que ceux qui n’ont pas d’activité physique. Les filles plus sédentaires seraient plus déprimées. Il convient aussi de mentionner que la majorité des recherches sur le lien « activité sportive/bien-être » se sont limitées à des enquêtes transversales, c’est-à-dire à la relation entre deux événements (ici la pratique sportive et la santé) à un moment donné. On peut s’interroger sur le sens de la relation observée. La pratique sportive a-t-elle un effet positif sur la santé ou est-ce que le fait d’être en bonne santé augmente la pratique sportive ? Il s’agit probablement d’une relation « circulaire » où la bonne santé favorise la pratique sportive qui elle-même augmente la bonne santé... Tous les auteurs admettent la nécessité d’enquêtes longitudinales, et surtout d’études longitudinales à long terme, tant le sujet est sensible et l’enjeu de taille pour les actions publiques.
Quand on considère des groupes de pratiquants (opposant par exemple les sportifs « intenses » et les sportifs « modérés » ou les sportifs « compétiteurs » et les sportifs « non compétiteurs »), les résultats deviennent complexes. La relation entre santé mentale et activité physique est linéaire : plus le temps de pratique sportive est élevé, moins les jeunes ont tendance à avoir des idées suicidaires ou des passages à l’acte, mais la relation est en U quand on considère les conduites à risque, telles que la consommation de substances ou les conduites de violence. Le fonctionnement social pourrait en partie expliquer cette courbe en U. Si la pratique sportive favorise la socialisation, on peut faire l’hypothèse que les sportifs « intenses » sont soumis à la pression du groupe, en particulier après les victoires. De plus en plus d’auteurs constatent que les sportifs « compétiteurs » ont plus de conduites à risque (consommation de substances psychoactives, conduites de violences) que les « non compétiteurs », résultats qui suggèrent qu’un accompagnement psychologique des sportifs de haut niveau devrait être envisagé systématiquement, en particulier dès l’adolescence dans les centres de formation.
Un certain nombre d’études en particulier celles menées par les psychologues du sport montrent que la pratique fréquente d’un sport d’endurance améliore l’image de soi. Plusieurs études d’intervention concernent plus particulièrement l’aérobic, car il s’agit d’une pratique sportive peu coûteuse et donc facile à généraliser. La majorité des études évaluatives concernent la population féminine, car c’est parmi les adolescentes que le déclin de la pratique sportive est le plus important. À ce jour, les études évaluatives sont insuffisantes car elles se limitent le plus souvent à un effet à court terme.
Si globalement, la participation à une pratique sportive semble bien améliorer l’état de santé perçu, le bien-être psychologique ou l’estime de soi, et diminuer l’anxiété sociale, il reste néanmoins à évaluer la valeur protectrice de la pratique sportive dans des études longitudinales à long terme.

L’activité physique et sportive présente des effets spécifiques aux différents âges de la vie de la femme

Dès le plus jeune âge, les filles ont une pratique physique significativement plus faible que les garçons. Cette différence apparaît dès l’âge de 4 ans, se retrouve à 9-10 ans et persiste à l’adolescence. Chez les filles, le niveau d’activité physique décroît avec l’âge, quelle que soit la valeur du niveau d’activité physique (filles actives, modérément actives ou inactives).
L’adolescence est la période à laquelle la baisse d’activité physique est la plus marquée. Les résultats font apparaître deux variables majeures de la diminution de l’activité physique à cette période sensible. Premièrement, le temps, qui représente la contrainte majeure, est inversement associé à l’activité physique. Deuxièmement, le soutien et l’aide apportés par les parents, les enseignants, l’entourage, sont positivement associés à l’activité physique. Les filles pratiquent le plus souvent pour perdre du poids et pour le plaisir. Au moment de l’adolescence, l’activité physique devient plus organisée et le plaisir du jeu laisse peu à peu la place à des objectifs de santé et de condition physique.
Les adolescentes sous-évaluent et sous-estiment leur capacité, leur potentiel et leur compétence pour l’activité physique. Elles énoncent plus d’obstacles à la pratique physique que les garçons tels que le temps, l’argent, les ressources et la pratique sécurisée. Il n’existe pas de recommandations précises pour l’activité physique des adolescentes.
À l’âge adulte, le pattern d’activité physique est très significativement différent entre l’homme et la femme. Les femmes pratiquent des activités physiques avec des dépenses énergétiques moins importantes que celles pratiquées par les hommes. Cependant, peu d’études se sont intéressées uniquement aux femmes. Les variables prédictives de la pratique d’une activité physique sont l’âge, le rôle social conféré à l’activité physique, le soutien de l’entourage et les paramètres environnementaux.
Pour la femme en population générale, les recommandations sont de 30 minutes d’activité physique par jour à intensité modérée, ce qui représente une dépense énergétique d’au moins 4 200 kJ par semaine, nécessaire à la prévention de la mortalité précoce par la réduction des risques de maladies cardiovasculaires et de certains cancers.
La littérature apporte des éléments de réponse quant aux caractéristiques de l’activité physique engendrant une adhésion optimale. La nature de l’activité n’apparaît pas comme un déterminant majeur. En revanche, le plaisir, la durée des sessions, un lieu adapté et approprié, un bon niveau de compétence et un programme personnalisé sont les facteurs qui apparaissent comme favorisant l’adhésion à une pratique d’activité physique chez la femme.
Pendant la grossesse, une activité physique régulière modérée de 30 minutes chaque jour de la semaine a des effets bénéfiques sur le contrôle du poids et sur la condition physique. Les activités préconisées sont la marche, le vélo stationnaire, la natation. La plongée sous-marine doit être évitée pendant cette période dans la mesure où le fœtus est soumis à un risque accru lié aux phénomènes de décompression. Des recommandations très précises ont été établies par la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada et la Société canadienne de physiologie de l’exercice.
À la ménopause, les femmes qui ont pratiqué régulièrement une activité physique au cours de leur vie ont en général une masse osseuse plus importante. Il existe une relation positive entre l’exercice musculaire et la densité minérale osseuse après ajustement de tous les facteurs qui peuvent agir sur la masse osseuse, en particulier en tenant compte de l’existence ou non d’un traitement substitutif œstrogénique.
Après la perte massive de masse osseuse survenant les premières années qui suivent l’installation de la ménopause, la perte moyenne osseuse se situe autour de 1 % par an. Une méta-analyse récente reprenant l’ensemble des publications entre 1966 et 1996 montre de façon significative que la pratique régulière de l’exercice musculaire peut prévenir voire inverser d’au moins 1 % par an la perte osseuse liée au vieillissement, à la fois au niveau vertébral et au niveau du col fémoral. Au-delà de 70 ans, l’activité physique seule ne suffit plus à s’opposer à cette perte osseuse de 1 % par an mais elle continue à exercer un effet bénéfique en réduisant (sans l’annuler complètement) l’importance de la perte osseuse.
Le risque relatif de fracture du col du fémur est diminué de 6 % pour chaque dépense énergétique équivalente à 1 heure de marche par semaine. Les femmes qui marchent au moins 4 h par semaine ont un risque diminué de 40 % par rapport aux femmes sédentaires marchant moins de 1 h par semaine. Ceci suggère que même une activité physique ayant un faible impact au niveau des contraintes imprimées à l’os comme la marche peut diminuer le risque de fracture. Il y aurait un gain de la résistance de l’os aux contraintes mécaniques qui serait beaucoup plus important que le gain de densité osseuse pour prévenir les fractures.
Sur le plan pratique, toutes les études s’accordent sur les points suivants :
• l’activité physique régulière doit s’accompagner d’un apport calcique d’au moins 1 g/j ;
• seuls les exercices avec mise en charge ont pu faire la preuve de leur efficacité (course à pied, musculation, marche à bon rythme, montée d’escaliers). Les exercices qui n’impliquent pas de mise en charge (natation, cyclisme) sont peu ou pas efficaces. À noter que la musculation est efficace car elle augmente la force du muscle donc l’importance de la contrainte mécanique imprimée par le muscle sur l’os ;
• les sites osseux réagissent localement en réponse à une stimulation mécanique alors que d’autres sites à distance ne bénéficient pas de manière significative de cette ostéoformation ;
• les femmes non ménopausées comme les femmes ménopausées peuvent profiter des effets bénéfiques de l’exercice musculaire régulier sur la densité osseuse ;
• les programmes d’entraînement peuvent être efficaces à la fois de façon prophylactique et de façon thérapeutique ;
• dans tous les cas, les bénéfices obtenus ne sont pas définitivement acquis. Ils ne persisteront qu’à condition que l’activité physique régulière soit maintenue.
Chez la femme ménopausée, les recommandations répertoriées dans la littérature suggèrent une pratique physique de 3 à 5 sessions hebdomadaires de 30 minutes à intensité modérée. Le type d’activité recommandé est la marche associée à des exercices de type renforcement musculaire 2 fois par semaine. Des effets bénéfiques en particulier sur la composition corporelle, le système musculo-squelettique, la condition physique, les profils lipidiques et glucidiques ont été obtenus avec ce type de programme.
Chez les femmes non ménopausées pratiquant une activité sportive intensive, l’insuffisance lutéale et les cycles anovulatoires représentent les troubles du cycle les plus fréquemment rencontrés. Cependant, la plupart de ces troubles ne sont pas diagnostiqués du fait de leur caractère asymptomatique (leur diagnostic ne peut être fait que sur des dosages plasmatiques ou urinaires d’hormones ovariennes). Chez les femmes qui pratiquent régulièrement la course à pied, la fréquence des troubles du cycle de type phase lutéale courte (durée des cycles<24 jours) ou oligoménorrhée (durée des cycles>35 jours) varie de 20 % à 40 % (voire 80 %) selon les auteurs, contre 9 % dans la population de femmes sédentaires. La fréquence de l’aménorrhée est plus élevée chez les sportives engagées dans les sports d’endurance (30 %), dans les sports dits « esthétiques » (patinage artistique, gymnastique) (35 %) et dans les sports à catégorie de poids (20 %) pour lesquels les contraintes mécaniques imposées par le poids sont une limite à la performance. La fréquence (autour de 12 %) chez les femmes qui pratiquent les sports non portés (natation et cyclisme) est proche de celle retrouvée dans la population générale. Ainsi, l’aménorrhée apparaît plus fréquente chez les sportives pour lesquelles la maîtrise de la composition corporelle est un facteur de réussite, et qui se soumettent à des régimes permettant de maintenir une masse grasse faible. En revanche, la fréquence des troubles du cycle n’est pas plus élevée chez les athlètes ayant une activité sportive intensive (jusqu’à 12 à 18 h d’entraînement par semaine) dans les sports dits techniques (golf, plongeon, curling, équitation, tir) ou les sports de balle. La fréquence des cycles anovulatoires laisse présager une fertilité moyenne diminuée dans une population sportive.
Les modifications de la fonction ovarienne chez la femme sportive sont d’origine centrale (hypothalamo-hypophysaire) en rapport avec le métabolisme énergétique et non pas avec le stress de l’exercice (hyperthermie, sécrétion prolongée et répétée de cortisol...). Les troubles du cycle résultent d’une inadéquation chronique entre apports alimentaires insuffisants et dépense énergétique augmentée liée à l’exercice musculaire. De plus, l’implication des facteurs nutritionnels dans la physiopathologie de l’hypoestrogénie de la sportive est quantitative et qualitative avec un déficit nutritionnel global par rapport aux dépenses énergétiques (-700 à -1 000 kcal/jour) et un déficit qualitatif en apports lipidiques (12 à 15 % de la ration alimentaire) chez l’athlète en aménorrhée. Il a été démontré que les exercices musculaires prolongés ou les situations d’entraînement intense qui rendent négative la balance énergétique se traduisent par une baisse de la concentration plasmatique de leptine. Cette évolution hormonale serait un des principaux signaux permettant d’informer l’ensemble de l’organisme et particulièrement le système nerveux central d’un déficit énergétique. L’administration de leptine recombinante pendant 3 mois chez des sportives en aménorrhée augmente la concentration des hormones hypothalamiques contrôlant l’activité ovarienne et améliore les fonctions de reproduction. La leptine, marqueur d’un niveau adéquat de réserves énergétiques, est donc nécessaire à une fonction de reproduction et à une fonction neuroendocrine normale.
Une autre conséquence de l’impact de l’entraînement physique intense sur les fonctions de reproduction est le retard pubertaire. Certains sports sont plus concernés que d’autres comme ceux imposant une maîtrise de la composition corporelle tels que la danse ou la gymnastique. Dans ce cas également, il est bien établi que ce retard est lié au déficit énergétique.
Paradoxalement, les femmes sportives en aménorrhée ont, du fait de l’arrêt de la production d’œstrogènes, des troubles de la fonction endothéliale (activation inflammatoire endothéliale) et un profil lipidique athérogène.
Cette aménorrhée s’accompagne d’un pronostic osseux extrêmement péjoratif car la carence œstrogénique induit une perte osseuse identique à celle observée chez la femme ménopausée et, surtout, cette perte osseuse est maximale les premières années suivant l’installation de l’aménorrhée. Il faut donc la dépister et la traiter précocement. Les troubles du cycle moins graves que l’aménorrhée (oligoménorrhée voire anovulation) ont également des conséquences au niveau osseux. Il existe une relation entre la sévérité des troubles du cycle et la densité minérale osseuse. De plus, le retour à des cycles réguliers après plusieurs années d’irrégularités menstruelles ne s’accompagne pas d’une restauration totale de la densité osseuse chez des femmes ayant une activité physique en charge.

L’activité physique d’intensité modérée intervient de manière très positive sur la santé des personnes âgées

La pratique régulière d’une activité physique permet de retarder ou de ralentir certains processus délétères liés au vieillissement. Le maintien des capacités physiques apparaît alors essentiel pour conserver l’indépendance et préserver la qualité de vie au cours de l’avancée en âge. Si les limitations fonctionnelles observées chez les personnes âgées peuvent être réduites par la pratique d’une activité physique, celle-ci peut ne pas être suffisante pour prévenir les incapacités.
La spirale du déclin fonctionnel qui se met en place au cours du vieillissement est en grande partie due au rôle de la fonction musculaire qui se dégrade progressivement et se caractérise par une réduction de la masse musculaire ou sarcopénie. La pratique d’une activité physique contribue donc au maintien de la fonction musculaire nécessaire à la mobilité chez le sujet âgé. Cependant, ce rôle de l’activité physique dans la préservation de la mobilité du sujet âgé n’a été que faiblement exploré : il a été montré qu’un niveau élevé d’activité physique à l’âge adulte est associé à une meilleure mobilité à un âge plus avancé comparé aux sujets moins actifs. En effet, une faiblesse musculaire est fréquemment associée à une mobilité réduite, un risque accru d’incapacité et à des chutes. Cette altération de la fonction musculaire est potentiellement réversible par le suivi de programme d’activité physique à base d’exercices contre résistance ou d’exercices en endurance. Il est aujourd’hui largement démontré que la force musculaire peut être augmentée par le biais de programmes d’entraînement même à un âge très avancé ; les gains pouvant être obtenus chez des sujets âgés étant similaires à ceux observés chez des adultes jeunes.
Les programmes combinant des exercices d’équilibre, de renforcement musculaire des membres inférieurs, de souplesse et/ou d’endurance permettent de réduire le risque de chutes chez le sujet âgé. Plusieurs études ont montré un taux d’incidence des fractures de col du fémur de 20 à 40 % plus faible chez les individus qui déclarent être physiquement actifs comparés à des sujets sédentaires.
L’activité physique n’agit pas seulement sur la santé physique des sujets mais également sur leur santé mentale en contribuant à leur bien-être et à leur qualité de vie. Les effets bénéfiques des programmes d’exercices sur la qualité de vie ont plus particulièrement été observés dans sa dimension physique. Plusieurs études permettent d’affirmer que l’activité physique a des effets bénéfiques sur le déclin cognitif. En effet, dans la plupart des études, les performances cognitives sont supérieures chez des sujets entraînés comparés à des sujets non entraînés, et ce quel que soit le statut cognitif de départ.
L’activité physique est également considérée comme un facteur de prévention des troubles cognitifs. L’amélioration de l’oxygénation du cerveau par une pratique régulière d’activité physique a un effet probant chez les personnes âgées au niveau de la capacité de réaction, de la mémoire, du raisonnement. L’effet global de l’exercice physique est faible mais significatif sur l’amélioration du fonctionnement cognitif. Les travaux portant sur un nombre important de sujets soulignent la corrélation entre l’augmentation des capacités aérobies et l’augmentation des performances cognitives. D’autres pistes explicatives sont envisagées comme la stimulation du système nerveux central, l’amélioration du système vasculaire et cardiaque, la stimulation sociale. Les derniers travaux constatent aussi bien des effets à court terme qu’à long terme. De là certains auteurs considèrent que l’activité physique est un élément de prévention contre la maladie d’Alzheimer et d’une façon plus générale contre les déficiences liées aux maladies chroniques ou au vieillissement.
Même chez le sujet âgé fragile, l’activité physique pourrait avoir un intérêt particulier par son action bénéfique sur différents paramètres. En effet, des études ont démontré des gains très significatifs à la fois sur le plan de la mobilité, de l’équilibre, de la souplesse et de la force musculaire mais également de la chute et des blessures associées, dans cette population.

Les connaissances actuelles permettent d’aboutir à des recommandations générales pour l’adulte

Les recommandations ont pour but de fournir des repères au public, aux professionnels de santé, aux décideurs des politiques de santé ainsi qu’aux organismes chargés de la surveillance de l’état sanitaire. Les recommandations en matière d’activité physique pour la population générale, ou pour des groupes spécifiques, découlent directement des connaissances sur la relation dose-réponse, entre un volume donné d’activité physique (la dose) et une modification physiologique permettant d’évaluer un effet sur un critère de santé (la réponse). La dose est habituellement définie par l’intensité, la fréquence et la durée par session de l’activité résultant en une quantité totale d’activité.
Avant les années 1980, les recommandations étaient fondées sur un modèle du type « entraînement physique – condition physique » et avaient pour objectif principal d’améliorer la capacité cardio-respiratoire (voire d’augmenter la performance). Le type d’activité préconisé dans ce cas était d’intensité relativement élevée et fondé sur l’évaluation de la fréquence cardiaque maximale.
À partir du milieu des années 1990, les recommandations correspondent à un modèle du type « activité physique – état de santé » et sont centrées sur l’activité physique nécessaire pour diminuer le risque de pathologie chronique en général et cardiovasculaire en particulier. Elles sont plus pragmatiques que les premières, s’adressent clairement à la population générale et en particulier à la catégorie des sujets inactifs ou peu actifs, dans une perspective de promotion de l’activité physique au sens large.
Les autorités de surveillance de l’état sanitaire des États-Unis, les CDC (Centers for Disease Control and Prevention) et l’ACSM (American College of Sport Medecine) ont publié en 1995 une première recommandation reprise dans le rapport du Surgeon General. Il est conseillé aux individus de tous les âges d’inclure un minimum de 30 minutes d’activité physique d’intensité modérée (telle que la marche rapide) dans l’idéal, tous les jours de la semaine. Il est également reconnu que, pour la plupart des personnes des bénéfices plus importants pour la santé peuvent être obtenus en pratiquant une activité physique d’intensité plus élevée ou de durée plus prolongée. Les recommandations américaines ont été adoptées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et par la Fédération internationale de médecine du sport (FIMS). Il faut souligner à quel point les recommandations visant la promotion de la santé (Health-Enhancing Physical Activity ou HEPA) diffèrent des recommandations plus anciennes centrées sur la capacité cardio-respiratoire. Plusieurs points sont à souligner : l’intensité recommandée est dite modérée (pratique de la marche rapide par exemple) ; le caractère quotidien de l’activité ; le concept d’accumulation de l’activité physique (la durée recommandée de 30 minutes peut être divisée en 2 ou 3 fois 10 minutes) ; de très nombreuses activités physiques de la vie quotidienne ou courantes effectuées dans le cadre professionnel, domestique (à la maison et à proximité du domicile) et lors des trajets/transports peuvent être prises en considération.
En 2007, le Collège américain de médecine du sport (ACSM) et l’Association américaine d’étude des maladies du cœur (American Heart Association, AHA) ont publié conjointement une mise à jour des recommandations d’activité physique pour le maintien de la santé de 1995.
Pour les adultes de 18 à 65 ans, il est recommandé une activité physique de type aérobie (endurance) d’intensité modérée pendant une durée minimale de 30 minutes 5 jours par semaine ou une activité de type aérobie d’intensité élevée pendant une durée minimale de 20 minutes 3 jours par semaine. Cette activité physique peut faire l’objet d’activités combinées. Par exemple : marcher d’un bon pas pendant 30 minutes 2 fois dans la semaine et pratiquer le jogging pendant 20 minutes 2 autres jours de la semaine.
Cette mise à jour permet de préciser certaines recommandations par rapport à celles de 1995 :
• la fréquence des activités d’intensité modérée est de 5 fois par semaine ;
• les activités d’intensité élevée sont explicitement incorporées dans les nouvelles recommandations. Les activités physiques d’intensité modérée et élevée sont considérées comme complémentaires en termes de bénéfice pour la santé ;
• des activités de différentes intensités peuvent être combinées pour atteindre le niveau recommandé ;
• la quantité recommandée d’activité physique de type aérobie est à ajouter aux activités physiques minimum de la vie quotidienne qui sont de faible intensité ou qui sont de durée inférieure à 10 minutes. En revanche, des activités de la vie courante qui seraient d’intensité modérée à élevée pratiquées pendant 10 minutes ou plus d’affilée sont comptabilisées pour atteindre le niveau recommandé. Cette notion est très importante, en particulier dans l’interprétation des questionnaires d’activité physique, par exemple dans les études de population ;
• dépasser le niveau minimum recommandé permet d’obtenir des bénéfices supplémentaires en termes de santé ;
• la durée minimum des sessions significatives est de 10 minutes ;
• les activités d’endurance (ou de type aérobie) sont différenciées des activités de renforcement musculaire (contre résistance) qui font maintenant partie des recommandations.
Il reste à mieux définir comment combiner de façon optimale les activités d’intensité modérée et les activités d’intensité élevée, en fonction des individus (âge, sexe, capacité physique...), des activités pratiquées et du résultat recherché.
L’inclusion d’exercices de renforcement musculaire dans les nouvelles recommandations résulte des données obtenues ces dernières années démontrant les effets bénéfiques de ce type d’exercice sur la force et l’endurance musculaire chez les sujets d’âge moyen, complétant ainsi les données connues chez les sujets âgés. Les nouvelles recommandations précisent que ces activités devraient être pratiquées au moins 2 jours, non consécutifs, par semaine, sous forme de 8 à 10 exercices utilisant les principaux groupes musculaires (avec 8 à 12 répétitions de chaque exercice).
En accord avec d’autres documents, il est mentionné que la prévention du gain de poids et la prévention de la reprise de poids après amaigrissement nécessiteraient chez l’adulte un niveau d’activité physique d’intensité modérée équivalent respectivement à 45-60 minutes/jour et 60-90 minutes/jour. Dans le cas spécifique du contrôle du poids, le contexte nutritionnel doit être pris en compte pour intégrer les apports et les dépenses énergétiques dans le raisonnement. Il faut souligner par ailleurs que le niveau minimum d’activité recommandé, par exemple 30 minutes par jour d’activité d’intensité modérée 5 jours/semaine, est déjà susceptible d’apporter des bénéfices même chez les sujets en surpoids. Enfin, la pratique d’une activité physique même modérée peut apporter des bénéfices majeurs sur l’état de santé chez les personnes en surpoids, indépendamment des effets de l’activité sur le poids.
En l’absence d’études prospectives ou d’études d’intervention randomisées bien conduites et suffisamment longues, nous ne disposons pas chez l’enfant, contrairement à l’adulte, de données permettant d’établir avec précision la quantité et le type d’activité physique nécessaires à un effet positif sur la santé immédiate et future des jeunes.
Il avait initialement été proposé d’utiliser les mêmes recommandations que celles destinées aux adultes (soit au moins 30 minutes par jour d’activité d’intensité modérée). Cependant, les conclusions de conférences de consensus récentes s’accordent aujourd’hui pour dire que ceci n’est probablement pas suffisant. Un minimum de 60 minutes (et non 30 minutes) par jour d’activités physiques d’intensité modérée à élevée est souhaitable chez les jeunes, sous forme de sports, de jeux ou d’activités de la vie quotidienne. La promotion d’un mode de vie physiquement actif doit être l’affaire de tous (famille, éducateurs physiques, écoles, centres médico-sportifs, collectivités...). Il faut noter que ces recommandations reposent sur le concept d’un seuil minimal ou d’un ensemble de recommandations supposées optimales pour la santé, concept pour lequel il n’existe pas à l’heure actuelle d’évidence épidémiologique ou expérimentale chez l’enfant.
En France, la limitation de la sédentarité et la promotion d’une activité régulière d’intensité modérée font partie des axes majeurs du Programme national nutrition santé (PNNS) mis en place par le ministère de la Santé en 2001, repris dans la Loi relative à la politique de santé publique du 9 août 2004. Les autorités de santé ont ainsi souhaité inclure une incitation à l’activité physique régulière dans la population générale dans le cadre du programme national sur la politique nutritionnelle. Il s’agit « d’augmenter de 25 % la proportion d’adultes pratiquant l’équivalent de 30 minutes de marche rapide par jour » ; de plus « la sédentarité étant un facteur de risque, elle doit être combattue dès l’enfance »20 . D’ici 2008, il s’agit de passer de 60 % à 75 % pour les hommes et de 40 % à 60 % pour les femmes, la proportion de personnes, tous âges confondus, faisant par jour l’équivalent d’au moins 30 minutes d’activité physique d’intensité modérée, au moins 5 fois par semaine.
En 2004, une campagne nationale de promotion de l’activité physique a été réalisée dans le cadre du PNNS21 . Ces actions sont complémentaires des campagnes d’incitation à la pratique sportive (« Sport pour tous ») réalisées par le ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Vie associative.

Des recommandations spécifiques ont été publiées pour l’adulte au-delà de 65 ans et chez le patient atteint de maladie chronique de plus de 50 ans

Chez l’adulte au-delà de 65 ans et chez le patient atteint de maladie chronique de plus de 50 ans, des recommandations spécifiques complétant les précédentes ont été publiées et mises à jour en 2007 par les mêmes Sociétés pré-citées, le Collège américain de médecine du sport et l’Association des cardiologues américains.
Les recommandations en termes de durée et fréquence apparaissent identiques à celles préconisées pour l’adulte jeune : réaliser des activités d’intensité modérée de type aérobie (en endurance) pour un minimum de 30 minutes par jour, 5 jours par semaine ou de forte intensité 20 minutes par jour, 3 jours par semaine.
Cependant, deux points sont mis en exergue. D’une part, l’individualisation de l’intensité de l’activité physique est préconisée grâce à l’utilisation d’un paramètre simple : une échelle visuelle analogique. Sur une échelle de 0 à 10, si la position assise est de niveau 0 et un exercice extrême, 10, une activité modérée correspond à 5-6. Elle produit une augmentation franche de la fréquence cardiaque et de la ventilation. Sur la même échelle, une activité intense correspond à une gradation de 7-8 et entraîne une augmentation importante de fréquence cardiaque et de ventilation. Compte tenu de l’hétérogénéité des niveaux d’aptitude physique des sujets âgés, pour certains d’entre eux une activité d’intensité modérée correspondra à la marche normale, pour d’autres à la marche rapide.
D’autre part, l’accent est mis sur la diversification des activités : au-delà de l’endurance (ou exercice aérobie), il faut ajouter le renforcement musculaire (activité contre résistance) particulièrement important chez le sujet âgé ou pathologique mais également les activités d’équilibre pour un maintien de la souplesse et une prévention des chutes. Des combinaisons d’activités modérées ou intenses peuvent être effectuées. Toutefois, ces exercices viennent en supplément des activités de la vie quotidienne ou des exercices d’intensité modérée durant moins de 10 minutes (tâches ménagères, marche du parking jusqu’au centre commercial...).
Au minimum deux fois par semaine sur des journées non consécutives, les sujets âgés doivent réaliser des renforcements musculaires (travail contre résistance) concernant les groupes musculaires principaux. Ces exercices peuvent être réalisés en soulevant des charges. L’intensité de l’exercice peut être modulée (considérée comme modérée ou élevée) selon les sujets en utilisant l’échelle analogique précédemment mentionnée. Il est recommandé de faire travailler 8 à 10 groupes musculaires (avant bras, bras, épaules, quadriceps droits, gauches...). Pour chaque groupe musculaire, il faut réaliser 10 à 15 répétitions.
Pour maintenir la souplesse nécessaire aux activités de la vie quotidienne, les sujets âgés doivent réaliser des exercices de souplesse (cou, épaule, taille, hanche...) au minimum 2 jours par semaine pendant au moins 10 minutes. Des exercices d’équilibre sont préconisés 2 autres jours par semaine (marcher sur une ligne tracée sur le sol, enjamber des plots placés sur cette ligne...) pour diminuer les risques de blessures consécutives aux chutes chez les sujets âgés les plus sédentaires présentant par exemple une maladie chronique.
En raison de la relation dose-réponse entre activité physique et Santé, les personnes âgées qui souhaitent améliorer leur aptitude physique et donc réduire le risque de maladies chroniques, prévenir la surcharge pondérale... bénéficieront d’une augmentation des minima d’activité physique aérobie ou de renforcement musculaire précédemment décrits. A contrario, plusieurs mois d’activités à un niveau inférieur à celui recommandé peuvent être appropriés pour certains sujets particulièrement âgés ou ayant une aptitude physique particulièrement basse. Dans tous les cas, les sujets âgés doivent être encouragés à auto-contrôler leurs activités (par exemple sur la base de l’échelle analogique) et à s’évaluer régulièrement pour reconsidérer leur programme en tenant compte de l’évolution de leur aptitude physique. Pour maintenir leur capital santé, les sujets âgés doivent maintenir une activité physique tout au long de leur vie.
Les sujets adultes sédentaires ne présentant pas de pathologie chronique doivent bénéficier d’un programme proposant une approche par paliers de niveau afin d’augmenter progressivement leur activité physique sur le long terme.
Les sujets adultes de plus de 50 ans et les sujets âgés présentant une maladie chronique pour lesquels une activité physique est une thérapeutique, doivent pratiquer cette dernière en respectant les règles de précaution inhérentes à cette maladie (exemple des maladies cardiovasculaires). Les sujets âgés doivent tenir compte des précédentes recommandations et avoir un programme d’activité physique adapté à leur pathologie, évoluant en fonction de l’amélioration ou de l’aggravation de celle-ci.

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