C’est la France qui a initié le règlement européen sur les médicaments orphelins en 1996, sous présidence française de l’Union européenne. C’est Simone Veil, ministre de la Santé, qui l’a introduit, à partir du travail effectué par Annie Wolf dans son ministère. Ce règlement a été adopté en 1999 grâce à son rapporteur Françoise Grossetête. à l’époque, une mission « médicaments orphelins et médicaments pédiatriques » avait été placée entre le cabinet ministériel et les services du ministère de la Santé. Il est regrettable que cette bonne méthode n’existe plus pour le Plan national maladies rares.
En 2006, c’est aussi la France qui avait initié un règlement sur l’usage pédiatrique des médicaments et qui l’avait porté. C’est à nouveau Françoise Grossetête qui était rapporteur au Parlement européen. à nouveau, les associations de maladies rares se trouvaient en première ligne pour promouvoir ce règlement, contrairement à ce qui s’est passé aux états-Unis oú il s’agissait plutôt des associations contre le cancer et le sida. L’année suivante, a été adopté le règlement sur les thérapies avancées, c’est-à-dire les thérapies géniques et cellulaires. Nous nous sommes battus en première ligne, car les fausses idées reçues étaient nombreuses.
Les associations de patients ont pu promouvoir ces trois règlements grâce au soutien de l’AFM-Téléthon et à ses bénévoles, qui ont financé 100 % de leur action de revendication.
Au cours de cette période, en 1997, la base d’information Orphanet est créée. Il s’agit aujourd’hui de la référence mondiale dans le champ de la connaissance des maladies rares.
Le mouvement européen d’associations de patients Eurordis a été créé la même année en France, par quatre associations françaises; l’AFM-Téléthon, Vaincre la mucoviscidose, AIDES et la Ligue Nationale contre le Cancer. Aujourd’hui, nous regroupons 800 associations dans toute l’Europe.
Je souhaiterais insister sur d’autres éléments. Les états-Unis abordent la problématique des maladies rares sous l’angle du développement des médicaments et de la recherche, et non de la santé publique. La stratégie que nous avons développée en Europe et en France a été inverse. En 2003, nous avons produit un document sur les maladies rares comme outil conceptuel de politique de santé publique. En France, c’est un rapport des états Généraux de la Santé en 1999 que j’ai rédigé pour Bernard Kouchner et un rapport de Bernard Barataud au Conseil économique et social en 2001, ont posé les bases d’une approche globale sur les maladies rares. C’est cette stratégie, développée d’abord en France avec le premier plan maladies rares de 2005, puis au niveau européen, qui inspire aujourd’hui le Canada et l’Australie, ainsi que des pays d’Amérique du Sud et d’Amérique centrale.
En 2008, la Commission européenne publie une Communication qui fait des maladies rares une priorité de ses différents programmes. Un an plus tard, le Conseil de l’Union Européenne publie une Recommandation fixant, aux états membres, l’objectif de développer des plans maladies rares d’ici 2013. Les plans effectivement adoptés varient dans 25 états membres, mais partagent tous un certain nombre de points communs, qui forment un socle sur lequel il est possible de bâtir : des centres d’expertise, une politique sur les registres, une politique d’investissement dans la recherche et une reconnaissance des patients atteints de maladies rares dans le système.
Le 9 mars 2011, une Directive sur les droits des patients aux soins transfrontaliers est adoptée, composée de quatre éléments clés pour les maladies rares :
- l’affirmation des maladies rares comme une priorité des soins transfrontaliers;
- la création de réseaux européens de référence;
- l’accès aux soins transfrontaliers;
- la collaboration européenne pour l’évaluation en santé HTA.
Suite au fort impact du règlement sur les médicaments orphelins, 1 300 désignations et plus de 130 médicaments avec statut orphelin ont été mis sur le marché et 24 réseaux européens de référence ont été mis en place. Ces réseaux sont formés par groupes thérapeutiques de maladies rares. Leurs missions sont claires et les patients sont impliqués dans la gouvernance. Rien de tout cela n’était évident.