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Med Sci (Paris). 35(3): 258–262.
doi: 10.1051/medsci/2019031.

Une nouvelle loi pour la fin de vie ?
Détour par l’Italie

Milena Maglio1*

1APEMAC, EA4360, Université de Lorraine, Université Franco-Italienne UFI, 9, avenue de la Forêt de Haye, 54500Vandœuvre-lès-Nancy, France
Corresponding author.
 

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Vignette (Photo © Inserm – Patrick Delapierre).

Depuis le 31 janvier 2018, l’Italie fait partie des États qui disposent d’une loi permettant à tout individu majeur d’exprimer ses volontés en matière de traitement, en prévision des jours où il pourrait être hors d’état de le faire [1].

Treize ans plus tôt, ce pas avait déjà été franchi par la France avec la loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, mieux connue sous le nom de loi Leonetti. Le 2 février 2016, la loi n° 2016-87, dite loi Claeys-Leonetti, créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie venait la compléter. Elle introduisait le droit à la sédation profonde et continue jusqu’au décès et donnait plus de poids aux « directives anticipées ». Désormais, ces dernières « s’imposent au médecin », « sauf en cas d’urgence vitale [...] » et lorsqu’elles « apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale » (art. 8) [2]. Elles ont, en outre, une durée illimitée dans le temps. Auparavant, le médecin devait simplement en tenir compte et leur validité se restreignait à trois ans. Ces deux éléments, associés à une certaine méconnaissance de la loi de 2005, ont souvent été désignés comme la raison du faible nombre de directives anticipées [3-5]. Malgré ces modifications, une campagne nationale d’information sur les droits relatifs à la fin de vie et la prise d’initiatives citoyennes, seuls 11 % des français auraient rédigé leurs directives anticipées1. Une certaine perplexité persiste au sein de la population, même parmi les personnes les plus informées sur le sujet [4, 6]. Selon le récent rapport d’évaluation de l’IGAS (Inspection générale des affaires sociales), les directives anticipées demeurent un droit « très peu exercé » [7]. Leur application est, elle aussi, controversée [8], car elles restent « peu contraignantes en pratique ». En somme, les directives anticipées n’ont « pas encore pleinement trouvé leur place ni leur utilité » [7].

La loi italienne, elle, est entrée en vigueur à l’heure où les critiques de la loi Claeys-Leonetti s’apprêtaient à fleurir. La fin de vie a été l’un des sujets les plus discutés lors des États généraux de la bioéthique de 2018 en France [9]. Il n’est pas rare d’entendre qu’on « meurt encore mal en France ». Deux mouvements s’opposent : d’une part, ceux qui plaident pour une nouvelle loi donnant « aux malades en fin de vie la libre disposition de leur corps et […] de leur destin2, » ; d’autre part, ceux qui affirment qu’il faudrait porter tous les efforts sur une réelle application de la loi de 2016. C’est la voie adoptée par l’IGAS. Tout en remarquant « les limites, les difficultés et les nuances qui demeurent à une bonne application de la loi », l’IGAS invite à « des ajustements limités des textes législatifs et réglementaires en vigueur » [7].

Un détour par l’Italie et une explication du contexte de sa nouvelle loi peuvent se révéler éclairants. Si les similitudes entre les deux textes sont nombreuses, des différences entre les pratiques et les cadres de pensée suggèrent des pistes de réflexion afin d’améliorer les conditions de la fin de vie dans l’un comme dans l’autre pays.

Le contexte d’émergence de la loi italienne

La discussion sur les directives anticipées (DAT3) ne date pas d’aujourd’hui de l’autre côté des Alpes [10]. Au Parlement, elle a débuté à peu près à la même époque qu’en France, en 2004, à la suite de l’examen de l’avis exprimé par le Comitato Nazionale di Bioetica (CNB) [11] – l’équivalent italien du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE). Dans son rapport, le CNB exhortait à la rédaction d’une législation sur le sujet. Mais, à la différence de la France, il a fallu plus de dix ans pour qu’une loi voie le jour. Un retour sur l’histoire de la bioéthique italienne dévoile les raisons de ce décalage.

« Bioéthique catholique » versus « bioéthique laïque »
Pendant de nombreuses années, en Italie, la réflexion bioéthique a été traversée par une opposition entre une « bioéthique catholique » (la bioéthique officielle du Magistère de l’Église de Rome et des penseurs qui en partagent les conceptions métaphysiques et anthropologiques) et une « bioéthique laïque » [12-14]. Le Magistère de l’Église catholique – en particulier sous les pontificats de Jean-Paul II (1978-2005) et de Benoît XVI (2005-2013) – a émis des documents sur l’euthanasie, sur la procréation médicalement assistée, sur l’avortement, etc. [15-18]. En 1995, l’encyclique Evangelium vitae mentionnait l’existence d’une opposition tranchée entre une « culture de la vie » et une « culture de la mort » [16]. En 1996, un groupe d’intellectuels italiens, à l’origine d’un Manifeste pour une bioéthique laïque [19], prenait le contre-pied de l’Evangelium vitae. Les jalons de l’opposition étaient posés. Les uns faisaient appel à l’indisponibilité de la vie, à l’existence d’interdictions absolues, d’actes intrinsèquement mauvais et à la loi morale naturelle4, (qui ne doit jamais être contredite par la loi juridique). Les autres évoquaient la disponibilité de la vie, le principe d’autonomie et de liberté individuelle, et le pluralisme éthique [12]. Le « catholicisme bioéthique » [20] a eu une influence évidente sur certains choix politiques5,. Les histoires de Piergiorgio Welby (en 2006)6, et d’Eluana Englaro (en 2009)7, – devenus des cas médiatiques et juridiques – en témoignent et illustrent l’opposition entre « paradigmes bioéthiques ». Comme en France pour les affaires Vincent Humbert et Vincent Lambert, ces cas ont été déterminants quant à la structuration de l’opinion publique et des débats parlementaires. Au lendemain de la mort d’Englaro, survenue à la suite de l’arrêt de l’alimentation et de l’hydratation artificielles (AAHA), catholiques et laïcs s’étaient accordés sur la nécessité d’une loi sur les DAT. Les objectifs des uns et des autres étaient pourtant bien différents. Les « catholiques » voulaient éviter que des « homicides d’État » se reproduisent, les « laïcs » voulaient permettre l’autodétermination des individus. À moins de deux mois de la mort d’Englaro, la proposition de loi Calabrò8 était approuvée au Sénat. Les catholiques l’accueillaient favorablement : elle suivait les principales indications de la Conférence épiscopale italienne (interdiction de l’euthanasie, du suicide assisté et de l’AAHA ; caractère seulement consultatif des directives anticipées, etc.). Pour les laïcs, il s’agissait, en revanche, d’« une loi contre le testament biologique » ; les espaces de choix se trouvaient réduits au nom de l’« alliance thérapeutique ». Or, cette alliance impliquait l’adhésion, le consensus, et excluait la divergence. Au nom de celle-là, le patient ne pouvait pas être en désaccord avec son médecin. Cette proposition de loi ne vit pas le jour. La chute du gouvernement Berlusconi interrompit le processus législatif. Les laïcs s’en réjouirent.
Tentatives de dialogue
L’année 2013 fut marquée par deux événements importants qui allaient, peu à peu, modifier la situation de la bioéthique italienne et permettre de poser des jalons en direction de la loi sur les DAT : une nouvelle législature et l’élection du pape François. Une loi sur les DAT fut proposée lors de la première assemblée du Sénat, alors que le pape François, contrairement à ses prédécesseurs, ne se prononçait pas sur les questions de bioéthique. Il voulait éviter tout sujet de désaccord [21]. À l’opposition entre une « culture de la vie » et une « culture de la mort », il préférait, en continuité avec les enseignements du Concile Vatican II, le dialogue entre catholiques et laïcs. Et en ce qui concerne la fin de vie, le dialogue semblait en bonne voie dans le document présenté au Sénat en septembre 2015 par le Parvis des Gentils – structure du Conseil pontifical de la culture ayant pour objectif la rencontre entre croyants et laïcs – en collaboration avec les sociétés savantes de réanimation et anesthésie et de soins palliatifs [22]. Ce document constitue le fondement de la loi actuelle. Celle-ci résulte de la fusion de 16 propositions de loi en un seul texte, par une Commission restreinte dont les membres proviennent de forces politiques différentes. Lors de son élaboration, elle reçoit plus de 3 000 amendements. Le risque que la loi ne voie pas le jour est élevé. Les élections sont proches. Les paroles prononcées par le Pape, en novembre 2017, sont interprétées par plusieurs politiciens italiens comme une exhortation pour une loi en faveur des DAT [23, 24]. En citant le Catéchisme de l’Église catholique, le Pape rappelle que « les décisions doivent être prises par le patient, s’il en a la compétence et la capacité ». Il insiste aussi sur la nécessité, au sein des sociétés démocratiques, de trouver des solutions qui contentent le plus de monde possible [25]. L’opposition entre une « bioéthique catholique » de l’indisponibilité de la vie et une « bioéthique laïque » de l’autonomie individuelle se trouble. [26]. La loi n° 219 « Normes en matière de consentement éclairé et de dispositions anticipées de traitement » [1] illustre cette évolution.
Une loi de « compatibilité entre différentes visions du monde » [9]

La volonté de concourir à la « compatibilité entre visions du monde différentes » est perceptible tout au long des 8 articles qui composent la loi n° 219, ainsi que dans son intitulé. Or, le titre d’une loi a pour rôle d’indiquer l’objet essentiel de son texte. Dans le texte italien, à la différence des lois Leonetti et Claeys-Leonetti, il ne s’agit pas de la fin de vie (expression qui est d’ailleurs absente tout au long du document), des droits des malades ou des personnes en fin de vie, mais du « consentement éclairé » et des « dispositions anticipées de traitement ». Deux sujets susceptibles de produire un certain consensus, du moins en apparence.

Trouver le consensus
Le consentement éclairé est ici le pilier et l’outil de « la relation de soin et de confiance entre le patient et le médecin ». « L’autonomie décisionnelle du patient et la compétence, l’autonomie professionnelle et la responsabilité du médecin » (art. 1,2) s’y rencontrent. Le médecin n’est pas un simple exécutant de la volonté du « patient-client ». C’est toujours la « relation de soin » (et non plus « l’alliance thérapeutique ») qui doit primer. Et celle-ci ne saurait se réduire ni à un document daté et signé, ni à une adhésion aveugle de la part du patient. Elle comporte un temps de discussion, au cours duquel la divergence entre points de vue différents peut émerger. À ce propos, le texte de loi précise que « le temps de la communication entre médecin et patient fait partie du temps du soin » (art. 1,8) et que « la formation initiale et continue des médecins et des autres professions soignantes doit inclure la formation en matière de relation et de communication avec le patient » (art. 1,10).

L’association entre le consentement éclairé et les DAT est donc logique. Pour prendre des décisions, que celles-ci soient anticipées ou non, il faut être informé, avoir une idée claire de la situation. Une DAT n’est rien d’autre qu’un consentement exprimé à l’avance pour une situation future (hypothétique ou probable). Autrement dit, les DAT sont une extension ou un prolongement du consentement éclairé. Cette formule a le mérite de dissocier les DAT de la fin de vie et de l’euthanasie, et de les rapprocher du consentement éclairé. Le législateur a probablement voulu éviter de relancer le débat entre catholiques et laïcs qui a longuement caractérisé la bioéthique italienne. Il souhaitait s’appuyer sur un principe éthique et juridique jouissant d’un large consensus dans l’espace national et international. La preuve en est qu’on ne trouve aucune tentative de définition du consentement éclairé dans la loi n° 219 [27].

L’expression employée de « dispositions anticipées de traitement » est, elle aussi, révélatrice d’une certaine volonté de « compatibilité entre différentes visions du monde ». Au fil des années, le choix des termes a été source de profonds débats et controverses entre « catholiques » et « laïcs ». Si les premiers préféraient le mot « déclaration » et les seconds le mot « directive », le texte de loi opte pour « disposition » [28]. Une « disposition », à la différence d’une « déclaration », a une valeur prescriptive et pas seulement descriptive et informative. Le médecin « est tenu au respect des DAT » (art. 4,5). En même temps, une « disposition », à la différence d’une « directive », n’est pas un ordre ou une indication définitive et hiérarchique auxquels il faut nécessairement se conformer. Les DAT n’imposent pas une contrainte absolue. Une des deux exceptions prévues par la loi française est introduite. Le médecin peut ne pas tenir compte des DAT lorsqu’elles « apparaissent manifestement incongrues ou non conformes à la condition clinique actuelle du patient », soit – le texte italien le précise – « lorsque des thérapies, non prévisibles au moment de la rédaction, existent et qu’elles sont en mesure de fournir des possibilités concrètes d’amélioration des conditions de vie » (art. 4,5). À la différence de la loi française, ce jugement ne revient pas au seul médecin (quoiqu’à l’issue d’une procédure collégiale) – ce qui peut réduire ultérieurement le caractère contraignant des directives anticipées [8] –, l’accord de la personne de confiance [fiduciario] est également requis9. Elle aussi fait partie de la relation de soin.

La tentative de dépasser les critiques généralement adressées aux DAT est évidente. La possibilité de désigner une personne de confiance permet de limiter la difficulté, souvent évoquée dans les débats citoyens [4], de prendre une décision aujourd’hui pour la personne que l’on sera demain. Son rôle est de contextualiser les DAT. De même, si les directives anticipées sont souvent accusées d’être une expression de l’individualisme et de faire du médecin un simple exécutant de la volonté du patient ou encore de provoquer la défiance entre le patient (ou ses proches) et l’équipe soignante, l’insistance sur la relation de soin permet de réduire la portée de telles critiques. L’art. 5, consacré à l’Advanced Care Planning (ou Pianificatione condivisia delle cure, en italien) ne peut que le confirmer10.

Accords et désaccords
Le caractère apparemment conciliateur de la loi n’élimine pas, pour autant, toute une série de controverses. Son texte en est même pétri.

Le premier sujet de désaccord se laisse percevoir dès le premier article, consacré au consentement éclairé. Comme la loi Claeys-Leonetti, la loi n° 219 précise que l’alimentation et l’hydratation artificielles sont des traitements, et qu’en tant que tels, ils peuvent être refusés ou arrêtés à la demande du patient. Le médecin ainsi que toute structure sanitaire, publique ou privée (y compris catholique11), doivent respecter la volonté d’arrêt ou de refus des traitements exprimée par le patient ou par ses DAT. Ce point a donné lieu à un deuxième sujet de controverse : l’absence de possibilité pour le soignant d’avoir recours à l’objection de conscience. La critique du caractère contraignant (quoique non absolu) des DAT est implicite. Les obstacles rencontrés par le père d’Englaro pour trouver une équipe et un service prêts à mettre en œuvre la décision d’AAHA, ainsi que les difficultés d’application de la loi n° 194 relative à l’interruption volontaire de grossesse, en raison du nombre élevé de médecins objecteurs, motivent le choix fait par le législateur. La volonté de concilier des visions du monde différentes est pourtant perceptible. Certes, le médecin est tenu de respecter un arrêt ou un refus des traitements et de faire tout son possible pour soulager les souffrances du patient (art. 2,1) – de sorte que le refus ou l’arrêt des traitements ne coïncide pas avec un abandon thérapeutique, comme cela a pu être le cas, en France, pour Hervé Pierra, au lendemain de la loi Leonetti. Le médecin n’est toutefois pas obligé d’accéder à une demande de traitement lorsqu’elle est « contraire à des normes de loi, à la déontologie professionnelle ou aux bonnes pratiques cliniques et d’assistance » (art. 1,6). Ce point est très important pour la compréhension de l’article 2 de la loi n° 219.

L’intitulé semble là aussi faire consensus entre les parties : « Thérapie de la douleur, interdiction d’obstination déraisonnable dans les soins et dignité dans les phases finales de la vie ». La terminologie adoptée et la disposition prévue rappellent la loi Claeys-Leonetti. Mais un élément de désaccord est introduit : la sédation palliative profonde et continue (sedazione palliativa profonda e continua, SPC). À la différence de la loi française, dans la loi italienne, elle n’est pas nécessairement associée à l’interruption des traitements. Il semblerait, en outre (en raison de l’art. 1,6 cité plus haut), que la SPC – tout comme la poursuite d’un traitement – ne puisse pas être demandée par le patient. En France, la SPC à la demande du patient a été présentée comme « une réponse au constat partagé sur le mal mourir [...] » et « l’assurance d’une mort apaisée » [7]. Elle s’est révélée – et les débats de ces derniers mois le confirment – « un compromis inadéquat conduisant à polariser le débat entre pro- et anti-euthanasie » [7, 29]. En raison de son histoire, l’Italie a donné une réponse différente.

Retour en France

En tentant de calmer certaines oppositions, le législateur italien a choisi de ne traiter la question de la fin de vie que de façon indirecte. Son attention s’est davantage portée sur la relation de soin. Tel est, nous semble-t-il, le principal apport de la loi n° 219. On peut abonder en ce sens et affirmer qu’en améliorant la relation de soin, on ne peut qu’améliorer les conditions de fin de vie. Ce n’est qu’à l’intérieur de cette relation que les moyens (même controversés) pour l’atteindre (AAHA, SPC, etc.) peuvent faire sens. On ajoutera ainsi, et en regard des débats qui ont eu lieu ces derniers temps en France, qu’une nouvelle loi sur la fin de vie, débouchant sur le suicide assisté ou l’euthanasie par exemple, ne suffira pas à garantir une « bonne mort », là où la relation de soin est défectueuse. Il importe donc de développer des outils permettant de l’améliorer. C’est encore dans cette perspective que les DAT peuvent trouver leur place et leur utilité [27]. Il ne s’agit plus de les considérer comme un « garde-fou contre l’agir médical » [4], mais comme une « aide à la relation de soin, dans sa définition et son développement » [30]12.

La loi italienne s’avère à certains égards paradoxale. Si elle permet bel et bien de mettre l’accent sur la relation de soin, les moyens qu’elle emploie pour impulser des changements en ce sens, ne font que l’éloigner de l’objectif recherché. On peut d’ores et déjà, grâce à l’expérience française cette fois13,, percevoir les limites d’une part trop belle laissée à la dimension juridico-légale du dispositif. En Italie, les DAT doivent être déposées chez un notaire ou attestées par un officier d’état civil de la mairie de résidence de l’intéressé14. En cas de conflit entre le médecin et la personne de confiance, la décision revient au juge (art. 3,5 ; 4,4). Les principaux protagonistes de la relation de soin (patient, médecin, personne de confiance, équipe, proches, etc.) semblent relégués à un second plan [31].

À l’heure actuelle, l’attention portée à la relation de soin offre une bouffée d’air par rapport à certaines oppositions radicales entre pro- et anti-euthanasie, entre indisponibilité de la vie et autonomie individuelle. Mais peut-être ne fait-elle que déplacer le problème. Le temps nous dira si ce mouvement permet effectivement d’améliorer les conditions de la fin de vie.

Liens d’intérêt

L’auteure déclare n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.

 
Footnotes
1 Selon un sondage réalisé pour le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie en janvier 2018.
2 C’est la position exprimée dans une tribune publiée dans Le Monde le 23 février 2018 à l’initiative de M. Touraine (LREM) et signée par 155 députés. À cette proposition de loi, ajoutons celles de Mme Fiat (FI) et M. Falorni (PS). Le 25 février, Libération publie une pétition signée par plus de 260 000 citoyens demandant une loi autorisant l’aide active à mourir. Le 10 avril, le Conseil économique, social, et environnemental publie un rapport intitulé Fin de vie : la France à l’heure des choix, demandant l’ouverture d’un droit à une « sédation profonde expressément létale ».
3 Pour « disposizioni anticipate di trattamento ([dispositions anticipées de traitement)] ».
4 Notion fondamentale dans la théologie catholique.
5 Le référendum de 2005 pour l’abrogation de la loi n° 40 du 19 février 2004 sur la procréation médicalement assistée en est l’exemple parfait. Le président de la Conférence épiscopale italienne ainsi que les organes d’information catholiques demandent aux citoyens de ne pas voter. Le taux d’abstention est de 84 % ; la consultation est donc nulle.
6 En 2006, Piergiorgio Welby, un homme atteint de dystrophie musculaire progressive, demande l’interruption de la ventilation mécanique et son accompagnement par une sédation par voie orale afin de ne pas souffrir des douleurs de l’asphyxie. Le docteur Mario Riccio réalise ses volontés. Cette sédation est considérée par le Magistère de l’Église comme un acte d’euthanasie.
7 En 2009, Eluana Englaro est en état végétatif persistant depuis 17 ans à la suite d’un accident de la route. Depuis 1999, son père demande l’arrêt de l’alimentation et de l’hydratation artificielles afin de respecter les volontés de sa fille.
8 La loi prend le nom du sénateur Raffaele Calabrò de Il Popolo della Libertà, parti de centre-droit fondé par M. Berlusconi.
9 Le rapport de l’IGAS suggère de rendre obligatoire, dans le cadre de la procédure collégiale, le recueil du témoignage de la personne de confiance.
10 Le rapport de l’IGAS, dans la recommandation n° 14, suggère de « développer les discussions anticipées comme support du dialogue avec les patients à l’hôpital et en ville ».
11 L’Église catholique romaine considère l’alimentation et l’hydratation artificielles comme des soins que l’on doit toujours garantir aux patients et qui en tant que tels ne peuvent jamais être interrompus.
12 En ce sens, le rapport de l’IGAS suggère de considérer les DAT comme « les supports d’un cheminement réalisé lors de discussions anticipées » ou un « aide à la décision ».
13 Afin d’éviter le recours aux tribunaux, le rapport de l’IGAS suggère d’instituer le droit au recours à un médiateur.
14 Des enregistrements vidéo sont prévus pour les personnes qui sont dans l’incapacité de les rédiger ou de se rendre personnellement à la mairie.
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