Fibromyalgie
2020
1-
Sémiologie de la fibromyalgie
Le symptôme clé de la fibromyalgie (FM) est une douleur diffuse chronique spontanée et une allodynie, c’est-à-dire une douleur provoquée par un stimulus qui est normalement indolore. Elle se caractérise néanmoins par un spectre de symptômes autres que la douleur qui interagissent étroitement entre eux (figure 1.1

). Les personnes souffrant de FM ne considèrent pas nécessairement cette dernière comme le symptôme le plus sévère. Ainsi, le niveau de fatigue, la raideur matinale, les troubles du sommeil et les troubles cognitifs sont ressentis comme plus élevés et invalidants par les patients (Borchers et Gershwin, 2015

).
Dans ce chapitre introductif, nous décrirons les caractéristiques cliniques de la FM telles qu’elles sont décrites par les patients dans la littérature, avant de les aborder séparément et de manière plus approfondie dans les chapitres suivants.
Douleur chronique généralisée et signes neurologiques
Description de la douleur par les patients
La majorité des douleurs spontanées sont musculo-squelettiques et sont localisées au niveau de l’appareil locomoteur (muscles squelettiques, tendons, articulations). Cette douleur généralisée a été décrite chez les deux tiers des sujets évalués dans l’étude menée par l’
American College of Rhumathogy (ACR) pour proposer les premiers critères de classification de FM (Wolfe et coll., 1990

). Souvent, les douleurs sont décrites comme diffuses, multifocales et migrantes dans différentes zones localisées comme les épaules, les bras, les mains, le dos, les cuisses, les jambes et les pieds. Les sujets souffrant de FM utilisent un grand nombre de termes qualitatifs pour décrire les douleurs spontanées dont ils souffrent. Ainsi, en utilisant le questionnaire
Mc Gill Pain Questionnaire (MPQ), les termes choisis pour évoquer la composante sensori-discriminative de la douleur sont les termes « pulsatiles », « lancinants », « tendus » et pour la composante affective de la douleur « épuisante » et « misérable » (Borchers et Gershwin, 2015

). De nombreuses autres sensations de douleurs peuvent être décrites par le patient, comme la sensation d’avoir des bleus, des muscles rétrécis, des brûlures et/ou des décharges électriques, évoquant une composante neuropathique, ou des douleurs profondes au niveau des os. Les douleurs provoquées par la pression (comme le port de chaussures ou le serrement de la main), parfois par le toucher, par une posture prolongée et/ou les mouvements répétitifs, sont sans doute les symptômes les plus pathognomoniques de la FM.
Les douleurs sont rapportées comme quotidiennes, continues et d’intensité fluctuante avec des périodes d’exacerbation. Des niveaux élevés de douleur sont associés avec de grandes fluctuations de la composante affective de la douleur, du niveau de fatigue et de l’humeur. Ainsi, une équipe américaine a rapporté une variabilité significative intra- et inter-individuelle de la douleur, de la fatigue et de l’humeur dans une évaluation de 256 participants atteints de FM qu’ils ont menée sur une période de 154 jours (Bartley et coll., 2018

). Vu l’importante hétérogénéité dans leur échantillon, ces auteurs proposent d’identifier des sous-groupes de patients basés sur les caractéristiques de variabilité de la symptomatologie de douleur, de fatigue et de l’humeur (faible variabilité, haute variabilité et variabilité mixte).
La majorité des sujets rapporte une exacerbation des douleurs pendant et surtout après les répétitions de certains efforts statiques, qui s’accompagne également d’une exacerbation de la fatigue et qui peut se prolonger pendant plusieurs jours (Mengshoel et coll., 1995

; van Santen et coll., 2002

; Jones et coll., 2006

; Mannerkorpi et coll., 2006

; Srikuea et coll., 2013

; Torgrimson-Ojerio et coll., 2014a

). Il existe toute une série de facteurs de modulation de la douleur que le sujet atteint de FM apprend à reconnaître afin de gérer au mieux sa pathologie (tableau 1.I

). Cependant l’exacerbation des douleurs n’est pas systématiquement prévisible et les douleurs, mais aussi les autres symptômes de la FM, sont décrits par les patients comme source de grande variabilité d’intensité d’un jour à l’autre et sur une même journée.
Tableau 1.I Facteurs d’aggravation et d’amélioration de la douleur listés par les patients atteints de fibromyalgie (adapté de Yunus, 2005
)
Facteurs d’aggravation de la douleur (et souvent autres symptômes)
|
|
o Changement de température
o Froid (parfois chaleur) – humidité
o Stress
o Pressions (port de vêtements ou chaussures)
o Émotions
o Difficulté de sommeil
o Exercices et/ou activités intenses
o Postures prolongées
o Mouvements répétitifs
o État hormonal (avant les règles – à la ménopause)
o Style d’adaptation à la douleur (dramatisation – lien contrôle externe)
o Générateurs périphériques persistants (ex. : tendinites, rachis avec souffrance articulaire postérieure...)
o Obésité, tabagisme
o Certains médicaments, comme les statines, par exemple
|
Facteurs d’amélioration
|
|
o Pacing (changement de rythme)
o Chaleur
o Relaxation
o Efficience personnelle
o Activité modérée (mouvements doux)
o Exercices d’étirement (?)
o Massage (non constant)
o Grossesse (?)
|
? : retrouvé de manière inconstante
Crises de douleurs (flare) dans la fibromyalgie
Des périodes d’exacerbation ou d’aggravation des symptômes sont fréquemment vécues par les sujets et se différencient de la symptomatologie quotidienne habituelle. Cet aspect de la sémiologie, rapportée par les praticiens en clinique courante, a fait l’objet de peu d’études rapportées dans la littérature (Cunningham et Jillings, 2006

). Vincent et coll. ont réalisé une étude qualitative auprès de 44 patients de FM (77 % de patientes) afin de mieux décrire ce phénomène rapporté fréquemment par les patients en clinique courante (tableau 1.II

, Vincent et coll., 2016

). Une analyse de contenu a été réalisée à partir d’un questionnaire qualitatif à composition non limitée proposé aux patients afin qu’ils décrivent comment ces crises divergent de la symptomatologie habituelle, quels en sont les facteurs déclenchants, et comment ils y font face.
N’importe quel stress, incluant le travail, les stress de la vie quotidienne mais aussi des émotions extrêmes sont rapportés comme facteurs déclenchants (tableau 1.II

). Le dépassement des limites physiques et/ou cognitives sur le lieu de travail, associé à des charges importantes de la vie quotidienne et de la vie sociale sont ainsi décrits comme des facteurs déclencheurs de crise, en particulier lorsqu’il n’y a pas de période de repos adéquate. «
Je me pousse trop loin, je tire sur l’élastique, je peux m’attendre à une crise douloureuse dans les prochains jours ». Des facteurs intrinsèques comme un sommeil de mauvaise qualité ou extrinsèques comme des changements brusques climatiques sont également rapportés par les patients comme des facteurs déclencheurs.
Tableau 1.II Investigation des facteurs causaux et stratégie de gestion des exacerbations (d’après Vincent et coll., 2016
)
|
Thème
|
Pourcentage de patients (n = 44)
|
Crises
| | |
Cause des crises
|
Stress
|
63,6
|
|
Dépassement des limites
|
43,2
|
|
Déficit de sommeil
|
25,0
|
|
Changement climatique
|
25,0
|
Symptômes de la crise
|
Symptômes de la grippe
|
31,8
|
|
Douleurs
|
86,4
|
|
Fatigue
|
34,1
|
|
Autres symptômes
|
100
|
Gestion de la crise
|
Traitement
|
75,0
|
|
Repos
|
56,8
|
|
Évitement de tout
|
22,7
|
|
Temporiser (attendre que la tempête passe)
|
18,2
|
Stratégies adoptées par les patients pour gérer la crise
| |
Thérapie physique
| |
4,5
|
Hydrothérapie
| |
2,3
|
Méditation
| |
15,9
|
Exercices respiratoires
| |
18,2
|
Massage
| |
13,6
|
Thérapie chaleur – froid
| |
13,6
|
Médicaments
| |
77,3
|
Une crise est décrite par les sujets comme une majoration de l’intensité des symptômes habituels avec un aspect continu et invalidant au quotidien, ce qui mène certains à être dans l’impossibilité de travailler pendant cette période. La douleur est si exacerbée qu’elle entrave le mouvement et le toucher «
C’est comme si j’avais été battue toute la nuit ». La fatigue est perçue comme un épuisement avec intolérance majeure au moindre effort «
C’est comme si j’avais couru un marathon ». Beaucoup de sujets décrivent une sensation d’être plongé dans une grippe épouvantable ; le niveau de concentration est très perturbé, la raideur musculaire s’amplifie. Sur le plan des réponses émotionnelles, les sujets rapportent des troubles de l’humeur avec notamment un sentiment d’irritabilité majeure (Vincent et coll., 2016

).
Le repos au lit, la chaleur, la réalisation d’exercices respiratoires et d’étirement, les stratégies de changement de rythme dite « pacing » et de fractionnement des activités sont primordiaux pour gérer cette crise alors que l’évitement des stimulations physiques, sociales et psychologiques peuvent s’avérer contre-productives. Les limites de cette étude qualitative, unique, sont liées au biais de recrutement possible car les sujets étaient suivis par un centre hospitalo-universitaire.
Symptômes autres que la douleur chronique diffuse
Fatigue
La fatigue est une sensation subjective définie comme étant un « état physiologique consécutif à un effort prolongé, à un travail physique ou intellectuel intense et se traduisant par une difficulté à continuer cet effort ou ce travail ». Il existe plusieurs composantes à la fatigue : la fatigue physique, qui peut être décrite comme un manque d’énergie ou une fatigabilité musculaire à l’effort ; la fatigue cognitive, qui renvoie à une difficulté ou une incapacité de se concentrer ou de penser ; et enfin, la fatigue émotionnelle, en lien avec un manque de motivation. Il est également possible de définir la fatigue par rapport à son impact sur la vie quotidienne, au niveau familial, au niveau professionnel, au niveau des activités sociales.
La fatigue est souvent identifiée à un des symptômes les plus invalidants au quotidien chez les sujets atteints de FM et décrite comme très perturbatrice. Les sujets décrivent notamment une intolérance à l’effort avec fatigabilité musculaire, et ont une perception de l’effort plus élevée pour des charges de travail similaires voire moindres comparées à des sujets témoins (Nielens et coll., 2000

; Kadetoff et Kosek, 2007

; Giske et coll., 2008

; Bachasson et coll., 2013

). Plus de trois quarts d’entre eux rapportent une fatigue persistant pendant plusieurs années d’après les études longitudinales (Wolfe, 1996

; Wolfe et coll., 1997

; Walitt et coll., 2011

; Vincent et coll., 2016

). Deux études mentionnent que les femmes rapportent un plus haut niveau de fatigue que les hommes, qui ont tendance à se focaliser sur la dimension de douleur (Yunus et coll., 2000

; Humphrey et coll., 2010

).
Peu de recherches ont cependant été réalisées à propos de la fatigue dans la littérature scientifique portant sur la FM comparée au symptôme douleur. Ceci peut s’expliquer par différentes raisons, dont les suivantes : absence de nomenclature standardisée à propos de la fatigue ; manque de compréhension des mécanismes physiopathologiques sur la fatigue en général ; absence de ligne de conduite évidente pour évaluer ce symptôme ; manque de stratégies thérapeutiques pour contrecarrer cette fatigue. Il semblerait que la fatigue dans la FM soit complexe et multi-systémique avec une dimension physique, cognitive et émotionnelle (Kratz et coll., 2019

). Elle serait influencée par de multiples facteurs comme l’intensité de la douleur, la détresse psychologique, une pauvre qualité de sommeil, un mode de vie sédentaire, et un faible niveau d’activité physique et de fonctionnement physique (Ericsson et Mannerkorpi, 2016

).
Les patients souffrant de FM rapportent très souvent un haut niveau de fatigue (échelle visuelle analogique ou EVA) comparé à des sujets témoins ou à des patients atteints de rhumatismes (Zautra et coll., 2007

; Roehrs et coll., 2013

). L’intensité de la fatigue est rapportée comme plus élevée que le niveau de douleur sur ces échelles. Enfin, cet état de fatigue présente une grande variabilité d’un jour à l’autre. De nombreux termes descriptifs sont utilisés par les sujets atteints de FM pour décrire leur fatigue : «
faiblesse dans les muscles » non proportionnelle à l’effort exercé, «
pas améliorée par le repos » mais nécessitant de faire les choses avec lenteur, «
cet état de fatigue est imbriqué à la douleur ».
Jusqu’à présent, aucune mesure spécifique de la fatigue dans la FM n’a été rapportée dans la littérature, bien que des questionnaires existent et aient été validés dans le cadre du cancer ou de maladies rhumatologiques. Les questionnaires généraux utilisés dans la littérature sont le niveau d’intensité de la fatigue dans le
Fibromyalgia Impact Questionnaire (FIQ), le
Multidimensional Fatigue Inventory (MFI), le
Fatigue Severity Scale (FSS), le
Multidimensional Assessment of Fatigue (MAF), le
Chalder Fatigue Questionnaire. Récemment, le questionnaire MDF-Fibro-17, intégrant 5 dimensions de la fatigue (expérience globale de fatigue, fatigue cognitive, fatigue physique, motivation et impact sur la fonction) et développé à partir de travaux de recherche qualitative sur la FM, a été proposé comme instrument multidimensionnel utilisable pour les essais cliniques (Li et coll., 2017

; Morris et coll., 2017

).
Fibromyalgie et plaintes cognitives
Au moins 75 % des sujets atteints de FM rapportent des difficultés de concentration et d’attention, des oublis ou évoquent un ensemble de troubles cognitifs, souvent décrits dans la littérature anglophone par le terme de «
fibrofog », et plus de la moitié mentionnent une sévérité de ces symptômes supérieure à 6 sur une EVA de 1 à 10 (Leavitt et coll., 2002

; Zachrisson et coll., 2002

; Katz et coll., 2004

; Rutledge et coll., 2009

; Schaefer et coll., 2011

; Borchers et Gershwin, 2015

). Les personnes atteintes de FM considèrent entre autres que la fatigue a un impact important sur les performances cognitives (Veldhuijzen et coll., 2012

; Oncu et coll., 2013

). Le fonctionnement cognitif dans la FM a fait l’objet de nombreux travaux, et nous renvoyons le lecteur au chapitre « Atteinte cognitive dans le syndrome fibromyalgique » pour l’analyse de ces derniers.
Troubles du sommeil
Entre 70 et 90 % des patients souffrant de FM rapportent un sommeil de mauvaise qualité dans les nombreuses études ayant évalué ce symptôme. Les résultats d’études longitudinales soulignent les liens complexes existant entre la douleur chronique et les troubles du sommeil dans la FM. Ainsi, une nuit de mauvaise qualité prédit l’intensité de la douleur le lendemain et un niveau de douleurs plus élevé peut détériorer la qualité du sommeil (Affleck et coll., 1996

). Comme pour les fonctions cognitives, nous renvoyons le lecteur à un autre chapitre de cette expertise (« Perturbations du sommeil et troubles psychiatriques dans le syndrome fibromyalgique ») pour une analyse des travaux sur les troubles du sommeil dans la FM.
Troubles anxieux et dépressifs
Basé sur des entretiens psychiatriques structurés (évaluation des troubles de l’axe 1), les sujets atteints de FM ont une prévalence le long de la vie de troubles de l’humeur, et en particulier de la dépression, entre 20 et 86 %, et 13 à 48 % des sujets ont un diagnostic de trouble dépressif majeur (Borchers et Gershwin, 2015

). Tout comme le sommeil, les interactions entre douleur chronique et troubles de l’humeur apparaissent bidirectionnelles.
Les troubles anxieux sont présents au moment de la consultation chez 27 à 60 % des patients atteints de FM et ont une prévalence sur le long de la vie quasi similaire (Epstein et coll., 1999

; Malt et coll., 2000

; Thieme et coll., 2004

). Ils seraient corrélés à un nombre important de symptômes somatiques, la présence de symptômes similaires à un état de stress post-traumatique, ou à un faible niveau d’activité ou de condition physiques (Thieme et coll., 2004

), en particulier une diminution de la souplesse des membres supérieurs, de la capacité cardiorespiratoire et de la force musculaire (Córdoba-Torrecilla et coll., 2016

). L’analyse de la littérature disponible sur les troubles mentaux dans la FM est réalisée dans le chapitre (« Perturbations du sommeil et troubles psychiatriques dans le syndrome fibromyalgique »).
Autres symptômes et plaintes rapportés par les patients
Raideur
Une sensation de raideur anormale est rapportée par 72 à 95 % des personnes atteintes de FM (Jacobs et coll., 1996

; Quimby et coll., 1998

). Celle-ci s’accentue au début de matinée et après des périodes d’inactivité et des postures prolongées. La raideur ne semble pas être un symptôme influençant le degré de sévérité de la FM rapportée par le patient. Une étude a montré que cette sensation de raideur majorée, en particulier était objectivée par une augmentation significative de la raideur passive élastique et visqueuse
1
L’élasticité est caractérisée par la capacité des tissus mous à revenir à leur état initial après un étirement : la raideur élastique d’un muscle au repos peut résulter d’une composante temps-indépendante comme celle d’un ressort. La viscosité correspond à la résistance du matériel à se déformer : la raideur visqueuse d’un muscle au repos peut résulter d’une composante temps-dépendante comme celle d’un amortisseur, et est très sensible à la vitesse d’étirement.
au niveau de la cheville chez 60 patientes atteintes de FM d’âge jeune et moyen comparées à des sujets sains (Dierick et coll., 2011

).
Symptômes neurologiques
Entre 26 et 95 % des patients souffrant de FM rapportent des paresthésies
2
La paresthésie est un trouble du sens du toucher dont la particularité est d’être désagréable mais non douloureux.
ou des dysesthésies
3
La dysesthésie est une diminution ou au contraire une exagération de la sensibilité.
(Rehm et coll., 2010

; Clauw, 2014

). Ces symptômes neurologiques peuvent s’associer à des scores élevés aux questionnaires utilisés pour évaluer la présence et le type de douleurs neuropathiques comme le
Neuropathic Pain Symptom Inventory (Bouhassira et coll., 2004

; Uceyler et coll., 2013

). D’autres symptômes suggérant une réponse sensorielle globale excessive sont également rapportés comme une hypersensibilité à la lumière vive, aux bruits sourds ou encore aux odeurs (Clauw, 2014

). Des mesures psycho-physiques semi-objectives de cette hypersensibilité ont ainsi montré une diminution des seuils douloureux pour les stimuli thermiques, électriques, auditifs et olfactifs (Lautenbacher et coll., 1994

; Kosek et coll., 1996

; Lautenbacher et coll., 1997

; Desmeules et coll., 2003

; Carrillo-de-la-Peña et coll., 2006

; McDermid et coll., 2006 ; Geisser et coll., 2008

; Blumenthiel et coll., 2011

; Tampin et coll., 2013

; Amital et coll., 2014

).
Troubles de l’équilibre et chutes
Les personnes souffrant de FM peuvent décrire des troubles de l’équilibre avec sensations vertigineuses, faiblesse, maladresse et chutes fréquentes. Les chutes sont très souvent d’origine multifactorielle et liées entre autres à une diminution de la force des membres inférieurs et à une diminution de la dorsiflexion de la cheville pendant la phase d’appui et une augmentation de la flexion plantaire pendant la phase de décollement des orteils (Goes et coll., 2015

).
Le nombre de chutes est associé avec la peur de la chute, des difficultés d’équilibre rapportées, des perturbations du test d’équilibre avec yeux fermés, de l’allodynie au toucher, du niveau d’anxiété, l’impact de la fibromyalgie et de la perturbation de la qualité de vie, et enfin l’utilisation de certains médicaments (psychotropes et antalgiques) (Collado-Mateo et coll., 2015

).
Impact sur les activités de la vie quotidienne
Les activités de la vie quotidienne sont décrites comme perturbées par les patients. Elles peuvent correspondre à des activités où la force musculaire est diminuée, comme serrer la main ou ouvrir un couvercle, où l’endurance musculaire est diminuée, comme travailler avec les bras levés, ou des activités où la consommation énergétique est importante comme porter, courir ou monter les escaliers (tableau 1.III

) (Henriksson et coll., 2005

).
Tableau 1.III Activités rapportées par les patients comme impossibles ou très difficiles à réaliser (adapté de Henriksson et coll., 2005
)
Activité
|
Pourcentage de patients (n = 26)
|
Porter
|
58 à 90
|
Monter les escaliers
|
40 à 53
|
Marcher
|
11 à 29
|
Courir
|
60 à 74
|
Travailler avec les bras levés
|
68 à 85
|
Serrer la main
|
26 à 40
|
Ouvrir un couvercle
|
56 à 65
|
Il est à signaler que les patients indiquent qu’ils sont cependant capables, si cela est nécessaire, de réaliser ce type d’activités mais au prix d’une exacerbation de la douleur et de la fatigue durant plusieurs jours après ces activités (Srikuea et coll., 2013

; Torgrimson-Ojerio et coll., 2014b

). Une plus ample analyse de la littérature disponible sur ce sujet d’importance est réalisée dans le chapitre « Impact sur la qualité de vie des patients ».
Conclusion
La FM est une condition de santé hétérogène sur le plan clinique avec une grande variabilité dans l’intensité des symptômes, dans les réponses psycho-physiologiques au stress, dans les patterns de gestion de la condition de santé et des réponses aux traitements. Cette hétérogénéité clinique peut laisser supposer une hétérogénéité dans les mécanismes physiopathologiques de la symptomatologie selon les patients.
Comme toute condition de douleur chronique, elle ne suit pas une évolution statique mais se caractérise par une grande fluctuation des symptômes dans une même journée et d’un jour à l’autre. Cette nature dynamique des symptômes, notamment de la douleur et de la fatigue, s’accompagne de modifications comportementales. Toute la complexité repose sur l’estimation de la sévérité, pour laquelle il ne semble pas exister d’outils validés et de consensus international pour évaluer de façon optimale le grade de sévérité (Hauser et coll., 2018

) (voir chapitre « Impact sur la qualité de vie des patients » pour l’analyse sur les outils disponibles). Une classification simple clinique serait de catégoriser la condition comme faible, modérée ou sévère pour mettre en route un plan de traitement de réhabilitation.
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