Fibromyalgie

2020


ANALYSE

7-

Syndrome fibromyalgique
et travail

De nombreuses questions se posent sur les liens entre le syndrome fibromyalgique (SFM) et les activités professionnelles car le SFM survient le plus souvent chez des personnes en âge de travailler et peut retentir sur la capacité à poursuivre son activité professionnelle ou la qualité de vie au travail. Cependant, les études sur le SFM et le milieu de travail sont relativement rares. C’est pourquoi nous avons également pris en considération la littérature concernant la douleur chronique étendue (ou douleur chronique diffuse).

Prévalence du syndrome fibromyalgique en milieu de travail

Très peu d’études ont été réalisées sur de grandes populations de travailleurs représentatives de la population active ou dans de grandes entreprises. Les études disponibles sont le plus souvent des études transversales de faible puissance portant sur des populations sélectionnées. Leurs résultats sont difficilement généralisables compte tenu de la diversité des contextes : 34 travailleurs de la métallurgie brésilienne caractérisés par une prévalence élevée des SFM (Gallinaro et coll., 2001renvoi vers), 343 travailleurs du secteur de la santé dans la région d’Hiroshima au Japon avec prévalence élevée des douleurs chroniques étendues chez les femmes (30,9 %) et les hommes (17,3 %) alors que la prévalence des SFM diagnostiqués selon les critères ACR 1990 est modérée, respectivement 2,0 % et 0,5 % chez les femmes et les hommes (Toda, 2009renvoi vers). Une étude de puissance modérée réalisée auprès de 655 travailleurs de l’industrie textile turque rapporte une prévalence globale de SFM plus élevée (7,3 % ; 9,0 % chez les femmes et 0,8 % chez les hommes ; Cobankara et coll., 2011renvoi vers).
Une étude, relativement ancienne, réalisée auprès de 7 217 travailleurs finlandais âgés de plus de 30 ans enrôlés dans la grande cohorte mini Finland Health Survey1 rapporte des chiffres plus faibles de prévalence des SFM pour les secteurs de l’agriculture (1,48 %), de l’industrie (0,46 %) et des services (0,77 % ; Mäkelä et Heliövaara, 1991renvoi vers). Cette étude montre une prévalence plus élevée pour les niveaux d’éducation bas (2,72 % pour niveau inférieur à l’élémentaire) et les travailleurs exposés aux tâches physiquement pénibles (1,0 %). La prévalence est plus élevée chez les personnes sans emploi (1,85 %) que dans l’ensemble du groupe (0,75 %) (Mäkelä et Heliövaara, 1991renvoi vers). La plus forte prévalence du SFM chez les inactifs que les actifs est observée pour d’autres syndromes douloureux chroniques (Carton et coll., 2013renvoi vers ; Putrik et coll., 2018renvoi vers). Elle peut s’expliquer par un phénomène de sélection dit « effet travailleurs sains », les travailleurs souffrant de SFM tendant à être exclus du monde du travail.

Relations entre syndrome fibromyalgique et activité professionnelle

Il n’existe pas dans la littérature de données en faveur d’une origine professionnelle du SFM : il n’y a pas d’étude montrant que le SFM puisse être directement lié aux conditions de travail (occupational disease) et il n’y a pas de données montrant que le SFM soit lié au travail (work-related disease) au sens de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), c’est-à-dire une affection pour laquelle l’environnement de travail et la réalisation du travail contribuent de manière significative, mais non exhaustive, à son étiologie multifactorielle. A contrario, de nombreuses études montrent que poursuivre une activité professionnelle est associé à un meilleur état de santé chez les personnes atteintes de SFM (Reisine et coll., 2003renvoi vers, 2004renvoi vers ; Palstam et coll., 2012renvoi vers ; Rakovski et coll., 2012renvoi vers). Cependant, s’agit-il d’un effet travailleurs sains ou d’un effet protecteur de l’activité professionnelle ? Une étude de cohorte de bonne qualité méthodologique a suivi pendant 5 ans 287 femmes atteintes de SFM dont la moitié était professionnellement active (Reisine et coll., 2008renvoi vers). Les femmes professionnellement actives à l’inclusion avaient un meilleur état de santé (moindre fatigue et moins de symptômes anxio-dépressifs) que les femmes atteintes de SFM inactives, excepté pour la douleur. L’étude montre que cet avantage se maintient au cours du suivi, le déclin de l’état de santé étant moindre chez les femmes actives que chez les femmes inactives (Reisine et coll., 2008renvoi vers). L’effet positif du travail dans cette étude semble plus net pour les catégories socio-professionnelles élevées, bénéficiant probablement de meilleures conditions de travail et de vie. Ce dernier point est en accord avec les données de la littérature (Henriksson et coll., 2005renvoi vers ; Löfgren et coll., 2016renvoi vers).
Si l’activité professionnelle peut améliorer l’état de santé des personnes atteintes de SFM, des conditions de travail pénibles connues pour favoriser la survenue de troubles musculo-squelettiques (TMS) (Roquelaure et coll., 2006renvoi vers ; Roquelaure, 2015renvoi vers) peuvent à l’inverse contribuer à révéler l’existence d’un SFM ou à aggraver l’intensité ou la durée des douleurs et de la fatigue chez les travailleurs atteints de SFM (Guymer et coll., 2016renvoi vers ; Palstam et Mannerkorpi, 2017renvoi vers). Ceci pourrait expliquer les résultats d’un travail mené par Perrot et coll. réalisé auprès de 4 516 patients atteints de SFM montrant que le travail serait perçu comme aggravant leur syndrome par 63 % d’entre eux2 . C’est pourquoi, s’il est probable qu’exercer ou poursuivre une activité professionnelle a un réel bénéfice physique, psychologique et social pour certaines personnes atteintes de SFM, cet effet peut varier en fonction du contexte clinique et des situations individuelles et professionnelles. Ainsi, si le SFM n’est pas d’origine professionnelle, il peut dans certains cas être aggravé par le travail.
Le SFM peut retentir sur les capacités fonctionnelles des patients et limiter leur participation aux activités quotidiennes ou professionnelles. La douleur, les troubles cognitifs et la fatigue caractéristiques du SFM sont sources à des degrés divers d’incapacité au cours des activités domestiques, sportives ou professionnelles (se rapporter aux autres chapitres). Ainsi, les tâches domestiques et surtout professionnelles impliquant des efforts musculaires répétés ou d’élever les bras au-delà de l’horizontale sont difficilement supportées, ce qui peut conduire à une incapacité de travail prolongée (Henriksson et coll., 2005renvoi vers). Néanmoins, les études sur le retentissement professionnel des SFM sont relativement rares et souffrent généralement de limites méthodologiques importantes. Il s’agit le plus souvent d’études transversales de faible puissance ne permettant pas de jugement de causalité. Comme le souligne le rapport de l’Académie de médecine en 20073 , les études sur le retentissement social et professionnel du SFM concernent généralement des formes sévères suivies dans des centres de prise en charge de la douleur ou dans des services spécialisés. Il est probable que les personnes atteintes de formes légères de SFM, peu ou non incapacitantes, ne consultent pas, ce qui aurait tendance à majorer les estimations de la fréquence de l’incapacité liée aux SFM. À l’inverse, les études conduites en milieu de travail sont exposées au biais dit « effet travailleurs sains » tendant à minorer les estimations de l’incapacité, les personnes les plus sévèrement atteintes étant exclues du milieu professionnel comme évoqué plus haut. De plus, la plupart des études n’utilisent pas d’outils standardisés pour évaluer les capacités fonctionnelles des patients atteints de SFM (Mannerkorpi et Ekdahl, 1997renvoi vers) ou les caractéristiques des situations de travail.
La présentation clinique du SFM et son impact sur les capacités fonctionnelles sont très variables non seulement d’un patient à l’autre mais aussi d’un jour à l’autre pour un même patient (Henriksson et coll., 2005renvoi vers). Cette variabilité symptomatique et de l’état fonctionnel est une caractéristique importante du SFM qui doit être prise en considération en milieu de travail et notamment lors de l’évaluation de son retentissement sur la capacité de travail (Henriksson et coll., 2005renvoi vers ; Palstam et coll., 2013renvoi vers). Dans nombre d’entreprises et administrations, les modes de production de biens et de services reposent sur des organisations du travail et pratiques managériales offrant peu de marges de manœuvre aux travailleurs pour moduler leur activité en fonction du contexte de la situation de travail et des aléas de production. Ceci entrave les possibilités des travailleurs à réguler leur activité de travail et à ajuster leurs tâches et gestes en fonction de leur état fonctionnel, qu’il s’agisse de personnes atteintes de SFM, de douleurs chroniques étendues, ou de maladies chroniques. L’absence de possibilité de modulation des efforts et des gestes ou du temps de travail et des pauses en fonction des variations de l’état fonctionnel est une source importante de handicap de situation4 dans les pathologies chroniques.

Participation aux activités professionnelles des personnes atteintes
de syndrome fibromyalgique

Le taux de participation aux activités professionnelles des personnes atteintes de SFM est variable selon les pays, les systèmes sociaux et les définitions de la participation au marché du travail. Selon une revue systématique récente, le taux d’emploi varie entre 34 et 77 % selon les pays (Palstam et Mannerkorpi, 2017renvoi vers). L’analyse secondaire des données de l’enquête américaine « 2007 National Fibromyalgia Association Questionnaire Study » réalisée auprès de 1 702 personnes atteintes de SFM rapporte un taux d’emploi de 50 % (Rakovski et coll., 2012renvoi vers). Compte-tenu des différences socio-économiques, réglementaires et de marché du travail entre les pays, les comparaisons internationales sont difficiles à interpréter. Néanmoins, on observe globalement que le taux d’activité professionnelle des personnes atteintes de SFM est inférieur à celui de la population générale. Ceci s’explique non seulement par l’impact du syndrome sur les capacités de travail, mais aussi par l’impact des conditions de travail sur l’intensité des symptômes fibromyalgiques réduisant également les capacités fonctionnelles (Rakovski et coll., 2012renvoi vers). À l’instar de ce qui est observé pour les douleurs chroniques étendues et les TMS, les patients atteints de SFM appartenant aux catégories peu qualifiées sont plus exposés aux contraintes physiques du travail et au manque d’autonomie dans le travail que les catégories socioprofessionnelles plus élevées. Ces catégories socioprofessionnelles peu qualifiées disposent de peu de marges de manœuvre. Elles sont les plus exposées aux phénomènes d’intensification des conditions de travail liée à l’instauration de nouvelles méthodes d’organisation du travail et de pratiques managériales visant à accroître la rationalisation et la flexibilité des processus de production et d’emploi dans l’industrie et les services (Westgaard et Winkel, 2011renvoi vers). Ces inégalités sociales se conjuguent à des inégalités de genre, car les femmes sont plus fréquemment exposées aux tâches parcellaires réalisées sous contraintes de temps avec de faibles marges de manœuvre pour faire face aux contraintes des tâches (Messing et coll., 2009renvoi vers ; Roquelaure, 2015renvoi vers ; Chappert et Théry, 2016renvoi vers).
Les taux de participation aux activités professionnelles des patients atteints de SFM suggèrent que nombre d’entre eux réalisent néanmoins les ajustements nécessaires ou bénéficient de marges de manœuvre professionnelles suffisantes pour rester en emploi malgré la limitation de leurs capacités fonctionnelles. Ceci est attesté par des études cliniques montrant qu’un tiers à deux tiers des personnes atteintes de SFM poursuivent leur activité professionnelle malgré des symptômes pouvant limiter leurs capacités fonctionnelles en situation de travail mais aussi hors de leur travail (Henriksson et coll., 2005renvoi vers ; Löfgren et coll., 2016renvoi vers). Selon une étude canadienne portant sur 100 personnes atteintes de SFM, 76 personnes atteintes de douleurs chroniques étendues et 375 sujets témoins indemnes de douleurs chroniques, les symptômes limitant le plus l’activité professionnelle déclarés par les patients sont la douleur, la fatigue, les troubles de la mémoire, les difficultés de concentration et les troubles attentionnels (White et coll., 1999renvoi vers). Les variables prédisant l’incapacité au travail sont, selon cette même étude, un score élevé au Fibromyalgia Impact Questionnaire (FIQ), avoir été diagnostiqué comme atteint de SFM, un sommeil non réparateur et un travail physiquement pénible (White et coll., 1999renvoi vers). Outre l’existence de douleur, fatigue, troubles du sommeil, les travailleurs atteints de SFM sont gênés par la réduction de la force musculaire statique (isométrique) et dynamique (isocinétique), ainsi que par une moindre endurance musculaire. La diminution de la force maximale ou de l’endurance maximale qui peut atteindre 50 % augmente la charge relative, c’est-à-dire le taux d’engagement des capacités musculaires, pour réaliser une tâche requérant de la force ou de l’endurance comparativement à des travailleurs sains pour lesquels le travail est conçu (Messing et coll., 2009renvoi vers ; St-Vincent et coll., 2011renvoi vers). Ceci explique que les travailleurs atteints de SFM rapportent être confrontés à des difficultés de réalisation des tâches nécessitant force et endurance musculaires plus souvent que les travailleurs sains. Ils sont également plus souvent confrontés à une gêne dans les activités professionnelles telles que le travail répétitif sous contraintes de temps, le travail avec les bras en élévation (y compris l’écriture au tableau), la manutention manuelle de charges lourdes et les manipulations répétitives de charges modérées (industrie, service aux particuliers, bibliothèque, aides maternelles, etc.), la montée d’escaliers et le travail statique prolongé observé dans les tâches de bureautique (Henriksson et coll., 2005renvoi vers ; Larsson et coll., 2018renvoi vers). Néanmoins, il est difficile de faire la part, dans les données de la littérature, de ce qui relève spécifiquement des SFM par rapport aux autres syndromes douloureux, tels que les douleurs chroniques étendues, les TMS liés au travail ou les pathologies rhumatismales chroniques. Une étude suédoise multicentrique de bonne qualité méthodologique a comparé les perceptions de l’activité professionnelle chez des femmes atteintes de SFM et des témoins appariés sur la catégorie socioprofessionnelle et l’emploi (Palstam et coll., 2014renvoi vers). Les perceptions sont évaluées par une batterie de questionnaires (FIQ, Fear-avoidance beliefs questionnaire ou FABQ) et sont complétées par des tests d’évaluation des capacités physiques. Les résultats confirment des efforts perçus nettement plus importants chez les femmes atteintes de SFM à charge de travail globalement « équivalente ». Logiquement, les capacités physiques sont diminuées par rapport aux témoins en ce qui concerne la force de préhension et la distance de marche. Le niveau d’efforts perçus au travail est corrélé avec l’intensité de la charge physique globale de travail et des tâches physiquement pénibles (manutention de charges, déplacements...). Les capacités physiques, notamment la force de préhension, semblent jouer un rôle important dans la perception des efforts chez les femmes atteintes de SFM. Cependant, l’effort perçu est également corrélé, mais dans une moindre mesure, avec les représentations négatives du travail et l’anxiété. L’étude montre, en accord avec les données de la littérature sur les TMS liés au travail et les douleurs chroniques étendues, une surexposition des catégories ouvrières/employées peu qualifiées caractérisées par une autonomie faible et une charge physique de travail élevée excédant souvent les capacités des femmes atteintes de SFM (Palstam et coll., 2014renvoi vers).

Syndrome fibromyalgique et incapacité au travail

Incapacité transitoire

Le SFM est une cause fréquente d’incapacité transitoire au travail d’après les études basées sur des données assurantielles ou les enquêtes en population. Aux États-Unis, d’après les données du Medical Disability Advisor (2012) portant sur 2 602 cas, la durée des arrêts de travail pour un SFM était en moyenne de 65 jours par an avec une durée médiane de 42 jours par an5  ; 6,2 % étaient en arrêt de travail pour une période supérieure à 6 mois. Ces chiffres, qui doivent être interprétés dans le contexte américain, sont proches de ceux observés pour d’autres douleurs chroniques invalidantes, comme les lombalgies.
En France, l’absence de codage du SFM donnant lieu à un arrêt de travail, en médecine ambulatoire ou dans les structures de prise en charge de la douleur chronique (SDC) comme les centres d’étude et de traitement de la douleur (CETD), complique l’analyse de son impact social. Une étude pilote, citée dans le rapport de la Haute Autorité de santé (HAS) sur le SFM6 , réalisée à partir des dossiers de consultants en médecine générale et rhumatologie libérale en 2005-2006 (panel Thalès-Cegedim) rapporte qu’environ 8 % des patients atteints de SFM ont eu un arrêt de travail, qu’ils aient reçu ou non un traitement. Moins de la moitié des patients ont eu un seul arrêt, 20 à 30 % ont eu 2 ou 3 arrêts de travail, et selon les années 10 à 18 % ont eu plus de 5 arrêts par an. L’enquête réalisée en 2008 par la HAS auprès de 307 patients atteints de SFM recrutés dans les CETD montre que la proportion de patients en arrêt maladie et en invalidité (37 %) est comparable à celle des patients en activité professionnelle (33 %). Ces résultats doivent être nuancés car il s’agit probablement de patients atteints de formes sévères nécessitant une prise en charge spécialisée dans les CETD. L’étude des conséquences socioéconomiques du SFM au sein d’une cohorte de patients français consultant leur médecin généraliste ou leur rhumatologue montre que des arrêts de travail sont rapportés par 44 % d’entre eux, avec une durée moyenne d’arrêt au cours du dernier mois de 2,7 jours (Perrot et coll., 2012renvoi vers). Une étude plus récente réalisée auprès de 4 516 patients français atteints de SFM confirmerait ces données en montrant que 65 % d’entre eux déclarent un arrêt de travail au cours des 12 derniers mois7 .

Incapacité prolongée

Le SFM est une source importante d’incapacité prolongée de travail. Ainsi, l’étude « 2012 National Health Interview Survey » portant sur 8 446 personnes représentatives de la population américaine, montre que le retentissement socioprofessionnel du SFM est considérable (Walitt et coll., 2015) : 55,8 % des personnes atteintes de SFM contre 5,8 % des personnes non atteintes étaient en incapacité de travail (OR ~ 9,6). Le taux d’incapacité était plus élevé chez les hommes (71,3 %) que chez les femmes (41,3 %) atteints de SFM défini par les critères ACR 2010. De même, les personnes atteintes de SFM touchaient près de 11 fois plus souvent une pension d’invalidité (30,2 % vs 2,8 %), sans différence sensible entre les hommes (32,4 %) et les femmes (28,1 %). Une cohorte canadienne de patients atteints de SFM recrutés dans des centres de référence (n = 248) a comparé les caractéristiques médicales et professionnelles des patients actifs, inactifs et en invalidité (Fitzcharles et coll., 2016renvoi vers). Le taux d’emploi des patients était de 36 %, 31 % étaient en invalidité et 33 % sans emploi. Compte-tenu du mode de recrutement des patients dans cette étude, un biais de sélection sur la santé peut expliquer le faible taux d’emploi rapporté par rapport à la population générale de référence8 . Les auteurs émettent également l’hypothèse d’une « incapacité de travail cachée » selon laquelle de nombreux patients auraient pu renoncer à une carrière professionnelle en raison du SFM pour expliquer le fort taux de personnes sans emploi. Les facteurs associés à l’invalidité dans cette étude étaient un âge élevé, la sévérité des symptômes, le fait d’avoir été précédemment employé dans des professions manuelles physiquement exigeantes de l’industrie et des services ou dans les secteurs de la santé et de l’éducation. Appartenir à une catégorie socioprofessionnelle défavorisée prédisposait à l’invalidité, mais il est possible, selon les auteurs, qu’un effet « revenu » intervienne car les femmes des catégories supérieures ayant des revenus élevés auraient moins intérêt financièrement à s’arrêter de travailler que les femmes aux revenus plus modestes en raison du plafonnement des pensions d’invalidité (Fitzcharles et coll., 2016renvoi vers).

Invalidité

Le taux d’invalidité élevé (31 %) des personnes atteintes de SFM observé dans la cohorte canadienne est proche des valeurs rapportées aux États-Unis et en Europe (Wolfe et Potter, 1996renvoi vers ; Henriksson et coll., 2005renvoi vers ; Reisine et coll., 2008renvoi vers ; Perrot et coll., 2012renvoi vers ; Wolfe et coll., 2014renvoi vers) (tableau 7.Irenvoi vers).

Tableau  7.I Taux d’activité et d’invalidité des personnes atteintes de syndrome fibromyalgique (Henriksson et coll., 2005renvoi vers)

Référence
Échantillon
Pays
Employé plein temps (%)
Invalidité (%)
Non employé à cause du SFM (%)
Ledingham et coll., 1993renvoi vers
72
Royaume-Uni
-
-
50
Wigers, 1996
44
Norvège
43/39*
27/64*
-
Fitzcharles et coll., 2003renvoi vers
70
Canada
43
19
34
Henriksson et coll., 2004
191
Suède
34/39†
 
39
Burckhardt et coll., 2010
94
États-Unis
46
45
38

* Étude prospective sur 4,5 ans (pourcentage au début et 4,5 ans après le début du suivi) ; † étude prospective à 1,5 an (pourcentage au début et 1,5 an après le début du suivi).

Les résultats issus d’une cohorte (ouverte) de 2 321 patients atteints de SFM recrutés à l’aide de la base de données américaine des maladies rhumatismales (National Data Bank for Rheumatic Diseases ou NDB) montrent que plus d’un tiers (34,8 % [IC 95 %, 32,9-36,8]) d’entre eux bénéficiaient d’une pension d’invalidité. L’incidence annuelle de l’invalidité chez les actifs à l’inclusion était de 3,4 % [IC 95 %, 3,0-3,9], et 25 % des patients étaient en incapacité de travail après 9 ans de suivi. A contrario, 31,4 % des patients atteints de SFM en invalidité ne recevaient plus de pension d’invalidité à la fin du suivi. Le taux d’invalidité reconnue par la sécurité sociale était plus élevé lorsque le SFM était associé à une polyarthrite rhumatoïde concomitante (55 % contre 42 % si SFM seul et 29 % si polyarthrite rhumatoïde seule) ou une arthrose de hanche ou de genou concomitante (42 %) (Wolfe et coll., 2014renvoi vers). L’analyse secondaire à l’aide des registres des pensions de retraite de la cohorte de jumeaux finlandais portant sur plus de 10 000 actifs professionnellement montre que l’incidence cumulée de préretraite pour invalidité est globalement voisine de 10 % au sein de la cohorte et atteint 26 % pour le groupe SFM (Markkula et coll., 2011renvoi vers), soit un risque relatif de retraite anticipée très élevé pour les jumeaux atteints de SFM (RR = 5,0 [3,6-6,9]).
Le SFM est une source importante d’incapacité prolongée de travail et d’invalidité comme nombre de syndromes douloureux chroniques. Ceci s’explique non seulement par les limitations des capacités fonctionnelles des patients mais aussi, comme pour les personnes atteintes de douleurs chroniques étendues ou de TMS, par un manque d’adaptation des situations de travail9 . À la différence de la douleur chronique étendue ou des lombalgies chroniques, de nombreux patients atteints de SFM rapportent que leur capacité de travail est entravée non seulement par la douleur mais aussi par des troubles cognitifs, de la fatigue, ainsi que par la fluctuation des symptômes d’un jour ou d’un moment à l’autre (Löfgren et coll., 2016renvoi vers).

Maintien en emploi et prévention de la désinsertion professionnelle des patients atteints de syndrome fibromyalgique

La plupart des études montrent que le maintien au travail des personnes atteintes de SFM est souhaitable, surtout s’il est possible d’adapter le poste à leurs capacités physiques (force, endurance, douleur) (Henriksson et coll., 2005renvoi vers). Une étude suédoise portant sur 176 femmes atteintes de SFM dont 50 % travaillaient (15 % à temps complet et 35 % à temps partiel) montre que pratiquement toutes les femmes professionnellement actives avaient une capacité de travail réduite du fait du SFM mais pouvaient continuer à travailler grâce à l’aménagement de leur poste de travail et à l’attitude compréhensive de leur employeur (Henriksson et Liedberg, 2000renvoi vers).
Les recommandations canadiennes de 2012 sur le SFM stipulent que « l’évolution de l’état de santé étant généralement moins favorable chez les gens sans emploi, les médecins devraient inciter les patients à demeurer en emploi et, lorsque nécessaire, faire des recommandations visant la conservation d’un niveau de productivité optimal (recommandation 44). Les patients [...] en congé de maladie depuis longtemps, devraient être encouragés à participer à un programme de réhabilitation adapté, visant l’amélioration de la capacité fonctionnelle et, si possible, le retour en emploi (recommandation 45) » (Fitzcharles et coll., 2013renvoi vers).
Néanmoins, si travailler est recommandé car important pour les patients atteints de SFM et constitutif de leur identité, rester en emploi « est une lutte permanente » pour nombre d’entre eux (Löfgren et coll., 2006renvoi vers ; Palstam et coll., 2014renvoi vers). Comme pour tous les syndromes douloureux chroniques, la prévention de la désinsertion professionnelle des personnes atteintes de SFM repose sur une approche globale et intégrée de la prévention des risques professionnels associant les trois niveaux de prévention (primaire, secondaire et tertiaire). L’enjeu est, in fine, la prévention primordiale des risques professionnels, c’est-à-dire l’instauration de conditions de travail soutenables tout au long de la vie professionnelle pour tous les travailleurs, quels que soient leur âge, genre, qualification, compétences et état de santé, ainsi que la promotion des interventions visant à développer leurs capacités pour y faire face tout au long de leur parcours professionnel (Supiot, 2010renvoi vers ; Falzon, 2014renvoi vers ; Roquelaure, 2017renvoi vers). Ainsi, tout ce qui concourt à la prévention des risques professionnels en général, et des syndromes douloureux chroniques liés au travail en particulier, peut avoir un effet bénéfique pour les travailleurs souffrant de douleurs chroniques et un impact sur leur maintien au travail10 .
D’une manière générale, le maintien en emploi des travailleurs atteints de SFM nécessite des aménagements des situations de travail. Comme pour les douleurs chroniques diffuses et les TMS liés au travail, le maintien en emploi repose dans la mesure du possible sur l’éviction des situations de travail pénibles, telle que le travail physique lourd et la manutention de charges lourdes, mais aussi le travail répétitif des membres, le travail les bras en hauteur, le travail musculaire dynamique excentrique des bras, etc. (Henriksson et coll., 2005renvoi vers ; Bossema et coll., 2012renvoi vers ; Roquelaure, 2017renvoi vers). Compte-tenu de la variabilité des symptômes et de leur intensité d’un jour à l’autre, le maintien en emploi des patients atteints de SFM nécessiterait de concevoir des situations de travail offrant des tâches variées. Il importe surtout que l’organisation du travail permette de varier les tâches ou l’intensité des efforts, ou de prendre des pauses en fonction de l’état fonctionnel d’un jour à l’autre et au cours de la journée. L’étude de Bossema et coll. (2012renvoi vers) a ainsi proposé une liste de 11 caractéristiques des situations de travail soutenables selon le point de vue des patients atteints de SFM, ainsi qu’un bref questionnaire sur la soutenabilité des conditions de travail (tableau 7.IIrenvoi vers) (Bossema et coll., 2012renvoi vers) :
(1) Opportunité de récupération (possibilité de prise de pauses courtes) ;
(2) Rythme de travail (possibilité de travailler à son propre rythme) ;
(3) Charge de travail non lourde ;
(4) Possibilité de garder de l’énergie pour la vie privée (domicile, loisirs) ;
(5) Correspondance entre travail et capacités ;
(6) Opportunités de développement ;
(7) Formations, responsabilités ;
(8) Compréhension et écoute des collègues et supérieurs ;
(9) Aide offerte par collègues ;
(10) Soutien des responsables, de l’encadrement et du médecin du travail ;
(11) Accords avec l’employeur.

Tableau  7.II Questionnaire bref aidant à améliorer les conditions de travail de patients atteints de SFM (d’après Bossema et coll., 2012renvoi vers)

Répondre aux 3 questions suivantes pour chacune des 10 caractéristiques listées :
• Cette caractéristique s’applique-t-elle à votre travail ?
• Cette caractéristique est-elle importante pour vous ?
• Souhaitez-vous améliorer cette caractéristique ?
Si la réponse est oui à la seconde ou la troisième question, il est important de discuter de vos conditions de travail avec votre employeur et de mettre en place des améliorations.
• Opportunité de récupération
Prendre des pauses, choisir par vous-même leur moment
• Rythme de travail
Travailler à votre propre rythme changer de posture, faire les tâches de votre manière
• Charge de travail non lourde
Demande physique ou cognitive pas trop lourde, date limite flexible, matériel adapté
• Garder de l’énergie pour la vie privée (domicile, loisirs)
Énergie pour les loisirs, activités (sociales), tâches ménagères et familiales
• Correspondance entre travail et capacités
Concordance entre les capacités requises et vos compétences, travail agréable
• Opportunités de développement
Formations, responsabilités
• Compréhension des collègues
Collègues à l’écoute, compréhensifs et attentifs à votre condition
• Aide des collègues
Collègues offrant de l’aide ou vous préconisant de ralentir si besoin
• Support des responsables
Employeur et médecin du travail comprennent votre syndrome et contrôlent régulièrement l’adéquation de votre travail
• Accords avec votre employeur
Accord sur la réduction de la charge de travail, possibilité d’aménager votre mission et les exigences légales
Outre la possibilité de varier les tâches et de limiter les efforts, il importe qu’il y ait une réflexion sur les pratiques managériales afin que les travailleurs atteints de SFM bénéficient du soutien social de leur hiérarchie et de leurs collègues, ainsi que de perspectives de développement via des formations adaptées. La promotion de l’activité et du maintien en emploi des travailleurs atteints de SFM nécessite donc de prendre en compte non seulement les paramètres physiques des situations de travail, mais aussi l’organisation du travail et les pratiques managériales. Ainsi, il a été montré que le climat social et la qualité des relations de travail, notamment une attitude compréhensive et le soutien de l’encadrement, sont des paramètres importants de la soutenabilité des conditions de travail pour les patients souffrant de douleurs chroniques, notamment de lombalgies ou de TMS (Durand et coll., 2011renvoi vers ; Loisel et Anema, 2013renvoi vers ; Petit et Roquelaure, 2014renvoi vers ; Roquelaure, 2017renvoi vers). Offrir des environnements de travail « capacitants », c’est-à-dire permettant le développement des compétences et savoir-faire de métier, est également un élément clé de la soutenabilité des conditions de travail chez le patient atteint de douleur chronique ou plus généralement le travailleur présentant un handicap de situation (Clot et Lhuilier, 2013renvoi vers ; Falzon, 2014renvoi vers ; Roquelaure, 2017renvoi vers).
Lorsque des perspectives développementales et des marges de manœuvre professionnelles suffisantes existent, nombre de personnes atteintes de SFM ou de douleurs chroniques, telles que des lombalgies, adoptent des stratégies leur permettant de réaliser les ajustements nécessaires pour rester en emploi malgré la limitation de leurs capacités fonctionnelles (Bourgeois, 2006renvoi vers ; Durand et coll., 2011renvoi vers ; Loisel et Anema, 2013renvoi vers ; Falzon, 2014renvoi vers). Ceci est en général plus facilement réalisable par les travailleurs qualifiés disposant d’une autonomie suffisante que par les travailleurs peu qualifiés exposés aux tâches répétitives et manquant d’autonomie. À ces inégalités sociales s’ajoutent des inégalités de genre car les femmes, notamment celles atteintes de SFM, occupent souvent des postes moins qualifiés disposant de moins de marges de manœuvre et de moins de perspectives de développement et d’évolution de carrière que les hommes (Chappert et Théry, 2016renvoi vers).
Dans nombre d’entreprises et administrations, la rigidité des organisations du travail et des processus de production de biens et de services entrave la mise en œuvre des ajustements de la charge de travail en fonction des variations des capacités fonctionnelles. Dans ce cas, le maintien en emploi nécessite le plus souvent une réduction du temps de travail afin d’obtenir des conditions de travail soutenables de manière durable. Ceci explique probablement la fréquence élevée du travail à temps partiel des personnes atteintes de SFM et le taux élevé d’incapacité des travailleurs atteints de SFM pour la catégorie peu qualifiée pour qui les ajustements sont plus difficilement réalisables (Henriksson et Liedberg, 2000renvoi vers ; Henriksson et coll., 2005renvoi vers ; Durand et coll., 2009renvoi vers ; Löfgren et coll., 2016renvoi vers).
Une étude qualitative suédoise par focus group11 de 20 patientes atteintes de SFM ayant réussi à se maintenir en emploi après un programme de réadaptation fonctionnelle suggère que le maintien en emploi nécessite des efforts constants et des stratégies de coping orientées vers la résolution des problèmes (Löfgren et al., 2006renvoi vers). Une étude de cas concrets montre qu’il s’agit cependant de stratégies parfois difficiles à mettre en place et consommatrices de temps : ralentir l’allure, séparer, prioriser et planifier ses activités, prendre du repos, arbitrer entre les charges familiales et professionnelles, mais aussi réaliser des exercices pour améliorer ses capacités physiques (Palstam et coll., 2014renvoi vers). Il s’agit aussi de développer des pensées positives, de prendre soin de soi et de profiter de la vie autant que faire se peut (tableau 7.IIIrenvoi vers). Les auteurs montrent que pour les patients, la prise de conscience de leur situation et la mise en œuvre de ces stratégies peuvent représenter un tournant dans leur manière de gérer leur vie personnelle et professionnelle (Löfgren et coll., 2006renvoi vers). Ce type de stratégies, qui concerne les personnes actives douloureuses chroniques en général, est particulièrement important chez les patients atteints de SFM compte tenu de l’impact élevé de ce syndrome sur les capacités fonctionnelles.

Tableau  7.III Stratégies mises en place par les patients atteints de syndrome fibromyalgique (d’après Löfgren et coll., 2016renvoi vers)

Ralentir l’allure
Fractionner les activités
Prioriser et planifier
Prendre du repos
S’échauffer
Pratiquer de l’activité physique, entretenir sa condition physique
Percevoir les signaux corporels et les respecter
Penser positif « la douleur n’est pas dangereuse »
Profiter de la vie au maximum
Développer une vision positive de la vie
Ne pas céder
Bien que le maintien en emploi des personnes atteintes de SFM soit une priorité « pour éviter la perte d’emploi et la désinsertion sociale »12 , il existe peu de données sur les interventions en vue de favoriser le retour au travail ou le maintien en emploi des patients souffrant de douleur chronique étendue en général et de SFM spécifiquement. Il existe notamment un déficit d’essais d’interventions de retour au travail ou de maintien en emploi. La plupart des connaissances concernent les syndromes douloureux en général, notamment les lombalgies chroniques (van Oostrom et coll., 2009renvoi vers ; Hasenbring et coll., 2012renvoi vers ; Loisel et Anema, 2013renvoi vers ; Petit et Roquelaure, 2014renvoi vers ; van Vilsteren et coll., 2015renvoi vers ; Cullen et coll., 2017). Elles sont cependant pour l’essentiel extrapolables aux patients atteints de SFM et aux douleurs chroniques étendues en ce qui concerne le volet « travail » de l’intervention, même si le volet « médico-social » peut présenter certaines spécificités pour la douleur chronique étendue ou le SFM, compte tenu des modalités de recrutement des patients et du caractère polymorphe du SFM. Il existe très peu de données sur l’impact du genre sur le retour au travail ou le maintien en emploi en cas de douleur chronique ou de SFM. Cependant, il est probable que les possibilités d’aménagement de postes soient plus faibles pour nombre de femmes occupant des postes peu qualifiés et exposant à des tâches répétitives sans marge de manœuvre ni perspectives de développement (Chappert et Théry, 2016renvoi vers).
D’une manière générale, la prévention de la désinsertion professionnelle des travailleurs atteints de douleur chronique ou de SFM doit associer une prise en charge médicale, sociale et professionnelle concertée, après évaluation de leur situation médicale, sociale et professionnelle (voir chapitre « Activités physiques et thérapie multidisciplinaire dans le syndrome fibromyalgique »). Une synthèse médico-professionnelle est nécessaire afin de rechercher les facteurs de risque d’aggravation et d’incapacité prolongée susceptibles de retarder le retour au travail et qui sont (Hasenbring et coll., 2012renvoi vers ; Loisel et Anema, 2013renvoi vers ; Petit et Roquelaure, 2014renvoi vers ; Löfgren et coll., 2016renvoi vers) :
• facteurs psychologiques : anxiété, symptômes dépressifs, représentations erronées du syndrome et de son pronostic, stratégies d’évitement, peur de la rechute, etc. ;
• facteurs socioéconomiques : faible niveau socioprofessionnel, faible qualification, précarité professionnelle et sociale, etc. ;
• facteurs professionnels : pénibilité de la tâche, manque d’autonomie, manque de soutien social, stress au travail, etc.
La littérature existante fournit des recommandations générales en vue de favoriser le retour au travail des travailleurs atteints de douleurs chroniques, mais il n’existe pas à notre connaissance de programmes multidimensionnels de retour au travail scientifiquement validés concernant spécifiquement le SFM, même si des études de cas montrent des résultats intéressants (Löfgren et coll., 2016renvoi vers). Les programmes pluridisciplinaires de maintien en emploi ayant montré leur efficacité, voire leur coût-efficacité, chez les patients avec douleur chronique notamment une lombalgie, associent dans des proportions variées les éléments suivants (van Oostrom et coll., 2009renvoi vers ; Hasenbring et coll., 2012renvoi vers ; Hoe et coll., 2012renvoi vers ; Loisel et Anema, 2013renvoi vers ; van Eerd et coll., 2016renvoi vers ; Geneen et coll., 2017renvoi vers ; Vogel et coll., 2017renvoi vers) :
• réadaptation physique (programmes d’exercices physiques, voire réentrainement à l’effort) ;
• accompagnement psychosocial ;
• aménagement ergonomique de la situation de travail (modification de la quotité de temps de travail, aménagement physique du poste de travail, modification de l’organisation du travail, réflexion sur les pratiques managériales afin de favoriser l’autonomie des travailleurs, campagne d’information de la hiérarchie et/ou des collègues sur la pathologie afin de favoriser les attitudes compréhensives dans le respect du secret médical, etc.).
D’une manière générale, il n’y a pas de solution type concernant l’intervention en milieu de travail, car celle-ci doit s’adapter aux spécificités historiques, technico-organisationnelles et économiques de l’entreprise concernée.

Conclusion

Le SFM survenant le plus souvent chez des personnes en âge de travailler, il peut retentir sur la qualité de vie au travail et compromettre la capacité des personnes à poursuivre leur activité professionnelle. Le taux d’activité des personnes atteintes de SFM est inférieur à celui de la population active, ce qui suggère d’améliorer la prise en charge des patients en vue de favoriser leur insertion professionnelle et leur maintien en emploi. Ceci nécessite également une prise de conscience sur le SFM, et les douleurs chroniques étendues en général, dans le monde du travail, ainsi que des efforts accrus dans les entreprises pour offrir des conditions de travail compatibles avec l’état fonctionnel des travailleurs souffrant de douleurs chroniques.

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