Fibromyalgie
2020
8-
Approche psychosociale
du syndrome fibromyalgique
L’approche psychosociale s’intéresse à l’expérience subjective du syndrome de fibromyalgie (SFM), prioritairement celle des personnes atteintes de SFM et qui vivent les symptômes au quotidien, mais aussi celle des médecins généralistes, spécialistes ou autres soignants confrontés dans leur pratique au SFM. Nous relèverons dans la littérature dédiée à cette approche les vécus et les perceptions de la douleur essentiellement et plus largement de l’ensemble des symptômes : quelles théories de la pathologie et quelles explications les personnes concernées développent-elles vis-à-vis du SFM ? Le travail d’analyse a consisté à faire ressortir de l’ensemble du corpus les modalités selon lesquelles ces dernières comprennent leur situation, la survenue des symptômes, mais aussi comment elles recherchent de l’aide pour apaiser leurs symptômes au quotidien. Plus essentiellement, comment et selon quelles attentes s’orientent les demandes de soins. Enfin, nous rechercherons quelles sont les modalités des réponses thérapeutiques, plus précisément comment se développent les interactions entre les personnes atteintes de SFM et les professionnels des soins et le système de santé. Les contenus de la littérature nous ont amenés à considérer plus particulièrement la problématique du diagnostic.
L’approche psychosociale cherche à articuler l’expérience intime narrée par le patient (Good, 1999

) aux réalités relationnelles, sociales, organisationnelles et politiques du soin (Fassin, 1996). Ces différentes perspectives de la littérature analysée organisent notre expertise psychosociale selon deux grands axes : I- la production des savoirs sur le SFM : les représentations des symptômes vécus, plus spécifiquement de la douleur, et les stratégies de faire face à ces différentes expériences douloureuses ; II- la recherche de soin et le rapport aux soins, ainsi que les modalités des interactions avec les soignants.
La littérature expertisée rassemble majoritairement des recherches qualitatives permettant d’accéder selon des méthodologies diverses, plus ou moins dirigées (dispositifs narratifs, entretiens non directifs, entretiens semi-directifs et guidés par des grilles d’entretien), à des données qui rendent compte de l’expérience subjective des personnes. Les pays les plus représentés sont les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni et les pays nordiques. Il est à noter que dans ces travaux, les personnes interrogées ont, dans la majorité des cas, reçu un diagnostic de SFM de la part d’un médecin, mais les critères diagnostiques et d’évaluation de l’intensité de la douleur utilisés ne sont pas systématiquement spécifiés. Les participants sont recrutés par deux voies principales : au sein des services médicaux dans lesquels ils consultent, ou via des associations de patients. Le délai écoulé depuis l’établissement du diagnostic est variable, et non systématiquement mentionné. Les échantillons sont constitués soit exclusivement, soit principalement, de femmes, et la problématique du genre n’est abordée que dans certaines études. L’absence de précisions sur les critères diagnostiques, les différentes modalités de recrutement des patients, les lieux de ce recrutement (institutionnel ou non institutionnel, cadre de soin/cadre associatif...) ainsi que la variation diagnostique ne permettent pas un travail de comparaison des études entre elles. Aussi nous considérons ce corpus comme un ensemble d’articles complémentaires qui impulsent une dynamique compréhensive. Cependant, des tendances clés apparaissent, dont nous allons rendre compte dans ce chapitre tout en faisant ressortir les nuances apportées par les différents travaux expertisés. Dans cette perspective, nous avons choisi d’intégrer des tableaux précisant les pays dans lesquels les études ont été réalisées, les types de populations de ces recherches et les choix méthodologiques mis en Ĺ“uvre. Ces caractéristiques représentent le dénominateur commun présent dans les travaux du corpus.
Représentations et expériences de la maladie
Dans ce premier chapitre, nous analysons les travaux de recherche qui ont exploré comment les personnes concernées par le SFM comprennent leur situation, la survenue des symptômes, mais aussi comment elles recherchent de l’aide pour apaiser les symptômes au quotidien.
Attributions causales traumatiques des patients et mystère du syndrome fibromyalgique
Si les facteurs à l’origine du SFM restent complexes à élucider pour les experts biomédicaux, ils sont aussi sources de nombreux questionnements pour les patients. Plusieurs études ont exploré les causes que les personnes atteintes de SFM attribuent à leurs troubles. Il ressort de leurs récits une haute prévalence d’événements traumatiques, notamment d’ordre psychologique, tels que le deuil d’un proche, le vécu de violence ou un trauma dans l’enfance, ou encore un divorce (Cedraschi et coll., 2007

, 2012

, 2013

, 2015

; Girard et coll., 2007

; Sallinen et Kukkurainen, 2015

; tableau 8.I

). Des traumatismes de type somatique sont aussi identifiés tels qu’un accident, une chirurgie, une chute, des problèmes gynécologiques/obstétriques (Cedraschi et coll., 2007

, 2012

, 2013

, 2015

). Le stress ou l’inquiétude, le surmenage, ou encore une immunité altérée, ressortent également comme des causes repérées par les patients (Lempp et coll., 2009

; Glattacker et coll., 2010

). Le traumatisme, physique ou psychologique, est désigné par certaines personnes interrogées comme événement déclencheur d’une maladie « dormant dans leur corps » (Madden et Sim, 2006

). Ainsi, les attributions des patients peuvent être internes ou externes, sont plus souvent instables que stables, c’est-à-dire que les causes sont perçues comme pouvant varier dans le temps et sont plus incontrôlables que contrôlables (Cedraschi et coll., 2013

). Cependant, malgré ces hypothèses, les patients concernés par le SFM rapportent un degré élevé de difficultés à comprendre la cause de la pathologie (Ferrari, 2012

; Ferrari et Russell, 2014a

), et un haut niveau d’injustice perçue (Ferrari et Russell, 2014b

).
Tableau 8.I Littérature traitant des attributions causales des patients
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil de données
|
Suisse
|
Cedraschi et coll., 2007
|
65 patients SFM
|
Entretiens semi-structurés
|
|
Cedraschi et coll., 2012
|
56 patientes SFM et 29 avec lombalgie
|
Entretiens semi-structurés
|
|
Cedraschi et coll., 2013
|
56 patientes SFM
|
Entretiens semi-structurés
|
|
Cedraschi et coll., 2015
|
Codage par 3 cliniciens (un médecin interniste, un psychiatre, un psychologue) expérimentés dans la prise en charge de patients avec douleur chronique, d’entretiens de 56 femmes SFM
|
Échelle Clinical Global Impression (CGI) : fournir une évaluation subjective de l’intensité de l’impact affectif de discours
|
|
Girard et coll., 2007
|
65 patients SFM
|
Entretiens approfondis de type narratif
|
Finlande
|
Sallinen et Kukkurainen, 2015
|
11 patientes ayant une longue histoire de SFM
|
Entretiens narratifs
|
Royaume-Uni
|
Lempp et coll., 2009
|
12 patients SFM
|
Entretiens qualitatifs
|
|
Madden et Sim, 2006
|
17 patients SFM
|
Entretiens semi-structurés
|
Allemagne
|
Glattacker et coll., 2010
|
245 patients SFM
|
SF-36 and fibromyalgia impact questionnaire
Illness Perception Questionnaire–revised
|
Canada
|
Ferrari, 2012
|
104 sujets répondant aux critères ACR 1990 de classification
272 sujets atteints de douleurs généralisées qui ne répondaient pas à ces critères
|
Understand Pain Scale et Explain Pain Scale
|
|
Ferrari et Russell, 2014a
|
126 participants (64 arthrite rhumatoïde et 62 SFM)
|
Injustice Experience Questionnaire, une échelle de douleur visuelle analogique, Hospital Anxiety and Depression Scale (HADS)
|
|
Ferrari et Russell, 2014b
|
126 sujets (64 SFM, 62 arthrite rhumatoïde)
|
Mystery Scale component of the Pain Beliefs and Perceptions Inventory
|
Des symptômes pluriels et complexes
Les symptômes les plus courants rapportés par les patients dans différentes études sont les suivants : douleur, fatigue, troubles du sommeil/insomnies et sommeil non réparateur, difficultés cognitives dont troubles de la concentration et de la mémoire, articulations raides, en particulier raideur matinale (Bennett et coll., 2007

; Choy et coll., 2010

; Glattacker et coll., 2010

; Theadom et coll., 2011

; Dennis et coll., 2013

; tableau 8.II

). La perte des forces ressort également de l’étude de Glattacker et coll. (2010

). Selon les patients, les facteurs aggravants entrainant des « poussées » de SFM, incluent la détresse émotionnelle, le stress, le manque de sommeil, le surmenage, mais aussi les changements climatiques (Bennett et coll., 2007

; Vincent et coll., 2016

). Les symptômes caractéristiques des poussées incluent alors des douleurs corporelles de type « grippal/épuisement », de la fatigue et une variété d’autres symptômes (Vincent et coll., 2016

). Les troubles dépressifs et l’anxiété sont également des symptômes rapportés par les patients mais ils sont moins répandus que les symptômes précédents dans la littérature en général (Aïni et coll., 2010

). En 2008, Sim et Madden ont proposé une métasynthèse de 23 études qualitatives réalisées entre 1995 et 2006, centrées sur l’expérience de la pathologie des patients avec un diagnostic de SFM (Sim et Madden, 2008

). En ce qui concerne la symptomatologie telle que rapportée par les patients, les résultats des études récentes sont similaires aux résultats présentés dans cette métasynthèse de 2008.
Tableau 8.II Littérature traitant des symptômes
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil de données
|
États-Unis
|
Bennett et coll., 2007
|
2 569 patients SFM
|
Questionnaire
|
|
Choy et coll., 2010
|
800 patients SFM
1 622 médecins dans 6 pays européens, au Mexique et en Corée du Sud
|
Questionnaire
|
|
Vincent et coll., 2016
|
44 patients SFM
|
Enquête administrée par voie électronique : 7 questions ouvertes
|
|
Arnold et coll., 2008
|
48 patientes SFM
|
6 Focus groups*
|
Allemagne
|
Glattacker et coll., 2010
|
245 patients SFM
|
SF-36, Fibromyalgia Impact Questionnaire, Illness Perception Questionnaire révisé
|
France
|
Aïni et coll., 2010
|
22 patients SFM
|
Entretiens non directifs, soit individuels, soit en groupe
|
Royaume-Uni
|
Dennis et coll., 2013
|
20 patients SFM
|
Questions ouvertes par mail puis dialogues par email
|
|
McMahon et coll., 2012a
|
10 patientes SFM
|
Récits de vie
|
|
Lempp et coll., 2009
|
12 patients SFM
|
Entretiens qualitatifs
|
|
Sim et Madden, 2008
|
23 études qualitatives réalisées entre 1995 et 2006
|
Métasynthèse
|
Norvège
|
Råheim et Håland, 2006
|
12 patientes SFM
|
Récits de vie
|
|
Grape et coll., 2017
|
8 patientes SFM
|
Entretiens qualitatifs
|
Nouvelle-Zélande
|
Theadom et coll., 2011
|
56 patients SFM
|
Entretiens directifs
|
Suède
|
Juuso et coll., 2011
|
15 patientes SFM
|
Entretiens semi-structurés
|
Espagne
|
Matarín Jiménez et coll., 2017
|
13 patientes SFM
|
Focus group et entretiens semi-structurés
|
|
Briones-Vozmediano
et coll., 2016
|
13 patientes SFM
|
Entretiens approfondis
|
* Le focus group est une méthode de recherche fondée sur des discussions collectives libres qui explorent une question particulière ou un ensemble de questions spécifiées par le chercheur. Les focus groups comprennent généralement 4 à 12 personnes (Markova I. In Moscovici S, Buschini B. Les méthodes des sciences humaines. Paris : PUF, 2003 : 221-241).
Dans la métasynthèse de Sim et Madden (2008

), la douleur est présentée comme le symptôme le plus fréquemment rapporté par les patients. Elle est décrite comme omniprésente et constante. Elle est caractérisée par un certain nombre de dualités, de nature souvent ambiguë ou conflictuelle. Ainsi, la douleur peut être localisée spécifiquement, mais peut aussi être diffuse et mouvante. Elle peut être ressentie lors d’activités ou au repos. La douleur est très souvent décrite comme étant à la fois physique et mentale (Davidsen et coll., 2016

). Plusieurs études rapportées par Sim et Madden se sont focalisées sur le langage utilisé pour communiquer la douleur. Des métaphores couramment utilisées, comme « brûler », « bouillir », « rayonner », « ronger », « couper » et « poignarder » rendent compte de quelques caractéristiques de la douleur qui s’avèrent similaires dans les études sur l’expérience de la pathologie réalisées depuis 2006 (Råheim et Håland, 2006

; Theadom et coll., 2011

; McMahon et coll., 2012a

; Dennis et coll., 2013

; Vincent et coll., 2016

). Dans l’étude de Juuso et coll. (2011

), la douleur omniprésente est décrite comme insupportable, accablante et dominant toute l’existence. Pour autant ces études font ressortir la difficulté de décrire et de communiquer clairement et de façon précise la douleur éprouvée, ce qui reflète l’inadéquation du langage dans l’expression de cette expérience subjective. Les personnes atteintes de SFM décrivent une double peine : vivre avec une douleur agressive et imprévisible, et être mises en doute par les autres, face à l’invisibilité de la douleur.
La fatigue apparaît comme un symptôme très paralysant. Elle est entremêlée avec la douleur, suscitant ainsi un état d’épuisement important. La fatigue et le manque de force impactent les relations personnelles et les activités quotidiennes (Sim et Madden, 2008

). Dans les travaux plus récents, la fatigue est le symptôme le plus fréquemment cité par les patients après celui de la douleur. C’est un symptôme complexe. Dans l’étude d’Eilersten et coll. (2015

), elle est décrite comme imprévisible, incontrôlable et invisible pour les autres. Les patients se déclarent être trop fatigués pour combattre la douleur et poursuivre leurs activités habituelles, allant quelquefois jusqu’à parler de
killer fatigue (« la fatigue tueuse ») (Dennis et coll., 2013

). Le travail de Grape et coll. (2017

) s’est focalisé sur la complexité des récits sur la fatigue et sur l’épuisement de patientes avec un diagnostic de SFM (Grape et coll., 2017

). Différentes compréhensions et significations de la fatigue et de l’épuisement, en lien avec le temps de la pathologie ressortent : 1) la fatigue est alarmante mais ignorée (avant la pathologie) ; 2) l’épuisement est paralysant (pendant la pathologie) ; 3) le développement d’une capacité à comprendre la fatigue et de moyens de la gérer (donner un sens à l’épuisement) ; 4) l’intégration de la fatigue à la vie (aujourd’hui).
Des difficultés cognitives sont également rapportées. Parmi ces difficultés, les patients évoquent des limites à la résolution de problèmes et à l’abstraction de la pensée, ainsi qu’une incapacité et une lenteur à prendre des décisions judicieuses (Sim et Madden, 2008

). Les patients rapportent également une baisse de la concentration (Arnold et coll., 2008

) et des troubles de la mémoire (Lempp et coll., 2009

). Les dysfonctionnements cognitifs ou
fibro-fog représentent également un répertoire d’expériences communes, largement partagées, qui rendent les interactions sociales plus difficiles pour les patients (Dennis et coll., 2013

).
Dans la métasynthèse de Sim et Madden sur l’expérience du SFM (2008), des symptômes dépressifs sont rapportés par les patients sans être pour autant largement répandus. Ils sont décrits comme résultant d’autres symptômes, essentiellement la douleur et la fatigue, la perte de contrôle sur la pathologie et la vie en général, et le sentiment de perte d’une vie antérieure. Dans l’étude d’Aïni et coll. (2010

), les patients se disent déprimés, facilement irritables, voire agressifs. Ils disent ne plus avoir le goût de vivre, ni la force de se battre. Ils ont le sentiment de ne pas être compris et rapportent que le monde ne les écoute pas. Certains évoquent explicitement des idées suicidaires.
La sexualité est une dimension peu traitée dans la littérature sur l’expérience du SFM. Elle n’est abordée que dans quelques rares travaux. Dans l’étude d’Aïni et coll. (2010

), les patients évoquent des répercussions du SFM sur leur vie sexuelle, parce qu’ils « se sentent lâchés » par leur corps, ce qui entrave une sexualité épanouie d’une part, et d’autre part en lien avec un climat relationnel avec le partenaire souvent dégradé. L’altération de la sexualité apparaît à la fois comme cause et conséquence de l’ajustement du couple. Dans l’étude de Matarín Jiménez et coll. (2017

), malgré des limites éprouvées dans la sexualité, cette dernière est importante pour l’identité et la qualité de vie des femmes atteintes de SFM. Dans l’étude de Briones-Vozmediano et coll. (2016

), portant sur la façon dont le genre façonne les expériences des femmes vivant avec le SFM, ces dernières rapportent le sentiment de ne plus être la femme et l’épouse qu’elles ont le sentiment d’avoir été, tant dans la gestion des tâches ménagères que dans les relations intimes avec leur partenaire. Elles estiment ne pas assumer leurs « obligations » matrimoniales par manque d’énergie, ce qui entraîne chez elles un sentiment de culpabilité et d’insuffisance.
Corps étranger et monde vécu altéré
Les symptômes décrits précédemment sont les plus courants et sont rapportés dans les différentes études ciblées. Mais un sentiment de rupture brutale est également repéré de façon récurrente dans les discours des personnes concernées par le SFM (tableau 8.III

). Il nous paraît important de noter que les symptômes semblent avoir un emplacement corporel spécifique et que les plaintes développent la conscience d’un corps défaillant. Les personnes ne peuvent plus compter sur leur corps (Lempp et coll., 2009

; McMahon et coll., 2012a

). Elles ont l’impression de perdre leurs repères et sensations habituelles (Cedraschi et coll., 2013

; Dennis et coll., 2013

), l’usage (muscles léthargiques, perte de contact, immobilisation) et le contrôle de leur propre corps (McMahon et coll., 2012a

; Dennis et coll., 2013

). Elles décrivent les efforts considérables qu’elles fournissent pour tenter d’imposer un ordre et un sens à la complexité, à la multiplicité et à l’instabilité de leurs symptômes (Dennis et coll., 2013

). Des travaux rapportent le sentiment de dépossession du corps (intrusion par une force étrangère, sentiment de corps oppressant, manque de volonté du corps) (Nettleton, 2006

; Van Altena, 2008

; Madden et Sim, 2016

). Les personnes peuvent également se sentir prisonnières de leur propre corps (McMahon et coll., 2012a

), ou ont l’impression d’être déconnectées de leur corps, qu’elles considèrent comme méconnaissable parce « qu’étrange et étranger » (Råheim et Håland, 2006

). Les récits des femmes interrogées dans cette dernière étude soulignent un monde vécu comme étant transformé et altéré par un corps en souffrance chronique. Elles décrivent une lutte dans laquelle elles ont l’impression que leur existence est en jeu.
Tableau 8.III Littérature traitant du corps étranger et du monde vécu altéré
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil de données
|
Royaume-Uni
|
Lempp et coll., 2009
|
12 patients SFM
|
Entretiens qualitatifs
|
|
McMahon et coll., 2012a
|
10 patientes SFM
|
Récits de vie
|
|
Dennis et coll., 2013
|
20 patients SFM
|
Questions ouvertes par mail, ensuite dialogue par email
|
|
Nettleton, 2006
|
18 patients qui vivent avec des symptômes médicalement inexpliqués
|
Entretiens qualitatifs
|
|
Sim et Madden, 2008
|
23 études qualitatives réalisées entre 1995 et 2006
|
Métasynthèse
|
|
Madden et Sim, 2016
|
17 patients SFM
|
Entretiens semi-structurés
|
Belgique
|
Wuytack et Miller, 2011
|
6 patientes SFM
|
Entretiens semi-directifs
|
Suisse
|
Cedraschi et coll., 2013
|
56 patientes SFM
|
Entretiens semi-directifs
|
|
Cedraschi et coll., 2015
|
56 patientes SFM
|
Codage par 3 cliniciens (un médecin interniste, un psychiatre, un psychologue) expérimentés dans la prise en charge de patients avec douleur chronique
|
Norvège
|
Råheim et Håland, 2006
|
12 patientes SFM
|
Récits de vie
|
|
Mengshoel et coll., 2017
|
28 articles contenant des informations sur les expériences du diagnostic des patients
|
Revue systématique d’études qualitatives disponibles en mai 2016, selon les principes de la méta-ethnographie
|
Cette altération du monde vécu a pour conséquence la perte du sentiment de soi (ne plus habiter son corps en sécurité), du contrôle personnel et de la liberté d’agir (Råheim et Håland, 2006

; Mengshoel et coll., 2017

). Elle entraîne le sentiment d’une rupture brutale à tous les niveaux existentiels (Wuytack et Miller, 2011

). À l’image de ces vécus, les récits des personnes concernées par le SFM sont morcelés (Sim et Madden, 2008

; McMahon et coll., 2012a

) et ont une haute charge émotionnelle (Cedraschi et coll., 2015

).
Relations aux autres bouleversées et activités perturbées :
perte du sentiment d’identité
Les discours des personnes enquêtées font explicitement ressortir que ce n’est pas seulement le corps physiologique qui est atteint mais toute l’identité individuelle et sociale. La perte du sentiment de soi donne le sentiment d’enfermement, d’isolement et de repli social. Toute une littérature fait ressortir des relations perturbées avec l’environnement, la famille et les amis, mais bien souvent aussi avec la sphère professionnelle, ce qui a pour conséquence une véritable diminution du tissu social (Arnold et coll., 2008

; Sim et Madden, 2008

; Wuytack et Miller, 2011

; Golden et coll., 2015

). La perception d’un manque de compréhension renforce davantage encore le processus de l’enfermement (Armentor, 2017

). Le SFM modifie les liens familiaux : certains liens sont fragilisés, le SFM perturbant les rôles familiaux habituels, alors que d’autres s’en trouvent renforcés lorsque les proches deviennent source de soutien, tant sur le plan pratique qu’émotionnel (Wuytack et Miller, 2011

). Les patients décrivent une ambivalence dans l’interaction. Malgré quelques rencontres positives, la frustration découlant de l’incompréhension perçue domine (Kool et coll., 2009

; Kool et coll., 2010

). Par conséquent, les patients préfèrent ne pas partager leurs expériences (Wuytack et Miller, 2011

). L’incrédulité et le manque de compréhension chez les autres sont rapportés comme sources de difficultés dans les relations des patients (Armentor, 2017

). Les patients estiment que la gravité de leur état est sous-estimée par la famille, les amis et les professionnels de santé (Golden et coll., 2015

).
Le SFM entraîne la perte de certaines activités, telles que les activités professionnelles et de loisirs (Crooks, 2007

; Sim et Madden, 2008

). Les patients sont souvent amenés à réduire leur activité professionnelle voire à cesser de travailler, ce qui donne lieu à des sentiments d’inutilité et de perte d’identité. Les activités de loisirs sont également grandement affectées (Wuytack et Miller, 2011

).
Ainsi, le SFM impacte toutes les dimensions de la vie des patients. Les sphères personnelles, familiales, sociales, professionnelles sont touchées (Sim et Madden, 2008

; Wuytack et Miller, 2011

). La santé physique, mentale et sociale des patients est compromise et le SFM affecte leur sentiment d’identité (Lempp et coll., 2009

). Il ressort de cette littérature que le SFM a de graves conséquences sur la vie des patients. Le caractère aléatoire et instable des symptômes leur fait vivre des émotions pénibles et ne peut être circonscrit, ni par le contrôle personnel ni par un traitement efficace (Stuifbergen et coll., 2006

). Les personnes atteintes de SFM expriment un profond sentiment de perte de leur personnalité d’avant, de leur ancien « soi », ce qui se retrouve dans d’autres syndromes de douleur chronique (Russell et coll., 2018

; tableau 8.IV

).
Tableau 8.IV Littérature traitant de la perte du sentiment d’identité
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil de données
|
Littérature globale
|
États-Unis
|
Arnold et coll., 2008
|
48 patientes SFM
|
Focus groups
|
|
Golden et coll., 2015
|
1 228 patients SFM
|
Enquête
|
|
Armentor, 2017
|
20 patientes SFM
|
Entretiens semi-directifs
|
|
Stuifbergen et coll., 2006
|
91 patientes SFM
|
Illness Perception Questionnaire
|
Royaume-Uni
|
Lempp et coll., 2009
|
12 patients SFM
|
Entretiens qualitatifs
|
|
Russell et coll., 2018
|
14 patients SFM
|
Focus groups
|
|
Sim et Madden, 2008
|
23 études qualitatives réalisées entre 1995 et 2006
|
Métasynthèse
|
Belgique
|
Wuytack et Miller, 2011
|
6 patientes SFM
|
Entretiens semi-directifs
|
Pays-Bas
|
Kool et coll., 2009
|
10 patients SFM
|
Entretiens
Hierarchical cluster analysis
|
|
Kool et coll., 2010
|
142 patients atteints d’arthrite rhumatoïde
167 patients SFM
|
Questionnaire
|
Canada
|
Crooks, 2007
|
55 patientes SFM
|
Entretiens approfondis et test standardisé (Sickness Impact Profile)
|
Littérature traitant spécifiquement du genre masculin
|
États-Unis
|
Muraleetharan et coll., 2018
|
1 163 patients hommes avec diagnostic SFM
|
Enquête qualitative
|
Norvège
|
Sallinen et Mengshoel, 2017
|
5 patients hommes avec diagnostic SFM
|
Récits de vie
|
Les échantillons des études rapportées sont souvent exclusivement féminins, ou n’intègrent que quelques hommes, et peu de travaux font ressortir des éléments spécifiques à propos de la population masculine. Muraleetharan et coll. (2018

) ainsi que Sallinen et Mengshoel (2017

) ont choisi de se focaliser sur les hommes atteints de SFM. L’étude de Muraleetharan et coll. aux États-Unis est basée sur une enquête qualitative à laquelle 1 163 hommes déclarant souffrir de SFM ont répondu. Sallinen et Mengshoel, en Finlande, ont quant à eux interviewé cinq hommes ayant reçu un diagnostic de SFM. Ces deux études font apparaître la double peine vécue par ces hommes : faire face à des symptômes accablants et ne pas être reconnu comme patient, le SFM étant considéré comme une pathologie de femmes.
Stratégies de faire face des patients : vers des expériences
de « mieux-être »
Les patients adoptent une variété de stratégies pour faire face aux symptômes et gérer leur quotidien (tableau 8.V

; Sim et Madden, 2008

; Sallinen et coll., 2011

; Kengen Traska et coll., 2012

). Elles reposent sur un ensemble d’attitudes comprenant la résistance, l’accommodation et l’acceptation. Cependant, celles-ci ne sont pas nécessairement des étapes séquentielles, linéaires ou exclusives dans la mesure où certains informateurs décrivent avoir atteint un équilibre entre l’attitude qui consiste à lutter contre les symptômes (résistance) et celle qui cherche à vivre avec (accommodation, adaptation) (Sim et Madden, 2008

).
Juuso et coll. (2013

) ont identifié ce que signifie « se sentir bien » pour treize femmes souffrant de SFM. Cela consiste à avoir la force de s’impliquer, pouvoir contrôler sa vie, être autonome. Celles-ci expliquent ainsi combien être actives au quotidien leur procure un « calme intérieur », un « sentiment de bonheur », et « de bonnes sensations » tant au niveau du corps que de l’esprit. Le printemps et l’été sont décrits comme des saisons plus favorables pour être actives ou se sentir mieux. Se sentir bien c’est aussi trouver son propre rythme, prendre soin d’autrui et être prise en charge par l’entourage et les soignants. L’enjeu de la légitimité est essentiel. Les personnes concernées par le SFM veulent être crues et acceptées par les autres et éprouver des sentiments d’appartenance.
Dans l’étude de Grape et coll. (2015

), huit femmes indiquées comme rétablies («
who had recovered from FMS ») rapportent l’effort considérable qu’elles doivent poursuivre pour rester en « bonne santé ». Elles réalisent trois formes différentes de travail : un travail de la pathologie et un travail de la vie quotidienne, consistant à réorganiser leur vie avec le SFM d’un point de vue pratique (prévention des symptômes, mise en place de stratégies de
coping...), mais aussi un travail biographique qui renvoie à la façon dont la personne rétablie recrée sa propre histoire, via notamment le récit permettant la reconstruction du soi (Grape et coll., 2015

).
Tableau 8.V Littérature traitant des stratégies de coping des personnes avec un diagnostic de fibromyalgie
Pays
|
Référence
|
Stratégies de coping
|
Espagne
|
Briones-Vozmediano et coll., 2016
|
– Changer les routines quotidiennes
– Faire face à la douleur en étant créatif et en trouvant différentes façons de faire sans ressentir la douleur (dans la sexualité notamment)
|
États-Unis
|
Vincent et coll., 2016
|
Au moment des poussées :
– Recourir à des traitements pharmaceutiques et non pharmaceutiques (massage, chaleur/froid, hydrothérapie et exercice doux ; méditation, respiration profonde, prière et humour)
– Se reposer
– Éviter de « faire quoi que ce soit »
– Attendre que la douleur passe
|
|
Kengen Traska
et coll., 2012
|
– Réguler/planifier
– Se focaliser sur des distractions mentales ou physiques (exercices par exemple)
– Éviter la douleur attribuable à une sensibilité extrême au toucher
– Bénéficier du support social d’autres patients
– « Se bouger » et « mettre son masque »
– Recourir aux médicaments
|
Canada
|
Crooks, 2015
|
– Mettre en place des parcours et routines quotidiens pour réguler et gérer son énergie
|
Royaume-Uni
|
Dennis et coll., 2013
|
– Installer des routines strictes
– Se focaliser sur des distractions mentales ou physiques (exercice par exemple)
– Prendre un bain chaud ou se faire masser
|
|
McMahon et coll., 2012a
|
– Réguler les niveaux d’activité et résister à l’envie « de faire trop d’efforts »
– Réévaluer les attitudes et les priorités, s’engager dans une réflexion positive
– Relativiser
|
Finlande
|
Sallinen et coll., 2011
|
– Recourir au soutien par les pairs
|
Métasynthèse
|
Sim et Madden, 2008
|
– Rechercher de l’information pour comprendre le SFM
– S’engager dans une pensée positive
– Résister à la prédominance des symptômes
– Trouver de la distraction dans des activités agréables
– Planifier les activités en utilisant des routines quotidiennes soigneusement structurées et limiter certaines activités
– Recourir aux réseaux sociaux ou familiaux et à des groupes de soutien
– Recourir à l’aide professionnelle de médecins ou thérapeutes
|
Norvège
|
Råheim et Håland, 2006
|
– Mise en place de routines
– Forcer son corps à agir
– Vaincre la douleur encore et encore
– Participer, être impliqué
|
Recherche d’informations sur Internet : quête de réponses
et de légitimité
L’information sur leur pathologie et leur devenir est très importante pour les personnes vivant avec le SFM ou concernées par le SFM, et Internet apparaît comme une source d’information très importante pour elles (Daraz et coll., 2011b

; Chen, 2012

; tableau 8.VI

). Elles accordent également beaucoup d’importance à l’information émanant des professionnels de la santé, de la famille et des amis. Parmi les sources en ligne, les sites Web, les portails de santé et les comptes de réseaux sociaux liés à la santé sont les plus fréquemment utilisés. Les sujets d’intérêt pour les personnes atteintes de SFM varient au fur et à mesure de l’évolution de la pathologie d’un stade initial de « confusion », au diagnostic et, éventuellement, à un stade d’équilibre dans lequel elles sont satisfaites de la manière dont elles parviennent à faire face à leur état. Leurs recherches portent sur les symptômes et les traitements, mais reflètent également et bien souvent un besoin de comprendre la signification de leur condition (Chen, 2012

). L’étude de Chen (2016

) a identifié quatre principales positions dans les parcours de pathologie : le début des symptômes, la progression vers le diagnostic, l’acceptation et le développement d’une stratégie de prise en charge efficace. Les informations recherchées changent au fil de ces parcours, passant d’une recherche active d’informations à une phase de veille pour être au courant de l’actualité sur le diagnostic avec une recherche ciblée intermittente, notamment lors de l’apparition de nouveaux symptômes, ou encore dans l’objectif de vérifier une information apprise de manière fortuite.
Tableau 8.VI Littérature traitant de la recherche d’information des patients
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil de données
|
Canada
|
Daraz et coll., 2011a
|
Analyse des 25 premiers sites Web identifiés à l’aide de Google et du mot clé de recherche « fibromyalgia »
| |
|
Daraz et coll., 2011b
|
442 personnes avec SFM
|
Enquête
|
États-Unis
|
Chen, 2012
|
190 personnes avec SFM
|
Enquête en ligne
|
|
Chen, 2016
|
23 personnes avec SFM
|
Entretiens
|
Italie
|
Bragazzi et coll., 2017
|
Exploration à l’aide de Google Trends (GT) de l’activité Internet liée au SFM
| |
Bragazzi et coll. (2017

) ont exploré l’intérêt que représente le SFM sur Internet, via l’analyse de l’activité Internet autour du terme
fibromyalgia en utilisant l’outil Google Trends (voir également le chapitre « L’expérience d’un trouble somatique fonctionnel : aspects sociologiques du syndrome fibromyalgique »). Une très grande quantité d’informations sur le SFM ainsi que des sujets connexes existent en ligne, et un intérêt important pour ces sites est repérable au cours des treize dernières années. On note cependant une légère baisse de cet intérêt, avec une stabilisation au cours de ces cinq dernières années. Les préoccupations des internautes portent principalement sur les effets secondaires des médicaments et sur la nature « insaisissable » du SFM : s’agit-il d’une condition réelle ou imaginaire ? Cela existe-t-il vraiment ou est-ce « tout dans la tête » ?
Si Internet constitue un espace de recherche d’informations important, Daraz et coll. (2011a

) font ressortir que les ressources d’information sur le SFM en ligne ne fournissent pas d’informations complètes. Elles sont même caractérisées par une mauvaise qualité et lisibilité et s’avèrent peu utilisables pour la plupart des gens.
Expériences des traitements : expression d’une ambivalence
et médiation de la relation de soin
Les options de traitement actuelles se concentreraient sur la prise en charge des symptômes pour améliorer les fonctions/activités et la qualité de vie plutôt que sur les causes pathophysiologiques sous-jacentes trop mal connues (Skaer et Kwong, 2017

). Les personnes concernées par le SFM ont un avis sur ce qui est susceptible de les aider, de les soulager, et sur ce qui au contraire n’améliore pas les symptômes. Elles font le plus souvent l’expérience de différents types de traitements et le recueil de leurs points de vue et constats apporte un éclairage riche pour l’ajustement de leur prise en charge.
Selon une étude américaine de 2007, les médicaments considérés comme les plus efficaces par les patients (2 596 personnes) sont les analgésiques, les antidépresseurs et les hypnotiques (Bennett et coll., 2007

). Plus récemment, Katz et Leavitt (2017

) ont montré qu’il s’agissait des opiacés contre la douleur, des médicaments pour améliorer le sommeil, et des stimulants ADD (
attention deficit disorder ou troubles de l’attention) pour les symptômes de type
fibro-fog. Les informateurs d’une étude qualitative au Royaume-Uni ont également des perceptions positives vis-à-vis de l’acupuncture, de l’hydrothérapie et des centres antidouleur (Ashe et coll., 2017

; tableau 8.VII

).
Néanmoins, la littérature rend compte de l’ambivalence des personnes concernées par le SFM à l’égard des médicaments. Elles ont souvent testé une multitude de médicaments (Kengen Traska et coll., 2012

; Roux et Durif-Bruckert, 2014

; Durif-Bruckert et coll., 2015

) et elles émettent des craintes à propos de ces traitements. Leur crainte porte tout d’abord sur les effets secondaires des médicaments (Durif-Bruckert et coll., 2015

), notamment la prise de poids (Ashe et coll., 2017

; Matarín Jiménez et coll., 2017

).
Tableau 8.VII Littérature abordant les médicaments
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil
de données
|
Littérature traitant des médicaments
|
États-Unis
|
Skaer et Kwong, 2017
|
Article d’analyse non empirique
|
|
Bennett et coll., 2007
|
2 596 patients SFM
|
Enquête
|
|
Katz et Leavitt, 2017
|
95 patients
|
Questionnaire
|
Royaume-Uni
|
Ashe et coll., 2017
|
14 patients SFM
|
Entretiens qualitatifs
|
Littérature traitant de l’ambivalence des patients vis-à-vis des médicaments
|
Royaume-Uni
|
Ashe et coll., 2017
|
14 patients SFM
|
Entretiens qualitatifs
|
|
Lemp et coll., 2009
|
12 patients SFM
|
Entretiens qualitatifs
|
|
Dennis et coll., 2013
|
20 patients SFM
|
Questions ouvertes par mail, puis dialogues par email
|
France
|
Durif-Bruckert et coll., 2015
|
35 patients SFM
|
Entretiens semi-directifs
|
|
Roux et Durif-Bruckert, 2014
|
35 patients SFM
|
Entretiens semi-directifs
|
Espagne
|
Matarín Jiménez et coll., 2017
|
13 patientes SFM
|
Focus group et entretiens semi-structurés
|
États-Unis
|
Kengen Traska et coll., 2012
|
8 patientes SFM
|
Entretien de groupe
|
Littérature traitant de l’activité physique
|
Espagne
|
Sanz-Baños et coll., 2016
|
46 patientes SFM
|
Focus groups
|
Royaume-Uni
|
Russell et coll., 2018
|
14 patients SFM
|
Focus groups
|
Elles parlent également de la nocivité des médicaments et de la menace de l’addiction, associées à l’impression d’un bénéfice très limité des traitements médicamenteux (Dennis et coll., 2013

). Elles craignent encore que les médicaments dissimulent les symptômes sans traiter les causes et les problèmes de fond de la pathologie (Lemp et coll., 2009

). Dans l’étude de Dennis et coll. (2013

), les participants signalent une réticence à traiter leurs symptômes avec des médicaments, et envisagent la médication comme une solution de dernier recours. Kengen Traska et coll. (2012

) ont également montré que la médication ne constitue pas une stratégie prioritaire de gestion de la pathologie pour les patients. Il faut cependant relever que malgré ces réserves, les patients restent à la recherche du traitement qui fonctionne et qui les soulage. Ashe et coll. (2017

) ont mis en lumière la lutte des informateurs de leur étude face aux médecins pour obtenir des antalgiques.
Dans la littérature sur les perspectives des patients quant aux traitements, des liens importants apparaissent entre l’expérience des médicaments et les enjeux qui gouvernent la relation de soin. Dans le même sens, Ashe et coll. (2017

), mais aussi Durif-Bruckert et coll. (2015

), relèvent une gêne de la part des patients envers les médecins prescrivant des thérapies psychothérapiques pour la douleur (voir également chapitre « Efficacité des accompagnements psychothérapiques des personnes présentant un syndrome fibromyalgique »). Ce type de traitement proposé par les soignants constituerait pour eux un indice de la faible importance et de la non-légitimité accordées à leur pathologie. Plus généralement, les médicaments jouent un rôle important de médiation dans la relation de soin (Durif-Bruckert et coll., 2015

). De même, les personnes consultant pour un SFM évaluent la qualité de la relation avec le soignant au travers des modalités de prescription des médicaments : le temps pris par le médecin pour expliquer, affiner et ajuster leurs effets. Et réciproquement, la prise en compte par les médecins des représentations que les patients ont des médicaments peut permettre une plus juste prescription (Roux et Durif-Bruckert, 2014

).
Concernant une prise en charge basée sur l’activité physique, fortement recommandée dans le SFM, seuls quelques travaux se sont intéressés aux significations associées pour les patients (Sanz-Baños et coll., 2016

; Russell et coll., 2018

). L’objectif de ces études est de comprendre la faible adhésion à cette pratique qui pourtant est celle qui est connue pour améliorer le plus la santé des patients (voir chapitre « Activités physiques et thérapies multidisciplinaires dans la fibromyalgie »). Ces derniers travaux posent une association entre le sentiment d’atteinte de l’identité et la difficulté à se sentir en mesure d’entreprendre une activité physique. Les professionnels de la santé doivent tenir compte de ce lien lors de la prescription d’exercices (Russell et coll., 2018

). Une première étape réussie de l’accompagnement thérapeutique des personnes atteintes de SFM consiste à créer une relation empathique et à rassurer le patient sur le fait que le clinicien comprend l’impact de la maladie et comprend les défis que présente le SFM en termes d’activité physique et d’engagement dans l’exercice.
Conclusion
Dans cette première partie, les articles synthétisés révèlent la complexité de l’expérience des patients avec un diagnostic de SFM : complexité des symptômes, complexité d’un corps devenu étrange et étranger, complexité de la relation aux autres et au quotidien qui en découle. La littérature existante a bien exploré les dimensions de cette expérience, en particulier via le recours aux récits de patients.
Il ressort des différentes études une ambivalence forte à l’égard des traitements, tant pour les patients que pour les professionnels de santé, et des incompréhensions pouvant en découler. En effet, les patients accordent une grande importance aux médicaments qui leur sont prescrits, pour leurs effets espérés sur les symptômes mais aussi car ils sont le signe que le médecin reconnaît leur pathologie comme entité biomédicale et comme trouble relevant du domaine médical. Mais en même temps, ils redoutent certains effets possibles des médicaments de même qu’ils redoutent de devenir dépendants sans amélioration nette de leur état. Leurs représentations des thérapies basées sur l’activité physique sont globalement positives, mais ils se disent attentifs à ce que les prescriptions de celles-ci n’évacuent pas pour autant la prise en charge médicale.
Il serait véritablement nécessaire, en France en particulier, de faire des investigations sur la spécificité des expériences de la maladie chez les hommes et auprès des patients qui se sentent rétablis, d’une part ; et d’autre part, sur les liens entre l’expérience, l’évolution de la maladie et les systèmes de soins en place.
Représentations réciproques entre les médecins
et les personnes atteintes de fibromyalgie : malaise
dans la relation de soin
Connaissances et représentations du SFM chez les professionnels
de santé
Un nombre important de travaux font état d’une faible connaissance du SFM, de ses symptômes et traitements de la part des soignants, en particulier des médecins généralistes. Ce constat concerne différents pays, notamment le Canada (Hayes et coll., 2010

), les États-Unis (Hadker et coll., 2011

; Hughes et coll., 2016

), mais aussi le Mexique (Martínez Lavín, 2007

), et plus récemment l’Iran (Kianmehr et coll., 2017

), et le Pérou (Acuña Ortiz et coll., 2016

). Le même constat ressort de l’enquête transnationale de Perrot et coll. (2012

). Ce savoir limité sur le SFM des personnels de santé en « première ligne » a été mesuré dans les différentes études par une auto-déclaration des médecins, ou à partir d’une évaluation des connaissances réalisée par questionnaires. Comme indiqué par Able et coll., malgré des préconisations médicales publiées aux États-Unis, la connaissance du SFM reste limitée, et son traitement variable en fonction des spécialités médicales (Able et coll., 2016

).
À ce manque de connaissance peuvent être associés d’une part un scepticisme de la part des soignants concernant la légitimité du diagnostic du SFM, et d’autre part des représentations négatives qu’ils ont des patients concernés par le SFM. Dans l’étude de Hayes et coll. (2010

) menées sur 328 médecins au Canada, une majorité de médecins généralistes enquêtés ne croyaient pas qu’on puisse poser un diagnostic de FM et près d’un quart d’entre eux décrivaient les patients atteints de SFM comme des simulateurs. Dans une étude espagnole publiée en 2018, Briones-Vozmediano et coll. montrent que parmi douze soignants interrogés, « la femme qui se plaint » représente le prototype du patient atteint de SFM. Dans la même étude, ces derniers questionnent également la véracité des symptômes décrits par les patients. Ces auteurs ont repéré deux positions différentes dans les discours des professionnels de la santé enquêtés. Certains croient en la souffrance des patients, et défendent l’existence du SFM en tant que maladie. D’autres doutent de certains patients et considèrent qu’ils peuvent prétendre avoir de faux symptômes ou qu’ils les exagèrent afin d’obtenir des avantages tels que des arrêts maladie ou une aide financière liée à une allocation d’invalidité. Par ailleurs, Pastor et coll. (2012

), en Espagne, ou encore Amber et coll. (2014

) aux États-Unis, ont montré qu’une majorité de médecins considère que les causes principales du SFM sont d’ordre psychologique et non biologique. Le tableau 8.VIII

rassemble les différentes études traitant des connaissances et représentations du SFM chez les soignants.
Tableau 8.VIII Littérature abordant les connaissances et représentations du syndrome fibromyalgique chez les personnels de santé
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil des données
|
Iran
|
Kianmehr et coll., 2017
|
190 médecins généralistes
|
Questionnaire détaillé (incluant des items sur les signes et les symptômes, les critères de diagnostic et le traitement)
|
Pérou
|
Acuña Ortiz et coll., 2017
|
145 médecins
|
Questionnaire
|
États-Unis
|
Amber et coll., 2014
|
72 médecins internistes et généralistes
211 étudiants en médecine
|
Questionnaire
|
|
Hadker et coll., 2011
|
94 médecins de première ligne
|
Méthodologie mixte : sondages suivis de groupes de travail semi-structurés
|
|
Hughes et coll., 2016
|
66 infirmiers praticiens
|
Questionnaire
|
|
Able et coll., 2016
|
Rhumatologues (n = 54), médecins de premier recours (n = 25), groupe hétérogène de médecins spécialistes de la douleur, médecine physique, psychiatrie, neurologie, obstétrique ou gynécologie, ostéopathie ou spécialité non spécifiée (n = 12)
|
Questionnaire
|
Espagne
|
Briones-Vozmediano et coll., 2018
|
12 prestataires de soin impliqués dans le soin de patients atteints de SFM
|
Entretiens semi-structurés individuels
|
|
Pastor et coll., 2012
|
208 médecins généralistes
|
Brief Illness Perception Questionnaire, échelles ad hoc d’auto-efficacité clinique, comportement clinique et satisfaction
|
France
|
Perrot et coll., 2012
|
1 622 médecins dans 6 pays européens, Mexique et Corée du Sud
|
Questionnaire via un entretien téléphonique de 15 minutes
|
Canada
|
Hayes et coll., 2010
|
189 généralistes
139 spécialistes
|
Méthodologie mixte : groupes de discussion, entretiens semi-structurés et enquête quantitative électronique
|
Problématique de la formation et de la sensibilisation
des étudiants en médecine
Les travaux qui se sont plus particulièrement intéressés aux étudiants en médecine ou d’autres cursus dans le domaine du soin témoignent avec acuité de l’impact de la formation sur l’intériorisation et la reproduction de représentations négatives vis-à-vis du SFM (tableau 8.IX

). En Norvège, Album et Westin (2008

) ont montré qu’il est peu valorisé pour les étudiants en médecine et les médecins de prendre en charge le SFM, à l’inverse de pathologies qui se situent en haut de l’échelle du prestige dans la culture médicale comme l’infarctus du myocarde, la leucémie et les tumeurs cérébrales. Le fait que le patient typique atteint de SFM soit une femme pourrait faire partie des facteurs explicatifs. Plus largement, des scores de faible prestige sont attribués aux pathologies et aux spécialités associées notamment aux affections chroniques n’ayant pas de localisation corporelle spécifique, ou encore dont les procédures de traitement sont peu sophistiquées. Le SFM répond à ces critères qui sont peu valorisés. Ces résultats sont identiques dans la même étude réactualisée récemment (Album et coll., 2017

).
Selon les études et leur contexte géographique et temporel, les étudiants en médecine, tout comme les médecins enquêtés, ont des attitudes contrastées à l’égard du SFM, ont des connaissances et développent des représentations différentes. Dans l’étude d’Amber et coll. (2014

) menée aux États-Unis, les étudiants en médecine développent davantage que les médecins l’idée d’une origine organique et non psychosomatique du SFM. Les étudiants en médecine interrogés par Silverwood et coll. (2017

) en Norvège ont au contraire une compréhension limitée du SFM et sont sceptiques quant à son existence. Ces attitudes sont influencées par le « curriculum caché » des étudiants, à savoir des connaissances non inscrites dans les cursus de formation qui se transmettent de manière implicite au travers des attitudes et comportements de leurs professeurs vis-à-vis de cette pathologie. Le manque d’enseignement formel au sujet du SFM vient signifier implicitement le peu de sérieux et la faible priorité qui lui sont accordés. En revanche, rencontrer un patient, un ami ou un membre de la famille atteint de SFM peut accroître les connaissances et mener à des perceptions différentes de la pathologie. Amber et coll. (2013

) ont montré que la compréhension que les étudiants ont du SFM dans les premières années de la formation en médecine peut être influencée par la publicité sur les médicaments, mais qu’après une formation médicale suffisante, leur compréhension du SFM est davantage influencée par des sources factuelles qui renversent avec succès toute forme d’influence de la publicité. Friedberg et coll. (2008

) ont montré quant à eux que l’exposition, même relativement brève des étudiants, via un séminaire interactif de courte durée, à des informations factuelles sur des pathologies spécifiques médicalement inexpliquées comme le syndrome de fatigue chronique ou le SFM, est associée à des attitudes plus favorables envers ces pathologies. Ces enjeux se retrouvent chez des étudiants d’autres disciplines. Au Canada, les étudiants en chiropraxie, naturopathie, kinésithérapie et ergothérapie sont en désaccord sur l’étiologie du SFM (Busse et coll., 2008

). Les étudiants en chiropraxie sont les plus sceptiques à l’égard du SFM en tant qu’entité diagnostique utile, et lui associent davantage que les autres une étiologie psychologique et non biologique. Ces représentations qui varient en fonction des sources de formation et d’informations, sont déterminantes sur les recours et les interactions de soin.
Tableau 8.IX Littérature traitant de la formation et de la sensibilisation des étudiants en médecine à la fibromyalgie
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil de données
|
Norvège
|
Album et Westin, 2008
|
242 médecins seniors, 327 médecins généralistes, et 317 étudiants en dernière année de médecine
|
Questionnaire
|
|
Album et coll., 2017
|
3 études sur le prestige des maladies dans la culture médicale
|
Analyse comparative
|
Royaume-Uni
|
Silverwood et coll., 2017
|
21 étudiants en médecine
|
Entretiens qualitatifs
|
États-Unis
|
Amber et coll., 2014
|
72 médecins internistes et de famille
211 étudiants en médecine
|
Questionnaire
|
|
Amber et coll., 2013
|
120 étudiants
|
Questionnaire
|
|
Friedberg et coll., 2008
|
45 étudiants en quatrième année de médecine
|
Questionnaire avant et après séminaire interactif
|
Canada
|
Busse et coll., 2008
|
336 étudiants en chiropratique, naturopathie, physiothérapie et ergothérapie
|
Enquête
|
Une rencontre « embarrassante » avec les patients :
la problématique du diagnostic
L’ensemble de méconnaissances, malaises et préjugés vis-à-vis des personnes consultant pour une souffrance fibromyalgique ne prédispose guère les médecins à se positionner dans une attitude diagnostique clairement définie et positive (Undeland et Malterud, 2007

). Pour Hayes et coll., le SFM est sous-diagnostiqué et son traitement est sous-optimal (Hayes et coll., 2010

). Le diagnostic ressort bien comme la problématique centrale du SFM et le retard de diagnostic se présente comme l’un des facteurs aggravants du SFM.
Essayons sur la base de la littérature d’analyser quelques-uns des enjeux et des mécanismes de cette problématique (tableau 8.X

). Le SFM n’est pas un diagnostic exclusif et peut être concomitant à d’autres maladies comme nous avons pu le lire dans le chapitre « Critères diagnostiques, diagnostics différentiels, comorbidités et sous-groupes ». Une étude de population utilisant le questionnaire d’auto-évaluation de 31 points a révélé que 17 % des 845 patients atteints d’arthrose, 21 % de 5 210 atteints de polyarthrite rhumatoïde et 37 % de 439 atteints de lupus érythémateux disséminé remplissaient les critères ACR 2010 de diagnostic de SFM (Wolfe et coll., 2011

). Cette composante fibromyalgique peut influer sur l’efficience de la prise en charge, et il est important de la reconnaître pour éviter une surenchère médicamenteuse inutile. Or, les écueils des soignants vis-à-vis du SFM rencontrent et renforcent ceux des patients. Les deux groupes sont insatisfaits du processus de gestion du SFM dans son ensemble. Patients et professionnels de santé expriment leur mécontentement quant au délai pour établir un diagnostic et obtenir un traitement efficace. Les patients indiquent le besoin d’un plus grand soutien moral de la part des professionnels, alors que ces derniers se sentent souvent frustrés et ont le sentiment d’être peu aidants pour les patients. Les patients et les professionnels s’accordent sur l’incertitude à fournir une cause pathologique claire, à identifier les symptômes et à choisir une intervention pour résoudre un problème entourant la prise en charge du SFM (Briones-Vozmediano et coll., 2013

), l’incertitude recouvrant une « perception subjective de l’incapacité à fournir une explication précise du problème de santé du patient » (Pincus et coll., 2018

).
Dans le champ de la pédiatrie, l’incertitude diagnostique perçue chez les jeunes souffrant de douleur chronique pédiatrique idiopathique, ainsi que chez leurs parents, est d’une importance critique pour comprendre les cognitions de douleur, les réponses comportementales à la douleur, les choix de traitement et les résultats pendant cette période de développement (Pincus et coll., 2018

). Jordan et coll. (2007

) ont examiné le contexte social plus large de l’incertitude diagnostique, soulignant que les pairs en bonne santé et les enseignants remettent en question la légitimité de la douleur chez les enfants et les adolescents souffrant de douleur chronique en l’absence de documentation médicale. Ainsi, ils offrent plus de soutien aux enfants ayant des problèmes de douleur diagnostiqués médicalement plutôt qu’inexplicables.
Tableau 8.X Littérature traitant du diagnostic de fibromyalgie chez le jeune et l’adulte
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil de données
|
Royaume-Uni
|
Pincus et coll., 2018
|
Revue littérature enfants, adolescents avec des douleurs chroniques
| |
|
Jordan et coll., 2007
|
15 parents/soignants d’adolescents avec des douleurs chroniques
|
Focus groups
|
|
Rahman et coll., 2014
|
Pas de précision méthodologique
| |
|
Nettleton, 2006
|
18 patients qui vivent avec des symptômes médicalement inexpliqués
|
Entretiens qualitatifs
|
Norvège
|
Undeland et Malterud, 2007
|
11 patientes SFM
|
Focus groups
|
Canada
|
Hayes et coll., 2010
|
189 généralistes,
139 spécialistes
|
Méthodologie mixte : groupes de discussion, entretiens semi-structurés et enquête quantitative électronique
|
Espagne
|
Briones-Vozmediano
et coll., 2013
|
12 patients SFM
9 professionnels de la santé
|
Entretiens semi-structurés
|
Italie
|
Salaffi et coll., 2012
|
252 rhumatologues
86 patients SFM
|
Exercices Delphi*
|
États-Unis
|
Mease et coll., 2008
|
23 cliniciens ayant de l’expertise avec SFM 100 patients SFM
|
Exercices Delphi
|
|
Clauw et coll., 2018
|
Pas de précision méthodologique
| |
Mexique
|
Martínez Lavín, 2007
|
Pas de précision méthodologique
| |
* Méthode structurée de construction d’un consensus par questionnaires associés à des échanges d’opinion.
Deux études similaires réalisées l’une en Italie (Salaffi et coll., 2012

) et l’autre aux États-Unis (Mease et coll., 2008

) ont montré que médecins et patients s’accordent également sur les symptômes les plus communs du SFM : douleur, fatigue, troubles du sommeil et perturbations de la qualité de vie liée à la santé, symptômes dépressifs voire dépression comorbides et troubles cognitifs. Cependant, Salaffi et coll. montrent que l’intensité des points douloureux est considérée par les cliniciens mais pas par les patients. Ces derniers relèvent en revanche une sensibilité environnementale (aux odeurs, sons, lumières, changements de température) alors que les soignants ne la retiennent pas. Mease et coll. ont quant à eux repéré que la raideur est classée par les patients mais pas par les cliniciens. En revanche, les effets secondaires des traitements sont importants pour les cliniciens mais ne sont pas identifiés comme tels par les patients.
Les malentendus entre la perspective des patients et celle des soignants peuvent être à l’origine d’interactions sensibles. En 2007, Martínez-Lavín listait plusieurs des raisons pouvant participer à une détérioration de la relation patient-médecin, plus spécifiquement en rhumatologie : le manque de connaissance de la part du praticien, son incrédulité, son manque de formation sur les mécanismes de base de la douleur chronique, la non-considération de l’impact psychologique du SFM, l’inefficacité des médications ainsi que le temps limité des consultations. Les résultats de cette étude suggèrent qu’il est courant que les personnes atteintes de SFM vivent de multiples rencontres négatives avec des professionnels de la santé car elles ne s’y sentent pas entendues et le plus souvent elles ne se sentent pas crues.
Comme nous l’avons vu précédemment, les médecins sont majoritairement frustrés du fait de leur incapacité à établir un diagnostic précis lors de rencontres médicales avec des patients qui peuvent être considérés comme atteints de SFM. Cette question est vive sur un plan clinique dans la mesure où le diagnostic rapide est supposé améliorer la satisfaction des patients (Clauw et coll., 2018

), tandis qu’un manque de diagnostic affecterait négativement les activités de la vie quotidienne et la qualité de vie. Le diagnostic est d’autant plus important que la société n’accorde pas la permission d’être malade en l’absence de pathologie identifiable reconnue (Nettleton, 2006

; voir chapitre « L’expérience d’un trouble somatique fonctionnel : aspects sociologiques du syndrome fibromyalgique »).
L’attitude ambivalente des médecins vis-à-vis du diagnostic :
plusieurs formes de réponses
Le processus diagnostique transpose la plainte du patient en symptômes et signe l’entrée de la pathologie dans un tableau nosologique et à l’intérieur d’un système de soins, ce qui lui attribue une légitimité (Dumit, 2006

; Jutel, 2009

). Ainsi par l’élaboration diagnostique, le patient et les professionnels s’approprient la pathologie en tant qu’objet d’expertise et de réponses médicales. Le diagnostic a une fonction de garant de l’autorité médicale. Lorsqu’au cours d’une consultation le médecin ne retrouve aucune explication somatique, il éprouve les limites de son savoir et se sent mis en échec. Dans l’étude de Hayes et coll. (2010

), les médecins généralistes, davantage que les spécialistes, pensent qu’il est difficile de reconnaitre un SFM.
En parallèle, d’autres travaux soulignent la frustration et le sentiment d’incapacité que peuvent leur faire vivre les symptômes inexplicables et incontrôlables présentés par les patients. En effet, face à ces derniers, les médecins ne se sentent pas en capacité de contrôler la situation (Pastor et coll., 2012

). Ils peuvent hésiter à accepter des patients atteints de SFM, non à cause d’une image stigmatique du « patient difficile », mais plutôt à cause de la difficulté de contrôler sur le plan clinique les symptômes du SFM (Homma et coll., 2016

; tableau 8.XI

).
Par ailleurs, le retard de diagnostic est expliqué par le fait que les critères de classification et de diagnostic reconnus à l’échelle internationale sont peu utilisés en clinique courante. Hugues et coll. (2016

) montrent qu’il est fort possible que de nombreux médecins généralistes hésitent à diagnostiquer des pathologies mal définies et suggèrent qu’il existe une forte variation de l’utilisation du terme diagnostique SFM. Il est important de nouveau de signaler que le SFM peut être concomitant à un autre diagnostic comme la polyarthrite rhumatoïde, ce qui peut expliquer que la réponse thérapeutique n’est pas celle attendue. Sur le terrain des soins, et au regard des représentations qui nourrissent les interactions médecin/patient, le défi pour les médecins est bien celui de tolérer l’incertitude d’une symptomatologie autant fluctuante que confuse et pour autant génératrice de plaintes exprimées et de conséquences bien inscrites dans le réel (McMahon et coll., 2012b

). L’incertitude entourant le SFM semble influencer la pratique professionnelle des soignants et participer à une faible reconnaissance du SFM en tant que pathologie grave (Briones-Vozmediano et coll., 2018

).
Toutefois, face à cette incertitude et à la difficulté de poser un diagnostic, tous les médecins n’adoptent pas la même attitude. Les articles du corpus de ces dix dernières années, tant auprès des médecins que des patients, font ressortir plusieurs catégories d’attitudes des médecins vis-à-vis du diagnostic SFM (qui ne sont peut-être pas exclusives pour une personne et qui fluctuent dans le temps des plaintes et des recours).
Une part des médecins, qui contestent la catégorie de SFM, soulignent l’importance d’être franc avec les patients sur l’état incertain des connaissances, c’est-à-dire sur l’impossible reconnaissance actuelle du SFM comme pathologie biomédicale, tout en proposant pour répondre aux symptômes une prise en charge globalement concrète incluant rééducation à l’effort, thérapie cognitive ou psychothérapie, sans exclure la prescription d’antalgiques (Nacu et Benamouzig, 2010

). Dans ce cas de figure, le médecin aide le patient à aller vers l’acceptation de la situation et propose des voies de gestion des symptômes sans reconnaître pour autant le syndrome en tant que tel.
D’autres sont plus embarrassés par la situation et cherchent un équivalent de tableau clinique pour gérer l’incertitude et pouvoir juger de la légitimité des demandes. Ainsi, ils attribuent aux personnes atteintes de SFM une combinaison de causes autres que biomédicales. Le plus souvent, il s’agit de problèmes sociaux et de traits de personnalité problématiques (Mik-Meyer et Obling, 2012

; Griffith et Ryan, 2015

; Mengshoel et coll., 2017

). L’absence de diagnostic médical traditionnel conduit donc les médecins pour sortir de l’impasse diagnostique à créer le plus fréquemment un diagnostic psychologique qui s’apparente à un diagnostic clinique dans sa fonction de modèle explicatif (Mik-Meyer et Obling, 2012

). Plus radicalement, Pastor et coll. (2012

) en Espagne ou encore Amber et coll. (2014

) aux États-Unis, ont montré qu’une majorité de médecins considère que les causes principales du SFM sont d’ordre psychologique.
Tableau 8.XI Littérature traitant de l’ambivalence des médecins vis-à-vis du diagnostic de fibromyalgie
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil de données
|
États-Unis
|
Dumit, 2006
|
100 000 publications de groupes de discussion USENET
|
Travail sur le terrain, entretiens informels, analyse approfondie de groupes de discussion
|
|
Hughes et coll., 2016
|
66 infirmiers praticiens
|
Questionnaire
|
|
Griffith et Ryan, 2015
|
Double récit qui juxtapose les récits d’une patiente et ceux de son psychiatre traitant
| |
|
Amber et coll., 2014
|
72 médecins internistes et de famille
211 étudiants en médecine
|
Questionnaire
|
Canada
|
Hayes et coll., 2010
|
189 généralistes,
139 spécialistes
|
Méthodologie mixte : groupes de discussion, entretiens semi-structurés et enquête quantitative électronique
|
|
Crooks, 2015
|
55 patientes SFM
|
Entretiens semi-structurés
|
Japon
|
Homma et coll., 2016
|
233 médecins (Japan College of Rheumatology, Japan Rheumatism Foundation) ayant de l’expérience auprès de patients atteints de SFM
|
Questionnaires : Brief Illness Perception Questionnaire, Illness Invalidation Inventory, Difficult Doctor–Patient Relationship Questionnaire (DDPRQ- 10)
|
Espagne
|
Pastor et coll., 2012
|
208 médecins généralistes
|
Brief Illness Perception Questionnaire, échelles ad hoc d’auto-efficacité clinique, comportement clinique et satisfaction
|
|
Briones-Vozmediano
et coll., 2018
|
12 prestataires de soin impliqués dans le soin de patients atteints de SFM
|
Entretiens semi-structurés
|
Royaume-Uni
|
McMahon et coll., 2012b
|
23 études qualitatives
|
Revue narrative
|
|
Nettleton, 2006
|
18 patients qui vivent avec des symptômes médicalement inexpliqués
|
Entretiens qualitatifs
|
France
|
Nacu et Benamouzig, 2010
|
Revue d’articles (45)
4 experts santé et 10 patients SFM
|
Entretiens qualitatifs
|
Danemark
|
Mik-Meyer et Obling, 2012
|
21 médecins de premier recours
|
8 entretiens de groupe, 3 entretiens individuels
|
Norvège
|
Mengshoel et coll., 2017
|
28 articles contenant des informations sur les expériences du diagnostic des patients
|
Revue systématique d’études qualitatives jusqu’à mai 2016, selon les principes de la méta-ethnographie
|
Cette attribution causale, d’ordre stratégique le plus souvent, ou établie par défaut explicatif, donne au médecin un pouvoir de légitimer ou de construire la pathologie tout en offrant un cadre à l’interprétation des symptômes. En contrepartie, une telle catégorie explicative contribue à considérer les patients comme des personnes ayant des traits de personnalité problématiques. De plus, le diagnostic psychologique, le plus souvent flou et peu argumenté, n’est pas pour autant assorti d’un véritable accompagnement sur le plan psychologique.
Dans cette perspective, les patients concernés se trouvent dans la nécessité d’adopter diverses stratégies de démonstration de leur pathologie (Nettleton, 2006

; Mik-Meyer et Obling, 2012

; Crooks, 2015

). Pour se qualifier et maintenir un rôle de patient légitime, ils « s’accrochent » et travaillent laborieusement à rendre leurs symptômes socialement visibles, réels et physiquement présents (Mik-Meyer et Obling, 2012

). Ils les adaptent aux attentes du corps médical (et même aux différentes spécialités médicales). Des auteurs décrivent la construction de récits qui sont présentés aux médecins et qui quelquefois, à force d’être « bricolés » et ajustés aux uns et aux autres, s’avèrent plus ou moins cohérents (Mik-Meyer et Obling, 2012

; Mengshoel et coll., 2017

). L’adaptation de ces comportements de malade fait inévitablement penser à la notion de « carrière déviante » développée par Becker (1985

), qui sous-entend l’apprentissage et l’adoption de bons comportements, des bonnes interactions, et des discours qui savent convaincre. Dans ce contexte interactif, il s’agit d’apprendre à « être fibromyalgique » afin d’être reconnu et traité comme tel. Mais être un patient légitime ne vient pas sans effets secondaires. Les médecins sont alors coproducteurs de nouveaux rôles adoptés par les patients atteints de SFM qui ne sont pas sans conséquences sur leur vie quotidienne, sur leurs relations sociales, familiales, professionnelles et avec le système de santé (Mik-Meyer et Obling, 2012

).
La troisième attitude décrite dans la littérature semble plus radicale et heureusement moins courante. Dans cette version, les médecins refusent de poser ou de chercher à poser un diagnostic et renvoient le patient à sa demande selon différentes formes d’évitement qui bien souvent s’avèrent péjoratives pour le demandeur de soins qui se sent catégorisé comme étant un simulateur (Hayes et coll., 2010

; Mengshoel et coll., 2017

).
En conclusion, il ressort que la grande majorité des médecins enquêtés font état d’une connaissance limitée du SFM. D’une grande diversité, les plaintes initiales sont peu spécifiques, laissant parfois les médecins perplexes et fortement embarrassés (quelquefois sur le mode d’une certaine culpabilité) devant les symptômes évoqués. Les réponses thérapeutiques sont variables en fonction des spécialités, du positionnement du médecin vis-à-vis de la dimension du diagnostic et de son engagement vis-à-vis de la relation de soins : soutien et gestion de symptômes invalidants pour compenser au mieux l’absence de traitement, création d’un modèle explicatif basé essentiellement sur la psychologisation des symptômes (en lieu et place du diagnostic clinique). Le désintérêt et le renvoi du patient à sa demande sont plus rarement évoqués.
Processus diagnostique
Une minorité de patients rejettent ou ne recherchent pas le diagnostic sur le double prétexte qu’ils se fient fortement à leur propre expérience de la pathologie productrice de sens (Sim et Madden, 2008

) ou qu’ils souhaitent éviter l’appartenance à ce qu’ils considèrent être un groupe stigmatisé (Mengshoel et coll., 2017

; tableau 8.XII

). Mais la grande majorité d’entre eux le recherchent dans l’idée d’une reconnaissance de l’expérience de la douleur (Guinot et coll., 2012

) et d’une possibilité de gestion de la pathologie. Nous avons reconstitué un schéma des étapes du processus diagnostique (figure 8.1

).
Tableau 8.XII Littérature traitant du processus diagnostique
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil de données
|
Royaume-Uni
|
Sim et Madden, 2008
|
23 études qualitatives réalisées entre 1995 et 2006
|
Métasynthèse
|
Norvège
|
Mengshoel et coll., 2017
|
28 articles contenant des informations sur les expériences du diagnostic des patients
|
Revue systématique d’études qualitatives jusqu’à mai 2016, selon les principes de la méta-ethnographie
|
France
|
Guinot et coll., 2012
|
Article d’analyses non empiriques
| |
Des fonctions qui apportent un véritable soulagement
Comme le confirment plusieurs auteurs, lorsqu’un diagnostic de SFM est finalement reçu, il est accueilli avec soulagement par le patient et est considéré comme une étape importante dans la carrière de la pathologie (Sim et Madden, 2008

; tableau 8.XIII

). Nacu et Benamouzig (2010

) parlent du « moment fondateur du diagnostic ». Les fonctions attendues sont clairement présentées et pour certaines développées par les informateurs de nombreuses études, et les bénéfices sont investis sur plusieurs niveaux. Au niveau de l’expérience corporelle, l’identification de la réalité du SFM est une assurance contre l’absence d’une pathologie grave (Undeland et Malterud, 2007

; Mengshoel et coll., 2017

) et représente une perspective de prévention des facteurs aggravants et de diminution des symptômes (Nacu et Benamouzig, 2010

). Le diagnostic peut ainsi rassurer les personnes concernées qu’elles ne souffrent pas, par exemple, d’arthrite inflammatoire ou d’un cancer, mettant ainsi un terme à un cycle de préoccupations médicales et d’examens répétés.
Le diagnostic représente par ailleurs un cadre d’explications et de mise en sens de la douleur et de la fatigue à l’aide de la compétence technique et clinique du médecin (Mengshoel et coll., 2017

; Cooper et Gilbert, 2017

). Il semble faciliter la réintégration dans le monde social dans la mesure où les classifications biomédicales ont, en tant que constructions sociales, un effet symbolique majeur. De ce point de vue, le diagnostic présente des enjeux identitaires essentiels en tant que garde-fou contre la marginalisation et la stigmatisation (Mengshoel et coll., 2017

). La reconnaissance de la pathologie par les autres crée une augmentation des sentiments de sécurité, de confiance et d’aide (Juuso et coll., 2014

). Il ne fait aucun doute du point de vue des patients que le défaut de diagnostic génère un processus de victimisation (Sim et Madden, 2008

) ainsi qu’un sentiment d’abandon du patient en termes de prise en charge.
Tableau 8.XIII Littérature traitant des fonctions du diagnostic dans la fibromyalgie
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil de données
|
Royaume-Uni
|
Sim et Madden, 2008
|
23 études qualitatives réalisées entre 1995 et 2006
|
Métasynthèse
|
France
|
Nacu et Benamouzig, 2010
|
Revue d’articles (45)
4 experts santé et 10 patients SFM
|
Entretiens qualitatifs
|
Norvège
|
Undeland et Malterud, 2007
|
11 patientes SFM
|
Focus groups
|
|
Mengshoel et coll., 2017
|
28 articles contenant des informations sur les expériences du diagnostic des patients
|
Revue systématique d’études qualitatives jusqu’à mai 2016, selon les principes de la méta-ethnographie
|
Afrique du Sud
|
Cooper et Gilbert, 2017
|
15 patients SFM
|
Entretiens approfondis de type narratif
|
Suède
|
Juuso et coll., 2014
|
9 patientes SFM
|
Entretiens narratifs
|
Le caractère limité du soulagement : une validité ambiguë sur le long terme
De nombreuses études montrent le caractère limité du diagnostic sur le long terme (Sim et Madden, 2008

; Mengshoel et coll., 2017

; tableau 8.XIV

). Le soulagement disparait lorsque les traitements s’avèrent inefficaces, lorsque la situation ne s’améliore pas et qu’elle stagne, voire se dégrade (Madden et Sim, 2006

; Undeland et Malterud, 2007

; McMahon et coll., 2012b

). Mais plus fondamentalement, une majorité d’articles font ressortir qu’être un « patient légitime » ne vient pas sans effets secondaires (Mik-Meyer et Obling, 2012

). Les informateurs constatent une reconnaissance fragile (McMahon et coll., 2012b

), c’est-à-dire que le diagnostic de SFM ne résout pas l’incertitude et apporte peu de rassurance durable.
Tableau 8.XIV Littérature traitant du caractère limité du soulagement associé au diagnostic
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil de données
|
Royaume-Uni
|
Sim et Madden, 2008
|
23 études qualitatives réalisées entre 1995 et 2006
|
Métasynthèse
|
|
McMahon et coll., 2012b
|
23 études qualitatives
|
Revue narrative
|
|
Undeland et Malterud, 2007
|
11 patientes SFM
|
Focus groups
|
Norvège
|
Mengshoel et coll., 2017
|
28 articles contenant des informations sur les expériences du diagnostic des patients
|
Revue systématique d’études qualitatives jusqu’à mai 2016, selon les principes de la méta-ethnographie
|
Danemark
|
Madden et Sim, 2006
|
17 patients SFM
|
Entretiens semi-structurés
|
|
Mik-Meyer et Obling, 2012
|
21 médecins de premier recours
|
8 entretiens de groupe, 3 entretiens individuels
|
France
|
Nacu et Benamouzig, 2010
|
Revue d’articles (45)
4 experts santé et 10 patients SFM
|
Entretiens qualitatifs
|
La méconnaissance du syndrome et le jugement péjoratif très souvent associé créent une tension dans la relation avec les professionnels de la santé (Mengshoel et coll., 2017

). Madden et Sim (2006

) relèvent une augmentation de l’incertitude également sur le sens du diagnostic. De plus, Nacu et Benamouzig (2010

) notent que la focalisation sur certains symptômes médicalisés empêche des comportements d’adaptation (
coping) potentiellement utiles en l’absence de traitement et permettant une amélioration durable. Pour ces mêmes auteurs, une certaine frustration est partagée par les soignants et les patients (Nacu et Benamouzig, 2010

).
Les personnes diagnostiquées renoncent à leurs propres expériences pour se soumettre aux injonctions et aux discours médicaux, ce qui accentue la dilution du soi et les sentiments de confusion. Ainsi les patients ne font pas confiance aux médecins pour discuter des aspects émotionnels de leurs problèmes et choisissent plutôt de cacher ces aspects derrière les plaintes somatiques (Peters et coll., 2009

). Ils perçoivent que les médecins ne répondent pas à leur désir de soutien affectif (Salmon et coll., 2009

, cités par Mik-Meyer et Obling, 2012

). Enfin un point fondamental ressort de l’ensemble des études qualitatives qui donnent la parole aux patients : le diagnostic de SFM n’a pas aidé les informateurs à convaincre l’entourage (Madden et Sim, 2006

). Les informateurs se sont sentis mal jugés et « pas pris au sérieux », et ont commencé à douter de la compétence des médecins en même temps que de leur propre capacité à guérir.
Le doute vis-à-vis des médecins et des médicaments contribue à creuser le contexte d’incertitude relationnelle, compromettant la sécurité des liens avec la famille, les amis, les collègues et sur le lieu de travail (Nettleton, 2006

; Dennis et coll., 2013

). Le diagnostic ne fournit pas dans le temps une explication significative des symptômes et a un pouvoir limité de légitimer la pathologie. Les personnes se sentent blâmées, affectées dans leur dignité à aller mieux (Mengshoel et coll., 2017

).
Mise en doute des symptômes et atteinte à la dignité de la personne
L’ambivalence et l’ambiguïté de la position des professionnels des soins vis-à-vis de la réalité des symptômes amènent leurs patients à en douter également (Wuytack et Miller, 2011

; Homma et coll., 2016

; Madden et Sim, 2016

; Armentor, 2017

; tableau 8.XV

). Ainsi, de nombreux patients se disent affectés par le risque ou la réalité d’assimilation entre SFM et problèmes psychologiques ou sociaux posée par le médecin. Ils rapportent les attributions négatives qui leur sont destinées : au travers des termes de « handicap », de « troubles de la personnalité », d’« hypocondrie », de « trouble de l’humeur » ainsi que de la mise en cause perçue de leur courage ou motivation pour se rétablir (Mengshoel et coll., 2017

). Les femmes sont d’autant plus affectées que la stigmatisation par la « psychologisation » est renforcée par les considérations de genre (Crooks et Chouinard, 2006

; Crooks et coll., 2008

; Van Altena, 2008

; Katz et coll., 2010

; Pryma, 2017

; Moretti, 2018

). Des préjugés sexistes peuvent impacter les interactions médecin-patient, en particulier dans le processus diagnostique. Les dimensions de la « biologie de la femme » sont facilement transposées en « troubles de la femme » et en comportements pathologiques décrits sur le mode de la plainte démonstrative (allusion à « l’hystérique ») et de la perte de contrôle. « Cette façon d’être est considérée, encore une fois, comme étant caractérisée par la passivité, la victimisation, l’irritabilité, la dramatisation, la vulnérabilité, la sensibilité, l’incapacité à gérer ses états d’âme, la fluctuation des humeurs et par conséquent une moindre tolérance à la douleur entraînant une exagération dans la manifestation sans gêne ni honte de son mal-être » (Moretti, 2018

).
Tableau 8.XV Littérature traitant de l’expérience diagnostique du patient
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil de données
|
Royaume-Uni
|
Madden et Sim, 2016
|
17 patients SFM
|
Entretiens semi-directifs
|
Belgique
|
Wuytack et Miller, 2011
|
6 patientes SFM
|
Entretiens semi-directifs
|
Japon
|
Homma et coll., 2016
|
233 médecins (Japan College of Rheumatology, Japan Rheumatism Foundation) ayant de l’expérience auprès de patients SFM
|
Questionnaires : Brief Illness Perception Questionnaire, Illness Invalidation Inventory, Difficult Doctor–Patient Relationship Questionnaire (DDPRQ-10)
|
Norvège
|
Mengshoel et coll., 2017
|
28 articles contenant des informations sur les expériences du diagnostic des patients
|
Revue systématique d’études qualitatives jusqu’à mai 2016, selon les principes de la méta-ethnographie
|
Canada
|
Crooks et Chouinard, 2006
|
18 patientes ayant développé des maladies arthritiques
|
Entretiens semi-structurés
|
|
Crooks et coll., 2008
|
55 patientes SFM
|
Entretiens semi-structurés
|
États-Unis
|
Armentor, 2017
|
20 patientes SFM
|
Entretiens semi-directifs
|
|
Katz et coll., 2010
|
61 rhumatologues
|
Enquête
|
|
Pryma, 2017
|
24 patientes SFM
|
Entretiens semi-structurés
|
|
Muraleetharan et coll., 2018
|
1163 patients hommes SFM
|
Enquête qualitative
|
|
Kempner, 2017
|
Commentaire de l’article Pryma (2017  )
| |
|
Pryma, 2017
|
24 patientes SFM
|
Entretiens semi-structurés
|
Italie
|
Moretti, 2018
|
Recherche ethnographique
| |
L’activité observée dans le centre de diagnostic et traitement du SFM dans lequel C. Moretti (2018

) a recueilli son matériau de recherche s’inscrit dans ce schéma : « la parole des médecins du centre et de la pratique clinique à laquelle j’ai assisté. (...) Le processus de féminisation qui caractérise la définition des critères diagnostiques du syndrome a ainsi, au fil du temps, entraîné la re-détermination de la conception selon laquelle les femmes sont majoritairement touchées par cette pathologie. Une idée constamment reconfirmée par une pratique médicale quotidienne passée et actuelle qui, dans les faits, en utilisant justement ces critères, a révélé et révèle davantage de formes de FM chez les patients de sexe féminin que chez ceux de sexe masculin » (Moretti, 2018

). Le comportement fibromyalgique, que Moretti appelle « l’
habitus », entendu comme les éléments qui sont à l’origine du syndrome ou sont la cause de son aggravation, est considéré alors comme étant liés à un tempérament strictement féminin plutôt que masculin. « Les consultations avec les patients masculins mettaient en évidence la difficulté, voire même l’impossibilité, d’établir un diagnostic du fait d’un manque d’éléments pour le faire, malgré l’existence de symptômes qualitativement et quantitativement similaires à ceux du syndrome fibromyalgique » (Moretti, 2018

). L’étude de Muraleetharan et coll. (2018

) montre également le sous-diagnostic de SFM chez les hommes. En effet, les interactions avec les prestataires de soins de santé sont découragées par le risque de diagnostic erroné ou de non-reconnaissance des symptômes. Une autre étude a notamment montré que les rhumatologues ont plus tendance à rechercher une preuve physique (trouver suffisamment de points douloureux) pour étayer une conclusion diagnostique de SFM chez les patients de sexe masculin (Katz et coll., 2010

). Des travaux dans le contexte américain soulignent que ces enjeux liés au genre sont associés aux préjugés raciaux, invitant à une analyse du SFM qui intègre l’intersectionnalité, notion désignant les expériences de personnes subissant simultanément plusieurs formes de discrimination, comme par exemple les expériences de femmes noires (Kempner, 2017

; Pryma, 2017

). Dans les études du corpus étayant ce chapitre, même lorsque les échantillons sont mixtes, les analyses questionnent rarement la problématique du genre pourtant centrale dans le SFM, et qui se manifeste au cĹ“ur de la relation de soin.
Perte de confiance dans l’autorité médicale : la dimension iatrogène
du diagnostic
La difficulté de l’implication claire des médecins et les différents niveaux de mises en cause et de préjugés autour du SFM associés à l’absence de mieux-être aboutissent à une perte de confiance dans l’autorité médicale de la part du patient. Madden et Sim parlent de « diagnostic vide » (Madden et Sim, 2006

; Mengshoel et coll., 2017

; tableau 8.XVI

) dans la mesure où un diagnostic ne devient réel et significatif que s’il ouvre la voie à un soulagement ou à un accompagnement et à une compréhension du tableau symptomatique. La valeur diagnostique ici n’est pas perçue comme étant fondée dans la mesure où il n’y a pas de prise en compte de la spécificité des besoins et de reconnaissance des douleurs spécifiques (Sallinen et coll., 2011

; Mengshoel et coll., 2017

).
Du point de vue d’une grande majorité d’informateurs dans les différentes études du corpus, les interactions soignant-soigné sont négatives essentiellement en lien avec la réception de soins inadéquats, non personnalisés, et avec le sentiment que le médecin est insensible et manque de connaissances sur le SFM (Egeli et coll., 2008

). Plus globalement l’insatisfaction à l’égard du médecin traitant se manifeste lorsque le patient a l’impression d’un mauvais contrôle du traitement de la part de ce dernier, et lorsqu’il se sent « écarté » et incompris (Homma et coll., 2018

). Plus que le diagnostic et bien au-delà, les participants souhaitent être perçus comme « personne entière » et recherchent auprès des médecins une reconnaissance de la spécificité des besoins et des niveaux d’accompagnement individuels. Ce dernier point a été exprimé avec force dans les récits de l’étude de Sallinen et Mengshoel (2017

). L’ambivalence médicale et l’errance diagnostique marquées par une absence de reconnaissance et des références médicales éclatées approfondissent la détresse fibromyalgique et la perte de confiance dans le soin.
Tableau 8.XVI Littérature traitant de la perte de confiance dans l’autorité médicale
Pays
|
Référence
|
Population
|
Méthode de recueil de données
|
Royaume-Uni
|
Madden et Sim, 2016
|
17 patients SFM
|
Entretiens semi-directifs
|
|
Sim et Madden, 2008
|
23 études qualitatives réalisées entre 1995 et 2006
|
Métasynthèse
|
Finlande
|
Sallinen et coll., 2011
|
20 patientes SFM
|
Récits de vie
|
|
Sallinen et Mengshoel, 2017
|
5 hommes SFM
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Récits de vie
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Norvège
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Mengshoel et coll., 2017
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28 articles contenant des informations sur les expériences du diagnostic des patients
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Revue systématique d’études qualitatives jusqu’à mai 2016, selon les principes de la méta-ethnographie
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Canada
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Egeli et coll., 2008
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42 patients SFM
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Questions ouvertes
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Japon
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Homma et coll., 2018
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304 patients SFM
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Questionnaire
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États-Unis
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Hughes et coll. (2016  )
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66 infirmiers praticiens
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Questionnaire
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France
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Ranque et Nardon, 2017
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Article d’analyse non empirique
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Akrich et Méadel, 2009
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Article d’analyse non empirique
| |
Le schéma diagnostique (figure 8.1

) reconstruit sur la base des résultats de la littérature, peut être envisagé dans cette perspective comme l’un des facteurs qui prédisposent au développement du syndrome. Il serait même susceptible de l’aggraver en favorisant des comportements qui se répercutent sur les symptômes de différentes manières, en fonction des états de gravité de la pathologie, de l’intensité de la plainte, mais aussi des structures psychiques des personnes concernées. Certaines d’entre elles se sentent profondément atteintes et s’inscrivent dans une quête de reconnaissance qui renforce leur état de dépendance vis-à-vis des médecins. Hugues et coll. (2006

) insistent sur la dimension iatrogène du diagnostic. Ces auteurs font entre autres le constat qu’à long terme, les recours au médecin ne diminuent pas. Après le diagnostic, les marqueurs d’utilisation des soins de santé ont diminué, mais en l’espace de deux ou trois ans, la plupart des visites médicales ont atteint des niveaux supérieurs ou égaux à ceux observés au moment du diagnostic, comme souligné par des analyses économiques d’accès aux soins (voir chapitre « Analyse économique du syndrome fibromyalgique »).
D’autres personnes ont tendance à s’inscrire dans des pratiques radicales de défense de la pathologie et/ou des pratiques revendicatrices dans l’objectif d’une résistance au fait d’être assimilé à un simulateur (Sim et Madden, 2008

; Mengshoel et coll., 2017

) et/ou plus fondamentalement dans celui d’une reconnaissance de la maladie. Il est vrai que certains patients ayant souvent pâti d’une malheureuse expérience passée avec le milieu médical (généralement un manque de considération de leur souffrance) sont excessivement revendicatifs et construisent leur agressivité sur un manque de confiance envers le corps médical (Ranque et Nardon, 2017

). Dans ce contexte, la recherche d’informations sur Internet peut devenir le support d’une activité qui concurrence frontalement l’autorité du monde médical quand ce dernier ne propose rien de consistant (Akrich et Méadel, 2009

). À terme, l’érosion de la légitimité du diagnostic, et les doutes et souffrances psychiques et sociales associés, redoublent l’exacerbation de l’ensemble des symptômes et génèrent encore plus d’incertitudes et d’anxiété.
Au-delà des expériences partagées et d’un schéma diagnostique commun dominant, il importe également de souligner la diversité des parcours individuels. Parmi les patients interrogés, certains semblent bénéficier d’une amélioration ou d’une stabilisation de leurs symptômes (selon des temporalités différentes), tandis que d’autres voient se profiler le spectre de l’invalidité. Pour autant, le moment du diagnostic que les patients tendent à adopter comme un élément de leur identité fait converger des trajectoires initialement diverses autour du modèle commun du SFM, de son évolution et de son traitement (Nacu et Benamouzig, 2010

).
Participation aux soins et émergence d’un soi expert
La rencontre d’un médecin qui écoute et d’une structure médicale attentive aux symptômes est bien sûr à considérer comme étant déterminante pour désamorcer le cours de ce schéma. Les informateurs d’un certain nombre d’études font référence à des expériences positives avec les médecins. Sous cette appellation sont rassemblées des interactions marquées par le respect et au sein desquelles le patient a pu participer. Le médecin y est dépeint comme attentionné, solidaire, compréhensif, créatif, compétent, respectueux, ouvert d’esprit et prêt à collaborer (Egeli et coll., 2008

; tableau 8.XVII

). Les patients atteints de SFM considèrent qu’un style de communication ouvert et centré sur le patient est particulièrement positif (Ullrich et coll., 2014

). Peu de recherches se sont appuyées sur une méthodologie intégrant des observations de consultations. Cette méthode apporte pourtant des éléments riches et originaux, comme dans l’étude de Eide et coll. (2011

), basée sur des enregistrements de premières consultations de patients concernés par le SFM avec des infirmières spécialisées en Norvège. Les résultats révèlent que les patients confient davantage leurs préoccupations sur la douleur, ainsi que leurs réactions émotionnelles, lorsque les infirmières manifestent davantage d’empathie. Il ressort de ces travaux sur le SFM la nécessité d’une relation thérapeutique essentiellement humaine, « qui pousse le médecin aux limites de ses capacités d’empathie et de communication » (Ranque et Nardon, 2017

). Ce constat est particulièrement vrai dans le contexte de pathologies chroniques médicalement inexpliquées.
Quelques auteurs rapportent ainsi des situations défendues par les personnes vivant un SFM comme des contextes thérapeutiques opérationnels : ce sont les situations de valorisation de leurs propres expériences et d’affirmation de leur propre expertise (Sallinen et coll., 2011

). Ces situations sont décrites essentiellement en référence à l’interdisciplinarité (Ashe et coll., 2017

) (voir chapitre « Activités physiques et thérapies multidisciplinaires dans la fibromyalgie »), à la négociation des savoirs, à la collaboration et, à un autre niveau, à la reconstitution narrative ainsi qu’à l’application des conceptions de l’éducation thérapeutique. Toutes ces dimensions renvoient au modèle de soin centré sur le patient et au modèle participatif de la relation médecin-malade (Bieber et coll., 2006

, 2008

; Finestone et coll., 2015

; Colmenares-Roa et coll., 2016

) qui favorisent l’élaboration de projets thérapeutiques et l’émergence d’un soi expert basé sur une connaissance privilégiée du corps propre (Madden et Sim, 2016

). Nous en précisons ci-dessous les différents bénéfices et intérêts en nous référant aux études respectives.
Tableau 8.XVII Littérature traitant de la participation des patients aux soins et de l’émergence d’un soi expert
Pays
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Référence
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Population
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Méthode de recueil de données
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Canada
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Egeli et coll., 2008
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42 patients SFM
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Questions ouvertes
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Cunningham et Jillings, 2006
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8 patients SFM
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Entretiens semi-structurés approfondis
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Ghazan-Shahi et coll., 2012
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150 rhumatologues
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Enquête comprenant 13 questions
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Crooks et coll., 2008
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55 patientes SFM
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Entretiens semi-structurés
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Allemagne
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Ullrich et coll., 2014
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256 patients SFM
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Questionnaire KOPRA
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Norvège
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Eide et coll., 2011
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5 consultations initiales entre patients atteints de SFM et infirmières cliniciennes spécialisées
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Enregistrement et analyse
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Mengshoel et coll., 2017
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28 articles avec informations sur les expériences du diagnostic des patients
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Revue systématique d’études qualitatives jusqu’à mai 2016, selon les principes de la méta-ethnographie
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Finlande
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Sallinen et coll., 2011
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20 patientes SFM
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Récits de vie
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Royaume-Uni
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Ashe et coll., 2017
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14 patients SFM
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Entretiens qualitatifs
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Madden et Sim, 2016
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17 patients SFM
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Entretiens semi-directifs
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Nettleton, 2006
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18 patients qui vivent avec des symptômes médicalement inexpliqués
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Entretiens qualitatifs
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McMahon et coll., 2012b
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23 études qualitatives
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Revue narrative
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Mexique
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Colmenares-Roa et coll., 2016
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8 patients SFM
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Récits de la maladie
Recherche anthropologique
Ethnographie à l’hôpital
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Pays-Bas
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Kroese et coll., 2008
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193 patients avec des symptômes SFM, randomisés à un groupe d’étude diagnostiqué par une infirmière spécialisée en rhumatologie (groupe SRN, n = 97) ou à un groupe contrôle diagnostiqué par un rhumatologue (groupe RMT, n = 96).
|
Mesures : accord initial entre l’infirmière et le rhumatologue du groupe SRN, diagnostic final après 12 à 24 mois de suivi, satisfaction du patient, coûts de diagnostic.
|
Belgique
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Wuytack et Miller, 2011
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6 patientes SFM
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Entretiens semi-directifs
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France
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Ranque et Nardon, 2017
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Article d’analyse non empirique
| |
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Guinot et coll., 2012
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Article d’analyse non empirique
| |
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Nacu et Benamouzig (2010  )
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Revue d’articles (45)
4 experts santé et 10 patients SFM
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Entretiens qualitatifs
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Durif-Bruckert et coll., 2015
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35 patients SFM
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Entretiens semi-directifs
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États-Unis
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Jobst et coll., 2013
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Une centaine d’étudiants, toutes professions de la santé
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Présentation d’une étude de cas d’un patient SFM puis questionnaire
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Une relation de collaboration entre les professionnels est susceptible d’aider les patients à aborder les complexités de la gestion des symptômes (Cunningham et Jillings, 2006

; Kroese et coll., 2008

; Wuytack et Miller, 2011

). Les médecins généralistes ne peuvent gérer seuls ces situations lourdes, « les spécialistes d’organes » manquent de vue d’ensemble, les psychiatres ont du mal à composer avec des symptômes physiques (ayant toujours la hantise de laisser passer un problème somatique). Afin de ne pas se décourager et s’épuiser, et réduire le soin du SFM au renvoi des patients de médecin en médecin (Ghazan-Shahi et coll., 2012

), une prise en charge interdisciplinaire est fortement indiquée, impliquant la rhumatologie, la neurologie, la rééducation fonctionnelle, la psychiatrie ainsi qu’un accès à des ressources rares : rééducation, gymnastique ou thérapies comportementales et cognitives. L’accompagnement interdisciplinaire combinant des approches non médicamenteuses (éducation, activité physique et thérapie comportementale) et le management médicamenteux de la douleur et des troubles du sommeil ressortent comme étant plus efficaces (Guinot et coll., 2012

; Jobst et coll., 2013

). Dans cette forme d’accompagnement, le patient est au centre du processus thérapeutique et adhère pleinement (dans l’idéal, décide lui-même de) à la démarche de prise en charge (Ranque et Nardon, 2017

).
Parallèlement, Mengshoel et coll. (2017

) font également ressortir la valorisation d’une coopération entre les patients et les professionnels de la santé pour accélérer leur guérison. Ainsi, « l’ordre négocié » issu de la sociologie interactionniste de l’école de Chicago (Baszanger, 1986

; Strauss, 1992

) est à envisager comme le résultat d’un processus de négociation entre le praticien et le patient, dans lequel les deux parties peuvent exercer leur influence, chacun apportant ses savoirs et ses expertises (Durif-Bruckert et coll., 2015

; Mengshoel et coll., 2017

). Il s’inscrit dans un processus de réévaluation du diagnostic donné, d’un croisement et d’une appropriation réciproque des points de vue : le pouvoir est exercé par chaque partie (Madden et Sim, 2016

). Cette perspective ouvre la possibilité de nommer les problèmes et difficultés avec des mots (et pas seulement avec un terme diagnostique) qui rendent compte de l’expérience vécue par le patient, et qui font sens à la fois pour le patient et le médecin (voir communication « Les pièges que nous tendent les symptômes fonctionnels »).
Par ailleurs, une évaluation et une formulation psychologiques qui permettent à la personne de raconter son histoire sans interruption ni jugement, peuvent être vécues comme thérapeutiques (McMahon et coll., 2012b

). La possibilité de prise de parole et de reconstitution par les patients des expériences et trajectoires privées a une valeur thérapeutique. Entre autres auteurs, McMahon et coll. considèrent les récits comme des « réorganisateurs identitaires », ce que nous avons pu également expérimenter dans d’autres recherches (Durif-Bruckert, 2007). Tout d’abord, ils permettent au patient de se réapproprier sa propre histoire (Sallinen et coll., 2011

), de faire valoir un espace propre de ressentis et de défendre sa propre langue profane (les métaphores et les théories explicatives élaborées en lien avec le vécu corporel et émotionnel). Dans le contexte du SFM, la reconstitution du cours de la douleur (association de la survenue, de l’intensité et du sens) permet de remettre de la cohérence et de l’intelligibilité dans les trajectoires de la pathologie fréquemment jugées comme étant « chaotiques », « discontinues », et « brisées » (Sallinen et coll., 2011

; McMahon et coll., 2012b

). Elle représente un exercice de reconstruction et de réorganisation des expériences vécues : possibilité de revenir sur les ruptures, de reformuler des liens, de questionner les évènements, de remettre en perspective des étapes de vie jusque-là figées (Nettleton, 2006

; Sallinen et coll., 2011

). « Prendre la parole » est aussi reprendre un « certain » contrôle de la situation. Le récit a pour fonction de faciliter le processus d’adaptation à une nouvelle réalité : processus d’acceptation de l’incertitude, de l’inexpliqué et plus fondamentalement ajustement à la variabilité de la douleur et aux activités de la vie quotidienne (McMahon et coll., 2012b

).
Les approches thérapeutiques qui adoptent une position de coordination des soins, de collaboration, et qui prennent plus particulièrement en compte les explications ainsi que les émotions, les pensées et les croyances que le patient associe à ses symptômes (quelle que soit la pathologie associée), sont des perspectives fortes, qui émergent timidement avec l’impulsion des lois sur l’autonomie du patient.
Les enjeux du diagnostic : incertitudes et controverses
Les différentes réflexions qui précèdent nous laissent entrevoir combien la prise en charge du SFM est particulièrement difficile. Pour autant les difficultés identifiées et restituées par les patients ne semblent pas tant résider dans la réalité de l’acte diagnostique (l’avoir ou ne pas l’avoir) que dans la nécessité d’une vraie relation thérapeutique.
Lorsque la dénomination est difficile, impossible ou considérée sur le mode d’une pathologie négative, le rôle du médecin consisterait effectivement à aider le patient à se rétablir en lui permettant de créer un espace de significations et de mise en sens de sa souffrance qui va bien au-delà du diagnostic en tant que tel (Undeland et Malterud, 2007

; tableau 8.XVIII

). Cet « au-delà » joue précisément un rôle central dans la gestion du SFM. Car fondamentalement, le véritable défi des médecins (et la véritable réponse faite à la demande d’un patient avec un diagnostic de SFM) consiste à aider le patient à se rétablir malgré et au cĹ“ur même des incertitudes et des controverses dont le SFM est fondamentalement l’objet et qui sous-tendent les conditions dans lesquelles se réalise le diagnostic.
La prise en charge du SFM est reliée et dépendante des intentions et des positionnements des médecins. Elle est en même temps déterminée par les dimensions psychosociales qui façonnent l’expression même de cette pathologie ainsi que par le débat public, les idéaux et les imaginaires qui lui sont associés sur la scène sociale et médicale et qui sous-tendent des aprioris négatifs qui font encore obstacle à la prise en compte et à la considération de la douleur physique et morale des patients atteints de SFM.
Tableau 8.XVIII Littérature traitant des enjeux du diagnostic
Pays
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Référence
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Population
|
Méthode de recueil de données
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Norvège
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Undeland et Malterud, 2007
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11 patientes SFM
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Focus groups
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Canada
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Crooks et coll., 2008
|
55 patientes SFM
|
Entretiens semi-structurés
|
Belgique
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Wuytack et Miller, 2011
|
6 patientes SFM
|
Entretiens semi-directifs
|
Royaume-Uni
|
Bass et Henderson, 2014
|
Article d’analyse non empirique
| |
France
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Le Breton, 2017
|
Enquête ethnographique
| |
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Nacu et Benamouzig (2010  )
|
Revue d’articles (45)
4 experts santé et 10 patients SFM
|
Entretiens qualitatifs
|
L’une des controverses autour du SFM se traduit au travers du questionnement sur le statut même de cette pathologie : est-ce qu’il s’agit d’une pathologie réelle, d’une expression subjective ou d’une construction sociale ? Comme le formule P. Cathébras, « un symptôme « médicalement inexpliqué » est considéré comme « moins réel », automatiquement « psychogène » voire « imaginaire », et peu ou prou sous la responsabilité de l’individu, qui peut donc implicitement (et parfois explicitement) en être blâmé » (Cathébras, 2006

; voir communication « Les pièges que nous tendent les symptômes fonctionnels »). À l’instar de nombreux auteurs en anthropologie, en psychologie sociale et en sociologie, D. Le Breton (2017

) rappelle que toutes les pathologies « relèvent d’une immersion historique sociale et culturelle », c’est-à-dire qu’elles émergent sur la scène médicale de façon soudaine, se diffusent largement, à travers toute la planète, ce qui leur donne un lien de parenté, malgré les différences culturelles. Ainsi certaines formes de somatisations « prennent » et se diffusent « parce qu’elles cristallisent à un moment donné des sensibilités collectives (...) amenant la médecine à remanier son système d’interprétation et ses catégories nosographiques » (Le Breton, 2017

). Ces pathologies émergentes comme les maux de dos, les douleurs chroniques et bien d’autres qui expriment des souffrances réelles, relèveraient de « prêts à porter culturels qui flottent à une époque donnée et se cristallisent concrètement à travers la légitimité paradoxale accordée du bout des lèvres par la médecine, les médias qui les vulgarisent, et les associations de patients qui se battent pour leur reconnaissance » (Le Breton, 2017

). La participation de différents types d’acteurs renforce simultanément l’intérêt pour ces pathologies émergentes. C’est ce que développent Nacu et Benamouzig (2010

) qui basent le cours de leur réflexion à la fois sur une revue de littérature de 45 références (1975-2010), sur les aspects biomédicaux et les approches en sciences sociales concernant le SFM, sur un ensemble de littérature grise accessible sur internet (sites gouvernementaux, associations professionnelles et de patients, forums de discussion et sites des principaux quotidiens français et américains), et en complément sur des entretiens approfondis d’experts de la santé publique en France (médecins spécialistes, spécialistes de santé publique non médecins). Selon ces auteurs, le SFM illustre une forme contemporaine et plus générale de médicalisation, dans laquelle les médecins sont associés à l’industrie pharmaceutique. Ils renvoient ainsi le lecteur au concept de
disease mongering (que l’on peut traduire par « propagande de pathologie ») proposé par Payer pour caractériser le façonnage de nouvelles maladies sous l’effet des intérêts conjugués de l’industrie pharmaceutique : financement d’études, participation des firmes aux activités professionnelles, par exemple à travers l’organisation et le sponsoring de congrès médicaux européens et internationaux, de groupes professionnels et d’associations de malades (voir également chapitre « L’expérience d’un trouble somatique fonctionnel : aspects sociologiques du syndrome fibromyalgique »). Sans être à l’origine de la problématique, ces dernières analyses contribuent à la diffusion du SFM dans l’espace public et à une réelle familiarisation avec cette entité, alors même qu’elle demeure méconnue sur le plan clinique et ne reçoit pas de reconnaissance médicale. Le noyau sémantique, matrice des significations sociales qui circulent dans l’ensemble des discours sociaux, professionnels et associatifs sur le SFM, est à la fois suscité et « repris » par l’histoire privée du patient. De façon plus ciblée, les femmes semblent étiquetées comme étant naturellement prédisposées à cette forme d’expression pathologique douloureuse par leur sensibilité et leur débordement émotionnel. Nous l’avons vu, les relations avec les médecins sont largement marquées par des non-dits, qui renvoient fondamentalement au stigmate « psy » mais aussi, et ce n’est pas sans lien, aux rapports de genre.
Les effets des symptômes SFM n’en sont pas moins réels. Ils sont à envisager entre autres raisons comme l’expression d’une rupture, mais aussi comme une protection contre la désorganisation psychique, « la désagrégation de soi » (Le Breton, 2017

), sans aucun doute comme un moyen de prendre corps, d’avoir un corps. Cette plainte traduit une souffrance profonde, à la fois dans le rapport à soi-même et au social. Elle traduit l’impossibilité à vivre et à trouver sa place. Les corps malades sur un mode chronique « fracturent les protocoles sociaux » en raison de leur incapacité à répondre de façon fiable aux attentes (Crooks et coll., 2008

) et à définir les contours d’un soi identitaire. Les fonctions identifiantes et protectrices de la douleur (D. Anzieu, 1985

, parle de « l’enveloppe de la douleur »), sorte de barrières contre des épisodes de vie impensables, laissent sous-entendre la complexité des soins à apporter aux patients concernés par le SFM. Il s’agit là de l’une des lectures incontournables du SFM, ainsi qu’une voie d’identification des réponses à lui donner. Les controverses sur la prise en charge du SFM se traduisent encore au travers de la difficulté à lui attribuer une appellation stable et systématisée : Wuytack et Miller (2011

) parlent de « trouble complexe » plutôt que de « syndrome douloureux ». Nacu et Benamouzig (2010

) définissent le SFM comme le résultat d’un « continuum de réactions » à un environnement social stressant, ou encore comme une situation de détresse marginalisante. Pour Bass et Henderson (2014

), le SFM est un trouble dimensionnel et là encore, le terme de « continuum » et non de « maladie » est utilisé. Il est fortement associé à des problèmes autres que douloureux et à la détresse émotionnelle, au moins aussi invalidants que les symptômes somatiques qui sont décrits de façon plus adéquate en termes de « détresse polysymptomatique ». Toutes ces pistes que nous donnent patients et soignants doivent être mises en relation avec des situations observées à propos d’autres maladies chroniques, pour lesquelles des considérations comparables essentiellement thérapeutiques sont décrites.
C’est à ces différents points d’articulation et de complexité entre les dimensions physiologiques, psychiques, sociales, émotionnelles et bien sûr politiques, que la médecine est conviée autour du SFM. Sans doute faut-il qu’elle élargisse, comme pour beaucoup d’autres maladies médicalement inexpliquées, les grilles de lecture « classiques » du symptôme au risque de s’embourber dans des situations d’impasses, source de maltraitances involontaires vis-à-vis du patient.
Conclusion
Le SFM est un défi pour les professionnels des soins. Il a la réputation d’être un trouble subjectif, non objectivable, à caractère diffus et instable, un syndrome aléatoire tant par sa localisation corporelle que par sa durée et sa gravité. Le trouble, pour autant, semble s’organiser, prendre de la substance lorsque les patients dans le cadre d’une recherche posent des explications sur cette « clinique vide ». Le corpus propose des informations divergentes, à la fois complémentaires et contradictoires, mais qui pour autant fournissent quelques indices récurrents sur ce mal-être, sur la manière de le considérer, de le traiter et de lui donner un statut social. Il ouvre des pistes d’investigations essentielles.
Le diagnostic de SFM, fortement attendu par les patients, ressort clairement et de manière paradoxale comme une situation embarrassante pour les médecins. Lorsqu’il est donné et reçu, son intérêt et les répercussions réelles sont discutables, mais aussi révèlent les véritables conditions d’une prise en charge opérationnelle. Le médecin peut exprimer une « ouverture » décisive dans la prise en charge du patient atteint de SFM dont nous avons vu les modalités ou bien au contraire laisser se créer une « fermeture » avec de graves conséquences pour le vécu du patient et l’évolution de sa pathologie (Ranque et Nardon, 2017

). La fermeture la plus préjudiciable et sans aucun doute la plus iatrogène est bien le rejet et le regard péjoratif porté à la demande du patient (par exemple il est très péjoratif de dire « c’est psychologique » sans soigner le psychologique).
Ce sont les points d’ouverture que nous offre la littérature par la voie des patients et des médecins qui sont à investir, à légiférer et à codifier. L’ouverture la plus efficace recouvre l’écoute : celle de la plainte du patient qui, à des degrés divers, exprime que quelque chose ne marche pas dans sa vie, et parallèlement et plus largement l’écoute de ce qui se joue dans la situation SFM dans son ensemble (contextualisation des enjeux sociaux du SFM et de la pratique médicale). Les patients revendiquent davantage d’être crus et écoutés plutôt que de recevoir un diagnostic. S’ils le réclament, c’est aussi parce qu’ils pensent qu’il est la seule voie possible pour être écoutés, pris au sérieux et introduits dans un parcours de soin.
La relation thérapeutique est souvent enfermée dans une suite d’attentes non recevables et une forme de malentendus difficiles à dénouer. Le médecin croit qu’il est obligé de faire un diagnostic, le patient pense que, sans diagnostic, il ne peut être un véritable malade. Le médecin n’a pas l’assurance des dires du patient alors que le patient se soumet au médecin à la fois pour espérer guérir et positionner le médecin dans un rôle de thérapeute.
Le malaise, la frustration, voire le désarroi, régulièrement ressentis par les médecins en charge de patients atteints de SFM sont révélateurs du fait que les ressorts de la relation médecin-malade, en situation d’incertitude, sont mal maîtrisés et objets d’inefficacité thérapeutique. L’importance de la relation médecin-malade a été soulignée entre autres par les travaux de Balint qui datent d’il y a près d’un demi-siècle (Balint, 1972) : « Le médicament le plus utilisé en médecine est le médecin lui-même » est bien toujours d’actualité, plus encore sur le terrain du SFM. Nous avons vu combien le médicament (ainsi que toute forme de prescription médicale) représente « un outil qui appartient à l’un et à l’autre, qui circule entre l’un et l’autre et advient dans cet entre-deux comme substance agissante, productrice à la fois de relations, d’actions et de représentations »
1
Traduit par les auteurs : « The medication is a tool, a sort of ingredient which belongs to both actors, and which becomes, between them, a sort of active substance that produces relations, actions and representations ».
(Durif-Bruckert et coll., 2015

). Le SFM est lié et exposé aux contextes et discours sociaux mais aussi à l’organisation de la médecine qui montre ses limites au travers d’un paradoxe anxiogène qui consiste à valoriser l’autonomie du patient alors même que ses savoirs et dires sont encore trop négligés, discutés et objets d’une certaine méfiance, notamment dans le contexte d’un SFM.
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