Pesticides et effets sur la santé
II. Pathologies cancéreuses
2021
13-
Cancer du sein
Les glandes mammaires ont pour principale fonction biologique la
production du lait. Chaque sein contient une glande mammaire, composée
de quinze à vingt compartiments séparés par du tissu graisseux ainsi que
par du tissu de soutien qui contient des vaisseaux sanguins, des
vaisseaux et ganglions lymphatiques, des fibres de collagène et de la
graisse. Chacun des compartiments de la glande mammaire est constitué de
lobules et de canaux galactophores. Le rôle des lobules est de produire
le lait en période d’allaitement. Les canaux transportent le lait vers
le mamelon. La glande mammaire se développe et fonctionne sous
l’influence des hormones stéroïdes sexuelles, notamment les œstrogènes
et la progestérone.
Les cancers du sein sont des adénocarcinomes dans 95 % des cas,
c’est-à-dire qu’ils se développent à partir des cellules épithéliales de
la glande mammaire. Les adénocarcinomes se développent le plus
fréquemment à partir des cellules des canaux et plus rarement à partir
des cellules des lobules.
Incidence et mortalité
Le nombre de nouveaux cas de cancer du sein chez la femme en France
en 2018 a été estimé à 58 459 avec un âge médian au diagnostic de
63 ans (Defossez et coll., 2019

). Le cancer du sein est le cancer le plus
fréquent chez la femme. Le taux d’incidence standardisé à l’âge de
la population mondiale (TIS-M) a été estimé à 99,9 cas pour
100 000 personnes-années et progresse selon l’âge à partir de l’âge
de 30 ans pour atteindre un maximum entre 70 et 74 ans. L’incidence
est hétérogène selon les départements. Sur la période 2007-2016, les
TIS-M les plus élevés ont été observés à Paris (111), le Nord (106)
et les Yvelines (104) et les TIS-M les plus bas en Guyane (53 pour
la période 2010-2014), en Martinique (61 pour la période 2007-2014)
et en Guadeloupe (66 pour la période 2008-2014) (Deloumeaux et
coll., 2019

).
Entre 1990 et 2018, l’accroissement d’incidence du cancer du sein a
été en moyenne de 1,1 %. Cependant, cette évolution n’a pas été
régulière avec une forte augmentation en début de cette période,
puis une légère diminution entre 2005 et 2009 puis une reprise
modérée à la hausse jusqu’en 2018. De multiples facteurs peuvent
expliquer ces variations, en commençant par l’évolution des
pratiques de dépistage, de la vie reproductive et des modes de vie
(voir section « Étiologie et facteurs de risque »).
Avec 12 146 décès par cancer du sein en 2018, le cancer du sein est
au premier rang des décès par cancer chez la femme avec un âge
médian au décès de 74 ans (Defossez et coll.,
2019

).
Le taux de mortalité standardisé à l’âge de la population mondiale
(TMS-M) est de 14,0 décès pour 100 000 personnes-années. Sur la
période 2007-2014, les TMS-M les plus élevés ont été observés dans
le Pas-de-Calais (21,0), le Nord (20,0) et la Somme (19,0) et les
TMS-M les plus bas en Guyane (11,0), dans les Alpes-Maritimes (13,0)
et la Haute-Garonne, le Var, en Guadeloupe et en Martinique (13,0)
(Deloumeaux et coll., 2019

). Globalement, les taux de mortalité
suivent une évolution inverse à ceux de l’incidence, avec une
diminution moyenne annuelle de 1,3 % entre 1990 et 2018. Cette
diminution pourrait être expliquée par l’amélioration des
traitements ainsi que par le dépistage permettant un diagnostic à
des stades plus précoces, et donc curables, de la maladie.
Étiologie et facteurs de
risque
Comme pour de nombreux cancers, l’étiologie du cancer du sein est en
grande partie inconnue. Cependant, de nombreux facteurs de risque
ont été identifiés, certains étant liés à des facteurs hormonaux et
reproductifs. L’âge précoce aux premières règles, des cycles plus
courts, un âge tardif à la première grossesse ou à la ménopause, la
prise de certains traitements hormonaux (notamment de la ménopause),
la consommation d’alcool, le tabagisme, le surpoids chez la femme
ménopausée, l’obésité, l’activité physique réduite et l’exposition à
des radiations ionisantes ont été associés à un excès de risque
alors qu’un nombre élevé de grossesses et l’allaitement diminuent le
risque (Ban et Godellas, 2014

; Colditz et Bohlke,
2014

;
Macacu et coll., 2015

; Picon-Ruiz et coll.,
2017

).
Le travail de nuit a été classé comme cancérogène probable
(groupe 2A) par le Circ sur la base de données mécanistiques et
expérimentales (Ward et coll., 2019

). Cependant, en dépit de nombreuses
études observationnelles, les conclusions sur un plan
épidémiologique sont encore controversées au regard du risque de
survenue du cancer du sein (Travis et coll.,
2016

;
Wegrzyn et coll., 2017

; Cordina-Duverger et coll.,
2018

;
Jones et coll., 2019

).
La présence d’antécédents familiaux de cancers, notamment ceux dits
« hormono-dépendants » (sein, ovaire), est également un facteur de
risque reconnu du cancer du sein. Cela peut traduire soit la
présence de facteurs modifiables communs (par exemple, modes de vie)
au sein d’une famille mais également la présence de facteurs
génétiques favorisant le développement de la maladie. Il existe
également une variabilité dans l’incidence du cancer du sein en
fonction des origines ethno-géographiques. En effet, toutes choses
étant égales par ailleurs, les populations d’origine caucasienne
sont plus à risque de développer un cancer du sein que les
populations d’origine africaine sub-saharienne ou asiatique,
traduisant la présence de facteurs de susceptibilité génétique ou
épigénétique individuels plus fréquents. On estime par ailleurs, que
5 à 10 % des cancers du sein sont héréditaires et attribuables à des
mutations génétiques. Parmi elles, les plus fréquentes affectent les
gènes BRCA1 et BRCA2. D’autres mutations, plus rares,
ont été décrites et affectent des gènes impliqués dans la réparation
de l’ADN ou dans l’arrêt de la multiplication des cellules en cas de
lésion au niveau de l’ADN, tels que TP53, CHEK2,
ATM, PTEN ou STK11.
Premières données
épidémiologiques
En 1993, Wolff et coll. ont publié une étude portant sur 58 cas de
cancer du sein et 171 témoins nichés au sein de la cohorte
New
York University Women’s Health Study aux États-Unis composée
de 14 290 femmes (Wolff et coll.,
1993

).
En utilisant des prélèvements sanguins obtenus entre 1985 et 1991,
les auteurs ont rapporté un risque augmenté de survenue de cancer du
sein chez les femmes les plus exposées au
dichlorodiphényldichloroéthylène (DDE), le principal métabolite du
dichlorodiphényltrichloroéthane (DDT) un insecticide organochloré.
Cependant, dès 1994, une nouvelle étude portant sur 150 cas et
150 témoins nichés au sein d’une cohorte de 57 040 femmes habitant
dans la région de la baie de San Francisco aux États-Unis (pour
lesquelles un prélèvement sanguin avait été obtenu vers la fin des
années 1960 et qui ont fait l’objet d’un suivi jusqu’en 1990) n’a
pas montré d’association entre les niveaux d’exposition au DDE et le
risque de survenue du cancer du sein (Krieger et coll.,
1994

).
Ces deux études, réalisées en partie par les mêmes auteurs et
contradictoires dans leurs conclusions ont été à l’origine d’un
engouement scientifique et sociétal concernant l’impact des
pesticides dans la survenue du cancer du sein. Cela s’explique par
la diffusion généralisée des pesticides, notamment des insecticides
organochlorés, dans l’environnement et la chaîne alimentaire (Hunter
et Kelsey, 1993

) mais aussi par leur capacité à interagir
avec les récepteurs aux œstrogènes ou aux androgènes, ce qui est
notamment le cas pour le DDE (Kelce et coll.,
1995

).
Ceci a généré l’hypothèse que les pesticides organochlorés,
généralement considérés comme non génotoxiques, pourraient moduler
l’expression de gènes intervenant dans le processus cancérogène des
tumeurs hormono-dépendantes par activation inappropriée de
récepteurs aux stéroïdes. Depuis ces premières études, de nombreuses
publications ont abordé cette question, dans un contexte
d’exposition professionnelle ou environnementale.
Résumé de l’expertise collective Inserm de
2013
Expositions
professionnelles
La majorité des études portant sur le risque de survenue du
cancer du sein dans des conditions d’exposition professionnelles
ont été réalisées parmi des femmes travaillant dans le secteur
agricole, avec des niveaux d’exposition aux pesticides souvent
plus faibles que chez leurs homologues masculins. En effet,
l’épandage de pesticides dans les cultures agricoles est une
tâche plus fréquemment dévolue aux hommes. Toutefois, outre
l’épandage direct des produits, les femmes peuvent être exposées
lors des tâches de ré-entrées sur des parcelles récemment
traitées, à leurs domiciles si, par exemple, elles sont en
charge du nettoyage des vêtements et équipement de travail du
conjoint ou dans des circonstances résidentielles, lorsque leurs
domiciles sont à proximité des champs.
Le risque de cancer du sein, estimé par son incidence, chez les
femmes en milieu agricole est très variable d’une étude à
l’autre, avec des études montrant soit une augmentation (Band et
coll., 2000

; Gardner et coll.,
2002

) soit une diminution de risque (Wiklund et Dich,
1994

; Kristensen et coll., 1996

; Settimi et coll.,
1999

; Pukkala et coll., 2009

; Villeneuve et coll.,
2011

) par rapport à celui observé dans les populations générales
respectives. L’interprétation de ces résultats par rapport à
l’exposition aux pesticides est difficile, car elle n’est pas
toujours bien documentée mais aussi parce que d’autres facteurs,
tels que l’alimentation, l’activité physique et les modes de vie
peuvent expliquer les différences d’incidence de la maladie.
D’autres études ont tenté de quantifier individuellement les
expositions. Ces études, basées sur des déclarations concernant
leur présence dans des cultures, pendant ou peu après
l’application de pesticides, ou l’application par elles-mêmes de
ces produits ont également donné lieu à des conclusions
contradictoires. Dans une étude cas-témoins menée en Caroline du
Nord aux États-Unis (862 cas
versus 790 témoins), Duell
et coll. ont retrouvé un risque augmenté de survenue de cancer
du sein en cas de présence dans les cultures pendant ou dans les
24 heures suivant les épandages de pesticides mais aussi un
risque diminué en cas de domiciliation ou de travail dans une
ferme (Duell et coll., 2000

). Au sein de la cohorte
Agricultural Health Study (AHS) aux États-Unis, les
auteurs ont constaté un risque diminué de survenue du cancer du
sein chez les femmes appliquant des pesticides (sans distinction
de matière active) mais un excès de risque en cas d’application
de l’herbicide 2,4,5-TP (Engel et coll.,
2005

).
Sur la base des données existantes en 2013, la précédente
expertise collective de l’Inserm a conclu qu’il était impossible
d’évaluer de manière complète et détaillée le risque de survenue
du cancer du sein chez les femmes exposées professionnellement à
des pesticides (Inserm, 2013

).
Expositions
environnementales
Comme évoqué ci-dessus, les premières études s’adressant au
risque de cancer du sein dans un contexte d’exposition
environnementale à des insecticides organochlorés, publiées en
1993 et 1994, sont apparues contradictoires quant à leurs
conclusions. De très nombreuses études ont été publiées par la
suite dans des circonstances d’exposition environnementale,
notamment sur les insecticides organochlorés et en particulier
le DDE. La longue demi-vie dans l’organisme des organochlorés
permet par la mesure de leur concentration dans une matrice
biologique (sang, graisse) de disposer d’un bon indicateur de la
charge corporelle et sur une période relativement longue.
Plusieurs méta-analyses et revues de la littérature ont conclu
qu’il n’existait pas de preuves suffisantes en faveur d’une
association entre les niveaux de pesticides organochlorés, y
compris le DDE, mesurés dans des matrices biologiques et le
risque de survenue du cancer du sein (Snedeker,
2001

; Calle et coll., 2002

; López-Cervantes et coll.,
2004

; Khanjani et coll., 2007

). S’agissant des études, bien moins
nombreuses et portant sur des pesticides autres que les
organochlorés, elles ont employé comme indicateur d’exposition
la distance de résidence à des zones d’épandages de pesticides
(Reynolds et coll., 2005

) ou les niveaux de contamination des
eaux de consommation à de l’atrazine (McElroy et coll.,
2007

) et n’ont pas montré d’association avec le risque de cancer
du sein.
Néanmoins, certaines études méritent d’être soulignées. Hoyer et
coll. se sont intéressés au sein de la cohorte
Copenhagen
City Heart Study au Danemark à l’évolution de la maladie
suite au diagnostic initial (Hoyer et coll.,
2000

). Au cours du suivi portant sur 195 cas incidents de cancer
du sein, les auteurs ont montré un excès de risque, à la limite
de la signification statistique, de récidive de la maladie et/ou
de décès par cancer du sein chez les femmes les plus exposées à
la dieldrine, un insecticide organochloré (RR = 2,61 ;
IC 95 % [0,97-7,01] pour le 4
e quartile d’exposition
le plus élevé comparé au 1
er quartile le plus
faible ; p de tendance < 0,01). Cependant, une étude
ultérieure au sein de cette même cohorte n’a pas montré de lien
entre l’exposition à plusieurs insecticides organochlorés, dont
la dieldrine, et la survie des patientes en fonction du statut
de la tumeur vis-à-vis des récepteurs aux œstrogènes (Hoyer et
coll., 2001

).
Une autre étude a porté son attention sur la période d’exposition
critique. Cohn et coll. ont mené une étude cas-témoins nichée
parmi les participantes à l’étude
Child Health and
Development Studies conduite en Californie aux
États-Unis (Cohn et coll., 2007

). Le DDT (isomères o,p’ et p,p’, ce
dernier étant le plus abondant) ainsi que le DDE (isomère p,p’)
ont été dosés dans des prélèvements de sang, obtenus entre 1959
et 1967, chez des jeunes femmes (âge moyen de 26 ans) à
l’occasion d’une de leurs grossesses. Cent vingt-neuf de ces
femmes ayant eu un diagnostic de cancer du sein avant l’âge de
50 ans ont été comparées à 150 femmes de même âge et sans cancer
du sein. Le DDT (isomère p,p’), dans un modèle ajusté aux autres
organochlorés, a été retrouvé associé à un excès de risque de
survenue de cancer du sein (OR = 2,9 ; IC 95 % [1,1-8,0] pour le
3
e tercile comparé au 1
er). En
fonction de leur âge en 1945, date où l’emploi du DDT a été
généralisé, un excès de risque a été observé chez celles qui
avaient moins de 14 ans à cette date (et moins de 20 ans lorsque
le DDT a atteint son maximum d’utilisation dans le monde au
début des années 1950) (OR = 2,8 ; IC 95 % [1,1-6,8] et
OR = 5,2 ; IC 95 % [1,4-9,1] respectivement pour les
2
e et 3
e terciles).
Bien que l’étude de Cohn et coll. ait soulevé l’importance de la
période d’exposition, l’ensemble des études réalisées jusqu’en
2013 n’a, comme pour l’exposition professionnelle, pas permis de
conclure sur le lien éventuel entre l’exposition des pesticides
et le risque de survenue d’un cancer du sein dans des
circonstances d’exposition environnementales.
Nouvelles données
épidémiologiques
Expositions
professionnelles
Dans le cadre de la cohorte AHS, trois nouvelles publications se
sont intéressées au risque de survenue de cancer du sein parmi
les conjointes d’agriculteurs, où les utilisatrices
d’insecticides ont été comparées aux non-utilisatrices (Lerro et
coll., 2015

; Engel et coll.,
2017

; Louis et coll., 2017

). Lors d’un suivi portant sur
1 059 cas incidents, l’usage d’insecticides organophosphorés a
été retrouvé associé à un risque augmenté de cancer du sein
(RR = 1,20 ; IC 95 % [1,01-1,43]) (Lerro et coll.,
2015

). Une analyse par matière active a montré que seule
l’utilisation du chlorpyrifos (parmi 8 organophosphorés étudiés)
était associée, à la limite de la signification statistique, à
un risque augmenté de cancer du sein (RR = 1,41 ;
IC 95 % [1,00-1,99]). Une analyse plus approfondie de
l’association avec le chlorpyrifos, en prenant en compte le
statut des récepteurs hormonaux aux œstrogènes (
estrogen
receptor ; ER) ou à la progestérone (
progesterone
receptor ; PR), a mis en évidence une augmentation de
risque l’association étant plus élevée en cas de tumeur ER-PR-
(RR = 2,26 ; IC 95 % [1,07-4,75]) qu’en cas de tumeur ER+PR+
(RR = 1,37 ; IC 95 % [0,86-2,19]). Un risque augmenté, mais non
statistiquement significatif, a été également constaté en cas
d’utilisation de terbufos (RR = 1,52 ; IC 95 % [0,97-2,36]).
Lors d’un suivi ultérieur portant sur 1 081 cas de cancers du
sein, les auteurs ont rapporté des résultats similaires
concernant le chlorpyrifos (HR = 1,4 ; IC 95 % [1,0-2,0]) et le
terbufos (HR = 1,5 ; IC 95 % [1,0-2,1]) mais aussi un risque
augmenté, non significatif, pour l’usage du coumaphos
(HR = 1,5 ; IC 95 % [0,9-2,5]) (Engel et coll.,
2017

). Au cours d’une étude exclusivement consacrée aux
insecticides organochlorés, aucune association n’a été retrouvée
en lien avec l’utilisation de ces pesticides sauf pour la
dieldrine (Louis et coll., 2017

). En effet, parmi les insecticides
organochlorés étudiés (8 au total), seul l’emploi de la
dieldrine est apparu associé à un risque augmenté de cancer du
sein, ce risque étant limité aux femmes porteuses d’une tumeur
ER-PR- (RR = 3,55 ; IC 95 % [1,12-11,18]). À noter que ce
résultat n’a été acquis qu’à partir de 3 cas présentant ces
caractéristiques tumorales.
Une étude cas-témoins en population générale, dans 18 communes à
forte activité agricole de la province de Vercelli (Italie), a
comparé 85 cas incidents de cancer du sein à 6 300 témoins
(Salerno et coll., 2016

). L’activité professionnelle dans le
secteur agricole a été retrouvée associée à un risque augmenté
de survenue du cancer du sein (OR = 1,72 ; IC 95 % [1,04-2,85]).
Cependant, en absence de toute information relative à l’usage de
pesticides, aucune conclusion ne peut en être dérivée s’agissant
de l’impact de ces derniers sur la survenue du cancer du
sein.
En Californie, une étude cas-témoins a été réalisée chez des
femmes hispaniques (101 cas
versus 88 témoins) résidant
dans la vallée de San Joaquin, une région à forte activité
agricole (Mills et coll., 2019

). Parmi celles ayant travaillé dans
une exploitation agricole, et à l’aide d’une matrice
emploi-exposition, celles ayant été exposées au parathion-méthyl
présentaient un excès de risque de survenue du cancer du sein
mais limité au 2
e tercile d’exposition (OR = 5,28 ;
IC 95 % [1,17-23,7]).
Expositions
environnementales
Dans une revue critique de la littérature, Alavanja et coll.
concluent, sur la base des études disponibles à l’époque, à
l’absence de preuves convaincantes d’un lien entre l’exposition
à des pesticides organochlorés et la survenue du cancer du sein
(Alavanja et coll., 2013

). S’agissant des pesticides autres que
les organochlorés, ces mêmes auteurs après examen des 8 études
disponibles dans des circonstances d’exposition non
professionnelles (conjointes d’agriculteurs non applicatrices de
pesticides, résidence à proximité de zones agricoles) estiment
que les études sont encore peu nombreuses et avec des
informations peu spécifiques concernant les matières actives
incriminées pour aboutir à des conclusions significatives dans
un sens ou dans l’autre.
Deux nouvelles méta-analyses ont porté sur le risque de cancer du
sein et les expositions environnementales au DDE estimées à
partir des concentrations de ce polluant dans des matrices
biologiques. Dans la méta-analyse de Park et coll. portant sur
35 études publiées jusqu’en août 2012, le mOR n’a pas montré
d’excès de risque significatif (1,03 ; IC 95 % [0,95-1,12])
(Park et coll., 2014

). Il en est de même pour la
méta-analyse de Ingber et coll. portant sur 46 études publiées
jusqu’en 2013 (mOR = 1,05 ; IC 95 % [0,93-1,18] pour le DDE et
mOR = 1,02 ; IC 95 % [0,92-1,13] pour le DDT) (Ingber et coll.,
2013

).
En Australie, une étude cas-témoins en population générale
(1 169 cas
versus 1 743 témoins) s’est intéressée à
l’association entre l’auto-déclaration d’avoir « remarqué » une
dérive de pulvérisation de pesticides à l’occasion d’application
de ces produits sur des terres agricoles (El-Zaemey et coll.,
2013

). Cette question a été adressée aux femmes ayant résidé
pendant au moins un an à proximité (1 km ou moins) d’une zone
d’activité agricole. Parmi les femmes qui ont déclaré « avoir
déjà remarqué » une dérive de pulvérisation, les auteurs
rapportent un excès de risque de survenue du cancer du sein
(OR = 1,43 ; IC 95 % [1,15-1,78]), et en particulier parmi
celles où cette constatation a été faite avant d’avoir atteint
l’âge de 20 ans (OR = 1,61 ; IC 95 % [1,19,-2,16]). Cette étude
n’apporte aucune information concernant les éventuels pesticides
(familles chimiques ou matière active) concernés et repose sur
une notion de dérive peu précise quant à l’exposition effective
(par exemple, dérive perçue visuellement et/ou par
l’odorat).
Une étude cas-témoins hospitalière (121 cas
versus
621 témoins) n’a pas observé d’association entre le lieu de
résidence à proximité d’une zone d’épandage de fongicides à
usage agricole à l’Île-du-Prince-Édouard au Canada et le risque
de survenue du cancer du sein (Ashley-Martin et coll.,
2012

). Une étude réalisée en Espagne et portant sur 425 cas
incidents et 1 511 témoins a exploré le lien avec la proximité
de leur domicile à des sites industriels (García-Pérez et coll.,
2018

). Une association positive a été retrouvée en lien avec la
présence de sites industriels situés à moins de 2 km et libérant
des pesticides (sans autre précision) (OR = 2,09 ; IC 95 %
[1,14-3,82]). Au Brésil, une étude comprenant 85 cas incidents
de cancers du sein et 266 témoins a rapporté un excès de risque
de survenue de la maladie chez les femmes résidant à moins de
500 m d’une exploitation agricole ayant recours à des pesticides
(OR = 2,37 ; IC 95 % [1,78-3,16]) (Silva et coll.,
2019

). Une étude réalisée chez 155 cas et 150 témoins en
Californie (comtés de Fresno, Tulare et Kern) a employé comme
indicateur d’exposition l’usage de pesticides agricoles dans un
rayon inférieur à 500 m à leur lieu de résidence (Tayour et
coll., 2019

). Une association positive a été
retrouvée avec l’usage du chlorpyrifos (OR = 3,22 ; IC 95 %
[1,38-7,53]) alors qu’une absence d’association a été retrouvée
pour l’usage d’organochlorés (sans autre précision), le diazinon
(un insecticide organophosphoré) et le 1,3 dichloropropène (un
nématicide).
Plusieurs autres études cas-témoins portant sur des faibles
effectifs ont étudié le risque de survenue du cancer du sein en
lien avec les concentrations sanguines en pesticides
organochlorés. En Espagne, Boada et coll. en comparant 121 cas à
103 témoins ont rapporté, parmi 7 organochlorés explorés, une
association positive, à la limite de la signification
statistique, avec le DDD (un métabolite du DDT) (OR = 1,01 ;
IC 95 % [1,00-1,02]) (Boada et coll.,
2012

). Au Groenland, Wielsøe et coll. ont rapporté des
concentrations sanguines de DDE plus élevées chez 77 cas de
cancer du sein que chez 84 témoins (Wielsøe et coll.,
2017

). Holmes et coll. en analysant 9 pesticides persistants dans
le sang, n’ont pas trouvé d’associations avec le risque de
survenue du cancer du sein dans une étude comparant 75 cas à
95 témoins en Alaska (Holmes et coll.,
2014

). En Tunisie, Arrebola et coll., en comparant les taux
sériques de cinq organochlorés chez 69 cas à 56 témoins, ont mis
en évidence une association entre une concentration élevée de
β-hexachlorocyclohexane (OR = 1,18 ; IC 95 % [1,05-1,34]) et le
risque de cancer du sein (Arrebola et coll.,
2015

). Dans une étude cas-témoins hospitalière (56 cas et
46 témoins) réalisée en Chine, He et coll. ont mesuré les
concentrations de six pesticides organochlorés dans des
prélèvements de tissus adipeux du sein (He et coll.,
2017

). Les auteurs concluent à une augmentation du risque de
survenue de cancer du sein alors que les résultats montrent
l’inverse (OR = 0,129 ; IC 95 % [0,031-0,542] pour le DDE). Une
étude réalisée au Pakistan chez 83 cas de cancers (incluant les
cancers du sein) et 32 témoins a rapporté que la moyenne de la
somme de la concentration sanguine de 14 pesticides
organochlorés était plus élevée chez les cas de cancer du sein
(nombre non précisé) que chez les témoins (Attaullah et coll.,
2018

).
Parada et coll. ont étudié aux États-Unis les associations entre
l’exposition aux insecticides organochlorés DDT, DDE et
chlordane chez 633 cas incidents de cancer du sein (invasifs ou
in situ) sur la période 1996-1997 et leur survie
(Parada Jr et coll., 2016

). L’exposition a été estimée par la
mesure de la concentration sanguine des pesticides à l’occasion
du diagnostic. Après un suivi de 5 et 15 ans, 55 et 189 décès
toutes causes confondues ont été constatés dont 36 et
74 attribuables au cancer du sein. À 5 ans, le tercile le plus
élevé de la concentration en DDT était associé à un excès de
décès toutes causes confondues (HR = 2,19 ; IC 95 %
[1,02-4,67] ; p de tendance = 0,02) et à un excès de décès
spécifique par cancer du sein (HR = 2,72 ; IC 95 % [1,04-7,13] ;
p de tendance = 0,02). Cependant, à 15 ans, aucune association
statistiquement significative n’a été observée. Les mêmes
auteurs, en partant d’une autre population de cas incidents de
cancers invasifs du sein (n = 748) au cours de la période
1993-1996 aux États-Unis, se sont également intéressés à la
survie au terme d’un suivi médian de 20,6 années (Parada Jr et
coll., 2019

). L’exposition au DDT et au DDE a été
estimée par la mesure de leur concentration sanguine à
l’occasion du diagnostic. Au terme d’un suivi de 5 ans, ni le
DDT ni le DDE n’ont été retrouvés associés à la mortalité toutes
causes ou à la mortalité spécifique par cancer du sein. En
revanche, au terme d’un suivi à 20 ans, le DDE (HR = 1,95 ;
IC 95 % [1,31-2,92] pour le 3
e tercile comparé au
1
er) et le DDT (HR = 1,64 ; IC 95 % [1,10-2,44]
pour le quantile le plus élevé comparé au quantile avec des
concentrations en dessous de la limite de détection) ont été
retrouvés associés à un excès de risque de décès toutes causes
confondues. S’agissant de la mortalité spécifique par cancer du
sein après 20 ans de suivi, les concentrations en DDE
supérieures à la médiane (groupe de référence : DDE en dessous
de la médiane) ont été retrouvées associées à une augmentation
de risque de décès (HR = 1,69 ; IC 95 % [1,06-2,68]). Le risque
était plus élevé chez celles qui présentaient une tumeur ER-
(HR = 3,24 ; IC 95 % [1,38-7,58]) comparé à celles qui
présentaient une tumeur ER+ (HR = 1,29 ; IC 95 % [0,73-2,28])
avec une interaction significative (p = 0,03).
Cohn et coll. avaient dans une première étude publiée en 2007
montré l’importance que pourrait avoir la période critique
d’exposition au DDT en lien avec le risque de survenue du cancer
du sein (Cohn et coll., 2007

). Cette étude, réalisée au sein de la
Child Health and Development Studies, s’était limitée
à la survenue de ce cancer avant l’âge de 50 ans, c’est-à-dire
avant la ménopause, l’exposition ayant été estimée par la mesure
de la concentration plasmatique en DDT à l’occasion d’une de
leurs grossesses (âge moyen de 26 ans). Les auteurs ont montré
que les concentrations sanguines en DDT étaient associées à un
excès de risque de survenue de cancer du sein, notamment chez
celles qui avaient moins de 14 ans au début des années 1950
(correspondant au maximum d’utilisation du DDT dans le monde).
Ces mêmes auteurs ont, dans une publication récente (Cohn et
coll., 2019

), étudié le risque de survenue du
cancer du sein pendant la période de transition de la ménopause
(50 à 54 ans). Un excès de risque a été observé (OR pour le
doublement de la concentration en p,p’ DDT = 1,99 ; IC 95 %
[1,48-2,67]). Cependant, tenant compte de l’âge qu’elles avaient
en 1945 (date où l’emploi du DDT a été généralisé), cet excès de
risque n’était observé que chez celles qui avaient plus de 14
ans à cette date (OR pour le doublement de la concentration en
p,p’ DDT = 2,83 ; IC 95 % [1,96-4,10]).
Une autre étude s’est adressée au risque de cancer du sein chez
les filles des femmes ayant participé à la cohorte
Child
Health and Development Studies entre 1959 et 1967 (Cohn
et coll., 2015

). Cent dix-huit cas de cancer du sein
ont ainsi été comparés à 354 témoins appariés à l’âge de
naissance. L’exposition maternelle pendant la grossesse au DDT
(isomère o,p’), dans un modèle ajusté sur les autres
organochlorés, était associée chez les filles à un excès de
risque de survenue de cancer du sein (OR = 3,7 ; IC 95 %
[1,5-9,0] pour le 4
e quartile ; p de
tendance = 0,05).
Au sein de la cohorte
Sister Study aux États-Unis, une
étude s’est intéressée au risque de survenue du cancer du sein
en lien avec l’exposition aux pesticides pendant l’enfance et
l’adolescence (Niehoff et coll.,
2016

). Parmi les 50 756 femmes sans cancer du sein incluses au
cours de la période 2003-2009, 2 134 ont développé un cancer du
sein lors d’un suivi moyen de 5 ans à compter de leur date
d’inclusion dans la cohorte. Les informations relatives aux
expositions résidentielles et agricoles aux pesticides ont été
recueillies par questionnaire à l’inclusion dans l’étude. Une
attention particulière a été portée sur le parcours résidentiel
avant l’âge de 14 ans ainsi que sur la nature de leur résidence
au regard d’une activité agricole (exploitation agricole) et de
l’usage de pesticides. Aucune association n’a été observée entre
l’exposition aux pesticides dans l’enfance et l’adolescence
(avant 14 ans) et le risque de survenue du cancer du sein, quel
que soit le statut hormonal de la tumeur. Seules les femmes
âgées de moins de 18 ans lors de l’interdiction du DDT aux
États-Unis en 1972 présentaient un risque augmenté de cancer du
sein, à la limite de la signification statistique (HR = 1,1 ;
IC 95 % [0,99-1,30]).
Récemment, une étude cas-témoins menée dans la vallée de San
Joaquin en Californie a mis en évidence une diminution de risque
non significative de survenue du cancer du sein chez les femmes
nées dans une exploitation agricole, ainsi que chez celles dont
les parents travaillaient dans ces exploitations au moment de
leur naissance (Mills et coll.,
2019

).
Cancer du sein chez
l’homme
10Chez l’homme, les seins demeurent immatures tout le long de la
vie et n’assurent aucune fonction particulière. Ils peuvent être
soumis à des pathologies bénignes, telles que la gynécomastie,
correspondant à une hypertrophie accompagnée ou pas
d’hyperplasie non fonctionnelle des cellules épithéliales des
canaux galactophores. Dans des très rares cas, le sein est
l’objet d’une transformation tumorale maligne. Il s’agit alors,
comme chez la femme, d’adéno-carcinomes qui se développent à
partir des cellules épithéliales tapissant les canaux.
Le cancer du sein chez l’homme survient à partir de l’âge de
60 ans et son TIS-M est estimé à un peu moins de 1 pour
100 000 personnes-années et ce quel que soit le pays considéré
(Contractor et coll., 2008

). Il est admis que le cancer du sein
chez l’homme correspond à la même entité pathologique que celle
décrite chez la femme (Thomas,
1993

). On y observe les mêmes types histologiques, l’expression
des mêmes récepteurs hormonaux (aux œstrogènes notamment) et une
fréquence élevée de mutations des gènes
BRCA1 ou
BRCA2 (Stalsberg et coll.,
1993

; Thomas, 1993

). L’étiologie est inconnue mais il
est bien établi que les entités nosologiques associées à des
déséquilibres entre androgènes et œstrogènes, notamment le
syndrome de Klinefelter, favorisent la survenue du cancer du
sein (Fentiman, 2018

). L’exposition à des radiations
ionisantes est un facteur de risque unanimement reconnu. À
l’inverse, le rôle des expositions à des champs
électromagnétiques ou à la chaleur (foyers thermiques radiants)
est encore débattu (Weiss et coll.,
2005

; Fentiman et coll., 2006

; Ruddy et Winer,
2013

). Il existe très peu d’études s’intéressant au rôle des
pesticides dans la survenue du cancer du sein chez l’homme. Une
cohorte historique suédoise comprenant 1 779 646 employés,
entreprise en 1971 et ayant fait l’objet d’un suivi de 19 ans,
n’a pu observer de lien entre des métiers exercés dans le
secteur agricole et le risque de survenue du cancer du sein
(Pollán et coll., 2001

). Une étude portant sur 178 cas et
1 041 témoins aux États-Unis n’a pas montré d’associations entre
l’exposition professionnelle aux herbicides ou à d’autres types
de pesticides et le risque de survenue de la maladie (Cocco et
coll., 1998

). En Europe, une étude ayant comparé
104 cas à 1 901 témoins n’a pas montré d’excès de risque chez
les agriculteurs, qu’ils soient exploitants ou salariés
(Villeneuve et coll., 2010

). À ce jour, aucune étude portant
sur des familles chimiques ou matière active et le risque de
cancer du sein chez l’homme n’a été publiée. Cela n’est guère
surprenant tenant compte de la rareté de la maladie. Pour
autant, les quelques études réalisées à ce jour ne soutiennent
pas un rôle important des pesticides dans la genèse du cancer du
sein masculin.
Données mécanistiques
Les études épidémiologiques existantes ne permettent pas à l’heure
actuelle de conclure sur la présomption d’un lien entre l’exposition
à des pesticides considérés dans leur ensemble et une augmentation
du risque de cancer du sein mais elles rapportent des signaux pour
certains organochlorés, tels que la dieldrine ou le DDT/DDE ou des
organophosphorés (chlorpyrifos...). Afin d’éclairer l’implication
potentielle de ces substances, une recherche bibliographique a été
menée sur les mécanismes biologiques moyennant lesquels elles
pourraient favoriser la survenue du cancer du sein. Certains de ces
pesticides sont interdits d’utilisation en Europe (par exemple, la
dieldrine ou le DDT, non autorisés depuis 1978), mais ils sont
persistants dans l’environnement, imprègnent la plupart des
populations et restent donc une préoccupation pour la santé
publique. Cette recherche bibliographique a été élargie à des
pesticides pour lesquels on ne dispose pas de données
épidémiologiques mais dont la littérature rapporte des propriétés
hormonales (perturbateurs endocriniens) et cancérigènes susceptibles
d’avoir un rôle dans la survenue du cancer du sein : les
insecticides néonicotinoïdes (notamment le
thiaclopride)
1
Le thiaclopride fait l’objet d’une
classification harmonisée au niveau européen comme substance
« susceptible de provoquer le cancer » (Carc 2/H351). Ce
composé et d’autres pesticides néonicotinoïdes ont fait
l’objet d’un avis de l’Agence nationale de sécurité
sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du
travail (Anses) relatif à « l’impact sur la santé humaine
des substances néonicotinoïdes autorisées dans les produits
phytopharmaceutiques et les produits biocides ». Saisine
n
o 2016-SA-0104. 2016. 45 p (
https://www.anses.fr/fr/system/files/BIOC2016SA0104.pdf
[consulté le 5 mai 2020]).
et l’herbicide glyphosate (voir chapitre
« Glyphosate et formulations à base de glyphosate »).
Dieldrine, DDT et autres pesticides
organochlorés
Certaines études épidémiologiques ont souligné la présence d’une
association entre l’exposition à certains organochlorés, comme
le DDT ou la dieldrine, et la survenue du cancer du sein. Ses
effets biologiques sont donc décrits plus spécifiquement
ci-après (figure 13.1

) avec
parfois d’autres organochlorés présentant des propriétés
similaires (ou parfois opposées) sur le plan mécanistique.
Environ deux tiers des cas de cancer du sein sont
hormono-dépendants, c’est-à-dire qu’ils sont sensibles aux
œstrogènes ou à la progestérone. Les cellules cancéreuses
expriment des récepteurs aux œstrogènes (ER) et/ou de la
progestérone qui régulent la prolifération cellulaire, et le
statut ER+ ou ER conditionne le pronostic et donc le choix des
traitements. De ce fait, de nombreuses études de toxicologie
expérimentale portant sur le rôle des pesticides dans
l’initiation ou la promotion du cancer du sein se sont
intéressées au potentiel d’activation des récepteurs hormonaux,
et en particulier de l’ERα (estrogen receptor alpha).
L’action des pesticides qui affectent le système œstrogénique
(c’est-à-dire qui ont des effets de perturbateurs endocriniens),
ne concerne pas que les récepteurs mais également d’autres
étapes comme la production des hormones.
De nombreuses études ont porté sur le potentiel œstrogénique des
organochlorés ; ainsi, en 1994, un article montre que le
toxaphène (mélange complexe de molécules chlorées), la dieldrine
et l’endosulfan ont des propriétés similaires à celles du DDT et
du chlordécone, molécules pro-œstrogéniques mais présentant des
affinités très inférieures à celles de l’œstradiol (Soto et
coll., 1994

). Ces effets sont souvent étudiés en
utilisant
in vitro le modèle MCF-7, cellule tumorale
mammaire humaine exprimant le ERα dont la croissance est
dépendante d’un stimulus œstrogénique (Verma et coll.,
1997

; Arcaro et coll., 1998

; Charles et coll.,
2002

; Rasmussen et Nielsen, 2002

; Aube et coll.,
2011

)
ou
in vivo un modèle de croissance utérine chez les
rongeurs (très sensible à l’imprégnation œstrogénique)
(Ramamoorthy et coll., 1997

; Wade et coll.,
1997

). Les effets pro-œstrogéniques observés dans les cellules
MCF-7 ont été confirmés dans d’autres lignées tumorales
mammaires humaines ER+ comme les T47D (Legler et coll.,
1999

). Les organochlorés ont en général des effets
pro-œstrogéniques pour des concentrations supérieures à 1 µM
(c’est-à-dire relativement élevées) (Andersen et coll.,
2002

). Toutefois, le toxaphène peut être décrit comme faiblement
anti-œstrogénique car il peut réduire la formation de « foci »
de cellules MCF-7 en présence d’œstradiol. Toutefois, il ne
semble pas en mesure de lier le récepteur ERα, il semblerait
donc important de confirmer ce dernier résultat et d’apporter
des éléments mécanistiques pour expliquer la réduction du nombre
de foci, précédemment décrite (Arcaro et coll.,
2000

).
Une étude plus récente a utilisé des lignées tumorales HeLa
exprimant de manière stable ERα ou ERβ ainsi qu’un gène
rapporteur pour mesurer l’activation des récepteurs
œstrogéniques par une cinquantaine de pesticides, dont
14 organochlorés (Lemaire et coll.,
2006

). Un traitement pendant 16 h avec les agents à une
concentration de 10 µM provoque l’activation de l’ERα et de
l’ERβ pour cinq des organochlorés testés ; chlordane, o,p’-DDT
(seul et en mélange avec le p,p’-DDT),
trans-nonachlore,
toxaphène. Cinq des pesticides organochlorés activaient l’ERα
uniquement ; chlordécone, dieldrine, endosulfan, endrine,
méthoxychlore. Un effet de compétition avec l’œstradiol (ou
antagonisme des organochlorés vis-à-vis de l’œstradiol et du
ERα) a été montré pour le chlordécone, le méthoxychlore,
l’endosulfan, l’endrine, la dieldrine et l’aldrine. On peut
ainsi noter que la dieldrine active l’ERα (considéré comme
pro-tumoral car favorisant la prolifération) et pas l’ERβ
(souvent associé à un bon pronostic après analyse histologique
de tumeurs mammaires).
D’autres mécanismes d’action ont toutefois été décrits. Ainsi,
une des conséquences de l’exposition aux organochlorés est une
perturbation de la communication intercellulaire par jonction
lacunaire. Le traitement des cellules mammaires non tumorales
avec la dieldrine inhibe la communication intercellulaire après
30 minutes et l’effet persiste pendant 24 h, tandis que pour le
DDT et le toxaphène une inhibition réversible est observée après
90 minutes (Kang et coll., 1996

). La rapidité de ces effets, qui ont
été constatés à des concentrations relativement élevées, suggère
l’activation de voies de signalisation non transcriptionnelles.
De même, Cameron et Foster montrent que la dieldrine bloque
l’apoptose de cellules MDA-MB-231 induite par leur détachement
du support de culture (anoïkis
2
L’anoïkis, du grec ancien « sans domicile
fixe », représente un mode d’élimination physiologique
des cellules par un mécanisme d’apoptose consécutif à
une rupture des communications entre une cellule et son
environnement. D’abord décrite pour des cellules
épithéliales, cette apoptose par détachement a été
identifiée depuis dans d’autres types cellulaires,
épithéliaux ou mésenchymateux. Alors qu’un excès de mort
par anoïkis observé dans un contexte protéolytique (dans
lequel les communications cellules-matrice
extracellulaire sont rompues) participe aux maladies
dégénératives, à l’inverse, une résistance marquée au
phénomène d’anoïkis permet aux cellules cancéreuses de
se disséminer (d’après Meilhac et Michel,
2005

).
). Les doses utilisées (0,5-10 µM ou
0,2-3,8 ppm) ont été sélectionnées sur la base d’une
modélisation simple en comparaison des concentrations retrouvées
dans le tissu mammaire (épithélium et adipocytes,
0,17-0,90 ppm). La résistance à l’anoïkis est observée à partir
de 5 µM et est associée avec une diminution de l’expression de
l’effecteur pro-apoptotique Bax (Cameron et Foster,
2008

). L’effet est bloqué par un antagoniste du récepteur tyrosine
kinase TrkB, dont l’expression est aussi augmentée
in
vivo dans un modèle murin de tumori-genèse mammaire
(Cameron et Foster, 2009

). Cette action de la dieldrine sur un
récepteur tyrosine kinase est à mettre en parallèle de celle
observée par Buteau-Lozano et coll. qui montrent une
augmentation de sécrétion et production de VEGF (facteur clé
intervenant dans l’angiogenèse) dans une lignée dérivée des
cellules MCF-7 (Buteau-Lozano et coll.,
2008

).
D’autres gènes cibles potentiels des organochlorés ont d’ailleurs
été caractérisés à l’aide d’une lignée primaire de cellules
mammaires humaines (Valerón et coll.,
2009

). Le traitement avec un mélange de plusieurs organochlorés
(p,p’-DDD ; p,p’-DDE ; o,p’-DDE ; aldrine ; dieldrine) conduit à
une augmentation de l’expression de plusieurs gènes (sur
94 testés) dont
ACVRL1 (inhibition de l’angiogenèse),
KIT et
ERBB3 (récepteurs dont l’activation
conduit à une prolifération cellulaire),
PDGFRB (récepteur
pro-angiogénique) et
ACVR1C (récepteur apparenté à ceux
activés par le TGF-β), aucun d’entre eux n’étant stimulé par
l’œstradiol. Les organochlorés ont été testés à des
concentrations 100 fois supérieures à celles constatées dans le
sérum d’une population générale espagnole (Îles Canaries). De
telles concentrations sont pertinentes dans la mesure où il est
assumé pour de nombreux organochlorés que leurs concentrations
dans les tissus adipeux sont 100 fois supérieures à celles
mesurées dans le sérum. Cette étude suggère l’existence de
mécanismes stimulés par les organochlorés autres que les
récepteurs aux œstrogènes dans les cellules mammaires.
Une revue récente sur les propriétés carcinogéniques de la
dieldrine a souligné que les études épidémiologiques sont
contrastées et comportent des biais méthodologiques liés au
défaut de caractérisation de l’exposition directe au pesticide
(Stern, 2014

). Néanmoins, l’article soulève un
point intéressant concernant le statut des tumeurs vis-à-vis de
l’expression du ERα, suggérant que la dieldrine soit plutôt
associée aux cancers ER (et ainsi un mode d’action non
œstrogénique). Ces éléments doivent être interprétés avec
prudence car ils peuvent avoir une dimension temporelle ; on
pourrait ainsi poser l’hypothèse que l’antagonisme de la
dieldrine vis-à-vis de l’œstradiol par compétition sur le même
site de liaison sur le ERα, favorise lors de la sélection
clonale, les cellules tumorales pouvant se multiplier sans
dépendance du ERα.
Chlorpyrifos
Des études épidémiologiques issues de la cohorte AHS ont montré
que l’exposition au chlorpyrifos (CPF) chez les femmes
agricultrices ou conjointes d’agriculteurs était associée, à la
limite de la signification statistique, à un excès de risque de
survenue du cancer du sein. Existe-t-il des données
mécanistiques qui peuvent renforcer la plausibilité de
l’association observée ?
Une étude
in vitro a évalué la capacité d’une vingtaine de
pesticides, dont le chlorpyrifos, à provoquer l’activation du
récepteur ERα et de stimuler la prolifération d’une lignée de
cellules humaines mammaires tumorales (MCF-7), mais ce dernier
n’a pas montré d’effets sur la prolifération cellulaire
(Vinggaard et coll., 1999

). Des expérimentations plus récentes
vont dans ce sens et ne démontrent que de très faibles effets
cytotoxiques, prolifératifs et de la stimulation de l’ER sur
cette même lignée de cellules à des doses élevées (≥ 50 µM)
(Andersen et coll., 2002

).
Ventura et coll. ont comparé l’effet du CPF sur les lignées MCF-7
et MDA-MB-231 en utilisant une plus large gamme de
concentration. Une légère diminution de la prolifération
associée à un blocage d’un des points de contrôle du cycle
cellulaire a été observée à 50 µM (Ventura et coll.,
2012

), un effet cytotoxique a également été démontré par Rich et
coll. sur les cellules MCF-7 traitées avec le CPF à 10 µM (Rich
et coll., 2012

). Ces résultats ont été confirmés
dans une étude subséquente par Ventura et coll. qui montrent que
ce blocage est lié à une altération des défenses anti-oxydantes
(toujours à 50 µM) avec une phosphorylation de ERK1/2 provoquée
par les espèces réactives de l’oxygène
(H
2O
2) (Ventura et coll.,
2015

). Considérées dans leur ensemble, ces données vont dans le
sens d’une absence d’effet (ou d’un faible effet) du CPF à forte
dose (figure 13.2

).
Toutefois, l’un des effets les plus intéressants est observé dans
une de ces études : celle utilisant une large gamme de
concentration et pour la très faible dose de 50 nM (selon un
traitement d’une durée de 10 jours). À cette concentration
(1 000 x plus faible que celle pour laquelle un blocage des
points de contrôle du cycle est observé), une augmentation de la
prolifération est observée (de 46 %), phénomène bloqué par un
antagoniste du ERα ainsi qu’une phosphorylation de la
tyrosine 537 du récepteur et une augmentation de l’expression
des cyclines D1 et E, qui permettent l’avancement du cycle
cellulaire (Ventura et coll.,
2012

). Sur de plus courtes périodes de traitement et à des doses
encore plus faibles (10 nM, 48 h), cet effet n’est pas observé
(Rich et coll., 2012

) soulignant que cet effet
pro-œstrogénique du CPF serait observé à de faibles doses mais
aussi sur de longues périodes d’exposition.
Ces effets de perturbation œstrogénique, possiblement non liée à
une liaison directe du CPF au ERα mais plutôt à des
modifications post-traductionnelles comme une phosphorylation du
récepteur, sont aussi observés
in vivo. L’exposition de
rates Wistar au CPF (0,1 ou 2,5 mg/kg/j pendant 8 semaines par
gavage) conduit à une perturbation du cycle ovarien caractérisé
par un prolongement du métoestrus (période correspondant au
début de la maturation de l’endomètre et à la synthèse de
progestérone) et des anomalies histologiques de la glande
mammaire, de l’utérus et de l’ovaire (suggérant des effets
pro-œstrogéniques) (Nishi et Hundal,
2013

). Une exposition à des doses encore plus faibles (0,01 et
1 mg/kg pc/j pendant une période doublée de 100 jours) de rates
Sprague-Dawley adultes, révèle également une perturbation de
l’architecture de la glande mammaire, des hyperplasies et au
niveau moléculaire, une expression augmentée du récepteur de la
progestérone et du marqueur de prolifération PCNA
(
proliferating cell nuclear antigen) et, à l’inverse,
une réduction de l’expression de corépresseurs des récepteurs
des œstrogènes. Les concentrations sériques de l’œstradiol, de
la progestérone et de l’hormone lutéinisante (LH) sont diminuées
(Ventura et coll., 2016

). Les mêmes auteurs ont étudié
l’effet de l’exposition chronique au CPF (aux mêmes doses que
précédemment ; 0,01 et 1 mg/kg pc/j) sur l’incidence de tumeurs
induites par le N-nitroso-N-méthylurée ; les deux doses de CPF
provoquent une réduction de la période de latence tumorale
(Ventura et coll., 2019

).
Néonicotinoïdes
La majorité des cas du cancer du sein sont caractérisés par une
surexpression de l’aromatase, l’enzyme catalysant la conversion
des androgènes en œstrogènes, ce qui a pour effet de stimuler la
prolifération de cellules tumorales œstrogéno-dépendantes (Zhao
et coll., 2016

). En 2016, Caron-Baudoin et coll.,
partant du fait que certains pesticides comme l’atrazine
(interdite au sein de l’UE en 2003) sont des activateurs de
l’expression de l’aromatase, ont évalué les effets de trois
pesticides de la famille des néonicotinoïdes sur ce système
(Caron-Beaudoin et coll., 2016

). L’imidaclopride, le thiaclopride,
et le thiaméthoxame ont été testés à des concentrations entre
0,1 et 10 µM sur une lignée cellulaire humaine de carcinome
surrénalien (H295R) et une lignée de cellules endothéliales de
la veine ombilicale humaine (HUVEC). Les résultats sont
intéressants à plus d’un titre (figure 13.3

). Le thiaclopride et le thiaméthoxame
présentent un profil activant l’expression de l’aromatase (pour
l’un de ses promoteurs), tandis que l’imidaclopride a un effet
inhibiteur sur les cellules H295R. Les effets sont de nature
non-monotone dans ces mêmes cellules, avec une activation
significative (12,7x) de l’aromatase par le thiaclopride à
0,3 µM ou par le thiaméthoxame à 0,1 µM (12,2x ou 15,7x en
fonction du promoteur considéré) qui n’est plus ou très
faiblement observée à des doses plus élevées. Les auteurs
renforcent leur démonstration par la mesure de la viabilité
cellulaire qui est inchangée à toutes les doses évaluées. La
diminution observée avec le traitement à l’imidaclopride (3 µM)
n’est plus constatée aux doses supérieures. Ces effets sont
cellule-spécifiques car non observés dans les expériences sur
les HUVEC. La mesure d’activité de l’enzyme aromatase dans les
cellules H295R, suit les profils d’expression, détaillés
ci-dessus.
Le même groupe a analysé les effets de ces mêmes substances
actives sur les cellules H295R dans un contexte de co-culture
avec des cellules placentaires BeWo (choriocarcinome ou modèle
de trophoblaste). En présence de chacun des trois
néonicotinoïdes, l’activité aromatase n’augmente pas dans les
cellules BeWo, tandis que l’enzyme est activée à des doses
relativement faibles dans les cellules H295R (par exemple pour
le thiaclopride dès 0,1 µM). Cette augmentation est associée à
une stimulation de la production d’œstradiol et d’œstrone, mais
pas d’œstriol qui diminue fortement probablement en lien avec
une augmentation d’expression du cytochrome P450 3A7 qui
métaboliserait les pesticides au lieu de produire un précurseur
de cette hormone (Caron-Beaudoin et coll.,
2017

).
Enfin, une augmentation de l’expression et de l’activité de
l’aromatase a aussi été montrée dans les cellules tumorales
mammaires Hs578t, toujours selon des courbes dose-réponse non
monotones pour le thiaclopride (activation à partir de 0,1 µM
effet maximum à 0,3 µM) et l’imidaclopride (activation à partir
de 0,1 µM, effet maximum à cette même concentration)
(Caron-Beaudoin et coll., 2018

). Les auteurs ont utilisé des
inhibiteurs pharmacologiques de voies de signalisation afin
d’éclairer les mécanismes potentiellement impliqués : les deux
néonicotinoïdes utilisés stimuleraient la voie de la
phospholipase (le thiaclopride stimulant également la voie
MEK/MAPK 1/3 qui, indépendamment de son effet sur la
transcription de l’aromatase, stimulerait la prolifération
cellulaire). Cette description est importante car l’une des
voies les plus étudiées en première intention pour tester un
effet pro-tumoral dans le contexte du cancer du sein est celle
des récepteurs aux œstrogènes (l’isoforme ERα jouant un rôle
pro-prolifératif). Or, Mesnage et coll. ont récemment évalué le
potentiel œstrogénique de sept néonicotinoïdes les plus utilisés
à travers un test de prolifération des cellules MCF-7 qui a
démontré qu’aucun d’entre eux n’activait le ERα (de même pour le
récepteur aux hormones thyroïdiennes sur des cellules GH3)
(Mesnage et coll., 2018

).
La démonstration d’un effet stimulateur de l’expression de
l’aromatase par les néonicotinoïdes suggère donc que la
concentration locale d’œstrogènes pourrait augmenter à de
faibles doses (effet non observé à de plus faibles doses,
courbes non monotones) d’exposition à ces pesticides dans
certains types cellulaires dont la cellule tumorale mammaire,
stimulant ainsi les voies œstrogéniques et la prolifération de
clones tumoraux (sans effet direct des néonicotinoïdes sur le
ERα).
Glyphosate
Les données mécanistiques détaillées dans le chapitre
« Glyphosate et formulations à base de glyphosate » de la
présente expertise collective montrent que le glyphosate et les
formulations à base de glyphosate (
glyphosate-based
herbicides ; GBH) pourraient exercer des effets
génotoxiques mais apparemment non mutagènes
(figure 13.4

). Ceci va
dans le sens d’une absence d’effet initiateur du glyphosate.
Toutefois, associé à un agent initiateur, il pourrait exercer un
effet promoteur à des doses plus faibles que celles
préalablement testées ; celui-ci reposerait sur divers
mécanismes d’action qui rentrent également dans le cadre de la
perturbation endocrinienne.
Le glyphosate a des effets pro-œstrogéniques à des concentrations
inférieures à 1 µM (Lin et Garry,
2000

; Hokanson et coll., 2007

; Mesnage et coll.,
2017

), voire de l’ordre de 10
-11 M, ce qui suggère que
l’effet est médié par le ERα (Thongprakaisang et coll.,
2013

; Sritana et coll., 2018

). Cet effet « faible dose » est à
opposer à ceux observés par exemple par Li et coll. qui montrent
que des concentrations de glyphosate comprises entre 15 et 50 mM
bloquent la croissance de certaines lignées cancéreuses (Li et
coll., 2013

). Ceci est aussi observé avec l’AMPA,
son produit de dégradation (Parajuli et coll.,
2015

; Parajuli et coll., 2016

). Des processus apoptotiques sont
stimulés à ces fortes doses, par exemple par l’AMPA dès 50 mM
(Li et coll., 2013

). Dans le contexte d’une exposition
au glyphosate à des concentrations pertinentes sur le plan
environnemental (de l’ordre de 1 µM à 1 pM), une liaison du
glyphosate au ERα n’a pas été mise en évidence à ce jour (EPA,
2015

). En revanche, Mesnage et coll. suggèrent une activation de
ce récepteur par d’autres mécanismes (par exemple, activation de
kinases et phosphorylation du ERα) (Mesnage et coll.,
2017

). Dans cette étude utilisant de nombreuses techniques, les
auteurs montrent ainsi que le glyphosate active la protéine
kinase A qui phosphoryle et active le ERα en l’absence d’un de
ses ligands. Par ailleurs, une étude de transcriptomique menée
sur des lignées cancéreuses mammaires ER+ et ER montre que le
GBH Roundup (à faibles concentrations sur de courtes durées
d’exposition) et l’AMPA affectent des fonctions telles que la
régulation du cycle cellulaire, la réparation de l’ADN et
l’intégrité mitochondriale (Stur et coll.,
2019

).
Une perturbation de la stéroïdogenèse est observée dans plusieurs
études (Walsh et coll., 2000

; Romano et coll.,
2012

; Owagboriaye et coll., 2017

). Cet effet peut être constaté avec
du Roundup et pas du glyphosate, soulignant la plus forte
toxicité des formulations (Walsh et coll.,
2000

; Romano et coll., 2012

). Cet effet pourrait impacter
indirectement la glande mammaire qui est sensible aux stéroïdes.
Le cas de l’aromatase est intéressant car son inhibition par le
Roundup suggère une baisse de la concentration locale
d’œstrogènes (Defarge et coll.,
2016

) expliquant la perturbation du développement de la glande
mammaire constatée dans certaines études chez les rongeurs
(Gomez et coll., 2019

). Cet effet est toutefois sujet à
controverse (Altamirano et coll.,
2018

). Ces effets sont transposables à d’autres organes comme
l’utérus au niveau duquel un effet prolifératif est constaté à
certains stades précoces (mais pas tardifs) ; les GBH pourraient
ainsi en fonction du stade de développement activer ou inhiber
les voies ER (Guerrero Schimpf et coll.,
2017

). Les mêmes auteurs suggèrent qu’une exposition précoce au
GBH augmente la sensibilité de l’utérus à l’œstradiol (Guerrero
Schimpf et coll., 2018

). Ces résultats, pris dans leur
ensemble, vont dans le sens d’une activité de perturbation
endocrinienne du glyphosate, mais ces effets demeurent complexes
car il peut présenter des propriétés anti-œstrogénique de par
son action sur l’aromatase et pro-œstrogénique de par
l’hypersensibilisation à l’action de l’œstradiol.
Finalement, des effets épigénétiques transgénérationnels sont
aussi suspectés et peuvent toucher des acteurs des voies de
signalisation évoqués précédemment. Une exposition de rates
gravides à 350 mg/kg pc/j de GBH et un suivi des femelles F1 a
mis en évidence une diminution de la méthylation du promoteur
ERα (ainsi que des modifications post-traductionnelles des
histones) associée à une augmentation du niveau de son ARN
messager (Lorenz et coll., 2019

). Ceci pourrait conduire à une
augmentation de la sensibilité de certains organes vis-à-vis des
œstrogènes, un phénomène déjà constaté dans d’autres contextes
et qu’il serait intéressant d’étudier dans la glande
mammaire.
Conclusion
Les études épidémiologiques publiées ces dernières années, prises
dans leur ensemble, n’apportent pas d’éléments supplémentaires
permettant de réviser les conclusions de la précédente expertise
collective de l’Inserm selon laquelle il n’est pas possible
d’établir de liens convaincants entre l’exposition professionnelle
ou environnementale à des pesticides et la survenue du cancer du
sein. Néanmoins, de nouveaux travaux issus de la cohorte AHS ont
montré que l’exposition professionnelle à des insecticides
organophosphorés, notamment le chlorpyrifos, et dans une moindre
mesure le terbufos et le coumaphos, pourraient être associés à un
risque augmenté de cancer du sein. Ces associations, à la limite de
la signification statistique, mériteraient d’être confirmées par des
études complémentaires.
L’immense majorité des études épidémiologiques conduites à ce jour a
porté sur des périodes d’exposition à l’âge adulte. Cependant, la
possibilité d’une période d’exposition critique à un plus jeune âge
(moins de 20 ans), évoquée dès 2007 par Cohn et coll. est toujours
d’actualité notamment pour ce qui concerne l’insecticide DDT. En
effet, des publications récentes ont continué à pointer l’influence
d’une exposition pendant la grossesse ou à un âge précédent ou juste
après la puberté dans la survenue d’un cancer du sein avant la
ménopause ou pendant la période de transition de la ménopause. Il
est à noter que dans ces études, ces périodes d’âge d’exposition
coïncident avec les années où l’utilisation du DDT dans le monde
était très élevée. Restent donc deux questions en suspens. Est-ce
que ces périodes d’exposition critique le sont toujours de nos jours
dans la mesure où les niveaux d’exposition au DDT (ou à ses
métabolites environnementaux tels que le DDE) ont fortement
diminué ? Est-ce que ces périodes d’exposition seraient également
critiques au regard d’autres pesticides ? Le manque d’études ne
permet malheureusement pas d’y répondre.
S’agissant des aspects mécanistiques issus d’études expérimentales,
le DDT comme la plupart des organochlorés ont un potentiel
œstrogénique démontré à la fois in vitro et in vivo.
Or, les cellules cancéreuses mammaires exprimant le récepteur aux
œstrogènes alpha, ont une prolifération stimulée en cas de liaison
d’agonistes à cette protéine. D’autres mécanismes stimulés par les
organochlorés autres que ceux passant par les récepteurs aux
œstrogènes ont été par ailleurs décrits dans les cellules mammaires
(altération des communications cellulaires, résistance à
l’apoptose...). Cela confère une certaine plausibilité biologique
aux études épidémiologiques portant sur des fenêtres d’exposition à
un âge précoce de la vie.
Pour ce qui concerne les insecticides organophosphorés, notamment le
chlorpyrifos, les études mécanistiques divergent en fonction des
doses employées. À de fortes doses, aucun ou de faibles effets
œstrogéniques sont constatés. À l’inverse, à de faibles doses des
effets pro-œstrogéniques sont constatés par des mécanismes
impliquant une stimulation du ERα mais sans liaison directe au
récepteur et plutôt par des modifications post-traductionnelles. Ces
éléments, susceptibles d’apporter de la plausibilité biologique aux
associations observées dans les rares études épidémiologiques
concernant le chlorpyrifos, sont encore peu nombreux et mériteraient
d’être investigués plus en détail.
Des travaux expérimentaux ont été également réalisés sur d’autres
substances (néonicotinoïdes et glyphosate) sans que l’on puisse pour
l’instant aboutir à de réelles conclusions en l’absence de données
épidémiologiques.
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