Pesticides et effets sur la santé
II. Pathologies cancéreuses

2021


ANALYSE

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Cancer du sein

Les glandes mammaires ont pour principale fonction biologique la production du lait. Chaque sein contient une glande mammaire, composée de quinze à vingt compartiments séparés par du tissu graisseux ainsi que par du tissu de soutien qui contient des vaisseaux sanguins, des vaisseaux et ganglions lymphatiques, des fibres de collagène et de la graisse. Chacun des compartiments de la glande mammaire est constitué de lobules et de canaux galactophores. Le rôle des lobules est de produire le lait en période d’allaitement. Les canaux transportent le lait vers le mamelon. La glande mammaire se développe et fonctionne sous l’influence des hormones stéroïdes sexuelles, notamment les œstrogènes et la progestérone.
Les cancers du sein sont des adénocarcinomes dans 95 % des cas, c’est-à-dire qu’ils se développent à partir des cellules épithéliales de la glande mammaire. Les adénocarcinomes se développent le plus fréquemment à partir des cellules des canaux et plus rarement à partir des cellules des lobules.

Incidence et mortalité

Le nombre de nouveaux cas de cancer du sein chez la femme en France en 2018 a été estimé à 58 459 avec un âge médian au diagnostic de 63 ans (Defossez et coll., 2019renvoi vers). Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme. Le taux d’incidence standardisé à l’âge de la population mondiale (TIS-M) a été estimé à 99,9 cas pour 100 000 personnes-années et progresse selon l’âge à partir de l’âge de 30 ans pour atteindre un maximum entre 70 et 74 ans. L’incidence est hétérogène selon les départements. Sur la période 2007-2016, les TIS-M les plus élevés ont été observés à Paris (111), le Nord (106) et les Yvelines (104) et les TIS-M les plus bas en Guyane (53 pour la période 2010-2014), en Martinique (61 pour la période 2007-2014) et en Guadeloupe (66 pour la période 2008-2014) (Deloumeaux et coll., 2019renvoi vers).
Entre 1990 et 2018, l’accroissement d’incidence du cancer du sein a été en moyenne de 1,1 %. Cependant, cette évolution n’a pas été régulière avec une forte augmentation en début de cette période, puis une légère diminution entre 2005 et 2009 puis une reprise modérée à la hausse jusqu’en 2018. De multiples facteurs peuvent expliquer ces variations, en commençant par l’évolution des pratiques de dépistage, de la vie reproductive et des modes de vie (voir section « Étiologie et facteurs de risque »).
Avec 12 146 décès par cancer du sein en 2018, le cancer du sein est au premier rang des décès par cancer chez la femme avec un âge médian au décès de 74 ans (Defossez et coll., 2019renvoi vers). Le taux de mortalité standardisé à l’âge de la population mondiale (TMS-M) est de 14,0 décès pour 100 000 personnes-années. Sur la période 2007-2014, les TMS-M les plus élevés ont été observés dans le Pas-de-Calais (21,0), le Nord (20,0) et la Somme (19,0) et les TMS-M les plus bas en Guyane (11,0), dans les Alpes-Maritimes (13,0) et la Haute-Garonne, le Var, en Guadeloupe et en Martinique (13,0) (Deloumeaux et coll., 2019renvoi vers). Globalement, les taux de mortalité suivent une évolution inverse à ceux de l’incidence, avec une diminution moyenne annuelle de 1,3 % entre 1990 et 2018. Cette diminution pourrait être expliquée par l’amélioration des traitements ainsi que par le dépistage permettant un diagnostic à des stades plus précoces, et donc curables, de la maladie.

Étiologie et facteurs de risque

Comme pour de nombreux cancers, l’étiologie du cancer du sein est en grande partie inconnue. Cependant, de nombreux facteurs de risque ont été identifiés, certains étant liés à des facteurs hormonaux et reproductifs. L’âge précoce aux premières règles, des cycles plus courts, un âge tardif à la première grossesse ou à la ménopause, la prise de certains traitements hormonaux (notamment de la ménopause), la consommation d’alcool, le tabagisme, le surpoids chez la femme ménopausée, l’obésité, l’activité physique réduite et l’exposition à des radiations ionisantes ont été associés à un excès de risque alors qu’un nombre élevé de grossesses et l’allaitement diminuent le risque (Ban et Godellas, 2014renvoi vers ; Colditz et Bohlke, 2014renvoi vers ; Macacu et coll., 2015renvoi vers ; Picon-Ruiz et coll., 2017renvoi vers). Le travail de nuit a été classé comme cancérogène probable (groupe 2A) par le Circ sur la base de données mécanistiques et expérimentales (Ward et coll., 2019renvoi vers). Cependant, en dépit de nombreuses études observationnelles, les conclusions sur un plan épidémiologique sont encore controversées au regard du risque de survenue du cancer du sein (Travis et coll., 2016renvoi vers ; Wegrzyn et coll., 2017renvoi vers ; Cordina-Duverger et coll., 2018renvoi vers ; Jones et coll., 2019renvoi vers).
La présence d’antécédents familiaux de cancers, notamment ceux dits « hormono-dépendants » (sein, ovaire), est également un facteur de risque reconnu du cancer du sein. Cela peut traduire soit la présence de facteurs modifiables communs (par exemple, modes de vie) au sein d’une famille mais également la présence de facteurs génétiques favorisant le développement de la maladie. Il existe également une variabilité dans l’incidence du cancer du sein en fonction des origines ethno-géographiques. En effet, toutes choses étant égales par ailleurs, les populations d’origine caucasienne sont plus à risque de développer un cancer du sein que les populations d’origine africaine sub-saharienne ou asiatique, traduisant la présence de facteurs de susceptibilité génétique ou épigénétique individuels plus fréquents. On estime par ailleurs, que 5 à 10 % des cancers du sein sont héréditaires et attribuables à des mutations génétiques. Parmi elles, les plus fréquentes affectent les gènes BRCA1 et BRCA2. D’autres mutations, plus rares, ont été décrites et affectent des gènes impliqués dans la réparation de l’ADN ou dans l’arrêt de la multiplication des cellules en cas de lésion au niveau de l’ADN, tels que TP53, CHEK2, ATM, PTEN ou STK11.

Premières données épidémiologiques

En 1993, Wolff et coll. ont publié une étude portant sur 58 cas de cancer du sein et 171 témoins nichés au sein de la cohorte New York University Women’s Health Study aux États-Unis composée de 14 290 femmes (Wolff et coll., 1993renvoi vers). En utilisant des prélèvements sanguins obtenus entre 1985 et 1991, les auteurs ont rapporté un risque augmenté de survenue de cancer du sein chez les femmes les plus exposées au dichlorodiphényldichloroéthylène (DDE), le principal métabolite du dichlorodiphényltrichloroéthane (DDT) un insecticide organochloré. Cependant, dès 1994, une nouvelle étude portant sur 150 cas et 150 témoins nichés au sein d’une cohorte de 57 040 femmes habitant dans la région de la baie de San Francisco aux États-Unis (pour lesquelles un prélèvement sanguin avait été obtenu vers la fin des années 1960 et qui ont fait l’objet d’un suivi jusqu’en 1990) n’a pas montré d’association entre les niveaux d’exposition au DDE et le risque de survenue du cancer du sein (Krieger et coll., 1994renvoi vers).
Ces deux études, réalisées en partie par les mêmes auteurs et contradictoires dans leurs conclusions ont été à l’origine d’un engouement scientifique et sociétal concernant l’impact des pesticides dans la survenue du cancer du sein. Cela s’explique par la diffusion généralisée des pesticides, notamment des insecticides organochlorés, dans l’environnement et la chaîne alimentaire (Hunter et Kelsey, 1993renvoi vers) mais aussi par leur capacité à interagir avec les récepteurs aux œstrogènes ou aux androgènes, ce qui est notamment le cas pour le DDE (Kelce et coll., 1995renvoi vers).
Ceci a généré l’hypothèse que les pesticides organochlorés, généralement considérés comme non génotoxiques, pourraient moduler l’expression de gènes intervenant dans le processus cancérogène des tumeurs hormono-dépendantes par activation inappropriée de récepteurs aux stéroïdes. Depuis ces premières études, de nombreuses publications ont abordé cette question, dans un contexte d’exposition professionnelle ou environnementale.

Résumé de l’expertise collective Inserm de 2013

Expositions professionnelles

La majorité des études portant sur le risque de survenue du cancer du sein dans des conditions d’exposition professionnelles ont été réalisées parmi des femmes travaillant dans le secteur agricole, avec des niveaux d’exposition aux pesticides souvent plus faibles que chez leurs homologues masculins. En effet, l’épandage de pesticides dans les cultures agricoles est une tâche plus fréquemment dévolue aux hommes. Toutefois, outre l’épandage direct des produits, les femmes peuvent être exposées lors des tâches de ré-entrées sur des parcelles récemment traitées, à leurs domiciles si, par exemple, elles sont en charge du nettoyage des vêtements et équipement de travail du conjoint ou dans des circonstances résidentielles, lorsque leurs domiciles sont à proximité des champs.
Le risque de cancer du sein, estimé par son incidence, chez les femmes en milieu agricole est très variable d’une étude à l’autre, avec des études montrant soit une augmentation (Band et coll., 2000renvoi vers ; Gardner et coll., 2002renvoi vers) soit une diminution de risque (Wiklund et Dich, 1994renvoi vers ; Kristensen et coll., 1996renvoi vers ; Settimi et coll., 1999renvoi vers ; Pukkala et coll., 2009renvoi vers ; Villeneuve et coll., 2011renvoi vers) par rapport à celui observé dans les populations générales respectives. L’interprétation de ces résultats par rapport à l’exposition aux pesticides est difficile, car elle n’est pas toujours bien documentée mais aussi parce que d’autres facteurs, tels que l’alimentation, l’activité physique et les modes de vie peuvent expliquer les différences d’incidence de la maladie.
D’autres études ont tenté de quantifier individuellement les expositions. Ces études, basées sur des déclarations concernant leur présence dans des cultures, pendant ou peu après l’application de pesticides, ou l’application par elles-mêmes de ces produits ont également donné lieu à des conclusions contradictoires. Dans une étude cas-témoins menée en Caroline du Nord aux États-Unis (862 cas versus 790 témoins), Duell et coll. ont retrouvé un risque augmenté de survenue de cancer du sein en cas de présence dans les cultures pendant ou dans les 24 heures suivant les épandages de pesticides mais aussi un risque diminué en cas de domiciliation ou de travail dans une ferme (Duell et coll., 2000renvoi vers). Au sein de la cohorte Agricultural Health Study (AHS) aux États-Unis, les auteurs ont constaté un risque diminué de survenue du cancer du sein chez les femmes appliquant des pesticides (sans distinction de matière active) mais un excès de risque en cas d’application de l’herbicide 2,4,5-TP (Engel et coll., 2005renvoi vers).
Sur la base des données existantes en 2013, la précédente expertise collective de l’Inserm a conclu qu’il était impossible d’évaluer de manière complète et détaillée le risque de survenue du cancer du sein chez les femmes exposées professionnellement à des pesticides (Inserm, 2013renvoi vers).

Expositions environnementales

Comme évoqué ci-dessus, les premières études s’adressant au risque de cancer du sein dans un contexte d’exposition environnementale à des insecticides organochlorés, publiées en 1993 et 1994, sont apparues contradictoires quant à leurs conclusions. De très nombreuses études ont été publiées par la suite dans des circonstances d’exposition environnementale, notamment sur les insecticides organochlorés et en particulier le DDE. La longue demi-vie dans l’organisme des organochlorés permet par la mesure de leur concentration dans une matrice biologique (sang, graisse) de disposer d’un bon indicateur de la charge corporelle et sur une période relativement longue. Plusieurs méta-analyses et revues de la littérature ont conclu qu’il n’existait pas de preuves suffisantes en faveur d’une association entre les niveaux de pesticides organochlorés, y compris le DDE, mesurés dans des matrices biologiques et le risque de survenue du cancer du sein (Snedeker, 2001renvoi vers ; Calle et coll., 2002renvoi vers ; López-Cervantes et coll., 2004renvoi vers ; Khanjani et coll., 2007renvoi vers). S’agissant des études, bien moins nombreuses et portant sur des pesticides autres que les organochlorés, elles ont employé comme indicateur d’exposition la distance de résidence à des zones d’épandages de pesticides (Reynolds et coll., 2005renvoi vers) ou les niveaux de contamination des eaux de consommation à de l’atrazine (McElroy et coll., 2007renvoi vers) et n’ont pas montré d’association avec le risque de cancer du sein.
Néanmoins, certaines études méritent d’être soulignées. Hoyer et coll. se sont intéressés au sein de la cohorte Copenhagen City Heart Study au Danemark à l’évolution de la maladie suite au diagnostic initial (Hoyer et coll., 2000renvoi vers). Au cours du suivi portant sur 195 cas incidents de cancer du sein, les auteurs ont montré un excès de risque, à la limite de la signification statistique, de récidive de la maladie et/ou de décès par cancer du sein chez les femmes les plus exposées à la dieldrine, un insecticide organochloré (RR = 2,61 ; IC 95 % [0,97-7,01] pour le 4e quartile d’exposition le plus élevé comparé au 1er quartile le plus faible ; p de tendance < 0,01). Cependant, une étude ultérieure au sein de cette même cohorte n’a pas montré de lien entre l’exposition à plusieurs insecticides organochlorés, dont la dieldrine, et la survie des patientes en fonction du statut de la tumeur vis-à-vis des récepteurs aux œstrogènes (Hoyer et coll., 2001renvoi vers).
Une autre étude a porté son attention sur la période d’exposition critique. Cohn et coll. ont mené une étude cas-témoins nichée parmi les participantes à l’étude Child Health and Development Studies conduite en Californie aux États-Unis (Cohn et coll., 2007renvoi vers). Le DDT (isomères o,p’ et p,p’, ce dernier étant le plus abondant) ainsi que le DDE (isomère p,p’) ont été dosés dans des prélèvements de sang, obtenus entre 1959 et 1967, chez des jeunes femmes (âge moyen de 26 ans) à l’occasion d’une de leurs grossesses. Cent vingt-neuf de ces femmes ayant eu un diagnostic de cancer du sein avant l’âge de 50 ans ont été comparées à 150 femmes de même âge et sans cancer du sein. Le DDT (isomère p,p’), dans un modèle ajusté aux autres organochlorés, a été retrouvé associé à un excès de risque de survenue de cancer du sein (OR = 2,9 ; IC 95 % [1,1-8,0] pour le 3e tercile comparé au 1er). En fonction de leur âge en 1945, date où l’emploi du DDT a été généralisé, un excès de risque a été observé chez celles qui avaient moins de 14 ans à cette date (et moins de 20 ans lorsque le DDT a atteint son maximum d’utilisation dans le monde au début des années 1950) (OR = 2,8 ; IC 95 % [1,1-6,8] et OR = 5,2 ; IC 95 % [1,4-9,1] respectivement pour les 2e et 3e terciles).
Bien que l’étude de Cohn et coll. ait soulevé l’importance de la période d’exposition, l’ensemble des études réalisées jusqu’en 2013 n’a, comme pour l’exposition professionnelle, pas permis de conclure sur le lien éventuel entre l’exposition des pesticides et le risque de survenue d’un cancer du sein dans des circonstances d’exposition environnementales.

Nouvelles données épidémiologiques

Expositions professionnelles

Dans le cadre de la cohorte AHS, trois nouvelles publications se sont intéressées au risque de survenue de cancer du sein parmi les conjointes d’agriculteurs, où les utilisatrices d’insecticides ont été comparées aux non-utilisatrices (Lerro et coll., 2015renvoi vers ; Engel et coll., 2017renvoi vers ; Louis et coll., 2017renvoi vers). Lors d’un suivi portant sur 1 059 cas incidents, l’usage d’insecticides organophosphorés a été retrouvé associé à un risque augmenté de cancer du sein (RR = 1,20 ; IC 95 % [1,01-1,43]) (Lerro et coll., 2015renvoi vers). Une analyse par matière active a montré que seule l’utilisation du chlorpyrifos (parmi 8 organophosphorés étudiés) était associée, à la limite de la signification statistique, à un risque augmenté de cancer du sein (RR = 1,41 ; IC 95 % [1,00-1,99]). Une analyse plus approfondie de l’association avec le chlorpyrifos, en prenant en compte le statut des récepteurs hormonaux aux œstrogènes (estrogen receptor ; ER) ou à la progestérone (progesterone receptor ; PR), a mis en évidence une augmentation de risque l’association étant plus élevée en cas de tumeur ER-PR- (RR = 2,26 ; IC 95 % [1,07-4,75]) qu’en cas de tumeur ER+PR+ (RR = 1,37 ; IC 95 % [0,86-2,19]). Un risque augmenté, mais non statistiquement significatif, a été également constaté en cas d’utilisation de terbufos (RR = 1,52 ; IC 95 % [0,97-2,36]). Lors d’un suivi ultérieur portant sur 1 081 cas de cancers du sein, les auteurs ont rapporté des résultats similaires concernant le chlorpyrifos (HR = 1,4 ; IC 95 % [1,0-2,0]) et le terbufos (HR = 1,5 ; IC 95 % [1,0-2,1]) mais aussi un risque augmenté, non significatif, pour l’usage du coumaphos (HR = 1,5 ; IC 95 % [0,9-2,5]) (Engel et coll., 2017renvoi vers). Au cours d’une étude exclusivement consacrée aux insecticides organochlorés, aucune association n’a été retrouvée en lien avec l’utilisation de ces pesticides sauf pour la dieldrine (Louis et coll., 2017renvoi vers). En effet, parmi les insecticides organochlorés étudiés (8 au total), seul l’emploi de la dieldrine est apparu associé à un risque augmenté de cancer du sein, ce risque étant limité aux femmes porteuses d’une tumeur ER-PR- (RR = 3,55 ; IC 95 % [1,12-11,18]). À noter que ce résultat n’a été acquis qu’à partir de 3 cas présentant ces caractéristiques tumorales.
Une étude cas-témoins en population générale, dans 18 communes à forte activité agricole de la province de Vercelli (Italie), a comparé 85 cas incidents de cancer du sein à 6 300 témoins (Salerno et coll., 2016renvoi vers). L’activité professionnelle dans le secteur agricole a été retrouvée associée à un risque augmenté de survenue du cancer du sein (OR = 1,72 ; IC 95 % [1,04-2,85]). Cependant, en absence de toute information relative à l’usage de pesticides, aucune conclusion ne peut en être dérivée s’agissant de l’impact de ces derniers sur la survenue du cancer du sein.
En Californie, une étude cas-témoins a été réalisée chez des femmes hispaniques (101 cas versus 88 témoins) résidant dans la vallée de San Joaquin, une région à forte activité agricole (Mills et coll., 2019renvoi vers). Parmi celles ayant travaillé dans une exploitation agricole, et à l’aide d’une matrice emploi-exposition, celles ayant été exposées au parathion-méthyl présentaient un excès de risque de survenue du cancer du sein mais limité au 2e tercile d’exposition (OR = 5,28 ; IC 95 % [1,17-23,7]).

Expositions environnementales

Dans une revue critique de la littérature, Alavanja et coll. concluent, sur la base des études disponibles à l’époque, à l’absence de preuves convaincantes d’un lien entre l’exposition à des pesticides organochlorés et la survenue du cancer du sein (Alavanja et coll., 2013renvoi vers). S’agissant des pesticides autres que les organochlorés, ces mêmes auteurs après examen des 8 études disponibles dans des circonstances d’exposition non professionnelles (conjointes d’agriculteurs non applicatrices de pesticides, résidence à proximité de zones agricoles) estiment que les études sont encore peu nombreuses et avec des informations peu spécifiques concernant les matières actives incriminées pour aboutir à des conclusions significatives dans un sens ou dans l’autre.
Deux nouvelles méta-analyses ont porté sur le risque de cancer du sein et les expositions environnementales au DDE estimées à partir des concentrations de ce polluant dans des matrices biologiques. Dans la méta-analyse de Park et coll. portant sur 35 études publiées jusqu’en août 2012, le mOR n’a pas montré d’excès de risque significatif (1,03 ; IC 95 % [0,95-1,12]) (Park et coll., 2014renvoi vers). Il en est de même pour la méta-analyse de Ingber et coll. portant sur 46 études publiées jusqu’en 2013 (mOR = 1,05 ; IC 95 % [0,93-1,18] pour le DDE et mOR = 1,02 ; IC 95 % [0,92-1,13] pour le DDT) (Ingber et coll., 2013renvoi vers).
En Australie, une étude cas-témoins en population générale (1 169 cas versus 1 743 témoins) s’est intéressée à l’association entre l’auto-déclaration d’avoir « remarqué » une dérive de pulvérisation de pesticides à l’occasion d’application de ces produits sur des terres agricoles (El-Zaemey et coll., 2013renvoi vers). Cette question a été adressée aux femmes ayant résidé pendant au moins un an à proximité (1 km ou moins) d’une zone d’activité agricole. Parmi les femmes qui ont déclaré « avoir déjà remarqué » une dérive de pulvérisation, les auteurs rapportent un excès de risque de survenue du cancer du sein (OR = 1,43 ; IC 95 % [1,15-1,78]), et en particulier parmi celles où cette constatation a été faite avant d’avoir atteint l’âge de 20 ans (OR = 1,61 ; IC 95 % [1,19,-2,16]). Cette étude n’apporte aucune information concernant les éventuels pesticides (familles chimiques ou matière active) concernés et repose sur une notion de dérive peu précise quant à l’exposition effective (par exemple, dérive perçue visuellement et/ou par l’odorat).
Une étude cas-témoins hospitalière (121 cas versus 621 témoins) n’a pas observé d’association entre le lieu de résidence à proximité d’une zone d’épandage de fongicides à usage agricole à l’Île-du-Prince-Édouard au Canada et le risque de survenue du cancer du sein (Ashley-Martin et coll., 2012renvoi vers). Une étude réalisée en Espagne et portant sur 425 cas incidents et 1 511 témoins a exploré le lien avec la proximité de leur domicile à des sites industriels (García-Pérez et coll., 2018renvoi vers). Une association positive a été retrouvée en lien avec la présence de sites industriels situés à moins de 2 km et libérant des pesticides (sans autre précision) (OR = 2,09 ; IC 95 % [1,14-3,82]). Au Brésil, une étude comprenant 85 cas incidents de cancers du sein et 266 témoins a rapporté un excès de risque de survenue de la maladie chez les femmes résidant à moins de 500 m d’une exploitation agricole ayant recours à des pesticides (OR = 2,37 ; IC 95 % [1,78-3,16]) (Silva et coll., 2019renvoi vers). Une étude réalisée chez 155 cas et 150 témoins en Californie (comtés de Fresno, Tulare et Kern) a employé comme indicateur d’exposition l’usage de pesticides agricoles dans un rayon inférieur à 500 m à leur lieu de résidence (Tayour et coll., 2019renvoi vers). Une association positive a été retrouvée avec l’usage du chlorpyrifos (OR = 3,22 ; IC 95 % [1,38-7,53]) alors qu’une absence d’association a été retrouvée pour l’usage d’organochlorés (sans autre précision), le diazinon (un insecticide organophosphoré) et le 1,3 dichloropropène (un nématicide).
Plusieurs autres études cas-témoins portant sur des faibles effectifs ont étudié le risque de survenue du cancer du sein en lien avec les concentrations sanguines en pesticides organochlorés. En Espagne, Boada et coll. en comparant 121 cas à 103 témoins ont rapporté, parmi 7 organochlorés explorés, une association positive, à la limite de la signification statistique, avec le DDD (un métabolite du DDT) (OR = 1,01 ; IC 95 % [1,00-1,02]) (Boada et coll., 2012renvoi vers). Au Groenland, Wielsøe et coll. ont rapporté des concentrations sanguines de DDE plus élevées chez 77 cas de cancer du sein que chez 84 témoins (Wielsøe et coll., 2017renvoi vers). Holmes et coll. en analysant 9 pesticides persistants dans le sang, n’ont pas trouvé d’associations avec le risque de survenue du cancer du sein dans une étude comparant 75 cas à 95 témoins en Alaska (Holmes et coll., 2014renvoi vers). En Tunisie, Arrebola et coll., en comparant les taux sériques de cinq organochlorés chez 69 cas à 56 témoins, ont mis en évidence une association entre une concentration élevée de β-hexachlorocyclohexane (OR = 1,18 ; IC 95 % [1,05-1,34]) et le risque de cancer du sein (Arrebola et coll., 2015renvoi vers). Dans une étude cas-témoins hospitalière (56 cas et 46 témoins) réalisée en Chine, He et coll. ont mesuré les concentrations de six pesticides organochlorés dans des prélèvements de tissus adipeux du sein (He et coll., 2017renvoi vers). Les auteurs concluent à une augmentation du risque de survenue de cancer du sein alors que les résultats montrent l’inverse (OR = 0,129 ; IC 95 % [0,031-0,542] pour le DDE). Une étude réalisée au Pakistan chez 83 cas de cancers (incluant les cancers du sein) et 32 témoins a rapporté que la moyenne de la somme de la concentration sanguine de 14 pesticides organochlorés était plus élevée chez les cas de cancer du sein (nombre non précisé) que chez les témoins (Attaullah et coll., 2018renvoi vers).
Parada et coll. ont étudié aux États-Unis les associations entre l’exposition aux insecticides organochlorés DDT, DDE et chlordane chez 633 cas incidents de cancer du sein (invasifs ou in situ) sur la période 1996-1997 et leur survie (Parada Jr et coll., 2016renvoi vers). L’exposition a été estimée par la mesure de la concentration sanguine des pesticides à l’occasion du diagnostic. Après un suivi de 5 et 15 ans, 55 et 189 décès toutes causes confondues ont été constatés dont 36 et 74 attribuables au cancer du sein. À 5 ans, le tercile le plus élevé de la concentration en DDT était associé à un excès de décès toutes causes confondues (HR = 2,19 ; IC 95 % [1,02-4,67] ; p de tendance = 0,02) et à un excès de décès spécifique par cancer du sein (HR = 2,72 ; IC 95 % [1,04-7,13] ; p de tendance = 0,02). Cependant, à 15 ans, aucune association statistiquement significative n’a été observée. Les mêmes auteurs, en partant d’une autre population de cas incidents de cancers invasifs du sein (n = 748) au cours de la période 1993-1996 aux États-Unis, se sont également intéressés à la survie au terme d’un suivi médian de 20,6 années (Parada Jr et coll., 2019renvoi vers). L’exposition au DDT et au DDE a été estimée par la mesure de leur concentration sanguine à l’occasion du diagnostic. Au terme d’un suivi de 5 ans, ni le DDT ni le DDE n’ont été retrouvés associés à la mortalité toutes causes ou à la mortalité spécifique par cancer du sein. En revanche, au terme d’un suivi à 20 ans, le DDE (HR = 1,95 ; IC 95 % [1,31-2,92] pour le 3e tercile comparé au 1er) et le DDT (HR = 1,64 ; IC 95 % [1,10-2,44] pour le quantile le plus élevé comparé au quantile avec des concentrations en dessous de la limite de détection) ont été retrouvés associés à un excès de risque de décès toutes causes confondues. S’agissant de la mortalité spécifique par cancer du sein après 20 ans de suivi, les concentrations en DDE supérieures à la médiane (groupe de référence : DDE en dessous de la médiane) ont été retrouvées associées à une augmentation de risque de décès (HR = 1,69 ; IC 95 % [1,06-2,68]). Le risque était plus élevé chez celles qui présentaient une tumeur ER- (HR = 3,24 ; IC 95 % [1,38-7,58]) comparé à celles qui présentaient une tumeur ER+ (HR = 1,29 ; IC 95 % [0,73-2,28]) avec une interaction significative (p = 0,03).
Cohn et coll. avaient dans une première étude publiée en 2007 montré l’importance que pourrait avoir la période critique d’exposition au DDT en lien avec le risque de survenue du cancer du sein (Cohn et coll., 2007renvoi vers). Cette étude, réalisée au sein de la Child Health and Development Studies, s’était limitée à la survenue de ce cancer avant l’âge de 50 ans, c’est-à-dire avant la ménopause, l’exposition ayant été estimée par la mesure de la concentration plasmatique en DDT à l’occasion d’une de leurs grossesses (âge moyen de 26 ans). Les auteurs ont montré que les concentrations sanguines en DDT étaient associées à un excès de risque de survenue de cancer du sein, notamment chez celles qui avaient moins de 14 ans au début des années 1950 (correspondant au maximum d’utilisation du DDT dans le monde). Ces mêmes auteurs ont, dans une publication récente (Cohn et coll., 2019renvoi vers), étudié le risque de survenue du cancer du sein pendant la période de transition de la ménopause (50 à 54 ans). Un excès de risque a été observé (OR pour le doublement de la concentration en p,p’ DDT = 1,99 ; IC 95 % [1,48-2,67]). Cependant, tenant compte de l’âge qu’elles avaient en 1945 (date où l’emploi du DDT a été généralisé), cet excès de risque n’était observé que chez celles qui avaient plus de 14 ans à cette date (OR pour le doublement de la concentration en p,p’ DDT = 2,83 ; IC 95 % [1,96-4,10]).
Une autre étude s’est adressée au risque de cancer du sein chez les filles des femmes ayant participé à la cohorte Child Health and Development Studies entre 1959 et 1967 (Cohn et coll., 2015renvoi vers). Cent dix-huit cas de cancer du sein ont ainsi été comparés à 354 témoins appariés à l’âge de naissance. L’exposition maternelle pendant la grossesse au DDT (isomère o,p’), dans un modèle ajusté sur les autres organochlorés, était associée chez les filles à un excès de risque de survenue de cancer du sein (OR = 3,7 ; IC 95 % [1,5-9,0] pour le 4e quartile ; p de tendance = 0,05).
Au sein de la cohorte Sister Study aux États-Unis, une étude s’est intéressée au risque de survenue du cancer du sein en lien avec l’exposition aux pesticides pendant l’enfance et l’adolescence (Niehoff et coll., 2016renvoi vers). Parmi les 50 756 femmes sans cancer du sein incluses au cours de la période 2003-2009, 2 134 ont développé un cancer du sein lors d’un suivi moyen de 5 ans à compter de leur date d’inclusion dans la cohorte. Les informations relatives aux expositions résidentielles et agricoles aux pesticides ont été recueillies par questionnaire à l’inclusion dans l’étude. Une attention particulière a été portée sur le parcours résidentiel avant l’âge de 14 ans ainsi que sur la nature de leur résidence au regard d’une activité agricole (exploitation agricole) et de l’usage de pesticides. Aucune association n’a été observée entre l’exposition aux pesticides dans l’enfance et l’adolescence (avant 14 ans) et le risque de survenue du cancer du sein, quel que soit le statut hormonal de la tumeur. Seules les femmes âgées de moins de 18 ans lors de l’interdiction du DDT aux États-Unis en 1972 présentaient un risque augmenté de cancer du sein, à la limite de la signification statistique (HR = 1,1 ; IC 95 % [0,99-1,30]).
Récemment, une étude cas-témoins menée dans la vallée de San Joaquin en Californie a mis en évidence une diminution de risque non significative de survenue du cancer du sein chez les femmes nées dans une exploitation agricole, ainsi que chez celles dont les parents travaillaient dans ces exploitations au moment de leur naissance (Mills et coll., 2019renvoi vers).

Cancer du sein chez l’homme

10Chez l’homme, les seins demeurent immatures tout le long de la vie et n’assurent aucune fonction particulière. Ils peuvent être soumis à des pathologies bénignes, telles que la gynécomastie, correspondant à une hypertrophie accompagnée ou pas d’hyperplasie non fonctionnelle des cellules épithéliales des canaux galactophores. Dans des très rares cas, le sein est l’objet d’une transformation tumorale maligne. Il s’agit alors, comme chez la femme, d’adéno-carcinomes qui se développent à partir des cellules épithéliales tapissant les canaux.
Le cancer du sein chez l’homme survient à partir de l’âge de 60 ans et son TIS-M est estimé à un peu moins de 1 pour 100 000 personnes-années et ce quel que soit le pays considéré (Contractor et coll., 2008renvoi vers). Il est admis que le cancer du sein chez l’homme correspond à la même entité pathologique que celle décrite chez la femme (Thomas, 1993renvoi vers). On y observe les mêmes types histologiques, l’expression des mêmes récepteurs hormonaux (aux œstrogènes notamment) et une fréquence élevée de mutations des gènes BRCA1 ou BRCA2 (Stalsberg et coll., 1993renvoi vers ; Thomas, 1993renvoi vers). L’étiologie est inconnue mais il est bien établi que les entités nosologiques associées à des déséquilibres entre androgènes et œstrogènes, notamment le syndrome de Klinefelter, favorisent la survenue du cancer du sein (Fentiman, 2018renvoi vers). L’exposition à des radiations ionisantes est un facteur de risque unanimement reconnu. À l’inverse, le rôle des expositions à des champs électromagnétiques ou à la chaleur (foyers thermiques radiants) est encore débattu (Weiss et coll., 2005renvoi vers ; Fentiman et coll., 2006renvoi vers ; Ruddy et Winer, 2013renvoi vers). Il existe très peu d’études s’intéressant au rôle des pesticides dans la survenue du cancer du sein chez l’homme. Une cohorte historique suédoise comprenant 1 779 646 employés, entreprise en 1971 et ayant fait l’objet d’un suivi de 19 ans, n’a pu observer de lien entre des métiers exercés dans le secteur agricole et le risque de survenue du cancer du sein (Pollán et coll., 2001renvoi vers). Une étude portant sur 178 cas et 1 041 témoins aux États-Unis n’a pas montré d’associations entre l’exposition professionnelle aux herbicides ou à d’autres types de pesticides et le risque de survenue de la maladie (Cocco et coll., 1998renvoi vers). En Europe, une étude ayant comparé 104 cas à 1 901 témoins n’a pas montré d’excès de risque chez les agriculteurs, qu’ils soient exploitants ou salariés (Villeneuve et coll., 2010renvoi vers). À ce jour, aucune étude portant sur des familles chimiques ou matière active et le risque de cancer du sein chez l’homme n’a été publiée. Cela n’est guère surprenant tenant compte de la rareté de la maladie. Pour autant, les quelques études réalisées à ce jour ne soutiennent pas un rôle important des pesticides dans la genèse du cancer du sein masculin.

Données mécanistiques

Les études épidémiologiques existantes ne permettent pas à l’heure actuelle de conclure sur la présomption d’un lien entre l’exposition à des pesticides considérés dans leur ensemble et une augmentation du risque de cancer du sein mais elles rapportent des signaux pour certains organochlorés, tels que la dieldrine ou le DDT/DDE ou des organophosphorés (chlorpyrifos...). Afin d’éclairer l’implication potentielle de ces substances, une recherche bibliographique a été menée sur les mécanismes biologiques moyennant lesquels elles pourraient favoriser la survenue du cancer du sein. Certains de ces pesticides sont interdits d’utilisation en Europe (par exemple, la dieldrine ou le DDT, non autorisés depuis 1978), mais ils sont persistants dans l’environnement, imprègnent la plupart des populations et restent donc une préoccupation pour la santé publique. Cette recherche bibliographique a été élargie à des pesticides pour lesquels on ne dispose pas de données épidémiologiques mais dont la littérature rapporte des propriétés hormonales (perturbateurs endocriniens) et cancérigènes susceptibles d’avoir un rôle dans la survenue du cancer du sein : les insecticides néonicotinoïdes (notamment le thiaclopride)1 et l’herbicide glyphosate (voir chapitre « Glyphosate et formulations à base de glyphosate »).

Dieldrine, DDT et autres pesticides organochlorés

Certaines études épidémiologiques ont souligné la présence d’une association entre l’exposition à certains organochlorés, comme le DDT ou la dieldrine, et la survenue du cancer du sein. Ses effets biologiques sont donc décrits plus spécifiquement ci-après (figure 13.1Renvoi vers) avec parfois d’autres organochlorés présentant des propriétés similaires (ou parfois opposées) sur le plan mécanistique.
Figure 13.1 Résumé des effets de la dieldrine en lien avec un effet susceptible de favoriser la survenue du cancer du sein
Environ deux tiers des cas de cancer du sein sont hormono-dépendants, c’est-à-dire qu’ils sont sensibles aux œstrogènes ou à la progestérone. Les cellules cancéreuses expriment des récepteurs aux œstrogènes (ER) et/ou de la progestérone qui régulent la prolifération cellulaire, et le statut ER+ ou ER­ conditionne le pronostic et donc le choix des traitements. De ce fait, de nombreuses études de toxicologie expérimentale portant sur le rôle des pesticides dans l’initiation ou la promotion du cancer du sein se sont intéressées au potentiel d’activation des récepteurs hormonaux, et en particulier de l’ERα (estrogen receptor alpha). L’action des pesticides qui affectent le système œstrogénique (c’est-à-dire qui ont des effets de perturbateurs endocriniens), ne concerne pas que les récepteurs mais également d’autres étapes comme la production des hormones.
De nombreuses études ont porté sur le potentiel œstrogénique des organochlorés ; ainsi, en 1994, un article montre que le toxaphène (mélange complexe de molécules chlorées), la dieldrine et l’endosulfan ont des propriétés similaires à celles du DDT et du chlordécone, molécules pro-œstrogéniques mais présentant des affinités très inférieures à celles de l’œstradiol (Soto et coll., 1994renvoi vers). Ces effets sont souvent étudiés en utilisant in vitro le modèle MCF-7, cellule tumorale mammaire humaine exprimant le ERα dont la croissance est dépendante d’un stimulus œstrogénique (Verma et coll., 1997renvoi vers ; Arcaro et coll., 1998renvoi vers ; Charles et coll., 2002renvoi vers ; Rasmussen et Nielsen, 2002renvoi vers ; Aube et coll., 2011renvoi vers) ou in vivo un modèle de croissance utérine chez les rongeurs (très sensible à l’imprégnation œstrogénique) (Ramamoorthy et coll., 1997renvoi vers ; Wade et coll., 1997renvoi vers). Les effets pro-œstrogéniques observés dans les cellules MCF-7 ont été confirmés dans d’autres lignées tumorales mammaires humaines ER+ comme les T47D (Legler et coll., 1999renvoi vers). Les organochlorés ont en général des effets pro-œstrogéniques pour des concentrations supérieures à 1 µM (c’est-à-dire relativement élevées) (Andersen et coll., 2002renvoi vers). Toutefois, le toxaphène peut être décrit comme faiblement anti-œstrogénique car il peut réduire la formation de « foci » de cellules MCF-7 en présence d’œstradiol. Toutefois, il ne semble pas en mesure de lier le récepteur ERα, il semblerait donc important de confirmer ce dernier résultat et d’apporter des éléments mécanistiques pour expliquer la réduction du nombre de foci, précédemment décrite (Arcaro et coll., 2000renvoi vers).
Une étude plus récente a utilisé des lignées tumorales HeLa exprimant de manière stable ERα ou ERβ ainsi qu’un gène rapporteur pour mesurer l’activation des récepteurs œstrogéniques par une cinquantaine de pesticides, dont 14 organochlorés (Lemaire et coll., 2006renvoi vers). Un traitement pendant 16 h avec les agents à une concentration de 10 µM provoque l’activation de l’ERα et de l’ERβ pour cinq des organochlorés testés ; chlordane, o,p’-DDT (seul et en mélange avec le p,p’-DDT), trans-nonachlore, toxaphène. Cinq des pesticides organochlorés activaient l’ERα uniquement ; chlordécone, dieldrine, endosulfan, endrine, méthoxychlore. Un effet de compétition avec l’œstradiol (ou antagonisme des organochlorés vis-à-vis de l’œstradiol et du ERα) a été montré pour le chlordécone, le méthoxychlore, l’endosulfan, l’endrine, la dieldrine et l’aldrine. On peut ainsi noter que la dieldrine active l’ERα (considéré comme pro-tumoral car favorisant la prolifération) et pas l’ERβ (souvent associé à un bon pronostic après analyse histologique de tumeurs mammaires).
D’autres mécanismes d’action ont toutefois été décrits. Ainsi, une des conséquences de l’exposition aux organochlorés est une perturbation de la communication intercellulaire par jonction lacunaire. Le traitement des cellules mammaires non tumorales avec la dieldrine inhibe la communication intercellulaire après 30 minutes et l’effet persiste pendant 24 h, tandis que pour le DDT et le toxaphène une inhibition réversible est observée après 90 minutes (Kang et coll., 1996renvoi vers). La rapidité de ces effets, qui ont été constatés à des concentrations relativement élevées, suggère l’activation de voies de signalisation non transcriptionnelles. De même, Cameron et Foster montrent que la dieldrine bloque l’apoptose de cellules MDA-MB-231 induite par leur détachement du support de culture (anoïkis2 ). Les doses utilisées (0,5-10 µM ou 0,2-3,8 ppm) ont été sélectionnées sur la base d’une modélisation simple en comparaison des concentrations retrouvées dans le tissu mammaire (épithélium et adipocytes, 0,17-0,90 ppm). La résistance à l’anoïkis est observée à partir de 5 µM et est associée avec une diminution de l’expression de l’effecteur pro-apoptotique Bax (Cameron et Foster, 2008renvoi vers). L’effet est bloqué par un antagoniste du récepteur tyrosine kinase TrkB, dont l’expression est aussi augmentée in vivo dans un modèle murin de tumori-genèse mammaire (Cameron et Foster, 2009renvoi vers). Cette action de la dieldrine sur un récepteur tyrosine kinase est à mettre en parallèle de celle observée par Buteau-Lozano et coll. qui montrent une augmentation de sécrétion et production de VEGF (facteur clé intervenant dans l’angiogenèse) dans une lignée dérivée des cellules MCF-7 (Buteau-Lozano et coll., 2008renvoi vers).
D’autres gènes cibles potentiels des organochlorés ont d’ailleurs été caractérisés à l’aide d’une lignée primaire de cellules mammaires humaines (Valerón et coll., 2009renvoi vers). Le traitement avec un mélange de plusieurs organochlorés (p,p’-DDD ; p,p’-DDE ; o,p’-DDE ; aldrine ; dieldrine) conduit à une augmentation de l’expression de plusieurs gènes (sur 94 testés) dont ACVRL1 (inhibition de l’angiogenèse), KIT et ERBB3 (récepteurs dont l’activation conduit à une prolifération cellulaire),PDGFRB (récepteur pro-angiogénique) et ACVR1C (récepteur apparenté à ceux activés par le TGF-β), aucun d’entre eux n’étant stimulé par l’œstradiol. Les organochlorés ont été testés à des concentrations 100 fois supérieures à celles constatées dans le sérum d’une population générale espagnole (Îles Canaries). De telles concentrations sont pertinentes dans la mesure où il est assumé pour de nombreux organochlorés que leurs concentrations dans les tissus adipeux sont 100 fois supérieures à celles mesurées dans le sérum. Cette étude suggère l’existence de mécanismes stimulés par les organochlorés autres que les récepteurs aux œstrogènes dans les cellules mammaires.
Une revue récente sur les propriétés carcinogéniques de la dieldrine a souligné que les études épidémiologiques sont contrastées et comportent des biais méthodologiques liés au défaut de caractérisation de l’exposition directe au pesticide (Stern, 2014renvoi vers). Néanmoins, l’article soulève un point intéressant concernant le statut des tumeurs vis-à-vis de l’expression du ERα, suggérant que la dieldrine soit plutôt associée aux cancers ER­ (et ainsi un mode d’action non œstrogénique). Ces éléments doivent être interprétés avec prudence car ils peuvent avoir une dimension temporelle ; on pourrait ainsi poser l’hypothèse que l’antagonisme de la dieldrine vis-à-vis de l’œstradiol par compétition sur le même site de liaison sur le ERα, favorise lors de la sélection clonale, les cellules tumorales pouvant se multiplier sans dépendance du ERα.

Chlorpyrifos

Des études épidémiologiques issues de la cohorte AHS ont montré que l’exposition au chlorpyrifos (CPF) chez les femmes agricultrices ou conjointes d’agriculteurs était associée, à la limite de la signification statistique, à un excès de risque de survenue du cancer du sein. Existe-t-il des données mécanistiques qui peuvent renforcer la plausibilité de l’association observée ?
Une étude in vitro a évalué la capacité d’une vingtaine de pesticides, dont le chlorpyrifos, à provoquer l’activation du récepteur ERα et de stimuler la prolifération d’une lignée de cellules humaines mammaires tumorales (MCF-7), mais ce dernier n’a pas montré d’effets sur la prolifération cellulaire (Vinggaard et coll., 1999renvoi vers). Des expérimentations plus récentes vont dans ce sens et ne démontrent que de très faibles effets cytotoxiques, prolifératifs et de la stimulation de l’ER sur cette même lignée de cellules à des doses élevées (≥ 50 µM) (Andersen et coll., 2002renvoi vers).
Ventura et coll. ont comparé l’effet du CPF sur les lignées MCF-7 et MDA-MB-231 en utilisant une plus large gamme de concentration. Une légère diminution de la prolifération associée à un blocage d’un des points de contrôle du cycle cellulaire a été observée à 50 µM (Ventura et coll., 2012renvoi vers), un effet cytotoxique a également été démontré par Rich et coll. sur les cellules MCF-7 traitées avec le CPF à 10 µM (Rich et coll., 2012renvoi vers). Ces résultats ont été confirmés dans une étude subséquente par Ventura et coll. qui montrent que ce blocage est lié à une altération des défenses anti-oxydantes (toujours à 50 µM) avec une phosphorylation de ERK1/2 provoquée par les espèces réactives de l’oxygène (H2O2) (Ventura et coll., 2015renvoi vers). Considérées dans leur ensemble, ces données vont dans le sens d’une absence d’effet (ou d’un faible effet) du CPF à forte dose (figure 13.2Renvoi vers).
Toutefois, l’un des effets les plus intéressants est observé dans une de ces études : celle utilisant une large gamme de concentration et pour la très faible dose de 50 nM (selon un traitement d’une durée de 10 jours). À cette concentration (1 000 x plus faible que celle pour laquelle un blocage des points de contrôle du cycle est observé), une augmentation de la prolifération est observée (de 46 %), phénomène bloqué par un antagoniste du ERα ainsi qu’une phosphorylation de la tyrosine 537 du récepteur et une augmentation de l’expression des cyclines D1 et E, qui permettent l’avancement du cycle cellulaire (Ventura et coll., 2012renvoi vers). Sur de plus courtes périodes de traitement et à des doses encore plus faibles (10 nM, 48 h), cet effet n’est pas observé (Rich et coll., 2012renvoi vers) soulignant que cet effet pro-œstrogénique du CPF serait observé à de faibles doses mais aussi sur de longues périodes d’exposition.
Ces effets de perturbation œstrogénique, possiblement non liée à une liaison directe du CPF au ERα mais plutôt à des modifications post-traductionnelles comme une phosphorylation du récepteur, sont aussi observés in vivo. L’exposition de rates Wistar au CPF (0,1 ou 2,5 mg/kg/j pendant 8 semaines par gavage) conduit à une perturbation du cycle ovarien caractérisé par un prolongement du métoestrus (période correspondant au début de la maturation de l’endomètre et à la synthèse de progestérone) et des anomalies histologiques de la glande mammaire, de l’utérus et de l’ovaire (suggérant des effets pro-œstrogéniques) (Nishi et Hundal, 2013renvoi vers). Une exposition à des doses encore plus faibles (0,01 et 1 mg/kg pc/j pendant une période doublée de 100 jours) de rates Sprague-Dawley adultes, révèle également une perturbation de l’architecture de la glande mammaire, des hyperplasies et au niveau moléculaire, une expression augmentée du récepteur de la progestérone et du marqueur de prolifération PCNA (proliferating cell nuclear antigen) et, à l’inverse, une réduction de l’expression de corépresseurs des récepteurs des œstrogènes. Les concentrations sériques de l’œstradiol, de la progestérone et de l’hormone lutéinisante (LH) sont diminuées (Ventura et coll., 2016renvoi vers). Les mêmes auteurs ont étudié l’effet de l’exposition chronique au CPF (aux mêmes doses que précédemment ; 0,01 et 1 mg/kg pc/j) sur l’incidence de tumeurs induites par le N-nitroso-N-méthylurée ; les deux doses de CPF provoquent une réduction de la période de latence tumorale (Ventura et coll., 2019renvoi vers).
Figure 13.2 Résumé des effets du chlorpyrifos en lien avec un effet susceptible de favoriser la survenue du cancer du sein

Néonicotinoïdes

La majorité des cas du cancer du sein sont caractérisés par une surexpression de l’aromatase, l’enzyme catalysant la conversion des androgènes en œstrogènes, ce qui a pour effet de stimuler la prolifération de cellules tumorales œstrogéno-dépendantes (Zhao et coll., 2016renvoi vers). En 2016, Caron-Baudoin et coll., partant du fait que certains pesticides comme l’atrazine (interdite au sein de l’UE en 2003) sont des activateurs de l’expression de l’aromatase, ont évalué les effets de trois pesticides de la famille des néonicotinoïdes sur ce système (Caron-Beaudoin et coll., 2016renvoi vers). L’imidaclopride, le thiaclopride, et le thiaméthoxame ont été testés à des concentrations entre 0,1 et 10 µM sur une lignée cellulaire humaine de carcinome surrénalien (H295R) et une lignée de cellules endothéliales de la veine ombilicale humaine (HUVEC). Les résultats sont intéressants à plus d’un titre (figure 13.3Renvoi vers). Le thiaclopride et le thiaméthoxame présentent un profil activant l’expression de l’aromatase (pour l’un de ses promoteurs), tandis que l’imidaclopride a un effet inhibiteur sur les cellules H295R. Les effets sont de nature non-monotone dans ces mêmes cellules, avec une activation significative (12,7x) de l’aromatase par le thiaclopride à 0,3 µM ou par le thiaméthoxame à 0,1 µM (12,2x ou 15,7x en fonction du promoteur considéré) qui n’est plus ou très faiblement observée à des doses plus élevées. Les auteurs renforcent leur démonstration par la mesure de la viabilité cellulaire qui est inchangée à toutes les doses évaluées. La diminution observée avec le traitement à l’imidaclopride (3 µM) n’est plus constatée aux doses supérieures. Ces effets sont cellule-spécifiques car non observés dans les expériences sur les HUVEC. La mesure d’activité de l’enzyme aromatase dans les cellules H295R, suit les profils d’expression, détaillés ci-dessus.
Le même groupe a analysé les effets de ces mêmes substances actives sur les cellules H295R dans un contexte de co-culture avec des cellules placentaires BeWo (choriocarcinome ou modèle de trophoblaste). En présence de chacun des trois néonicotinoïdes, l’activité aromatase n’augmente pas dans les cellules BeWo, tandis que l’enzyme est activée à des doses relativement faibles dans les cellules H295R (par exemple pour le thiaclopride dès 0,1 µM). Cette augmentation est associée à une stimulation de la production d’œstradiol et d’œstrone, mais pas d’œstriol qui diminue fortement probablement en lien avec une augmentation d’expression du cytochrome P450 3A7 qui métaboliserait les pesticides au lieu de produire un précurseur de cette hormone (Caron-Beaudoin et coll., 2017renvoi vers).
Enfin, une augmentation de l’expression et de l’activité de l’aromatase a aussi été montrée dans les cellules tumorales mammaires Hs578t, toujours selon des courbes dose-réponse non monotones pour le thiaclopride (activation à partir de 0,1 µM effet maximum à 0,3 µM) et l’imidaclopride (activation à partir de 0,1 µM, effet maximum à cette même concentration) (Caron-Beaudoin et coll., 2018renvoi vers). Les auteurs ont utilisé des inhibiteurs pharmacologiques de voies de signalisation afin d’éclairer les mécanismes potentiellement impliqués : les deux néonicotinoïdes utilisés stimuleraient la voie de la phospholipase (le thiaclopride stimulant également la voie MEK/MAPK 1/3 qui, indépendamment de son effet sur la transcription de l’aromatase, stimulerait la prolifération cellulaire). Cette description est importante car l’une des voies les plus étudiées en première intention pour tester un effet pro-tumoral dans le contexte du cancer du sein est celle des récepteurs aux œstrogènes (l’isoforme ERα jouant un rôle pro-prolifératif). Or, Mesnage et coll. ont récemment évalué le potentiel œstrogénique de sept néonicotinoïdes les plus utilisés à travers un test de prolifération des cellules MCF-7 qui a démontré qu’aucun d’entre eux n’activait le ERα (de même pour le récepteur aux hormones thyroïdiennes sur des cellules GH3) (Mesnage et coll., 2018renvoi vers).
La démonstration d’un effet stimulateur de l’expression de l’aromatase par les néonicotinoïdes suggère donc que la concentration locale d’œstrogènes pourrait augmenter à de faibles doses (effet non observé à de plus faibles doses, courbes non monotones) d’exposition à ces pesticides dans certains types cellulaires dont la cellule tumorale mammaire, stimulant ainsi les voies œstrogéniques et la prolifération de clones tumoraux (sans effet direct des néonicotinoïdes sur le ERα).
Figure 13.3 Résumé des effets de néonicotinoïdes en lien avec un effet susceptible de favoriser la survenue du cancer du sein

Glyphosate

Les données mécanistiques détaillées dans le chapitre « Glyphosate et formulations à base de glyphosate » de la présente expertise collective montrent que le glyphosate et les formulations à base de glyphosate (glyphosate-based herbicides ; GBH) pourraient exercer des effets génotoxiques mais apparemment non mutagènes (figure 13.4Renvoi vers). Ceci va dans le sens d’une absence d’effet initiateur du glyphosate. Toutefois, associé à un agent initiateur, il pourrait exercer un effet promoteur à des doses plus faibles que celles préalablement testées ; celui-ci reposerait sur divers mécanismes d’action qui rentrent également dans le cadre de la perturbation endocrinienne.
Le glyphosate a des effets pro-œstrogéniques à des concentrations inférieures à 1 µM (Lin et Garry, 2000renvoi vers ; Hokanson et coll., 2007renvoi vers ; Mesnage et coll., 2017renvoi vers), voire de l’ordre de 10-11 M, ce qui suggère que l’effet est médié par le ERα (Thongprakaisang et coll., 2013renvoi vers ; Sritana et coll., 2018renvoi vers). Cet effet « faible dose » est à opposer à ceux observés par exemple par Li et coll. qui montrent que des concentrations de glyphosate comprises entre 15 et 50 mM bloquent la croissance de certaines lignées cancéreuses (Li et coll., 2013renvoi vers). Ceci est aussi observé avec l’AMPA, son produit de dégradation (Parajuli et coll., 2015renvoi vers ; Parajuli et coll., 2016renvoi vers). Des processus apoptotiques sont stimulés à ces fortes doses, par exemple par l’AMPA dès 50 mM (Li et coll., 2013renvoi vers). Dans le contexte d’une exposition au glyphosate à des concentrations pertinentes sur le plan environnemental (de l’ordre de 1 µM à 1 pM), une liaison du glyphosate au ERα n’a pas été mise en évidence à ce jour (EPA, 2015renvoi vers). En revanche, Mesnage et coll. suggèrent une activation de ce récepteur par d’autres mécanismes (par exemple, activation de kinases et phosphorylation du ERα) (Mesnage et coll., 2017renvoi vers). Dans cette étude utilisant de nombreuses techniques, les auteurs montrent ainsi que le glyphosate active la protéine kinase A qui phosphoryle et active le ERα en l’absence d’un de ses ligands. Par ailleurs, une étude de transcriptomique menée sur des lignées cancéreuses mammaires ER+ et ER­ montre que le GBH Roundup (à faibles concentrations sur de courtes durées d’exposition) et l’AMPA affectent des fonctions telles que la régulation du cycle cellulaire, la réparation de l’ADN et l’intégrité mitochondriale (Stur et coll., 2019renvoi vers).
Une perturbation de la stéroïdogenèse est observée dans plusieurs études (Walsh et coll., 2000renvoi vers ; Romano et coll., 2012renvoi vers ; Owagboriaye et coll., 2017renvoi vers). Cet effet peut être constaté avec du Roundup et pas du glyphosate, soulignant la plus forte toxicité des formulations (Walsh et coll., 2000renvoi vers ; Romano et coll., 2012renvoi vers). Cet effet pourrait impacter indirectement la glande mammaire qui est sensible aux stéroïdes. Le cas de l’aromatase est intéressant car son inhibition par le Roundup suggère une baisse de la concentration locale d’œstrogènes (Defarge et coll., 2016renvoi vers) expliquant la perturbation du développement de la glande mammaire constatée dans certaines études chez les rongeurs (Gomez et coll., 2019renvoi vers). Cet effet est toutefois sujet à controverse (Altamirano et coll., 2018renvoi vers). Ces effets sont transposables à d’autres organes comme l’utérus au niveau duquel un effet prolifératif est constaté à certains stades précoces (mais pas tardifs) ; les GBH pourraient ainsi en fonction du stade de développement activer ou inhiber les voies ER (Guerrero Schimpf et coll., 2017renvoi vers). Les mêmes auteurs suggèrent qu’une exposition précoce au GBH augmente la sensibilité de l’utérus à l’œstradiol (Guerrero Schimpf et coll., 2018renvoi vers). Ces résultats, pris dans leur ensemble, vont dans le sens d’une activité de perturbation endocrinienne du glyphosate, mais ces effets demeurent complexes car il peut présenter des propriétés anti-œstrogénique de par son action sur l’aromatase et pro-œstrogénique de par l’hypersensibilisation à l’action de l’œstradiol.
Finalement, des effets épigénétiques transgénérationnels sont aussi suspectés et peuvent toucher des acteurs des voies de signalisation évoqués précédemment. Une exposition de rates gravides à 350 mg/kg pc/j de GBH et un suivi des femelles F1 a mis en évidence une diminution de la méthylation du promoteur ERα (ainsi que des modifications post-traductionnelles des histones) associée à une augmentation du niveau de son ARN messager (Lorenz et coll., 2019renvoi vers). Ceci pourrait conduire à une augmentation de la sensibilité de certains organes vis-à-vis des œstrogènes, un phénomène déjà constaté dans d’autres contextes et qu’il serait intéressant d’étudier dans la glande mammaire.
Figure 13.4 Résumé des effets du glyphosate en lien avec un effet susceptible de favoriser la survenue du cancer du sein

Conclusion

Les études épidémiologiques publiées ces dernières années, prises dans leur ensemble, n’apportent pas d’éléments supplémentaires permettant de réviser les conclusions de la précédente expertise collective de l’Inserm selon laquelle il n’est pas possible d’établir de liens convaincants entre l’exposition professionnelle ou environnementale à des pesticides et la survenue du cancer du sein. Néanmoins, de nouveaux travaux issus de la cohorte AHS ont montré que l’exposition professionnelle à des insecticides organophosphorés, notamment le chlorpyrifos, et dans une moindre mesure le terbufos et le coumaphos, pourraient être associés à un risque augmenté de cancer du sein. Ces associations, à la limite de la signification statistique, mériteraient d’être confirmées par des études complémentaires.
L’immense majorité des études épidémiologiques conduites à ce jour a porté sur des périodes d’exposition à l’âge adulte. Cependant, la possibilité d’une période d’exposition critique à un plus jeune âge (moins de 20 ans), évoquée dès 2007 par Cohn et coll. est toujours d’actualité notamment pour ce qui concerne l’insecticide DDT. En effet, des publications récentes ont continué à pointer l’influence d’une exposition pendant la grossesse ou à un âge précédent ou juste après la puberté dans la survenue d’un cancer du sein avant la ménopause ou pendant la période de transition de la ménopause. Il est à noter que dans ces études, ces périodes d’âge d’exposition coïncident avec les années où l’utilisation du DDT dans le monde était très élevée. Restent donc deux questions en suspens. Est-ce que ces périodes d’exposition critique le sont toujours de nos jours dans la mesure où les niveaux d’exposition au DDT (ou à ses métabolites environnementaux tels que le DDE) ont fortement diminué ? Est-ce que ces périodes d’exposition seraient également critiques au regard d’autres pesticides ? Le manque d’études ne permet malheureusement pas d’y répondre.
S’agissant des aspects mécanistiques issus d’études expérimentales, le DDT comme la plupart des organochlorés ont un potentiel œstrogénique démontré à la fois in vitro et in vivo. Or, les cellules cancéreuses mammaires exprimant le récepteur aux œstrogènes alpha, ont une prolifération stimulée en cas de liaison d’agonistes à cette protéine. D’autres mécanismes stimulés par les organochlorés autres que ceux passant par les récepteurs aux œstrogènes ont été par ailleurs décrits dans les cellules mammaires (altération des communications cellulaires, résistance à l’apoptose...). Cela confère une certaine plausibilité biologique aux études épidémiologiques portant sur des fenêtres d’exposition à un âge précoce de la vie.
Pour ce qui concerne les insecticides organophosphorés, notamment le chlorpyrifos, les études mécanistiques divergent en fonction des doses employées. À de fortes doses, aucun ou de faibles effets œstrogéniques sont constatés. À l’inverse, à de faibles doses des effets pro-œstrogéniques sont constatés par des mécanismes impliquant une stimulation du ERα mais sans liaison directe au récepteur et plutôt par des modifications post-traductionnelles. Ces éléments, susceptibles d’apporter de la plausibilité biologique aux associations observées dans les rares études épidémiologiques concernant le chlorpyrifos, sont encore peu nombreux et mériteraient d’être investigués plus en détail.
Des travaux expérimentaux ont été également réalisés sur d’autres substances (néonicotinoïdes et glyphosate) sans que l’on puisse pour l’instant aboutir à de réelles conclusions en l’absence de données épidémiologiques.

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• Un ou plusieurs auteurs sont affiliés à une industrie des phytosanitaires.
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