Pesticides et effets sur la santé : Nouvelles données

2021


ANALYSE

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Exposition aux pesticides de la population française

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Les données sont aujourd’hui suffisantes pour dresser le constat d’une contamination ubiquitaire de l’environnement par les pesticides et leurs produits de dégradation en France, ainsi que dans de nombreuses autres régions du monde. Cette contamination concerne de nombreux compartiments environnementaux (par exemple eau, sol, air) et s’explique à la fois par les usages professionnels et domestiques, multiples et variés, passés ou actuels, de produits contenant des pesticides. Il en résulte ainsi une exposition continue et régulière de la population générale française à de multiples pesticides, correspondant à des scénarios d’exposition qui peuvent être très divers (Anses, 2010arenvoi vers).
Dans ce chapitre, les données d’imprégnation de la population française seront décrites à travers les études de biosurveillance (« biomonitoring ») et l’interprétation de leurs résultats sera discutée et mise en perspective. Après un bilan des résultats sur la contamination des différents compartiments environnementaux en France, les données les plus récentes sur les sources d’exposition possibles de la population française seront décrites, notamment la contamination des aliments et des eaux de consommation, de l’air intérieur des domiciles et des zones riveraines des terres agricoles. Enfin, la méthodologie s’appuyant sur les systèmes d’information géographique permettant de caractériser l’environnement des populations riveraines de zones agricoles et d’estimer l’exposition environnementale aux pesticides sera présentée, et son utilisation dans les études épidémiologiques sera discutée.

Mesurage biologique pour évaluer les expositions
aux pesticides

L’exposition de la population générale aux pesticides et à leurs métabolites est complexe à estimer, car cela nécessite de tenir compte de leur grande diversité et de la multiplicité des circonstances d’emploi. L’hétérogénéité géographique et l’évolution temporelle de leurs usages sont des difficultés supplémentaires. À cela s’ajoutent les connaissances insuffisantes concernant les sources d’émission et de dispersion et les voies de pénétration dans l’organisme. Cependant, grâce aux développements de méthodes de chimie analytique, un grand nombre de substances pesticides et leurs métabolites, ou produits de dégradation dans l’environnement, peuvent être identifiés et leurs concentrations mesurées dans le cadre de la surveillance environnementale, dans des prélèvements d’air ou de poussières par exemple, ou dans le cadre de la biosurveillance dans des prélèvements biologiques humains ou provenant d’autres organismes (Yusa et coll., 2015renvoi vers).
L’évaluation des expositions aux pesticides par la mesure de leurs concentrations dans un fluide ou un tissu biologique donné (matrice biologique) est considérée comme l’estimation de référence. Cette mesure représente un substitut (surrogate) ou un indicateur de la charge corporelle. Les matrices biologiques possèdent en effet l’avantage de pouvoir intégrer l’ensemble des voies d’exposition et de ce fait les sources d’exposition, même lorsqu’elles ne sont pas toutes identifiées. Cependant, chaque matrice présente des limites qu’il faut prendre en compte au moment d’interpréter les mesures réalisées, notamment au regard des principes qui régissent la toxicocinétique : absorption, distribution, métabolisme et élimination. Contrairement aux expositions par voie orale, les expositions cutanées et par voie respiratoire se retrouvent directement dans la circulation systémique et court-circuitent le premier passage hépatique. Dans certains cas, cela peut faire une importante différence dans la concentration de contaminants réactifs dans les organes cibles. De plus, il ne faut pas sous-estimer l’absorption lymphatique intestinale suite à une exposition par voie orale pour certains contaminants lipophiles, cette route d’absorption n’étant pas impactée par l’effet du premier passage hépatique.
Certaines matrices correspondent à des compartiments internes d’un organisme (sang, tissu adipeux...) pour lesquels prendre en compte l’absorption, la distribution et le métabolisme est essentiel et d’autres à des compartiments que l’on peut qualifier d’externes et qui sont principalement concernés par l’élimination (fèces, urines, phanères...).
D’une manière générale, les matrices internes présentent un intérêt plus particulièrement pour les composés dont la demi-vie dans l’organisme est relativement longue (dits persistants, de plusieurs semaines à plusieurs années comme c’est le cas notamment pour les pesticides organochlorés) ou encore des composés ubiquitaires à demi-vie plus faible traduisant une certaine capacité à s’accumuler dans des compartiments de l’organisme. Cependant, leur obtention oblige à des procédures invasives. Néanmoins, le sang est fréquemment utilisé car il est relativement facile à obtenir (ponction veineuse périphérique), mais aussi parce qu’il est le principal fluide qui transporte et distribue les composés aux divers tissus de l’organisme. La mesure de la concentration d’un composé dans le sang est considérée comme un bon indicateur de sa charge corporelle à un instant (t) à l’état d’équilibre (body burden at steady state). D’autres tissus, qui peuvent être potentiellement intéressants, sont moins fréquemment employés, car ils requièrent des méthodes invasives lourdes (biopsies, chirurgie). Les mesurages réalisés dans ces tissus peuvent refléter la capacité à accumuler les composés chimiques, par exemple le tissu adipeux est capable de concentrer des substances lipophiles. Toutefois, c’est au cas par cas, en tenant compte des propriétés intrinsèques de chaque composé et de la nature des tissus cibles, que les concentrations observées peuvent être utilisées comme un indicateur reflétant la charge corporelle. Un cas particulier concerne les mesurages réalisés dans le sang de cordon. Les concentrations dans cette matrice constituent un bon indicateur de l’exposition fœtale au moment de la naissance. Toutefois, il faut garder à l’esprit la possibilité d’une importante variabilité des résultats, car les systèmes enzymatiques et les organes intervenant dans la distribution ou la rétention des composés dans les divers compartiments fœtaux ne sont pas toujours complètement matures à la naissance.
S’agissant des compartiments externes, dont la collecte ne requiert pas de procédures invasives, la matrice la plus employée est l’urine bien qu’elle ne puisse être utilisée que pour des composés (parents ou métabolites) qui sont éliminés, en partie ou totalement, par cette voie. D’une manière générale, cette matrice est surtout employée pour le mesurage des composés à demi-vie plutôt courte (dits semi-persistants ou non persistants, de plusieurs jours à quelques heures). Au moment d’interpréter une mesure urinaire comme indicateur de la charge corporelle, il est nécessaire de tenir compte de la diurèse, mais aussi, et surtout, de la cinétique d’élimination du composé, laquelle dépend de sa demi-vie dans l’organisme. Ces aspects conditionnent le type idoine de prélèvement urinaire : prélèvement ponctuel ou spot, premières mictions du matin ou urines de 24 heures. Plusieurs mesures répétées dans le temps sont indispensables s’il est nécessaire de contrôler la variabilité intra-individuelle des concentrations urinaires, qui sont également le reflet de la variabilité de l’exposition. Dans la pratique, l’urine est la matrice adaptée pour estimer l’exposition à diverses familles chimiques de pesticides et/ou leurs métabolites tels que les organophosphorés et les pyréthrinoïdes.
Au cours de ces dernières années, un intérêt croissant est apparu pour des matrices externes alternatives à l’urine pour estimer l’exposition à des pesticides. La détection de substances chimiques dans les cheveux est depuis longtemps utilisée à des fins médicolégales, par exemple pour identifier des consommations de substances illicites ou médicamenteuses. De par leur croissance (de l’ordre d’environ un cm par mois), l’analyse des cheveux permet également d’estimer la ou les périodes d’exposition en fonction de la longueur de cheveux disponible. C’est ainsi que l’analyse des cheveux en fin de grossesse peut présenter un intérêt pour reconstituer les expositions au cours d’une séquence temporelle correspondant aux 9 derniers mois. Bien que les cheveux représentent une matrice prometteuse, de par leur facilité d’obtention et leur capacité à conserver la mémoire d’une exposition pendant de nombreux mois, l’interprétation des données recueillies reste encore délicate (Kempson et Lombi, 2011renvoi vers ; Appenzeller et Tsatsakis, 2012renvoi vers). En effet, les processus qui conditionnent le passage des contaminants organiques du sang vers la matrice pilaire et l’efficacité de ce passage en fonction de leurs caractéristiques physico-chimiques et structurales sont encore mal connus. Il est également important de tenir compte de la structure et de la composition des cheveux qui varient selon les origines ethno-géographiques des populations (quantité de kératine, réseau vasculaire du follicule pileux...), ainsi que de la dégradation possible des contaminants dans la matrice pilaire (Kempson et Lombi, 2011renvoi vers). Il en résulte des interrogations sur la validité de ces mesures comme indicatrices de la charge corporelle.
Le méconium est une autre matrice externe qui suscite un grand intérêt pour estimer l’exposition fœtale aux substances chimiques, dont les pesticides (Ostrea et coll., 2008renvoi vers). Le méconium, premières selles du nouveau-né, correspond à l’ensemble des sécrétions intestinales, des cellules desquamées présentes dans le tube digestif et des substances provenant du liquide amniotique ingéré pendant la vie fœtale. La production de méconium s’initie vers le début du deuxième trimestre de grossesse et s’accumule dans le côlon jusqu’à la naissance. Facile à obtenir, cette matrice est confrontée aux mêmes difficultés que les cheveux, car on ignore les processus pharmacocinétiques qui conditionnent l’accumulation des pesticides ou de leurs métabolites dans le méconium.
Une matrice externe particulière est le lait maternel. Les concentrations en composés chimiques correspondent bien à celles qui vont être ingérées par le nourrisson au cours de la période d’allaitement. Cependant, il est important de distinguer le colostrum du lait définitif tenant compte de leur différence de composition, qui peut conduire à des variations importantes en matière de concentrations de pesticides.
Les progrès de la chimie analytique font que la détection de nombreux composés par des procédures ciblées et dans de multiples compartiments biologiques ne représentent plus une limite. Cependant, si la détection de ces composés témoigne bien d’une exposition réelle (présence ou non), l’interprétation des concentrations observées au regard de l’exposition globale de l’organisme doit tenir compte de la nature de la matrice, des propriétés physico-chimiques, des caractéristiques de toxicocinétique et du métabolisme de la substance. Il est également important de préciser que les concentrations effectivement mesurées dans une matrice donnée ne correspondent pas toujours à celles présentes au niveau de l’organe ciblé par l’effet toxique. Cet aspect est à considérer dans les études épidémiologiques visant à établir des associations entre l’exposition à un pesticide (composé parent ou métabolite) et un évènement de santé.
Une autre difficulté majeure du mesurage biologique est que la nature des substances auxquelles la population suivie est exposée, ou leurs produits de dégradation ou métabolites, doit être connue et anticipée. Les méthodes et les processus analytiques permettant de rechercher un grand nombre de molécules de propriétés physico-chimiques variées à des niveaux de contamination environnementale se développent et connaissent depuis quelques années des progrès importants. Ces méthodes incluent les approches non ciblées, à ce jour à l’état de preuve de concept pour caractériser l’exposition aux pesticides. Elles peuvent aussi représenter un coût important en termes de financements et de temps d’analyses lorsqu’elles sont déployées à large échelle.
En résumé, la mesure des concentrations dans le sang des pesticides organiques persistants, pour la plupart aujourd’hui interdits en France, constitue de bons indicateurs rétrospectifs de l’exposition sur de longues périodes, utilisables dans les études épidémiologiques à visée étiologique. L’exposition aux pesticides non- ou semi-persistants se mesure généralement à partir de matrices biologiques externes, telles que les urines ou plus récemment les cheveux et le méconium. L’interprétation des résultats des mesures biologiques pour estimer l’exposition d’un individu à un pesticide va dépendre de la nature de la matrice et des mécanismes de bio-accessibilité, de métabolisation et de pharmaco-cinétique de la substance. La pertinence du choix de la matrice et des substances à y mesurer offre encore un champ d’investigation important, incluant l’identification de nombreux métabolites des substances-mères encore inconnus, qu’ils soient spécifiques ou non. Enfin, la multiplicité des substances doit être davantage considérée dans ces mesurages.

Données françaises de biomesurage de pesticides

Les connaissances sur l’exposition professionnelle des travailleurs agricoles français aux pesticides ont été décrites dans le chapitre intitulé « Exposition aux pesticides » de l’expertise collective de 2013 (Inserm, 2013renvoi vers) et ont fait l’objet d’une revue systématique de la littérature récente (Anses, 2016brenvoi vers). Elles ne seront pas abordées ici en détail. Les études analysées visaient généralement à mesurer les contaminations cutanées et respiratoires ou les concentrations urinaires pour certains pesticides pour les mettre en lien avec des observations de terrain sur les pratiques et le matériel. Ces enquêtes permettent de mieux comprendre les déterminants professionnels de l’exposition aux pesticides et ainsi de proposer des mesures de réduction de cette exposition à travers la modification des pratiques, du matériel et des équipements. Alors qu’il est logique que l’usage agricole d’un produit soit associé à une exposition aux pesticides, d’autres tâches agricoles, hors manipulation directe de pesticides, ont elles aussi été associées à des niveaux d’exposition importants et parfois même plus élevés que ceux des utilisateurs (Anses, 2016brenvoi vers). C’est le cas par exemple de la ré-entrée dans des parcelles traitées. La production de données dans ce domaine est encore insuffisante et reste une nécessité.
Les pesticides et leurs produits de dégradation peuvent pénétrer l’organisme par différentes voies d’exposition : i) par inhalation lorsqu’ils sont présents dans l’air à l’état gazeux ou en aérosol (liquide sous la forme de fines gouttelettes ou solide sous la forme de poudre), ii) par ingestion lorsqu’ils contaminent les aliments ou qu’ils sont fixés aux particules que l’on ingère involontairement (par exemple dans les poussières) par les contacts main-bouche, ou iii) par contact cutané direct avec les produits utilisés ou par les molécules présentes dans tout l’environnement, notamment les composés déposés sur les surfaces. Les études qui s’intéressent à mesurer les niveaux des pesticides contemporains ou de leurs métabolites dans les matrices biologiques humaines (le sang, les urines, les cheveux, le lait maternel ou encore le méconium pour le nouveau-né) en population générale française existent depuis une quinzaine d’années. Elles sont peu nombreuses mais montrent toutes une exposition répandue à de multiples substances.
Plusieurs initiatives d’envergure nationale ont permis d’améliorer les connaissances sur l’exposition aux pesticides de la population générale, mais cette connaissance est limitée à quelques familles chimiques particulières et était initialement orientée vers l’exposition alimentaire. Il s’agit, par exemple, de l’Étude nationale nutrition santé menée en 2006-2007 qui avait pour objectifs d’évaluer les apports alimentaires, l’état nutritionnel et l’activité physique de la population française en lien avec les données de santé (Fréry et coll., 2013renvoi vers). L’étude comprenait un volet environnemental, dont l’objectif était de décrire, pour la première fois, l’exposition de la population française à certains pesticides par l’analyse de prélèvements sanguins et urinaires. Les résultats montraient que les niveaux d’exposition aux pesticides organochlorés sont comparables aux niveaux observés à l’étranger, mais concernant d’autres pesticides plus contemporains, les niveaux français sont notablement plus élevés que ceux observés aux États-Unis ou en Allemagne : principalement les insecticides pyréthrinoïdes (concentration urinaire médiane du métabolite 3-PBA : 0,63 µg/g créatinine) et dans une moindre mesure les pesticides organophosphorés. Le volet périnatal de la stratégie nationale de biosurveillance de la population française, s’appuyant sur la cohorte nationale ELFE (Étude Longitudinale Française depuis l’Enfance) ayant inclus en 2011 près de 18 000 femmes lors de l’accouchement sur toute la France métropolitaine (Charles et coll., 2020renvoi vers), a permis de contribuer à cette connaissance. Les études de la cohorte ELFE ont confirmé la présence ubiquitaire des métabolites de pesticides pyréthrinoïdes dans les urines de femmes françaises (concentration médiane du métabolite 3-PBA : 0,36 µg/l ou 0,50 µg/g créatinine), ce qui pourrait s’expliquer par leur usage domestique et leur usage accru en substitution aux insecticides organophosphorés, sw5et ont montré également une exposition peu fréquente ou absente aux pesticides organophosphorés (cohérent avec la diminution des usages des organophosphorés) et aux herbicides de la famille swdes triazines (Dereumeaux et coll., 2016arenvoi vers ; Dereumeaux et coll., 2016brenvoi vers ; Dereumeaux et coll., 2018renvoi vers). Enfin, l’étude ESTEBAN (étude de santé sur l’environnement, la biosurveillance, l’activité physique et la nutrition)2 est une étude nationale mise en place en 2014-2016, conduite sur un échantillon représentatif de la population générale composée de 1 104 enfants et 2 503 adultes, et construite pour être répétée tous les 7 ans environ, notamment pour mesurer l’exposition de la population à certaines substances de l’environnement et suivre son évolution à partir de divers prélèvements biologiques. Les premiers résultats concerneront une liste de pesticides appartenant principalement à des familles déjà étudiées et devraient être publiés au cours de l’année 2021.
D’autres études françaises menées au niveau régional et réalisées dans le cadre d’activités de recherche se sont intéressées à des mesures de l’exposition aux pesticides sur des populations particulières, telles que les enfants et les femmes pendant la grossesse. Dès 2004, l’étude EXPOPE (Évaluation de l’exposition de la population aux pesticides dans l’environnement) a mesuré les métabolites dialkylphosphates (DAP) d’insecticides organophosphorés dans les urines, sur la peau et dans l’air à l’intérieur des logements dans une population résidant en Île-de-France. Les concentrations urinaires médianes des DAP retrouvées dans cet échantillon de 130 enfants et de 41 adultes étaient de 154 nmol/g créatinine et 241 nmol/g créatinine, respectivement (Bouvier, 2005renvoi vers).
En 2008, l’étude PELAGIE (Perturbateurs endocriniens : Étude longitudinale sur les anomalies de la grossesse, l’infertilité et l’enfance), avait pour objectif d’évaluer les conséquences des expositions environnementales aux substances chimiques pendant la grossesse sur le déroulement de celle-ci et la santé de l’enfant à partir d’une approche de cohorte mère-enfant. Elle a montré la présence ubiquitaire de métabolites de pesticides organophosphorés (concentration médiane des métabolites DAP : 42 nmol/g créatinine) et pyréthrinoïdes chez la femme enceinte sur la période 2002-2005 et l’enfant de 6 ans sur la période 2009-2012 en Bretagne, complétés par des prélèvements dans l’environnement intérieur (Chevrier et coll., 2009renvoi vers ; Glorennec et coll., 2017renvoi vers). Cette étude a également montré la présence chez environ 30 % des femmes enceintes de métabolites urinaires des triazines, famille d’herbicides utilisés jusqu’au début des années 2000 mais qui sont rémanents en particulier dans les eaux (Chevrier et coll., 2011renvoi vers).
Plus récemment, une étude réalisée en Picardie a effectué des dosages de 11 pesticides ou métabolites de pesticides dans des prélèvements de méconium collectés en maternité entre 2011 et 2014 (Haraux et coll., 2018renvoi vers). Les résultats ont permis d’observer des pesticides dans la majorité des prélèvements des 58 nouveau-nés (groupe témoins). Les molécules les plus présentes étaient les insecticides organophosphorés (métabolites diéthylthiophosphates (DETP), chlorpyrifos, diazinon ; concentrations médianes respectives : 82,4 ng/g, 6,6 ng/g et 1,6 ng/g), le propoxur (concentration médiane : 12,1 ng/g) et l’isoproturon (concentration médiane : 7,0 ng/g).
Une analyse d’une sous-cohorte de l’étude ELFE (311 femmes résidant dans les régions Nord-Est et Sud-Ouest) a également apporté de nouvelles connaissances sur l’exposition aux pesticides des femmes enceintes françaises à partir de mesures dans les mèches de cheveux collectées à la naissance de l’enfant (Béranger et coll., 2018renvoi vers). Parmi les 140 molécules recherchées, 122 (87 %) ont été détectées au moins une fois dans les mèches de cheveux. Un minimum de 25 molécules a été retrouvé dans chaque mèche de cheveux. Pour la moitié des femmes, plus de 43 molécules pesticides ont été détectées dans les mèches de cheveux (maximum : 65). L’ensemble des 18 familles chimiques étudiées est retrouvé, objectivant la présence de mélanges complexes de pesticides. Les molécules avec les concentrations médianes les plus élevées sont d’origine à la fois agricole et non agricole. Par ordre décroissant, les concentrations médianes observées sont égales à 37,9 ng/g de cheveu pour la perméthrine, 10,0 ng/g pour le pentachlorophénol, 7,5 ng/g pour le métabolite DEP (famille des pesticides organophosphorés), 3,5 ng/g pour le métabolite Cl2CA (famille des pesticides pyréthrinoïdes), 2,7 ng/g pour le métabolite TCPγ (spécifique du chlorpyrifos, famille des pesticides organophosphorés), 2,3 ng/g pour le métabolite fipronil sulfone, 1,7 ng/g pour le métabolite 3-PBA (famille des pesticides pyréthrinoïdes), 1,6 ng/g pour le lindane, et 1,1 ng/g pour la cyperméthrine (famille des pesticides pyréthrinoïdes). Parmi les 20 molécules les plus fréquemment détectées, la moitié sont des pesticides ou des métabolites de pesticides classés cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction et 14 sont des perturbateurs endocriniens, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et la Commission européenne. Enfin, les corrélations observées entre les concentrations des pesticides ou des métabolites mesurées dans les cheveux sont généralement modestes à faibles, en dehors des corrélations observées entre la substance-mère et ses métabolites ou entre substances d’une même famille chimique. Ces résultats suggèrent que la population générale serait exposée à une grande diversité de mélanges de pesticides, complexifiant l’étude des risques associés à ces mélanges.
En résumé, les études qui s’intéressent à mesurer les niveaux des pesticides contemporains ou de leurs métabolites dans les matrices biologiques humaines en population générale française existent depuis une quinzaine d’années. Elles sont peu nombreuses mais montrent toutes une exposition répandue à de multiples substances. Elles sont pour certaines d’envergure nationale mais jusqu’à présent limitées à quelques familles chimiques, et pour d’autres d’envergure régionale, portées par des travaux de recherche, à la fois plus complètes en matière de couverture de molécules d’intérêt pour le contexte français mais plus exploratoires compte tenu d’incertitudes liées aux matrices biologiques choisies. Il est important de rappeler que la détection d’un pesticide, d’un métabolite de pesticide, ou d’un mélange de ces substances dans une matrice biologique humaine atteste très certainement d’une exposition, mais ne peut conduire immédiatement à une interprétation de toxicité ou d’effet sanitaire sans l’analyse de toutes les données associées et disponibles de toxicologie et d’épidémiologie.

Contamination environnementale par les pesticides
en France et sources possibles d’exposition de la population générale

Bref aperçu de la contamination environnementale en France

La contamination de l’eau est la mieux documentée depuis plus de vingt ans car la réglementation impose des contrôles sanitaires réguliers pour l’eau de consommation, ainsi des mesures sont effectuées à la fois dans les eaux superficielles et souterraines. D’après le dernier rapport sur l’état de l’environnement en France, publié en 2019 par le ministère de la Transition écologique et solidaire3 , un total de 80 % des masses d’eaux souterraines du territoire français est contaminé par les pesticides : en 2017, près de 300 substances ont été détectées parmi plus de 700 recherchées. Parmi elles, la majorité (57 %) sont des herbicides ou leurs produits de dégradation et 40 % sont des substances actuellement interdites mais rémanentes dans les systèmes d’eau. Le seuil de qualité de 0,5 µg/l pour la concentration totale de pesticides n’est pas respecté pour plus d’un quart (27 %) de la superficie des masses d’eau souterraine. La contamination des cours d’eau en France est également généralisée, et elle est bien documentée4 . En considérant la limite de qualité réglementaire de 0,1 µg/l pour un pesticide pris isolément, 84 % des points de mesures des eaux de surface dépassent au moins une fois ce seuil sur la période (au moins un échantillon > 0,1 µg/l) avec des différences marquées selon les régions : 100 % des points de mesure dans le bassin Artois-Picardie versus 60 % en Rhône-Méditerranée-Corse. Les dépassements réguliers (plus de 3 échantillons > 0,1 µg/l sur la période) concernent, au niveau national, plus de 25 % des points de mesure.
La contamination par les pesticides des milieux marins et littoraux ne bénéficie pas d’obligation réglementaire de contrôle. Des données compilées par l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) existent cependant depuis plus de 40 ans pour quelques pesticides, pour les eaux mais aussi pour les organismes filtreurs tels que les huîtres ou les moules capables d’accumuler les polluants, et servent ainsi d’indicateur quantitatif de la contamination (programme « Mussel watch »). Elles permettent de montrer que les niveaux de concentration en organochlorés (par exemple le lindane) ont été réduits jusqu’à un facteur 5 sur l’ensemble de la façade littorale française entre les périodes 1979-1993 et 2001-2004 (Ifremer, 2006renvoi vers). Aux Antilles françaises, la présence du chlordécone dans le milieu marin est régulièrement contrôlée et a poussé les autorités à interdire certaines activités de pêche dans les zones les plus contaminées.
La contamination de l’air extérieur par les pesticides a été documentée depuis quelques décennies pour l’essentiel par les données ponctuelles collectées localement et sous l’initiative des Associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA). Une base de données, PhytAtmo, regroupant ces données pour la période 2002-2017 a été rendue publique récemment (Atmo-France, 2019renvoi vers). Le nombre des pesticides recherchés chaque année par l’ensemble des AASQA en France évolue entre 150 et 250 en fonction des usages régionaux. Entre 40 et 90 substances actives (herbicides, fongicides, insecticides) sont détectées annuellement dans les prélèvements d’air, à des concentrations qui montrent une forte variabilité spatiale et temporelle. Certains composés peu volatils ou interdits sont également retrouvés. Les zones rurales et urbaines sont concernées par une contamination de l’air par des pesticides, suggérant une contribution possible des usages non agricoles ou bien du transport à des distances importantes de molécules utilisées sur les champs. La Campagne nationale exploratoire des pesticides (CNEP) a été initiée en 2018 dans un partenariat entre l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) et le réseau AASQA, promettant des résultats harmonisés sur l’ensemble du territoire français (métropole et outre-mer) pour 75 substances actives analysées sur 50 sites de prélèvements. Ces substances entrent, selon le cas, dans la composition de produits phytopharmaceutiques, de produits biocides, de médicaments vétérinaires et antiparasitaires à usage humain. Les résultats de cette campagne montrent que seulement 6 substances n’ont jamais été détectées en métropole, contre 43 dans les DROM, reflétant une moindre variété de substances utilisées. Les prélèvements d’air réalisés en zones « urbaines », « périurbaines » ou « rurales » rapportent des résultats similaires. Parmi l’ensemble des substances recherchées, les molécules les plus détectées dans les prélèvements d’air sont le chlorothalonil, le chlorpyrifos-méthyl, le glyphosate, le lindane, le prosulfocarbe, le S-métolachlore, le folpel, la pendiméthaline, et le triallate. Cette campagne a permis dans un premier temps de prioriser la conduite d’investigations plus approfondies sur le lindane (cancérogène et reprotoxique avéré) car il est retrouvé dans près de 80 % des échantillons d’air, et de nouvelles mesures plus systématiques dans l’air pour une liste de 32 substances (dont 9 interdites) (Anses, 2020renvoi vers). Il n’existe pas actuellement de valeurs réglementaires concernant les niveaux de pesticides présents dans l’air.
Les sols sont également concernés par la contamination par des résidus de pesticides et leurs métabolites, mais en l’absence de surveillance réglementaire les données sont parcellaires en France. Des niveaux localement élevés de lindane et d’atrazine ont été mis en évidence dans le Nord de la France en 2008 (Anses, 2010arenvoi vers). Plus récemment, à partir d’une zone atelier dans les Deux-Sèvres, les échantillons de sol de prairies et de cultures de céréales rapportent une présence fréquente (> 80 % des échantillons de sol) de diflufénican, d’imidaclopride, de boscalide et d’époxiconazole, qu’il s’agisse d’agriculture conventionnelle ou biologique, les concentrations observées étant plus faibles dans le cas d’agriculture biologique (Pelosi et coll., 2021renvoi vers).

Contamination alimentaire en France

Les denrées alimentaires contaminées par les pesticides sont une source d’exposition de la population qui est actuellement encadrée en France par divers dispositifs réglementaires de contrôle et de surveillance. Il existe en effet une réglementation européenne sur les teneurs en pesticides des produits destinés à l’alimentation humaine, qui définit les limites maximales de résidus de pesticides (LMR) (CE/396/2005). Ces limites maximales résiduelles sont fixées, non seulement de manière à ne pas présenter de danger en restant bien en deçà des seuils toxicologiques, mais également pour correspondre au niveau le plus faible raisonnablement atteignable compatible avec des « bonnes pratiques agricoles » pour chaque pesticide. Les niveaux de contamination en résidus de pesticides des denrées végétales et animales font l’objet d’une surveillance régulière en France, dont l’objectif est de s’assurer du non-dépassement des LMR mais aussi de vérifier que des produits pesticides interdits ne sont pas encore utilisés. Des mesures administratives ou pénales peuvent être prises à la suite des enquêtes réalisées en cas de non-conformité.
Les mesures au niveau de la production primaire sont prises en charge en France par la DGAL (Direction générale de l’alimentation). La surveillance s’applique également aux niveaux supérieurs de la chaîne alimentaire jusqu’au consommateur, et est prise en charge par la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes).
Les plans nationaux de contrôle et de surveillance de l’ensemble des pays de l’Espace économique européen (EEE) font l’objet d’un rapport commun. Dans le rapport basé sur les données de 2016 (Efsa, 2018renvoi vers), 6 773 échantillons végétaux et animaux ont été analysés sur le marché français : 6,4 % des échantillons étaient non conformes et présentaient un dépassement de la LMR pour au moins un pesticide, et près de la moitié (48,3 %) présentaient des résidus de pesticides quantifiables. L’origine des échantillons était à 45,7 % française, 20,6 % étaient issus de l’EEE, 25,5 % de pays tiers et 8,2 % d’origine inconnue. Au niveau européen, le taux de dépassement des LMR s’élève à 4,5 % pour les légumes (7,7 % pour les légumineuses fraîches ; 7,9 % pour les légumes feuilles-herbes fraîches), 4 % pour les fruits et noix (4,6 % pour les agrumes ; 5,8 % pour les fruits tropicaux et subtropicaux), 1,4 % pour les céréales, 8,1 % pour les autres produits végétaux (11 % pour les épices ; 12,1 % pour le houblon ; 16,2 % pour les thé-café-infusion-cacao), 1,9 % pour les produits animaux (2,2 % pour le lait-produits laitiers et 12,6 % pour le foie) et 1,9 % pour les aliments pour nourrissons et jeunes enfants. Sur les 84 657 échantillons analysés au niveau européen, les pesticides les plus quantifiés (en nombre absolu d’analyses égales ou supérieures à la limite de quantification) sont le boscalide (6 815 dosages), le fludioxonil (4 255 dosages), l’imazalil (4 061 dosages), le cyprodinil (3 721 dosages), l’acétamipride (3 578 déterminations), l’azoxystrobine (3 526 dosages) et le chlorpyrifos (3 371 dosages). Le rapport de l’Efsa a conclu que, d’un point de vue d’une exposition aiguë aux pesticides, la probabilité d’être exposé à des résidus de pesticides dépassant des concentrations susceptibles d’entraîner des effets négatifs sur la santé est faible. De même, l’Efsa a conclu que, selon les connaissances scientifiques actuelles, l’exposition alimentaire à long terme aux pesticides couverts était peu susceptible de présenter un risque pour la santé des consommateurs. Il faut cependant noter que ces études scientifiques sont peu nombreuses et particulièrement complexes à réaliser.
La connaissance de la contamination de l’alimentation est complétée par des études de l’alimentation totale (EAT), mises en place par l’Anses, qui s’appuient sur une méthode standardisée recommandée par l’OMS et visent à rechercher différentes substances susceptibles d’être présentes dans les aliments « tels que consommés » et non plus seulement bruts comme c’est le cas avec les plans de contrôle et de surveillance des aliments. En associant aux résultats analytiques des données de consommations alimentaires, ces études permettent en particulier d’identifier les aliments qui contribuent le plus aux expositions et de caractériser des risques pour la population en tenant compte des apports totaux de chaque substance dans l’alimentation. L’Étude de l’alimentation totale 2 (EAT2 ; Anses, 2011renvoi vers) présente en 2011 des résultats concernant les résidus de 283 pesticides recherchés. « Parmi les 1235 échantillons composites alimentaires analysés (194 items distincts), 37 % présentent au moins un résidu détecté et 30 % au moins un résidu quantifié5 . Parmi les 463 échantillons présentant des détections (100 items alimentaires distincts), 50 % contiennent une seule substance, 41 % de 2 à 5 substances, 8 % de 6 à 10 substances et 1 % plus de 10 substances. Au maximum, 16 substances ont été détectées dans un même échantillon composite. Considérant l’ensemble des substances, 73 (26 %) ont été détectées, dont 55 (19 %) quantifiées à des teneurs variant de 0,003 mg/kg (chlorpyrifos-éthyl dans un échantillon composite de merguez) à 8,7 mg/kg (soufre dans un échantillon composite de salades) ». Rappelons que les limites de détection et de quantification sont définies par les méthodes chimiques analytiques mises en œuvre, et sont très supérieures aux LMR, élaborées pour la protection de la santé humaine. D’après l’analyse des risques pour la population, seul le diméthoate présente une probabilité non nulle de dépassement de la dose journalière admissible avec un risque chronique pour les grands consommateurs de cerises qui ne peut être écarté. Le diméthoate sera par la suite interdit en 2016 en France, en 2019 en Europe et la LMR portée au minimum en 20206 .
Dans la continuité de ces résultats, l’Étude de l’alimentation infantile (EATi ; Anses, 2016arenvoi vers) présente également en 2016 des mesures de résidus de pesticides dans l’alimentation, avec un focus sur les aliments destinés à l’alimentation des enfants de moins de trois ans : il s’agit d’aliments courants ou alors de préparations spéciales infantiles avec un plus grand nombre de pesticides et de métabolites recherché (n = 469) et une amélioration importante des limites analytiques. « Parmi les 309 échantillons composites analysés, 208 (67 %) présentent au moins un résidu détecté. [...] Parmi les échantillons présentant des détections, 17 % contiennent une seule substance active, 61 % de 2 à 5 substances et 22 % plus de 5 substances. Au maximum, 20 substances ont été détectées dans un même échantillon composite. Parmi les 469 substances et métabolites recherchés, 78 (17 %) ont été détectés, dont 37 (8 %) quantifiés. » L’analyse des risques pour la population suite à ces nouvelles données n’identifie aucun pesticide en particulier.
Les eaux destinées à la consommation humaine représentent le compartiment de l’environnement le plus surveillé en termes de contamination par les pesticides. Il bénéficie de normes réglementaires. L’arrêté du 11/01/2007 (articles R. 1321-2, R. 1321-3, R. 1321-7 et R. 1321-38 du code de la santé publique) fixe : i) pour les pesticides dans les eaux brutes de toute origine, utilisées pour la production d’eau destinée à la consommation humaine, une norme de 0,5 µg/l pour chaque pesticide pris individuellement et de 2 µg/l pour la somme de tous les pesticides individualisés détectés et quantifiés (ainsi que leurs métabolites) ; ii) pour les pesticides dans les eaux destinées à la consommation humaine une norme de 0,1 µg/l pour chaque pesticide pris individuellement et de 0,5 µg/l pour la somme de tous les pesticides individualisés détectés et quantifiés (ainsi que leurs métabolites). Ces normes, en vigueur dans l’Union européenne, ont été fixées sur la base des limites analytiques de détection de l’époque et ne correspondent pas à des valeurs sanitaires de référence. Quatre pesticides font l’objet de normes plus sévères à 0,03 µg/l : l’aldrine, la dieldrine, l’heptachlore et l’époxyde d’heptachlore. Le dépassement de ces valeurs mesurées dans les points de captage entraîne la non-conformité de l’eau de consommation et des contrôles plus fréquents, mais n’est pas considéré par l’Anses comme un risque sanitaire donc n’entraîne pas de restriction d’usage pour les populations. En 2018, c’est 90,6 % de la population française qui a été alimentée par une eau conforme en permanence ; les dépassements des limites de qualité au moins une fois au cours de l’année ont concerné la quasi-totalité des départements français (DGS, 2019renvoi vers). Depuis 2010 les chiffres ne montrent pas d’amélioration, bien que les comparaisons doivent être faites avec précaution en raison de la variabilité des conditions de mise en œuvre. Il n’existe pas de liste de pesticides définie au niveau national à rechercher dans le cadre du contrôle sanitaire, et le choix des molécules recherchées relève donc de la responsabilité des Agences régionales de santé qui priorisent les substances les plus susceptibles d’être présentes en raison des spécificités locales et notamment des usages agricoles connus. L’amélioration récente des techniques d’analyse en laboratoire permet de rechercher de plus en plus de molécules (entre 100 et 200 molécules dans chaque échantillon d’eau, voire jusqu’à plus de 400 molécules). Pour l’année 2018, la grande majorité des cas de dépassement des limites de qualité de l’eau était causée par cinq molécules herbicides dont l’atrazine et ses métabolites, dont les usages sont interdits au niveau européen depuis 2003 mais qui, rémanents, persistent dans les eaux.
En résumé, les denrées alimentaires et l’eau destinée à la consommation humaine contaminées par les pesticides représentent une source évidente d’exposition possible de la population générale. Divers dispositifs réglementaires de contrôle et de surveillance de cette contamination existent en France et permettent de détecter régulièrement des non-conformités réglementaires ou des contaminations de ces denrées. Dans l’ensemble et selon les connaissances actuellement disponibles, il n’y a pas de risques identifiés associés à ces contaminations pour la santé humaine. Pour un certain nombre de pesticides, il existe un besoin urgent d’acquisition de données pour une évaluation de risque appropriée ; ce manque de connaissances est encore plus important dans le cas de mélanges de pesticides présents dans l’alimentation ou les pratiques agronomiques.

Contamination des environnements intérieurs français

Il existe très peu de données sur la contamination de l’air intérieur par les pesticides, qui peut être le résultat des usages directs de produits pesticides dans le logement, de l’émanation des substances à partir de biens et matériaux traités (meubles, bois, tapis, matelas...) et de la contamination de l’air extérieur.

Contaminations par l’air

Les résultats de quatre études menées entre 2001 et 2006 rapportés par l’Observatoire des résidus de pesticides font état de 38 substances pesticides détectées au moins une fois sur un total de 84 recherchées (Anses, 2010brenvoi vers). Cinq substances ont été systématiquement mesurées, il s’agissait du chlorpyrifos, de l’α-endosulfan, du fenthion, du lindane et du propoxur. Sur une période similaire, entre 2003 et 2005, l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur (OQAI) a réalisé sa première campagne « logements » et a confirmé la présence d’insecticides organochlorés tels que le DDT, son métabolite DDE, et le lindane, dans plus de la moitié des logements (phase particulaire de l’air, avec utilisation de filtres PM10). Les deux insecticides organophosphorés (chlorpyrifos, diazinon) étaient peu détectés, alors que la perméthrine était très détectée (76 %) et la molécule-pesticide avec la plus forte concentration parmi les 17 molécules-pesticides recherchées (Mandin et coll., 2016renvoi vers).

Contamination par les poussières

La contamination de l’environnement intérieur par les pesticides a également été étudiée via les poussières domestiques (déposées ou en suspension dans l’air). Dans le cadre du projet Ecos-POUSS7 , une campagne de prélèvements dans des logements français représentatifs accueillant des enfants en 2008-2009 a conclu à la présence dans les poussières de plus d’un tiers des logements de : perméthrine (99 %), lindane (66 %), DDE (52 %), cyperméthrine (47 %), et chlorpyrifos (35 %). Les concentrations les plus élevées (P75 : présentes dans au moins 25 % des logements) étaient observées pour la cyperméthrine, le lindane, le chlorpyrifos, et l’oxadiazon (Le Bot et coll., 2014renvoi vers ; Mandin, 2015renvoi vers). Enfin, plus récemment, l’OQAI fait état d’un profil similaire de contamination par les pesticides dans les écoles du territoire français entre 2013 et 2017 : avec dans l’air, le lindane et son isomère (α-HCH), l’α-endosulfan, le diazinon, la dieldrine, et le chlorpyrifos, et dans les poussières la perméthrine, le lindane et son isomère, le DDT et son métabolite DDE, et la dieldrine (Wei et coll., 2021renvoi vers). Enfin plus récemment, une équipe de recherche a conduit une campagne de prélèvements de poussières en 2012 dans 239 foyers de la région Auvergne-Rhône-Alpes et a permis de détecter au moins une fois 125 pesticides distincts, parmi les 276 recherchés (Béranger et coll., 2019renvoi vers).

Contaminations liées aux usages domestiques de produits pesticides

Les usages domestiques de produits pesticides par les Français sont décrits et quantifiés pour la première fois avec une portée nationale en 2019 par l’étude Pesti’home pilotée par l’Anses (Anses, 2019renvoi vers). L’enquête repose sur un échantillonnage stratifié parmi les ménages de France métropolitaine (n = 1 507) interrogés en 2014 pour renseigner les caractéristiques de l’habitat et les utilisations de pesticides au cours des 12 derniers mois. Un inventaire des produits pesticides présents au domicile a permis également de fournir des informations précises sur les produits et les substances actives présentes dans les foyers français. Dans les 12 derniers mois, 75 % des ménages interrogés rapportent des usages domestiques de produits pesticides, pour majorité des traitements à l’intérieur des logements. Les utilisations sont différentes selon les régions et les caractéristiques des logements, et certaines caractéristiques individuelles des ménages. Le rapport conclut que les ménages qui utilisent le plus fréquemment des produits pesticides sont aussi souvent ceux qui en utilisent un nombre plus important, notamment en traitement des jardins. L’étude montre que 10 familles chimiques différentes sont retrouvées dans les produits stockés dans les foyers français. Les substances actives les plus présentes et utilisées par la population sont : trois insecticides pyréthrinoïdes (cyperméthrine, perméthrine, et tétraméthrine), un herbicide (glyphosate) et un endectocide ou insecticide (fipronil). Enfin, l’étude met en évidence que plus d’un quart des ménages stocke au moins un produit interdit au moment de l’enquête, soulignant un manquement d’information concernant l’évolution rapide des réglementations de ces produits domestiques. L’étude Pesti’home a également été mise en place dans des DROM (Guadeloupe, Martinique, La Réunion) ; la publication des résultats est prévue en 2021.
Les usages domestiques entraînent à la fois une exposition directe des personnes occupant le domicile lors de l’utilisation mais aussi la contamination de l’environnement intérieur puisque certaines substances peuvent subsister dans l’air ou les poussières des logements. En effet, plusieurs études françaises montrent que les niveaux d’exposition mesurés dans les poussières des logements sont corrélés aux usages domestiques (Glorennec et coll., 2017renvoi vers ; Béranger et coll., 2019renvoi vers). Ces résultats sont également observés par les études nord-américaines (Deziel et coll., 2017renvoi vers). D’autres travaux français montrent également que les concentrations de métabolites urinaires d’insecticides pyréthrinoïdes sont corrélées aux usages domestiques déclarés de produits pesticides (Dereumeaux et coll., 2018renvoi vers), suggérant une contribution de ces usages domestiques à l’exposition des populations.
En résumé, la contamination de l’environnement intérieur par les pesticides est retrouvée dans l’ensemble des études. Elle est particulièrement bien étudiée par l’OQAI qui s’intéresse également à d’autres polluants et aux mélanges entre tous ces contaminants. Les sources de ces contaminations peuvent être variées et méritent d’être étudiées de façon plus approfondie. Les usages domestiques de produits pesticides dans le logement ou l’émanation des substances à partir de biens et matériaux traités (meubles, bois, tapis, matelas...) sont les premières sources possibles de contamination, ainsi que l’air extérieur. La contribution des usages domestiques de produits-pesticides à l’exposition aux pesticides a longtemps été négligée mais grâce aux données récentes des dix dernières années, on s’aperçoit qu’elle apparaît pourtant non négligeable pour la population française. Ceci incite par précaution à plus de vigilance et d’information auprès du grand public quant à l’usage et le stockage de ces produits.

Contaminations liées à la proximité des lieux de vie aux zones agricoles

Études utilisant des mesures dans les compartiments biologiques
et environnementaux

En France, quelques études réalisées en population générale à des échelles régionales se sont intéressées à évaluer en zones riveraines d’activités agricoles, la contamination des environnements intérieurs des habitations par les pesticides ou l’exposition des habitants aux pesticides. Il existe en effet une dérive aérienne des pesticides au moment du traitement et après l’application (par la volatilisation ou par l’érosion éolienne) sur des distances plus ou moins longues selon le mode d’application, les propriétés physico-chimiques des pesticides et les conditions météorologiques (Gurial et coll., 2016renvoi vers). Ces études ont permis de détecter la présence de produits correspondant à des pesticides agricoles dans les poussières domestiques ou les urines de ces habitants ; elles ne permettent cependant pas de conclure que l’activité agricole voisine contribue fortement à cette exposition (Chevrier et coll., 2014renvoi vers ; Glorennec et coll., 2017renvoi vers ; Béranger et coll., 2019renvoi vers). Ces études n’ont toutefois pas été conduites spécifiquement pour cette question limitant la capacité méthodologique déployée pour étudier la dérive des pesticides pendant/après application, et ainsi la portée de ces résultats. Ces études s’appuient en effet sur une approche spatiale précise, mais sans toutefois bénéficier d’une précision temporelle pourtant nécessaire à ce type d’étude. De la même façon, la CNEP (décrite ci-dessus), réalisée à l’échelle nationale en 2018-2019, a permis de fournir des mesures de pesticides dans l’air ambiant couvrant des zones urbaines, péri-urbaines et rurales sur 12 mois (Anses, 2020renvoi vers ; Ineris et coll., 2020renvoi vers), et n’observe pas de différence significative de fréquences de quantification et de concentrations moyennes annuelles entre ces différentes zones.
La littérature scientifique sur cette question dans le contexte nord-américain est similaire et aboutit au même constat (Deziel et coll., 2015renvoi vers). Une revue de la littérature sur l’exposition aux pesticides des femmes en zones agricoles, recense en particulier 16 études qui s’intéressent au rôle de la dérive des pesticides dans la contamination des habitations, par la mesure de concentrations de pesticides dans les poussières domestiques, en fonction de la proximité aux parcelles agricoles. La moitié des études n’ont pas observé de corrélation entre la distance aux cultures et les concentrations en pesticides dans les poussières des habitations.
En 2017, Deziel et coll. ont réalisé une méta-analyse de 10 études afin d’évaluer les associations (et de quantifier les différences observées) entre les concentrations de pesticides dans les poussières des habitations et trois indicateurs des principales voies d’exposition aux pesticides : l’utilisation de pesticides dans le cadre professionnel par un membre de la famille (forte ou faible selon la fréquence et l’ancienneté), la distance aux cultures et l’utilisation domestique de pesticides. En se basant sur 7 études (incluses dans la revue de Deziel et coll., 2015renvoi vers), les auteurs de la revue ont extrait 52 mesures de pesticides (moyennes géométriques des mesures faites dans chaque étude pour chaque type de pesticides), associées à des distances allant de 10 à 3 690 pieds (soit 3 à 1 100 m environ), avec un écart interquartile allant de 75 à 820 pieds (23 à 250 m). Ces données ont permis de mettre en évidence une association négative non linéaire entre les concentrations de pesticides dans les poussières des habitations et la distance aux cultures, qui correspondait à une diminution de 64 % de la concentration de pesticides dans les habitations situées à 250 m des cultures par rapport aux concentrations dans les habitations situées à moins de 23 m. Cette diminution était estimée à 78 % pour les concentrations en herbicides et fongicides, 51 % pour les concentrations en insecticides. Par ailleurs, les concentrations en pesticides étaient estimées à des niveaux 2,3 fois plus élevés dans les habitations des agriculteurs utilisant des pesticides de manière importante par rapport aux niveaux mesurés dans les habitations des autres agriculteurs, et 1,3 fois plus élevés dans les habitations avec une utilisation domestique de pesticides par rapport aux autres habitations. Ces résultats donnent des informations quantitatives sur les associations entre les différents indicateurs d’exposition aux pesticides et la concentration mesurée dans les poussières des habitations. Cependant, ces résultats doivent être considérés avec prudence pour plusieurs raisons, outre l’absence de prise en compte de l’échelle temporelle : i) le biais de publication est probablement important puisque plusieurs études ayant des résultats non statistiquement significatifs n’ont pu être incluses par manque d’information sur les concentrations de pesticides mesurées ou sur les indicateurs de distances et d’utilisation professionnelle ou domestique de pesticides ; ii) la difficulté de prendre en compte simultanément les différentes voies d’exposition ; iii) les associations sont parfois estimées à partir d’un petit nombre de mesures de pesticides ; iv) les études incluses ont été réalisées principalement dans quelques États du Nord-Ouest des États-Unis, les résultats ne sont donc peut-être pas généralisables à d’autres régions/pays.
D’autres études, réalisées en Europe, ont utilisé une méthodologie intégrant à la fois des données spatiales et temporelles, pour apporter des connaissances sur l’exposition aux pesticides des populations riveraines des activités agricoles.
En 2011 et 2012, au Royaume-Uni, des mesures ont été effectuées dans les urines de personnes résidant à moins de 100 m de parcelles de terres arables ou de vergers traités avec des pesticides (Galea et coll., 2015renvoi vers). Quatre substances pouvant être détectées dans les urines à l’aide de biomarqueurs et qui ont pu être appliquées sur les parcelles sélectionnées ont été retenues dans l’étude : captane, cyperméthrine, chlorméquat et chlorpyrifos. Les prélèvements des urines ont été réalisés jusqu’à 48 h après une application de pesticides sur les parcelles et à d’autres moments pendant et en dehors de la période habituelle d’application (de mars à août). Au total, 156 habitations et 140 participants (non exposés professionnellement aux pesticides) ont été inclus, et 1 518 échantillons d’urines analysés. Pour deux des quatre pesticides d’intérêt, le captane et la cyperméthrine, plus de 80 % des concentrations urinaires étaient inférieures à la limite de détection, quel que soit le moment du prélèvement. Les concentrations urinaires en chlorméquat 48 h après une application étaient comparables à celles mesurées plus tard dans la période d’application de pesticides et un peu plus élevées que celles mesurées en dehors de cette période. Les concentrations en chlorpyrifos mesurées moins de 48 h après une application étaient quant à elles un peu plus faibles que les concentrations mesurées plus tardivement (pendant ou en dehors des périodes d’application). Il n’y avait pas de différences statistiquement significatives entre les concentrations urinaires en pesticides des hommes et des femmes et entre celles des enfants et des adultes. Dans l’ensemble, pour les pesticides étudiés, cette étude ne montre donc pas d’augmentation des concentrations urinaires chez les riverains de cultures dans les deux jours qui suivent le traitement des parcelles. Par ailleurs, les différences observées selon les périodes de prélèvements ne semblaient pas être expliquées par des facteurs tels que l’âge, le sexe, le statut tabagique, la consommation d’aliments issus de l’agriculture biologique, l’utilisation domestique de pesticides, ou le temps passé à l’intérieur et à l’extérieur de l’habitation 48 h avant l’application de pesticides sur les parcelles agricoles.
En Wallonie, l’étude PROPULPPP8 coordonnée par l’Institut scientifique de service public a permis d’estimer les concentrations en pesticides dans l’air et les poussières à proximité des cultures (< 50 m), ainsi qu’à plus longue distance de l’application (> 100 m). Les mesures ont été effectuées en 2018 dans les heures et les jours qui suivent des pulvérisations à proximité de parcelles expérimentales (7 pulvérisations, 19 substances), puis dans des écoles et chez des particuliers (540 substances). L’étude a mis en évidence une diminution des dépôts de pesticides au sol en fonction de la distance à la zone traitée, particulièrement dans les 10 premiers mètres, ainsi qu’une diminution en fonction du temps. Les concentrations de pesticides dans l’air ne montraient pas de tendance nette à la diminution en fonction de la distance à la parcelle traitée et du temps, les profils de variations étant différents selon les substances. L’effet positif de la présence d’une barrière-écran (buse anti-dérive et filet anti-insecte) autour des parcelles sur la diminution des concentrations en pesticides au sol, en bordure du champ quelques heures après la pulvérisation, a également été noté.
L’exposition aux pesticides des personnes habitant à proximité des champs de fleurs aux Pays-Bas a été évaluée dans l’étude OBO (Onderzoek Bestrijdingsmiddelen en Omwonenden) qui portait sur 80 habitations (164 participants) situées à moins de 250 m de 9 parcelles traitées avec les pesticides par une technique de pulvérisation dirigée vers le bas (Gooijer et coll., 2019renvoi vers). La population « contrôle » était constituée de 28 participants résidant dans 16 habitations situées à plus de 500 m des parcelles agricoles et dans des zones non urbaines. Des prélèvements d’air ont été testés pour 48 pesticides d’intérêt appliqués sur les parcelles voisines, et l’imprégnation des participants a été évaluée par l’analyse des prélèvements d’urine pour 5 substances actives (asulame, métabolites de chlorprophame, prochloraze, tébuconazole et carbendazime). Les mesures ont été faites au moment des applications de pesticides (pendant 7 jours, en commençant le jour de l’application) et en dehors de ces périodes. La plupart des pesticides ont été retrouvés avec des concentrations plus importantes à moins de 250 m des champs de bulbes qu’à plus de 500 m, surtout à l’extérieur des habitations mais également à l’intérieur, et de façon plus marquée pendant les périodes d’application. Les niveaux de concentrations dans l’air étaient globalement plus importants dans les habitations des cultivateurs que dans celles d’autres riverains de champs de bulbes, les habitations des cultivateurs étant généralement plus proches des champs. Enfin, deux pesticides (chlorprophame et tébuconazole) ont été retrouvés chez plus de la moitié des participants (riverains des champs ou résidents des zones témoins), sans qu’il y ait de lien linéaire entre la distance aux champs et les concentrations urinaires.
En résumé, plusieurs études se sont intéressées à la contamination des lieux de vie par les pesticides à proximité de parcelles agricoles, en considérant les concentrations dans et à l’extérieur des habitations ou les concentrations urinaires des populations résidentes. Les résultats de ces études sont assez hétérogènes. Lorsque les périodes d’applications de pesticides ne sont pas prises en compte, il est difficile de faire le lien avec l’utilisation de pesticides sur les parcelles voisines. Plus récemment, quelques études ont été mises en place afin d’étudier plus précisément les variations de concentrations de pesticides à proximité de parcelles agricoles après application, en fonction de la distance et du temps. Ces études rapportent des concentrations plus importantes de pesticides pendant les périodes d’application sur les parcelles et une diminution en fonction de la distance. Comme cela est attendu, ces profils de variations dépendent des substances actives considérées et du type de mesure effectué (dans l’air, au sol, dans les urines des habitants).

Études utilisant des indicateurs indirects de l’exposition aux pesticides
pour caractériser le danger pour les populations riveraines

Depuis quelques années, les épidémiologistes se sont intéressés à la population riveraine de cultures en considérant la proximité de l’habitation aux champs agricoles comme un proxy de l’exposition aux pesticides. Les études dites « écologiques » visent à évaluer la corrélation spatiale entre un indicateur de santé (taux de mortalité, taux d’incidence ou de prévalence d’une maladie) mesuré dans des unités géographiques et un indicateur d’activité agricole défini pour ces mêmes unités (densité de fermes, surface en cultures, quantité de pesticides utilisée sur les cultures...). Les indicateurs d’activité agricole reposent principalement sur des bases de données agricoles locales ou nationales (voir addenda en fin de chapitre). En France, par exemple, les données du recensement général agricole ont été utilisées dans plusieurs études écologiques afin d’estimer la part de surface en culture dans les communes ou cantons, globalement et pour plusieurs grands types de cultures (céréales, oléagineux, arboriculture, viticulture, pommes de terre, légumes...). Cet indicateur d’activité agricole a été mis en relation avec plusieurs évènements de santé, notamment la croissance fœtale (Petit et coll., 2010renvoi vers), la maladie de Parkinson (Kab et coll., 2017renvoi vers) ou les leucémies aiguës de l’enfant (Coste et coll., 2020renvoi vers).
Des études cas-témoins se sont également intéressées à la présence de cultures à proximité des lieux de résidence des participants en s’appuyant sur la géolocalisation des adresses et en considérant des zones circulaires centrées sur ces adresses (buffer ou en français zone tampon), et de taille différente selon les études (rayon entre 100 m et 1 500 m principalement). Plusieurs types de données intégrés dans des systèmes d’information géographique sont utilisés afin de caractériser l’activité agricole dans les zones tampons : registre de parcelles agricoles, données d’occupation du sol provenant d’images satellitaires ou de vues aériennes, données de ventes ou d’utilisation de pesticides... Ces données permettent de déterminer la présence de cultures et d’estimer la surface en culture dans les zones tampons. Ces indicateurs indirects de l’exposition aux pesticides sont utilisés, par exemple, dans le projet Geocap Agri9 afin d’étudier le lien entre la présence de cultures et l’utilisation de pesticides agricoles à proximité du domicile, et la survenue de cancers chez les enfants. Les parcelles agricoles sont localisées à partir de plusieurs sources de données présentées plus en détail dans l’addenda en fin de chapitre (registre parcellaire graphique, base de données BD Topo de l’Institut géographique national, données satellitaires de Corine Land Cover...). Lorsque l’historique résidentiel des participants aux études cas-témoins est connu, il est également possible de calculer des scores cumulés d’exposition aux pesticides. Cette approche a été suivie dans l’étude cas-témoins CERENAT (Carles et coll., 2017renvoi vers) sur le risque de tumeurs cérébrales chez l’adulte dans 4 départements français (Gironde, Calvados, Manche et Hérault), dont les résultats sont détaillés dans le chapitre « Tumeurs du système nerveux central » de la présente expertise collective. Les données satellitaires de la base Corine Land Cover et les données communales du recensement général agricole ont été utilisées afin de définir plusieurs indicateurs de présence de cultures à proximité des lieux de résidence des participants, les adresses ayant été recueillies par questionnaire et géolocalisées : i) la distance à la culture la plus proche, ii) le pourcentage de surface en culture dans des zones tampons de 500 m de rayon, centrées sur les adresses de résidence, iii) la somme des surfaces en cultures dans les communes de résidence à partir des historiques résidentiels.
En plus de la distance aux cultures, des études ont pris en compte des paramètres qui peuvent influencer le transport des pesticides des parcelles agricoles vers des zones non traitées. Ainsi, une étude s’intéressant à la présence de symptômes respiratoires à l’âge de 7 ans chez les enfants de la cohorte CHAMACOS (enfants nés de familles latino-américaines de faible revenu vivant dans la vallée Salinas en Californie) a pris en compte la direction des vents la semaine qui suivait l’application de pesticides afin de mieux caractériser les niveaux d’exposition à 4 substances particulières dans des zones tampons de 3, 5 et 8 km (Gunier et coll., 2018renvoi vers). L’apport de cette variable et l’impact de sa prise en compte sur les résultats ne sont toutefois pas discutés. En France, dans le cadre du projet POPEYE (Exposition aux pesticides dans la cohorte mères-enfants ELFE et issues de grossesse), une équipe de recherche Irset-Inserm s’intéresse à l’exposition aux pesticides agricoles des femmes enceintes incluses dans la cohorte nationale ELFE, en considérant en particulier la proximité aux zones agricoles comme source d’exposition (projet en cours).
À l’heure actuelle, seules les études réalisées en Californie ont pu associer à la proximité des cultures des informations sur les usages de pesticides. En effet, depuis 1972, l’État de Californie possède un registre des pesticides utilisés sur les parcelles agricoles (pesticide use report, PUR), avec en particulier des informations précises sur la localisation de ces parcelles, les substances et les quantités utilisées, le type de culture et la surface traitée, la méthode et la date d’application. Les données sont présentées pour des sections de 1 mile2 soit environ 2,6 km2. Elles ont été utilisées dans plusieurs études écologiques réalisées à différentes échelles géographiques (county, census block, zip code) ainsi que dans plusieurs études cas-témoins s’appuyant sur la géolocalisation des adresses de résidence. Pour ces dernières études, les données de cette base ont été combinées dans un système d’information géographique avec les données des études d’occupation des sols, les Land Use Surveys (LUS), réalisées tous les 7-10 ans à l’échelle nationale, afin d’associer les données sur les quantités de pesticides provenant des PUR aux différentes parcelles agricoles. Des développements méthodologiques récents ont par ailleurs montré l’intérêt de prendre en compte également les données des satellites de la NASA et de l’institut américain de surveillance géologique (U.S. Geological Survey) pour identifier et caractériser les parcelles agricoles, notamment pour les années non couvertes par les LUS (VoPham et coll., 2015renvoi vers). Des travaux méthodologiques similaires sont en cours de développement dans plusieurs équipes de recherche françaises.

Précaution et limites de ces études

Les études écologiques et les études cas-témoins basées sur la géolocalisation des lieux de résidence présentent l’avantage de pouvoir être menées à grande échelle, et de couvrir ainsi une large population, et sont généralement moins coûteuses que les études cas-témoins dans lesquelles les informations sur les expositions sont recueillies par questionnaires et/ou prélèvements environnementaux ou biologiques. En revanche, les informations sur d’éventuels facteurs de confusion individuels sont généralement plus limitées dans ces études, ce qui peut être problématique si des facteurs individuels sont associés à la pathologie étudiée et à l’indicateur de présence de culture ou d’exposition aux pesticides agricoles considéré. La précision du géocodage des adresses de résidence est un point important également lorsqu’on s’intéresse à la proximité des cultures comme proxy de l’exposition aux pesticides agricoles, ou à tout autre facteur d’exposition qui varie de manière importante sur de courtes distances. Il a été montré, par exemple, que la précision du géocodage peut dépendre de la méthode utilisée (Faure et coll., 2017renvoi vers) et que, de manière générale, le géocodage est plus précis en zone urbaine qu’en zone rurale. Pour construire un indicateur d’exposition cumulée aux pesticides, ou évaluer une exposition ancienne, il est important également de disposer de l’historique complet des lieux de résidence des participants, ce qui peut être très compliqué pour les maladies avec une longue période de latence. Ces aspects ne sont pas toujours pris en compte dans les études et sont peu abordés dans les articles. De même, la précision de l’indicateur d’exposition (présence de culture ou quantité de pesticides utilisée) mérite d’être discutée (Chang et coll., 2014renvoi vers). En effet, dans les études de type géographique, les informations sur l’exposition proviennent souvent de bases de données qui ont été mises en place afin de répondre à des objectifs différents et parfois à des échelles géographiques différentes de celles considérées dans les études (par exemple, caractérisation du territoire à l’échelle européenne pour Corine Land Cover, déclaration des surfaces en cultures afin d’obtenir une aide financière dans le cadre de la politique agricole commune pour le registre parcellaire graphique). Ces bases de données sont souvent incomplètes et/ou peu précises. Elles sont réalisées avec des pas de temps parfois longs (10 ans pour les recensements agricoles en France), et ne remontent pour certaines qu’à quelques années (2007 pour le registre parcellaire graphique) ne permettant pas des analyses à la parcelle pour les expositions anciennes.
Pour pallier ce manque d’information historique, une équipe du centre Léon Bérard a développé récemment un algorithme afin d’automatiser l’interprétation de photos aériennes anciennes pour caractériser l’occupation du sol (Ratajczak et coll., 2019renvoi vers). Des données satellitaires historiques avaient également été utilisées par cette équipe pour l’étude TESTIS sur les tumeurs germinales du testicule (Béranger et coll., 2014renvoi vers).

Conclusion

Les données disponibles sur la contamination des différents compartiments de l’environnement (air, eaux, sols) en France indiquent une présence ubiquitaire de pesticides, que ce soient des substances actives ou leurs produits de dégradation. Il peut s’agir de pesticides autorisés au niveau européen ou interdits, y compris depuis plusieurs années car ayant une rémanence importante.
Les études qui mesurent les niveaux de pesticides ou de leurs métabolites dans les matrices biologiques humaines en population générale française montrent toutes une exposition répandue à de multiples substances.
Les origines actuelles ou passées de ces molécules sont multiples : utilisation dans le cadre agricole (pour les cultures, les animaux – y compris la pisciculture – ou les bâtiments d’élevage ou de stockage), entretien des infrastructures de transport (routes, chemins de fer, aéroports...), parcs publics et espaces verts, usages domestiques (jardins, antiparasitaires...). À noter que l’utilisation des produits phytopharmaceutiques de synthèse est interdite depuis 2017 pour les collectivités pour l’entretien des espaces verts et la voirie, et depuis 2019 pour les particuliers (potagers, jardins et plantes d’intérieur).
Depuis quelques années, la contamination des environnements intérieurs par les usages domestiques de pesticides ou par l’épandage de pesticides sur des surfaces proches des lieux de vie a concentré les efforts de recherche. Elles ont pu dans certains cas corréler la concentration de pesticides dans les poussières d’habitations à l’utilisation de pesticides au domicile ou dans des zones autour de la résidence, en fonction de la distance ou des périodes d’application des pesticides. Les résultats de ces études et l’utilisation de méthodes d’évaluation de l’exposition telles que les systèmes d’information géographique devraient permettre de progresser dans l’évaluation de l’exposition aux pesticides des personnes au sein même de leur domicile et l’estimation des risques pour la santé comme cela est illustré dans le cas de certaines pathologies (résultats présentés dans les chapitres correspondants).

Addenda : Principales sources de données disponibles
en France

Les principales sources de données actuellement disponibles en France, à l’échelle nationale, pour les études basées sur la géolocalisation des adresses de résidence et la construction de buffers autour de ces adresses à l’échelle nationale, sont :
• la base Corine Land Cover : données sur l’occupation du sol provenant d’images satellitaires, disponibles pour les années 1990, 2000, 2006, 2012, 2018 sur des polygones de 25 ha minimum ;
• le registre parcellaire graphique, qui rassemble les informations déclarées par les agriculteurs lors des demandes d’aide financière dans le cadre de la politique agricole commune. Ces données sont disponibles depuis 2007, à l’échelle des îlots de culture (avant 2015) ou des parcelles (depuis 2015) ;
• la base de données BD Topo de l’Institut géographique national qui permet de localiser les parcelles en vignes et vergers (sur une période autour de 2010-2015) ;
• le casier viticole informatisé géré par la Direction générale des douanes et droits indirects. Il fournit depuis 2016 des informations sur les parcelles en vignes à partir des déclarations de récoltes faites par les viticulteurs ;
• la banque nationale des ventes de produits phytopharmaceutiques par les distributeurs agréés (BNV-d) rassemble, depuis 2009, les informations sur les ventes de produits phytosanitaires que les distributeurs agréés déclarent annuellement aux agences et offices de l’eau dans le cadre de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques. Actuellement ces données sont disponibles à l’échelle de la commune (code postal du distributeur, et plus récemment de l’acheteur).
Ces données sont disponibles (mais difficilement accessibles parfois) pour différentes périodes avec des degrés de précision variables. Des réflexions sont en cours, en particulier à Santé publique France, pour combiner au mieux l’ensemble de ces informations dans un système d’information géographique afin de décrire finement l’espace agricole français et de localiser précisément les parcelles en culture.
Sur le modèle californien, l’utilisation de données satellitaires pourra certainement être envisagée à court terme pour identifier plus précisément les parcelles agricoles en France et pour prendre en compte les variations temporelles, notamment les rotations de cultures sur certaines parcelles. Les matrices cultures-pesticides, par exemple Matphyto mis en place par Santé publique France (Spinosi et Févotte, 2008) ou PESTIMAT de l’Inserm-Isped (Baldi et coll., 2017renvoi vers), permettent d’associer à différents types de cultures des informations sur les pesticides utilisés, en tenant compte de l’évolution temporelle des pratiques sur plusieurs dizaines d’années et des différences régionales. Comme cela été fait dans une étude récente en Caroline du Nord (Rappazzo et coll., 2019renvoi vers), ces matrices pourront être utilisées également pour estimer les quantités de pesticides appliquées à proximité des habitations.

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