Réduction des dommages associés à la consommation d’alcool
II. Actions de prévention des consommations
2021
10-
Efficacité des mesures visant
à restreindre l’offre et la demande
de boissons alcoolisées
Le prix d’un bien auquel fait face un consommateur n’est pas le seul facteur
déclencheur de son acte d’achat. Se greffent en effet à celui-ci des coûts
de recherche du dit-bien, des coûts d’obtention d’informations à son
encontre (Nelson, 1970

) et finalement, tous les coûts objectifs et psychologiques qui font que
l’acte d’achat est
per se un acte coûteux. Dit autrement, il existe
des coûts de transaction supportés par le consommateur dès l’instant où ce
dernier utilise le marché pour se procurer le bien en question (Coase,
1937

).
Pour les biens générant de potentielles externalités négatives lorsqu’ils
sont consommés et, en conséquence, dont le coût social peut être important
(cf. chapitre « Coût social de l’alcool en France et envergure économique du
secteur »), les pouvoirs publics ont la possibilité de mobiliser les
différents déterminants du coût d’achat pour en limiter la consommation.
Limiter l’attractivité, limiter l’accès, informer sur les risques à
consommer et les bénéfices à ne pas le faire, augmenter le prix grâce à un
système de taxation adéquat, contraindre l’offre à ne pas vendre à une
catégorie d’individus, font ainsi partie de la panoplie classique des outils
à disposition de l’acteur public soucieux de maximiser le bien-être
social.
Les politiques publiques qui visent à restreindre l’offre et la demande
d’alcool en vue d’en minimiser le coût social, s’insèrent évidemment dans ce
cadre d’analyse. Empêcher l’offre d’alcool de pouvoir pleinement s’exprimer
dans le temps et l’espace, en interdisant la vente à une classe d’individus
ou en limitant ses plages horaires, sont des actions qui théoriquement
visent à renchérir le coût d’obtention de l’alcool. Plus directement,
l’augmentation du prix des produits alcooliques du fait de la hausse des
taxes qui s’y rapportent est peut-être la mesure la plus évidente de
limitation à son accès.
Depuis la loi Évin de 1991, le dispositif législatif et réglementaire
français n’a cessé d’être étoffé de mesures limitant l’accès à l’alcool (et
dans le même temps défait de certaines mesures visant à restreindre son
attractivité). Sauf exception (Díaz Gómez et coll.,
2013

;
Gallopel-Morvan et coll., 2017

), aucune évaluation robuste n’a été menée sur les
impacts que l’interdiction de vente aux mineurs, la taxation des pré-mix ou
encore l’interdiction de vente d’alcool en certains temps et place, ont pu
avoir en termes de santé ou d’ordre publics. Et, il est tout aussi
regrettable qu’aucune mesure de sensibilité aux variations des prix des
boissons alcooliques n’ait été effectuée en France.
L’objet de ce chapitre sera alors d’examiner les expériences étrangères
récentes visant à limiter l’offre et la demande d’alcool les plus proches du
cadre réglementaire français et dont les évaluations ont fait l’objet de
publications scientifiques. Dans la mesure du possible, nous concentrerons
notre attention sur les expériences européennes avec l’idée que les
comportements de consommation et les cadres de régulation s’apparentent un
peu plus aux conduites et normes françaises. Nous n’exclurons cependant pas
les mesures extra-européennes significatives, ces dernières pouvant toujours
être inspirantes pour la santé publique française.
Dans un premier temps, nous traiterons des mesures qui contraignent l’offre
d’alcool. Entre autres choses, nous insisterons, à l’instar de ce que
propose la littérature scientifique de ces dernières années, sur l’impact
que peut avoir le nombre de lieux de vente sur un territoire donné mais
aussi sur l’importance des heures d’ouverture et de fermeture des débits de
boissons alcooliques. Après avoir mis en exergue les premiers bénéfices en
termes de santé publique que l’on peut retirer de la limitation des points
de vente et de la réduction des plages horaires de distribution, la
problématique de l’interdiction de vente aux mineurs à laquelle doit se
soumettre tout vendeur d’alcool sera abordée. À ce propos, il sera souligné
l’importance du respect de la loi et de ses déterminants.
Dans un second temps, la littérature scientifique mobilisée permettra de
mettre en relief la sensibilité des individus aux variations du prix de
l’alcool. En discriminant les populations en fonction de leur âge, de leur
dépendance à l’alcool ou encore de leur mode de consommation, nous
montrerons que les individus sont plutôt sensibles aux augmentations des
prix des boissons alcooliques (vin, bière, spiritueux), les amenant de ce
fait et en règle générale à limiter leur consommation suite aux hausses de
taxes. D’autres impacts seront mis en lumière, mais ce sont bien les effets
de substitution possibles entre les produits de l’alcool qui nous amèneront,
comme l’ont fait les pouvoirs publics écossais, à nous intéresser au
design fiscal le plus adéquat en termes de diminution des
consommations d’alcool. Un mécanisme fiscal de taxation au gramme d’alcool
pur ou l’imposition d’un prix minimum plutôt qu’un système complexe
distinguant les produits, les accises, les droits et les taxes apparaîtra
plus efficace dans l’atteinte d’un objectif de santé publique. Sur l’exemple
de la taxe « soda » désormais appliquée en France, nous montrerons la
faisabilité et l’intérêt d’un tel design fiscal pour les boissons
alcooliques en France.
Contraindre l’offre d’alcool
Il existe de nombreuses mesures visant à limiter l’attractivité et à
restreindre l’accès aux produits alcooliques en France. Avec la loi Évin
de 1991, la France a d’ailleurs été précurseur de telles mesures : en
limitant les possibilités de publicité et en restreignant les lieux et
heures de consommation, un objectif clair de santé publique était
établi. La littérature scientifique récente nous invite à nous focaliser
sur l’intérêt, pour la santé publique, de limiter non seulement le
nombre de points de vente de boissons alcooliques mais aussi leur
disponibilité potentielle. Combien, qui, quoi, quand et surtout à qui
vendre sont les questions structurant les politiques de gestion de
l’offre d’alcool, certes déjà considérées par l’appareil législatif
français.
Combien de débits
d’alcool ?
Le nombre de débits de boissons alcooliques à emporter ou à consommer
sur place implantés en un lieu donné n’est pas,
a priori,
laissé aux seules forces du marché en France. Pour ces derniers, il
se détermine d’une part, par la catégorie de boissons proposées à la
vente comme le rappelle le « Guide des Débits de Boissons » co-édité
par le Ministère de l’Intérieur et celui des Solidarité et de la
Santé (Ministère de l’intérieur,
2018

) et
d’autre part, par le marché des licences IV théoriquement
géographiquement borné mais souffrant de l’exception de potentiels
transferts vers des communes définies comme touristiques par
l’article L. 133-11 du Code du tourisme. En des termes plus simples,
le nombre de débits de boissons alcooliques va dépendre de la
caractérisation du débit de boissons – licence I, III ou IV (la II
ayant été rattachée à la III)
1
La réglementation française distingue des
groupes de boissons et des licences pour les détaillants de
ces boissons. Le groupe 1 est celui des boissons sans
alcool. Le 2 a été rassemblé au 3 pour inclure les boissons
fermentées et vins doux naturels (vin, bière, cidre, poiré,
crème de cassis...). Le groupe 4 se compose des rhums,
tafias, alcool provenant de la distillation des vins,
cidres, poirés... sous condition d’un grammage maximal de
sucre ou d’essence ajoutés. Le groupe 5 regroupe les autres
boissons alcooliques (boissons anisées, whisky, vodka,
gin...). La licence III ou 3e catégorie ou encore
la petite licence permet à son détenteur de vendre des
boissons du 1er et 3e groupe. La
licence IV ou 4e catégorie ou encore la grande
licence permet la vente de tous types de boissons. Les
licences I et II ont été supprimées respectivement en 2011
et 2015.
– et du nombre d’habitants de la commune, à moins
que celle-ci ne soit considérée comme touristique. Limité à 1 débit
de boissons alcooliques à consommer sur place (licences III et IV)
pour 450 habitants (mais 2 à partir du 451
e habitant)
sauf en cas de transfert de licence, il existe bon nombre d’autres
restrictions à l’ouverture ou à la présence de débits de boissons :
proximité avec des lieux de santé, d’écoles, d’entreprises de taille
importante, d’équipements sportifs, de caserne ou de prison... Il
est toutefois possible de voir ouvrir pour des événements
exceptionnels des débits de boissons temporaires comme pour des
manifestations agricoles ou sportives. La présence et le nombre de
débits de boissons apparaissent être extrêmement régulés en France,
cet encadrement est cependant poreux puisque présentant des
exceptions et des possibilités de dérogation en nombre
important.
Le site internet de l’Union des Métiers et des Industries de
l’Hôtellerie informe que le nombre de débits de boissons à consommer
sur place (café-bar) est globalement en diminution ces dernières
années, passant de 47 000 en 2005 à moins de 35 000 en 2014,
confirmant en cela une étude déjà datée de l’Insee (Le Ru et Niel,
2009

).
La possibilité de transfert régional des licences IV concédées en
2015 rend, à l’heure actuelle, difficile la localisation des débits
de boissons dotés d’une telle licence : en toute logique, elles
devraient se concentrer, ou en tous cas à terme migrer, dans les
zones touristiques au détriment des communes rurales en voie de
dépeuplement (Oliveau et Doignon,
2016

).
Relativement aux points de vente d’alcool à emporter (principalement
les magasins à vocation alimentaire mais aussi les caves à vin par
exemple), leur nombre progresse
2
. Les demandes d’obtention de licence pour la vente
d’alcool à emporter se font auprès des mairies et
in fine
auprès des préfets. Ce sont eux qui permettent aux différents
établissements (épiceries, supermarchés, caves à vin...) de vendre
tout type d’alcool (pour les groupes 4 et 5 des boissons
alcooliques) entre 8 h et 22 h. Une formation doit être suivie pour
vendre de l’alcool la nuit et est subordonnée à une autorisation du
maire. La vente d’alcool dans les stations-services est fortement
encadrée : ainsi, on ne peut y vendre que des boissons alcooliques
réfrigérées à emporter et la vente entre 18 h et 8 h est
interdite.
Entre autres et en bout de chaîne administrative, ce sont bien les
autorités locales qui ont compétence sur l’offre d’alcool dans leur
territoire. Le maire est un acteur majeur du nombre de débits de
boissons alcooliques à emporter et à consommer sur place puisque
c’est lui qui enregistre les demandes d’implantation sur le
territoire de la commune ainsi que le transfert des licences IV en
lien étroit avec le préfet du département récipiendaire (et du maire
de la commune récipiendaire elle aussi).
En Grande-Bretagne, l’obtention d’une autorisation d’ouverture d’un
débit de boissons alcooliques s’obtient également après saisine des
autorités locales. Le
Home Office Britannique, à travers le
Licensing Act de 2003, a d’ailleurs pourvu ces autorités
locales de la possibilité de la mise en œuvre d’un
Cumulative
Impact Policy (CIP). Le demandeur de licence doit se
présenter devant un conseil composé des parties prenantes locales
(habitants, policiers, détaillants, professionnels de santé...) afin
d’exposer et de défendre son projet d’entreprise et sa demande de
licence de vente d’alcool. Ces CIP ont eu comme premier impact de
modifier la sociologie des propriétaires et les types de débits de
boissons accrédités selon une étude récente – ce sont les individus
les mieux dotés en capital social et culturel, faisant preuve de
coopération, avec davantage de talent pour se présenter et « se
vendre », souhaitant plutôt ouvrir des restaurants ou des cafés
« artistiques » qui sont perçus comme en adéquation avec les
objectifs des comités CIP (Grace et coll.,
2016

).
Et, au contraire peut-être de l’esprit du
Licensing Act, ce
ne sont pas des objectifs de santé publique à destination des
consommateurs qui sont poursuivis par les comités de licence
(dépendance, dommages sociaux à domicile, inégalités de santé) mais
bien les dommages sociaux inhérents au mésusage d’alcool dans les
lieux publics. L’acteur local apparaît plus concerné par l’ordre
public immédiat que par la santé publique de long terme.
Ces deux objectifs vont toutefois plus ou moins de pair et les
impacts de la densité de l’offre d’alcool en un lieu donné
s’évaluent en fonction des taux de criminalité et de violence, de
blessés ou encore de dommages médicaux à travers des statistiques de
passages aux urgences ou de déplacement d’ambulances par exemple
(Campbell et coll., 2009

). Il n’en reste pas moins que le
Licensing Act de 2003 et l’implémentation des CIP en
Angleterre a au moins eu le mérite de faire baisser
significativement le nombre d’admissions à l’hôpital en lien avec
l’alcool dans les aires de mise en œuvre intense d’un tel contrôle
de l’offre d’alcool (Vocht et coll.,
2016

).
Au final, il est alors difficile de jauger de l’efficacité du
calibrage français du nombre de débits de boissons alcooliques par
tranche de population (450). Il est en revanche questionnable que la
décision d’autorisation d’implantation dépende des maires ou des
seuls préfets, même si théoriquement, les problématiques d’addiction
et de santé publique doivent motiver leur décision. La formule
anglaise des comités de licence et de CIP, même si elle est
imparfaite, apparaît intéressante puisque réunissant les avis et
intérêts des différentes parties prenantes, tenant peut-être un peu
plus compte des dommages sanitaires et sociaux que les seuls
avantages économiques directs. Dans ce cadre, le choix du
législateur français d’autoriser en 2015 les transferts régionaux de
licence IV vers les zones considérées comme touristiques a
certainement répondu à des impératifs économiques qu’il ne faut
certainement pas sous-estimer mais qu’il faudrait peut-être pondérer
par des préoccupations de santé publique immédiate (utilisation des
services d’urgence, criminalité violente, mobilisation des secours,
etc.) comme de long terme (baisse des consommations d’alcool). Ceci
mériterait sans nul doute d’être spécifiquement étudié en France.
Mais encore faudrait-il avoir des recensements nationaux des
transferts de licence IV et tout au moins, comme le plaident
certains (Holmes et coll., 2014b

), une étroite collaboration entre
chercheurs et décideurs publics, fussent-ils locaux.
Limiter les heures
d’ouverture ?
Les heures où il est possible de vendre des boissons alcooliques sont
limitées. Tout exploitant de débit de boissons à emporter
(supermarché, épicerie par exemple) qui veut vendre de l’alcool
entre 22 h et 8 h doit non seulement suivre une formation
spécifique, dispensée par un centre de formation agréé, afin
d’obtenir un permis de vente de boissons alcooliques de nuit mais
sera de plus contraint par des horaires définis par arrêté municipal
(Ministère de l’intérieur, 2018

). De la même façon, les établissements à
vocation nocturne (établissements de nuit ou bénéficiant d’une
autorisation préfectorale et les discothèques) se doivent d’arrêter
la vente d’alcool une heure trente avant leur heure de fermeture et
jusqu’à 5 h 30 au maximum, l’heure de fermeture de ces
établissements étant fixée à 7 h du matin
3
Les horaires de fermeture peuvent être affichés
à l’extérieur de l’établissement pour, entre autres,
permettre aux forces de police de contrôler le respect de
non vente d’alcool 1 h 30 avant la fermeture. Cet affichage
n’est cependant pas une obligation.
. Pour tous les débits d’alcool, les heures
d’ouverture et de fermeture sont fixées par arrêté préfectoral – les
maires pouvant eux-aussi établir des restrictions – et peuvent donc
différer d’une préfecture à une autre. Ainsi, à titre d’exemple,
dans le département du Rhône, l’heure d’ouverture des restaurants
est fixée à 5 h du matin tandis que l’heure de fermeture est à 1 h
(arrêté n
o 2012-1517 du 20 mars 2012), alors qu’à Paris,
le préfet de police établit l’heure limite d’ouverture également à
5 h mais l’heure limite de fermeture à 2 h (arrêté
n
o 2010-00396 du 10 juin 2010), soit une heure de
plus.
Ces limitations de vente d’alcool à emporter ou à consommer sur place
ont-elles un impact en termes de santé publique ? Ou, dit autrement,
peut-il exister une différence sur des indicateurs sanitaires
relatifs à la consommation d’alcool entre le département du Rhône et
Paris du fait de l’heure plus tardive de fermeture des restaurants
dans la capitale ? Si l’on en croit les plus récentes expériences et
évaluations de cette problématique dans différents pays européens,
la réponse tendrait à être positive.
Aux Pays-Bas par exemple et à Amsterdam plus précisément, il a été
décidé de l’extension des heures de fermeture des points de vente
d’alcool dans deux zones de vie nocturne sur les cinq qualifiées par
la municipalité. Cette dernière différencie les commerces en
fonction de leur période d’activité journalière. Il y a des
commerces de jour (
daytime), de soirée (
evening) et de
nuit (
night-time). Après le 1
er avril 2009, les
deux premiers ont vu leur heure de fermeture durant les jours de
semaine reculer d’une heure et passer respectivement à 2 h et 4 h et
à 5 h les vendredi et samedi soirs (les commerces de jour gagnant
deux heures de plus). En réalisant une étude avant-après contrôlée
des zones de vie nocturne n’ayant pas bénéficié de l’extension des
heures de fermetures, et en excluant les jours particuliers de fête
(jour de l’an,
Queens-Day, et la
Gay Pride). Il a été
montré que les interventions d’ambulance dans les quartiers
concernés par les extensions d’ouverture avaient significativement
augmenté après la mise en œuvre de la mesure. Ainsi les
interventions d’ambulance des soirées de week-end, entre 2 h et
5 h 59 concernant des hommes de 25 à 34 ans et transportés à
l’hôpital ont significativement augmenté dans les quartiers
concernés par rapport aux autres aires de vie nocturne. Reculer
d’une heure la fermeture des points de vente d’alcool a conduit à
une hausse de 34 % des interventions ambulancières pour blessures ou
problèmes liés à l’alcool (Goeij et coll.,
2015

).
En Allemagne, ce sont les points de vente d’alcool à emporter
(stations-services, épiceries, supermarchés) qui ont vu leurs heures
de vente d’alcool être drastiquement réduites dans le Land du
Baden-Württenberg le 1
er mars 2010. Avant cette date en
effet, il leur était théoriquement possible de vendre de l’alcool
24 h sur 24 puisqu’aucune restriction ne venait les frapper (en
particulier dans les stations-services) alors qu’après la mise en
œuvre de la mesure, la vente d’alcool n’était autorisée qu’entre
10 h et 17 h. En estimant un modèle économétrique en différences des
différences (test statistique entre un groupe test et un groupe
contrôle) qui cherche à évaluer l’impact de cette mesure sur les
taux d’hospitalisation enregistrés dans le Lander concerné par
rapport aux autres, une diminution significative de 7 % des
hospitalisations liées à l’alcool chez les adolescents et jeunes
adultes a été mise en relief (Marcus et Siedler,
2015

).
Une baisse sensible du nombre d’hospitalisations liées à des
agressions violentes a aussi été constatée.
Deux cantons suisses offrent également des exemples de l’intérêt de
réduire les plages horaires de vente d’alcool. Le canton de Genève
interdisait en 2005 la vente d’alcool à emporter entre 9 h et 19 h
et prohibait tout bonnement sa vente dans les stations-services et
les vidéos stores
4
Ce qui revient, pour la seconde mesure, à
réduire le nombre de points de vente.
. Toujours sur des données d’hospitalisation pour
intoxication alcoolique en considérant le canton de Genève comme
traitement et les autres cantons en contrôle, et en utilisant une
régression économétrique par série temporelle (ARIMA) sur la période
2002-2007, il est montré que l’impact de la mesure de restriction et
d’interdiction est significativement important. Le taux
d’hospitalisation pour intoxication alcoolique chez les adolescents
et jeunes adultes diminue fortement. En fonction des tranches d’âge,
cette baisse est comprise entre 25 et 40 % (Wicki et Gmel,
2011

).
Plus récemment, le 1
er juillet 2015, c’est le canton de
Vaud qui a restreint les possibilités de vente à emporter de bières
et de spiritueux. La vente de ces boissons alcooliques est ainsi
interdite après 21 h et tous les jours de la semaine, la ville de
Lausanne étant un peu plus restrictive en imposant dès 20 h
l’interdiction de vente. En utilisant des statistiques médicales des
hôpitaux du canton, soit pour un diagnostic d’intoxication
alcoolique soit pour un recueil de fréquentation du service des
urgences du Centre Hospitalier Universitaire du Canton de Vaud des
personnes présentant une alcoolémie élevée, les études montrent la
diminution de ces enregistrements et de ces fréquentations, en
particulier chez les jeunes et les jeunes adultes (Wicki et coll.,
2018

).
En Norvège, alors que la législation nationale autorise les ventes
d’alcool sur place jusque 3 h au maximum (le client pouvant quant à
lui consommer jusque 3 h 30), ce sont bien les municipalités qui,
sous respect de cette heure maximum, fixent les horaires de vente
d’alcool autorisées. Alors que certaines villes ont étendu cette
possibilité sur la décennie 2000-2010, d’autres, dans le même temps,
l’ont restreint, fournissant alors une expérience naturelle
permettant de tester l’impact de ces extensions-restrictions. En
étudiant les agressions violentes survenant entre 22 h et 5 h les
soirs de week-end, il a été montré, par séries temporelles (ARIMA)
sur 18 villes norvégiennes, que chaque extension additionnelle d’une
heure d’autorisation de vente d’alcool était associée à une
augmentation de 16 % des agressions violentes enregistrées par les
forces de l’ordre. Cet effet étant symétrique, il signifie qu’une
heure de moins d’autorisation d’ouverture des points de vente
d’alcool à consommer sur place diminue d’autant les taux
d’agressions violentes (Rossow et Norström,
2012

).
Un peu plus loin de la France, c’est aussi en Australie que l’on
trouve nombre de travaux s’attaquant à cette même problématique.
Loin des expériences naturelles de mesures politiques mises en
œuvre, même si des travaux les répertorient et les évaluent
positivement (White et coll., 2018

), ce sont des simulations fondées sur un
modèle théorique calibré sur des données de jeunes gros buveurs de
Melbourne qui démontrent tout l’intérêt des différentes politiques
de restriction de l’accès à l’alcool en fonction des heures
d’ouverture des commerces. Les modèles d’agents (
Agent-Based
Model) permettent d’une part, de dépasser les écueils des
expériences naturelles en simulant
ex ante les effets
potentiels des mesures – ce qui permet de ne pas attendre que la
mesure soit effectivement implémentée pour évaluer son effet – et
d’autre part, d’intégrer nombre de variables d’intérêt que les
expériences naturelles omettent ou ne peuvent tester ; l’impact des
heures d’ouverture des transports publics par exemple. Sur les
indicateurs de santé publique mais aussi de sécurité publique,
toutes les simulations de restriction des heures d’ouverture de
lieux de vente d’alcool (généralement une à deux heures en moins)
dans différentes villes australiennes montrent le bien-fondé de
telles mesures (Scott et coll.,
2016

;
Scott et coll., 2017

; Atkinson et coll.,
2018

).
Que cela soit empiriquement ou théoriquement,
ex post ou
ex
ante, les études confirment l’intérêt, sur des indicateurs
de santé et d’ordre publics (baisse des consommations d’alcool,
diminution des agressions violentes, baisse des alcoolémies
routières...), de restreindre les plages horaires de vente d’alcool,
que ce soit à emporter ou à consommer sur place (Wilkinson et coll.,
2016

).
En France, avec les horaires autorisés nationalement et laissés à la
discrétion des autorités locales, il existe un espace de prévention
des problèmes liés à l’alcool si ceux-ci se font localement
ressentir. Espace de prévention dont les autorités locales auraient
tout intérêt à se saisir puisque les pertes économiques liées aux
restrictions d’horaires ne semblent pas aussi importantes que cela,
faisant de ces mesures, des mesures potentiellement efficientes et
coût-efficaces (Wicki et coll.,
2018

;
Scott et coll., 2017

).
Une interdiction de vente aux mineurs implémentée et
implémentable ?
Alors que depuis 1960, le Code des débits de boissons et des mesures
contre l’alcoolisme, en son article L. 80, précisait les modalités
de vente des différents alcools à des mineurs de plus de 14 ou de
16 ans, ce n’est qu’en 1991 qu’il était décidé de normaliser les
interdictions de vente et de don de tout alcool aux mineurs de moins
de 16 ans. Et c’est depuis 2009 que le Code de la santé publique, à
l’article L. 3342-1, stipule que « la vente des boissons alcooliques
à des mineurs est interdite. L’offre de ces boissons à titre gratuit
à des mineurs est également interdite dans les débits de boissons et
tous commerces ou lieux publics. La personne qui délivre la boisson
peut exiger du client qu’il établisse la preuve de sa majorité ».
Depuis 2016, il est par ailleurs précisé que « l’offre, à titre
gratuit ou onéreux, à un mineur de tout objet incitant directement à
la consommation excessive d’alcool est également interdite ». La loi
Hôpital, patients, santé et territoire du 21 juillet 2009 (HPST) et
celle de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016
ont ainsi durci les conditions de vente et d’offre des boissons
alcooliques en augmentant l’âge légal d’accès à l’alcool.
Les bénéfices à limiter les consommations d’alcool des plus jeunes
sont aujourd’hui clairement documentés. Des limites d’âge élevées
sont associées à une plus faible accidentologie routière, à de plus
faibles consommations d’alcool et à de moindres conséquences
négatives de l’usage d’alcool chez les adolescents et jeunes adultes
(Wagenaar et Toomey, 2002

; DeJong et Blanchette,
2014a

).
Des recherches tendent à montrer également les bénéfices sanitaires
de long terme que produirait de telles interdictions (Plunk et
coll., 2016

). Les preuves scientifiques de l’intérêt des limites d’âge
élevées en matière d’accès à l’alcool sont donc aujourd’hui
indubitables (DeJong et Blanchette,
2014b

)
et en ce sens, l’augmentation progressive de l’âge légal d’accès à
l’alcool en France apparaît judicieuse
5
À noter toutefois que ces preuves scientifiques
se fondent le plus souvent sur l’âge de la majorité des pays
anglo-saxons, à savoir 21 ans.
.
Malgré cela, lorsque l’on s’attarde sur les niveaux de prévalence et
de consommation des jeunes français, on ne peut être qu’étonné que
8,2 % des collégiens des classes de 6
e concèdent au moins
un épisode mensuel de consommation d’alcool ou que presque 1 lycéen
sur 4 en classe de terminale déclare une consommation régulière
voire quotidienne d’alcool en 2018 (Spilka et coll.,
2019

).
Les consommations d’alcool s’installent durant l’adolescence malgré
les récentes mesures législatives. Et, à l’instar des problématiques
nord-américaines (Harding et coll.,
2016

),
ce sont bien, en plus de celles de dénormalisation de l’usage
d’alcool, des questions de mises en œuvre et de respect de la loi
qui se posent. Ainsi en 2012, soit 3 ans après la loi HPST
interdisant la vente d’alcool aux mineurs, un débitant d’alcool sur
trois déclarait ne jamais faire usage de son droit à demander une
pièce d’identité, et seule la moitié des débitants enquêtés
affirmait le faire en cas de doute sur l’âge du client (Díaz Gómez
et coll., 2013

). Plus précisément, alors que les grandes surfaces et les petits
commerces de détail (épiceries et stations-services) utilisaient de
plus en plus leur prérogative à demander une pièce d’identité, ce
sont les cafés et les bars qui le faisaient le moins, et il était
souligné la plus grande difficulté à respecter la loi par la
sous-catégorie des bars-tabacs. Cette même année, dans leur
quasi-majorité, les commerçants ne rapportaient aucun contrôle des
autorités relativement à la vente d’alcool aux mineurs (Karsenty,
2015

).
En 2017, 91 % des jeunes de 17 ans ayant consommé de l’alcool durant
le mois écoulé déclaraient s’être procuré des boissons alcoolisées
en magasin et 77,5 % en avoir consommé dans un débit de boissons. La
majorité d’entre eux ajoutait ne pas avoir eu besoin de présenter
une carte d’identité pour justifier de leur âge (Spilka et coll.,
2018

).
Ces résultats sont plus ou moins similaires à ceux antérieurement
obtenus aux Pays-Bas. Dans ce pays, la vente d’alcool est interdite
aux mineurs de moins de 16 ans et en particulier, les boissons
contenant plus de 15 % d’alcool sont interdites aux moins de 18 ans.
Par des enquêtes « clients-mystères » dans les points de vente
représentatifs des débits d’alcool, il a été constaté une
augmentation des demandes de pièce d’identité de la part des débits
d’alcool entre 2011 et 2013 suite à une attention accrue des médias
et du monde politique sur les questions d’accès à l’alcool de la
part des mineurs (van Hoof et coll.,
2015

).
Plus précisément, alors que la demande de pièce d’identité passait
de 43,9 % en 2011 à 54,1 % en 2013, ce sont les supermarchés ainsi
que les magasins de vente de spiritueux (
liquor stores) qui
respectaient le plus la loi (à plus de 74 %) alors que les
restaurants à emporter, les bars, les bars sportifs faisaient
nettement moins bien et que les services de livraison d’alcool à
domicile n’effectuaient, quant à eux, aucune vérification.
Afin d’améliorer le respect de la loi et face à la médiatisation du
problème de l’accès des jeunes à l’alcool, l’industrie de détail
néerlandaise a mis en place des formations pour les vendeurs et les
a équipés d’outils de vérification de l’âge du client. Grâce aux
données recueillies par un système de vérification d’âge à distance
installé dans 67 boutiques d’alcool, il a été calculé qu’en moyenne,
1,12 tentative d’achat d’alcool par des mineurs était évitée par
jour et par boutique. Soit, en extrapolant à l’ensemble du
territoire néerlandais, un million de tentatives d’achat d’alcool
par des mineurs dans les seules boutiques d’alcool (
liquor
stores) seraient annuellement évitées grâce aux mesures
mises en œuvre pour se conformer à la loi (van Hoof et van
Velthoven, 2015

).
Alors que ces taux de conformité de la part des vendeurs d’alcool
vont en s’améliorant aux Pays-Bas, en particulier dans les
bars-cafés-discothèques et les bars sportifs mais encore peu pour
les services de livraison à domicile (Schelleman-Offermans et coll.,
2017

),
c’est la question de l’efficacité relative des outils de
vérification d’âge qui se pose désormais. Opposant dans une étude
« clients-mystères », deux systèmes de vérification d’âge, à savoir
un lecteur de carte d’identité et un système à distance de
vérification d’âge, par comparaison à un groupe témoin sans aucun
système, il a été montré que le système de vérification d’âge à
distance était le plus efficace en amenant le vendeur à vérifier
plus souvent l’âge du client (87 % des fois) (van Hoof,
2017

).
Même si l’intérêt d’autres systèmes de vérification d’âge a été
établi par ailleurs aussi bien pour l’alcool que pour le tabac
(Roodbeen et coll., 2016

), il semblerait que les systèmes de
vérification d’âge à distance présentent différents intérêts.
Premièrement, ils bloquent la caisse enregistreuse si l’individu est
mineur. Deuxièmement, les agents à distance chargés de vérifier
l’âge des clients ne font que cette tâche et sont donc spécialisés.
Troisièmement, ils ne sont pas confrontés aux clients rendant
certainement leur tâche plus aisée (van Hoof,
2017

)
6
Ceci est efficace sous réserve que des majeurs
n’achètent pas d’alcool à la place et pour des mineurs
(Roodbeen et coll., 2016

).
.
Des travaux éclairent sur l’implémentation ou plutôt sur
l’implémentabilité d’une mesure politique importante (Mulder et
Greeff, 2013

). Non seulement la sanction à l’encontre du vendeur doit être
dissuasive mais les contrôles doivent aussi être réalisés. Aux
Pays-Bas, ces contrôles s’opèrent selon une procédure en trois
étapes. Elle commence par une recherche exploratoire des lieux où
l’alcool est servi à une clientèle jeune. Puis, une pré-inspection
incognito (
undercover) est faite par des agents de police
pour finalement qu’une inspection réelle se fasse en temps et lieu
où des infractions sont commises et constatées. Dans d’autres pays
européens, une communication à destination des professionnels, à
travers différents canaux médiatiques, est faite sur de probables
inspections ; l’idée étant que les concernés surestiment leur
probabilité d’être contrôlé et qu’ainsi la mesure d’interdiction
soit plus amplement respectée. Finalement, la concertation entre les
parties prenantes de telles mesures semble le moyen le plus efficace
pour que rentrent en vigueur de telles interdictions de vente
d’alcool.
En attendant une normalisation des interdictions de vente, les
pouvoirs publics peuvent disposer de l’outil fiscal qui se
révélerait être, en étant adéquatement utilisé, un levier efficace
de contrôle des consommations d’alcool.
Limiter la demande grâce à une fiscalité
adaptée
Il ne s’agit pas de taxer les produits alcooliques afin d’engranger de
seules recettes fiscales. Il s’agit en revanche de faire diminuer les
consommations en vue de réduire le coût social de l’alcool. Ceci
présuppose plusieurs choses. La première est que les individus soient
effectivement sensibles aux variations de taxes, c’est-à-dire que
lorsque celles-ci font augmenter le prix des produits alcooliques, les
consommateurs diminuent leur consommation. La deuxième est de savoir qui
est le plus sensible à ces variations de taxes : sont-ce les plus jeunes
ou encore les gros buveurs ou au contraire les consommateurs
« modérés » ? Cette question est importante puisqu’en fonction de la
catégorie d’usagers les plus sensibles, c’est de l’efficacité de la
mesure dont il est question. Si les gros buveurs ne modifient pas leur
consommation après une augmentation des taxes, le niveau des dommages
sociaux attachés à leur consommation ne sera pas modifié – voire il peut
augmenter – et en plus, les dépenses en alcool des usagers non
problématiques peuvent croître, détournant inutilement des ressources
d’autres secteurs de l’économie. Finalement, la question de potentiels
effets de substitution entre les produits alcooliques est aussi
importante. Si cette possibilité existe, est-ce que les consommateurs se
déportent vers des marques et des produits meilleur marché lorsque les
taxes augmentent ? Si oui, existe-t-il un mécanisme fiscal ou un mode de
tarification qui limiterait ces possibilités de substitution ?
Sensibilité de la demande d’alcool aux variations de
taxes et de prix
Au meilleur de notre connaissance, il n’existe pas d’estimation
d’élasticité prix de la demande d’alcool en France. La seule
estimation disponible inclut le tabac et repose sur l’enquête
« budget de familles » de 2001 de l’Insee. Elle établit l’élasticité
prix de la demande de tabac et d’alcool à -0,52, signifiant en cela
que lorsque le prix de l’alcool et du tabac (conjointement) augmente
de 10 %, les dépenses des ménages français pour ces produits
diminuent de 5,2 % (Ruiz et Trannoy, 2008

). Même si on ne peut se
satisfaire de cette seule estimation, il est plutôt intéressant de
noter qu’elle se trouve dans la fourchette des estimations
internationales d’élasticité prix de la demande d’alcool. En
l’occurrence, deux estimations, l’une à la médiane, l’autre à la
moyenne, issues de méta-analyses de plus de 1 000 estimations
antérieures font aujourd’hui référence et établissent respectivement
l’élasticité prix de la demande d’alcool à -0,535 et à -0,44
(Gallet, 2007

; Wagenaar et coll., 2009

). De ces mêmes méta-analyses détaillant
les élasticités par type de produits, il ressort que l’élasticité
prix de la bière est moins élevée que celle du vin ou des
spiritueux. Les deux études font ainsi état d’une élasticité
comprise entre -0,46 et -0,83 pour la bière, entre -0,69 et -1,11
pour le vin et -0,80 et -1,09 pour les spiritueux.
Ces estimations importent : elles établissent le fait que les
consommateurs d’alcool sont sensibles aux variations de prix et que,
de ce fait, les pouvoirs publics ont le pouvoir d’infléchir les
consommations grâce à l’outil fiscal même si certains en doutent et
minimisent plutôt cet impact (Nelson,
2014

)
7
Jon P. Nelson est professeur d’économie dans
une université de Pennsylvanie (
PennState College of the
Liberal Arts). Ses travaux par ailleurs publiés dans
d’excellentes revues scientifiques remettent fréquemment en
question les résultats de la littérature (Nelson et McNall,
2016

et
2017

). Même si des controverses
existent du fait de ses liens d’intérêt très marqués avec
l’industrie de l’alcool (Nelson,
2016

; Xuan et coll.,
2016

) puisqu’il travaille pour le IARD
(
International Alliance for Responsible
Drinking), un lobby alcoolier vantant les mérites de la
consommation responsable d’alcool, ses travaux sont toujours
inclus dans les méta-analyses établissant les élasticités
prix de la demande d’alcool.
. Cependant, afin de calibrer au mieux cette mesure
politique, de plus amples informations sur la réaction des
consommateurs en fonction de leurs caractéristiques individuelles
sont nécessaires.
Les jeunes
L’élasticité prix de la demande se compose de deux élasticités :
celle de participation et celle de demande conditionnelle. La
première mesure la sensibilité d’une demande qui ne s’est pas
encore exprimée ; elle établit à partir de quelles variations de
prix, les individus vont commencer ou non à consommer le
dit-bien. Celle de demande conditionnelle concerne la
sensibilité d’individus qui ont déjà commencé à consommer le
bien en question. À titre d’illustration de ces concepts, soyons
convaincus que ce n’est pas parce que le prix de l’héroïne
baisse fortement que de nombreux nouveaux consommateurs vont
s’adonner à son usage (élasticité de participation) ; en
revanche, si son prix diminue de manière importante, on peut
s’attendre à ce que les consommateurs actuels en fassent une
consommation accrue (élasticité de demande conditionnelle).
En matière d’alcool, les estimations d’élasticité de
participation à l’alcool sont plutôt rares. Il faut en effet
avoir des populations principalement abstinentes pour pouvoir
apprécier l’impact d’une baisse du prix de l’alcool sur les
incitations à consommer ou non. C’est le cas en Thaïlande : 70 %
des collégiens-lycéens et 82 % des collégiennes-lycéennes
(
Secondary School Students) déclarent ne jamais avoir
consommé d’alcool. En France, ces pourcentages sont inverses :
en terminale, presque 9 lycéens sur 10 disent avoir consommé au
moins une fois de l’alcool durant leur vie (Spilka et coll.,
2018

). Il n’est ainsi pas étonnant de retrouver une sensibilité de
participation à l’alcool significative en Thaïlande (Sornpaisarn
et coll., 2015b

) alors que celle-ci est très
difficilement voire impossible à estimer en France. C’est pour
ces raisons que différents travaux nord-américains ont
investigué le lien entre expérimentation de l’usage d’alcool et
influence des pairs. L’idée de ces travaux repose sur le fait
que le prix des produits alcooliques ne doit que peu déterminer
la consommation d’alcool des jeunes, au contraire de l’influence
des amis et des proches. Ainsi, à partir d’un sous-échantillon
de moins de 3 000 individus d’une enquête nationale
représentative de 90 000 collégiens et de lycéens d’écoles
américaines (de la 5
e à la terminale) datant de
1994-1995, une étude établit clairement l’influence des pairs
dans l’initiation à la consommation d’alcool. Les pairs n’ont
cependant pas d’impact explicatif sur la fréquence de
consommation déclarée ni même sur les comportements de
binge
drinking (pour davantage d’information sur les facteurs
de risque de la consommation d’alcool, cf. chapitre
« Épidémiologie des consommations d’alcool : données
récentes »). Selon la même étude, le fait d’avoir des parents
mariés a un effet protecteur aussi bien dans l’initiation que
dans la fréquence de consommation ou d’imprégnation alcoolique
intensive et, dans toutes les régressions économétriques
effectuées, le prix de l’alcool (celui de la bière ou un indice
composite) n’est jamais significatif (Ajilore et coll.,
2016

).
Encore une fois, la sensibilité des plus jeunes au prix de
l’alcool n’est certainement pas un levier explicatif de la
consommation et en particulier chez les jeunes gros buveurs :
les prix de certains produits sont certainement trop bas pour
être, même une fois augmentés par un surcroît de taxes,
désincitatifs à l’achat (Wall et coll.,
2017

). En revanche, l’influence des pairs et la situation
familiale des jeunes rendraient en partie compte des
comportements de consommation. Avoir des amis qui consomment
explique la consommation mais pas l’usage régulier ni les
alcoolisations ponctuelles importantes (API) ; avoir des parents
mariés diminue l’intensité des fréquences de consommation et
d’API.
Les variations de prix du fait de l’augmentation des taxes ne
semblent donc pas avoir beaucoup d’emprise chez les jeunes. Et
même lorsqu’une taxe supplémentaire est imposée sur un type de
boissons alcooliques ciblant spécifiquement les jeunes
consommateurs, comme les pré-mix (
alcopops ou
ready-to-drink), certains indicateurs de santé
publique (visites dans les services d’urgence) fléchissent
quelque peu sur des tranches d’âge adolescents et jeunes adultes
(Lensvelt et coll., 2016

), mais rien de vraiment impactant
n’est mis en relief (Kisely et Lawrence,
2016

), tout au moins dans ces travaux australiens.
Les stratégies de contournement des augmentations de taxes mises
en œuvre par les jeunes semblent donc efficaces. Une enquête
représentative auprès de plus de 1 000 néo-zélandais âgés de 16
à 19 ans les interrogeant sur leurs habitudes et comportements
d’achat et de consommation d’alcool est éclairante à ce sujet.
Répartis en fonction de leur déclaration de consommation soit
dans un groupe de faibles buveurs, de buveurs moyens ou au
contraire de gros buveurs, il ressort que les dépenses engagées
pour assouvir leur consommation est inversement proportionnelle
à leur intensité d’usage. Plus précisément, il a été calculé que
le coût pour 15 ml d’alcool pur achetés par le premier groupe
était pour des achats à emporter (à consommer sur place) de
2,00 $NZ (7,57 $NZ), de 1,88 $NZ (6,96 $NZ) pour le second
groupe et finalement de 1,73 $NZ (6,61 $NZ) pour le groupe des
gros buveurs (Wall et coll.,
2017

). Les plus gros buveurs paient donc moins cher leur alcool
que les buveurs moyens, eux-mêmes payant moins cher que les
faibles buveurs. Il est de plus montré que les gros buveurs sont
les plus gros consommateurs de
ready-to-drink avec de
hauts titrages alcooliques ; les faibles buveurs consommant
proportionnellement plus de vin.
Les jeunes consommateurs intensifs mettent en place des
stratégies de minimisation des dépenses pour un rendement
maximum de la molécule d’éthanol : ils semblent ainsi raisonner
au prix payé par gramme d’alcool pur. Les individus dépendants
ou dont la consommation est à risque élevé présentent-ils la
même stratégie et la même insensibilité au prix de
l’alcool ?
Les buveurs intensifs
Le sujet est tout aussi important que celui concernant les
jeunes. Les individus consommateurs modérés ou à faibles risques
d’alcool sont sensibles aux augmentations de taxes, signifiant
en cela que la politique de taxation des produits alcooliques
est une politique de santé publique puisque faisant baisser le
niveau moyen de consommation en population générale. Si
d’aventures, les buveurs intensifs, à risques élevés, dépendants
à l’alcool sont aussi sensibles aux variations de prix, alors la
politique de taxation prendrait un tout autre élan en
permettant, en quelque sorte, de « soigner » et non plus
uniquement de prévenir. Les travaux concernant les drogues
illicites concluent sur une sensibilité accrue des consommateurs
intensifs et dépendants au prix de leurs substances
psychoactives, que cela soit pour le cannabis, la cocaïne, la
méthamphétamine ou encore l’héroïne (Rhodes et coll.,
2000

; Kisely et Lawrence, 2016

). Concernant l’alcool, une récente
étude australienne présente des conclusions similaires (Byrnes
et coll., 2016

). Mobilisant une enquête réunissant
plus de 79 000 individus de 14 ans et plus ayant complété un
questionnaire sur leurs comportements, leurs attitudes et leurs
perceptions des drogues en 2001, 2004 et 2007 où il leur était
demandé d’indiquer leur fréquence de consommation d’alcool et
durant un épisode standard, quelle était la quantité consommée,
les répondants ont pu être répartis en quantiles en fonction de
leur usage d’alcool. Les régressions économétriques font état
que les 10 % des individus les moins consommateurs d’alcool sont
insensibles aux variations de prix tandis que plus on progresse
dans les quantiles d’usage, plus cette élasticité prix devient
importante en valeur absolue, à un rythme décroissant néanmoins.
Ceci signifierait que plus on consomme de l’alcool plus on est
sensible aux variations des prix, les 10 % les plus
consommateurs présentant une élasticité supérieure à 1 en valeur
absolue. Il serait alors tentant de conclure que comme les très
grands consommateurs d’alcool sont plus sensibles aux variations
de prix que les autres individus, toute politique d’augmentation
des taxes invite tous les usagers d’alcool à diminuer leur
consommation et ainsi à réduire les risques attribuables à
l’alcool. Mais, comme le soulignent les auteurs de l’étude, une
lacune importante du travail menée consiste en l’omission de la
qualité des produits ingérés et ainsi de la non prise en compte
d’éventuels effets de substitution entre les produits
alcooliques ; effets de substitution qui pourraient contrecarrer
l’effet des augmentations de prix.
C’est clairement ce que fait ressortir une étude britannique
(Pryce et coll., 2018

). Fondée sur une enquête annuelle
représentative des ménages entre 2001 et 2013, interrogeant les
comportements de dépenses alimentaires en mêlant entretiens
auprès des ménages et restitutions d’un journal d’enregistrement
(
diary) des dépenses sur 15 jours, les achats
d’alcool étant notés selon 25 types de produits possibles, en
millilitres dont la consommation s’est faite soit au domicile,
soit dans un débit de boisson (bar, restaurant). Plus de 54 000
enregistrements sont ainsi exploitables pour mesurer la
sensibilité au prix des produits alcooliques des ménages
britanniques sur la période considérée. Les dépenses en alcool
ont été traduites en unité d’éthanol et les ménages ont été
répartis en quintile en fonction de leur consommation. La
qualité supposée des produits consommés étant dérivée du prix
payé par unité d’alcool, les auteurs montrent que les faibles
buveurs présentent une dépense par unité d’alcool nettement
supérieure aux buveurs plus intensifs (presque deux fois plus
importante, pour une quantité consommée entre 10 et 30 fois
moins importante). Les résultats des régressions économétriques
viennent contredire les derniers travaux en la matière : les
buveurs intensifs sont moins sensibles aux variations de prix
que les buveurs modérés. Les 25 % des ménages les plus
consommateurs ont une élasticité prix estimée à -0,346 tandis
que les 25 % les moins usagers de -0,709. Si on s’attarde sur
les 5 % les plus gros consommateurs, l’élasticité prix serait de
-0,176. Globalement, les individus seraient plus sensibles au
prix des produits issus de la vente à emporter même si cela
serait le contraire pour les 5 % les plus consommateurs, étant
pour leur part plus sensibles aux prix des boissons à consommer
sur place. Surtout, il ressort, comme le soulignent les auteurs,
que les gros buveurs répondent aux augmentations des prix en
substituant les produits en fonction de leur prix (voir
également Hobday et coll., 2016

). Ainsi, ils se dirigent
tendanciellement vers des dépenses maximisant les unités
d’alcool par prix payé soit en achetant plus souvent à emporter
qu’à consommer sur place, soit en achetant des marques d’alcool
moins cher. De ce fait, en l’état du mécanisme fiscal des
boissons alcooliques, ils rendent, tout au moins pour eux,
caduque et inefficace une politique de santé publique fondée sur
les augmentations de taxes.
À la lecture de ces résultats, certains pourraient crier à
l’injustice sociale et conclure sur l’ineffectivité totale des
politiques d’augmentation des taxes (Nelson,
2014

; Nelson, 2015

). Ceci mérite pourtant d’être
relativisé.
Certes, augmenter les taxes sur les produits alcooliques alors
même que les buveurs intensifs voire dépendants continuent d’en
acheter peut s’apparenter à l’imposition d’une taxe régressive,
c’est-à-dire frappant les plus vulnérables et peut-être les
moins fortunés d’entre nous. Néanmoins, tous les individus
vulnérables et les moins fortunés ne sont évidemment pas des
buveurs intensifs. Certains, en conséquence, verront leur état
de santé s’améliorer du fait de la politique d’augmentation des
taxes. Aussi, l’objectif des pouvoirs publics n’est clairement
pas de taxer les pauvres ou de générer des recettes fiscales,
l’objectif est bien de santé publique : les gains générés devant
être mis en regard des pertes supportées par certaines
catégories d’individus. Finalement, il ne faut pas omettre le
fait qu’une partie des recettes fiscales est à destination des
plus vulnérables et des moins aisés grâce aux systèmes de
protection sociale et qu’ainsi, il existe des effets
redistributifs dont il faudrait tenir compte pour jauger
globalement de la supposée régressivité des taxes sur les
produits alcooliques (Sassi et coll.,
2018

).
Que certaines catégories de population soient nettement moins
sensibles que d’autres aux augmentations de prix ne disqualifie
certainement pas l’outil fiscal en tant que politique de santé
publique. Cela implique tout au plus de conduire de plus amples
recherches, entre autres, sur la façon dont l’industrie de
l’alcool favorise les effets de substitution entre les produits
d’une part, et sur la façon dont les mécanismes et
designs fiscaux pourraient les limiter d’autre part
(Sharma et coll., 2017

; Pryce et coll.,
2018

). Aujourd’hui, quelques travaux commencent à éclairer cette
dernière problématique.
Quel design fiscal ?
Comme recensé par l’Organisation mondiale de la santé (
World
Health Organization, 2010

), il existe cinq principaux modes de
taxation des produits du tabac qui peuvent également s’appliquer aux
boissons alcooliques (Sornpaisarn et coll.,
2015a

).
Les accises
8
Les accises sont des impôts indirects perçus
sur la consommation. L’accise porte sur une quantité et non
sur une valeur.
spécifiques (mode 1), dont la base de taxation sont
les quantités (par exemple l’hectolitre) et les accises
ad
valorem (mode 2) s’appuient sur la valeur du produit (au
détail, en gros ou au coût de production) représentent les deux
premiers modes de taxation. Ils sont qualifiés d’« uniformes »
puisque ne mettant en jeu qu’un seul type de mécanisme de
taxation.
Dans le cas des accises ad valorem avec plancher d’accise
spécifique (mode 3), l’accise est calculée ad valorem mais si
le montant de taxe chiffré se trouve en deçà d’un certain plancher,
c’est un taux d’accise spécifique qui s’applique. Les deux autres
modes restants sont aussi des combinaisons. On peut retrouver des
accises mixant taxes spécifiques et taxes ad valorem (mode 4)
ou encore une combinaison spécifique/ad valorem avec plancher
d’accise spécifique (mode 5).
Ces catégorisations d’accises aident à la lecture des régimes fiscaux
des boissons alcooliques, les détails sont cependant plus difficiles
à apprécier.
Régime fiscal des boissons alcooliques en
France
Le système français de taxation des boissons alcooliques est
sophistiqué (tableau 10.I

: Fiscalité applicable aux boissons alcooliques au
1
er janvier 2019). Il applique, outre la Taxe sur
la Valeur Ajoutée (TVA), de façon différenciée entre les
produits (vins, bières, produits intermédiaires et alcools
titrant plus de 22 %), des droits de circulation, des droits
spécifiques ou droits de consommation et des cotisations de
sécurité sociale. À cette hétérogénéité d’imposition des accises
vient se greffer une difficulté supplémentaire. Parfois les
droits s’appliquent sur les quantités mesurées en hectolitre en
fonction de leur Titre Alcoométrique Volumique (TAV) (pour les
bières) ou non (pour les vins, vins mousseux, cidres et poirés
et autres hydromels), parfois sur les quantités et la qualité
mesurées en hectolitre d’alcool pur pour les produits
intermédiaires et les alcools avec un TAV supérieur à 22 %. Il
mêle, si l’on tient compte de la TVA, accise
ad valorem
et accise spécifique (mode 3) mais si l’on omet cette première,
il peut être entendu que le régime fiscal sur les produits
alcooliques en France ne se compose que d’accises spécifiques
(mode 1).
Des exceptions notables viennent encore un peu plus brouiller la
lecture du régime
9
Le Code Général des Impôts en son
article 1613 bis établit une cotisation de sécurité
sociale supplémentaire pour les premix, mélanges
d’alcool et de soda, de 11 € par décilitre d’alcool pur
non reproduite ici.
. L’origine géographique des boissons est ainsi
un élément de discrimination des montants de droit spécifique
puisque les rhums des départements d’Outre-mer bénéficient d’une
moindre imposition que les autres. Également, la taille de
l’entreprise productrice de bière importe puisque les brasseries
indépendantes ayant une production inférieure à 200 000
hectolitres par an sont imposées de droits spécifiques et de
cotisations de sécurité sociale
a minima.
Tableau 10.I Fiscalité applicable aux boissons alcooliques au
1er janvier 2019
|
Droit de circulation
|
Droit spécifique ou droit de
consommation
|
Cotisation sécurité sociale
|
TVA
|
Vins, vins mousseux, cidres, poirés et
hydromels, boissons fermentées autres que le vin
et la bière
|
Vins tranquilles : 3,83 €/hl Vins
mousseux : 9,44 €/hl Cidres, poirés,
hydromels : 1,34 €/hl Boissons fermentées
autres que le vin et la bière :
3,82 €/hl
|
Aucun
|
Aucune
|
20 %
|
Bières
|
Aucun
|
TAV ≤ 2,8 % : 3,75 €/degré/hl TAV ≥
2,8 % : 7,49 €/degré/hl Brasseries
indépendantes ≤ 200 000 hl :
3,75 €/degré/hl
|
TAV ≥ 18 % :
3 €/degré/hl Brasseries indépendantes ≤
200 000 hl : 1,5 €/degré/hl
|
20 %
|
Produits intermédiaires
|
Aucun
|
Produits intermédiaires :
47,67 €/hl Autres produits intermédiaires :
190,68 €/hl
|
TAV ≥ 18 % : 47,67 €/hl
|
20 %
|
Alcool avec TAV > 22 %
|
Aucun
|
Rhums des DOM :
879,72 €/hlap Autres alcools :
1 758,45 €/hlap Droit réduit bouilleurs :
879,24 €/hlap
|
TAV ≥ 18 % : 564,61 €/hlap
|
20 %
|
À des fins de lisibilité, toutes les catégories
de produits et de taxes n’apparaissent pas dans ce
tableau.
TAV : Titre alcoométrique volumique ; hl :
Hectolitre ; hlap : Hectolitre d’alcool pur.
Sources :
Circulaire du 18 décembre 2018 du ministère de l’Action et
des Comptes publics : Tarifs des droits sur les alcools, les
boissons alcooliques et les boissons non alcooliques
applicables au 1er janvier 2019 ; inspiré de
Spach (2016
).
Les rendements des accises catégorisées en fonction des boissons
sont inversement proportionnels aux quantités consommées en
France. Alors que le vin est la boisson alcoolique la plus
consommée en 2013 derrière les spiritueux et la bière (avec
respectivement 6,9 litres, 2,5 litres et 1,7 litre mesurés en
alcool pur par individu de 15 ans et plus), le vin contribuait
vingt fois moins que les spiritueux aux recettes fiscales. Il a
été estimé que la charge fiscale pour dix grammes d’alcool pur
était de 0,37 centimes d’euros pour le vin tranquille, 0,92 pour
le vin pétillant, entre 1,83 et 3,66 pour la bière et finalement
22,9 centimes d’euros pour les spiritueux (Daudigny,
2013-2014

).
Les accises auraient désormais ceci de particulier, et au
contraire des taxes frappant l’ensemble des biens et services
comme la TVA, qu’elles n’ont pas pour objectif de maximiser les
recettes fiscales mais bien d’enclencher des modifications
comportementales (2011)
10
Ceci était toutefois le cas jusqu’à une
période récente dans la mesure où sans proches
substituts, les biens frappés d’accises généraient
d’importantes recettes fiscales. Cependant, la lutte
contre le tabagisme et les problèmes environnementaux
liés aux énergies fossiles ont fait entrer les accises
dans une autre dimension que la seule production de
recettes fiscales (Cnossen,
2011

).
. Elles visent,
a priori, à corriger une
sous-optimalité du fait d’une surconsommation engendrant des
externalités négatives. On comprend dès lors mieux pourquoi la
Cour des comptes, dans son dernier rapport sur les politiques de
lutte contre les consommations nocives d’alcool, semblait si mal
à l’aise en soulignant l’absence d’objectifs clairs assignés au
régime fiscal français actuel (Cour des comptes,
2016

), en effet, peu orienté vers des objectifs de santé publique.
La Cour des comptes notait aussi l’absence de volonté de
maximiser les recettes fiscales étant donné les faibles niveaux
d’accises appliquées sur les produits du vin, pourtant les plus
consommés. Évidemment, la juridiction du palais Cambon ne
pouvait écrire, du fait du cadre européen contraignant les
produits soumis à accise, qu’en réalité les objectifs sont
plutôt évidents : d’une part, protéger la production et la
consommation de vin (Spach,
2016

) à l’instar certainement de l’Espagne et de l’Italie – les
droits d’accises étant nuls dans ces deux pays pour le vin
tranquille – et d’autre part, encourager l’industrie naissante
et grandissante de la bière, sans parler évidemment des
productions de rhums des DOM (pour apprécier les conséquences
sanitaires du rhum français voir : Mété,
2017

). Un certain protectionnisme semble se dégager du régime
fiscal français frappant les boissons
alcooliques
11
Le secteur de l’alcool en France ne semble
plus aussi florissant qu’au début des années 2000. De
nouveaux concurrents gagnent des parts de marché
mondial, en particulier les vins dits du nouveau monde
et d’autre part, le nombre estimé d’emplois dans le
secteur est en nette diminution (cf. chapitre « Coût
social de l’alcool en France et envergure économique du
secteur »).
.
Suite à ce constat et ces non-dits, la Cour des comptes
recommande d’augmenter les droits d’accise sur les boissons
alcooliques si les pouvoirs publics ambitionnent de faire
diminuer la consommation d’alcool à risque des Français ou de
préparer la mise en place d’un prix minimum sur ces mêmes
boissons si l’objectif est de faire diminuer les consommations
des usagers à risque élevé voire dépendants. Alors qu’un prix
minimum ne relève pas des régimes fiscaux en tant que tel, cette
idée peut toutefois être atteinte en utilisant le gramme
d’alcool pur (ou l’unité d’alcool) comme assiette de calcul de
la taxe. Les deux formules méritent d’être étudiées.
Imposer un prix minimum aux boissons alcooliques
et/ou taxer le gramme d’alcool pur108
12
La taxation des boissons alcooliques au
gramme d’alcool pur n’est qu’une variante de
l’imposition d’un prix minimum aux boissons alcooliques
(Sharma et coll., 2016

) même si de potentielles
différences peuvent résulter dans le prix final des
produits. À titre d’exemple de concordance, imposer un
prix minimum de 3,50 euros à une bouteille de 75 cl de
vin à 12 % reviendrait à taxer le gramme d’alcool pur à
environ 0,05 euros (soit les 10 grammes à
0,50 euro).
La fiscalité des boissons alcooliques a fait couler beaucoup
d’encre en Europe ces dernières années. Voulant suivre
différents exemples internationaux en matière de tarification
des produits alcooliques dans le monde (Biélorussie,
Kirghizstan, Ukraine, Fédération de Russie ou encore le Canada),
l’Écosse a voulu imposer un prix minimum par unité d’alcool en
2012. S’en est suivie une lutte juridique (Bartlett,
2016

), médiatique et lobbyiste
13
Cf. chapitre « Lobbying de la filière
alcool » de cette expertise
collective.
(Hilton et coll.,
2014a

; Katikireddi et coll.,
2014b

; Katikireddi et Hilton,
2015

) acharnée entre les tenants gouvernementaux de la santé
publique et l’industrie écossaise de l’alcool (du whisky en
particulier). La Cour de Justice de l’Union européenne tranchait
le bien-fondé de la mesure en deux temps. D’une part, elle
affirmait l’implémentabilité d’un tel dispositif sous réserve
qu’un autre
design fiscal ne puisse atteindre un même
résultat de santé publique (Sibony,
2016

). D’autre part, elle confirmait sa non contre disposition à
la liberté de circulation des marchandises en Europe (Alemanno,
2016

; Dobson et Hawkins, 2016

). Mais c’est finalement en 2017 que
la Cour Suprême Britannique a autorisé l’Écosse à fixer un prix
minimum aux produits alcooliques. La volonté de mettre en place
un prix minimum par unité d’alcool du gouvernement écossais
faisait suite aux dommages liés à l’alcool que connaît la région
et aux bénéfices escomptés d’une telle mesure de limitation des
consommations, bénéfices qui étaient anticipés à partir d’une
modélisation des politiques de lutte contre l’alcool au
Royaume-Uni.
Le modèle de l’université de Sheffield
14
Le modèle en lui-même est devenu un acteur
du débat public car non seulement ses résultats ont été
utilisés de façon instrumentale par les tenants de la
santé publique même si, aux dires des décideurs
politiques, ils se sentent parfois en tension, voire mal
à l’aise vis-à-vis de cet outil d’aide à la décision
(Katikireddi et coll.,
2016

).
, méthodologiquement décrit par ailleurs
(Brennan et coll., 2015

; Brennan et coll.,
2016

), est un modèle de simulation mathématico-économique reposant
sur des données empiriques anglaises assez détaillées et de
nombreuses estimations d’élasticités prix et revenu par
catégories de population. Les liens entre niveau de consommation
d’alcool et morbi-mortalité sont aussi inclus permettant aux
auteurs, entre autres, de pouvoir estimer l’impact d’une
augmentation de taxe ou d’un changement de mécanisme fiscal non
seulement sur les niveaux de consommation ou de recettes
fiscales mais aussi les conséquences sanitaires attribuables à
l’alcool ou aux inégalités de santé. Le modèle permet en outre
de pouvoir comparer les impacts attendus des restrictions de
ventes d’alcool (Brennan et coll.,
2014

) ou plus généralement des différentes politiques fiscales sur
les produits de l’alcool. Augmentation des taxes actuelles,
introduction d’une taxe additionnelle
ad valorem,
remplacement par une taxe sur le TAV ou alors introduction d’un
prix plancher de 0,50 £ par unité d’alcool sont les régimes
fiscaux les plus souvent comparés entre eux, et les effets
attendus portent le plus souvent sur la consommation des buveurs
intensifs et sur les inégalités sociales de santé (Holmes et
coll., 2014a

; Meier et coll.,
2016

). Des travaux fondés sur ce modèle, il ressort que le système
de taxation au TAV ou l’imposition d’un prix minimum par unité
d’alcool sont des
designs débouchant sur les meilleures
performances en termes de mortalité évitée en particulier chez
les plus vulnérables, à savoir les gros buveurs ou les
travailleurs « manuels » ; les buveurs modérés n’étant que peu
impactés par ces mesures, comme également confirmé par une
récente étude australienne (Sharma et coll.,
2016

).
Cet impact d’un prix minimum par unité d’alcool sur les gros
buveurs est confirmé dans d’autres travaux anglo-saxons réalisés
à partir d’autres méthodologies. Ainsi, par l’analyse d’une
enquête représentative de plus de 3 000 individus âgés de 18 à
75 ans qui ont fourni un journal de leur consommation d’alcool
la semaine précédant l’enquête, il ressort que les hommes,
usagers intensifs d’alcool et à faible revenu sont ceux qui
cherchent à consommer l’alcool au plus faible prix. Les auteurs
de conclure sur le bien-fondé d’un prix minimum d’alcool en
Irlande afin d’infléchir la consommation de ces usagers et ainsi
réduire la morbi-mortalité attribuable à l’alcool dans cette
catégorie de population (Cousins et coll.,
2016

). Sur un échantillon plus réduit d’individus (639 patients)
fréquentant les services d’addictologie ou admis à l’hôpital en
lien avec leur consommation d’alcool, et selon leurs achats
déclarés d’alcool durant une semaine « normale », il a été
estimé que la mise en œuvre d’un prix minimum par unité d’alcool
de 0,50
pence en Écosse réduirait la consommation moyenne
de deux-tiers de ces individus de 33 % (Gill et coll.,
2017

). Une enquête qualitative par entretien en face-à-face (20
écossais âgés de 34 à 67 ans, 15 hommes et 5 femmes) vient
cependant nuancer ces conclusions. Les répondants mettent ainsi
en avant le fort pouvoir addictif de l’alcool et avancent que
les plus dépendants chercheront bon an mal an et de toute façon
à se procurer leurs boissons. Ici, les auteurs soulignent
l’importance des mesures d’accompagnement nécessaires auprès des
publics les plus vulnérables à la suite de la mise en œuvre des
politiques de prix minimum (O’May et coll.,
2016

).
Au Canada, la mise en œuvre d’un prix minimum par unité d’alcool
s’est révélée positive en termes de santé mais aussi d’ordre
public. Les régions les moins riches de Colombie Britannique ont
ainsi vu leur taux d’hospitalisation en lien avec l’alcool
diminuer plus fortement que dans les autres régions de cette
province à la suite de l’imposition d’un prix minimum par unité
d’alcool, confortant en cela les effets attendus d’une telle
mesure sur les populations les plus vulnérables (Zhao et
Stockwell, 2017

). Également en étudiant par séries
temporelles les admissions à l’hôpital (services d’urgence) en
lien avec l’alcool mais pour la province de Saskatchewan, il a
été montré une diminution significative des visites aux urgences
pour accidents de la route (en particulier chez les femmes de
25 ans et plus) (Sherk et coll.,
2018

). Cet effet a été confirmé mais pour les hommes cette fois-ci
en plus de la mise en relief d’une diminution des crimes
violents pour cette même province canadienne à la suite de la
mise en œuvre d’un prix minimum en 2010 (Stockwell et coll.,
2017

). Toutes les provinces canadiennes ne peuvent se targuer
d’obtenir de tels résultats malgré la mise en œuvre d’un prix
minimum par unité d’alcool (excepté l’Alberta qui ne dispose pas
d’une telle mesure). C’est ici de l’implémentation défectueuse
de la mesure dont il s’agit. Toutes les provinces n’ont en effet
pas mis en place les mêmes niveaux d’effectivité des politiques
de lutte contre l’usage d’alcool : alors qu’un prix minimum de
1,50 $ canadien était recommandé par verre standard en vente à
emporter et 3 $ en verre standard à consommer sur place,
certaines provinces ont tarifé en deçà de ces recommandations.
De plus, toutes les boissons alcooliques ne sont pas concernées
par la mesure, certaines y faisant exception. Finalement, les
prix minimum ne tiennent pas compte de l’inflation ou des
modifications de contenu en éthanol des boissons, paraissant de
fait peu adaptatifs car figés dans le temps et leur objet
(Giesbrecht et coll., 2016

; Thompson et coll.,
2017

).
Au final, les politiques de contrôle de la consommation d’alcool
par l’outil fiscal sont largement préconisées car évaluées
positivement en termes de santé et de sécurité publiques (Sassi
et coll., 2015

). Plus spécifiquement, les mises en
œuvre de politique de prix minimum par unité d’alcool sont
associées à une diminution de la consommation d’alcool et des
dommages associés. Même si d’autres travaux menés par
différentes équipes de recherche pourraient être conduits en vue
de confirmer les preuves scientifiques aujourd’hui réunies, il
apparaît que les politiques fondées sur un prix plancher et en
particulier l’imposition d’un prix minimum par unité d’alcool
sont enclines à réduire la consommation et la morbi-mortalité
associée à l’alcool (Boniface et coll.,
2017

).
Quid d’un prix minimum par unité d’alcool en
France ?
La taxation au contenu en éthanol des boissons alcooliques est
une mesure qui peut être envisagée pour d’une part, simplifier
et homogénéiser le
design fiscal qui frappe ces produits
et d’autre part, pour permettre de limiter le report vers
certaines marques et certains types de boissons qui auraient un
contenu alcoolique élevé pour un prix faible. On constate avec
le tableau 10.I

que la
possibilité de taxer les boissons alcooliques, mis à part le
vin, en fonction de leur volume alcoométrique est déjà envisagé
par le régime fiscal français actuel : les bières sont
discriminées en fonction de leur TAV sur les droits spécifiques
ainsi que sur les cotisations sociales, et, de la même manière,
ces dernières frappent de façon différenciée les produits
intermédiaires ainsi que les alcools de plus de 22 %. Toutefois,
cette façon de considérer le contenu en alcool des boissons est
somme toute simpliste : seuls des seuils sont ici spécifiés,
laissant de larges marges de manœuvre aux industriels pour
s’inscrire soit juste en deçà d’une limite, soit carrément
au-dessus.
L’intérêt pour la France d’un prix minimum par unité d’alcool a
déjà été mis en relief (Karsenty,
2015

) et la décision de la Cour de Justice de l’Union européenne
laisse entrevoir la possibilité de mise en place d’un tel
design fiscal et tarifaire en France pour les
produits de l’alcool. Remarquons opportunément qu’un tel
mécanisme fiscal est déjà à l’œuvre en France pour le sucre
contenu dans les boissons non alcoolisées, il s’agit de la taxe
connue sous le nom de « taxe soda ». L’article 1613
ter
du Code Général des Impôts dispose en effet qu’« il est institué
une contribution perçue sur les boissons et préparations
liquides pour boissons destinées à la consommation humaine,
[...] relevant des codes NC 2009 et NC 2202 du tarif des douanes
[et...] contenant des sucres ajoutés... »
15
La Nomenclature Combinée (NC) « est un
outil de classification des marchandises, mis en place
pour répondre aux exigences du tarif douanier commun et
des statistiques du commerce extérieur de l’UE » peut-on
lire sur le site de la Commission
européenne.
. L’imposition s’effectue au kilogramme de
sucres ajoutés par hectolitre de boisson. Ainsi, entre 1 et 4 kg
de sucre ajouté par hectolitre, chaque kilo est taxé d’environ
0,50 euro ; entre 4 et 7 kg, c’est un euro qui vient s’ajouter
et au-delà de 7 kg, c’est plus de deux euros qui s’ajoutent aux
taxes. Dit autrement, le prix minimum par kilo de sucre ajouté
par hectolitre est progressif : 0,50 euro les premiers
kilogrammes, puis, un euro et enfin 2,02 euros à partir de 7 kg.
On peut alors se poser la question de l’incidence de cette
nouvelle façon de taxer les boissons sucrées.
Les rares évaluations ne concluent pas à une diminution
significative des consommations de boissons sucrées à la suite
de la mise en œuvre de cette taxe (Berardi et coll.,
2016

; Etilé et coll., 2018

) malgré la sensibilité au prix des
boissons des ménages français (Boizot,
1999

). Deux raisons sont avancées : la première est le niveau même
de la taxe qui se trouve finalement être très
faible
16
Alors que la lutte contre l’obésité
motivait prioritairement l’application de ce nouveau
dispositif, cet argument a été détrôné au fur et à
mesure des négociations avec les industriels pour
laisser place à un argument de rentrées fiscale (Etilé
et coll., 2018

).
– la lutte contre l’obésité devenant un
objectif secondaire de la taxe –, la seconde est le transfert
opéré par les détaillants pour minimiser la répercussion de la
taxe sur les prix de vente. Alors que les études font souvent
l’hypothèse d’un report complet sur le prix final, entre 2008 et
2013, le report n’était que de 39 % à un niveau agrégé de
boisson, signifiant que les prix n’ont pas augmenté du même
montant de la taxe (Etilé et coll.,
2018

) qui se trouve être déjà faible.
À partir de l’exemple de la taxe soda, on peut conclure qu’il est
non seulement possible en France de mettre en œuvre une accise
proportionnelle à la molécule que l’on souhaite cibler, mais
qu’il faut être vigilants sur les réactions potentielles des
offreurs (producteurs et détaillants) dans la répercussion de la
taxe au consommateur final. On conviendra aussi que le niveau du
prix minimum ou de la taxe par unité doit être suffisamment
élevé pour non seulement éviter le dernier écueil mais aussi
enclencher une réaction comportementale des consommateurs.
Conclusion
Les politiques de lutte contre l’offre et la demande d’alcool sont
efficaces (Chaloupka et coll., 2019

; Siegfried et Parry,
2019

) : il
est ainsi possible de rendre le fardeau sanitaire incombant à la
consommation d’alcool moins lourd pour la collectivité. Réduire
l’accessibilité aux boissons alcooliques, que ce soit en diminuant le
nombre et en contraignant les points de vente dans leurs heures
d’ouverture ou en leur interdisant de vendre à des mineurs, permet un
contrôle efficace de la consommation d’alcool et une diminution des
dommages qui lui sont associés. La législation et la réglementation
françaises en la matière sont assez outillées pour permettre un tel
contrôle. Encore faudrait-il ne pas déroger aux règles en vigueur, que
ce soit sur le marché et la mobilité des licences IV ou sur les ventes
d’alcool aux mineurs. Dans le premier cas, on questionnera la nécessité
d’une migration et donc d’une multiplication des licences IV dans les
aires touristiques. Dans le second cas, la participation des industriels
à la formation et à l’équipement de leurs employés favorisant le respect
de la loi et l’implication plus grande des forces de l’ordre dans son
implémentation seraient bienvenues (par un nombre accru de contrôles
d’application de la loi par exemple).
Par ailleurs, l’augmentation des accises sur les boissons alcooliques
et/ou la mise en place d’une « taxe éthanol », comme recommandées par la
Cour des comptes, feraient très certainement leur preuve dans la
diminution des consommations d’alcool en France, que ce soit en
population générale ou chez les buveurs intensifs. L’implémentation d’un
prix minimum (sur un ou plusieurs types de produit ou sur le grammage
d’alcool pur) est aujourd’hui possible en France, la Cour de Justice de
l’Union européenne en ayant souligné les conditions. Cette mesure de
santé publique, efficace en ce qu’elle réduit les possibilités de
contournement de l’augmentation des taxes, est, en quelque sorte, déjà
mise en œuvre en France mais sur la molécule de sucre. De son exemple,
il pourrait être retenu que le niveau de taxation doit être assez élevé
et que ses effets peuvent être différenciés en fonction des structures
économiques locales facilitant ou non le report de la taxe vers le prix
final (Etilé et coll., 2018

). L’utilisation du régime fiscal de l’alcool
en France doit glisser d’un protectionnisme économique à un
protectionnisme sanitaire : non seulement les bénéfices en termes de
santé sont indéniables dès lors que des politiques volontaristes sont
mises en œuvre mais il se trouve aussi que l’envergure économique du
secteur de l’alcool en France s’étiole avec en particulier une
employabilité allant
decrescendo. Au final, la lutte contre la
consommation d’alcool,
via l’augmentation des taxes s’y
rapportant, conduirait, selon de récentes simulations réalisées pour
certains États américains, à créer de l’emploi plutôt qu’à en détruire.
Un ruissellement se ferait d’un secteur à un autre mais l’effet net
resterait positif (Wada et coll., 2017

), rendant l’argument des
industriels de l’alcool quant aux destructions d’emploi inhérentes aux
politiques de lutte contre l’alcool caduc. Ces estimations restent à
réaliser en France.
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