Réduction des dommages associés à la consommation d’alcool
I. Consommations d’alcool : les risques, les dommages et leur environnement

2021


ANALYSE

5-

Impact des données
en épigénétique

Notre but dans ce chapitre est d’évaluer l’impact des découvertes les plus récentes en épigénétique et de la consommation d’alcool sur les possibilités diagnostiques et thérapeutiques qu’elles ouvrent et leur impact en termes de prévention et de réduction des risques. Nous nous limiterons aux études qui concernent les déficits du développement et de l’intégrité du cerveau, principalement en réponse à l’exposition prénatale à l’alcool. En effet, les problématiques soulevées par ce domaine couvrent et illustrent parfaitement les enjeux de l’épigénétique pour la prévention et réduction des risques liés aux consommations à risque1 .

Développement du cerveau et impact épigénétique de l’alcoolisation fœtale

Le développement du cerveau et son fonctionnement à l’âge adulte sont étroitement contrôlés par des mécanismes épigénétiques (Bird, 2007renvoi vers). L’importance de ce contrôle épigénétique est soulignée par le grand nombre de maladies neuro-développementales et neuropsychiatriques associées à des mutations ou variants de gènes codant des acteurs épigénétiques (syndrome de Rett, syndrome de Rubinstein-Taybi, autisme, schizophrénie...) (Gräff et coll., 2011renvoi vers ; LaSalle et coll., 2013renvoi vers ; Bourgeron, 2015renvoi vers ; Liu et coll., 2016arenvoi vers).

Mécanismes épigénétiques

Les mécanismes épigénétiques contrôlent l’expression des gènes, sans modifier la séquence de l’ADN (acide désoxyribonucléique, support de l’information génétique et de sa transmission au cours des générations) elle-même, mais en contrôlant l’accessibilité de l’information génétique contenue dans l’ADN aux machineries cellulaires qui vont lire et transcrire cette information (mécanisme dit de « transcription ») et permettre ainsi, ou non, à la cellule « d’exprimer » l’information contenue dans tel ou tel gène, par la synthèse de protéines spécifiques ou d’ARN dits non-codants (ne codant pas de protéines) (figure 5.1Renvoi vers). L’ADN est une molécule longue d’environ deux mètres, dans une cellule de mammifère, qui est compactée dans un noyau de quelques microns, ce qui compromet, en effet, l’accessibilité à son information génétique, mais procure aussi un niveau crucial de régulation de l’expression des gènes.
La compaction de l’ADN dans le noyau est assurée par son enroulement autour d’un complexe protéique, composés d’histones, ce complexe constituant le nucléosome, c’est-à-dire l’unité de base qui constitue la chromatine (figure 5.1Renvoi vers). Cette unité de base, ainsi que des ordres supérieurs d’enroulement, limitent l’accessibilité à l’information génétique qui est contenue dans cette portion de l’ADN (Dulac, 2010renvoi vers ; Schang et coll., 2018renvoi vers). Les mécanismes épigénétiques agissent sur cette compaction et donc « l’ouverture » ou la « fermeture » de la chromatine, par des modifications chimiques (modifications post-traductionnelles) (figure 5.1Renvoi vers). Ces « décorations » chimiques constituent le « code histone » ou plutôt un « langage histone ». Elles sont héritables d’une division cellulaire à l’autre, ou acquises de novo, et sont très diverses : acétylation, méthylation, phosphorylation... pour ne citer que les plus étudiées. Elles induisent soit une stabilisation, soit au contraire une déstabilisation des nucléosomes, en attirant de gros complexes, répresseurs ou activateurs, respectivement. Ces complexes contiennent des acteurs épigénétiques (« scribes/écrivains »), responsables du dépôt de ces modifications chimiques (marques épigénétiques) qui, lues par des « lecteurs », provoquent le dépôt de nucléosomes additionnels grâce à l’intervention de « remodeleurs » de la chromatine, et donc une augmentation de l’enroulement – ou bien leur éviction, ce qui induit le déroulement de l’ADN. On aboutit à une conformation dite fermée ou ouverte de la chromatine, respectivement. La modification épigénétique la plus étudiée est la méthylation de l’ADN lui-même. Elle s’effectue par l’ajout de groupement méthyl (-CH3) sur des résidus cytosines (C) – une des quatre bases, qui forment l’ADN – les autres étant l’adénine (A), cytosine (C), la guanine (G) et la thymine (T), dont l’ordre constitue la séquence de l’ADN, support de l’information génétique. D’une manière très schématique, la méthylation de l’ADN dans un contexte « CpG » (cytosines, suivies d’une guanine) situées au cœur des régions régulatrices de l’expression des gènes, a globalement pour effet de condenser la chromatine, aboutissant à une conformation fermée de la chromatine (figure 5.1Renvoi vers). La distribution des CpG dans le génome fait apparaître l’existence d’îlots de CpG (regroupements de CpG), situés à proximité des promoteurs de gènes, et dont la méthylation induit une répression de l’expression des gènes. Les gros complexes contiennent aussi de (longs) ARN non-codants qui, ne codent pas des protéines, mais, qui, enveloppant une région, peuvent en particulier agir comme pièges ou « éponges », et maintenir les acteurs épigénétiques à proximité du site à remodeler (Briggs et coll., 2015renvoi vers). Enfin, le contrôle épigénétique de l’expression d’un gène implique aussi les petits ARN non-codants, dont les micro-ARN (miARN), qui, grâce à des homologies de séquences avec des ARN messagers (ARNm2 ) régulent leur niveau de traduction en protéines. Un miARN peut réguler la traduction d’ARNm de plusieurs gènes et l’expression d’un gène est régulée par plusieurs miARN (Yi et Fuchs, 2011renvoi vers).
Ces mécanismes épigénétiques sont à l’œuvre tout au long des étapes qui régissent la construction du cerveau, son intégrité et ses fonctions : la prolifération des progéniteurs neuraux, la migration des jeunes neurones, la formation des axones et des dendrites, celle des synapses et, enfin, la plasticité neuronale. L’activité neuronale elle-même est capable de modifier l’épigénome, c’est-à-dire les caractéristiques des marques épigénétiques et la conformation de la chromatine à l’échelle du génome (Su et coll., 2017renvoi vers). De plus, une dynamique très particulière de formes de méthylation dans des contextes non-CpG a été identifiée dans le cerveau humain et de souris, après la naissance dans le cortex préfrontal. Absente du cerveau fœtal, elle est caractérisée par une augmentation brutale pendant la petite enfance, et atteint son maximum à la fin de l’adolescence. Cette forme de méthylation est très proéminente dans les neurones en particulier (Lister et coll., 2013renvoi vers ; He et Ecker, 2015renvoi vers ; Schultz et coll., 2015renvoi vers). Chez la souris, elle coïncide avec une augmentation de l’ADN méthyl-transférase DNMT3A qui méthyle de novo les cytosines. Cette période correspond chez l’Homme et la souris à une augmentation de la densité de synapses durant l’enfance, puis avec l’élagage synaptique durant l’adolescence, ce qui souligne le rôle proéminent de la méthylation de l’ADN dans le développement et la fonction cérébrale. En outre, ces résultats procurent un nouveau cadre de pensée pour la compréhension du rôle de l’épigénome et de ses altérations dans le cerveau normal et pathologique. De façon notable, la méthylation des cytosines dans un contexte non-CpG n’est pas lue par la cellule selon les mêmes grilles d’interprétation que la méthylation CpG, d’une part, avec des impacts opposés sur l’expression des gènes, dans les cellules souches et le cerveau mature.
5.1 : Schéma des mécanismes épigénétiques

Exposition prénatale à l’alcool et impacts épigénétiques
sur le cerveau en développement

La dérégulation de ces mécanismes épigénétiques affecte profondément le développement du cerveau et son intégrité – que ce soit en raison de mutations présentes dans des acteurs épigénétiques ou d’expositions à des agressions environnementales au stade fœtal, périnatal ou adulte. Des agressions très variées sont capables d’affecter le développement du cerveau, et d’augmenter le risque de développer des maladies neuropsychiatriques, selon le concept « DOhaD » (developmental origins of health and disease) : l’exposition de la mère ou du jeune enfant à la maltraitance (violences physiques et/ou psychologiques et abus sexuels), la (mal)nutrition et l’exposition à des toxiques, dont l’alcool, ou à des polluants (Thompson et coll., 2009renvoi vers ; Ishii et Hashimoto-Torii, 2015renvoi vers ; Guintivano et Kaminsky, 2016renvoi vers ; Schang et coll., 2018renvoi vers).
L’exposition prénatale à l’alcool (EPA) est considérée comme une cause majeure d’anomalies neurodéveloppementales (Popova et coll., 2012renvoi vers). Elle endommage l’ensemble des processus neuro-développementaux cités ci-dessus, et donc tous les stades (Guerri et coll., 2009renvoi vers) : prolifération et différenciation déficiente des progéniteurs neuraux, migration neuronale anormale, mort neuronale, synaptogénèse compromise, neurotransmission et plasticité neuronale perturbées. Outre provoquer des avortements spontanés et des morts subites inexpliquées du nourrisson, ces défauts contribuent à un large spectre de déficits dont la sévérité est variable et qui, sur la base du travail pionnier de Lemoine et coll. (1968renvoi vers) et Jones et Smith (1973renvoi vers) est répertorié sous le nom de « troubles causés par l’alcoolisation fœtale » (ou TCAF ; FADS, Fetal Alcohol Spectrum disorders (Sowell et coll., 2001renvoi vers) (Streissguth et O’Malley, 2000renvoi vers).
Ce spectre s’étend de défauts structurels et macroscopiques de diverses régions cérébrales à des incapacités neurocomportementales plus subtiles, avec parfois des traits autistiques (Mattson et coll., 2011renvoi vers ; Varadinova et Boyadjieva, 2015renvoi vers). Dans le cas où des anomalies structurales du cerveau sont décelées en imagerie cérébrale, on parle de Syndrome d’alcoolisation fœtale (SAF). Les dysfonctionnements primaires du cerveau affectent plus particulièrement le comportement et la cognition et sont référencés dans l’outil de diagnostic mnémotechnique « ALARM » Adaptive functioning (aptitudes sociales, maturité émotionnelle, concepts de temps et d’argent, et compréhension), Language/Learning, Attention (impulsivité, hyperactivité et difficultés d’attention, taux élevé de troubles de l’attention/hyperactivité TDAH, Reasoning (raisonnement et fonctions exécutives), Memory (mémoire verbale et non verbale) (Inserm, 2001renvoi vers ; Clarke et Gibbard, 2003renvoi vers ; Mattson et coll., 2011renvoi vers). Des incapacités secondaires surviennent au cours de la vie de l’individu, dont des maladies neuropsychiatriques avec, au premier plan, les troubles de l’anxiété, la dépression majeure et la vulnérabilité aux addictions (revues : Kodituwakku, 2007renvoi vers ; O’Connor et Paley, 2009renvoi vers).
La difficulté inhérente au diagnostic d’un ensemble de troubles aussi complexes et à la sévérité aussi variable que le TCAF, d’un individu à l’autre, explique que les enfants sont souvent diagnostiqués tardivement, généralement au moment de la scolarisation. La détection des femmes enceintes à risque pour leur consommation à risque d’alcool est également compliquée et reste très restreinte, et celle de leur père l’est encore plus. La difficulté du diagnostic est encore accrue lorsque qu’aucune donnée sur l’historique d’exposition n’est connue (dans les cas d’adoption, par exemple). La nécessité d’identifier des biomarqueurs d’EPA et possiblement des molécules à effet thérapeutique est donc particulièrement aigüe en ce qui concerne le TCAF dont l’incidence est manifestement sous-estimée (cf. chapitre « Mortalité, faibles consommations et effets biologiques »). Les perturbations épigénétiques, en raison de leur persistance et leur réversibilité potentielle sous l’effet de traitements pharmacologiques ont ouvert une voie prometteuse à cet égard.

EPA, TCAF et perturbations épigénétiques

L’étude des modèles cellulaires, mais surtout animaux, a été déterminante dans la compréhension des effets de l’EPA sur l’épigénome, d’une part, parce que la taille des cohortes d’enfants ou de collections d’échantillons de fœtus TCAF restent très limitées, et, d’autre part, parce qu’ils ont permis « d’isoler » la composante « EPA » de facteurs confondants (problèmes économiques et éducationnels, abus sexuels et maltraitance, dépression chez la mère, addiction à d’autres substances psychotropes...). Les études ont principalement impliqué des modèles de rongeurs, mais pas uniquement (par exemple, des embryons de poulet et des primates non-humains). Nous privilégierons les études portant sur les mammifères.
Une des difficultés majeures rencontrée dans le domaine est la diversité des modèles cellulaires et animaux, et des protocoles d’EPA : les doses d’éthanol ; l’administration chronique, aiguë, ou intermittente ; la fenêtre de développement du cerveau ; la durée de la consommation ou de l’administration ; le laps de temps écoulé entre l’administration d’alcool et les observations moléculaires, neuro-morphologiques ou comportementales, le mode d’administration (gavage, injection intra-péritonéale, voie orale (liquide ou semi-liquide). Même si l’on se limite au modèle murin, le fond génétique varie considérablement d’une souche de souris à l’autre ce qui là aussi peut conduire à des résultats différents vis-à-vis des effets de l’alcool (Xu et coll., 2019renvoi vers). De nombreuses études s’intéressent au cerveau entier, ce qui introduit un biais parce que différentes régions du cerveau ne présentent physiologiquement ni les mêmes profils de méthylation, ni la même proportion de types cellulaires neuraux, puisque les profils de méthylation sont très dépendants du type cellulaire (Lussier et coll., 2018arenvoi vers). D’une manière générale, il n’est donc pas possible de définir une liste des régions du génome différentiellement marquées épigénétiquement par l’alcool. Tout au plus peut-on dégager des tendances et pointer vers de futurs biomarqueurs potentiels.

Disponibilité des métabolites nécessaires au fonctionnement
des acteurs épigénétiques

L’EPA engendre des bouleversements dans la disponibilité et la synthèse de molécules clés du métabolisme cellulaire – en particulier le métabolisme du carbone (one-carbon) – qui ont un retentissement sur l’activité des enzymes impliquées dans le dépôt de marques épigénétiques. Inversement, ces études ont observé une amélioration des endophénotypes du TCAF, par des traitements de complémentation dans la nourriture par des métabolites. C’est le cas du folate dont le transfert de la mère à l’embryon est altéré par l’EPA (Hutson et coll., 2012renvoi vers) et qui est un donneur de groupe méthyl, indispensable à l’établissement et au maintien de la méthylation de l’ADN ou des histones, et dont la carence est donc susceptible d’engendrer des anomalies de l’épigénome). C’est aussi le cas de la disponibilité en S-adénosyl-méthionine qui est aussi un donneur de méthyl et dont les niveaux sont diminués, en raison du stress oxydatif engendré par l’éthanol. L’apport en choline, qui est un précurseur de S-adénosyl-homocytéine et de S-adénosyl-méthionine, peut donc modifier aussi les marques épigénétiques de méthylation. Enfin, le stress oxydatif engendré par l’exposition à l’éthanol résulte aussi en une augmentation d’acétyl-CoA qui est un précurseur de groupement acétyl- et utilisé par les HAT pour acétyler les histones (Kleiber et coll., 2014renvoi vers ; Chater-Diehl et coll., 2017renvoi vers).

Altération globale des modifications des histones et de la méthylation de l’ADN

De nombreuses études sur des modèles cellulaires, ou des coupes de tissus de modèles animaux ou de fœtus ou jeunes enfants, morts rapidement après la naissance, ont tenté une approche globale de la caractérisation de modifications des signatures épigénétiques. Ces études reposent sur la détection à l’aide d’anticorps de la méthylation de l’ADN (voir pour un exemple récent portant sur des échantillons de fœtus et de nouveau-nés TCAF post mortem (Jarmasz et coll., 2019renvoi vers) ou de modifications post-traductionnelles des histones (Chater-Diehl et coll., 2017renvoi vers). D’autres encore évaluent globalement la méthylation de l’ADN et l’activité de certains acteurs responsables du dépôt de marques d’histones. Les résultats sont très variables selon les systèmes et leur interprétation très limitée car ces données sont difficiles à relier à l’expression génique ou au phénotype. Cependant, elles suggèrent que l’EPA induit des perturbations globales de disponibilité et d’activité d’acteurs épigénétiques (DMT, HAT/KAT [acétyl-lysine/histone-transférase], HDAC/KDAC [lysine/histone-désacétylase], KMT ou KDM) (Chater-Diehl et coll., 2017renvoi vers ; Veazey et coll., 2017renvoi vers).

Impact de l’EPA sur les modifications post-traductionnelles d’histones

Une revue de l’ensemble de ces modifications a été établie par Chater-Diehl (Chater-Diehl et coll., 2017renvoi vers).
Les approches par gènes candidats, utilisant essentiellement des modèles d’EPA chez la souris, sont basées sur la technique d’immuno-précipitation de chromatine (ChIP) à l’aide d’anticorps dirigés contre des marques d’histones suivi d’une amplification de la région d’ADN du gène d’intérêt par qPCR (quantitative Polymerase Chain Reaction ; on parle de ChIP-qPCR). Globalement, les études de l’effet de l’EPA dans des périodes prénatales chez la souris qui miment le premier et le second trimestre chez la femme, soulignent le fait que des modifications de l’expression ou de l’activité des acteurs impliquées dans le dépôt de marques génétiques (DNMT [DNA-5mC-méthyl-transférase], HDAC...) ne sont pas nécessairement corrélées avec une diminution ou une augmentation parallèle de la marque épigénétique correspondante. En d’autres termes, si ces changements contribuent peut-être à l’altération des marques épigénétiques observées après EPA, ils n’en sont pas la seule cause. Au contraire, on peut plutôt penser que c’est la redistribution de ces acteurs à l’échelle du génome, sur telle ou telle région, et ce de façon spécifique à chaque acteur, qui va déterminer les remaniements des marques épigénétiques sur une région donnée, selon des mécanismes qui restent à déterminer (voir plus loin). De plus, pour chaque marque étudiée, le profil temporel de ses altérations est différent. Enfin, ces changements de marques épigénétiques ne sont pas nécessairement corrélés à des modifications de l’expression des gènes qui les portent. On ne dispose donc pas à l’heure actuelle d’une vue globale des modifications d’histones qui procurerait une clé de lecture interprétative de ces changements, en articulation avec ceux de l’expression génique, et donc du phénotype résultant. Et cela, en dépit du fait que des régions différentiellement méthylées (DMR) sont associées à des gènes clés de neuro-développement : par exemple, des gènes gouvernant le caractère « cellule souche » ou des gènes homéotiques, ou des régions hétérochromatiniennes dont la conformation fermée et dont le verrouillage de leur expression est important pour la stabilité du génome. Il faudrait d’autre part que le domaine s’astreigne à répéter des études utilisant les mêmes protocoles dans divers laboratoires pour attester de la reproductibilité des résultats.
À titre d’illustration concrète, des approches successivement globales, puis de gènes candidats, dans la période postnatale qui correspond, chez la souris, au troisième trimestre chez la femme et est une phase active de synaptogenèse et de croissance cérébrale (Chater-Diehl et coll., 2017renvoi vers), on retiendra une étude fouillée qui s’est intéressée chez la souris à l’histone/lysine-méthyl-transférase KTM G9a et ses effets potentiels sur l’apoptose après EPA. G9a, avec un autre membre de la famille, GLP, est responsable de la di-méthylation de l’histone H3 sur les résidus lysine K9 et K27 (H3K9me2 et HEK27me2). En accord avec l’augmentation de l’expression de G9a en réponse à l’EPA dans l’hippocampe et le cortex, les marques répressives H3K9me2 et HEK27me2 sont augmentées par rapport à la quantité totale de H3 (qui, elle, diminue) de façon corrélée avec la mort neuronale (Subbanna et coll., 2013renvoi vers). Un prétraitement par un inhibiteur spécifique de G9a réduit à la fois l’élévation des niveaux de H3K9me2 et HEK27me2, la mort neuronale et les déficits de mémoire et de reconnaissance sociale chez les souris adultes, issues de ce protocole d’EPA (Subbanna et coll., 2013renvoi vers ; Subbanna et Basavarajappa, 2014renvoi vers). Ils ont également confirmé sur un gène candidat qui contrôle négativement le relargage de neurotransmetteurs (CB1R, récepteur de type 1 des endocannabinoïdes), une diminution de la marque H3K9me2 et d’une augmentation de la marque H4K8ac sous l’effet de cet inhibiteur dans l’hippocampe et le cortex (Chater-Diehl et coll., 2017renvoi vers ; Subbanna et coll., 2014renvoi vers). Enfin, un antagoniste de CB1R et l’inhibiteur de G9a annulent les effets de l’EPA sur les déficits en plasticité neuronale, d’apprentissage et de mémoire, en lien avec une restauration du profil épigénétique et de l’expression d’un gène précoce de réponse de l’activité neuronale (immediate-early gene, Arc), profil qui est modifié par l’EPA (augmentation de H3K9me2) (Subbanna et coll., 2018arenvoi vers ; Subbanna et coll., 2018brenvoi vers). Cette étude suggère l’implication du contrôle du niveau d’expression d’acteurs épigénétiques gérant les modifications d’histones et ouvre la possibilité de leur manipulation pharmacologique dans un but d’amélioration à la fois des profils épigénétiques et des performances comportementales et cognitives des souris ayant subi une EPA. D’autres travaux, comme par exemple sur des gènes candidats impliqués dans la plasticité synaptique ont montré une corrélation entre une de marques d’histones activatrice (H3K14 acétylée, en ChIP-qPCR), une hyperméthylation de l’ADN et une expression génique réduite (Dong et coll., 2018renvoi vers).
Cependant, lorsque de larges groupes de gènes sont explorés, les variations des niveaux d’expression de l’enzyme ou de son activité ne corrèlent ni avec la réduction, ni l’augmentation de la marque épigénétique correspondante, et les altérations des marques épigénétiques, bien que leur magnitude soit globalement dépendante de la dose d’alcool, et ne s’accompagnent pas de modifications de l’expression génique : ces études récentes se sont attachées à l’effet à long terme de l’EPA chez la souris adulte sur l’ensemble des promoteurs du génome (Chater-Diehl et coll., 2016renvoi vers) ou à des modèles de cellules souches embryonnaires murines (Veazey et coll., 2017renvoi vers). Les modifications de marques d’histones induites par l’EPA ne peuvent donc pas à elles seules être invoquées pour rendre compte des traits liés au TCAF. Il est notable que, du moins à notre connaissance, des études explorant directement l’accessibilité de la chromatine et ses modifications sous l’effet de l’EPA, par ATAC-Seq, par exemple (Buenrostro et coll., 2013renvoi vers ; Schang et coll., 2018renvoi vers), n’aient pas encore été répertoriées dans le domaine. En effet, les modifications des histones sont une chose, leur impact sur la conformation chromatinienne en est une autre, surtout si les « lecteurs » de ces marques sont perturbés dans leur expression. En effet, leur régulation ou leur activité (par des modifications post-traductionnelles, précisément) mettent en jeu les mêmes acteurs que pour les histones. Il est possible aussi que les marques déposées suite à l’EPA n’aient d’effets sur l’expression génique que lors d’un stress ultérieur, ce qui demeure à tester.
Enfin, il se pourrait aussi que des modifications de la combinatoire de facteurs de transcription sous l’effet de l’EPA, soient responsables de modifications de l’expression génique qui peuvent être observées à très grande distance temporelle de l’exposition – combinatoire qui s’exercerait donc sur un paysage chromatinien globalement robuste par rapport à l’EPA. De façon remarquable, il existe une « mémoire » de l’EPA très précise, puisqu’elle se traduit par des modifications de l’expression génique qui affectent des programmes de transcription spécifiquement actifs au moment de l’exposition (Kleiber et coll., 2013renvoi vers) : les programmes de prolifération cellulaire chez la souris adulte sont affectés de manière proéminente lorsque l’EPA s’est produite au cours de l’équivalent du premier trimestre de grossesse chez la femme, période pendant laquelle les progéniteurs neuraux se divisent activement. Des atteintes de programmes gouvernant la migration cellulaire (et donc neuronale) sont observées chez l’adulte quand la période d’exposition coïncide avec celle qui mime le second trimestre et qui se caractérise la migration de jeunes neurones pour former les couches du cortex, en particulier. Enfin, lorsque l’EPA s’effectue en période postnatale chez la souris, ce qui correspond à la formation d’axones et de dendrites et à la synaptogenèse, on observe une dérégulation majeure de gènes impliqués dans la formation des synapses, le remaniement des réseaux neuronaux et la plasticité cellulaire chez l’adulte. Les mécanismes moléculaires sous-tendant la persistance spécifique de programmes d’expression génique chez l’adulte restent donc encore obscurs et la question demeure de la pertinence des modifications des histones en tant que biomarqueurs potentiels, car il faudrait pourvoir explorer la causalité entre ces marques et les phénotypes associés au TCAF.

Implication des microARN dans les perturbations d’expression génique induites par l’EPA

Un autre niveau d’explication des discordances observées entre le dépôt de marques d’histones anormales et les altérations de l’expression génique après EPA est que les voies de régulations majeures épigénétiques mises en œuvre au moment de l’EPA peuvent opérer à un niveau post-transcriptionnel, en particulier à travers la synthèse de miANR. Mir-10 est un candidat identifié par plusieurs groupes (Miranda, 2012renvoi vers ; Laufer et coll., 2013renvoi vers), qui régule des gènes homéotiques impliqués dans la migration neuronale. Par ailleurs de nombreux miARN dont l’expression est altérée par l’alcool régulent des gènes impliqués dans le neurodéveloppement, soit à des stades précis (comme mir-10), soit à tous les stades (comme mir-9). Leur fonctionnalité, en ce qui concerne les effets de l’EPA, est soulignée par leur capacité à affecter de nombreux gènes dont des perturbations de l’expression sont répertoriées dans des modèles de maladies neurodéveloppementales ou neuropsychiatriques (par exemple la microcéphalie, le déficit intellectuel). La délétion de plusieurs mir-9 conduit en effet à un phénotype mimant le TCAF chez la souris. Il est à noter que l’expression de nombreux miARN est elle-même sous contrôle épigénétique, et donc sensible à l’EPA (Miranda, 2012renvoi vers).

Identification de signatures épigénétiques du méthylome
de l’ADN par approches non-biaisées à l’échelle du génome

Nous nous concentrerons sur les études concernant majoritairement l’analyse du méthylome de l’ADN à grande échelle (échelle du génome ou d’une partie « capture » du génome). Aux facteurs de variabilité liés au modèle d’étude, au mode d’administration de l’alcool et aux fenêtres de temps, se rajoute le fait que les méthodes d’explorations du méthylome de l’ADN sont également très diverses (figure 5.1Renvoi vers ; Schang et coll., 2018renvoi vers). Enfin, les méthodes bioinformatiques et biostatistiques utilisées pour l’identification des DMR varient. Il est donc impossible d’établir de manière rigoureuse une liste pertinente des gènes ou de régions concernées dans les perturbations épigénétiques induites par l’EPA. Il y a plus de 28 millions de CpG dans le génome humain et on estime que 70-80 % d’entre elles peuvent être méthylées, même si la grande majorité ne l’est pas. 45 000 environ sont situées dans des îlots CpG (figure 5.1Renvoi vers). Ces chiffres illustrent la complexité rencontrée par les recherches. Des tendances néanmoins se dégagent qui sont en faveur de la détection de biomarqueurs d’EPA et de leur utilisation future en prévention ou suivi.
D’une manière générale, on n’observe ni une hyperméthylation globale du génome, ni une hypométhylation gobale en réponse à l’EPA, mais une redistribution de la méthylation à l’échelle du génome : certaines régions sont hyperméthylées, tandis que d’autres sont hypométhylées et ce, même à distance temporelle de l’EPA (chez l’adulte : Kleiber et coll., 2013renvoi vers ; Laufer et coll., 2013renvoi vers ; Lussier et coll., 2018brenvoi vers). Ces résultats suggèrent que les DNMT sont redistribuées sur d’autres régions que leurs sites physiologiques par des modes de recrutement qui restent encore à éclaircir.
Lorsque l’on étudie le méthylome de l’ADN à l’échelle du génome (et non seulement sur des « captures » d’une partie du génome), on observe que de nombreuses DMR semblent situées dans des régions dites « intergéniques », c’est-à-dire à distance des gènes et de leurs régions régulatrices proximales (Lussier et coll., 2018renvoi versrenvoi vers). Ces régions comportent potentiellement des éléments régulateurs de type enhancers dont l’activité pourrait être perturbée par l’EPA. Mais il est souvent très difficile à l’heure actuelle de savoir quel(s) gène(s) précisément elles régulent (voir plus loin) et donc de tester l’impact fonctionnel de ces modifications. Cependant, les nombreux sites de facteurs de transcription qu’elles contiennent, ainsi que leur identification, pourrait éclairer de façon majeure la manière dont les DNMT sont recrutées à l’échelle du génome et dont on pourrait manipuler leur redistribution dans un but de normalisation. En effet, dans les régions proximales mieux connues, de nombreuses DMR correspondent aussi à des régions régulatrices riches en sites de facteurs de transcription (Laufer et coll., 2013renvoi vers ; Khalid et coll., 2014renvoi vers ; Laufer et coll., 2017renvoi vers ; Lussier et coll., 2018arenvoi vers) dont en sites de liaison du facteur CTCF qui a également un rôle d’« insulateur », car il borne des régions chromatiniennes de conformations différentes et est ainsi un élément clé de la structure fonctionnelle de l’épigénome et de la régulation de l’expression des gènes. La méthylation de tels sites de facteurs de transcription peut affecter leur liaison à l’ADN et remodeler ainsi l’expression génique.
Les DMR (en particulier celles caractérisées par une hyperméthylation) sont associées à des gènes de neuro-développement (Kleiber et coll., 2014renvoi vers ; Laufer et coll., 2017renvoi vers ; Lussier et coll., 2018arenvoi vers). Elles ont été aussi souvent identifiées dans les explorations du méthylome d’autres pathologies neurodéveloppementales ou neuropsychiatriques, (ex : la famille de protéines synaptiques SHANK, (Bourgeron, 2015renvoi vers) : troubles de l’anxiété, syndrome épileptique, troubles du spectre autistique, trouble de développement profond (un ensemble de cinq pathologies caractérisées par un retard de fonctions cérébrales élémentaires, (dont la communication et la socialisation) et troubles liés à des substances (Portales-Casamar et coll., 2016renvoi vers). Cela est en faveur de l’identification de marques de méthylation de l’ADN comme futurs biomarqueurs.
L’exploration des impacts épigénétiques ne concerne pas que l’exposition in utero et les TCAF. En effet, des études suggèrent un effet pré-conceptionnel de la consommation de l’alcool par le père (Beeler et coll., 2019renvoi vers ; Chang et coll., 2019renvoi vers) – soit, potentiellement, par des marques de méthylation de l’ADN anormales, soit par la perturbation du contenu en ARN non-codants dans le sperme – ainsi qu’un impact péri-conceptionnel par la mère (Lucia et coll., 2019renvoi vers).

Signatures épigénétiques induites par l’EPA
comme biomarqueurs potentiels

Modifications des histones comme biomarqueurs potentiels

Idéalement, un biomarqueur doit appartenir à la chaîne causale d’un processus biologique qui, endommagé, participe à l’étiologie de la pathologie et n’est pas lié à des facteurs inconnus agissant lors de l’exposition. Les modifications chimiques des histones impliquées dans le TCAF, sont donc de faibles candidats, même en ce qui concerne la marque K3K9me3 qui présente une robustesse dans le temps après EPA, qui est identifiée dans diverses études, et qui est techniquement accessible (Chater-Diehl et coll., 2017renvoi vers).
Par ailleurs, on distingue des biomarqueurs d’exposition, destinés à établir des prédictions, et des biomarqueurs de pathologies, utilisés pour faciliter le diagnostic. La relative corrélation entre les perturbations de marques et la sévérité du FASD établie dans des modèles animaux (Veazey et coll., 2015renvoi vers) pourrait faire de certaines marques d’histones opérant sur des gènes spécifiques, des biomarqueurs de l’exposition et de son ampleur, mais elle ne serait en aucun cas prédictive des effets comportementaux qui, d’un patient à l’autre, peuvent varier considérablement. Les développements spectaculaires de l’analyse de l’épigénome par imagerie, en termes de conformation de la chromatine (Chen et coll., 2016renvoi vers) ou du décodage de la combinatoire de modifications portées par un nucléosome, à l’échelle de la molécule unique (Shema et coll., 2016renvoi vers) pourraient à l’avenir permettre une exploration plus directe et plus pertinente de l’accessibilité de la chromatine et des marques d’histones.

Signatures de méthylation de l’ADN comme biomarqueurs potentiels

La méthylation de l’ADN est une marque techniquement plus facile d’accès puisqu’il est plus facile d’isoler et de conserver l’ADN méthylé que d’explorer les marques d’histones par ChIP-qPCR ou ChIP-Seq (ChIP, suivie de séquençage du génome à haut débit). Les aspects fonctionnels des marques de méthylation de l’ADN sont également mieux appréhendés car mieux corrélés à l’expression génique, comme nous l’avons vu.
Les méthodes actuelles d’exploration du méthylome de l’ADN n’ont considéré, pour la plupart, qu’une partie du génome (« captures ») et, en particulier, la couverture des éléments enhancers de régulation des gènes est actuellement faible dans ces technologies. Or, des DMR ont été identifiées dans des régions inter-géniques très riches en enhancers (Lussier et coll., 2018renvoi versrenvoi vers), mais aussi les corps de gènes ou des régions transcrites, mais non traduites (5’UTR), et l’on peut penser qu’une exploration plus représentative des différentes régions du génome devrait conduire à l’identification de nouvelles DMR d’intérêt pour la détermination de biomarqueurs. Une très récente étude à l’échelle du génome s’appuie sur une cohorte très bien caractérisée pour des sous-phénotypes du TCAF (Cobben et coll., 2019renvoi vers). Un enrichissement des DMR dans les régions correspondant au corps des gènes et au démarrage de la transcription a été observé (Lussier et coll., 2018brenvoi vers). Quatre DMR robustes ont été identifiées, associées au moins à un sous-phénotype, dont l’une (NECAB3) est partagée avec les travaux de Portales-Casamar et coll. (2016renvoi vers) et de Lussier et coll. (2018arenvoi vers) et présente donc un potentiel de biomarqueur. Le faible chevauchement de ces trois études repose à la fois sur les méthodes d’approches différentes pour explorer le DNA méthylome, mais aussi sur la manière dont les cohortes ont été construites (stratification des patients par sous-phénotypes, en particulier).
Les études de Laufer et coll. (2013renvoi vers), Chater-Diehl et coll. (2016renvoi vers), Portales-Casamar et coll. (2016renvoi vers) et Lussier et coll. (2018brenvoi vers) ont mis en évidence, dans des cohortes d’enfants TCAF, des DMR associées à des gènes importants pour diverses étapes et pathologies neurodéveloppementales, dont, de façon remarquable : i) le large groupe (clusters) de gènes codant les protocadhérines dont les rôles clés dans le développement neural se sont récemment renforcés et étendus (Toyoda et coll., 2014renvoi vers ; Aran et coll., 2016renvoi vers ; El Hajj et coll., 2016renvoi vers ; Molumby et coll., 2017renvoi vers) ; ii) des gènes soumis à l’empreinte parentale, c’est-à-dire qui montrent une expression spécifique à partir d’un seul des deux allèles, selon son origine parentale, sur la base de la méthylation, soit de l’allèle maternel, soit de l’allèle paternel – l’autre étant maintenu épigénétiquement silencieux. De façon intéressante, 30 % des gènes soumis à l’empreinte expriment des ANR non-codants, dont la dérégulation est impliquée dans les désordres neuro-développementaux, tels que ceux issus du locus SNRPN-UBE3A exprimé spécifiquement dans les neurones et associé au Syndrome de Prader-Willi (LaSalle et coll., 2015renvoi vers). Cette expression, étroitement régulée par des mécanismes épigénétiques, est cruciale pour le neuro-développement (Davies et coll., 2008renvoi vers). Les deux « hots-spots » constitués par les groupes de gènes de protocadhérines, d’une part, et les gènes soumis à l’empreinte, d’autre part, ont été aussi identifiés dans des analyses du méthylome de l’ADN dans des modèles murins de FASD à distance de l’exposition (chez l’adulte) et liés à des modifications de l’expression des ARN (Laufer et coll., 2013renvoi vers ; Laufer et coll., 2015renvoi vers). Ils présentent donc un potentiel de biomarqueurs important.
De façon intéressante, et qui pourrait permettre de discriminer potentiellement à l’avenir le type d’exposition dû à la consommation d’alcool par les parents, les études d’exposition pré-conceptionnelle d’origine paternelle ne montrent pas de modifications de la méthylation de l’ADN ou de l’altération de l’empreinte dans le sperme, mais une expression différentielle de gènes soumis à l’empreinte dans le placenta des fœtus qui en sont issus (Chang et coll., 2017renvoi vers).
L’hétérogénéité des cohortes TCAF recrutées jusqu’à présent pour des études du méthylome de l’ADN (données démographiques de sexe, âge, ethnicité...) (Laufer et coll., 2015renvoi vers ; Chater-Diehl et coll., 2016renvoi vers ; Portales-Casamar et coll., 2016renvoi vers ; Lussier et coll., 2018arenvoi vers) et leur taille très restreinte constituent un frein à l’identification de marqueurs robustes pouvant s’appliquer à des populations étendues. Le succès de deux études combinant des méthodes de détection d’événements de méthylation de l’ADN à des approches d’intelligence artificielle (machine learning) pour la détection de l’exposition prénatale au tabac est néanmoins prometteur à ce titre pour l’EPA (Joubert et coll., 2012renvoi vers ; Ladd-Acosta et coll., 2016renvoi vers).

Perturbations de l’épigénome, potentiel en biomarqueurs et thérapies
et troubles de l’usage de l’alcool chez l’adulte

Nous ne décrirons pas en détail les explorations de l’épigénome liées aux consommations à risque d’alcool chez l’adulte (consommation, sevrage) et leur lien avec l’addiction ou d’autres pathologies neuropsychiatriques. Ces investigations en sont encore à leur début, et des discordances apparaissent entre diverses études, dues à la taille modeste et à la définition des cohortes. Des modifications de la méthylation de l’ADN ou d’hydroxy-méthylation (Koller et coll., 2019renvoi vers) ont été trouvées dans des tissus périphériques, dans les régions promotrices de gènes, reliées aux consommations à risque, que ce soit durant la période de consommation ou de sevrage, et en lien avec des phénomènes de neuro-adaptation. Ces événements de méthylation pourraient ainsi sous-tendre un rôle complexe dans le risque de troubles liés à l’usage de l’alcool persistants (Zhang et Gelernter, 2017renvoi vers) et sont localisées, par exemple, dans des séquences répétées du génome, de régions régulatrices de gènes du métabolisme de l’alcool, du stress oxydatif et de la réponse immunitaire (aldéhyde-déshydrogénases, cytochrome P450, TLR4 Toll-like Receptor 4 [Ureña-Peralta et coll., 2018renvoi vers]...), et dans les gènes du transporteur de la dopamine (DAT), du récepteur de la dopamine (DRD2 ; Hagerty et coll., 2020renvoi vers ; Hill et Sharma, 2019renvoi vers), du sous-type de Récepteur N-méthyl-D-aspartate 2b (GRIN2B), du facteur de croissance NGF (nerve growth factor), du récepteur µ opioïde (OPRM1), du transporteur de la sérotonine (5HTT/SLC6A4), avec pour ce gène une cohérence avec des modifications de l’expression. Des interactions génome x épigénome ont aussi été mises en évidence : des polymorphismes sur des nucléotides CpG (SNP-CpG) qui affectent donc les possibilités de méthylation (Zhang et Gelernter, 2017renvoi vers). Le développement des explorations à l’échelle du génome a confirmé l’importance de perturbations de la méthylation de l’ADN sur le promoteur du gène GDAP1 (Ganglioside induced Differentiation Associated Protein 1) par ailleurs associé à la maladie de Charcot-Marie-Tooth (Zhang et Gelernter, 2017renvoi vers) et révélé aussi des sites CpG exploitables par PCR comme futurs biomarqueurs d’exposition (Philibert et coll., 2018renvoi vers). Des variations d’expression de miARN ont également été identifiées qui en lien avec des marqueurs génétiques (SNP), pourraient prédire la prédisposition aux consommations à risque d’alcool (Rudra et coll., 2018renvoi vers). Les enjeux pour la détection de biomarqueurs de ces troubles, d’identification de marques « miroirs » dans les tissus périphériques (Berg et coll., 2018renvoi vers ; Clark et coll., 2018renvoi vers ; Perrier et coll., 2019renvoi vers) sont les mêmes que pour le TCAF. Ils sont moins complexes que pour le TCAF, néanmoins, puisque qu’ils s’adressent à l’adulte, et concernent en particulier : 1) la détection des consommations à risque d’alcool ; 2) les problèmes liés à la prescription de médicaments « épigénétiques » par rapport aux problématiques in utero ou en période périnatale, du fœtus, de l’enfant ou de l’adolescence (voir plus loin).

Perspectives et freins pour l’identification et l’usage de futurs biomarqueurs de TCAF

Interprétation fonctionnelle du dépôt de marques épigénétiques aberrantes après EPA

Les études menées chez l’adulte qui ont été exposés à l’alcool durant la vie fœtale soulèvent la question suivante : les marques épigénétiques aberrantes observées sont-elles directement dues à l’EPA ou correspondent-elles plutôt au dépôt de marques épigénétiques en réponse à des défauts de fonctionnement des circuits neuronaux engendrés a posteriori par cette exposition ? Peu d’études ont été entreprises chez le nouveau-né exposé, pour des raisons évidentes de difficultés d’accès au matériel biologique que constitue le cerveau. Des changements épigénétiques globaux ont été néanmoins décelés post mortem dans le noyau des cellules neurales (« nerveuses », neurones, astrocytes, oligodendrocytes) dans le cerveau de fœtus et d’enfants, et bien qu’ils soient d’interprétation délicate, suggèrent que des études approfondies de l’épigénome devraient être entreprises pour cartographier ces marques épigénétiques qui semblent se déposer à très courte distance temporelle de l’exposition (Jarmasz et coll., 2019renvoi vers).
De plus, la fonctionnalité de ces perturbations reste obscure dans de nombreux cas. D’une part, un grand nombre d’études présentent des résultats (DMR) sur cerveau entier, ce qui pose le problème de leur interprétation par rapport aux phénotypes pertinents pour le TCAF touchant à la prolifération, la différenciation neuronale, l’activité et la plasticité synaptique ou au comportement. La validation moléculaire de l’impact de ces modifications sur l’activité de gènes pertinents reste à démontrer dans l’immense majorité des cas. Les approches appropriées devraient cibler la population cellulaire d’intérêt, et la ou les régions du génome modifiées, dans un but rectifier la signature épigénétique par des techniques dérivées de l’édition des génomes (figure 5.2Renvoi vers ; Holtzman et Gersbach, 2018renvoi vers), afin d’en explorer l’impact positif sur l’amélioration ou la restauration d’un niveau physiologique de l’expression génétique et, le cas échéant, du phénotype cellulaire ou de la fonction neuronale. Cette technologie laisse intacte la séquence de l’ADN, mais cible, sur une région précise du génome, un acteur épigénétique capable de restaurer les marques épigénétiques (par exemple une HAT/KAT ou une HDAC/KDAC). On pourrait ainsi explorer l’impact de la restauration de cette/ces marque(s) sur l’expression génique et les phénotypes liés au TCAF. Cette démonstration de la signification biologique d’une DMR permettrait donc de la retenir en tant que biomarqueur potentiel.
De nombreuses DMR sont situées dans des régions inter-géniques – c’est-à-dire à distance des gènes. Comme nous l’avons vu, de nombreuses régions régulatrices de l’activité des gènes (enhancers) sont localisées dans ces régions inter-géniques, et il est bien difficile à l’heure actuelle d’attribuer les événements de méthylation, identifiés dans une DMR, aux perturbations de l’expression d’un gène donné, celui-ci pouvant se trouver à grande distance de la DMR, voire même sur un autre chromosome. Les nouvelles approches de cartographie de l’architecture tridimensionnelle du génome (technologie de Hi-C, dérivée de la Chromosome Conformation Capture 3C) devraient contribuer à attribuer une DMR à un ou plusieurs gènes, à travers l’identification de domaines chromatiniens appelés « Topologically Associated Domains » (TADs) et de régions plus restreintes (sous-TADs) et ce, également, dans des approches en cellule unique et non seulement en populations cellulaires (Lee et coll., 2019renvoi vers).
Le fait que des inhibiteurs d’acteurs épigénétiques aient des effets bénéfiques de réduction des défauts neuro-développementaux et des endophénotypes liés aux TCAF pourrait aussi passer par la perturbation de modifications post-traductionnelles de protéines non-histones, comme des facteurs de transcription ou d’autres types de régulateurs dont l’activité est aussi contrôlée par l’acétylation, la méthylation ou d’autres modifications chimiques. Comme nous l’avons déjà évoqué, un remaniement de la combinaison de tels facteurs de transcription dans des régions chromatiniennes dont l’accessibilité serait inchangée pourrait aussi rendre compte des perturbations d’expression génique observée en réponse à l’EPA, ainsi que de la modification de l’expression de miARN.

Interaction entre gène et environnement/épigénétique

La sensibilité du fœtus à l’alcool repose non seulement sur les modes d’EPA (doses, chronicité, consommation massive d’alcool sur une courte durée...) mais aussi sur sa propre architecture génétique et de celle de ses parents : présence de variants ou de combinaisons de variants génétiques, favorisant une vulnérabilité aux TUA, chez la mère ou le père, et aux défauts neuro-développementaux susceptibles d’être engendrés par l’EPA, chez le fœtus. Ce concept « gène x environnement » est particulièrement pertinent dans le cas de maladies neuropsychiatriques dont la composante génétique est faible (comme la dépression majeure, ou la vulnérabilité aux addictions). Les développements spectaculaires du séquençage à haut-débit des génomes et la création de très grandes cohortes ont récemment permis d’identifier des variants associés à un risque plus élevé de développer une dépression majeure (CONVERGE consortium, 2015renvoi vers) ou des consommations à risque d’alcool (Liu et coll., 2019renvoi vers). Cela pourrait à terme avoir des répercussions positives sur la capacité à cerner la vulnérabilité au TCAF, si appliqué aux parents ou même au fœtus. À l’avenir, des études sur le TCAF pourraient potentiellement révéler l’existence de variants dans des gènes codant des acteurs épigénétiques, comme c’est le cas, pour la dépression majeure, de la HDAC SIRT1, un intégrateur important du métabolisme (CONVERGE consortium, 2015renvoi vers). Plus encore, une étude sur la prédiction des causes de mortalité (toutes confondues) suggère que les informations épigénétiques seraient potentiellement plus informatives que les génétiques (Zhang et coll., 2017renvoi vers), incitant fortement à poursuivre les études des remaniements de l’épigénome en réponse à l’EPA dans la mesure où ils pourraient permettre d’identifier des individus à risque et de permettre la mise en place de stratégies de prévention ou de suivi.

Accès aux signatures épigénétiques : le parallèle entre cerveau et tissus périphériques

L’identification de biomarqueurs épigénétiques pertinents caractéristiques du TCAF est freinée par la grande difficulté, sinon l’impossibilité d’effectuer des biopsies du cerveau. Pour contourner cette limitation, les prélèvements de tissus périphériques (cellules sanguines nucléées, épithélium buccal [récolté par frottis] ou olfactif...) peuvent constituer une alternative, à condition qu’ils représentent un bon miroir des altérations de l’épigénome de la région cérébrale d’intérêt. Les cellules buccales présentent l’intérêt d’avoir la même origine embryonnaire ectodermique que les cellules du cerveau. Des DMR spécifiques de l’EPA ont été identifiées à la fois dans l’hypothalamus et les leucocytes de rat et montrent des changements dans la même direction dans ces deux types de tissus (Lussier et coll., 2018brenvoi vers). Ces DMR contiennent de nombreux sites potentiels de facteurs de transcription et touchent des gènes impliqués dans la fonction immunitaire, le remodelage épigénétique, le métabolisme et la signalisation hormonale. L’une d’elles concerne le gène codant le récepteur à la dopamine D4, DRD4, qui a été trouvée également dans les échantillons d’épithélium buccal de cohortes TCAF (Fransquet et coll., 2016renvoi vers ; Portales-Casamar et coll., 2016renvoi vers). Des événements de méthylation de l’ADN placentaires ont montré une association avec l’EPA. Ils ont été identifiés sur des régions répétées du génome dans des régions proches de site de démarrage de la transcription, et riches en site de facteurs de transcription pour des processus importants (modulation immunitaire et métabolisme) qui ouvre également une piste (Loke et coll., 2018renvoi vers). Des miARN maternels circulants, présents à des taux élevés en milieu et fin de grossesse, ont été identifiés dans des études visant à prédire le devenir des enfants après EPA (Balaraman et coll., 2016renvoi vers ; Tseng et coll., 2019arenvoi vers ; Tseng et coll., 2019brenvoi vers) et représentent également des biomarqueurs potentiellement intéressants.

Stratégies d’avenir d’identification de biomarqueurs

La combinaison d’approches de séquençage à très haut-débit (à l’échelle de la cellule unique ou non), des techniques dérivées de l’édition du génome et de l’épigénome (figure 5.2Renvoi vers) et de l’intelligence artificielle, est susceptible de faire apparaître de nouvelles voies de dérégulation proéminentes dans le TCAF.
5.2 : Technologies d’édition du génome et de l’épigénome
Par exemple, une étude transcriptomique utilisant des approches algorithmiques d’apprentissage automatique non supervisé (unsupervised machine learning) dans un modèle d’embryon de poulet a mis en évidence des miARN co-régulant plusieurs voies de régulation. Certaines étaient connues, d’autres ont été révélées grâce à une réduction de la complexité des données (Al-Shaer et coll., 2019renvoi vers). Cette combinaison d’approches de pointe peut s’appliquer à des modèles cellulaires ou organoïdes (Luo et coll., 2016renvoi vers) issus de patients TCAF (cellules pluripotentes induites différenciées en neurones par exemple) et être couplée à de l’imagerie à haut contenu-haut débit qui, faisant également appel à l’intelligence artificielle, constitue une stratégie de choix pour la découverte de nouvelles molécules à potentiel thérapeutique par des cribles à (très) haut débit.

Signatures épigénétiques et diagnostic précoce de FASD

Un biomarqueur n’a pas de valeur pris isolément, mais uniquement en combinaison avec d’autres biomarqueurs et à la lumière d’un tableau clinique global. Associé à celui-ci, et à des marqueurs biochimiques métaboliques (Lecuyer et coll., 2017renvoi vers ; Andreu-Fernández et coll., 2019renvoi vers), d’imagerie cérébrale poussée (Chabenne et coll., 2014renvoi vers ; Paolozza et coll., 2017renvoi vers), de phénotypage comportemental (l’enregistrement des mouvements de l’œil : Paolozza et coll., 2014arenvoi vers ; Paolozza et coll., 2014brenvoi vers ; Paolozza et coll., 2015renvoi vers ; Zhang et coll., 2019renvoi vers), des tests psychomoteurs et neuropsychiatriques, l’identification de marques épigénétiques pourrait conduire à un diagnostic plus précoce de l’EPA et à la prise en charge de jeunes patients pour une remédiation non-médicamenteuse ou médicamenteuse. De façon notable, le dimorphisme sexuel observé pour certains biomarqueurs moléculaires ou comportementaux (Lee et Rivier, 1996renvoi vers ; Weinberg et coll., 2008renvoi vers ; Paolozza et coll., 2015renvoi vers ; Loke et coll., 2018renvoi vers), pourrait également concerner de futurs marqueurs épigénétiques, avec le biais actuel suivant : la majorité des études épigénétiques sur l’animal ont concerné des mâles pour s’affranchir des variations potentiellement liées au cycle œstral chez les femelles (Lussier et coll., 2017renvoi vers). Plus le diagnostic et la prise en charge seront précoces, meilleures seront les chances d’améliorer les capacités cognitives et comportementales du jeune patient et sa trajectoire de vie.

Épigénétique et perspectives thérapeutiques

La combinaison d’approches de pointe (génome x épigénome, technologies d’édition de l’(épi)génome [figure 5.2Renvoi vers], intelligence artificielle, cellules pluripotentes issues de patients TCAF ou ayant subi une EPA et différenciées en cellules neurales ou en organoïdes cérébraux) peut être non seulement appliquée à l’identification de biomarqueurs, mais également être couplée à de l’imagerie à haut contenu-haut débit qui, faisant également appel à l’intelligence artificielle, constitue une stratégie de choix pour la découverte de nouvelles molécules thérapeutiques.

Perspectives d’intervention médicamenteuse

Les marques aberrantes observées après EPA touchent donc des gènes impliqués dans la performance des fonctions neuronales et un certain nombre d’études suggère qu’elles sont associées à un dysfonctionnement cérébral – même s’il reste à le démontrer au niveau moléculaire, en utilisant des outils d’édition de l’épigénome (figure 5.2Renvoi vers). Des compléments alimentaires à base de choline semblent avoir des effets bénéfiques, mais uniquement chez de très jeunes enfants (2-5 ans), suggérant un effet sur le développement cérébral (Wozniak et coll., 2015renvoi vers) et indiquant que ces marques épigénétiques sont potentiellement réversibles. Il est tentant d’imaginer qu’en jouant sur l’activité des enzymes impliquées dans leur dépôt sur le génome, on pourrait effacer ces marques et retourner à une conformation normale de la chromatine, et de l’expression de ces gènes. Le problème n’est pas simple car il ne suffit pas d’exciser les marques aberrantes, mais aussi de favoriser le dépôt des marques normales, physiologiques. La balance et le dialogue existant entre les machineries de méthylation de l’ADN et de dépôt de marques répressives/activatrices sur les queues des histones est un levier intéressant. Des « médicaments épigénétiques » (epidrugs) sont d’ailleurs déjà utilisés en clinique dans le traitement de certains cancers, et depuis fort longtemps en psychiatrie (tel que l’acide valproïque ; Sharma et coll., 2005renvoi vers) : c’est le cas des inhibiteurs de HDACs qui, en empêchant la désacétylation d’histones, favorisent le retour à une conformation ouverte de la chromatine et à une expression physiologique des gènes (figure 5.1Renvoi vers). Des exemples encourageants sont procurés par des études effectués dans les modèles animaux adultes, dans un contexte d’addiction (Drissi et coll., 2020renvoi vers). Cependant, la multiplicité des HDAC, combinée aux difficultés d’identifier des inhibiteurs spécifiques des différents membres des HDAC, freinent le développement thérapeutique. De plus, ces inhibiteurs agissent globalement sur le génome et sont susceptibles de déréguler d’autres gènes qui n’ont pas été perturbés par l’EPA, avec un risque de bouleversement majeur de la fonction neuronale. Enfin, le mode d’administration systémique de ces molécules implique qu’elles affectent d’autres tissus et cellules que ceux et celles que l’on veut cibler (ici le cerveau, dans des régions précises et des populations cellulaires précises). L’utilisation de nanoparticules capables de passer la barrière hématoencéphalique et de cibler spécifiquement une population cellulaire donnée pourrait à l’avenir contribuer à résoudre ce problème, car on peut les associer à des anticorps spécifiques de marqueurs cellulaires (figure 5.3Renvoi vers).
5.3 : Modifier l’épigénome de façon ciblée dans un tissu ou une (sous)-population cellulaire
Les techniques dérivées de l’édition de l’épigénome, couplées à l’utilisation de ces nanoparticules, sont susceptibles de diriger une molécule thérapeutique sur une cible génique (ou une combinaison de cibles géniques) (figures 5.2Renvoi vers et 5.3Renvoi vers). Encapsulées dans des nanoparticules ad hoc, ces acteurs couplés à ces outils d’édition, pourraient modifier de façon « chirurgicale » l’accessibilité de la chromatine dans des gènes clés et rectifier l’expression de gènes d’importance pour le neuro-développement ou les fonctions neuronales, dans une sous-population cellulaire ciblée. De telles approches ont déjà été tentées pour des maladies neurodéveloppementales (Liu et coll., 2016brenvoi vers ; Liu et coll., 2018renvoi vers ; Wang et Jiang, 2019renvoi vers). La caractérisation des modifications de l’épigénome dans le TCAF et l’identification de gènes à cibler de façon privilégiée en fonction de leur rôle dans le neurodéveloppement rend possible d’envisager ce genre d’approche pour ce spectre de pathologies. Ces nouvelles technologies laissent donc entrevoir des solutions thérapeutiques « à façon », dans le futur, mais la route est encore longue entre les preuves de concept chez l’animal et leur mise en place chez l’homme et encore plus chez l’enfant.
Outre ces aspects techniques, comme nous l’avons vu, le développement du cerveau est particulièrement contrôlé par des mécanismes épigénétiques ; la diversification et la dynamique très particulière des marques de méthylation de l’ADN de la naissance à l’adolescence, touche plus particulièrement les neurones, mais aussi les cellules gliales, et engendre une complexité inédite de leur combinaison et de leur interprétation, par les machineries épigénétiques, sur l’expression des gènes. Ces caractéristiques rendent très complexe et hasardeuse la perspective de la manipulation du méthylome de l’ADN, en particulier, dans le cerveau de nouveau-nés, de jeunes enfants et d’adolescents.
De plus, dans une population cellulaire neurale donnée, toutes les cellules ne vont pas être touchées de la même manière par l’EPA. La réponse à l’EPA présente un aspect fortement stochastique. Le cerveau en développement présente en effet une variabilité physiologique entre cellules (Pollen et coll., 2014renvoi vers), même dans une population cellulaire bien caractérisée que l’on peut identifier à l’aide de marqueurs (ex. : progéniteurs neuraux ; jeunes neurones de couches spécifiques du cortex ; cellules gliales et non neurales ; microglie d’origine immunitaire). Cette variabilité procure vraisemblablement, au cerveau en développement et adulte, une adaptabilité aux exigences du fonctionnement et de la plasticité neuronale, ainsi qu’en réponse à des variations de l’environnement. Cependant, cette variabilité entre cellules est exacerbée par l’EPA et c’est dans les cellules les plus « déviantes » que l’expression des gènes qui contrôlent le neuro-développement est la plus dérégulée (Hashimoto-Torii et coll., 2014renvoi vers ; Ishii et coll., 2017renvoi vers). Idéalement, il faudrait pouvoir cibler uniquement cette sous-population cellulaire vulnérable sans perturber celles qui ont adopté un destin cellulaire normal. On conçoit donc que, même si les outils moléculaires existent pour faire des « frappes » chirurgicales en vue de restaurer les marques épigénétiques anormales, le chemin soit encore long.

Remédiation non-médicamenteuse

Des travaux ont répertorié les interventions non-médicamenteuses qui visent à améliorer l’état des jeunes patients TCAF. Ces interventions incluent : des stratégies d’éducation et d’apprentissage (utilisant ou non les jeux vidéo et la réalité virtuelle), la thérapie du contrôle cognitif (visant à rétablir une hiérarchie satisfaisante entre les informations provenant de l’environnement extérieur et intérieur, et la connexion entre la pensée et l’action par auto-observation et autorégulation), la thérapie langagière et linguistique, les interventions précoces, en mathématiques, et l’entraînement par répétition pour la mémoire, et les stratégies sociales et comportementales. Quelques études bien randomisées avec des cohortes contrôles qui s’intéressent à des déficits fonctionnels spécifiques semblent indiquer que ces stratégies peuvent apporter effectivement des améliorations (Peadon et coll., 2009renvoi vers). Des interventions, visant à former les parents (mères consommant des substances psychotropes) ou les soignants, réduisent le risque de dépression chez l’enfant, la consommation de drogues ou d’alcool chez les mères, le cas échéant, et le comportement de l’enfant. Des thérapies parent-enfant montrent également des effets bénéfiques sur le comportement de l’enfant et le stress des parents. Certaines sont destinées aux adultes TCAF ou aux adolescents TCAF et leurs parents et réduisent la consommation de drogues et d’alcool, la prise en charge des responsabilités familiales, le recours aux services médicaux et de santé mentale (Petrenko et Alto, 2017renvoi vers).
Même si là encore, tout reste à démontrer en ce qui concerne le TCAF, on peut supposer que ces interventions, à travers la stimulation d’une activité neuronale améliorée agisse en partie sur des marques épigénétiques, comme cela est suggéré par des études chez l’adulte concernant les effets bénéfiques de l’exercice physique (Chen et coll., 2018renvoi vers).

Conclusion

L’étude de l’épigénome, de sa robustesse ou de sa plasticité, de la question du dépôt précoce de marques épigénétiques suite à l’exposition et de leur persistance à distance temporelle, ainsi que de l’impact fonctionnel de ces perturbations, est donc une piste à poursuivre de façon privilégiée, que ce soit suite à une EPA, sur le cerveau de l’enfant et de l’adulte, ou suite à une consommation chez l’adulte. Il est tout aussi important de favoriser en parallèle la constitution de larges cohortes bien phénotypées (données démographiques de sexe, d’âge, d’ethnicité, de mode de recrutement d’alcoolisation ou de sevrage...). La réversibilité du dépôt de marques épigénétiques procure un espoir thérapeutique certain. Elle s’articule avec une perspective de couplage avec des outils issus de l’édition du génome et d’administration de molécules à potentiel thérapeutique ciblées sur des sous-populations cellulaires via l’utilisation de nanoparticules (et non systémique). La caractérisation de ces sous-populations cellulaires, grâce aux approches sur cellule unique en plein essor (transcriptomiques et épigénomiques), est une voie prometteuse. Le développement de l’intelligence artificielle, que ce soit pour l’analyse de transcriptomes ou d’épigénomes, mais aussi en imagerie à haut contenu et haut débit (par exemple l’imagerie de la conformation de la chromatine), est susceptible d’ouvrir des brèches remarquables dans notre compréhension des mécanismes sous-tendant le TCAF et la découverte de nouvelles voies thérapeutiques. Cependant, dans l’état actuel de nos connaissances (datant d’une ou deux décennies), le traitement médicamenteux d’enfants TCAF soulève un grand nombre de questions et la prévention de la consommation d’alcool pendant la grossesse et en période de préconception reste primordiale. Les voies de remédiation non-médicamenteuses qui pourraient reposer sur un remaniement de l’épigénome – ce qui reste à démontrer – sont à considérer très sérieusement, avec l’enjeu des moyens humains et d’infrastructure qu’elles supposent de déployer. Dans tous les cas, la mise en œuvre de ces voies de remédiation et de suivi des patients implique de pouvoir poser un diagnostic précoce pour lequel l’utilisation de combinaisons de biomarqueurs, dont ceux issus de l’épigénétique, pourrait être déterminante.

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