Polyhandicap

2024


ANALYSE

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Recommandations


Recommandations

Recommandations d’action

Comme le groupe d’experts l’a souligné en préambule, le polyhandicap et les personnes polyhandicapées interrogent notre conception collective de l’humanité. La question philosophique de la valeur d’une vie et de son humanité possède d’importants enjeux théoriques et pratiques, et a donné lieu à des controverses scientifiques et des controverses de terrain entre ceux qui ont défendu l’humanité de ces personnes et ceux qui l’ont contestée.
Ce type d’interrogations, toujours actuelles, participe à l’accentuation des réactions négatives, du rejet des personnes polyhandicapées et à la méconnaissance du polyhandicap.
Le groupe d’experts recommande que des opérations de sensibilisation et de mise en visibilité du polyhandicap soient organisées à destination de l’ensemble de la société. Ces opérations sont essentielles pour diminuer les réactions négatives, de méconnaissance ou de rejet, dont les personnes polyhandicapées et leurs familles sont l’objet.

L’importance de caractériser, identifier et diagnostiquer le polyhandicap

Définir le polyhandicap comme une entité clinique spécifique

Le terme « polyhandicap » qui n’a pas de réel équivalent dans la littérature internationale, est un terme francophone utilisé dans différents pays européens (France, Belgique, Italie et Suisse) mais aussi par certains pays d’Afrique du nord et au Canada. Dans la littérature internationale anglophone, d’autres termes existent et sont utilisés de manière variable selon les pays et leur langue. La notion de polyhandicap est plus précise que ceux-ci, parce qu’elle met l’accent sur le rôle de la lésion cérébrale intervenant sur un cerveau en voie de développement. En effet, cette lésion précoce explique l’évolutivité et l’intrication des déficiences. Elle explique la spécificité du tableau clinique et fonctionnel présenté par les personnes polyhandicapées ainsi que la complexité des interactions maturatives et la spécificité de la manière dont elles vont pouvoir développer des capacités, et enfin la singularité de leur expérience et de leur personnalité.
Actuellement, 4 définitions du polyhandicap coexistent : celle du Groupe Polyhandicap France (GPF) (de 2002), celle du décret de 2017, celle de la Haute Autorité de santé (de 2020) et celle du Protocole National de Diagnostic et de Soins (PNDS de 2020). Elles n’utilisent pas exactement les mêmes formulations, néanmoins elles convergent sur un socle commun. Toutes considèrent que le polyhandicap est une entité syndromique référant aux conséquences définitives d’un désordre, d’une anomalie ou d’une lésion survenue sur un cerveau en développement ou immature, dont les étiologies sont variées, progressives ou non, connues ou inconnues. Au niveau fonctionnel, le polyhandicap associe une déficience mentale évaluée comme sévère à profonde et une déficience motrice évaluée comme sévère. L’association de ces déficiences, qui interagissent entre elles et avec le développement physiologique du cerveau, engendrent une restriction extrême constatée des activités de communication et de relations ordinaires, ainsi qu’une réduction extrême de l’autonomie et de la mobilité.
Ce socle commun des définitions actuelles a été utilisé par le groupe d’experts pour définir le périmètre de l’expertise collective réalisée, qui porte donc sur le polyhandicap ainsi défini. Néanmoins, cette définition est liée à l’état de nos connaissances et aux limites de nos moyens actuels d’évaluation des capacités des personnes. Le recours à une définition du polyhandicap est important car il permet la reconnaissance de la personne et par là même autorise et conduit à s’y intéresser spécifiquement. Ce recours doit être associé à une vigilance éthique et pratique pour prévenir tout dogmatisme.
Ainsi, le groupe d’experts recommande de s’appuyer sur le socle commun que partagent les définitions actuelles du polyhandicap pour définir (ou reconnaître) le polyhandicap comme une entité clinique spécifique, distincte d’autres entités proches ou de catégories trop englobantes (comme la catégorie PIMD – Profound Intellectual and Multiple Disabilities – en usage dans les classifications internationales).
Le groupe d’experts recommande d’intégrer le polyhandicap dans l’ensemble des nomenclatures internationales (notamment CIM – Classification internationale des maladies – et CIF – Classification internationale du fonctionnement – de l’OMS) et nationales qui organisent les systèmes de soins et de protection sociale. Ceci étant nécessaire pour améliorer la connaissance, la participation sociale, les moyens d’accompagnement de ces personnes et assurer la surveillance épidémiologique et le suivi de l’état de santé de cette population.

Reconnaître le polyhandicap comme une maladie rare

La prévalence du polyhandicap serait comprise entre 0,5 et 1/1 000 enfants et se rapprocherait plutôt de 0,5/1 000 sur les dernières estimations.
Sur la base des données de prévalence actuelle, le groupe d’experts recommande de reconnaître le polyhandicap, quelle qu’en soit la cause, comme une maladie rare.

Mettre en place un accès rapide aux procédures de diagnostic devant des anomalies précoces

Le polyhandicap est secondaire à une altération sévère et précoce du neurodéveloppement via une altération irréversible de la prolifération neuronale, de la migration, de la synaptogenèse ou de la sélection synaptique. Il se révèle par des anomalies précoces de l’examen neurologique et des comorbidités, qui sont parfois en lien étroit avec la cause du polyhandicap (par exemple l’épilepsie dans les encéphalopathies développementales avec épilepsie).
Le diagnostic prénatal s’est considérablement développé grâce aux avancées de la médecine génomique et de l’imagerie fœtale. Il comprend deux situations principales : le diagnostic prénatal ciblé, qui vise à identifier chez le fœtus une maladie génétique déjà connue dans la famille, et le diagnostic lié à la détection de malformations fœtales pendant les échographies de suivi.
Les progrès technologiques offrent des perspectives encourageantes, mais la prise en compte des aspects éthiques et des conséquences pour les familles reste primordiale dans ces situations délicates.
Un examen neuromoteur anormal avant l’âge de 6 mois chez un enfant est le témoin d’une maladie potentiellement grave qui nécessite un avis spécialisé urgent. Le groupe d’experts recommande de permettre un accès rapide à une consultation spécialisée aux enfants ayant un examen clinique neurologique anormal avant l’âge de 6 mois de façon à initier la démarche diagnostique, étiologique et fonctionnelle et de démarrer l’accompagnement de l’enfant et de la famille.
L’intérêt de porter un diagnostic génétique et le risque d’erreur diagnostique du fait des facteurs confondants justifient de réaliser des investigations génétiques, en l’absence de cause acquise confirmée, après investigation clinique étayée et rigoureuse, en particulier dans les situations d’hypoxie anoxo-ischémique. Si l’indication d’une exploration génétique est reconnue, le groupe d’experts recommande de garantir l’accès rapide à un diagnostic génétique, en lien avec un service de génétique clinique.
Le groupe d’experts recommande la mise en place d’une indication de diagnostic dédiée au polyhandicap dans le cadre du Plan France Médecine Génomique 2025 afin de structurer un réseau diagnostique génétique dédié.

La prise en soins multidisciplinaire de la personne polyhandicapée

Le polyhandicap est une entité clinique complexe avec de nombreux troubles imbriqués. L’évaluation des besoins de soins, leur mise en place coordonnée et leur adaptation à l’avancée en âge, nécessitent une multidisciplinarité des approches et une coordination complexe.
Le groupe d’experts recommande d’évaluer systématiquement l’impact, tant sur le plan médical que sur la qualité de vie à court et long termes, des interventions mises en œuvre pour la personne polyhandicapée. Cette évaluation doit porter sur les bénéfices et les inconvénients de chaque intervention, pour la personne elle-même mais aussi à titre global, dans son environnement et pour sa famille. L’arrivée de toute « thérapie innovante » dans le champ du polyhandicap doit répondre aux critères bioéthiques communs à toute recherche sur la personne humaine.
Le groupe d’experts recommande ainsi que les prises en soins soient orientées vers des objectifs réalistes, définis régulièrement avec la personne polyhandicapée (enfant/adulte) et sa famille, et en lien avec l’évaluation médicale/paramédicale de la personne, afin de permettre une participation sociale et une qualité de vie aussi bonnes que possible, pour la personne et sa famille, tout au long de la vie.
Le groupe d’experts a décidé de proposer des recommandations de prise en soins qui s’appuient exclusivement sur des interventions fondées sur des preuves d’efficacité (evidence-based) et rapportées dans la littérature scientifique.

Améliorer la prise en soins en tenant compte de chacun des troubles associés au polyhandicap

Parler de « troubles associés » au polyhandicap pourra, au cours de notre développement, référer à des comorbidités (quand un symptôme est directement relié à un autre par un lien de causalité, dans un intervalle de temps défini), ou à des multi-morbidités (s’agissant de plusieurs symptômes dont le lien de causalité ne peut être établi), avec un impact en termes de complexité de prise en charge de la pathologie causale (s’agissant notamment soit de la charge en soins liée aux symptômes soit du retentissement en termes de mortalité notamment) et inscrivant le polyhandicap dans le cadre des pathologies chroniques et complexes où l’environnement dont la famille et les aidants tient une place prépondérante.

Les troubles de la motricité

Les troubles moteurs appartiennent à l’entité même du tableau de polyhandicap. À ce titre, la motricité de la personne polyhandicapée, à toutes les périodes de sa vie, mérite une attention particulière dans la prise en soins de réadaptation, afin de compenser les déficits moteurs primaires (pour augmenter la fonction motrice), d’éviter les déficits secondaires inhérents et de favoriser les actes moteurs (préhension, déplacement, etc.).
Les troubles de la motricité (déficits moteurs, mouvements anormaux, etc.) et neuro-orthopédiques (déformations de l’appareil locomoteur, etc.) sont permanents chez la personne polyhandicapée et entravent fortement les activités et la participation sociale. Les prises en soins thérapeutiques de ces troubles sont cruciales, potentiellement différentes selon les âges de la vie, mais constamment nécessaires à tous les âges de la vie.
Les interventions motrices doivent avoir pour objectifs de favoriser la motricité volontaire tout en évitant l’immobilité, et de prévenir les déficits secondaires. Les thérapies motrices pourraient ainsi se décliner pour diminuer les déficits moteurs primaires, en interventions favorisant la rééducation des déficits moteurs primaires (déficit musculaire, spasticité, etc.) via un apprentissage moteur. Un autre niveau serait la prévention de la survenue des déficits secondaires (rétraction musculaire, déformation squelettique, douleurs, limitations d’amplitudes articulaires, etc.). Enfin, un dernier niveau représenterait celui d’interventions directes sur les activités motrices (déplacements, actes de la vie quotidienne, etc.) via des adaptations, des aides techniques et autres innovations technologiques.
Le groupe d’experts recommande que sur le versant moteur, les interventions thérapeutiques aient pour objectifs de favoriser le mouvement (pour une amélioration de l’activité motrice) et la motricité volontaire (amélioration des déficits primaires), tout en évitant l’immobilité (pour éviter/prévenir les déficits secondaires). Il existe une intrication forte entre travail de la motricité (activité) et travail de l’activité motrice (déficit) qui est (ou doit être) l’objectif d’une rééducation motrice de la personne polyhandicapée, et intégrée dans son quotidien.
Dans ce sens, chaque individu doit pouvoir bénéficier d’une évaluation individuelle, régulière, par des équipes expertes dans la rééducation motrice mais aussi ayant une expertise en technologie. Les programmes d’interventions motrices doivent être pensés, conçus, sur les principes d’apprentissages moteurs et via les adaptations technologiques existantes et/ou à développer spécifiquement pour le polyhandicap, par des équipes de cliniciens mais aussi d’ingénieurs.
Le groupe d’experts recommande d’investir pour permettre l’innovation technologique des aides à la motricité et leur accès pour les personnes polyhandicapées.
Le groupe d’experts recommande de renforcer les moyens humains pour la rééducation motrice auprès des personnes polyhandicapées afin d’avoir un ratio d’au moins un thérapeute moteur pour une personne polyhandicapée pendant les actes de rééducation motrice.
Le groupe d’experts recommande de permettre à ce que chaque individu avec polyhandicap (enfant et adulte) bénéficie régulièrement dans son parcours d’une évaluation médicale et motrice pour identifier les éléments bloquants à la réalisation des objectifs moteurs, et redéfinir les objectifs de la rééducation motrice.
Le groupe d’experts recommande de favoriser la constitution d’équipes médico-chirurgicales expertes dans l’ensemble des aspects de l’évaluation, et des traitements de la spasticité, des dyskinésies et des troubles neuro-orthopédiques.
Le groupe d’experts recommande que l’activité physique, même minime, soit favorisée via au minimum les changements de position réguliers. Ces changements de position nécessitent la présence d’aides humaines disponibles sur l’ensemble du nycthémère.
Le groupe d’experts déconseille l’utilisation de techniques, de thérapies motrices passives, sans objectif spécifique, appliquées sur l’enfant ne permettant pas sa participation active (thérapies type neurodéveloppementales, oxygénothérapie hyperbare, etc.). Ces techniques n’ont en effet pas fait la preuve de leur efficacité.

L’épilepsie

L’épilepsie est souvent une comorbidité du handicap initial, c’est-à-dire qu’elle vient compliquer une trajectoire développementale anormale, en lien avec la cause du polyhandicap (génétique ou acquise, pré- ou postnatale). Parfois, l’épilepsie est le premier symptôme du trouble du neurodéveloppement. Elle est donc un révélateur de la maladie neurologique développementale, d’origine génétique, malformative. En l’absence d’étiologie connue, il est important de renouveler les explorations, quelques années plus tard, compte tenu de l’avancée des progrès notamment génétiques. Connaître la cause précise de l’épilepsie est bénéfique pour le patient et sa famille.
Alors que la prévalence de l’épilepsie au sein de la population générale est estimée entre 3 et 6/1 000, il s’agit d’une des comorbidités les plus fréquentes chez les patients polyhandicapés. Cette comorbidité constitue un véritable « sur-handicap », surtout en cas de pharmaco-résistance, en raison des complications respiratoires ou traumatiques des crises, des complications liées aux traitements, des troubles du comportement surajoutés. Cela crée un risque accru de mortalité.
La situation de polyhandicap ne doit pas dispenser le clinicien de faire une évaluation rigoureuse de l’épilepsie avant toute prise en soins : description précise et classification des crises, recherche de facteur(s) précipitant(s), évaluation du contexte clinique (notamment étiologie), réalisation d’un électro-encéphalogramme (EEG) de durée et de modalité adaptées au patient et à l’épilepsie, discussion des principes du suivi et des objectifs des soins et traitements prescrits.
Le groupe d’experts recommande que les critères de sévérité des crises soient recherchés : cyanose prolongée, crises traumatisantes, crises mal tolérées sur le plan hémodynamique ou respiratoire, crises avec phase postcritique prolongée. Les crises sévères seront traitées en priorité.
Le groupe d’experts recommande qu’une évaluation de l’état de santé, de l’état cognitif, d’éveil, nutritionnel, du sommeil, etc. soit systématiquement réalisée avant l’instauration du traitement antiépileptique car celui-ci peut avoir des effets secondaires plus difficiles à mettre en évidence du fait du polyhandicap.
Une modification du comportement chez un enfant épileptique polyhandicapé nécessite de questionner tous les facteurs potentiellement en cause : les facteurs liés à l’épilepsie, au polyhandicap, à l’étiologie sous-jacente, et enfin les facteurs environnementaux.
Tout mouvement ou phénomène paroxystique anormal chez la personne polyhandicapée n’est pas synonyme d’épilepsie. En cas de doute, et en l’absence de critère de gravité, la mise en place d’un traitement peut attendre de caractériser les phénomènes en étudiant des vidéos ou en réalisant un ou des enregistrements EEG.
En cas de résistance aux premières lignes de traitement anti-crise (épilepsie pharmaco-résistante), le groupe d’experts recommande de faire appel à un centre expert afin de réévaluer le diagnostic et la classification des crises et ainsi ajuster le traitement.

Les troubles respiratoires

Les troubles respiratoires sont la première cause de mortalité et la première cause d’hospitalisation en urgence dans la population polyhandicapée. Évaluer la fonction respiratoire chez les patients polyhandicapés ne peut se faire avec les outils usuels (épreuves fonctionnelles respiratoires qui nécessitent une participation active de la personne, ce qui n’est habituellement pas possible pour les personnes polyhandicapées) et repose donc avant tout sur l’examen clinique (présence de signes de lutte, auscultation, fréquence des infections respiratoires et de l’encombrement, etc.). Le groupe d’experts recommande que la fonction respiratoire soit systématiquement évaluée avant tout geste chirurgical nécessitant une anesthésie générale.
Bien que les interventions thérapeutiques à visée respiratoire aient peu fait l’objet d’études scientifiques de haut niveau de preuve, peu d’effets secondaires des interventions sont rapportés, et il apparaît notamment important de lutter contre l’encombrement bronchique chronique, de prévenir les infections respiratoires par la vaccination contre la grippe ou le pneumocoque, de veiller à un bon état nutritionnel et de veiller au positionnement adapté des personnes en toute situation, tout ceci s’intégrant dans le cadre d’un projet de soins concerté autour de la personne polyhandicapée.
Le groupe d’experts recommande que les moyens humains nécessaires, notamment en termes de kinésithérapeutes, soient attribués, en milieu sanitaire comme médico-social, afin de lutter contre l’encombrement respiratoire et en promouvant également l’apprentissage aux aidants des techniques de désencombrement manuelles ou avec des aides techniques. Une attention particulière au positionnement des patients doit être accordée.
La scoliose est l’un des éléments altérant la fonction respiratoire, et nécessite une prise en soins préventive et thérapeutique adaptée chez la personne polyhandicapée. À l’adolescence, la croissance entraîne la majoration rapide des scolioses qui doivent faire l’objet d’un suivi attentif et de mesures de prise en soins préventives et curatives.
Le groupe d’experts recommande que, dès l’enfance – et particulièrement au pic de croissance pubertaire –, les scolioses des personnes polyhandicapées fassent l’objet d’un suivi attentif et de mesures de prise en soins préventives et curatives.

Les troubles de l’alimentation, de la nutrition et de la digestion

Les troubles digestifs et les troubles liés à l’alimentation (dysphagie, dénutrition, reflux gastro-œsophagien, constipation) sont très fréquents chez les patients polyhandicapés, avec des intrications avec d’autres troubles notamment respiratoires, moteurs, orthopédiques et la douleur.
Des recommandations de la Société européenne de gastroentérologie, hépatologie et nutrition pédiatrique (ESPGHAN) ont été publiées en 2016, portant sur l’évaluation et le traitement des complications gastro-intestinales et nutritionnelles des enfants avec atteinte neurologique, non spécifiques à la population polyhandicapée mais la concernant cependant.
Le groupe d’experts recommande le suivi des recommandations de l’ESPGHAN en insistant notamment sur :
• la recherche de troubles de déglutition, leur évaluation (avec recours aux évaluations orthophonistes et en vidéofluoroscopie) et la mise en œuvre de mesures adaptées pour faciliter la prise alimentaire ;
• l’évaluation de l’état nutritionnel est indispensable et ne peut se faire par un seul paramètre et doit s’intégrer dans un suivi régulier, que ce soit dans le secteur médico-social ou hospitalier. Il faut ajuster les apports nutritionnels, en partant des références standards pour l’âge et en ajustant à l’évolution des paramètres anthropométriques mesurés régulièrement (au moins tous les 6 mois). Rappelons les signes d’alerte devant faire se poser la question d’une dénutrition chez l’enfant selon les critères de l’ESPGHAN : présence de complications de décubitus ou de signes de carences (phanères, œdèmes, etc.), poids pour l’âge <–2 DS (sur les courbes en population standard), épaisseur du pli cutané tricipital <10e percentile pour l’âge et le sexe, périmètre brachial <10e percentile, perte de poids ;
• une surveillance annuelle biologique des micronutriments est préconisée (fer, vitamine D, calcium, phosphore) ;
• quand une nutrition entérale est prolongée au-delà de plusieurs semaines, la mise en place d’une gastrostomie est préconisée, dont les objectifs et modalités devront être préalablement discutés avec la famille et les aidants professionnels ;
• l’évaluation et le traitement des troubles digestifs fréquents dans cette population (reflux gastro-œsophagien et constipation) doivent être systématiques.

La fragilité osseuse et les troubles endocrinologiques

L’ostéoporose est une maladie généralisée du squelette qui entraîne une diminution de la résistance de l’os et par conséquent entraîne des fractures osseuses. La baisse de la densité minérale osseuse et les fractures sont fréquentes dans la population polyhandicapée. Il est donc nécessaire de savoir reconnaître la fragilité osseuse de ces patients, la diagnostiquer, la prévenir et la traiter le cas échéant.
Des recommandations nationales existent concernant la fragilité osseuse secondaire de l’enfant qu’il convient d’appliquer aux patients polyhandicapés, nécessitant l’accès des patients polyhandicapés, enfants et adultes, aux services spécialisés s’occupant de la santé osseuse.
Le groupe d’experts recommande l’accès des patients polyhandicapés enfants et adultes à une évaluation spécialisée de leur santé osseuse.
Le groupe d’experts recommande qu’une évaluation, et quand cela est possible une prévention des facteurs de risque de fragilité osseuse, soit réalisée pour les patients polyhandicapés : susceptibilité génétique, état nutritionnel, limitation de la mobilité, traitements associés dont les antiépileptiques, exposition solaire et carence vitaminique, statut pubertaire.
Le groupe d’experts recommande que la recherche d’une fragilité osseuse soit réalisée dans le cadre du bilan étiologique d’une douleur inexpliquée chez le sujet polyhandicapé.
La mesure de la densité minérale osseuse (DMO) repose sur la mesure en ostéodensitométrie biphotonique, dont la mesure et les normes établies au niveau du rachis lombaire et du corps entier sans la tête rendent la faisabilité parfois difficile pour des patients polyhandicapés. Des mesures sur d’autres sites, notamment le fémur proximal et distal, se développent mais nécessitent d’être davantage pratiquées.
Le groupe d’experts recommande de réaliser la première évaluation osseuse dès l’apparition de fractures des os longs sans traumatisme les expliquant ou de fractures de vertèbres, ou de douleurs inexpliquées, notamment en cas de dénutrition sévère prolongée et idéalement à partir de 6 à 8 ans. Ultérieurement, le suivi sera déterminé par la survenue de fractures, en cas de valeurs anormales de la DMO à la première évaluation et/ou à la puberté et en fin de croissance.

La douleur

La douleur est définie par l’Association internationale sur l’étude de la douleur (IASP) comme « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à, ou ressemblant à celle associée à, une lésion tissulaire réelle ou potentielle ». Il en découle d’une part la possibilité d’expérimenter la douleur en l’absence de lésion tissulaire identifiée et d’autre part cette définition reconnaît l’existence de la douleur y compris pour les personnes dans l’impossibilité de l’exprimer par les moyens usuels de communication. La description de sa propre expérience douloureuse doit être respectée, et il est donc essentiel d’avoir des moyens de l’évaluer, adaptés à la personne polyhandicapée.
L’identification de la douleur et son évaluation avec des outils adaptés, la reconnaissance de son étiologie et son traitement sont particulièrement nécessaires.
Le groupe d’experts recommande que toute modification du comportement, du tonus ou du sommeil fasse évoquer la possibilité d’une douleur nécessitant une évaluation spécifique.
Le groupe d’experts recommande la réalisation d’une enquête étiologique approfondie en cas de symptôme douloureux avec un examen clinique détaillé et en s’aidant le cas échéant d’outils diagnostiques adaptés. Les causes digestives, musculo-squelettiques, dentaires, cutanées, une fragilité osseuse seront notamment recherchées, ainsi que des douleurs neuropathiques, sans oublier les étiologies retrouvées en population générale (poussée dentaire, menstruations, appendicite, etc.) ni les douleurs liées aux soins et traitements.

Les comportements difficiles

Les comportements difficiles sont des manifestations d’inconfort et sont le reflet d’une souffrance physique ou psychique dont il faut prendre la mesure pour comprendre ce que vit et ressent la personne. Ce n’est qu’alors que l’on peut adopter l’attitude la plus adéquate en vue d’améliorer ces comportements difficiles.
En cas de survenue de comportements difficiles (impulsivité majeure, automutilations, agressivité, cris incessants, troubles majeurs du sommeil), le groupe d’experts recommande d’entreprendre une enquête clinique approfondie à la recherche d’une potentielle cause : douleur viscérale, musculo-squelettique, dentaire, sinusienne, céphalées, etc., mais aussi changement d’équipe éducative, d’horaire de coucher, de lieu de vie, de mode d’alimentation. Cette enquête est parfois longue et doit faire appel à l’ensemble des personnes qui vivent auprès de l’enfant ou de l’adulte. Le traitement de la cause identifiée (suspectée ou prouvée) est requis avant toute prise en charge symptomatique.
Le groupe d’experts recommande que l’utilisation des différentes méthodes visant à améliorer le confort et le comportement des personnes polyhandicapées s’accompagne d’évaluations cliniques régulières pour chaque patient.

Les troubles du sommeil

Les troubles du sommeil sont fréquents dans la population polyhandicapée, moins étudiés chez l’adulte, avec un retentissement important sur la qualité de vie des personnes et de leur entourage. Ils peuvent être en lien avec des troubles somatiques intrinsèques (pathologie causale du polyhandicap, troubles du tonus, douleur, troubles digestifs, encombrement respiratoire, épilepsie mal stabilisée) ou des facteurs environnementaux extrinsèques (traitements, bruit environnant, stimuli en lien avec le matériel médical, manque d’activité, facteurs relationnels, etc.).
Le groupe d’experts recommande que les troubles du sommeil soient systématiquement évalués chez les personnes polyhandicapées, en termes de type de trouble (insomnie, réveils, troubles respiratoires, mouvements anormaux, hypersomnolence diurne, parasomnies), de fréquence mais aussi d’impact sur le patient et son entourage.

Savoir évaluer les compétences, les déficiences et la qualité de vie de la personne polyhandicapée

Les compétences et déficiences

Quelle qu’en soit la cause, les lésions précoces qui interviennent dans le polyhandicap désorganisent la dynamique développementale et interagissent avec le développement et la maturation physiologiques des structures et des fonctions cérébrales, entraînant des dysfonctionnements qui interfèrent entre eux et conduisent à l’intrication progressive de handicaps multiples. L’acquisition des compétences motrices, psychiques, neurologiques, mentales et sensorielles en est limitée drastiquement. Aussi, l’évaluation des compétences et des déficiences de la personne polyhandicapée est complexe et nécessite des évaluations régulières de la situation globale de la personne polyhandicapée et de ses compétences et difficultés spécifiques.
L’évaluation globale des compétences et déficiences de la personne polyhandicapée doit permettre de partager une « vue d’ensemble » de la situation de la personne sur le niveau de développement de ses compétences, et sur les différentes déficiences (médicales, psychologiques, relationnelles) qui interagissent avec son développement. L’Échelle de sévérité du polyhandicap a été construite dans cet objectif et a été validée en langue française. Elle s’applique tant à l’enfant qu’à l’adulte. Le groupe d’experts recommande de généraliser l’utilisation de l’Échelle de sévérité du polyhandicap (validée en français) pour évaluer et suivre l’évolution des compétences et des déficiences de la personne polyhandicapée.
Le groupe d’experts recommande, avant toute intervention (médicale, éducative, etc.), une observation approfondie des compétences de la personne polyhandicapée en particulier des compétences communicationnelles.
De nouveaux outils de communication ont permis de mettre en évidence des compétences cognitives antérieurement non détectables. Le groupe d’experts recommande donc d’apporter une grande vigilance à l’interprétation de l’évaluation des compétences cognitives. Cette évaluation a besoin d’être continue, régulièrement réinterrogée et faite en équipe élargie aux parents tant chez l’adulte que chez l’enfant.
Le groupe d’experts recommande que les capacités sensorielles des personnes polyhandicapées (visuelles, auditives, olfactives, gustatives, tactiles, nociceptives, proprioceptives, etc.) soient régulièrement évaluées chez l’adulte comme chez l’enfant avec des outils adaptés et validés afin de dépister d’éventuels déficits pour les prendre en compte de façon fiable et si nécessaire de les corriger lorsque cela est possible.

La qualité de vie

La qualité de vie des personnes polyhandicapées est difficile à connaître de façon précise et fiable du fait que ces personnes ne peuvent donner par elles-mêmes les informations permettant de comparer leur qualité de vie à celle de la population générale. Dès lors, leur qualité de vie ne peut être évaluée que par d’autres personnes. Ces particularités de l’évaluation de la qualité de vie dans le contexte du polyhandicap posent des questions philosophiques, éthiques et méthodologiques.
L’évaluation de la qualité de vie dans le champ du polyhandicap permet non seulement de connaître la qualité de vie de ces personnes mais aussi de mieux garantir et de renforcer leurs droits fondamentaux.
L’amélioration de la qualité de vie doit faire partie des objectifs de toute intervention thérapeutique et nécessite donc une évaluation adaptée. Le groupe d’experts recommande de généraliser l’utilisation de l’échelle de qualité de vie PolyQoL disponible en français avec pour objectif de toujours viser la qualité de vie dans tous les actes.
Le groupe d’experts recommande que les différents professionnels (médecins, paramédicaux, éducateurs, psychologues, assistants sociaux) partagent leurs évaluations et leurs compréhensions de la situation de la personne polyhandicapée dont ils s’occupent afin d’améliorer autant que possible la qualité de vie de l’enfant et de l’adulte polyhandicapé.
Le groupe d’experts recommande que les douleurs vécues par les personnes polyhandicapées soient évaluées, en termes d’intensité, de durée et d’impact, avec des outils adaptés à leurs capacités de communication car la douleur, de par sa fréquence et souvent sa non-reconnaissance, est un élément majeur de dégradation de la qualité de vie pour ces personnes.
L’environnement sensoriel peut avoir un rôle sur le sentiment de sécurité et de confort de la personne polyhandicapée. Il a aussi un impact sur les capacités d’attention de la personne polyhandicapée enfant et adulte, qui retentit sur sa qualité de vie.
Le groupe d’experts recommande qu’une attention particulière soit portée à l’environnement sensoriel (visuel, sonore, etc.) des lieux collectifs et individuels qui accueillent des personnes polyhandicapées de tous âges. Les télévisions qui sont en permanence allumées dans les salles communes ou les chambres et diffusent des sons plus ou moins forts doivent être remplacées par des environnements sonores plus paisibles et adaptés aux personnes polyhandicapées, en fonction de leur âge.

Une coordination indispensable du parcours et une formation nécessaire de tous les acteurs

Coordonner le parcours de soins/de vie

L’identification précise du parcours, sa coordination et sa continuité sont d’autant plus importantes dans le contexte du polyhandicap où parcours de vie et parcours de soins sont parfois confondus.
Pour cela, le groupe d’experts recommande un parcours coordonné qui doit s’appuyer sur des centres d’expertise et de ressources polyhandicap (existants ou à créer), régionaux et/ou nationaux, apportant un soutien ponctuel ou prolongé, aux équipes et aux familles.
Le groupe d’experts recommande également d’identifier un parcours de soins pour les situations d’urgence médicale qui soit dédié et coordonné pour toutes les personnes polyhandicapées. Celles-ci doivent pouvoir bénéficier d’une filière d’accueil coordonnée entre la ville et les différents services hospitaliers.

La mise en place d’un parcours coordonné dès la petite enfance

Le polyhandicap de par sa définition concerne les familles et les enfants dès le début de la vie. Ainsi la période de la petite enfance est une période cruciale pour accompagner la famille et l’évolution de l’enfant polyhandicapé. Le groupe d’experts rappelle ici qu’il est essentiel d’effectuer un repérage et un diagnostic précoces du polyhandicap, en impliquant les familles dès le début et en offrant un soutien compétent, professionnel, multidisciplinaire et coordonné. Les interventions précoces, respectant les principes de l’apprentissage moteur et de la prévention des déficits secondaires, doivent être proposées, tout en favorisant l’accueil dans des environnements inclusifs de la petite enfance en partenariat avec les services spécialisés.
Les interventions précoces impliquent la coordination des différents professionnels de santé entre eux, d’autant que les établissements spécialisés en polyhandicap sont généralement accessibles seulement à partir de l’âge de 3 ans, sur notification de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH).
La MDPH est le pivot central du droit à la compensation et le socle pour les besoins et futurs besoins de l’enfant et de sa famille en termes de soins, de scolarisation et de réadaptation. Par conséquent, le groupe d’experts recommande de respecter, dans la situation du polyhandicap, des délais raisonnablement adaptés pour le traitement des dossiers, de l’application des mesures décidées et des droits ouverts, et de leur réévaluation.

La transition médicale vers l’âge adulte

La transition reste difficile dans le champ des maladies chroniques, et plus particulièrement dans le polyhandicap notamment par l’absence d’équivalence stricte entre médecins d’enfants et d’adultes à l’hôpital, ce qui implique de créer un parcours de soins nouveau par rapport à celui qui avait été développé en pédiatrie. La transition doit être l’occasion de faire le bilan des nouveaux besoins apparus depuis le début du suivi (besoins médicaux, mais aussi non médicaux), le bilan de l’état de santé de l’adolescent et le point sur la situation familiale et des aidants. Bien que les besoins en matière de soins de santé évoluent naturellement à l’âge adulte, la forte diminution de l’utilisation de certains types de rééducation après le passage à l’âge adulte suggère que les personnes ont eu des difficultés à accéder à ce type de soins de santé après l’enfance.
Le groupe d’experts recommande la nécessité de favoriser et développer les services médicaux « adultes » accueillant les jeunes adultes polyhandicapés.
La transition en médecine ne se limite pas au transfert du patient de la médecine pédiatrique à la médecine d’adulte. C’est un processus qui vise à préparer le patient et sa famille au passage de l’adolescence à l’âge adulte (même si le suivi est effectué par la même équipe). Chez la personne polyhandicapée, la transition vers l’âge adulte n’est pas un événement unique mais est un processus continu qui débute entre 13 et 15 ans, parfois plus tôt, au moment de l’annonce du diagnostic, selon les situations, et se termine avec la consultation ou la séance de transfert vers un service adulte.
Le groupe d’experts recommande d’aborder la question de la transition précocement, à partir de 13 ans, en abordant ces grands enjeux quand bien même le développement pubertaire serait retardé.
Les équipes soignantes doivent établir un protocole de transition médicale qui réponde aux grands enjeux de la transition, adaptés au polyhandicap : anticipation des attentes de la famille et des aidants, projet basé sur une réévaluation récente des capacités motrices, cognitives, d’autonomie et d’adaptation de l’adolescent, planification de la transition sur plusieurs années, prise en compte des aspects légaux du passage à l’âge adulte, abord des aspects médicaux neurologiques et extra-neurologiques, etc. Afin de faciliter la transition, le groupe d’experts recommande d’identifier précocement le ou les référents qui prendront le relai à l’âge adulte afin de co-construire le parcours de soins avec l’équipe pédiatrique, la future équipe de médecine d’adultes, le patient et sa famille. Le médecin de famille fait partie intégrante de l’équipe de soignants. Si l’adolescent n’a pas de médecin de famille, il convient de lui conseiller le plus rapidement possible d’en choisir un.

Favoriser des lieux de vie adaptés

En France, la filière tripartite de prise en soins des personnes polyhandicapées est articulée entre le secteur sanitaire (services MCO-SMR1 spécialisés) dédié à la prise en soins des personnes polyhandicapées requérant des soins médicaux, les établissements du secteur médico-social offrant un accompagnement plus centré sur le projet de vie de la personne et la prise en soins au domicile des parents. Ainsi notre système de soins offre des solutions d’accueil médicalement graduées pour les enfants et pour les adultes permettant de répondre à l’ensemble des besoins de la personne polyhandicapée tout au long de sa vie. Cependant, ce parcours de soins n’est pas toujours optimal.
Le groupe d’experts recommande un accueil dans des lieux de vie adaptés à la sévérité du polyhandicap (structures sanitaires – MCO, SMR spécialisés – pour les personnes atteintes des formes les plus sévères – nécessitant une prise en soins médicalisée –, ou médico-sociales pour ceux ou celles avec polyhandicap moins sévère – nécessitant une prise en soins moins médicalisée), ceci à tout âge de la vie. Pour les personnes vivant au domicile de leur famille, il est nécessaire que les conditions de vie soient adaptées à la complexité de la situation de la personne polyhandicapée (notamment accès au logement, aux salles d’eau, à la circulation entre les pièces du domicile).
Dans l’idéal, il faut favoriser le maintien de l’enfant polyhandicapé de moins de 3 ans dans son lieu naturel de vie, en soutenant la famille et en leur garantissant des possibilités de séjours de répit adaptés aux besoins de l’enfant et de la famille.
Le groupe d’experts recommande l’attribution de moyens suffisants matériels et humains adaptés aux nécessités d’accompagnement et de soins, aussi bien dans les établissements et services médico-sociaux qu’au sein des établissements sanitaires (MCO, SMR, HAD2 ) ou au domicile. Le groupe d’experts recommande une amélioration du maillage du territoire national en SMR spécialisés polyhandicap afin de pouvoir accueillir en moyen séjour toute personne polyhandicapée nécessitant des bilans médicaux ou des actions de prévention.
Le groupe d’experts recommande, pour les personnes polyhandicapées requérant moins de soins médicaux, une amélioration du maillage territorial des établissements médico-sociaux en résidentiel et en accueil de jour.
Le groupe d’experts recommande de maintenir et de développer des structures d’hébergement médico-sociales, pour les personnes polyhandicapées, en externat et en internat, adaptées à leur âge et à leurs spécificités. Ces structures doivent leur offrir à la fois un lieu de socialisation, la possibilité d’une vie la plus autonome possible, et celle de participer à des activités extérieures, grâce à la mise à disposition de moyens humains et techniques nécessaires à ces missions.
Le groupe d’experts recommande que l’accompagnement de l’avancée en âge des personnes polyhandicapées soit impérativement associé à des soins médicaux spécifiques et ceci en prenant en compte la dimension sociale et éducative afin de leur proposer un projet de vie cohérent, adapté et intégratif.
Les séjours et structures doivent pouvoir alterner avec des séjours au domicile familial en fonction des souhaits et possibilités des familles.

Encourager l’accès à la télémédecine notamment
lors des crises sanitaires

Lors de la crise sanitaire de la Covid-19, le recours à la télémédecine s’est développé afin de permettre le maintien d’un suivi à distance mais aussi de maintenir le lien entre les familles et leur enfant confiné en établissement.
Le groupe d’experts recommande de garantir l’accès aux soins et la prise en soins des personnes polyhandicapées lors des crises sanitaires.
Le groupe d’experts recommande que l’accès aux solutions de télémédecine soit développé à destination des personnes polyhandicapées, en situation de crise sanitaire mais également en dehors, sans cependant se substituer aux consultations en présentiel. Ce recours à la télémédecine pour les patients aussi bien à domicile qu’en structures sanitaires ou médico-sociales devrait permettre de fluidifier le parcours de soins mais aussi un suivi plus régulier.

Développer les compétences des intervenants et les aider
à prendre en compte les spécificités du polyhandicap

Compte tenu de l’ensemble de ses spécificités, le groupe d’experts recommande que le polyhandicap et son accompagnement médical et paramédical soit enseigné dans le programme d’étude des futurs professionnels de santé (médecins et paramédicaux) ainsi que de toutes les professions impliquées à l’école (AESH3 ) et dans les administrations (direction des hôpitaux, des structures médico-sociales, écoles spécialisées, MDPH, etc.) pouvant être impliquées dans l’accompagnement et l’encadrement de la personne polyhandicapée à tout moment de sa vie.
Le groupe d’experts a souhaité insister sur le développement de formations, en particulier pour certaines dimensions médicales et sociales.

La douleur

La reconnaissance de la douleur est fondamentale. L’évaluation de la douleur chez la personne polyhandicapée est particulièrement complexe et nécessite l’utilisation d’outils adaptés.
Le groupe d’experts recommande que les équipes, hospitalières ou médico-sociales, soient formées – dans le cadre de la formation initiale mais également de la formation continue – à l’utilisation d’outils adaptés d’évaluation de la douleur, en soulignant également l’intérêt des évaluations croisées.

Les troubles de la déglutition

Les altérations de la fonction de déglutition sont fréquemment retrouvées chez les personnes polyhandicapées, où la précocité de l’atteinte cérébrale à l’origine du polyhandicap a bien souvent altéré cette fonction d’emblée (troubles de succion/déglutition dès la naissance) la rendant moins accessible à un apprentissage qui se fait habituellement au cours des deux premières années de vie.
Le groupe d’experts recommande le suivi des recommandations de l’ESPGHAN en insistant notamment sur la mise en œuvre de mesures adaptées pour faciliter la prise alimentaire, prenant en compte l’expertise multidisciplinaire des aidants familiaux et professionnels, qui doivent ainsi y être sensibilisés et formés.

La communication

Le handicap de communication important des personnes polyhandicapées implique un ajustement de leurs partenaires de communication, un aménagement du contexte et justifie la mise en place de moyens facilitant la participation des personnes polyhandicapées à ces interactions.
Le groupe d’experts recommande la formation initiale et/ou continue des aidants afin que les partenaires de communication, professionnels et familles, puissent identifier les tentatives de communication de la personne et éviter d’en rester à des préjugés concernant ses incapacités supposées ou à des résultats d’évaluations non adaptées au polyhandicap.
Le groupe d’experts recommande que les professionnels accompagnant les personnes polyhandicapées soient formés aux moyens et aux méthodes de communication alternative et améliorée (CAA) afin de favoriser la participation sociale de ces personnes. Les partenaires de communication comme les familles et les proches aidants doivent également profiter de cette formation. Cette formation vise à la fois à favoriser le déploiement des moyens de CAA dans le contexte social de la personne et à permettre aux partenaires de communication de choisir les moyens de CAA adaptés. L’accès à ces formations comme aux moyens de CAA doit être financé.

Les comportements difficiles

L’ensemble des études portant sur les comportements difficiles souligne l’importance de la formation des soignants à la gestion des comportements difficiles car ces comportements s’améliorent avec un environnement adapté et apaisant. Cela confirme aussi que les comportements difficiles chez l’enfant ou l’adulte polyhandicapé sont le plus souvent réactionnels à la situation particulière de la personne et ne sont pas des troubles psychiatriques à proprement parler et ne font pas nécessairement partie du tableau de polyhandicap. Le principal facteur permettant d’améliorer ces comportements difficiles, mis en évidence par les études publiées, est la participation des professionnels à une formation spécifique sur la façon de gérer les troubles du comportement, ces études soulignent l’intérêt et l’importance de ces formations. L’environnement des structures d’accueil médico-social ou médical doit aussi être adapté à l’accueil des personnes polyhandicapées.
Le groupe d’experts recommande que les professionnels travaillant auprès de personnes polyhandicapées bénéficient régulièrement de formations spécifiques sur la façon de gérer les troubles du comportement dans ce contexte spécifique, et recommande l’adaptation de l’environnement des structures d’accueil et de prise en soins (bruit, luminosité).

La scolarisation

Les réticences relatives à la scolarisation existent chez les enseignants hors du milieu spécialisé ou peu familiers de celui-ci, voire même dans le milieu spécialisé, certains doutant de l’intérêt d’une scolarisation pour les jeunes polyhandicapés. Il convient donc d’insister sur l’importance de la formation des enseignants et des professionnels médico-sociaux pour lutter contre ce type de représentations.
Le groupe d’experts recommande la mise en place de formations conjointes des enseignants, des AESH et des professionnels médico-sociaux à propos de la question de la scolarisation adaptée.

La vie affective

La vie affective est souvent négligée au profit d’interrogations concernant exclusivement la vie sexuelle. Or, certaines personnes polyhandicapées expriment clairement leurs affinités électives et leurs besoins d’affection et de contact.
Le groupe d’experts suggère donc d’intégrer à la formation des professionnels la question des marques de tendresse et d’affection qu’ils acceptent et peuvent témoigner aux résidents, ce qui interroge la juste distance professionnelle et la qualité de l’étayage fourni par des relations privilégiées, auxquelles il faut ajouter les relations affectives familiales et entre pairs.

La participation sociale

Les conditions de travail au sein des structures d’hébergement médico-sociales (bien-être au travail, formation, nombre de personnels, reconnaissance des salariés, etc.) peuvent constituer une entrave à la participation sociale des personnes polyhandicapées, ainsi que le manque de connaissance du concept de participation sociale.
Le groupe d’experts recommande d’intégrer à la formation initiale et continue des professionnels le concept de participation sociale et des loisirs, en associant les familles aux formations, et d’être vigilant à l’organisation du travail des professionnels.

Prendre conscience des enjeux des soins autour de la fin de vie

La fin de vie de la personne polyhandicapée soulève de multiples enjeux : des enjeux éthiques liés à la spécificité du polyhandicap, des enjeux de politique publique et de moyens, des enjeux liés à la prise de décision, au rôle de la famille et de la collaboration avec celle-ci. La fin de vie nécessite un accompagnement qui doit viser à prendre soin de la personne polyhandicapée dans sa globalité, en tenant compte de ses capacités, de ses envies, de ses émotions, de ses croyances. Cet accompagnement concerne également les aidants familiaux et professionnels.
Il est important de faciliter un questionnement éthique tout au long de ce moment, aider à un positionnement et garantir une démarche optimisée dans la lutte contre la souffrance physique et psychique de la personne.
Le groupe d’experts recommande que les conditions de la fin de vie (notamment le lieu et les modalités) de la personne polyhandicapée soient discutées, si possible anticipées, conjointement entre famille et professionnels.
Le groupe d’experts souligne la nécessité d’une acculturation des équipes sanitaires et médico-sociales à l’accompagnement de la fin de vie, nécessitant une inscription dans le projet de soins des établissements afin de promouvoir des coopérations sur ces questions avec les autres ressources du territoire (établissements sanitaires dont hospitalisation à domicile, équipes mobiles de soins palliatifs [EMSP], équipe ressource régionale de soins palliatifs pédiatriques [ERRSPP]).
Les soins palliatifs font aujourd’hui partie du mandat social confié à la médecine. La médecine palliative peut soutenir une démarche soignante et humaine qui tient compte des vulnérabilités de la personne polyhandicapée. Le groupe d’experts encourage le recours précoce aux équipes de soins palliatifs tant pour la gestion des symptômes de la fin de vie que pour l’accompagnement de la personne, des aidants familiaux et des professionnels. Le groupe d’experts préconise de sensibiliser les équipes de soins palliatifs aux spécificités du polyhandicap en particulier chez l’enfant, et de développer l’accès aux formations pour les équipes.
La fréquence des situations d’accompagnement de fin de vie en services spécialisés pédiatriques, nécessite des moyens dédiés afin de permettre de répondre aux besoins des patients, familles et professionnels en termes d’évaluation et d’adaptation des traitements, capacités d’accueil et temps d’échange suffisants en amont, au moment du décès mais également après, avec la poursuite des échanges multidisciplinaires et collégiaux ainsi que la formation des professionnels.
Le groupe d’experts recommande que les considérations portées par les parents sur leur enfant soient entendues et discutées avec les parents lors des réunions collégiales, d’autant plus dans le cadre de l’accompagnement de fin de vie.

Un soutien et une reconnaissance indispensables pour les familles, les proches aidants et les professionnels

Prévenir le risque d’épuisement des familles
comme des professionnels de première ligne

La sévérité de la condition des personnes polyhandicapées ainsi que leur dépendance et leur vulnérabilité impactent lourdement leur entourage, qu’il soit familial ou professionnel. Le fait de pouvoir partager avec les professionnels la responsabilité de l’accompagnement de leur enfant, mais aussi de maintenir une vie sociale et professionnelle, contribue à soutenir les parents contre l’épuisement.
Le polyhandicap retentit aussi sur la qualité de vie des familles (parents et fratries) d’autant plus lorsque leur enfant est régulièrement hospitalisé.
Le groupe d’experts recommande que, lors des hospitalisations de leur enfant polyhandicapé, les parents et proches soient accompagnés.
Le groupe d’experts recommande de proposer à toutes les familles des solutions d’accueil et de prises en soins adaptées à leurs besoins et proches de leur domicile, et des solutions de répit de qualité. Les professionnels de ces lieux d’accueil doivent pouvoir être en lien avec des structures de référence spécialisées dans le polyhandicap.
Le groupe d’experts recommande que les solutions de répit et/ou de soutien pour les aidants familiaux soient développées et financées.
Pour les professionnels intervenant en institution, l’optimisation et l’adaptation de leurs environnements de travail, en particulier le maintien d’un ratio personnel/patient élevé et des mesures ciblées (dispositif d’analyse de pratiques), ainsi que le travail d’équipe limitent la charge physique et émotionnelle inhérente au contexte de polyhandicap.
Le groupe d’experts recommande donc l’adaptation de l’environnement de travail des professionnels, avec l’augmentation du ratio personnel/patient (à l’image de certaines organisations de soins pour les personnes très dépendantes). Le groupe d’experts recommande la mise en place de mesures ciblées (mise en place de dispositifs d’analyse de pratiques dans les institutions, etc.), ainsi qu’un travail en équipe pour limiter la charge physique et psychique inhérente au contexte de polyhandicap. Ces mesures sur les modèles organisationnels doivent être pensées à tous les niveaux de décision.

Créer du lien

La possibilité de rencontrer d’autres parents avec des vécus similaires dans le cadre d’associations, de réseaux sociaux ou de dispositifs de parole, et d’échanger entre pairs, constitue une aide précieuse pour réduire le sentiment d’isolement.
Le groupe d’experts recommande de mettre en place des dispositifs spécifiques et adaptés pour soutenir les aidants, en particulier les parents et la fratrie (par exemple : séjours entre fratries, dispositifs de parole). Le groupe d’experts recommande de développer et/ou soutenir les initiatives de formation des proches via des dispositifs reconnus.

S’appuyer sur la connaissance unique acquise par les familles

Les connaissances des parents sur leur enfant polyhandicapé sont fondées sur le lien spécial et durable qu’ils entretiennent avec lui. Ils peuvent être considérés comme des experts de leur propre enfant et de ses besoins.
Le groupe d’experts recommande que la connaissance unique qu’ils ont de leur enfant soit prise en compte durant tout le parcours de soins/de vie.

La dimension sociale en jeu dans le polyhandicap

Améliorer la communication avec la personne polyhandicapée

Les difficultés de communication des personnes polyhandicapées sont parfois telles qu’il convient toujours de rappeler à quel point les capacités se mesurent en fonction de l’état actuel de nos connaissances.
La communication est intrinsèquement reliée à la notion de participation sociale et constitue un droit humain fondamental.
Les moyens de communication alternative et améliorée (CAA) proposés doivent être adaptés aux capacités motrices et cognitives de la personne polyhandicapée. Ils rendent possible le développement de la communication et favorisent l’accessibilité de la communication. Il peut s’agir d’objets référentiels, de gestes conventionnels, inspirés et adaptés de la langue des signes (selon la zone géographique) ou des moyens technologiques.
La CAA étant actuellement le seul ensemble de méthodes validées pour améliorer la communication des personnes polyhandicapées, le groupe d’experts recommande son implémentation concrète dans tous les lieux d’accueil et de vie des personnes polyhandicapées (domicile, établissements médico-sociaux et hospitaliers, écoles, etc.), sans postuler l’existence de compétences prérequises pour tester telle ou telle méthode. Les moyens auxiliaires adaptés et recommandés dans la littérature, comme des contacteurs, doivent être mis en place afin de rendre accessible la participation sociale active des personnes, en lien avec les engagements de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDPH) et le modèle de participation recommandé dans la littérature actuelle à propos de la CAA. La communication et l’utilisation de ces moyens doivent être évaluées dans les contextes sociaux de la personne. Cette évaluation permet de valider l’adaptation des moyens implémentés aux capacités physiques et cognitives de la personne polyhandicapée.
L’aide des professionnels doit également s’orienter vers la prise en compte des difficultés potentielles de communication au sein de la famille (parents, fratrie) et l’étayage de cette communication, en particulier dans les moments les plus difficiles (puberté, transitions, projet pour l’avenir d’adulte).
La CAA réfère à la fois aux moyens, aux méthodes qui leur sont associées, à l’aménagement du contexte et à l’ajustement des partenaires de communication, familles et professionnels.
Le groupe d’experts recommande les interventions centrées sur les partenaires de communication, à partir de vidéos d’interaction par exemple, pour les personnes présentant plusieurs handicaps et s’exprimant de manière non symbolique. Ces partenaires de communication (y compris familiaux) peuvent ainsi intervenir par la suite dans le quotidien de la personne.

Promouvoir les apprentissages tout au long de la vie

L’éducation tout au long de la vie des personnes polyhandicapées, et plus récemment encore l’enseignement qui leur est proposé, soulève de nombreux défis pour les familles, les praticiens et les politiciens. Se posent notamment les questions de la bonne connaissance de leurs besoins spécifiques, des pratiques et des méthodes adaptées, et de la formation des professionnels. La mobilisation spontanée dans l’activité et l’exploration sont fortement entravées par des limitations importantes (déficits sensoriels et moteurs, modalités de communication restreintes, etc.), complexifiant l’accès aux apprentissages pour la personne polyhandicapée. Cependant, la personne polyhandicapée possède bien des capacités d’apprentissage. Elle a également la possibilité de progresser si tant est que des aménagements adéquats soient mis en place, qu’on évalue ses déficiences, ses potentialités et ses modalités particulières d’être au monde et de communiquer, et qu’on tienne compte de sa trajectoire personnelle d’évolution.
Pour ces publics, l’apprentissage doit être développé et favorisé tout au long de la vie. Des conditions fondamentales, d’ordre institutionnel, didactique et méthodologique, doivent être réunies pour que la personne s’engage sur la voie de l’apprentissage. Le groupe d’experts recommande d’impliquer tous les aidants, proches et professionnels, dans les apprentissages sans se limiter aux activités dédiées. Ceci dans les différents espaces qui accueillent la personne polyhandicapée, qu’ils leur soient dédiés spécifiquement (apprentissages structurés dans l’espace-classe ou l’espace éducatif) ou non.

Encourager l’inclusion scolaire

Il existe un potentiel d’apprentissage en chaque être humain, quelles que soient ses difficultés. Or ce potentiel ne peut apparaître que sous certaines conditions.
Le groupe d’experts recommande la mise en œuvre de moyens organisationnels, humains et matériels nécessaires pour développer des dispositifs d’accueil adaptés à l’état de santé de l’enfant polyhandicapé.
Quelles que soient leurs capacités, les enfants polyhandicapés ont le droit d’accéder à une scolarisation ajustée à leurs besoins. Il est important de rappeler le droit à la scolarisation de tout enfant, mais la position du « tout inclusif » se heurte à des problèmes majeurs de mise en œuvre dans le cas précis des élèves polyhandicapés, à tel point que l’on peut se demander si elle est toujours réalisable.
Le groupe d’experts recommande de s’appuyer sur le tissu existant d’établissements spécialisés en France afin de définir une scolarisation individualisée pour chaque enfant. Les experts recommandent de créer systématiquement des unités d’enseignement impliquant les équipes des établissements spécialisés et celles des écoles de proximité. Le groupe d’experts recommande d’adapter les conditions de scolarisation aux spécificités et à l’état de santé des enfants polyhandicapés.
Le groupe d’experts recommande de définir en France une référence ministérielle qui aurait valeur de « programme d’enseignement adapté » pour les élèves polyhandicapés, et qui préciserait plus clairement les objectifs d’apprentissage dans le cadre d’une scolarisation. Compte tenu de la grande hétérogénéité intra- et interindividuelle des profils, il est indispensable de comprendre les stratégies et les besoins propres à chaque personne polyhandicapée, pour envisager des objectifs d’apprentissage.
Le groupe d’experts recommande que l’évaluation individualisée des potentialités, des limitations (déficits) et des besoins d’apprentissage, ait lieu en équipe pluriprofessionnelle associant les parents. Il faut rappeler en effet le rôle fondamental des parents dans la co-construction puis l’évaluation du projet de scolarisation.
Certains enfants diagnostiqués à tort polyhandicapés ou catégorisés comme tels échappent à la définition stricte du polyhandicap du fait de leurs compétences cognitives et doivent être pris en soins et accompagnés en établissement spécialisé, tout en bénéficiant d’une scolarisation adaptée à leurs capacités effectives.

Favoriser la participation sociale

Les personnes polyhandicapées, parce que leurs déficiences et incapacités sont importantes, sont souvent considérées comme ayant peu, voire parfois pas, de possibilités de participation sociale. Pourtant, ces personnes ont des capacités et peuvent participer aux diverses activités de la vie quotidienne et sociale, grâce à certaines aides, méthodes, outils et grâce à l’adaptation de leur environnement, qui prennent en compte la spécificité de leurs atteintes et de leur situation.
Si la participation sociale des personnes polyhandicapées ne sera sans doute jamais « typique » ou semblable à celle des personnes dites valides, les personnes polyhandicapées ne devraient être exclues, de manière a priori et arbitraire, d’aucun domaine de la participation sociale, au contraire, leur participation aux différentes activités et leur participation sociale doivent être soutenues et renforcées. Le groupe d’experts recommande la mise en œuvre d’une accessibilité renforcée tenant compte des spécificités des personnes polyhandicapées afin d’augmenter leur présence au sein du groupe social et d’y permettre leur participation. Cette accessibilité généralisée (dans les transports, les lieux publics et privés, les services de soin avec des espaces dédiés) doit articuler adaptation matérielle et aide humaine, conception universelle et adaptation spécifique. Elle pourra être utile à d’autres personnes présentant des déficiences multiples ou en situation de grande dépendance. Elle est la condition sine qua non pour permettre la participation des personnes polyhandicapées et de leur famille à une diversité d’activités, et pour rendre leurs droits effectifs.
Le groupe d’experts recommande la mise en place d’un dispositif de suivi et d’amélioration de l’effectivité des droits fondamentaux des personnes polyhandicapées et de leurs proches (familiaux et professionnels).
Les interventions relatives à la participation sociale doivent correspondre à des situations de la vie quotidienne et doivent viser à rendre possible la participation de la personne dans son contexte social.
Le groupe d’experts recommande d’augmenter la quantité et la qualité des activités proposées aux personnes polyhandicapées accueillies dans les établissements et services, tout en les adaptant aux capacités et spécificités de chaque personne.
La réalisation de la citoyenneté de la personne polyhandicapée passe par le développement de son autodétermination et de sa capacité à réaliser des choix et d’exprimer ses préférences. L’autodétermination est un processus dans lequel la personne polyhandicapée doit être accompagnée. Elle est façonnée par le contexte et sa réalisation effective dépend des occasions offertes par le milieu et le soutien apporté par l’environnement.
C’est pourquoi le groupe d’experts recommande la mise en place de pratiques facilitant l’autodétermination (telle que la réalisation de choix au quotidien) préparant l’exercice de la citoyenneté des personnes polyhandicapées.
Le groupe d’experts recommande également la mise en place d’outils et de médiations permettant l’exercice effectif de la citoyenneté pour ces personnes polyhandicapées.
Avoir des activités de loisirs est essentiel à la qualité de vie et à la socialisation des personnes polyhandicapées : cela contribue au développement et au maintien de leurs compétences physiques, cognitives et sociales et renforce leurs capacités (comme la communication ou la créativité).
Le groupe d’experts recommande que des activités de loisirs adaptées soient proposées à toutes les personnes polyhandicapées, en veillant à favoriser les choix, à limiter la durée des « temps morts » et en les remplaçant a minima par du divertissement, à repérer ce qui plaît à la personne, et à l’inscrire dans un engagement durable.

Mieux reconnaître la vie affective et sexuelle

Lorsque l’on aborde la question de vie affective, intime et sexuelle, deux écueils principaux sont à éviter, en particulier dans le champ du polyhandicap : négliger la question de la vie affective au profit de la vie sexuelle et croire qu’il est aisé de définir la sexualité. Il est ainsi nécessaire d’ouvrir un espace de réflexion et de travail sur les questions relatives à la vie affective et sexuelle dans toute institution accompagnant des personnes polyhandicapées, en particulier adolescentes et adultes.
Le groupe d’experts recommande d’envisager toutes les modalités et manifestations d’une vie affective et sexuelle dans le champ du polyhandicap y compris à propos de l’auto-érotisme, sans hypersexualiser les conduites ni dénier la possibilité d’une sexualité.
Les outils pédagogiques et les réflexions éthiques et pratiques utilisés généralement pour éviter les abus et les rapports sexuels non consentis ne sont généralement pas opérants en raison des difficultés de communication et de compréhension, créant un vide dans la littérature éthique et pratique à propos du polyhandicap.
Le groupe d’experts recommande de tolérer toutes les formes d’expression de la vie sexuelle et de permettre à chacun de pouvoir explorer son corps, ce qui est une forme de connaissance de soi, tout en fixant les limites d’une telle activité, et en l’inscrivant dans le cadre d’un apprentissage du rapport aux autres et de la limite entre le public et le privé.
Le groupe d’experts recommande la mise en place de projets d’équipe confrontant chaque professionnel à ses propres aspirations et freins en matière de sexualité ainsi qu’aux problèmes posés par la situation bien particulière d’une personne polyhandicapée. Réalisée en équipe, l’analyse de la pratique peut également faciliter la mise en perspective de ses propres convictions initiales et refus éventuels.
Face à la manifestation de pulsions sexuelles, l’un des risques est que les accompagnants ou les parents décident sans concertation d’apporter une « aide » inadaptée lors de la toilette. De tels gestes hétéro-masturbatoires n’épanouissent pas les personnes polyhandicapées mais les déstructurent et les exposent à des maltraitances involontaires.
Le groupe d’experts recommande le développement d’une réflexion nationale à propos de l’accompagnement sexuel dans le champ du polyhandicap.

Reconnaître et prévenir la maltraitance

Les études portant sur maltraitance et polyhandicap sont rares, mais convergent autour de l’idée que la vulnérabilité majeure qui caractérise le polyhandicap renforce les risques de maltraitance, à la fois volontaire et involontaire. Cette vulnérabilité est physique, mais aussi psychique.
Les risques de maltraitance des personnes polyhandicapées étant nombreux, une acculturation des proches et des professionnels à la prévention de la maltraitance et à leurs besoins spécifiques est essentielle.
Le groupe d’experts recommande de prendre garde aux formes de maltraitance involontaire ou passive (par exemple : laisser-faire, négligence, manque de connaissance) qui peuvent être liées à des soins inadaptés, à des habitudes d’entrée en relation renforçant la vulnérabilité communicationnelle, voire à une sous-estimation des capacités cognitives de ces personnes conduisant parfois à une négation de leur vie psychique.
L’attribution abusive de la catégorie de « polyhandicapé » à certains enfants et adultes accueillis en institution constitue en soi une source de maltraitance involontaire.
C’est pourquoi, le groupe d’experts recommande de conserver la plus grande prudence quant aux catégorisations abusives en accordant plus d’attention aux possibles compétences révélées par une communication adaptée.
La maltraitance n’est pas caractérisée par le fait d’agir ou de ne pas agir mais par ses effets. La maltraitance involontaire peut procéder du désir de bien faire, donc de l’illusion de bientraitance, par exemple lorsque l’on pense percevoir les attentes de l’autre en projetant sur lui des aspirations et besoins qui ne sont pas les siens. La communication dite « facilitée » où l’aidant peut se substituer à la personne concernée, entre dans cette catégorie de la maltraitance involontaire et est un terrain propice à des abus, à la différence d’une communication alternative et améliorée (CAA) qui rend accessible la participation de la personne aux interactions de son contexte social en favorisant son expression et sa compréhension.
Le groupe d’experts recommande de proscrire les pratiques de communication dite « facilitée » en particulier dans le milieu professionnel.
Quand l’accompagnement est aussi lourd au quotidien que dans le cas du polyhandicap, le risque de maltraitance institutionnelle existe tout comme celui de maltraitance familiale (ne serait-ce qu’en raison des effets de l’épuisement des proches).
Une série de maltraitances qui pourraient être considérées comme « mineures » peut, à force de répétitions, produire des effets comparables à une maltraitance majeure. Or la répétition de « petites » maltraitances passives et involontaires est probablement plus fréquente que des maltraitances actives et volontaires relevant pénalement d’un délit.
Les experts rappellent que l’objectivation des mauvais traitements doit être considérée avec prudence. Les signes cliniques d’une maltraitance physique (ecchymoses ou hématomes, rougeurs, dénutrition, fractures) peuvent s’avérer difficiles à repérer dans un tableau clinique complexe, d’où le risque d’une mauvaise imputation : on peut supposer une maltraitance alors qu’elle n’a pas eu lieu ou au contraire sous-estimer l’importance de celle-ci.
Le maintien d’un important ratio patient-résident/aidant professionnel, dans les établissements accueillant les personnes polyhandicapées, est l’un des facteurs déterminants de prévention de la maltraitance.
Le groupe d’experts recommande le développement de groupes d’analyse de la pratique, des formations continues pour la prévention de la maltraitance, avec l’instauration d’une cellule de veille dans l’établissement, tout ceci ne pouvant évidemment pas exister en l’absence de moyens humains suffisants avec des équipements adaptés.
En conséquence, le groupe d’experts recommande que les moyens humains suffisants à un accompagnement professionnel des personnes polyhandicapées soient assurés afin de réduire les risques de maltraitance, quelle que soit la structure d’accueil de la personne.

Recommandations de recherche

Le groupe d’experts recommande le développement des recherches sur le polyhandicap à tous les âges de la vie, dans l’ensemble des disciplines scientifiques, mobilisant différents types de méthodologies, dont les démarches participatives. Concernant ces dernières, le groupe d’experts recommande l’implication des familles, des professionnels, mais aussi le plus possible des personnes polyhandicapées elles-mêmes dont la présence est en soi déjà un facteur possible de transformation du processus de recherche. Le groupe d’experts insiste sur la nécessité de formaliser une réflexion critique sur les conditions, les enjeux, les possibilités et les limites de ces méthodes participatives.
Le transfert des données de la recherche sur le terrain est un enjeu, notamment afin d’induire des changements de pratiques fondés sur la littérature à la fois au niveau micro (équipes professionnelles et familles), meso (directions et responsables d’institution) et macro (acteurs politiques et administrations). Le groupe d’experts recommande que les résultats des recherches soient vulgarisés et communiqués pour être compris par le plus grand nombre, puis développés et déployés sur le terrain.

Développer la recherche sur les données de prévalence et l’impact médico-économique du polyhandicap

À ce jour, il existe en France des données incomplètes de prévalence relatives au polyhandicap.
Une approche épidémiologique en population générale est nécessaire pour repérer les cas de polyhandicap, décrire l’évolution de la prévalence du polyhandicap et les principales caractéristiques des personnes concernées de façon non biaisée. Elle repose donc sur des registres de population ou sur des enquêtes ad hoc transversales ou des cohortes réalisées dans des zones géographiques bien définies et pour lesquelles le nombre d’habitants y est connu. Le groupe d’experts recommande de financer davantage de recherches épidémiologiques descriptives et prospectives sur le polyhandicap, en particulier dans l’objectif d’obtenir des données de prévalence et de suivi représentatives du territoire national.
Le groupe d’experts recommande que soit entrepris un travail sur les bases médico-administratives pour l’élaboration d’un algorithme de repérage des patients avec un polyhandicap.
Par ailleurs, il n’y a pas de travaux publiés actuellement sur l’impact médico-économique du polyhandicap.
Pour combler cette absence, le groupe d’experts recommande que soit entrepris un travail sur l’impact médico-économique du polyhandicap, tant au niveau individuel-familial que médico-social et hospitalier (SMR et MCO).

Mieux connaître les causes de polyhandicap

Les origines du polyhandicap sont diverses, se classant en causes génétiques (prédominantes) et causes acquises, pré-, péri- ou postnatales. Le groupe d’experts recommande d’encourager la recherche sur les causes (y compris génétiques) de polyhandicap, ainsi que la recherche fondamentale, pluridisciplinaire sur le neurodéveloppement normal et sur les troubles précoces et sévères qui l’affectent.

Poursuivre les efforts pour mieux connaître les troubles associés et optimiser la prise en soins

Le groupe d’experts a émis des recommandations de recherche pour améliorer les connaissances actuelles sur les troubles associés au polyhandicap et leurs prises en soins.
Le groupe d’experts recommande de conduire des études permettant d’évaluer l’impact, sur la personne polyhandicapée et son entourage, des différentes interventions à court et à long termes, ainsi que sur le retentissement sur la qualité de vie de la personne polyhandicapée et de son entourage familial et professionnel. Pour les troubles de la motricité, le groupe d’experts recommande de favoriser une méthodologie de recherche de type SCED (single case experimental design) pour évaluer l’efficience de certains traitements (surtout ceux entraînant des inconforts).
Le groupe d’experts recommande de favoriser des études sur le rationnel et l’efficacité des traitements chirurgicaux orthopédiques chez la personne polyhandicapée (dont le rapport bénéfices/risques des interventions doit être systématiquement discuté). Par ailleurs, les rationnels scientifiques et le niveau de preuves dans la littérature autour des interventions, notamment motrices précoces, restent encore faibles. Les programmes de soins des enfants (thérapie motrice) sont peu décrits et l’intérêt à proposer ce type d’intervention précocement repose sur l’idée de favoriser la plasticité du cerveau de l’enfant et l’accompagnement des parents.
Le groupe d’experts recommande d’engager des programmes de recherche sur l’efficacité clinique des thérapies précoces.
Concernant les troubles de la sphère mentale, le groupe d’experts recommande que des études soient menées pour évaluer l’intérêt des différentes méthodes en usage qui visent l’amélioration des manifestations comportementales d’inconfort.
Les troubles respiratoires sont la première cause de mortalité et la première cause d’hospitalisation en urgence dans la population polyhandicapée.
Le groupe d’experts recommande la réalisation de recherches portant sur l’épidémiologie des symptômes des pathologies respiratoires et les moyens de les évaluer, sur l’identification des facteurs de risque, sur le retentissement en termes de consommation de soins ou sur la sévérité de l’atteinte respiratoire dans la population polyhandicapée. Le groupe d’experts encourage la réalisation de recherches portant sur les interventions à visée respiratoire, en préventif comme en curatif, mais en intégrant également des dimensions autour de l’organisation des soins, auprès des personnes polyhandicapées.
La scoliose est l’un des éléments altérant la fonction respiratoire, et nécessite une prise en soins préventive et thérapeutique adaptée chez la personne polyhandicapée. Cependant, les effets spécifiques sur la fonction respiratoire des interventions préventives et curatives restent insuffisamment étudiés à ce jour.
Le groupe d’experts encourage la réalisation d’études portant sur les interventions préventives et curatives (fonctionnelles, chirurgicales, rééducatives) dans le cadre des scolioses chez les personnes polyhandicapées, en s’intéressant notamment à leur impact en termes d’atteinte respiratoire, sur la qualité de vie, mais aussi aux complications éventuelles associées et aux moyens de les prévenir le cas échéant.
Le bavage, en lien avec une hypersalivation et/ou surtout des troubles de la déglutition, participe également de l’atteinte respiratoire des personnes polyhandicapées. Différentes stratégies thérapeutiques sont proposées : comportementales, médicamenteuses, chirurgicales.
Le groupe d’experts recommande qu’une évaluation adaptée du bavage et de ses conséquences notamment sur la fonction respiratoire soit réalisée chez les personnes polyhandicapées, en s’appuyant sur des outils d’évaluation adaptés et validés.
Le groupe d’experts encourage la réalisation de recherches sur les stratégies thérapeutiques adaptées, intégrant différentes modalités de traitement si besoin, dans le cadre du bavage chez la personne polyhandicapée en s’intéressant notamment aux effets sur la fonction respiratoire et la déglutition.
Les troubles digestifs et les troubles liés à l’alimentation (dysphagie, dénutrition, reflux gastro-œsophagien, constipation) sont très fréquents chez les patients polyhandicapés, avec des intrications avec d’autres troubles notamment respiratoires, moteurs, orthopédiques et la douleur.
Le groupe d’experts recommande d’encourager les recherches pour valider des outils de dépistage et diagnostic des troubles de déglutition et de la nutrition chez les patients polyhandicapés.
Le groupe d’experts recommande d’encourager les recherches sur l’évaluation des interventions visant à améliorer l’état nutritionnel (troubles de déglutition, type et mode d’alimentation dont l’intérêt des préparations cuisinées mixées administrées dans le cadre d’une nutrition entérale sur gastrostomie, traitements), non seulement sur le plan nutritionnel et digestif mais également en intégrant une dimension psychosociale auprès des familles.
Le groupe d’experts recommande de mener des recherches sur l’intérêt et l’efficacité des accompagnements au maintien de l’oralité dans le contexte des gastrostomies.
Il n’y a pas d’étude sur la microbiologie intestinale des personnes polyhandicapées qui ont une alimentation variable de par ses voies d’administration et son contenu. Le groupe d’experts recommande d’encourager les recherches sur les modifications éventuelles du microbiote chez les personnes polyhandicapées.
Le groupe d’experts recommande d’encourager la recherche sur les aspects sociaux et psychologiques autour de l’alimentation de la personne polyhandicapée, que ce soit pour elle-même ou pour son entourage (plaisir gustatif, sensoriel et de relation).
L’ostéoporose est une maladie généralisée du squelette qui entraîne une diminution de la résistance de l’os et par conséquent entraîne des fractures osseuses. La baisse de la densité minérale osseuse et les fractures sont fréquentes dans la population polyhandicapée.
Le groupe d’experts encourage la réalisation de recherches portant sur l’étude des facteurs de risque de fragilité osseuse dans la population polyhandicapée, à tous les âges, et notamment sur l’effet de leur prévention sur la fragilité osseuse.
Le groupe d’experts recommande le développement de recherches sur les moyens diagnostiques de la fragilité osseuse, notamment en vue d’obtenir des normes de référence de densité minérale osseuse, à tout âge, et sur différents sites facilement accessibles (dont le fémur proximal et distal) dans la population polyhandicapée.
Les biphosphonates sont à ce jour les seuls traitements de la fragilité osseuse symptomatique chez l’enfant (présence de fractures) et leur indication n’est à ce jour pas retenue en prévention, c’est-à-dire chez un patient à risque ayant une diminution isolée de la mesure de densité minérale osseuse sans fracture associée. Le groupe d’experts encourage la réalisation de recherches sur l’administration préventive de biphosphonates en cas de densité minérale osseuse abaissée sur la fragilité osseuse chez la personne polyhandicapée, notamment en amont des chirurgies orthopédiques osseuses.
Le groupe d’experts encourage la réalisation de recherches portant sur l’effet à long terme de la santé osseuse des personnes polyhandicapées, en y intégrant également des données sur la qualité de vie.
Les troubles du sommeil sont plus fréquents dans la population des enfants avec trouble neurodéveloppemental.
Le groupe d’experts encourage la réalisation de recherches portant sur les outils d’évaluation, technologiques ou comportementaux portant sur le diagnostic et l’évaluation des troubles du sommeil dans la population polyhandicapée à tout âge ainsi que sur leur impact sur le patient et ses aidants. Ces outils devront également permettre d’évaluer l’efficacité des mesures thérapeutiques sur le sommeil. Le groupe d’experts recommande la mise en œuvre de recherches portant sur les mesures thérapeutiques, pharmacologiques ou non, en vue d’améliorer les troubles du sommeil dans des populations de patients polyhandicapés, si besoin en s’appuyant sur des méthodologies de type SCED.
La qualité de vie des personnes polyhandicapées est très impactée par certains sur-handicaps. La prévention et le traitement de la douleur sont des plus importants.
Sur le plan pharmacologique, le recours aux antalgiques usuels est encouragé, en évaluant avec des outils adaptés leur efficacité, et en privilégiant tant que faire se peut la monothérapie.
Le groupe d’experts encourage la réalisation d’études pharmacologiques, prenant en compte notamment les interactions médicamenteuses, dans cette population où la polymédication est fréquente.
Le groupe d’experts soutient le développement de recherches portant sur les méthodes non pharmacologiques du fait de leur effet notamment sur les composantes comportementale et émotionnelle de la douleur, et impliquant les aidants professionnels et familiaux.
Lors de la crise sanitaire de la Covid-19, le recours à la télémédecine s’est développé afin de permettre le maintien d’un suivi à distance mais aussi de maintenir le lien entre les familles et leur enfant confiné en établissement.
Le groupe d’experts recommande d’encourager des recherches évaluant l’impact du recours aux solutions de télémédecine, aussi bien en termes de qualité des soins, que d’impact sur la morbidité et sur les aidants professionnels et familiaux.
Enfin, les soins palliatifs font aujourd’hui partie du mandat social confié à la médecine. La médecine palliative peut soutenir une démarche soignante et humaine qui tient compte des vulnérabilités de l’enfant polyhandicapé. Le groupe d’experts recommande d’encourager les recherches sur l’impact d’une démarche palliative précoce dans le champ du polyhandicap.

Compléter les données sur l’effet de l’avancée en âge

La sévérité globale du polyhandicap s’accroît avec l’âge et on observe chez les plus âgés une majoration de la déficience tant motrice que cognitive avec pour conséquence une majoration de leur niveau de dépendance. L’accompagnement des personnes polyhandicapées doit impérativement associer les soins médicaux spécifiques nécessaires et prendre aussi en compte la dimension sociale et éducative afin de leur proposer un projet de vie cohérent, adapté et intégratif. Le groupe d’experts recommande d’encourager les recherches pour compléter les données sur l’effet de l’avancée en âge chez la personne polyhandicapée quelle que soit l’étiologie, et sur l’accompagnement de leur vieillissement.

Évaluer, traduire et valider des outils spécifiques à l’évaluation des compétences/déficiences, à la qualité de vie et à la douleur dans le cadre du polyhandicap

L’acquisition des compétences motrices, psychiques, neurologiques, mentales et sensorielles est extrêmement limitée chez la personne polyhandicapée. Aussi, l’évaluation des déficiences et des compétences de la personne polyhandicapée est complexe et nécessite des évaluations régulières de la situation globale de la personne et de ses compétences et difficultés spécifiques avec des outils adaptés.
Le groupe d’experts encourage le développement et la validation d’outils complémentaires adaptés à l’âge (évaluant les compétences cognitives, communicationnelles, auditives et visuelles notamment).
La pratique de l’évaluation s’appuie souvent sur des outils non validés, ou non adaptés pour les personnes polyhandicapées. De plus, les outils validés le sont le plus souvent en néerlandais, anglais ou allemand ce qui induit un biais conceptuel quand l’évaluation est faite par des personnes parlant une autre langue.
Le groupe d’experts recommande que les recherches internationales utilisent des outils d’évaluation des compétences et des déficiences qui soient traduits dans la langue d’usage et validés dans la culture de chaque pays participant.
L’amélioration de la qualité de vie doit faire partie des objectifs de toute intervention thérapeutique et nécessite donc une évaluation adaptée. Le groupe d’experts recommande d’intégrer le retentissement sur la qualité de vie, à court et à long termes, aux objectifs des protocoles de recherche thérapeutique chez la personne polyhandicapée.
Le groupe d’experts recommande de développer des recherches sur l’évaluation de la qualité de vie des personnes polyhandicapées, notamment de développer des outils complémentaires d’évaluation.
Les douleurs vécues par les personnes polyhandicapées doivent être évaluées, en termes d’intensité, de durée et d’impact, avec des outils adaptés à leurs capacités de communication. Les outils à destination des adultes, en dehors de la DESS (échelle Douleur Enfant San Salvadour) qui a été validée jusqu’à 33 ans, manquent à ce jour.
Le groupe d’experts recommande de développer des recherches sur l’évaluation de la douleur chez la personne polyhandicapée.

Améliorer la communication avec la personne polyhandicapée

Les déficiences cognitives et motrices des personnes avec un polyhandicap induisent un handicap de communication important qui entrave leur participation aux interactions de leur quotidien. Ces déficiences impliquent un ajustement de leurs partenaires de communication, un aménagement du contexte et justifient la mise en place de moyens facilitant la participation des personnes à ces interactions.
Le groupe d’experts souligne le manque d’outils validés pour l’évaluation de la communication dans le cadre spécifique du polyhandicap et recommande de développer les recherches autour de l’évaluation de la communication, en initial et en dynamique, autour des différentes interventions. Le groupe d’experts recommande d’encourager les recherches type evidence-based sur la communication alternative et améliorée (CAA) dans le polyhandicap.
Le groupe d’experts recommande également que des travaux soient menés sur les manifestations des émotions et de l’état intérieur des personnes polyhandicapées.

Mener des recherches spécifiques à la famille,
aux aidants et aux professionnels

Dans les champs du polyhandicap, l’implication de la famille, des aidants et proches aidants, est une évidence, même si le patient reste au cœur du processus.
Le groupe d’experts recommande de développer les recherches sur l’impact des différentes étapes de la vie de la personne polyhandicapée sur sa famille.
Le groupe d’experts souligne l’importance d’encourager les recherches sur les enfants polyhandicapés d’âge préscolaire, notamment sur les interactions précoces parents-enfant et sur les modes de garde de ces enfants.
Le groupe d’experts recommande de mettre en place des recherches pour évaluer la qualité de vie des familles et identifier des leviers d’action permettant d’améliorer la qualité de vie de tous les membres de la famille.
Par ailleurs, pendant les confinements liés à la crise sanitaire de la Covid-19, l’accès aux soins des personnes polyhandicapées a été sévèrement compromis. Cette crise a cependant permis l’émergence d’une offre de soin et d’éducation en distanciel qui représente un complément utile dans l’arsenal thérapeutique dans la prise en soins des personnes polyhandicapées.
Le groupe d’experts recommande de développer des actions de recherche afin d’évaluer l’impact des situations de crise sur les soignants des personnes polyhandicapées.

Mener des recherches spécifiques
sur la dimension sociale en jeu dans le polyhandicap

Les enfants polyhandicapés, quelles que soient leurs capacités, ont le droit d’accéder à une scolarisation adaptée. Cependant, il y a très peu de littérature disponible sur leur inclusion totale en pratique et en particulier aucun texte traitant de la situation française. Le groupe d’experts recommande le développement de recherches portant sur les conditions et l’évaluation de la scolarisation des enfants polyhandicapés en France.
Concernant la maltraitance, les études portant sur le polyhandicap sont rares, mais convergent autour de l’idée que la vulnérabilité majeure qui caractérise le polyhandicap renforce les risques de maltraitance.
Le groupe d’experts recommande d’encourager des recherches pour analyser les phénomènes de maltraitance active et passive, les évaluer et mieux envisager la prévention à ce sujet.

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