2011
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Surveillance et prévention selon le secteur d’activité
Ce chapitre vise à identifier les méthodes quantitatives et qualitatives qui permettent de dépister les situations de stress chez les travailleurs et à évaluer les systèmes nationaux de surveillance des facteurs de risque psychosociaux. Il complète également le chapitre sur les types d’interventions de prévention et l’évaluation de leur efficacité en abordant plus spécifiquement les interventions centrées sur un secteur d’activité particulier ou sur la prévention d’une pathologie liée au stress. Outre les constats de la littérature internationale, ce chapitre aborde l’analyse qualitative du travail à partir de données françaises de pathologie clinique.
En préambule, seront précisés les concepts et définitions des notions de stress et de catégorie de travailleurs dits « indépendants » utilisés dans ce chapitre.
Travailleurs indépendants : qui sont-ils, que font-ils ?
Comme le souligne Barreau dans son ouvrage « Gérer le travail » (1999), dans les années 1950, la classification des situations d’emploi est relativement simple. Elle est bipolaire. La population active se partage en effet à peu près également entre le travail indépendant et le travail salarié. La multiplication des « emplois atypiques » (par exemple, temps partiel, CDD, intérim, groupement d’employeurs) et la généralisation du salariat (plus de 80 % des actifs dans les années 1980 et 1990) ont éclipsé, depuis, cette répartition des années 1950.
Depuis les années 1970, et surtout depuis les années 1990 et 2000, on assiste à un développement des situations particulières d’emploi et de la précarité. Si particularité ne signifie pas précarité, dans les faits, les situations particulières d’emploi sont le plus souvent précaires. Cette précarité peut toucher le travail salarié mais également le travail indépendant. L’analyse économique de la précarité tient compte de trois éléments : la discontinuité (portant sur le temps de travail), le revenu (dont le niveau découle du taux de rémunération et de la discontinuité) et la protection sociale. Ces éléments sont importants à connaître et à prendre en compte dans les études concernant les travailleurs indépendants puisqu’ils sont précisément un objet de préoccupation pour eux, comme les quelques explorations cliniques ou études qualitatives le montrent.
En 2007, selon l’enquête Emploi de l’Insee (Chevalier et coll., 2008

), les travailleurs non-salariés constituaient environ 11 % de la population active et d’après une étude en 2005 du même organisme, les effectifs des non-salariés se sont remis à croître légèrement après avoir baissé dans les années 1990 : hors agriculteurs et aides familiaux, les non-salariés étaient aux alentours de 1 900 000 en 2005. Cette population se caractérise par sa grande hétérogénéité et une variabilité d’effectifs des différentes catégories dans le temps. On y retrouve, outre les non-salariés agricoles et les aides familiaux, les artisans et commerçants, les professions libérales (réglementées ou non), les professions intermédiaires de la santé et du travail social. L’émergence de nouveaux statuts, le cumul d’activités salariées et non-salariées viennent également brouiller la segmentation traditionnelle entre travailleurs salariés et indépendants. Au sein même de ces différentes catégories, il peut y avoir des groupes aux caractéristiques de travail très variées comme par exemple celui des employeurs qui regroupe des PDG salariés de leur propre entreprise dont la taille peut être considérable et des employeurs de quelques salariés. Pour plus de précisions, nous conseillons au lecteur de se reporter au chapitre sur l’ébauche d’une sociologie des travailleurs indépendants.
Les études sur les conditions de travail et leurs effets sur la santé dans la population des travailleurs salariés tiennent compte, parmi ceux-ci, des différentes catégories socioprofessionnelles (ouvriers, employés, cadre...). De la même manière, les travaux chez les travailleurs indépendants doivent pouvoir, outre la question du genre, tenir compte de ces différentes catégories, dont les conditions de travail peuvent être très éloignées les unes des autres.
Stress au travail : quel modèle de compréhension ?
La première difficulté à laquelle nous nous trouvons confrontés est le fait que dans le langage commun le mot « stress » sert à désigner, à la fois, les facteurs d’expositions pathogènes en milieu de travail (les « stresseurs ») et leurs effets sur la santé, tant physique que psychique, des travailleurs qui y sont soumis. Son usage familier dans le grand public et sa banalisation en font un excellent mode d’entrée pour tenter d’explorer le travail et son organisation pour telle population particulière d’un côté, les conséquences pour leur santé et les moyens pour y faire face de l’autre. La compréhension des situations de travail dépend de la posture adoptée par l’observateur : « neutre » extérieur, prenant ce qui est montré dans son travail par le travailleur observé pour la seule réalité objective, ou bien s’intéressant au rapport subjectif du travailleur à son activité dans une dimension de compromis entre les exigences de l’organisation prévue, la rationalité (les attentes, les désirs, les capacités physiques et psychiques, les valeurs...) de l’individu et la rationalité du collectif d’appartenance (existant ou non).
Dépister le niveau de stress dans une situation de travail, dans une profession, dans une entreprise, implique de faire une analyse à partir d’indicateurs pour repérer les facteurs de risque et leur impact sur la santé des travailleurs.
Un diagnostic à partir de l’analyse de la situation de travail utilise le plus souvent des outils développés sur la base de questionnaires et d’échelles qui font ensuite l’objet de traitements statistiques.
Mettre en place une intervention-action visant à réduire ou prévenir les situations de stress et améliorer la santé des travailleurs fait appel à d’autres méthodologies, voire à d’autres concepts.
D’après les travaux explorés, la prééminence de plusieurs approches, différentes mais non opposables, de compréhension du stress sert de support aux interventions visant à prévenir le stress en entreprise. L’une, déjà plus ancienne, est le modèle transactionnel du stress au travail qui a été utilisé par l’INRS (Institut national de recherche et de sécurité), s’orientant vers une évaluation cognitive des enjeux de la situation de travail et les stratégies mises en place pour garder le contrôle de cette situation. Une autre démarche, préconisée par l’INRS actuellement, s’appuie sur l’évaluation des contraintes au travail considérées comme pathogènes. Enfin, celle de la psychodynamique du travail s’intéresse au rapport subjectif du sujet à son travail, discipline construite par Christophe Dejours (voir sa communication « La référence au « travailler » dans le rapport entre santé mentale et travail » à la fin de cet ouvrage) à partir des concepts de souffrance liée au travail, de stratégies défensives (collectives et/ou individuelles), de la confiance et de la coopération dans le travail, de la reconnaissance et de l’autonomie, dans un contexte de travail qui a beaucoup changé depuis le début des années 1990.
Surveillance et dépistage
Dans cette partie seront abordés les différents outils de dépistage des situations de stress ainsi que les systèmes nationaux de surveillance des facteurs de risque psychosociaux mis en place dans les différents pays.
Outils de dépistage
On pourra, pour cette question des outils, utilement se reporter dans cet ouvrage au chapitre portant sur les modèles et concepts pour l’évaluation des facteurs psychosociaux et à celui sur les facteurs de stress et les mécanismes psychologiques. Le dépistage des facteurs de risque de stress et des atteintes à la santé peut être envisagé à un niveau individuel ou collectif.
De nombreux articles, surtout anglo-saxons, s’intéressent au dépistage et à l’évaluation collectifs, avec l’utilisation quasi exclusive d’une méthodologie d’enquête par questionnaire et le recours à des outils de mesure internationalement validés. Il est possible de distinguer ces outils selon trois catégories : ceux qui portent sur les facteurs de risque, à savoir les « stresseurs » ou les facteurs de stress liés au travail ; ceux qui évaluent les processus cognitifs du stress ; ceux qui évaluent les conséquences du stress en termes d’atteintes à la santé ou d’attitudes au travail. Dans le tableau 16.I

, quelques exemples de ces questionnaires sont donnés.
Tableau 16.I Exemples de questionnaires de stress traduits en français
Nom de l’outil
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Type d’évaluation
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Job Content Questionnaire (Karasek)
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Facteurs de stress : demande psychologique, latitude décisionnelle, soutien social
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Déséquilibre efforts-récompenses (Siegrist)
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Facteurs de stress : efforts et récompenses
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Échelle de stress perçu (PSS) (Cohen et coll., 1983  )
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Processus cognitifs du stress : stress perçu
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Way of Coping Cheklist (WCC) (Vitaliano et coll., 1985  )
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Processus cognitif du stress : stratégies d’adaptation
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General Health Questionnaire (GHQ) (Goldberg et Hillier, 1979  )
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Atteinte à la santé mentale : détresse psychologique
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Maslach Burnout Inventory (MBI) (Maslach et Jackson, 1986  )
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Atteintes à la santé mentale et des attitudes au travail : burnout ou épuisement professionnel
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Les outils de dépistage les plus couramment utilisés dans les études depuis une quinzaine d’années sont, du côté de la mesure des effets sur la santé, le MBI (Malasch Burnout Inventory), principalement en santé publique pour une évaluation du burnout, et le GHQ (General Health Questionnaire) (différentes versions existent selon le nombre de questions, le GHQ 28 à 28 questions, le GHQ 12...), alors que les modèles de Karasek et Siegrist portent sur l’évaluation des contraintes de travail (enquêtes Sumer et Samotrace) pour la mesure des contraintes vécues dans le travail. Le NHP (Notthingam Health Profile) utilisé en version française dans l’enquête Estev (enquête santé travail et vieillissement) au début des années 1990, semble, depuis, avoir été délaissé au profit des outils cités ci-dessus. Actuellement, on observe fréquemment en France l’utilisation conjointe de questionnaires des modèles de Karasek et de Siegrist et du GHQ pour explorer les dimensions à la fois du côté travail et du côté santé et faire une analyse du croisement de ces données.
Des articles, en particuliers francophones, assez peu nombreux comparativement à l’ensemble de la littérature explorée, font état d’études ou revues d’indicateurs de risque de stress au travail au niveau de l’organisation du travail. L’INRS (2007

) a publié des documents destinés aux acteurs dans le champ santé travail et aux acteurs de la prévention au travail comprenant aussi les membres de CHSCT (Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) et les instances représentatives du personnel, pour les aider à dépister les risques psychosociaux, réaliser un diagnostic organisationnel et construire une démarche de prévention (François et coll., 2006

). Vézina et coll. ont publié en 2006 une note de recherche pour définir les risques et sur la prévention des problèmes de santé mentale (avec utilisation des modèles de Karasek et de Siegrist). L’Institut national de santé publique du Québec (Direction des risques biologiques, environnementaux et occupationnels) a produit, sous la direction de Michel Vézina en avril 2009, une grille d’identification des risques psychosociaux au travail (INSPQ, 2009

).
La recherche d’un indicateur universel unique qui permettrait d’évaluer les risques psychosociaux liés au travail dans toutes ses composantes (cf. Rapport Nasse-Légeron, 2008

), idée séduisante de prime abord, est aujourd’hui rejetée par la communauté scientifique du champ de la santé au travail.
Le Collège d’expertise sur le suivi statistique des risques psychosociaux au travail, constitué à la demande du ministère du Travail en France et présidé par Michel Gollac, a élaboré et fait connaître en octobre 2009 une batterie d’indicateurs provisoires autour de six axes : les exigences au travail, les exigences émotionnelles, l’autonomie ou les marges de manœuvres, les rapports sociaux et relations au travail, les conflits de valeurs, l’insécurité de l’emploi (Collège d’expertise, 2009

). Ces indicateurs sont tirés essentiellement de deux sources : l’enquête Conditions de travail de 2005 réalisée par la Dares (Direction pour l’animation de la recherche et des statistiques, ministère du Travail) (Algava et Vinck, 2009

) et l’enquête Santé et itinéraire professionnel (SIP, 2007) de l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques), la Dares et la Drees (Direction de la recherche et des études sur la santé, ministère de la Santé). Ces sources de données incluent des informations sur les travailleurs indépendants (agriculteurs et autres non-salariés).
Les premiers résultats sur les facteurs psychosociaux auxquels sont exposés les indépendants sont présentés dans le chapitre sur les facteurs de risque psychosociaux au travail chez les indépendants. De façon synthétique, il en ressort que les travailleurs non-salariés (hors agriculteurs) sont plus que les autres travailleurs exposés à une pression temporelle, à une complexité de tâches, à des exigences émotionnelles dues aux relations avec le public et au fait d’avoir à cacher ses émotions. Ils sont plus nombreux à craindre pour leur emploi. En revanche, ils ont plus de marges de manœuvre et d’autonomie, ils sont moins soumis à des conflits, ils estiment plus souvent que leur travail est reconnu à sa juste valeur. Ils sont moins nombreux que les salariés à estimer avoir à faire des choses qu’ils réprouvent. Ils estiment pour la plupart avoir les moyens de faire un travail de qualité et ils se sentent, plus que les salariés, en capacité de continuer leur activité jusqu’à l’âge de la retraite.
Compte tenu du fait que la catégorie « travailleurs non-salariés » n’est pas homogène, il serait souhaitable que ces indicateurs soient appliqués de façon différenciée aux différentes catégories de travailleurs indépendants pour pouvoir analyser chaque groupe plus finement et pouvoir adapter l’offre de prévention de façon spécifique à chacun.
Il faut également citer la post-enquête qualitative en Pays de la Loire réalisée en 2008-2009 qui fait suite à l’enquête SIP de l’Insee de 2007 en population générale (Guiho-Bailly et coll., 2009). Cette post-enquête a été réalisée simultanément par la méthodologie de la psychodynamique du travail et par la méthodologie traditionnelle avec questions fermées et enquêteur professionnel. Les résultats montrent que la méthodologie traditionnelle aboutit, pour les cas étudiés, à une sous-estimation des liens entre les choix de travail et de mobilité et les problèmes de santé qui peuvent en découler ou bien des liens entre le souci de préserver sa santé et l’itinéraire professionnel choisi ou subi. Si le suivi d’un script strict de questionnement facilite le traitement statistique ultérieur, il enferme néanmoins la pensée du sujet dans un fonctionnement binaire réducteur et cloisonnant. Ce résultat est un élément de connaissance important dont il faudrait pouvoir tenir compte dans le choix de méthodologie d’une investigation auprès des travailleurs indépendants.
Évaluation des systèmes nationaux de surveillance
Dollard et coll. (2007)

ont procédé à une revue internationale des systèmes nationaux de surveillance des facteurs de risque psychosociaux auxquels sont exposés les travailleurs : 35 systèmes examinés dans 20 pays différents dont la France, avec l’enquête Sumer (Surveillance médicale des expositions et des risques au travail) et l’enquête Conditions de Travail de la Dares. Il apparaît qu’il n’y pas de mesure exhaustive des facteurs de risque recherchés par un seul système. La majorité des enquêtes évalue à la fois les caractéristiques du travail et le contexte organisationnel et social du travail. Ainsi, les six caractéristiques du travail le plus souvent inclues dans les systèmes de surveillance nationaux sont, par ordre : les horaires de travail, le degré d’influence sur l’organisation de son travail (autonomie), la surcharge ou la sous charge de travail, les contraintes cognitives, le manque de variété dans le travail (monotonie). Sur l’aspect social et organisationnel du travail, les six caractéristiques les plus communément mesurées dans toutes les enquêtes, sont la rémunération, la formation professionnelle, l’insécurité de l’emploi, le support par la hiérarchie, la coopération des collègues, les évolutions de carrière (possibilités de promotion). On constate que les modèles de Karasek et Siegrist sont en adéquation avec cette taxonomie émergente de tous les systèmes de surveillance. L’usage très largement répandu dans le monde entier de ces deux modèles, faisant consensus du point de vue scientifique pour les chercheurs dans le domaine de la santé au travail, contribue à ce résultat. Les conséquences pour la santé et le bien-être des travailleurs, les plus fréquemment recherchées et mesurées sont la santé physique, la satisfaction au travail, la santé mentale, le stress et les arrêts de travail. Si l’Europe et le Canada sont en pointe en nombre d’études et d’enquêtes à visée statistique sur un plan national, l’Australie défend un système de surveillance « compréhensive » avec une approche plus qualitative.
Par ailleurs, il faut observer que les principaux facteurs émergents validés par la recherche et qui restent à intégrer dans les systèmes de surveillance incluent : la demande émotionnelle, le harcèlement, les stresseurs aigus, la justice organisationnelle, les changements organisationnels, les états psychologiques positifs et le bien-être.
Stress et secteur d’activités
Il n’existe pas d’échelle comparative entre les professions qui permettrait de faire une sorte de classement des plus touchées par le stress. En France, l’enquête Samotrace (Cohidon et coll., 2009

), qui s’est déroulée en 2006-2008 en région Centre et deux régions limitrophes, permet de repérer des secteurs d’activité professionnelle ou des catégories socioprofessionnelles où les salariés enquêtés présentent une prévalence plus importante de « souffrance mentale » liée à leur travail, ou bien sont plus nombreux à être en situation de «
job strain » (modèle de Karasek). Les femmes déclarent plus souvent que les hommes, dans tous les secteurs d’activité, un « mal-être global » selon le questionnaire GHQ 28. Cependant, pour le secteur hôtels-cafés-restaurants, ce sont les hommes qui sont les plus nombreux à déclarer ce mal-être. L’étude explore, de façon tout à fait originale, une contrainte de travail particulière, travailler d’une façon heurtant la conscience professionnelle, dont l’impact psychique est régulièrement souligné dans les consultations de « souffrance au travail ». Une ventilation par secteur professionnel et par sexe a été faite. Sont concernés principalement les hommes dans les secteurs des services collectifs, sociaux et personnels, l’administration publique, l’immobilier, la location et les services aux entreprises, le commerce, la réparation automobile et les articles domestiques, l’industrie manufacturière. Dans le secteur de la construction, il n’est pas anodin de constater qu’environ 18 % des hommes de ce secteur déclarent travailler d’une façon heurtant leur conscience professionnelle.
Pour les femmes, les secteurs les plus touchés sont la santé-action sociale, ainsi que les activités financières et les transports et communications. Cependant, en analyse multivariée, l’obligation de travailler d’une manière que l’on réprouve est associée au mal-être uniquement chez les hommes (OR=1,5 ; IC 95 % [1,1-2,1]).
Les résultats ne sont représentatifs que de la population enquêtée et en l’occurrence, il s’agit de travailleurs salariés et d’une étude transversale. L’objectif du Département santé travail de l’InVS, pilote du programme, est de pouvoir aboutir à un observatoire permanent de la santé mentale des salariés en lien avec leur travail dans un nombre significatif de régions en France.
L’enquête Sumer, enquête transversale répétée en 1987, 1994, 2003 et 2009, portant sur au moins 50 000 salariés, permet de répertorier les contraintes de travail auxquelles ces salariés sont exposés, d’apprécier les risques psycho sociaux par l’utilisation du modèle de Karasek et de déterminer des prévalences par catégorie socioprofessionnelle ou par secteur d’activité. On constate, selon les résultats de 2003, que tous les salariés sont touchés mais selon des degrés variables (Guignon et coll., 2008

). En particulier, les ouvriers de type industriel, les ouvriers qualifiés de la manutention et les contremaîtres cumulent le plus de contraintes physiques, organisationnelles, de rythme et de manque d’autonomie (dénommés « Zola » dans la figure 16.1A

). Ces travailleurs qui représentent 5 % de la population-salariée se retrouvent en beaucoup plus grand nombre dans la catégorie «
job strain » (figure 16.1B

), situation liée à la survenue plus fréquente de syndromes dépressifs et de maladies cardiovasculaires.
L’intérêt du dépistage des contraintes dans le travail et des atteintes à la santé selon le sexe, le secteur d’activité ou la catégorie socioprofessionnelle réside dans la possibilité de faire des choix d’actions de prévention plus ciblés ou prioritaires et d’alimenter le débat social, tant en interne dans l’entreprise qu’en externe dans la société.
Toutefois, disposer uniquement de données par secteurs d’activité ou par catégories socioprofessionnelles serait immanquablement radicalement réducteur puisque les situations de stress en lien avec le travail sont à analyser au regard de l’organisation du travail particulière dans laquelle un travailleur ou un groupe de travailleurs sont plongés. Cette organisation, particulière à chaque entreprise, est susceptible de changer à tout moment sous l’effet des efforts conjoints ou non des organisateurs du travail et de leurs subordonnés. Parallèlement à l’approche par profession ou secteur d’activité, il convient de s’intéresser au type d’organisation du travail, aux contraintes qu’elle génère pour chacun à chaque niveau de responsabilité, et par conséquent, aux déterminants de l’activité de travail de la population que l’on souhaite observer.
Interventions de prévention selon les secteurs d’activité ou les pathologies
Les populations qui font l’objet d’études d’évaluation des interventions visant à prévenir le stress au travail sont constituées quasi exclusivement de travailleurs salariés du secteur privé ou public. Il s’agit essentiellement d’employés (« cols blancs » et « managers ») dans les secteurs du soin, dans les hôpitaux ou le soin à domicile (médecins généralistes, dentistes, psychiatres, infirmières et aides soignants, cadres de santé), du médico-social (fonction publique territoriale), de la Poste ou des télécommunications, du secteur des services. Nous disposons d’une enquête chez les avocats et d’une autre chez les dirigeants « senior ».
Nous n’avons retrouvé qu’une étude portant sur des travailleurs indépendants (Blonk et coll., 2006

). Cette étude compare deux types d’interventions, l’une de thérapie cognitivo-comportementale, l’autre d’une action combinée sur le travail et les individus, dans une population de travailleurs indépendants présentant des plaintes de la sphère psychique telles que anxiété, dépression et
burnout.
Une évaluation des pratiques de diagnostic de stress et des interventions de prévention a été menée par Hansez et coll. (2009)

au sein de 180 entreprises belges couvrant de nombreux secteurs d’activité. Les auteurs relèvent les facteurs bloquants ou stimulants pour passer du diagnostic à l’élaboration d’un plan d’actions et aux interventions. Ils constatent qu’il existe de plus en plus d’interventions centrées sur l’environnement de travail au détriment de celles plus traditionnelles portant sur les travailleurs, et que les interventions visent maintenant le plus souvent les facteurs de risque psychosociaux dans le travail que les stresseurs physiques. Les auteurs montrent que les facteurs facilitant la mise en place d’interventions après diagnostic sont du côté de la communication, de la participation des « acteurs clés » et de la méthodologie utilisée, les facteurs gênants étant liés aux aspects temporels et financiers ainsi qu’aux changements d’organisation. Des actions de sensibilisation sont d’autant plus nécessaires que la taille de l’entreprise est faible. L’usage de questionnaires dans les PME-TPE serait un outil inadapté. Il s’agit là, également, d’un élément à retenir pour d’éventuelles interventions auprès de travailleurs indépendants.
La profession non-salariée pour laquelle nous disposons de quelques études quantitatives et/ou qualitatives est une profession libérale (profession réglementée en France), celle de médecin généraliste (
general practitioner). Ces études ont été menées aux États-Unis et aux Pays-Bas (Linzer et coll., 2001

), en France (Davezies et Daniellou, 2002

), au Royaume-Uni (Garelick et coll., 2007

), en Suède (Kjeldmand et Holmstrom, 2008

; Peterson et coll., 2008

) et au Canada (Lee et coll., 2008

). L’objet de ces études vise essentiellement à dépister et évaluer l’importance du
burnout dans cette profession en utilisant, le plus souvent, les critères du
Malasch Burnout Inventory (MBI) et d’en évaluer l’impact sur le devenir professionnel. Quelques études se sont intéressées aux dispositifs spécifiques de soins mis à disposition de ces professionnels (prévention tertiaire) en termes de facilités d’accès et d’efficacité. Deux études (Kjeldmand et Holmstrom, 2008

; Peterson et coll., 2008

) montrent l’efficacité de la prévention du
burnout chez les médecins généralistes fondée sur la participation à des groupes Balint (travail en groupe de pairs et construction de règles de métier) ou l’analyse de pratiques entre pairs.
Deux études portent sur les dentistes, partant du fait que cette profession présenterait un haut niveau de stress professionnel selon les quelques travaux déjà menés. La première (Newton et coll., 2006

) discute essentiellement de questions méthodologiques des interventions et de la nécessité de combiner des interventions de type « structuré » et « non structuré ». La seconde étude (Gorter et coll., 2007

) analyse les facteurs qui contribuent au sentiment de ne pas être préparé au métier chez les jeunes dentistes. Elle attire l’attention sur la nécessité d’inclure des cours sur les pratiques de management dans la formation initiale et le besoin d’un suivi régulier des praticiens pour dépister le
burnout. Pour la France, nous disposons de données quantitatives pour la population des travailleurs non-salariés dans deux des enquêtes citées plus haut : l’enquête Conditions de travail de la Dares (dernière édition 2005) et l’enquête SIP de l’Insee.
Tableau 16.II Interventions auprès des professionnels de santé
Références
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Catégorie
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Type intervention
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Méthodologie
Outils
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Effets santé mesurés
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Résultats
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Ruotsalainen et coll., 2008
Marine et coll., 2006
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Recherchea
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Revues de littérature :
Interventions sur le travail
Interventions sur les sujets
Interventions sur l’interface sujet/travail
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Karasek’ job content questionnaire
Maslach Burnout Inventory (MBI)
Nursing Stress Scale (NSS)
General Health Questionnaire (GHQ)
State Trait Anxiety Inventory (STAI)
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Stress
Burnout
Anxiété et dépression
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Secteur du soin (infirmières)
Évaluation de l’efficacité des différents types d’intervention et classement des études : uniquement niveau « limited evidence »
Effet mineur mais significatif pour les 3 types d’intervention
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Taris et coll., 2003
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Recherche
Prévention primaire
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81 organisations du secteur de soins à domicile ont été interrogées à 2,5 ans d’intervalle, évaluation de 3 types d’interventions :
Interventions sur le travail
Interventions sur les sujets
Interventions sur l’interface sujet/travail
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MBI
Karasek
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Burnout
Job stress
Support social
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Population d’infirmières en soins à domicile
Seules les interventions sur le travail sont les plus efficaces pour diminuer le stress au travail, mais effet faible
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Kjeldmand et Holmstrom, 2008
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Prévention primaire
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Étude sur les groupes de travail entre pairs
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Interviews
Groupes Balint MBI
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Burnout
Job satisfaction
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Médecins généralistes
Efficacité +++ sur la réduction de survenue de burnout
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Lee et coll., 2008
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Prévention primaire
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Autoquestionnaires chez les médecins généralistes
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MBI
Family Physician Stress Inventory
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Burnout
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La participation à la formation médicale continue et l’amélioration des relations avec les patients diminuent le niveau de stress
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Martini, 2006
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Prévention primaire
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Questionnaires chez les médecins résidents de différentes spécialités d’une université avant-après la mise en œuvre d’une limitation des heures de travail
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MBI
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Burnout
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Réduction de 77 à 43 % de burnout après la limitation des horaires de travail chez les résidents de première année
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Peterson et coll., 2008
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Prévention primaire
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Évaluation des effets de la participation à un groupe de réflexion entre pairs 660 travailleurs du secteur des soins
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Randomized controlled trial (RCT) Oldenburg Burnout Inventory (OLBI) version suédoise du MBI-GS
General Nordic Questionnaire for psychological and Social Factors at Work (QPS Nordic)
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Burnout
Changements perçus dans les conditions de travail
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Médecins généralistes
Effets positifs significatifs +++
|
Linzer et coll., 2001
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Prévention primaire
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Comparaison de deux enquêtes dans deux pays : États-Unis et Pays-Bas
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Work control, work influence
Work/home interference
Home support
Stress scale
Satisfaction
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Burnout
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Burnout lié à la perte d’autonomie et à l’augmentation de la charge de travail
Le contrôle de son travail permet une plus grande satisfaction au travail
Aux |$$|AAEtats-Unis, un bon support familial a un effet positif.
Liens interférence travail/vie privée avec nombre d’heures de travail, stress, insatisfaction et burnout
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Perseius et coll., 2007
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Préventions primaire et secondaire
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Évaluation de l’effet de la mise en œuvre d’une thérapie comportementale spéciale pour suicidants
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MBI
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Burnout
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Est efficace : le travail collectif, la discussion entre pairs, la supervision, l’entraînement spécial pour thérapeutes
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Metzenthin et coll., 2009
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Prévention secondaire
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Étude transversale chez des infirmières
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Sentiment de stress : Lickert Scale (1 à 5)
Mesure du taux de cortisol salivaire au réveil
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Sentiment de stress au travail
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Pas de lien entre taux de cortisol et conditions de travail
Taux de cortisol et sentiment de stress liés
Stress et conditions de travail liés
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Rø et coll., 2007
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Prévention tertiaire
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Enquête par questionnaire chez les médecins s’adressant à un centre proposant un programme de conseils pour médecins généralistes en souffrance
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MBI
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Symptomes d’anxiété -dépression
Burnout
Job stress
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Comparaison avec la population totale des médecins généralistes norvégiens
Intérêt de proposer ce programme aux médecins présentant un burnout lié au stress au travail
Pas d’exploration du travail
|
Cunningham et coll., 2009
|
Prévention tertiaire
|
Service conseil pour médecins généralistes stressés
|
MBI
|
Burnout
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Bonne perception du programme mais méconnaissance du système par les médecins
Pas d’exploration du travail
|
Krasner et Epstein, 2009
|
Prévention tertiaire
|
Programme intensif d’éducation individuelle États-Unis
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MBI
Échelles de personnalité, empathie, humeur
Jefferson Scale Physician Profile of Mood States Physician Belief Scale
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Burnout
État de l’humeur
Traits de personnalité
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60 % des médecins généralistes présentent un burnout
50 % des étudiants médecins de 3e année
Liens forts entre burnout et idées suicidaires
Le programme est efficace pour augmenter le sentiment de bien-être.
|
Ayers et coll., 2009
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Prévention secondaire
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Évaluation de l’état de santé en lien avec le travail chez les dentistes de Nouvelle-Zélande
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Enquête nationale postale sur un échantillon de 750 praticiens
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TMS
Appréciation globale de l’état de santé
Problèmes dermatologiques
Accidents ou évènements marquants au travail
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71 % se déclarent en bonne ou excellente santé.
19 % ont connu des violences dans le travail, plus souvent les dentistes femmes et les dentistes salariés.
Les principaux TMS touchent le cou, le bas du dos, les épaules.
47 % ont présenté un épisode dermatologique dans les 12 derniers mois.
Les atteintes à la santé en lien avec le travail sont plus fréquentes chez les dentistes femmes, mais elles sont plus satisfaites de leur santé que les hommes.
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Fothergill et coll., 2004
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Recherche Revue de littérature
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Évaluation de l’impact d’interventions de gestion du stress chez les professionnels du secteur de la psychiatrie (praticiens psychiatres)
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23 études internationales ont été étudiées
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Stress
Stresseurs personnels
Stresseurs liés au travail
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L’événement le plus difficile (stressant) pour les psychiatres est le suicide d’un patient.
Les stratégies pour faire face au stress font appel au support social des collègues et aux centres d’intérêt en dehors du travail.
Aucune étude mesurant l’impact d’une intervention de gestion du stress chez les psychiatres n’a été trouvée.
|
a Dans la catégorie « Recherche » figurent les interventions réalisées dans un but d’acquisition des connaissances (souvent des revues de littérature). Les autres catégories incluent les études ou les interventions de terrain orientées vers l’action.
Tableau 16.III Interventions pour les seniors managers
Références
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Catégorie
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Type intervention
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Méthodologie
Outils
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Effets santé mesurés
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Résultats
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Veach et coll., 2003
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Prévention tertiaire
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Stage de gestion du stress
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Stress and Coping Inventory
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Dépression
Health habits
Social support
Stress and Life satisfaction
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Isolement des managers
Nécessité d’un travail entre pairs
Amélioration 10 mois après avoir suivi le stage
Action sur les comportements, pas d’analyse du travail
|
Tableau 16.IV Interventions pour les avocats
Références
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Catégorie
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Type intervention
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Méthodologie
Outils
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Effets santé mesurés
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Résultats
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Geok-Choo et coll., 2008
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Prévention tertiaire
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Intervention de coaching, travail sur jeux de pouvoir, description de situations de travail stressantes
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Work stressors
Overall stress level
Coping behaviour
|
Stress lié aux relations interpersonnelles
Mesure des liens entre work stress et comportement de coping
|
Présentation de l’intérêt des jeux de pouvoirs
Coping : comportement adapté et ressources
Approche du travail uniquement sous l’angle des relations interpersonnelles
|
Tableau 16.V Interventions pour les employés de bureaux, les cols blancs
Références
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Catégorie
|
Type intervention
|
Méthodologie
Outils
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Effets santé mesurés
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Résultats
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Eklöf et coll., 2004
|
Prévention primaire
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Intervention participative et intégration de paramètres ergonomiques dans l’organisation
|
Étude longitudinale des caractéristiques des changements dans le travail
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Karasek
Mood adjective checklist
Confort du travail sur ordinateur (échelle de 9 points)
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40 groupes d’employés travaillant sur terminal à écran dans 11 entreprises publiques ou privées
Participation et intégration ergonomique sont plus difficiles à mener à bien quand il y a demande forte, stress élevé et support social faible.
|
Krause et coll., 2010
|
Prévention secondaire
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Étude longitudinale chez 165 téléopérateurs
Essai d’intervention ergonomique randomisée
Enquête pré- et post- intervention par questionnaire
|
Effort-Reward Imbalance (ERI)
Temps d’utilisation de l’ordinateur au travail et à la maison
Données ergonomiques du poste de travail
Activités de loisirs
Caractéristiques individuelles des travailleurs
|
TMS : cou, épaules et membres supérieurs
|
Lien significatif entre un score élevé ERI et augmentation douleurs membre supérieur droit
Pas de lien significatif avec les changements au niveau du cou, épaules ou membre supérieur gauche
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Elo et coll., 2008
|
Prévention tertiaire
|
Intervention de gestion du stress
Enquête pré- et post- intervention à 2 ans de distance
|
Entretiens qualitatifs
MBI-GS
1 question sur stress Work Ability Index (WAI)
|
Burnout
|
Entreprise municipale, fonction publique
La participation active des employés a un effet positif sur les retours de la hiérarchie et sur la circulation des informations.
Le niveau de participation n’est pas lié au bien-être individuel.
Observation des comportements, pas d’analyse du travail
|
Gatty, 2004
|
Prévention tertiaire
|
4 heures d’entraînement individuel chez 16 employés de bureau
Essai longitudinal randomisé et en parallèle
|
Groupe avec entraînement
Groupe contrôle
|
TMS
Stress
Niveau d’énergie
|
Impact positif au niveau des yeux, du cou, des épaules, coudes et poignets à la 11e semaine mais augmentation des céphalées
Modification minime du stress et du niveau d’énergie
Diminution du nombre de jours d’arrêt durant le mois de l’intervention
|
Hätinen et coll., 2007
|
Prévention tertiaire
|
Comparaison entre une intervention participative et une intervention traditionnelle
Échantillon de 110 employés
|
Intervention sur les individus (thérapie et relaxation) et identification des éléments de stress au travail
Idem + coopération avec les représentants du personnel et action sur les stresseurs identifiés
MBI-GS
Time pressure at work, Job control, workplace climate, satisfaction with supervisor
|
Burnout
|
Meilleur « job control » est lié à une diminution de l’épuisement et du « cynicisme ».
La méthode participative est plus efficace pour la prévention du burnout.
|
Kawaharada et coll., 2007
|
Prévention secondaire
|
Étude des relations entre stress au travail et sept catégories d’emploi
|
Auto-questionnaires
ERI
Job Demand-Control Model (JDC)
|
Anxiété
Dépression
Stress somatique
|
Différence de niveau de stress suivant les différentes catégories, résultats différents suivant le modèle utilisé, différences hommes/femmes, différences ouvriers/techniciens et managers
|
Kawaharada et coll., 2009
|
Prévention tertiaire
|
Programme d’entraînement gestion du stress
|
Non-randomized controlled trial
Ways of Coping Checklist (WCCL), Lickert scale
Percieve health Competence Scale (PHCS)
|
Anxiété
Fatigue
Dépression
Stress somatique
|
Pas d’effet observé, échantillon de population trop petit
|
Kirk et Brown, 2003
|
Prévention tertiaire
|
Programme d’assistance, conseils et consultations sur le lieu de travail : historique et développement en Australie
|
Évaluation du programme
|
Bien-être au travail
|
Pas d’intervention sur le travail
L’effet serait bénéfique sur la santé mentale des employés.
|
Dahl-Jorgensen et coll., 2005
|
Recherche
Prévention primaire
|
Deux interventions au niveau organisationnel dans le secteur des services, une dans une municipalité, l’autre dans un centre commercial
|
Utilisation d’indicateurs de santé utilisés avant-après intervention
Observations
Interviews
|
Job dissatisfaction
Stress
Épuisement émotionnel
Absentéisme
|
Changement positif sur seulement deux variables de santé chez les employés du centre commercial, pas de changement chez les employés municipaux
Analyse qualitative des données : rôle des contraintes de temps, du contact avec le public et des différents modes d’organisation
Examen d’une possible extension de ce type d’intervention dans le secteur des services
|
Tableau 16.VI Interventions pour les ouvriers
Références
|
Catégorie
|
Type intervention
|
Méthodologie
Outils
|
Effets santé mesurés
|
Résultats
|
Tsutsumi et coll., 2009
|
Prévention tertiaire
|
Évaluation d’une intervention participative
|
Cluster Randomized Controlled Trial
GHQ 28
Health and Work Performance Questionnaire (HPQ)
Version japonaise du Karasek (JCQ)
|
Santé mentale
|
La participation à l’intervention est liée à une amélioration de la santé mentale.
|
Tableau 16.VII Interventions ciblées sur la prévention des troubles mentaux
Références
|
Catégorie
|
Type intervention
|
Méthodologie
Outils
|
Effets santé mesurés
|
Résultats
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Corbière et coll., 2009
|
Recherche
Revue de littérature 2001-2006
|
Prévention primaire (8 interventions)
Prévention secondaire (14 interventions)
Prévention primaire et secondaire combinées (2 interventions)
|
Cotrell’s conceptualization
Karasek
Siegrist
|
Santé mentale
Facteurs psychosociaux dans l’environnement travail
|
Importance d’intervenir à deux niveaux : individuel et organisationnel
|
Quick et coll., 1992
|
Recherche
Revue de littérature
|
Prévention tertiaire
Gestion du stress
|
Contexte de promotion de la santé, d’éducation et traitement
|
Stress
Santé mentale
|
Nécessité de : références pour les connaissances, repérer les groupes à risque, standardisation de l’évaluation du stress et de la santé mentale, créer des guides pour intervention, établir des critères de mesure d’impact des interventions
Pas d’analyse du travail
|
Van Oostrom et coll., 2007
|
Recherche
|
Intervention sur le lieu de travail visant à diminuer la durée des arrêts de travail
Prévention tertiaire
|
« Intervention mapping »
Mode participatif
Groupe d’entretien rassemblant sujets stressés au travail, superviseurs et médecin du travail
|
Temps de retour au travail
|
Le retour au travail serait tributaire d’un changement de comportement, présentation de la méthode, travail sur les relations humaines et les perceptions, pas d’exploration du travail.
|
Bakker et coll., 2007
|
Recherche
|
Évaluation de l’efficacité en soins primaires d’une intervention chez des patients en arrêt de travail pour des troubles mentaux liés au stress
Prévention tertiaire
|
Comparaison de deux groupes (cluster randomized trial) :
Minimal intervention for stress-related mental disorders and sick leaves (MISS) usual care
|
Arrêts de travail
Dépression
Anxiété
Somatisations
|
Aucun effet constaté de l’intervention
Travail non exploré
Intervention en milieu de soins
|
Couser, 2008
|
Recherche
|
Revue de littérature
Gestion du stress
Prévention de la dépression au travail
Prévention tertiaire
|
Problème de définitions préventions primaire et secondaire : observation uniquement des individus et des groupes
|
Dépression (DSM IV)
|
Aucune exploration du travail
Conclusions : développer la résilience individuelle, dépister les individus à haut risque de dépression, améliorer l’organisation de l’éducation des populations (literacy), organiser un système de soins en santé au travail permettant l’accès à une intervention de qualité proactive
|
Martin et coll., 2009
|
Recherche
|
Intervention promotion de la santé sur le lieu de travail
Prévention tertiaire
|
Méta-analyse 1997-2007
MBI
Depression, Anxiety, Stress Scales (DASS)
Beck Depression Inventory (BDI)
GHQ12
Hospital Anxiety Depression Scale (HADS)
|
Dépression et anxiété
|
Aucune exploration du travail
Effet mineur des interventions de ce type
Effet identique des interventions ciblant la santé mentale directement et de celles ciblant d’autres facteurs de risque
|
Morris et Hardesty, 2002
|
Recherche
|
Point sur les connaissances
Dépression au travail
Prévention tertiaire
|
Revue des concepts
Stress
Dépression, burnout (DSM IV, MBI)
|
Dépression
|
Rôle de la hiérarchie :
Détecter les dépressifs
Proposer des programmes de gestion du stress
Améliorer les conditions de travail
|
Vezina, 2008
|
Prévention primaire
|
Intervention sur l’organisation du travail
|
Questionnaires
Karasek
Siegrist
|
Santé mentale
Support social
|
Démarche participative structurée
Groupe de soutien à l’intervention
Six étapes : focus groupe, nature du problème, types d’actions à réaliser, désignation de la personne responsable, l’échéancier, les critères d’évaluation
Intervention dans un plan de santé publique
|
Arthur, 2002
|
Prévention secondaire et tertiaire
|
Dépistage et surveillance de salariés à problèmes psychiques (secteur public en Grande-Bretagne)
|
Questionnaire GHQ 12
Conseils et programmes d’assistance individuelle
|
Santé mentale
|
Aucune exploration du travail
Dépistage de problèmes psychiques chez des salariés : 24 % de participation, 86 % ont un score > 4 avec besoin de soins
Origine des problèmes (opinion des intéressés) : 70 % personnelle, 30 % travail
|
Blonk et coll., 2006
|
Prévention primaire et tertiaire combinées
|
Intervention chez 122 travailleurs indépendants par thérapie cognitivo-comportementale (CBT) : comparaison de deux groupes et suivi à 4 et 10 mois
|
MBI version NL
DASS
Groupe CBT + intervention combinée (conseils sur la charge de travail, job demands... et techniques individuelles d’éducation psychique)
Groupe CBT seule
|
Arrêts de travail
Dépression
Anxiété
Burnout
|
Pour le groupe à intervention combinée : effet significatif sur le retour au travail (moins 200 jours d’arrêt), pas d’effet sur la souffrance liée au travail, la reprise du travail ne diminue pas la souffrance au travail ou cette diminution n’est pas nécessairement liée à la reprise du travail
|
Mino et coll., 2006
|
Prévention secondaire et tertiaire
|
Programme de gestion du stress
RCT (Randomized controlled trial)
|
ERI
GHQ 30
Center for Epidemiologic Studies for Depression (CES-D)
|
Santé mentale
Dépression
|
Effets potentiels ou nul du programme, chez des employés dans un travail hautement stressant
Pas d’exploration du travail
|
Perseius et coll., 2007
|
Prévention primaire et secondaire
|
Dépistage de l’effet de la mise en œuvre d’une thérapie comportementale spéciale pour suicidants
|
MBI
|
Burnout
|
Est efficace : le travail collectif, la discussion entre pairs, la supervision, l’entraînement spécial pour thérapeutes
|
Nickel et coll., 2007
|
Prévention tertiaire
|
Programme d’entraînement comportemental et psycho-éducatif RCT prospectif
|
Pression systolique (tension artérielle)
Cortisol salivaire au réveil
Trier Inventory for Assessment of Chronic Stress (TICS)
State Trait Anger Expression Inventory (STAXI)
Short Form Health Survey (SF36)
|
Stress
Anxiété
Santé mentale
TA et cortisol
|
L’application du programme minore tous les paramètres.
Efficacité dans le traitement des hommes présentant du stress chronique lié à une surcharge de travail
|
Woo et Postolache, 2008
|
Prévention secondaire et tertiaire
|
Dépistage et programme d’éducation
|
Karasek
Siegrist
|
Troubles de l’humeur
Suicides et idées suicidaires liées au travail
|
Programme visant à :
Prise de conscience, éducation, dépistage précoce, « Numéro vert » (hotline assitance), conseils, contrôles médicaux à la recherche d’idées suicidaires
|
Landsman-Dijkstra et coll., 2006
|
Prévention tertiaire
|
Programme de gestion du stress par séminaire hors travail, avec action sur le corps et l’esprit
|
Residential Body Awareness Program (BAP), 3-days program
Working with body
Working with mind
Creative session bodily sensations and thoughts
|
Symptômes psychosomatiques chroniques aspécifiques (CAPS)
|
Efficacité du programme jusqu’à 12 mois plus tard
Modification du style de vie et augmentation du contrôle du stress
Stress et ses symptômes mieux supportés
Aucune exploration du travail
|
Schene et coll., 2007
|
Prévention tertiaire
|
Thérapie par le travail de sujets dépressifs
|
DSM IV
Mood disorders Questionnaire Organisation stress (QOS)
|
Dépression
Retour au travail
Coût du stress
|
Traitement médicamenteux et thérapie par le travail : pas d’influence sur la dépression, réduction du nombre de jours d’arrêt de travail, pas de modification du stress lié au travail, coût inférieur au seul traitement médicamenteux
Pas d’exploration du travail
|
Tableau 16.VIII Interventions ciblées sur la prévention cardiovasculaire
Références
|
Catégorie
|
Type intervention
|
Méthodologie
Outils
|
Effets santé mesurés
|
Résultats
|
Rees et coll., 2004
|
Recherche
Prévention tertiaire
|
Revue de littérature
Interventions psychologiques chez des malades coronariens
|
Programmes de gestion du stress : comprehensive cardiac rehabilitation program
|
Mortalité par trouble cardiaque
|
Pas d’effet sur la mortalité
Diminue l’anxiété et la dépression
Aucune exploration du travail
|
Lucini et coll., 2007
|
Prévention tertiaire
|
Programme de gestion du stress par restructuration cognitive et relaxation chez des « cols blancs » pour la prévention des maladies cardiovasculaires
|
Entretiens semi-directifs
DSM IV
Lickert linear analogue scale
Subjective Stress-related Somatic Symptoms Questionnaire (AS-Q)
ECG
|
Dysrégulation du système nerveux autonome
Symptômes de stress
Tension artérielle
|
L’application du programme au groupe de travailleurs qui présentaient un haut niveau de stress, une hypertension et une dysrégulation du système nerveux autonome a entraîné une normalisation des paramètres.
|
Walton et coll., 2005
|
Prévention tertiaire
|
Action sur les individus par un programme de méditation transcendantale
| |
Stress « psychosocial »
Maladies cardiovasculaires
|
Plaidoyer pour introduire la méthode dans des programmes nationaux et les assurances : « économies assurées »
Réduction d’au moins 80 % des réclamations au niveau des assurances médicales
Aucune exploration du travail
|
Tableau 16.IX Interventions ciblées sur la prévention des lombalgies et troubles musculosquelettiques
Références
|
Catégorie
|
Type intervention
|
Méthodologie
Outils
|
Effets santé mesurés
|
Résultats
|
Shaw et coll., 2009
|
Recherche
|
Prévention primaire
Développement d’une méthode pour inclure de façon systématique la recherche des facteurs de risque au travail chez les lombalgiques chroniques
|
Conférence et ateliers sur 3 jours regroupant 21 chercheurs et cliniciens
|
Lombalgies et handicap
|
Sept variables du travail à rechercher systématiquement par les cliniciens : demande de travail physique, possibilité de choisir la façon de travailler (les marges de manœuvres), job stress, le support social au travail, job satisfaction, souhaits pour la reprise du travail, la crainte d’une rechute
Cinq critères pour l’évaluation de la méthode : la fiabilité, la performance attendue, la faisabilité, l’acceptabilité et la congruence avec des interventions crédibles Méthode par questionnaire, interview et visite du poste de travail
|
Warren, 2001
|
Recherche compréhensive
|
Revue de littérature
Prévention primaire
|
Programmes ergonomiques participatifs
Karasek
|
TMS
|
Effet combiné du risque psychosocial dans le travail et du risque biomécanique pour l’apparition de TMS : la prévention efficace nécessite une action ergonomique combinée avec les travailleurs.
|
Westman et coll., 2008
|
Prévention secondaire
Dépistage
|
Suivi sur 3 ans de patients présentant des douleurs chroniques musculosquelettiques
|
Örebro Musculoskeletal Pain Screening
Questionnaire (ÖMPSQ)
SF-36 Health Survey
Job strain
Coping strategies Questionnaire
|
TMS
|
Le questionnaire ÖMPSQ est validé pour prédire les issues en terme de handicap.
La mesure des facteurs psychosociaux par ce questionnaire est bien liée au handicap au travail et à la santé perçue 3 ans après traitement chez les patients atteints de douleurs de TMS chroniques.
|
Feuerstein et coll., 2004
|
Prévention secondaire et tertiaire
|
Intervention ergonomique comparée avec une intervention combinée ergonomique et gestion du stress
Chez des employés de bureau (économistes, informaticiens...)
|
Life Stressors and Social Resources Inventory (LSRES)
Visual Analogue Scale of pain (VAS pain)
Upper extemity function scale (UEFS)
SF-12
Job Requirements and Physical Demands Survey (JRPDS)
|
TMS des membres supérieurs
Santé globale, physique et mentale
|
Ajouter deux sessions de gestion du stress ne renforce pas significativement l’amélioration à court et moyen terme apportée par l’intervention ergonomique seule
|
Li et coll., 2006
|
Prévention tertiaire
|
Programme d’entraînement sur 3 semaines pour le retour au travail de sujets atteints de TMS
|
Randomized controlled trial (RCT)
Deux groupes : un groupe « entraînement », un groupe « témoin »
SF-36
Chinese State Trait and Anxiety inventory (C-STAI)
|
Mesure du stress, douleur, anxiété
|
Meilleurs résultats du groupe entraîné : augmentation du nombre de reprises du travail, réduction du niveau d’anxiété, amélioration de la santé perçue
Changement de comportement par rapport à la douleur chronique, la motivation négative et l’anxiété
|
Marhold et coll., 2001
|
Prévention tertiaire
|
Programme d’entraînement pour le retour au travail de sujets atteints de TMS
|
Gestion du stress
Relaxation
Entraînement progressif à l’activité et à l’accroissement du rythme
|
Nombre de jours d’arrêt de travail
|
Diminution du nombre de jours d’arrêt de travail seulement chez les patients arrêtés depuis peu de temps
Pas d’exploration du travail des patients
|
Schell et coll., 2008
|
Prévention tertiaire
|
Programme de promotion de la santé et gestion du stress via Internet chez le personnel du Swedish Broadcasting Public Service Companies
|
Étude longitudinale sur 12 mois (Prospective Controlled Follow-up)
|
Douleurs du cou, épaules et lombalgies
|
Pas d’effet de l’intervention sur les douleurs de TMS ou la souffrance au travail dans ces métiers à fort niveau de stress
|
Van Oostrom et coll., 2009
|
Recherche Méta-analyse et analyse qualitative (estimation du niveau de preuve)
|
Étude comparative entre intervention sur le lieu de travail et soins traditionnels quant à l’effet sur la facilitation du retour au travail et suivant diverses affections de santé dont TMS et problèmes de santé mentale
|
Recherche dans the Cochrane Occupational Health Field Trials Register, Central, Medline et Embase (EMBASE.com), et PsycINFO databases (to November 2007)
Ont été incluses 6 RCT d’interventions sur lieux de travail visant le retour au travail
|
TMS (lombalgies, atteintes des membres supérieurs, autres)
Problèmes de santé mentale Tous autres problèmes de santé
|
Preuves de moyenne qualité montrant que les interventions sur lieux de travail diminuent les arrêts de travail en cas de TMS mais pas de preuve sur l’amélioration des symptômes ; pas de conclusions similaires pour les problèmes de santé mentale ou les autres atteintes de santé.
|
De façon générale, il ressort des évaluations de ces interventions que si les actions ne portent que sur les individus sans se préoccuper du travail réel et de son organisation, elles présentent un semblant d’efficacité à court terme et sont inefficaces à moyen ou long terme.
En revanche, il est remarquable d’observer que les travaux portant sur la population des professionnels de santé (tableau 16.II

), en particulier les médecins praticiens généralistes, tant en Suède, au Canada qu’aux États-Unis, montrent des résultats convergents quant à l’effet particulièrement important de la participation à des groupes d’analyse de pratiques entre pairs sur la réduction du risque de survenue d’un
burnout chez ces professionnels.
Organisations du travail pathogènes et bénéfiques
Selon les concepts développés par la psychodynamique du travail, toute situation de travail, quel que soit le niveau hiérarchique ou le secteur d’activité, génère en première instance un état de tension, de « stress », de « souffrance », lié au fait que l’exécution d’une prescription de travail se heurte à la résistance du réel, à l’épreuve de l’échec. Le questionnement qui nous intéresse est : devant cette difficulté première que constitue tout travail à réaliser, est-ce que j’ai les moyens (temps, matériel, expérience, qualification, argent...) ou est-ce que je peux acquérir par moi-même les moyens pour arriver à surmonter cette difficulté, pour accéder au résultat escompté qui pourra, alors, faire l’objet d’une reconnaissance source de fierté et de plaisir ? Ces moyens englobent les ressources individuelles mais aussi les moyens collectifs donnés par l’organisation de mon travail, qui m’est prescrite ou qui m’est imposée par les contraintes externes (marché économique, sous-traitance...).
À titre d’exemple, lorsque le but ne peut jamais être atteint, lorsqu’on estime ne pas pouvoir faire un travail de bonne qualité (selon les règles de métier et les critères de qualité validés entre pairs), lorsqu’on est pris dans des conflits éthiques dont on n’arrive pas à sortir, lorsque la surcharge de travail ne permet plus d’anticiper et que les erreurs s’accumulent, alors on sait que le risque d’atteinte à la santé est majeur. Cela ne débouche cependant pas sur les mêmes décompensations ou maladies pour tout le monde. Les conséquences sont fonction de chacun : le type de maladie, psychique et/ou somatique, les délais d’apparition sont en rapport avec la personnalité, l’histoire et le patrimoine génétique de chaque individu.
Au-delà des facteurs organisationnels et des contraintes évoquées plus haut, certains modes d’organisation du travail apparaissent délétères pour la santé. Selon les constats cliniques faits par le Dr Marie-Pierre Guiho-Bailly (communication n’ayant pas fait l’objet de publication) à partir de consultations de pathologie professionnelle au CHU d’Angers (France), sont identifiés comme pathogènes pour les individus qui y sont soumis les modes d’organisation suivants :
• management par le stress, par l’urgence ;
• management « par objectifs »... sans objectifs (mise en concurrence sans ligne d’arrivée) ;
• management « par le coût » (rentabilité, effectif, qualité) ;
• restructurations « à la hache », sans accompagnement des changements et dans des délais extrêmement brefs ;
• réformes perpétuelles sans évaluation ;
• harcèlement moral toléré ou encouragé : vertical (descendant ou ascendant), horizontal, individuel, collectif ;
• critères d’évaluation « anti-travail » (personnels, sociaux, quotas, primes) ;
• idéologies défensives de l’encadrement : déni de perception du réel du travail, des limites, des dysfonctionnements (« je ne veux pas le savoir », « pas de problèmes, rien que des solutions », « il n’y a pas le choix »).
Inversement, une organisation du travail bénéfique pour la santé des salariés :
• tient compte des différences interindividuelles ;
• autorise des marges de manœuvres, en terme de modes opératoires et de répartition des tâches ;
• reconnaît et rétribue la contribution des salariés ;
• reconnaît les savoir-faire de métier ;
• tient compte de l’histoire de l’entreprise et des collectifs de travail ;
• associe les salariés à la mise en œuvre des changements technologiques ou organisationnels ;
• ne dénie pas les dysfonctionnements et les analyse en partenariat avec les opérateurs ;
• recrute, évalue, promeut sur des critères transparents et portant sur le travail.
Toutes ces caractéristiques sont facteurs d’efficience et de résilience pour les salariés en cas d’imprévu ou d’évènement traumatique du fait de la fiabilité des procédures, de l’existence de la confiance et de la coopération tant horizontales que verticales, d’un soutien social solide construit dans le temps, et enfin du fait du respect habituel de leur fonctionnement mental leur permettant de penser et d’analyser, individuellement comme collectivement, l’événement inattendu survenant dans leur travail.
Exemple d’analyse qualitative du travail chez des indépendants : cas d’une profession libérale, les médecins généralistes
Si nous disposons de beaucoup de connaissances, en particulier issues des enquêtes épidémiologiques, sur les effets du travail sur la santé de sujets au travail, ces connaissances concernent essentiellement les travailleurs salariés. En outre, ces études épidémiologiques ont pour limite de n’explorer, le plus souvent, les contraintes psychosociales qu’à l’aide des modèles de Karasek et Siegrist, sans compter que l’analyse à partir de résultats statistiques ne peut pas toujours mettre en évidence des relations pourtant identifiées par l’analyse et les observations issues de la clinique, faute de puissance statistique d’abord, par nécessité d’utiliser d’autres modèles explicatifs ensuite.
Par ailleurs, les travaux qui s’intéressent au travail réel, à l’organisation et aux conditions de travail de travailleurs non-salariés ne le font, jusqu’à ce jour, que de façon comparative par rapport à la population des salariés.
La nécessité de mener, de façon complémentaire, des travaux d’analyse sur le versant qualitatif et sur le mode « approche compréhensive » commence à émerger dans le milieu de la recherche en santé au travail, y compris au niveau des systèmes nationaux de surveillance (voir l’exemple de l’enquête qualitative complémentaire SIP de l’Insee).
Seule la profession des médecins généralistes a fait l’objet, en France et à notre connaissance, d’un travail qualitatif approfondi (Davezies et Daniellou, 2002

), après une étude sur cette même profession sur le mode quantitatif menée en 2001 en Bourgogne par Truchot et coll. (2001)

.
Il nous paraît intéressant d’examiner ici, en détail, les analyses produites par ces auteurs car elles sont autant de pistes à explorer dans l’idée d’appliquer leur méthodologie à d’autres professions indépendantes, afin d’une part d’accroître le corpus de connaissances concernant les travailleurs indépendants qui fait actuellement cruellement défaut, et d’autre part d’accéder à la possibilité de construire de véritables recommandations du point de vue de la prévention du stress dans ces professions qui ne soient pas juste la transposition des mesures préconisées pour les travailleurs salariés.
Ainsi, à partir de l’observation du travail au cours de 140 consultations chez 9 médecins différents dans la région Poitou-Charentes (durée moyenne de consultation, urgences, téléphone, charges administratives), les auteurs argumentent le fait que si la charge quantitative de travail provoque fatigue, difficulté à changer de rythme, troubles du sommeil, en revanche, le risque de déshumanisation de la relation au patient, l’atteinte de l’estime de soi (composantes du
burnout) prennent toujours leur source dans le contenu et la qualité du travail. Le soutien social des pairs et certaines formes de reconnaissance reçues peuvent jouer un rôle favorable, tandis que leur absence joue un rôle nettement aggravant. Cela rejoint les conclusions des deux enquêtes citées plus haut (Kjeldmand et Holmstrom, 2008

; Peterson et coll., 2008

). Le discours des médecins sur les évolutions des exigences des patients a une fonction défensive contre leur souffrance psychique. L’inquiétude des patients découle de la réduction des liens sociaux et de l’isolement croissant tant dans la sphère familiale que professionnelle : tableaux cliniques relevant de la psychopathologie ou de la clinique psychosociale. Les difficultés des médecins face à cette situation révèlent les lacunes de leur formation.
Selon ces auteurs, les médecins généralistes sont face à des difficultés liées à des conflits de logique : logique de métier (obligation de moyens imposant une démarche diagnostique conforme aux connaissances et aux techniques) et logique économique (réduction des dépenses de santé). Il est également constaté qu’ils connaissent un conflit intérieur qui est de considérer comme un risque le départ de patients vers d’autres cabinets alors qu’ils sont en situation de surcharge.
C’est un constat courant dans les activités de service : le professionnel présente une sensibilité aux critiques des usagers, du collègue ou du supérieur hiérarchique qui conduit à des réactions sans proportion par rapport à la réalité de l’agression. Cela traduit une dégradation du rapport au travail, un affaiblissement lié à une perte des repères professionnels. C’est le doute sur le fait que l’on travaille bien et la menace de crise identitaire qui rendent particulièrement sensibles à la critique. Enfin, c’est le sentiment d’une activité qui n’est pas toujours à la hauteur de l’idéal professionnel (accroissement de l’écart).
Dans les déterminants du malaise des médecins, la question de la confiance intervient : le médecin serait responsable des dépenses et du « trou » de la Sécu ? La position d’expert du médecin est questionnée par les usagers qui sont de plus en plus sur-informés sur les médicaments génériques, les vaccins... (Internet, ministère de la Santé...). Ils se sentent démunis devant les évolutions réglementaires, le risque judiciaire, d’où un accroissement du sentiment d’impuissance et un accroissement du sentiment de ne pas avoir les moyens de faire un travail de bonne qualité : c’est la porte ouverte à la crise identitaire et aux décompensations.
Face à ces menaces, le soutien et la reconnaissance du collectif professionnel (le soutien social) sont essentiels. Qui sont les pairs ? La communauté scientifique ? La communauté professionnelle ? Mais ce sont des potentiels concurrents... Face à ces évolutions, quelle attitude avoir par rapport aux clients-usagers : empathie ou sympathie ? La relation médecin-patient repose sur le don mais, pour les médecins, il y a un manque patent de références théoriques et de méthodologie.
Les auteurs soutiennent dans cette étude qu’un des problèmes des médecins est qu’ils tiennent un discours d’inspiration libérale (liberté du médecin et échange marchand) mais que le réel de l’activité se fait sur le mode traditionnel comme dans les familles et la relation d’aide, relation affective (don), crée un lien par la dette générée par le don, dette qui n’est jamais soldée par l’échange marchand. Cette production de lien avec l’usager se retrouve chez les médecins dont l’activité est importante quantitativement. Elle débouche sur la routine, l’ennui, l’auto accélération, le report sur les patients de la responsabilité des problèmes : déception et désillusion qui correspondent au « cynisme » et à la « déshumanisation », composantes du burnout. Le mode de défense observé est de reporter l’accusation au niveau collectif, avec des discours stéréotypés sur les patients « en général », sur les insuffisances de protection sociale et juridique de la profession. Mais cette économie psychique indiscutable débouche sur une impossibilité de penser les contradictions.
Cependant, d’autres médecins sont dans la production d’autonomie chez leurs patients : consultations longues, écoute, travail d’élaboration. Chacun reçoit plus qu’il ne donne, chaque chose produite profite aux deux, nous sommes dans le don et le contre-don : il n’y a aucune dette de l’un envers l’autre. Cette reconnaissance mutuelle produit une liberté et non une obligation. Ainsi, le départ des patients est une étape normale dans un parcours de vie (sentiment plus souvent rencontré chez les médecins femmes).
Les observations effectuées par les auteurs leur ont permis de dégager des pistes de prévention pour cette profession :
• changer le système libéral du secteur soins ? Ce n’est pas d’actualité ;
• imaginer des organisations de travail nouvelles ;
• sortir de la solitude par des débats collectifs ouvrant des controverses d’opinions sur le travail pour penser, par exemple les groupes Balint pour les médecins généralistes, (Kjeldmand et coll., 2008

) ;
• développer la formation initiale et la formation médicale continue portant sur les tableaux cliniques relevant de la psychopathologie ou de la clinique psychosociale, ce qui va dans le sens des conclusions d’une étude effectuée par Souville et coll. en 2009

auprès de 391 médecins généralistes du sud-est de la France.
On peut donc constater à la lecture des analyses de cette étude que ce type de travail permet d’élargir le champ des investigations et des interrogations habituelles. La pratique clinique issue de l’analyse d’une enquête qualitative est susceptible d’apporter des hypothèses de compréhension nouvelles pour les données issues des enquêtes quantitatives et des pistes pour la prévention.
Pistes à explorer pour une prévention chez les indépendants
Si nous voulons comprendre ce que vivent les travailleurs indépendants dans leur travail et les conséquences pour leur santé, les résultats des études qualitatives mettent en lumière la nécessité d’explorer les aspects suivants : les notions de choix de métier, la formation initiale et l’évolution des connaissances, la notion d’indépendance et d’autonomie, le risque de solitude, les questions de la reconnaissance, de l’action sur le réel et de son efficacité au regard d’autrui, des règles de l’art et de métier. Ces travaux explorent également le travail bien fait, la possibilité de se projeter au-delà du temps immédiat, la question du genre, la notion de responsabilité et de sécurité, la tension devant les contraintes externes, la question du statut social, celle particulièrement prégnante des revenus et de l’argent, la notion de liberté et de plaisir au travail, la souffrance due au travail et les stratégies défensives pour y faire face comme les conduites addictives, le poids de la transmission familiale ou le rejet, le besoin de transmission de valeurs et d’un patrimoine, le risque de confusion entre la vie professionnelle et la vie personnelle.
Le choix des notions à explorer, susceptibles d’apporter des éléments de compréhension ou d’avoir un impact sur la santé des travailleurs indépendants, repose également sur différents travaux.
L’enquête santé travail et vieillissement (Estev) effectuée en 1990 et complétée par un volet longitudinal en 1995 (Derriennic et coll., 1996

) nous apprend que les salariés déclarant ne pas avoir choisi leur profession ont, dans chacune des 6 dimensions du NHP (
Nottingham Health Profile ou Indice de santé perceptuel de Nottingham), une perception plus dégradée de leur santé par rapport à ceux qui ont choisi leur profession (ceci étant valable pour les hommes comme pour les femmes, quelle que soit la génération). Quand on connaît, par les études sociologiques sur les travailleurs indépendants, le poids de la transmission des valeurs et du patrimoine entre générations, le rôle de l’éducation aboutissant au rejet ou à la reprise de l’activité économique des parents, on ne peut qu’être vigilant à ne pas négliger le paramètre du choix de métier.
Dans « Travailler pour être heureux ? Le bonheur et le travail en France » (Baudelot et Gollac, 2002

), les auteurs montrent que les indépendants qui sont l’objet de leur enquête, plus que les autres travailleurs, désirent voir leurs enfants emprunter le même chemin professionnel qu’eux. Parmi eux, on trouve les professions libérales (58 %), les chefs d’entreprise (55 %), les agriculteurs (45 %), les artisans (41 %) et les commerçants (35 %). Les indépendants qui ne souhaitent pas transmettre à leurs enfants mettent en avant le travail trop pénible, trop difficile, pas assez rémunérateur (7 % des agriculteurs, 15 % des commerçants), les horaires de travail trop longs (10 %), le manque de perspectives d’avenir de la profession (9 % des patrons, 6 % des agriculteurs). Il y aurait, en effet, un lien entre une durée de travail élevée à plus de 45 h/semaine et un accroissement de la souffrance ressentie. La différence pour les travailleurs indépendants par rapport aux salariés se situerait, selon cette étude, au niveau de la transmission du capital économique, du métier et du statut d’indépendant, mais aussi des notions de liberté et de plaisir au travail.
Dans le tome 2 de son livre « Travail vivant : travail et émancipation » (2009), Christophe Dejours aborde la question de la peur de la solitude dans le travail par défaut de reconnaissance, reconnaissance nécessaire à la construction identitaire mais qui s’oppose à l’autonomie et l’émancipation tant que le sujet en reste dépendant. Le travailleur indépendant serait-il moins dépendant de la reconnaissance de l’autre ou des autres que le salarié, d’où une plus grande autonomie et une capacité accrue à décider de travailler en indépendant ? Mais d’où lui viendrait cette moindre dépendance de la reconnaissance des autres puisque l’activité de travail, pour être un « acte traditionnel efficace » comme nous l’apprend Sigaut (« Le triangle du sens », 1993), nécessite le jugement d’autrui attestant de l’efficacité du travail fait comme action réelle de transformation du monde (figure 16.2

) ?
D’ailleurs, comme nous le rappelle Danièle Linhart dans son ouvrage « Travailler sans les autres ? » (2009), on ne peut pas travailler que pour soi, le travail doit être « adressé » sous peine, sinon, de mettre en danger sa santé. De plus, pour les travailleurs indépendants, les règles de l’art se construisent bien avec les pairs, c’est-à-dire ceux qui font le même métier. Ils se rencontrent dans des syndicats, des associations, des confréries, des salons, des expositions. Ils se comparent également lors des appels d’offre ou dans des concours. Ils peuvent constituer de véritables corporations à l’exemple des compagnons du devoir du tour de France dont sont issus beaucoup d’artisans et de travailleurs indépendants : outre l’aspect éducatif qui est pris en charge pour les jeunes entrant chez les compagnons, l’apprentissage de l’autonomie y repose sur l’apprentissage de techniques et de valeurs, sur la solidarité d’un réseau et sur la notion d’accomplissement d’une œuvre, notion qui se différencie de façon radicale de celle de travail salarié.
En conclusion, plusieurs questionnaires, validés par des études épidémiologiques et traduits en français, permettent actuellement de dépister les facteurs de risque de stress et/ou les effets de l’exposition à ces facteurs sur la santé mentale. Il serait souhaitable que ces outils soient appliqués de façon différenciée aux différentes catégories de travailleurs indépendants pour analyser chaque groupe plus finement et pouvoir adapter l’offre de prévention de façon spécifique à chacun.
Les évaluations des interventions de prévention ciblées selon les secteurs d’activité ou les pathologies sont unanimes pour relever que si les actions ne portant que sur les individus sans se préoccuper du travail réel et de son organisation ont un semblant d’efficacité à court terme, elles sont inefficaces à moyen ou long terme. Les interventions de prévention permettent également de confirmer l’existence de liens de causalité entre les facteurs psychosociaux au travail et les manifestations pathologiques tant physiques que psychiques.
Dans l’état actuel des connaissances, les pistes à suivre pour la prévention du stress chez les travailleurs indépendants passeront par l’étude du travail réel des différentes catégories de ces travailleurs, en alliant des enquêtes de type épidémiologique et les études qualitatives, ainsi que par la détermination des facteurs favorisant le débat entre pairs et la controverse sur le travail.
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