II. Épidémiologie
2013
16-
Troubles anxio-dépressifs
L’évaluation des troubles mentaux au sein des populations soulève de nombreuses difficultés, la première d’entre elles étant de définir de manière claire et consensuelle des entités pathologiques, identifiables et dénombrables avec des outils épidémiologiques tels que des échelles d’évaluation et des questionnaires. De plus, une proportion non négligeable de personnes atteintes de ces troubles n’accède pas à une prise en charge médicale et ne sont donc pas diagnostiquées comme telles. De ce fait, les données d’incidence et de prévalence restent aujourd’hui largement débattues. Un rapport de l’OMS en 2001

fait état de 450 millions de personnes atteintes de maladies mentales dans le monde, et précise que les affections les plus souvent diagnostiquées dans les structures de soins de santé primaires sont les troubles dépressifs (10 %) et les troubles anxieux (8 %)
1
. En France, selon les études, la prévalence des épisodes dépressifs majeurs est évaluée entre 6 et 12 % et celle des symptômes dépressifs à 19 %
2
.
En dépit de la fréquence de ces troubles, leurs déterminants restent en grande partie méconnus. Certains facteurs exogènes sont clairement identifiés tels que les événements de vie douloureux (deuils, séparations, perte d’emploi, accidents, maladie), l’environnement social ou le contexte professionnel. À côté de ces facteurs, et le plus probablement en interaction avec eux, on reconnaît aujourd’hui l’implication de facteurs génétiques et de possibles déterminants biologiques. L’hypothèse du rôle possible des pesticides dans l’apparition de ces maladies est sous-tendue par leur possible interférence avec les nombreux neurotransmetteurs qui jouent un rôle majeur dans les processus mentaux et comportementaux.
Exposition en secteur agricole et troubles anxio-dépressifs
De nombreuses études menées dans divers pays ont indiqué des taux de dépression et de suicide plus élevés chez les agriculteurs que dans la population générale (Carruth et Logan, 2002

; Grégoire, 2002

; Thomas et coll., 2003

; Sanne et coll., 2004

; Fraser et coll., 2005

). Cette situation peut s’expliquer par différents facteurs de stress associés aux contraintes de la vie professionnelle en milieu agricole : isolement du lieu de vie (souvent dans des zones rurales reculées), isolement social (réseau social limité ou inexistant), accès aux structures de soins plus complexe, pression temporelle liée à des journées de travail souvent longues, soumises aux aléas saisonniers et météorologiques, et possibles problèmes d’ordre économique.
Dans de nombreux pays, il a également été suggéré que la fréquence des tentatives de suicide n’était pas nécessairement plus élevée qu’en population générale, mais seulement la mortalité par suicide l’était. Les agriculteurs sembleraient donc recourir à des moyens plus fréquemment fatals tels que les armes à feu, les pendaisons et les intoxications volontaires par certains produits chimiques, notamment les pesticides, auxquels ils auraient un accès facilité.
Cependant, ces études descriptives considèrent la population agricole dans sa globalité, traitent la question des troubles psychiatriques d’un point de vue psychosocial, mais ne documentent pas spécifiquement les expositions professionnelles, en particulier celles aux pesticides.
Deux études de mortalité ont cependant apporté des données plus précises en analysant des groupes professionnels particuliers. Ces deux études, l’une menée sur l’ensemble des États-Unis entre 1988 et 1992 et l’autre dans le Colorado entre 1990 et 1999, ont respectivement analysé la mortalité par maladie psychiatrique (Van Wijngaarden et coll., 2003

) et la mortalité par suicide (Stallones, 2006

) pour 18 professions potentiellement exposées aux pesticides, aussi bien dans les secteurs agricoles que le jardinage/paysagisme, la sylviculture… L’élévation de risque de décès par maladie psychiatrique pour l’ensemble de ces professions était significative et de l’ordre de 46 %, plus marquée chez les femmes (OR=2,65 ; IC 95 % [1,89-3,71]) notamment pour les névroses (OR=4,32 ; IC 95 % [2,44-7,64]) (Van Wijngaarden et coll., 2003

). Concernant les suicides, une élévation de risque non significative de 14 % était observée chez les hommes exposés, alors qu’un doublement de ce même risque était mis en évidence chez les femmes (OR=1,98 ; IC 95 % [1,01-3,88]) (Stallones, 2006

).
Cependant, dans ces études, il faut souligner une difficulté liée à la fiabilité du diagnostic de la pathologie à partir des certificats de décès pour l’identification des pathologies psychiatriques ou des décès par suicide. De plus, ces études ne permettaient pas de prendre en compte les autres facteurs individuels de maladie psychiatrique, ni de documenter précisément le lien avec les expositions aux pesticides.
En résumé, deux études rapportent des risques significativement plus élevés de décès par maladie psychiatrique dans des professions potentiellement exposées aux pesticides et plus marqués chez les femmes. Toutefois, les expositions et les facteurs individuels sont peu documentés.
Intoxication aiguë par un pesticide et troubles anxio-dépressifs
Dès les années 1970, Levin et Rodnitzky synthétisaient les premières données concernant le risque de troubles psychiatriques chez des personnes ayant subi une intoxication aiguë par un organophosphoré (Levin et Rodnitzky, 1976

). Les observations cliniques disponibles mettaient en évidence chez ces personnes de fréquents syndromes dépressifs, s’accompagnant de troubles du sommeil, ainsi que des manifestations d’anxiété ou d’irritabilité. En revanche, les éléments en faveur de manifestation psychotique tels que la schizophrénie étaient jugés peu nombreux et peu convaincants.
À partir de la fin des années 1980, plusieurs études épidémiologiques se sont intéressées aux effets sur le système nerveux central d’une intoxication massive par un organophosphoré ayant justifié une prise en charge hospitalière, en recherchant principalement des effets sur la cognition (cf. le chapitre sur les troubles cognitifs). Elles ont également exploré en parallèle l’existence de certains symptômes psychiatriques (tableau 16.I

).
Tableau 16.I Études épidémiologiques portant sur le lien entre intoxication aiguë par des pesticides et troubles psychiatriques
Référence Pays
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Population étudiée Méthodologie de l’étude
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Définition de la pathologie
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Fréquence Probabiblité Durée d’exposition
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Méthode d’estimation de l’exposition
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Facteurs d’ajustement
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Résultats
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Études transversales : intoxiqués/non intoxiqués
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Savage et coll., 1988
États-Unis (Colorado et Texas)
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100 paires Intoxiqués : OP, 16-70 ans, >3 mois avant entretien, sans antécédents neurologiques, alcool… Non intoxiqués : proches des intoxiqués et sources variées
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Test de personnalité (MMPI : Minnesota Multiphasic Personality Inventory)
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Diversité des contextes professionnels
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Intoxications aiguës : méthylparathion, parathion, disyston, malathion, mévinphos, bildrine, TEPP, dioxathion, DEF, phorate AChE et niveau en OC
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Âge, sexe, niveau d’études, profession, ethnie
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Plus grande fréquence d’anxiété, de dépression et d’irritabilité chez les personnes ayant été intoxiquées
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Rosenstock et coll., 1991
Nicaragua
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1986-1988 Intoxiqués : hommes de 15-44 ans hospitalisés pour intoxication aiguë aux OP hors suicide (N=36) Non intoxiqués : proches des intoxiqués (N=25)
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Échelle concernant l’humeur : Profile of Mood States (mesure la tension, dépression, anxiété, fatigue et confusion)
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69 % des non intoxiqués et 100 % des intoxiqués ont une exposition professionnelle
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Intoxication aiguë Peu d’exposition professionnelle dans les trois mois avant les tests (N=9)
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Âge, niveau d’études, alcool
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Davantage de symptômes rapportés parmi les intoxiqués
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Reidy et coll., 1992
États-Unis (Californie)
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Intoxiqués : hommes hispaniques, ayant subi deux intoxications : mévinphos en 1981, mévinphos, méthomyl, manèbe en 1984 Non intoxiqués : ouvriers usine
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Échelles d’anxiété et de dépression (28 items) Dérivées du Minnesota Multiphasic Personanlity Inventory
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45 % d’intoxiqués ont travaillé ≥16 ans en agriculture
|
Intoxication au mévinphos, méthomyl, manèbe
| |
Élévation des scores d’anxiété et de dépression chez les intoxiqués
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Steenland et coll., 1994
États-Unis (Californie)
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Intoxiqués : OP, 1982-1990, Hommes ≥ 16 ans, prise en charge médicale. Cas certains ou probables selon symptômes, AChE… (N=128) Non intoxiqués : proches (N=90)
|
Profile of Mood States (mesure la tension, dépression, anxiété, fatigue et confusion)
| |
Intoxications aiguës : chlorpyrifos, diazinon, diméthoate, déméton méthyl, mévinphos, parathion, phosalone, autres
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Âge, ethnie, IMC, études, langue, sommeil, alcool, tabac, café, médicaments
|
Plus grande fréquence de tension chez les intoxiqués par la phosalone, le diazinon, le chlorpyrifos, le diméthoate et le déméton méthyl Plus de fatigue avec la phosalone et le diméthoate
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Rehner et coll., 2000
États-Unis (Mississipi)
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Personnes exposées au méthyl-parathion en 1997 (pulvérisations illégales dans des domiciles). 115 foyers tirés au sort Stratification sur niveau d’exposition des domiciles
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CES-D ≥ 16 : dépression probable
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Tous ont été exposés, ¼ pour chaque niveau
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Classement des logements en fonction de l’importance de la contamination Durée d’exposition dans le logement
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Sexe, ethnie, niveau socioéconomique
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55 % des personnes ont une CES-D ≥16. Seule la durée de l’exposition prédit la dépression (pas le niveau).
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Wesseling et coll., 2002
Costa Rica
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Plantations de bananes, hommes 15-55 ans sans antécédents neurologiques Intoxiqués : OP/carbamates (N=81) Non intoxiqués : tirés au sort dans les bananeraies (N=130)
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BSI (Brief Symtpom Inventory)
| |
Intoxications OP : terbufos, phénamiphos, éthoprophos, diazinon, cadusaphos, chlorpyrifos ; Carbamates : carbofuran, oxamyl Histoire professionnelle détaillée Index=nb j/an x nb an x % expo/emploi x EPIExposition récente <3 mois, AChE plasmatique
|
Acuité visuelle, âge, niveau d’études, alcool, tabac, heure test, solvants, sommeil, médicament, caféine…
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Plus grande fréquence des symptômes neuropsychiatriques. Score au BSI chez les exposés : 45,8 Score au BSI chez les non exposés : 26,8 Pas de lien avec l’exposition récente
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Études longitudinales : intoxiqués/non intoxiqués
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Beseler et Stallones, 2008
États-Unis (Colorado)
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Fermes du Colorado : inclusion du chef d’exploitation et de son conjoint (N=872)
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Enquête téléphonique CES-D (seuil=16) Prise en compte des items séparés Suivi de 3 ans
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Moyenne de 27 ans en agriculture, 6 % d’intoxiqués
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Antécédents d’intoxication aiguë
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Âge, sexe, niveau d’études, statut marital, problème économique, état de santé général
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Risque de dépression sur les 3 ans Antécédents d’intoxication : OR=2,00 ; IC 95 % [0,91-4,39] Risque pour des items spécifiques S’ennuyer : OR=3,29 ; IC 95 % [1,95-5,55]
Tout est un effort : OR=1,93 ; IC 95 % [1,14-3,27]
Doublement de risque également en lien avec les difficultés économiques
|
CES-D : Center for Epidemiologic Studies-Depression scale ; EPI : Equipement de protection individuelle ; IMC : Indice de masse corporelle ; OC : Organochlorés ; OP : Organophosphorés ; TEPP : Tetraéthyl Pyrophosphate
L’étude de Savage mettait ainsi en évidence une plus grande fréquence de dépression, d’irritabilité et d’anxiété chez les personnes ayant subi une intoxication aiguë (Savage et coll., 1988

), celle de Rosenstock montrait essentiellement une plus grande fréquence de plaintes psychosomatiques (Rosenstock et coll., 1991

) alors que celle de Steenland ne révélait aucun symptôme particulier (Steenland et coll., 1994

).
En Californie, une plus grande fréquence de troubles anxieux et dépressifs a été également observée chez un groupe de travailleurs agricoles ayant été intoxiqués à deux reprises par une association de mévinphos, de méthomyl et de manèbe, par rapport à un groupe témoin (Reidy et coll., 1992

). Ces premières études analysaient les réponses des personnes à des échelles d’humeur globale explorant à la fois les états de tension, de dépression, d’anxiété, de fatigue et de confusion, telles que le
Profile of Mood States (Rosenstock et coll., 1991

; Steenland et coll., 1994

), ou le
Minnesota Multiphasic Personality Inventory (Savage et coll., 1988

; Reidy et coll., 1992

). Également à l’aide d’une échelle globale adaptée au bas niveau d’études des ouvriers de bananeraies du Costa Rica, le
Brief Symptom Inventory (BSI), Wesseling a mis en évidence des scores élevés parmi ceux qui avaient bénéficié d’une prise en charge médicale (en moyenne 27 mois avant l’entretien) pour une intoxication par un pesticide inhibiteur de l’acétylcholinestérase (AChE), et ceci indépendamment d’une exposition récente aux inhibiteurs de l’AChE (Wesseling et coll., 2002

).
Par ailleurs, des outils d’évaluation plus spécifiques de la dépression tels que l’échelle de la CES-D (
Center for Epidemiologic Studies-Depression scale) ont été utilisés dans des populations ayant subi une intoxication par des pesticides afin d’apprécier l’existence de troubles dépressifs à distance de l’épisode d’exposition aiguë. Ainsi, une étude menée dans le Mississippi chez des victimes d’exposition au méthyl-parathion, suite à des pulvérisations massives et inappropriées de leurs logements, a mis en évidence que plus de la moitié des victimes (55 %) manifestaient des symptômes dépressifs, plus marqués chez les personnes les plus longtemps exposées, sans lien clair avec le niveau de contamination mesuré dans leurs logements, et persistant après indemnisation et prise en charge des dommages (Rehner et coll., 2000

). Une étude transversale portant sur 761 personnes résidant dans des fermes du Colorado a mis en évidence un risque élevé de symptômes dépressifs mesurés par un score à l’échelle CES-D ≥16, chez ceux qui rapportaient un épisode d’intoxication par un pesticide (OR=5,87 ; IC 95 % [2,56-13,44]) (Stallones et Beseler, 2002

). Également dans le Colorado, un doublement du risque de dépression mesurée par la CES-D, à la limite du seuil de significativité, était observé après un suivi de 3 ans d’agriculteurs ayant subi une intoxication aiguë par un pesticide (Beseler et Stallones, 2008


), même lorsque d’autres facteurs de risque de dépression étaient pris en compte (difficultés financières, endettement). Dans cette dernière étude, les personnes ayant été intoxiquées répondaient plus fréquemment positivement à certains items de la CES-D, à savoir la sensation d’ennui (OR=3,29 ; IC 95 % [1,95-5,55]), et la sensation que « tout est un effort » (OR=1,78 ; IC 95 % [1,27-2,50]).
En résumé, quelques travaux menés dans les fermes du Colorado avec des échelles spécifiques de la dépression rapportent un risque élevé de symptômes dépressifs chez les personnes ayant subi un épisode d’intoxication par un pesticide.
Exposition chronique aux pesticides et troubles anxio-dépressifs
À la fin des années 1990, la possibilité de troubles psychiatriques liés à des expositions prolongées, en dehors d’épisodes d’intoxication aiguë, a été soulevée suite aux diverses observations réalisées précédemment dans des circonstances d’expositions massives.
Les études explorant les effets sur la cognition des expositions prolongées aux pesticides ont parfois inclus des items ou des échelles brèves permettant d’apprécier certains troubles de la personnalité, ou des symptômes anxieux ou dépressifs (tableau 16.II

). Conçues pour une évaluation des performances cognitives par des tests détaillés, ces études incluaient généralement un nombre limité de sujets, de l’ordre de quelques dizaines. Leur puissance statistique était donc faible. Ainsi, l’étude de Fiedler sur des arboriculteurs (57 sujets exposés/43 non exposés), en dépit d’une caractérisation de l’exposition détaillée, ne mettait pas en évidence de manifestations psychiatriques (Fiedler et coll., 1997

), et celle de Bayrami sur des horticulteurs (40 exposés/40 non exposés) ne relevait qu’un excès de plaintes somatiques dans le groupe exposé (Bayrami et coll., 2012

). En revanche, d’autres études de petite taille ont néanmoins mis en évidence chez les personnes exposées aux pesticides organophosphorés une plus grande fréquence de troubles dépressifs ou anxieux (26 exposés/25 non exposés et 37 exposés/25 non exposés) (Bazylewicz-Walczak et coll., 1999

; Salvi et coll., 2003

) ou, de troubles névrotiques en général (52 exposés/50 non exposés et 27 exposés/27 non exposés) (Van Wendel de Joode et coll., 2001

; Farahat et coll., 2003

). Dans l’étude de Van Wendel de Joode et coll. (2001

), les personnes sont exposées aux organophosphorés mais également au DDT.
Tableau 16.II Études épidémiologiques portant sur le lien entre exposition chronique aux pesticides et troubles psychiatriques
Référence Pays
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Population étudiée Méthodologie de l’étude
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Définition de la pathologie
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Probabiblité Fréquence Durée d’exposition
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Méthode d’estimation de l’exposition
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Facteurs d’ajustement
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Résultats
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Études transversales : exposés/non exposés
|
Stephens et coll., 1995
Royaume Uni (Devon, Cumbria, Pays de Galle du Nord)
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Hommes de 16-65 ans, pas d’antécédents neurologiques Exposés : éleveurs de ≥ 50 moutons (listes professionnelles) Non exposés : ouvriers carrière
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General Health Questionnaire
Détecte troubles psychiatriques 30 items
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Questionnaire professionnel Index d’exposition=nb moy moutons/an x nb bains/an x nb années OP Dialkylphosphates urinaires Pas d’exposition récente (<2 mois)
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Âge, niveau d’études, latéralité, alcool, tabac, infection virale, caféine, langue, heure du test…
|
Plus grande vulnérabilité aux troubles psychiatriques Risque d’avoir au moins 5 symptômes psychiatriques : OR=1,5 ; IC 95 % [1,31-1,69]
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Amr, 1997
Égypte
|
Culture du coton Formulateurs pesticides (N=208) Applicateurs (N=172) Non exposés : ouvriers d’une usine textile (N=223)
|
General Health Questionnaire
DSM-III
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OC, OP, carbamates, pyréthrinoïdes Formulateurs : >40 h/semaine, >9 mois, 2 années de suite Applicateurs : >2 ans dans 2 fermes « modèles »
| |
Plus grande fréquence de troubles psychiatriques en général (50 % vs 32 %), de dépression (19 % vs 7 %), d’irritabilité et troubles de la fonction érectile
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Fiedler et coll, 1997
États-Unis (New Jersey)
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Exposés : arboriculture, hommes blancs (N=57) Non exposés : hommes blancs dans culture de cranberries (N=23) + petits commerçants (N=20)
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MMPI 2 (Minnesota Multiphasic Personality Inventory 2)
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Calendrier professionnel vie entière Index cumulé au cours de la vie prenant en compte la surface de la ferme, le type de tâches effectuées et le type de matériel employé, équipement de protection individuelle Antécédents d’intoxication aiguë AChE globulaire
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Âge, niveau d’études, facultés intellectuelles, antécédents médicaux, alcool, neurotoxiques
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Pas de lien entre les différentes composantes du MMPI 2 et l’exposition aux pesticides
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Van Wendel de Joode et coll., 2001
Costa Rica
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Hommes 55-70 ans Exposés : applicateurs DDT (malaria) ≥ 2 ans entre 1950 et 1997 (N=27) Non exposés : gardes et conducteurs (N=27) Exclus : antécédents neurologiques, exposition récente
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BSI (Brief Symptom Inventory) Seuil : score total supérieur à 28
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5 années d’exposition au DDT en moyenne et 4 années aux OP
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Histoire professionnelle Deux niveaux d’exposition au DDT : haut et bas (années application)
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Niveau d’études, tabac, alcool, malaria, caféine, solvants, IMC, habitude de vie, médicaments, état clinique…
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Risque d’avoir un score élevé au BSI pour les exposés au DDT
OR=7,25 ; IC 95 % [1,87-27,78]
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Farahat et coll., 2003
Égypte
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Culture coton, durant période traitement, en 2000 sur 10 sites (Menoufiya) Exposés : 52 hommes applicateurs Non exposés : 50 employés de bureau Exclusion de travailleurs saisonniers, <12 ans d’études, antécédents médicaux…
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Test de personnalité : EPI (Inventaire de personnalité d’Eysenck)
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Pas d’antécédents d’intoxication Exposition professionnelle : pulvérisation à dos ou tracteurs d’OP (profénofos, chlorpyrifos, triaziphos, phorate), carbamates (carbaryl, thiodicarb), pyréthrinoïdes (esfenvalérate) et divers, de juin à septembre AChE sérique
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IMC, tabac, alcool, thé, café
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Abaissement AChE sérique si exposition Tests de personnalité : score de névrose plus élevé chez les exposés (p=0,01), mais pas de psychose ou autre trouble
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Salvi et coll., 2003
Brésil
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Avant/après 3 mois Ouvriers du tabac Exposés : ont utilisé un OP depuis 3 mois et en particulier la veille (N=37) Non exposés : pas d’utilisation d’OP dans les 3 mois (N=25)
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Évaluation psychiatrique : MINI (Mini International Neuropsychiatric Interview)
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Précisions sur l’utilisation des OP : dates, équipement protection, substance Chlorpyrifos, acéphate Antécédents d’intoxication aiguë AChE
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Alcool, tabac
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Fréquence des troubles psychiatriques dans le groupe exposé (48 % d’épisodes actuels) et en particulier d’anxiété généralisée et de dépression. Après 3 mois d’arrêt de l’exposition, fréquence moindre de troubles
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Mackenzie- Ross, 2010
Angleterre (Nord et Sud Ouest
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Exposés (OP) : éleveurs de moutons âgés de 18-78 ans (N=127), actifs ou retraités ayant changé ou arrêté pour cause médicale Non exposés : policiers (N=78) Critères d’inclusion : ≥ 5 ans d’exposition aux OP avant 1991, pas d’antécédents d’intoxication aiguë, neurologiques, alcool
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Hospital Anxiety and Depression Scale
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>20 ans d’exposition en moyenne, et dernière exposition remonte en moyenne à 10 ans
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Exposition professionnelle : calendrier professionnel, caractéristiques de l’exposition à partir de symptômes associés (syndromes pseudo grippaux) Prise en compte de la durée d’exposition Polymorphismes PON1 (paraoxonase)
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Appariés sur niveau d’études, sexe, QI Ajustement sur âge, dépression, anxiété
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Dépression : 46,9 % au-dessus du seuil chez les exposés vs 6,5 % chez les témoins (p<0,001) Anxiété : 41,5 % chez les exposés vs 22,1 % chez les témoins (p<0,01)
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Bayrami et coll., 2012
Iran
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Village de Hafte Exposés : Horticulteurs 15-80 ans (N=40) Non exposés : habitants du même village (N=40)
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Symptom Checklist 90 : appréciation symptômes et détresse psychologique selon 9 dimensions et 3 scores
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Utilisation d’OP
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AChE plasmatique, marqueurs de stress oxydant
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Habitudes de vie, antécédents médicaux, alimentation
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Seulement augmentation des plaintes somatiques chez les horticulteurs
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Études transversales
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Stallones et Beseler, 2002
États-Unis (Colorado)
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1992-1997 Huit zones représentant 47 % de la population agricole de l’État Tirage au sort de zones de 250 ha dans lesquelles les fermes ont été localisées. Identification des chefs d’exploitation, conjoints et ouvriers (N=761)
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CES-D, seuil=16 Prévalence : 6 % (femmes : 9,5 % ; hommes : 3,8 %) Symptômes liés à l’utilisation de pesticides
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Questionnaire sur les tâches, pesticides utilisés dans l’année, en particulier alachlore, triazines dont atrazine, 2,4-D, carbamates, terbufos, chlorpyrifos, phosmet, autres OP Antécédents d’intoxication/pesticides diagnostiqué (N=69)
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Sexe, âge, niveau d’études, statut marital, événements de vie négatifs, santé perçue, alcool
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Dépression en lien avec des troubles de santé liés aux pesticides
OR=5,87 ; IC 95 % [2,56-13,44]
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Solomon et coll., 2007
Angleterre et Pays de Galles
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Hommes nés de 1933 à 1977, résidant dans 3 zones, identifiés par les médecins généralistes (N=9 844)
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Questionnaire postal Symptômes (N=12) lors utilisation pesticides, symptômes neurologiques dans le mois passé (N=7), anxiété et dépression dans les 7 jours, troubles somatiques, consultations médicales
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Parmi l’ensemble des hommes : 19 % d’éleveurs de moutons, 8 % d’utilisateurs d’autres insecticides, 10 % d’utilisateurs d’autres expositions pesticides
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Questions sur : traitement des moutons, autres insecticides, herbicides, fongicides, traitement du bois
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Manifestations d’ordre somatique
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Plus de symptômes neurologiques chez exposés (pas seulement les éleveurs) surtout si troubles pendant traitements. Persistance après exclusion des exposés <1 an Pas d’association nette entre dépression ou anxiété et exposition
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Étude de suivi (exposés/non exposés)
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Bazylewicz- Walczak et coll., 1999
Pologne
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Entreprises jardinage Exposés vs non exposés et avant/après saison Exposées : femmes employées au jardinage (N=26) Non exposées : femmes employées dans des cantines, cuisines, travaux administratifs (N=25)
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Profile of Mood States administré avant et après période de traitement
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1 exposé/1 non-exposé
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Organophosphorés appliqués dans les serres : dichlorvos, méthamidophos, méthidathion, pirimiphos-méthyl (les plus fréquents) Mesures air de la serre en 5 points à 4 moments de la journée. Mesure sur vêtements, eau lavage des mains. Index d’exposition sommant exposition dermale (~98 %) et respiratoire
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Âge, sexe, niveau d’études, lieu de résidence
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Plus de troubles de l’humeur dans le groupe exposé par rapport au groupe non exposé, et en particulier de tension, de dépression et de fatigue Pas de détérioration dans la comparaison avant/après saison de traitement
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Études de cohorte
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Bouillard-Dalbos et coll., 2001
France (Gironde)
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Exposés directement : ouvriers viticoles ayant traité (N=528) Exposés indirectement : ouvriers en contact avec vignes traitées (N=173) Non exposés (N=216)
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Center for Epidemiological Studies Depression Scale (CES-D) Seuil=17 chez les hommes ; seuil=23 chez les femmes Prise de médicaments psychotropes
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Questionnaire en face à face Calendrier professionnel détaillé Calendrier et détail des tâches agricoles 3 catégories d’exposition : directe/indirecte/absence d’exposition
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Sexe, âge, niveau d’études, statut marital, consommation d’alcool
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Prise de médicaments psychotropes plus élevée chez les exposés mais pas d’association claire entre exposition et symptomatologie dépressive
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Études cas-témoins nichée dans cohorte ahs (Agricultural Health Study)
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Beseler et coll., 2006
États-Unis (Iowa, Caroline du Nord)
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Épouses des applicateurs de l’AHS (N=29 074) incluses entre 1993 et 1997 avec réponse sur dépression Cas : diagnostic de dépression par médecin (N=2 051) Témoins : pas de dépression
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Auto-déclaration : « Un médecin a-t-il diagnostiqué une dépression ? »
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Exposition 51 j en médiane 42 % des intoxiquées n’ont pas traité professionnellement
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Nombre d’années de vie/travail à la ferme, travaux non agricoles Expositions aux pesticides, solvants Traitements (> ou <50 % du temps), nombre années et jours/an Index=durée x nb jours/an (90e percentile) Antécédents d’intoxication diagnostiquée
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Âge, niveau d’études, ethnie, tabac, alcool, état de résidence Nombre de consultations médicales
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Risque de dépression Exposition modérée : OR=1,06 ; IC 95 % [0,96-1,18] Exposition forte : OR=1,09 ; IC 95 % [0,91-1,31] Antécédents intoxication : OR=3,26 ; IC 95 % [1,72-6,19]
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Beseler et coll., 2008
États-Unis (Iowa, Caroline du Nord)
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Inclusion AHS (Agricultural Health Study) Applicateurs agriculteurs de l’AHS (N=17 585) inclus en 1993 et 1997 avec réponse sur dépression Cas : diagnostic de dépression par un médecin (précision âge) (N=534) Témoins : pas de dépression (N=17 051)
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Auto-déclaration : « Un médecin a-t-il diagnostiqué une dépression ? »
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Exposition 225 j en médiane, davantage si antécédents intoxication ou événement exposant (370 j)
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Nombre de jours d’application au cours de la vie, 3 catégories (<226=médiane, 226-752, >752=90e percentile) Antécédents d’événement fortement exposant Antécédents d’intoxication diagnostiquée 50 pesticides étudiés en catégories : I, F, H et OC, OP, carbamates
|
Âge, niveau d’études, ethnie, tabac, alcool, état de résidence Nombre de consultations médicales Équipement de protection individuelle
|
Risque de dépression (IC 95 %) Exposition modérée : OR=1,07 [0,87-1,31] Exposition forte : OR=1,11 [0,87-1,42] Exposition forte sans intoxication : OR=1,54 [1,16-2,04]
Intoxication : OR=2,57 [1,74-3,79]
Événement exposant : OR=1,65 [1,33-2,05]
Risque élevé pour tous pesticides, plus marquée pour I et H que F OP : OR=1,78 [1,27-2,50]
|
Étude cas-témoins de mortalité
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Van Wijngaarden, 2003
États-Unis
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1988-1992, population âgée de 20-64 ans Cas : décès/maladie psychiatrique (N=7 756) Témoins : autres décès sauf cancer, maladie neurologique, accidents, suicide (N=330 452)
|
Décéder d’une maladie psychiatrique CIM 9 : codes 290 à 316
|
Principalement expositions agricoles
|
Emploi dans une profession exposée aux pesticides, codée sur le certificat de décès : vétérinaires, pépiniéristes, désinsectiseurs, agriculteurs et ouvriers agricoles, aquaculteurs, jardiniers paysagistes, soigneurs d’animaux, contrôleurs agricoles, forestiers et bûcherons
|
Statut marital, race, âge, sexe, lieu de résidence
|
Risque décès par maladie mentale (IC 95 %) Significativement élevé pour : Chefs d’exploitation OR=2,2 [0,9-5,1] Ouvriers agricoles
OR=1,8 [1,5-2,1]
Contrôleurs agricoles
OR=2,1 [1,3-3,4]
Jardiniers paysagistes OR=2,0 [1,6-2,4]
Bûcherons OR=1,6 [1,2-2,1]
Risque plus élevé chez les femmes et les jeunes, en particulier pour névroses
|
AChE : Acétylcholinestérase ; CIM 9 : Classification internationale des maladies, neuvième révision ; F : Fongicides ; H : Herbicide ; I : Insecticide ; IMC : Indice de masse corporelle ; OC : Organochlorés ; OP : Organophosphorés
Un intérêt particulier a été porté à cette question au Royaume-Uni, en raison d’une part d’une forte mortalité par suicide décrite chez les agriculteurs, et d’autre part de la fréquence de l’utilisation de bains d’organophosphorés par les éleveurs pour le traitement des moutons. Trois études ont documenté les risques psychiatriques susceptibles de survenir dans ces circonstances particulières d’exposition. L’étude de Stephens, réalisée parmi 146 éleveurs de moutons, mettait en évidence une plus grande fragilité vis-à-vis de troubles psychiatriques chez les éleveurs réalisant le traitement par bains de leurs moutons. En effet, ceux-ci avaient un risque accru de 50 % de déclarer plus de 5 symptômes psychiatriques au
General Health Questionnaire (Stephens et coll., 1995

). De même Mackenzie-Ross, sur 127 éleveurs de moutons, montrait à l’aide de l’
Hospital Anxiety and Depression Scale une plus grande fréquence de dépression et d’anxiété parmi les éleveurs exposés (Mackenzie-Ross et coll., 2010

). En revanche, une étude en population générale, interrogeant sur les utilisations d’insecticides sur animaux et proposant des questions de santé générale susceptibles de détecter des troubles psychiatriques, trouvait une plus grande fréquence de plaintes neurologiques mais pas davantage d’anxiété ou de dépression chez les éleveurs de moutons ayant utilisé des insecticides (Solomon, 2007

).
Enfin, quelques études ont porté plus spécifiquement sur les troubles psychiatriques en lien avec des expositions chroniques dans de larges populations d’agriculteurs. Ainsi, dans l’
Agricultural Health Study (AHS), le risque de dépression (diagnostiquée par un médecin) était plus élevé chez les applicateurs de la cohorte, variant entre 7 % pour les expositions modérées (définies par le nombre de jours cumulés au cours de la vie) et 11 % pour les expositions fortes. Ce risque était plus élevé chez les agriculteurs applicateurs de pesticides ayant signalé un épisode d’intoxication aiguë ou d’événement fortement exposant au cours de la vie. Ce risque était observé quelle que soit la classe de pesticides, bien qu’un peu plus marqué pour les insecticides (OR=2,05 ; IC 95 % [1,29-3,27]) et les herbicides (OR=2,05 ; IC 95 % [0,76-5,54]) que pour les fongicides (OR=1,24 ; IC 95 % [1,01-1,53]) (Beseler et coll., 2008a

). Dans cette cohorte, des analyses ont également porté sur les femmes d’agriculteurs, dont une majorité ne déclarait pas d’utilisation professionnelle de pesticides. Elles présentaient une légère augmentation du risque de dépression mesurée par la CES-D, de l’ordre de 6 à 9 %, beaucoup plus marquée chez celles qui déclaraient un épisode d’intoxication aiguë (OR=3,26 ; IC 95 % [1,72-6,19]). Leur nombre de jours d’exposition paraissait pourtant faible au regard de celui des hommes (51 jours au cours de la vie en médiane) mais les expositions domestiques et para-professionnelles, moins bien caractérisées, pourraient expliquer les résultats obtenus (Beseler et coll., 2006

).
Une autre étude menée auprès d’agriculteurs et conjoints dans des fermes du Colorado a mis en évidence une élévation nette du risque de dépression (CES-D≥16) (OR=5,95 ; IC 95 % [2,56-13,84]) chez les personnes qui rapportaient des troubles de santé en lien avec l’exposition aux pesticides (maux de tête, inconfort respiratoire, irritations cutanées, troubles visuels…) (Stallones et Beseler, 2002

; Beseler et coll., 2008b

). Enfin, dans une cohorte de viticulteurs en Gironde, un lien entre la prise de médicaments psychotropes et l’exposition aux pesticides était observée, sans qu’une relation nette puisse être établie avec des symptômes dépressifs ou anxieux (Bouillard-Dalbos et coll., 2001

).
En résumé, plusieurs études menées chez les éleveurs de moutons, les applicateurs de la cohorte AHS, ou encore dans les fermes du Colorado rapportent un risque significatif de dépression ou d’anxiété après exposition chronique aux insecticides parfois plus élevé chez ceux ayant présenté une intoxication aiguë (de même chez les femmes).
Exposition aux pesticides et suicide
La revue de London en 2005 discute les difficultés de l’étude du rôle des pesticides et plus spécifiquement des organophosphorés, dans la survenue de suicide en milieu agricole (London et coll., 2005

). Elle mentionne en premier lieu la fréquence du recours aux pesticides dans les tentatives de suicide dans les pays en développement, compte tenu de leur accessibilité, pour le grand public et pour les populations agricoles en particulier. Elle rapporte l’estimation réalisée par l’OMS de 2 millions de tentatives de suicide mettant en cause des pesticides annuellement à l’échelle mondiale, les molécules les plus fréquemment utilisées à ces fins étant les organophosphorés, les carbamates et le paraquat. Cette revue met en lumière la complexité de la relation entre les expositions aux pesticides et la survenue de suicide. L’accessibilité aux pesticides est en effet susceptible d’augmenter la fréquence des intoxications aiguës et des suicides dans les zones agricoles, mais par ailleurs l’exposition aux pesticides elle-même pourrait induire des troubles de l’humeur de nature dépressive prédisposant aux gestes suicidaires. Si l’augmentation de la fréquence des suicides en milieu agricole semble établie par de nombreuses observations, l’implication des pesticides dans cette augmentation ne peut être documentée qu’au travers d’études caractérisant les expositions à ces substances (tableau 16.III

).
Tableau 16.III Études épidémiologiques portant sur le lien entre exposition aux pesticides et suicide
Référence Pays
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Population étudiée Méthodologie de l’étude
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Définition de la pathologie
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Probabilité Fréquence Durée d’exposition
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Méthode d’estimation de l’exposition
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Facteurs d’ajustement
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Résultats
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Études écologiques
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Parron et coll., 1996
Espagne
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3 zones de la province d’Almeria dont Poniente, fortement agricole
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Mortalité par suicide entre 1976 et 1987 (N=251) Diagnostic par expertise médico-légale Autopsie psychologique
| |
Profession relevée lors de l’expertise médico-légale : agriculteurs
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Pas de facteur individuel (données sociodémographiques chez les cas)
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Plus de suicide en zone agricole :
OR=3,20 ; IC 95 % [1,17-8,73]
Proportion de suicides/empoisonnement plus élevée dans les zones agricoles
|
Meyer et coll., 2010
Brésil
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6 zones rurales près de Rio de Janeiro, et 3 zones de référence Ouvriers agricoles Population rurale
|
Mortalité par suicide Codes CIM 9 (E950-E959) et CIM 10 (X60-X84), entre 20 et 59 ans, de 1981 à 2005 (N=2 821) Taux d’hospitalisation/tentatives de suicide ou troubles de l’humeur (codes CIM 10 : F30-F39) de 1998 à 2007 entre 20 et 59 ans
|
8 % de population agricole
|
Quantité de pesticides vendus par ville en 1996 divisée par le nombre de salariés agricoles en 1996 Prise en compte des quartiles de cet index, référence=1er quartile
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Pas de facteur individuel
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Mortalité par suicide chez ouvriers agricoles : doublement du risque vs population générale, et multiplié par 4 chez les femmes Hospitalisation/suicide : hommes : > x10 femmes : x 6 à x9 Hospitalisation/troubles de l’humeur : hommes : x 3 à x 4, femmes : x 1,5 à x 2 Pas de lien net avec quartiles de l’index d’exposition
|
Études cas-témoins
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Pickett et coll., 1998
Canada
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Étude cas-témoins nichée dans une cohorte d’agriculteurs canadienne (Canadian Farm Operator Cohort) destinée à étudier la mortalité N=326 256 hommes agriculteurs
|
Cas : décès/suicide entre 1971 et 1987, codes CIM 9 (E950-E959) (N=1 457) Témoins : 8/cas, appariés sur âge, lieu résidence, vivant à date décès du cas (N=11 632)
|
1/3 ont utilisé des herbicides, 10 % des insecticides, 50 % des pesticides
|
Données du recensement agricole de 1971 : surface traitée/insecticides, surface traitée/herbicides, achats pesticides, taille de la ferme, type d’agriculture, données économiques…
|
Données économiques Information sur l’emploi de main d’œuvre (pour les traitements…)
|
Paramètres du recensement agricole : pas de relation avec les surfaces traitées ou les achats de pesticides Légères tendances positives si les agriculteurs ayant employé de la main d’œuvre sont exclus.
|
MacFarlane et coll., 2011
Australie (New South-Wales et Victoria)
|
Cas-témoins nichée dans une cohorte Programme de surveillance de salariés exposés aux pesticides (N=14 601 dont 92 % d’hommes), principalement agriculteurs et jardiniers/paysagistes
|
1 338 décès d’hommes Dont suicide (N=90) Codes CIM 9 (E950-959) et CIM 10 (X60-X64) 270 témoins appariés sur âge, état résidence
| |
Informations disponibles dans le programme de surveillance sur les classes de pesticides OP, OC, carbamates, herbicides/fongicides, organométalliques
| |
Pas d’élévation du risque en lien avec une exposition à une des classes de pesticides Élévation non significative du risque pour ceux qui ont un antécédent d’intoxication aiguë
|
Wesseling et coll., 2010
Costa Rica (Pococi, Guacimo)
|
Ouvriers de bananeraies Exposés : 78 intoxiqués (1-4 ans avant l’entretien) Non exposés : 130 non intoxiqués Exclusion des Antécédents de traumatisme crânien, drogue, troubles neurologiques
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Brief Symptom Inventory (53 items) dont l’item « Avez-vous eu des idées suicidaires ? » (seuil fixé à 63)
| |
Intoxication par OP (N=54), carbamate (N=24) Délai moyen depuis l’intoxication : 27 mois Mesure de AChE Index cumulé d’exposition
|
Âge, niveau d’études, traumatisme crânien, alcool, tabac, solvants
|
Concernant l’item sur les idées suicidaires : OR=3,58 ; IC 95 % [1,72-14,45]
|
Études de cohortes
|
Green, 1991
Canada
|
Cohorte rétrospective de mortalité : 1 222 ouvriers (hommes) de « Ontario Hydro » en charge de désherber autour des lignes électriques (>6 mois sur période 1950-1982)
|
80 décès entre 1950 et 1982 dont 11 par suicide Population de référence : population générale de l’Otario
|
Un tiers des ouvriers ont travaillé en forêt 15 ans ou plus
|
Utilisation principalement de phénoxy-herbicides (2,4-D et 2,4,5-T)
| |
Risque de décès par suicide
SMR=210 (p=0,04)
|
Beard et coll., 2011
États-Unis (Iowa, Caroline du Nord)
|
81 988 sujets de l’AHS (applicateurs et conjoints) avec données renseignées
|
Mortalité par suicide : codes CIM 9 (E95 ou 95 et suivants), codes CIM 10 (X60-X84) N=110 suicides
|
Durée moyenne de suivi : 13 ans
|
Questionnaire sur pesticides utilisés à l’inclusion (N=50), avec durée et nombre de jours par an. Calcul du nombre de jours cumulés 10 catégories retenues : fumigants, fongicides, herbicides insecticides, phénoxy-herbicides, triazines, carbamates, OC, OP, pyréthrinoïdes
|
Âge, sexe, état résidence, race, niveau d’études, statut marital, nombre d’enfants, taille ferme, alcool, tabac, maladie cardiaque, diabète
|
Trop peu de cas pour regarder le lien entre événement exposant et suicide Pas de cas avec une intoxication aiguë Aucune association positive significative, à noter une tendance avec le 2,4,5-T, quelques associations négatives avec des herbicides
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Études transversales
|
Zhang et coll., 2008
Chine (Province de Zhejiang)
|
Échantillonnage à partir du recensement de population de 2000 : villages au sein de 3 zones rurales (montagne, plaine, côte) N=9 811
|
Questionnaire sur idées suicidaires dans le passé, dans les 2 ans ou actuellement Questionnaire de santé générale
|
52 % stockent des pesticides à la maison (87 % d’entre eux ont OP)
|
Pesticides domestiques : type de produits et lieu de stockage (méthamidophos le plus fréquent) Pas de donnée professionnelle
|
Âge, sexe, niveau d’études, statut marital, antécédents familiaux de suicide, santé perçue
|
Lien entre idées suicidaires dans les 2 dernières années et pesticides à la maison : OR=1,6 ; IC 95 % [1,1-2,4], d’autant plus qu’ils sont dans un lieu accessible, et de manière plus claire à la montagne et en plaine
|
Étude cas-témoins de mortalité
|
Stallones et coll., 2006
|
Résident du Colorado au décès Décès par suicides (N 4991) ; Autres causes de décès sauf cancer, pathologies mentales et accidents N=107 692
|
Suicide = cause primaire de décès (Certificat de décès du Colorado entre 1990 et 1999)
| |
Profession exposée aux pesticides versus non exposée
|
Age, groupe ethnique, niveau d’étude, statut marital,
|
Suicide : Homme : OR=1,14 IC 95 % [0,97-1,34] Femme : OR=1,98 IC 95 % [1,01-3,88]
|
OC : Organochlorés ; OP : Organophosphorés ; SMR : Standardized Mortality Ratio
Dans cet objectif, une première approche a consisté à analyser le risque de suicide en fonction de l’importance d’utilisation de pesticides agricoles à une échelle régionale. Parmi ces études écologiques, l’une menée dans le sud de l’Espagne (province d’Almeria) a montré que les zones correspondant aux plus fortes utilisations de pesticides étaient également celles qui présentaient les taux de suicides les plus élevés (Parron et coll., 1996

). Une autre étude, réalisée au Brésil dans l’État de Rio de Janeiro, indiquait que les hommes agriculteurs âgés de 20 à 59 ans présentaient un doublement du risque de décès par suicide par rapport à la population générale de la même région (OR=2,31 ; IC 95 % [1,89-2,82]), et les agricultrices un quadruplement de ce même risque (OR=4,13 ; IC 95 % [1,60-8,93]) (Meyer et coll., 2010

). Dans cette étude, les hospitalisations pour des troubles de l’humeur étaient également beaucoup plus fréquentes dans les zones fortement utilisatrices de pesticides.
Seulement quatre études ont estimé ces risques à l’échelle individuelle, et pris en compte des facteurs de confusion potentiels : deux études cas-témoins nichées dans des cohortes au Canada (Pickett et coll., 1998

) et en Australie (Mac Farlane et coll., 2011), la cohorte de l’AHS (Beard et coll., 2011

), et enfin une étude cas-témoins portant sur des personnes ayant subi une intoxication aiguë par des pesticides au Costa Rica (Wesseling et coll., 2010

). L’étude cas-témoins canadienne (au sein de la
Canadian Farm Operator Cohort) a analysé 1 457 décès par suicide chez des agriculteurs et n’a pas trouvé de lien, ni avec la surface traitée par des herbicides ou par des insecticides, ni avec la quantité de pesticides achetés sur l’exploitation (données provenant du recensement agricole canadien de 1971). Cependant, une élévation du risque de suicide était observée chez les exploitants n’employant pas de main d’œuvre et donc plus susceptibles de réaliser eux-mêmes les traitements (OR=1,71 ; IC 95 % [1,08-2,71]), ainsi que chez les saisonniers (OR=1,68 ; IC 95 % [1,15-2,46]). L’étude cas-témoins australienne (États du New South Wales et de Victoria) nichée au sein d’une cohorte, qui incluait aussi bien des agriculteurs que des jardiniers/paysagistes et a analysé 90 décès par suicide, ne trouvait pas de lien entre cette mortalité et l’exposition aux organophosphorés, carbamates, organochlorés, herbicides/fongicides, ou pesticides organo-métalliques. En revanche, elle mettait en évidence une élévation non significative du risque de suicide parmi les personnes qui rapportaient un antécédent d’intoxication par un inhibiteur de l’acétylcholinestérase (MacFarlane et coll., 2011

). Dans la cohorte AHS, il n’était pas mis en évidence de lien entre l’exposition aux pesticides et la mortalité par suicide (quel que soit l’indicateur retenu : exposition en général, à des pesticides particuliers, scores cumulés au cours de la vie, indicateur prenant en compte l’intensité d’exposition, regroupement en familles de pesticides). Cependant, le nombre de suicides survenus dans la cohorte AHS après 13 années de suivi en moyenne restait limité (N=110) (Beard et coll., 2011

). L’étude cas-témoins au Costa Rica a exploré les intentions suicidaires de 78 ouvriers de bananeraies ayant subi une intoxication par un organophosphoré ou un carbamate à l’aide du
Brief Symptom Inventory (item : « Avez-vous eu l’intention de mettre fin à vos jours ? »). Les personnes ayant été intoxiquées 1 à 4 ans avant l’entretien avaient un risque plus élevé de répondre positivement à cet item (OR=3,58 ; IC 95 % [1,72-14,45]), ce risque étant plus marqué pour les individus ayant été intoxiqués par un organophosphoré comparativement à ceux qui avaient été intoxiqués par un carbamate (Wesseling et coll., 2010

).
Des éléments complémentaires sont apportés sur la question du risque de suicide chez les personnes exposées aux pesticides dans des contextes très différents, et n’impliquant pas majoritairement des organophosphorés. Ainsi un doublement du risque de décès par suicide était en effet mis en évidence dans la cohorte d’employés d’une compagnie d’électricité en charge du désherbage ayant principalement utilisé du 2,4-D et du 2,4,5-T (phénoxy-herbicides) (Green, 1991

). Enfin, une étude en Chine observait une élévation du risque de suicide en population générale chez les personnes stockant des pesticides à leur domicile (Zhang, et coll., 2008

).
En résumé, des études écologiques menées dans le sud de l’Espagne et au Brésil indiquent un risque de décès par suicide plus élevé chez agriculteurs et les agricultrices que dans la population générale de la même région. Des études cas-témoins, rapportent une augmentation de risque dans certaines catégories professionnelles (exploitants n’employant pas de main d’œuvre, saisonniers) ou encore chez les personnes ayant subi une intoxication aiguë. Enfin, les tentatives de suicides semblent plus fréquentes dans les populations exposées.
En conclusion, à ce jour, une trentaine d’études ont abordé la question des troubles psychiatriques en lien avec les expositions aux pesticides. Pour un certain nombre d’entre elles, l’étude de ces troubles était un objectif secondaire, associé à l’exploration de troubles cognitifs. De ce fait, les outils de mesure des troubles psychiatriques étaient parfois simplifiés, et ne permettaient pas de poser des diagnostics précis. Ces outils étaient cependant divers, ne rendant pas faciles les comparaisons entre études. De plus, les populations explorées étaient souvent limitées en effectif.
Néanmoins, en dépit de ces limites, l’ensemble des études publiées converge vers une plus grande fréquence de troubles anxieux et dépressifs chez les personnes exposées aux pesticides, aussi bien dans les suites d’expositions massives au décours d’intoxications aiguës, que pour des expositions plus modérées mais prolongées. Par ailleurs, plusieurs études suggèrent un lien possible avec des tentatives de suicide, sans qu’il soit réellement possible à partir des données existantes de distinguer le rôle spécifique des pesticides de celui d’autres facteurs présents en milieu agricole, ni de déterminer avec certitude le sens de la relation : les populations exposées aux pesticides sont-elles plus vulnérables, ou leur vulnérabilité s’associe-t-elle à une plus grande probabilité d’exposition ?
L’éventualité d’effets psychiatriques liés à l’exposition aux pesticides soulève des questions importantes de santé publique. Ce lien possible pourrait en effet expliquer pour partie les excès de suicide en milieu agricole observés dans de nombreux pays. Il interroge également sur le risque possible d’accidents pouvant découler de troubles de l’attention secondaires à des perturbations de l’humeur. Enfin, il met également en garde sur l’accessibilité par ces populations, mais également pour la population générale, de substances permettant un acte suicidaire.
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