II. Épidémiologie

2013


ANALYSE

9-

Cancers du testicule

Le cancer du testicule est un cancer rare, qui représente environ 1 à 2 % des cancers toutes localisations confondues. Il affecte principalement les jeunes adultes entre 20 et 35 ans. La très grande majorité des cancers du testicule sont issus de la lignée germinale (spermatogonies). Parmi eux, on distingue les tumeurs séminomateuses (séminomes) et les tumeurs non séminomateuses. Les séminomes représentent 30 à 40 % des cancers du testicule et surviennent majoritairement entre 35 et 45 ans. Les tumeurs non séminomateuses ou embryonnaires représentent 60 à 70 % des cancers du testicule et surviennent principalement entre la puberté et 35 ans. Les tumeurs non germinales, affectant par exemple les cellules de Sertoli ou de Leydig, ne représentent que 5 % des cancers du testicule. Avec un traitement qui débute obligatoirement par l’ablation du testicule (orquidectomie), complété par la radiothérapie ou la chimiothérapie, le pronostic est très favorable avec un taux de guérison dépassant les 95 %.

Incidence et mortalité

Les estimations faites pour l’année 2008 au niveau mondial font état de 52 322 nouveaux cas de cancer du testicule (correspondant à une incidence ou taux annuel standardisé de 1,5 cas pour 100 000 hommes-année). Il constitue le 21e cancer le plus fréquent chez l’homme1 . L’incidence est plus élevée dans les pays développés (4,6) que dans les pays en voie de développement (0,8). C’est en Europe du Nord que l’on observe les taux les plus élevés (12,9 en Norvège ; 10,3 au Danemark) avec néanmoins des variations importantes entre pays proches (2,3 en Lituanie ; 5,1 en Finlande). Aux États-Unis, l’incidence est élevée chez les populations blanches non-hispaniques, intermédiaire chez les hispaniques et faible chez les populations asiatiques et noires2 . En termes de mortalité, avec 9 874 décès, le cancer du testicule est en 23e position des causes de décès par cancer (correspondant à un taux annuel standardisé de 0,3 décès pour 100 000 hommes)1.
Des projections pour l’année 2011 de l’incidence et de la mortalité par cancer du testicule en France métropolitaine3 , issues d’une modélisation des données d’incidence provenant des registres jusqu’en 2006 et des données de mortalité observées sur la France entière jusqu’en 2008 estiment en 2011 la survenue de 2 324 nouveaux cas, correspondant à une incidence standardisée de 7,4 pour 100 000 hommes et 86 décès, correspondant à une mortalité standardisée de 0,2 pour 100 000 hommes. À noter que les données Globocan pour l’année 2008 estiment l’incidence en France métropolitaine à 7,1 cas pour 100 000 hommes.
En Outremer, des données d’incidence ne sont disponibles que pour la Martinique. Sur la période 2003 à 2008, l’incidence annuelle du cancer du testicule a été estimée à 1,2 pour 100 000 hommes alors qu’elle était parmi les départements métropolitains couverts par les registres Francim entre 4,6 (Somme) et 8,3 (Bas-Rhin)4 . Cette plus faible incidence constatée en Martinique comparée à la France métropolitaine n’est pas surprenante, le cancer du testicule étant peu fréquent parmi les populations originaires de l’Afrique subsaharienne.
Bien que l’incidence du cancer du testicule soit faible, elle augmente depuis de nombreuses décennies dans divers pays du monde, en particulier les pays industrialisés. Cette augmentation concerne aussi bien les tumeurs séminomateuses que non-séminomateuses. Aux États-Unis, l’augmentation annuelle de l’incidence a été de 2,3 % sur la période 1975 à 1989 et de 0,8 % sur la période comprise entre 1989 et 20085 . En France, le taux d’incidence du cancer du testicule a augmenté de 2,5 % par an entre 1980 et 20056 . Mais c’est dans les pays du Nord de l’Europe que l’augmentation de l’incidence au cours du temps a été la plus frappante, dépassant les 4,9 % annuels en Lithuanie (Richiardi et coll., 2004renvoi vers). En revanche, dans d’autres régions du monde, Chine ou Japon, ou bien parmi les populations d’origine africaine, l’incidence est restée stable.
L’analyse détaillée de l’évolution temporelle de l’incidence du cancer du testicule a clairement montré que la prise en compte de la cohorte de naissance est plus pertinente que celle de l’année du diagnostic (Bergström et coll., 1996renvoi vers ; Ekbom et coll., 1998renvoi vers ; Bray et coll., 2006renvoi vers). Cela a permis de mieux détailler le début de l’évolution séculaire de l’incidence de ce cancer. C’est ainsi que le début de l’augmentation de l’incidence du cancer du testicule aurait pris place à la fin du 19e siècle en Angleterre et au Pays de Galles, au tout début du 20e siècle au Danemark, Norvège et Suède et vers 1920 en Allemagne, Finlande et Pologne (Joffe, 2001renvoi vers). Cette augmentation a concerné toutes les cohortes de naissances en Allemagne, Finlande et Pologne alors qu’une interruption de l’augmentation a été constatée au Danemark, en Norvège et en Suède entre 1930 et 1945.
Contrairement à l’incidence, l’évolution séculaire de la mortalité du cancer du testicule s’est caractérisée, en particulier dans les pays industrialisés, par une diminution significative. En France, entre 1980 et 2005 le taux de mortalité a diminué de 4,4 % par an en moyenne7 . Cela est la conséquence de l’introduction, au milieu des années 1970, des chimiothérapies permettant de guérir la grande majorité des cancers du testicule, y compris ceux présentant d’emblée des métastases.

Diagnostic et traitement

Le diagnostic du cancer est facilement évoqué par la présence d’une masse anormale, généralement dure et irrégulière dans l’un des testicules. Il est confirmé par des examens complémentaires tels que l’échographie, l’échographie-doppler ou une IRM. L’ablation du testicule constitue la première étape du traitement sans entraîner d’infertilité dans la mesure où l’autre testicule est intact. Toutefois, par précaution et compte tenu de l’impact délétère des traitements qui suivront (radiothérapie, chimiothérapie) sur la lignée germinale, il est conseillé au patient de faire une préservation de sperme. L’examen anatomopathologique définira, en fonction du type histologique, de la conduite à tenir. Les tumeurs séminomateuses font appel généralement à une radiothérapie, alors que les non séminomateuses ont plus facilement recours à la chimiothérapie. Le pronostic est très bon, le taux de guérison dépassant les 95 % pour les séminomes et de 98 % pour les tumeurs non séminomateuses localisés. En cas de métastases, le taux de survie dépasse les 85 %.

Étiologie et facteurs de risque

L’étiologie du cancer du testicule est méconnue. La non ou mauvaise descente des testicules dans le scrotum, en particulier avant l’âge de 6 ans, constitue le principal facteur de risque identifié à ce jour. Il n’existe pas de caractère familial ou héréditaire marqué favorisant la survenue de ce cancer. Cependant, la différence d’incidence constatée en fonction des origines ethniques, suggère l’implication de facteurs génétiques de susceptibilité.
L’augmentation de l’incidence du cancer du testicule interpelle sur les facteurs qui pourraient être à l’origine de cette variation séculaire et par conséquent sur l’étiologie de la maladie. Contrairement au cancer de la prostate, l’augmentation de la fréquence et de l’incidence du cancer du testicule ne peut pas être expliquée ni par l’amélioration des procédures de diagnostic ni par le vieillissement des populations. Tenant compte de l’âge de survenue du cancer du testicule, la période prénatale et la puberté ont été (et sont toujours) considérées comme des fenêtres critiques exposants à des facteurs de risque. Pour certains auteurs, l’augmentation de l’incidence serait la conséquence de l’exposition des populations à des agents chimiques produits et disséminés par l’Homme à partir de la seconde moitié du 20e siècle. Cela ne constitue qu’une hypothèse qui n’est que partiellement compatible avec l’augmentation de l’incidence constatée dès le début du 20e siècle dans certains pays.
Quoi qu’il en soit, l’influence des substances chimiques, utilisées dans un contexte professionnel ou disséminées dans l’environnement, dans la genèse du cancer du testicule a été à l’origine de nombreux travaux épidémiologiques. Les principales catégories de produits étudiées ont été celles employées dans le secteur agricole (pesticides), les produits issus de l’industrie lourde et de l’industrie de transformation (zinc, cadmium, nickel), de l’industrie du papier et de la chimie (PVC, PCB). Les pesticides, du fait de leur emploi généralisé dans le secteur agricole, leur diversité d’utilisation tant dans un contexte professionnel que domestique ont particulièrement attiré l’attention des chercheurs. Certains d’entre eux pourraient, de par leurs propriétés hormonales (perturbateurs endocriniens), agir à des étapes critiques de la différenciation des gonades et/ou de la descente testiculaire et ainsi favoriser la survenue ultérieure d’un cancer du testicule.

Exposition aux pesticides et cancer du testicule

Premières observations

La prépondérance du cancer du testicule dans des milieux ruraux comparée à celle des milieux urbains a été signalée dans deux études datant de 1969 en Angleterre et Pays de Galles (Lipworth et Dayan, 1969renvoi vers)et en 1974 aux Pays-Bas (Talerman et coll., 1974renvoi vers). Une étude cas-témoins réalisée aux États-Unis (Mills et coll., 1984renvoi vers) a montré que le risque de survenue du cancer du testicule était plus élevé chez les hommes travaillant dans le secteur agricole (OR=6,27 ; IC 95 % [1,83-21,49]). La même année, une étude cas-témoin réalisée au Royaume-Uni utilisant les certificats de cause de décès, a montré un excès de risque, à la limite de la significativité, de décès par cancer du testicule chez les exploitants agricoles (McDowall et Balarajan, 1984renvoi vers). Cependant, ces conclusions ne furent pas confirmées par des études réalisées peu de temps après au Danemark (Jensen et coll., 1984renvoi vers)et aux États-Unis (Brown et Pottern, 1984renvoi vers ; Sewell et coll., 1986renvoi vers). En 1985, une revue résumant les études disponibles (études de mortalité, d’incidence et cas-témoins) aboutissait à des conclusions mitigées dans la mesure où seulement 3 études sur 6 montraient un excès de risque de cancer du testicule chez les agriculteurs (Blair et coll., 1985renvoi vers).
Il est à noter que la plupart de ces études portent sur de faible nombre de cas du fait de la faible incidence de la maladie. Cela est particulièrement accentué pour les études portant spécifiquement sur la mortalité, eu égard aux faibles taux de décès imputables à ce cancer.

Méta-analyses

Deux méta-analyses, publiées l’une en 1992 et l’autre en 1998, se sont adressées aux études portant sur le risque de cancer (mortalité ou incidence) chez des populations résidantes dans des régions rurales caractérisées par une forte activité agricole (Blair et coll., 1992renvoi vers ; Acquavella et coll., 1998renvoi vers). Concernant le cancer du testicule, la première méta-analyse a porté sur 10 études, et le méta RR était de 0,88 (IC 95 % [0,79-1,03]). La seconde, portant sur 14 études a montré un méta RR de 0,97 (IC 95 % [0,87-1,08]). Cette dernière n’a pas montré d’excès ou défaut de risque qu’il s’agisse d’études de cohortes, de mortalité ou cas-témoins.
En résumé, les résultats des méta-analyses ne sont pas en faveur d’un excès de risque.

Études de cohortes

En Suède, 254 117 travailleurs agricoles et 1 725 845 hommes travaillant dans d’autres secteurs ont été suivis au cours de la période 1961-1979. Un risque augmenté non significatif de survenue de cancer du testicule fut constaté chez les travailleurs agricoles (et parmi eux chez les applicateurs de pesticides disposant d’une licence d’emploi) comparés aux travailleurs non-agricoles (Wiklund et coll., 1989renvoi vers). Le suivi de cette cohorte jusqu’en 1991 n’a pas confirmé cette augmentation de risque chez les applicateurs de pesticides (Dich et coll., 1996renvoi vers).
Aux États-Unis, 33 658 applicateurs de pesticides dans l’État de Floride ont été comparés à 279 397 personnes-années issues de la population générale du même État au cours d’une période de suivi comprise entre 1975 et 1993 (Fleming et coll., 1999renvoi vers). Le risque de survenue du cancer du testicule a été retrouvé significativement plus élevé chez les applicateurs de pesticides (SIR=2,48 ; IC 95 % [1,57-3,72]). Cependant, cette même équipe n’a pas retrouvé d’excès de risque de décès par cancer du testicule chez les agriculteurs et applicateurs de pesticides (Fleming et coll., 2003renvoi vers).
En Finlande, une cohorte constituée de tous les hommes actifs professionnellement et nés entre 1906 et 1945 a fait l’objet d’un suivi entre 1971 et 1995. Les cas incidents de cancer du testicule (n=387) ont été identifiés par le registre du cancer finnois. Aucun excès de risque n’a été retrouvé chez les exploitants agricoles (SIR=1,0 ; IC 95 % [0,8-1,4]) ou les ouvriers agricoles (SIR=1,0 ; IC 95 % [0,4-2,0]). Une matrice emploi-exposition couplée fut développée permettant d’attribuer à chaque métier une ou plusieurs catégories de substances chimiques tout en prenant en compte l’intensité et la durée d’exposition. Trois catégories d’exposition ont été construites : non exposé, faiblement exposé et fortement exposé. Un risque significativement élevé de cancer du testicule a été retrouvé chez les sujets fortement exposés aux insecticides (RR=3,26 ; IC 95 % [1,20-8,83] ainsi qu’une relation dose-effet positive et significative (p de tendance < 0,05) a été retrouvée avec l’emploi de chacune des grandes catégorie d’emploi de pesticides (herbicides, fongicides, insecticides) (Guo et coll., 2005renvoi vers).
Au Costa Rica, les causes de décès chez 40 959 travailleurs agricoles de la banane entre 1972 et 1979 et exposés au dibromo-chloro-propane (DBCP) ont été enregistrées jusqu’en 1999 (Hofmann et coll., 2006renvoi vers). Comparés à la population générale, aucun excès de risque significatif de cancer du testicule fut constaté chez les travailleurs agricoles (SMR=1,45 ; IC 95 % [0,53-3,15].
Au Royaume-Uni, 62 960 applicateurs de pesticides disposant d’une licence d’utilisation ont été suivis entre 1987 et 2004 (Frost et coll., 2011renvoi vers). L’incidence et la mortalité par cancer ont été comparées à celle de la population générale britannique. Un risque de décès augmenté mais non significatif par cancer du testicule (basé sur 7 cas) a été constaté (SMR=1,95 ; IC 95 % [0,93-4,09]). Pour ce qui est de l’incidence, un risque augmenté significatif a été observée (SIR=1,26 ; IC 95 % [1,04-1,53]).
En 1993 a été initiée aux États-Unis une importante cohorte prospective intitulée Agricultural Health Study (AHS) dans les États de l’Iowa et de la Caroline du Nord (Alavanja et coll., 1996renvoi vers). Constituée de 89 658 personnes, elle comprend une majorité d’exploitants agricoles disposant d’une licence les autorisant à appliquer des pesticides, des applicateurs professionnels de pesticides travaillant pour des entreprises spécialisées dans l’épandage de ces produits et les conjoints ou conjointes des applicateurs. En 2006 et après un suivi moyen de 10,8 années, aucun excès de risque de survenue de cancer du testicule n’a été constaté ni chez les exploitants agricoles applicateurs de pesticides (SIR= 0,97 ; IC 95 % [0,67-1,37], n=32) ni chez les applicateurs professionnels (SIR=1,21 ; IC 95 % [0,45-2,64], n=6) (Koutros et coll., 2010renvoi vers).
Au Danemark, une cohorte de 3 156 jardiniers a fait l’objet d’une surveillance concernant la survenue de cancers entre 1975 et 2002 (Hansen et coll., 2007renvoi vers). Aucun excès de risque de survenue de cancer du testicule a été observé (SIR=1,01 ; IC 95 % [0,80-1,27]) et ce quel que soit les périodes de naissance (avant 1914, de 1915 à 1934 et après 1934).
En résumé, plusieurs études de cohortes, dont l’AHS, ne mettent pas en évidence d’excès de risque dans les populations agricoles. Cependant, trois études de cohortes (États-Unis, Finlande, Royaume-Unis) montrent des excès de risque (incidence) significatifs chez les applicateurs ou les sujets les plus fortement exposés.

Études cas-témoins

Aux États-Unis, une étude cas-témoins portant sur 323 cas de cancers du testicule et 658 témoins appariés à l’âge, au groupe ethnique et à la zone de résidence, a montré un risque élevé, mais non significatif, chez les agriculteurs propriétaires et gestionnaires (RR=1,9 ; IC 95 % [0,6-5,4]) mais pas chez les ouvriers agricoles (RR=0,6 ; IC 95 % [0,3-1,3]) (Van den Eeden et coll., 1991renvoi vers).
En France, une étude comparant 229 cas et 800 témoins a montré que le fait de résider dans une zone rurale ou avoir une activité régulière de jardinage était associé à une augmentation significative de risque de survenue de cancer du testicule (respectivement OR=1,63 ; IC 95 % [1,16-2,29] ; OR=1,84 ; IC 95 % [1,23-2,75]) (Walschaerts et coll., 2007renvoi vers). Cependant, ces associations disparaissaient dans un modèle multivarié prenant en compte des facteurs de confusions tels que les antécédents de cryptorchidie.
En résumé, en France l’excès de risque constaté dans une étude disparaît après ajustement en particulier sur les antécédents de cryptorchidie.

Études portant sur les enfants d’hommes exposés

La survenue de cancers a été étudiée chez les enfants d’agriculteurs norvégiens nés au cours de la période 1952-1991 (Kristensen et coll., 1996renvoi vers). Comparé à la population générale, les enfants d’agriculteurs présentaient un excès de risque significatif de survenue de cancer du testicule (SIR=1,24 ; IC 95 % [1,01-1,52]). Cependant, aucune information n’est rapportée concernant l’emploi de pesticides, les auteurs mettant l’accent exclusivement les fertilisants azotés et phosphorés.
En Suède, une étude s’est intéressée au risque de survenue de cancers chez les enfants nés entre 1958 et 1994 de parents applicateurs de pesticides au cours de la période 1965-1976 (Rodvall et coll., 2003renvoi vers). Aucun excès de risque de survenue de cancer de testicule n’a été observé (SIR=1,19 ; IC 95 % [0,13-4,28]).
En résumé, sur les deux études menées dans les pays du Nord de l’Europe, l’une présente un excès de risque significatif (enfants d’agriculteurs) l’autre pas (enfant d’applicateurs).

Exposition aux substances actives et cancer du testicule

Études centrées sur des catégories de pesticides ou matières actives

Une étude aux États-Unis s’est intéressée aux causes de décès chez des hommes ayant été potentiellement exposés à des composés bromés entre 1935 et 1976. Un excès significatif de décès par cancer du testicule (2 cas observés pour 0,11 attendus, p < 0,05) a été constaté chez les hommes ayant été en contact avec des composés bromés autres que le pesticide DBCP (dibromo-chloropropane) ou les retardateurs de flammes (le 2,3-dibromopropyl phosphate) ou les polybromobiphényls. Les cas concernés avaient en commun une exposition au bromure de méthyle (Wong et coll., 1984renvoi vers).
Toujours aux États-Unis, une étude écologique a étudié par régression linéaire multiple le lien qui pourrait exister entre des mesurages de DDE (dichlorodiphényldichloroéthylène), le principal métabolite du DDT (dichlorodiphenyltrichloroethane), dans des prélèvements de graisse sous-cutanée et les taux de décès par cancer du testicule dans divers États (Cocco et Benichou, 1998renvoi vers). Aucune corrélation n’a été retrouvée.
Une étude réalisée parmi les travailleurs d’une usine de production de l’insecticide alachlor située dans l’Iowa aux États-Unis n’a pas montré d’excès de risque significatif de survenue de cancer du testicule sur la période 1968 à 1999 (SIR=2,35 ; IC 95 % [0,49-6,86]) (Acquavella et coll., 2004renvoi vers).
La mortalité par cancer a été étudiée chez 21 863 travailleurs provenant de 12 pays et de 36 cohortes exposés aux herbicides de type phénoxy ou chlorophénols et contaminés ou pas par des dioxines (Kogevinas et coll., 1997renvoi vers). Aucun excès de mortalité par cancer du testicule n’a pu être constaté chez les hommes exposés aux herbicides chlorophénoxy qu’ils soient contaminés par les dioxines (SMR=1,31 ; IC 95 % [0,36-3,35]) ou pas (SIR= 1,33 ; IC 95 % [0,28-3,90]).
Parmi les matières actives étudiées au sein de la cohorte AHS, seul l’alachlor a fait l’objet d’une étude au regard du cancer du testicule (Lee, 2004renvoi vers). Aucune association n’a été retrouvée entre l’utilisation d’alachlor et le risque de survenue du cancer du testicule (RR=0,75 ; IC 95 % [0,25- 2,23]).
Une étude de mortalité réalisée aux États-Unis parmi les travailleurs de l’industrie chimique n’a pas montré d’excès de risque de décès chez les hommes exposés au 2,4 D (SMR=2,24 ; IC 95 % [0,03-12,47]) (Burns et coll., 2010renvoi vers).
En résumé, une majorité des études n’a pas pu mettre en évidence d’association avec une matière active à l’exception du bromure de méthyle.

Études couplées à des mesures biologiques des expositions

Plusieurs études de type cas-témoins ont été réalisées au cours de ces dernières années, et sont résumées sur le tableau 9.Irenvoi vers. Elles concernent exclusivement des pesticides organochlorés réputés être persistants dans l’organisme.

Tableau 9.I Pesticides organochlorés et cancer du testicule : études utilisant des marqueurs biologiques pour mesurer les expositions

Références
Population d’étude
Nombre de cas/témoins
Matrice
de mesure
Pesticides étudiés
Niveaux d’exposition
OR [IC 95 %]
     
% de détection
Valeurs détectées
(médiane)
 
McGlyn et coll., 2008renvoi vers
Population générale
754/928
Sang
Cis-nonachlore
Trans-nonachlore
Oxychlordane
Chlordanes totaux
p,p’-DDE
p,p’-DDT
β-HCH
Mirex
39
96
98
NP
98
19
83
41
0,003 µg/g lipides d
0,016 µg/g lipides d
0,012 µg/g lipides d
Non précise
0,25 µg/g lipides d
0,025 µg/g lipides d
0,008 µg/g lipides d
0,006 µg/g lipides d
1,56 [1,11–2,18]a
1,46 [1,07-2,00]b
1,0 †
1,51 [1,09–2,10]b
1,71 [1,23–2,38]c
1,0 †
1,0 †
1,0 †
Biggs et coll., 2008renvoi vers
Population générale
246/630
Sang
β-HCH
γ - HCH
Dieldrin
Hexachlorobenzene
Heptachlor epoxide
Mirex
p,p’-DDT
o,p-DDT
p,p’-DDE
Oxychlordane
Trans-nonachlor
95
76
80
100
90
95
97
67
100
87
99
0,004 µg/g lipides e
0,001 µg/g lipides e
0,007 µg/g lipides e
0,025 µg/g lipides e
0,004µg/g lipides e
0,002 µg/g lipides e
0,004 µg/g lipides e
0,0008 µg/g lipides e
0,153 µg/g lipides e
0,006 µg/g lipides e
0,0010 µg/g lipides e
1,0 †
1,0 †
1,0 †
1,0 †
1,0 †
1,0 †
1,0 †
1,0 †
1,0 †
1,0 †
1,0 †
Purdue et coll., 2009renvoi vers
Population générale
49/51
Sang
o,p-DDT
p,p’-DDT
p,p’-DDE
Heptachlor epoxide
Oxychlordane
Trans-nonachlore
Chlordanes totaux
β-HCH
Dieldrine
γ−HCH
Hexachlorobenzene Mirex
>50
>50
>50
>50
>50
>50
>50
>50
>50
>50
>50
>50
0,016 µg/g lipides d
0,194 µg/g lipides d
1,833 µg/g lipides d
0,012 µg/g lipides d
0,012 µg/g lipides d
0,020 µg/g lipides d
0,045 µg/g lipides d
0,130 µg/g lipides d
0,055 µg/g lipides d
0,007 µg/g lipides d
0,568 µg/g lipides d
0,001 µg/g lipides d
1,0 † 
1,0 † f
1,0 † f
1,0 † f
1,0 † f
1,0 † f
1,0 † f
1,0 †
1,0 † f
1,0 †
1,0 † f
1,0 †
Hardell et coll, 2003renvoi vers
Cas hospitaliers/témoins issus de la population générale
27 à 40 cas/26 à 30 témoins








22 à 35 mères de cas et 15 à 22 mères de témoins
Sang









Sang
Hexachlorobenzene
p,p’-DDE
cis-Heptachlordane
cis-chlordane
Oxychlordane
MC6
Trans-nonachlordane
Cis-Nonachlordane
Chordanes totaux

Hexachlorobenzene
p,p’-DDE
Cis-Heptachlordane
Cis-chlordane
Oxychlordane
MC6
Trans-nonachlordane
Cis-Nonachlordane
Chordanes totaux
NP
NP
NP
NP
NP
NP
NP
NP
NP

NP
NP
NP
NP
NP
NP
NP
NP
NP
0,022 µg/g lipides d
0,098 µg/g lipides d
0,001 µg/g lipides d
0,001 µg/g lipides d
0,006 µg/g lipides d
0,002 µg/g lipides d
0,008 µg/g lipides d
0,0003 µg/g lipides d
0,021 µg/g lipides d

0,031 µg/g lipides d
0,324 µg/g lipides d
0,001 µg/g lipides d
0,001 µg/g lipides d
0,009 µg/g lipides d
0,004 µg/g lipides d
0,013 µg/g lipides d
0,001 µg/g lipides d
0,032 µg/g lipides d
1,0 †
1,0 †
1,0 † g
1,0 †
1,0 †
1,0 †
1,0 †
2,6 [1,2–5,7] h
1,0 †

4,4 [1,7–12,0] h
1,0 †
1,0 † g
2,5 [0,99–6,1] h
1,0 † g
1,0 †
4,1 [1,5–11,0]h
3,1 [1,2–7,8] h
1,0 †
Giannandrea et coll, 2011renvoi vers
Cas–témoins hospitalier
50/48
Sang
p,p’-DDE
Hexachlorobenzene
pp’-DDE + hexachlorobenzene
18
3

19
Max 1,2 ng/ml
Max 0,83 ng/ml
3,21 [0,77–13,3]i
p=0,087 j

3,34 [1,09–10,17] i
Cohn et coll, 2010renvoi vers
Cohorte
Child Health Developmental Studies
15/45
Sang maternel
pp’- DDT
pp’- DDE
op’–DDT
pp’-DDT/pp’-DDE
100
100
77
11,89 ng/ml d
53,84 ng/ml d
0,36 ng/ml d
1,0 †
1,0 †
1,0 †
3,56 [1,34–11,88] k

Risque non différent de 1
a OR du quatrième quartile. P de tendance 0,009 avec quartiles croissants
b OR du quatrième quartile. P de tendance 0,03 avec quartiles croissants
c OR du quatrième quartile. P de tendance 0,0002 avec quartiles croissants
d valeurs médianes des échantillons détectables chez les témoins ou valeurs médianes des échantillons chez l’ensemble des cas et des témoins
f OR non significatif et supérieur à 2 pour le troisième tercile
g OR non significatif et supérieur à 2 pour les valeurs supérieures à la médiane chez les témoins
h OR pour les valeurs supérieures à la médiane chez les témoins
i OR pour les valeurs supérieures à la limite de détection (0,2 ng/ml)
j p de Fisher : proportion de valeurs au dessus de la limite de détection (0,2 ng/ml) chez les cas et chez les témoins
k OR du quatrième quartile

Aux États-Unis, une étude disposant de prélèvements sanguins obtenus en moyenne 14 ans avant le diagnostic a mesuré les concentrations circulantes de divers pesticides organochlorés chez 754 cas de cancer du testicule et 928 témoins issus de la population générale (McGlynn et coll., 2008renvoi vers). Les cas et les témoins ont été appariés à l’année de naissance et à l’année de prélèvement. Les données ont été ajustées aux antécédents familiaux de cancer du testicule, de testicule non descendu et à l’indice de masse corporelle. Les auteurs ont rapporté une association significative, avec une relation dose-effet significative, entre le risque de survenue du cancer du testicule et les concentrations plasmatiques en chlordanes (cis-nonachlore et trans-nonachlore) ainsi qu’avec le DDE.
Une autre étude réalisée aux États-Unis et portant sur la comparaison entre 248 cas de cancer du testicule et 630 témoins n’a pas montré d’association avec les concentrations circulantes en onze pesticides organochlorés (Biggs et coll., 2008renvoi vers). Les résultats pour les différents pesticides sont détaillés dans le tableau 9.Irenvoi vers.
Une étude portant sur des donneurs de sang ayant participé au programme Janus Serum Bank en Norvège a comparé les concentrations plasmatiques en pesticides organochlorés chez 49 sujets ayant développé un cancer du testicule à 51 témoins (Purdue et coll., 2009renvoi vers). Les cas et les témoins ont été appariés à l’âge au prélèvement, à l’année de prélèvement et à la zone de résidence. Un excès de risque non significatif de survenue du cancer du testicule a été retrouvé associé à certaines molécules (DDE, heptachlor époxide, chlordanes, dieldrine et hexachlorobenzène). La portée de cette étude se trouve limitée par les effectifs réduits.
Une étude suédoise s’est intéressée aux concentrations plasmatiques en 8 pesticides ou métabolites organochlorés chez des cas hospitaliers et des témoins sélectionnés parmi la population générale ainsi que chez leurs mères (Hardell et coll., 2003renvoi vers). Les résultats montrant un excès de risque de survenue de cancer du testicule en lien avec l’exposition au cis-nonachlordane sont de portées limitées tenant compte des faibles effectifs étudiés. Les auteurs ont souhaité également tester l’hypothèse selon laquelle une exposition maternelle pendant la grossesse pourrait favoriser la survenue ultérieure d’un cancer du testicule chez la descendance. Des concentrations plasmatiques plus élevées en héxachlorobenzène et divers chlordanes (cis-chlordane, trans-nonachlordane et cis-nonachlordane) ont été retrouvées chez les mères des cas comparés aux mères des témoins. Mais ici encore, outre les effectifs réduits, les expositions maternelles mesurées en moyenne 30 ans après la période critique (grossesse) limitent la crédibilité des conclusions.
Une étude cas-témoin nichée au sein d’une cohorte de 9 744 garçons nés vivants a étudié les éventuelles associations entre les concentrations circulantes maternelles en certains organochlorés et le risque de survenue de cancer du testicule (Cohn et coll., 2010renvoi vers). Quinze cas et 45 témoins appariés à l’âge de naissance ont été comparés. Ni les concentrations plasmatiques en DDT ni celles en DDE n’ont été trouvées associées à une modification de risque. Seul le rapport DDT/DDE était associé à un excès de risque de survenue de cancer du testicule. Les faibles effectifs de cette étude rendent les conclusions difficilement interprétables.
Plus récemment, une étude italienne a comparé les concentrations plasmatiques en DDE et en hexachlorobenzène (HCB) chez 50 cas de cancers du testicule et 48 témoins (Giannandrea et coll., 2011renvoi vers). Le taux de détection était de 18 et 3 % pour le DDE et le HCB respectivement. Les auteurs observent un risque augmenté mais non significatif de survenue de cancer du testicule chez les sujets ayant des valeurs détectables de DDE et significatif chez les sujets ayant des valeurs détectables de DDE et/ou de HCB. Ici encore, les faibles effectifs et le faible pourcentage de valeurs détectables ne permet pas de donner du crédit à cette étude.
En résumé, les résultats significatifs les plus fréquemment retrouvés concernent les chlordanes et le DDT (DDE). Cependant, les effectifs réduits de certaines études limitent leur portée.

Plausibilité biologique

La plupart des études visant à établir un lien éventuel entre l’utilisation de pesticides et le risque de survenue de cancer du testicule sont peu informatives au regard des familles chimiques et matières actives. Seuls des pesticides halogénés, bromés ou chlorés, ont fait l’objet d’études plus spécifiques et parmi eux quelques associations positives ont été identifiées.
L’exposition au fumigant bromure de méthyle a été associée à un risque augmenté et significatif de décès par cancer du testicule (Wong et coll., 1984renvoi vers). Cette substance a été classée comme « peu probable d’être cancérogène pour l’Homme » par l’EPA et « inclassable quant à sa cancérogénicité pour l’Homme » par l’IARC. Mais selon la classification Cancérogène-Mutagène-Reprotoxiques de l’Union européenne, le bromure de méthyle a été classé en catégorie 2 (substances et préparations préoccupantes pour l’Homme en raison d’effets cancérogènes possibles mais pour lesquelles les informations disponibles sont insuffisantes)8 .
Parmi les pesticides organochlorés, les études fondées sur leurs dosages dans le sang tendent à montrer que certains d’entre eux (DDE et chlordanes) sont associés à un risque accru de survenue de cancer du testicule. Le DDE, principal métabolite du DDT et particulièrement rémanent dans l’environnement et dans les organismes, est un antagoniste du récepteur des androgènes (Kelce et coll., 1995renvoi vers). Mais on peut s’interroger si ce ne sont pas les propriétés œstrogéniques du DDT, la molécule mère, qui devraient être prises en considération (Bitman et coll., 1968renvoi vers). Les chlordanes sont en revanche considérés comme des agonistes des récepteurs aux œstrogènes (Lemaire et coll., 2006renvoi vers). Aujourd’hui, il reste difficile d’expliquer comment des substances ayant des propriétés hormonales apparemment divergentes pourraient intervenir dans le même sens en favorisant la survenue d’un cancer du testicule.

Fenêtres critiques d’exposition

Le cancer du testicule survient dans la grande majorité des cas chez les jeunes adultes. Cela interpelle sur la période de la vie où des facteurs étiologiques pourraient intervenir. Lorsqu’on se penche sur l’emploi de pesticides dans un contexte professionnel, ce sont les années d’exposition à l’âge adulte qui sont prises en compte. Mais tenant compte de l’âge médian de survenue de ce cancer, il faut constater que la période d’exposition est particulièrement réduite (une dizaine d’années). Même si ce n’est pas une règle absolue, on considère que plusieurs décennies d’exposition à un xénobiotique sont nécessaires pour que ceux-ci contribuent à la survenue d’une pathologie tumorale. On peut donc s’interroger sur la portée des études visant comme période critique l’âge adulte et donc les populations exposées professionnellement aux pesticides.
D’autres fenêtres critiques ont été considérées telles que la période prénatale, la période postnatale précoce, la période pré ou pubertaire, où les testicules subissent des processus de développement, croissance, maturation ou stimulation hormonale. Un grand intérêt a été suscité par la période prénatale car le seul facteur de risque majeur du cancer du testicule identifié à ce jour est le testicule non descendu, la descente testiculaire étant un processus qui prend place, en plusieurs étapes, au cours de la grossesse. Certains auteurs ont associé la survenue du testicule non descendu à celui du cancer du testicule par une origine commune liée à l’exposition intra-utérine à des perturbateurs endocriniens. Cette association a été regroupée sous le terme de syndrome de dysgénésie testiculaire. Cependant, l’existence de ce syndrome est toujours discutée de nos jours. Peu d’études épidémiologiques ont porté sur les expositions aux pesticides au cours de ces périodes sensibles, en particulier la période prénatale (Hardell et coll., 2003renvoi vers ; Cohn et coll., 2010renvoi vers). Les études rétrospectives se trouvent confrontées aux difficultés de reconstitution des expositions ayant eu lieu de nombreuses années auparavant, qui plus est chez la maman. Pour ce qui est des études prospectives, elles sont inexistantes, et celles qui débuteraient demanderont de nombreuses années de suivi avant de pouvoir conclure.
En résumé, l’exposition pendant la période prénatale, postnatale précoce, pré ou pubertaire, périodes sensibles pour le développement et la maturation du testicule, est rarement prise en compte dans les études.

Interactions

Partant de la population de cas et témoins précédemment citée (McGlynn et coll., 2008renvoi vers), les auteurs se sont intéressés aux interactions qui pourraient exister avec des polymorphismes des gènes impliqués dans le métabolisme des hormones, en particulier stéroïdiennes (CYP17A1, CYP1A1, HSD17B1, HSD17B4 et AR) (Chia et coll., 2010renvoi vers). Deux variants de CYP1A1, rs1456432 et rs7495708, modifient les associations retrouvées avec le trans-chlordane et les chlordanes totaux. Parmi les hommes présentant l’allèle minoritaire du variant rs1456432, un risque augmenté de survenue de cancer du testicule a été retrouvé associé au 4e quartile d’exposition au trans-chlordane (OR=1,90 ; IC 95 % [1,01-3,56] ; p d’interaction=0,024) ainsi qu’au 4e quartile d’exposition aux chlordanes totaux (OR=2,07 ; IC 95 % [1,09-3,92] ; p d’inter-action=0,014). Des résultats similaires ont été obtenus parmi les hommes présentant l’allèle minoritaire du variant rs7495708. Biggs et coll. (2008renvoi vers) ont étudié l’influence que pourraient avoir les polymorphismes de répétitions des trinucléotides CAG et GGN présents dans l’exon 1 du récepteur des androgènes. Ces variants n’induisent pas de modification du risque mesuré entre l’exposition au DDE et la survenue de cancer du testicule.
En résumé, certains variants de gènes (CYP1A1) impliqués dans le métabolisme des hormones pourrait être impliqué dans un risque augmenté de survenue de cancer du testicule en lien avec l’exposition aux chlordanes.
En conclusion, la prépondérance du cancer du testicule dans des milieux ruraux comparés à des milieux urbains a été signalée pour la première fois en 1969 sans être confirmée dans les années suivantes. En 1985, une revue de la littérature mentionnait que sur six études portant sur le risque de survenue de cancer du testicule chez des populations agricoles, trois de ces études montraient des associations positives et trois autres aucune association.
Deux méta-analyses publiées en 1992 et en 1998, se sont intéressées aux études portant sur le risque de cancer (mortalité ou incidence) chez des populations résidant dans des régions rurales à forte activité agricole. Aucune n’a montré d’excès de risque de cancer de testicule.
La cohorte AHS aux États-Unis après un suivi moyen de plus de 10 années, n’a pas montré d’excès de risque de survenue de cancer du testicule ni chez les exploitants agricoles applicateurs de pesticides ni chez les applicateurs professionnels.
Plusieurs autres études de cohorte menées parmi des populations agricoles ou applicateurs de pesticides dans divers pays du monde (Suède, États-Unis, Finlande, Costa-Rica, Royaume-Uni, Danemark) n’ont pas globalement rapporté d’association significative. Trois études (États-Unis, Royaume-Uni, Finlande) ont présenté des excès de risque significatifs de survenue de cancer de testicule chez les applicateurs ou les sujets les plus exposés. L’étude finlandaise a montré une relation dose-effet significative avec l’emploi d’herbicides, fongicides et insecticides.
Quelques études de type cas-témoins, dont une réalisée ces dernières années en France, n’ont pas permis de mettre en évidence d’association significative entre les activités agricoles ou de jardinage, et le risque de cancer du testicule.
Le risque de survenue de cancer du testicule chez les enfants d’agriculteurs ou d’applicateurs de pesticides a fait l’objet de deux études. L’une réalisée en Norvège chez les agriculteurs (sans information sur l’emploi de pesticides) a montré un excès de risque significatif alors que celle réalisée en Suède chez les applicateurs de pesticides n’a pas montré d’augmentation du risque.
Il est actuellement difficile de conclure dans un sens ou dans un autre sur le risque que représente l’exposition aux pesticides sur la survenue du cancer du testicule. Outre les mesures peu discriminantes des expositions aux pesticides, plusieurs raisons peuvent être évoquées. Le cancer du testicule est un cancer rare. De ce fait, un grand nombre d’études manquent de la puissance requise. Par ailleurs, on ignore quelle serait la période sensible ou critique. L’hypothèse de la période prénatale comme fenêtre critique à l’action de xénobiotiques, dont les pesticides, est sérieusement à considérer. Toutefois, sa vérification se trouve confrontée à l’absence d’études prospectives d’envergure permettant d’y répondre et aux délais importants qu’elles nécessiteront avant de conclure si jamais elles étaient mises en œuvre.
Parmi les matières actives qui ressortent le plus fréquemment associées à un risque accru de cancer du testicule, figurent le DDE, principal métabolite persistant du DDT ainsi que dans une moindre mesure certains chlordanes.

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