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Med Sci (Paris). 2008 February; 24(2): 197–204.
Published online 2008 February 15. doi: 10.1051/medsci/2008242197.

Le point faible méiotique : la première division

M. Emilie Terret1 and Katja Wassmann2*

1Molecular Biology Program, Memorial Sloan-Kettering Cancer Center, Box 97, 1275 York Avenue, 10021 New York, NY, États-Unis
2Team Avenir Inserm, Cell Division and Associated Checkpoints. UMR 7622 CNRS, Biologie du Développement, Université Pierre et Marie Curie, 9, quai Saint-Bernard, Boîte 24, 75005 Paris, France
Corresponding author.
 

La mitose vise à répartir dans les cellules somatiques le patrimoine génétique dupliqué lors de la phase réplicative, de manière équivalente dans chacune des deux cellules filles. Des dérèglements de ce processus peuvent conduire à la multiplication anarchique des cellules et à un processus de cancérisation [ 1, 2]. La méiose est une forme de division très particulière qui concerne les cellules germinales. Elle a pour but de répartir une version haploïde du génome dans les quatre cellules filles issues de deux séries de divisions méiotiques sans synthèse d’ADN intermédiaire. Elle permet le brassage génétique essentiel à la diversité de l’espèce. La rencontre des deux gamètes du sexe opposé lors de la fécondation, un spermatozoïde et un ovocyte, permettra la formation d’un embryon diploïde. Des erreurs lors de la méiose peuvent conduire à des problèmes de stérilité féminine, ainsi qu’à la formation d’embryons aneuploïdes [ 3]. Dans cet article, nous traiterons des avancées récentes concernant la régulation de la première division méiotique femelle, en particulier celles qui sont liées à l’assemblage des fuseaux de division et à la régulation du cycle cellulaire méiotique chez la souris.

La maturation méiotique : une succession de deux divisions sans synthèse d’ADN intermédiaire

La maturation méiotique marque l’achèvement de la méiose depuis la levée du blocage en prophase de première division de méiose jusqu’à la fécondation. L’ovocyte de souris est le modèle étudié pour ces questions le plus proche de l’homme, et les ovocytes sont transparents, ce qui rend l’architecture intérieure de la cellule facilement observable. Enfin c’est un modèle où des approches génétiques sont possibles. La maturation méiotique est schématisée dans la Figure 1. L’ovocyte immature de souris est bloqué en prophase I de méiose dans les ovaires ; il est caractérisé morphologiquement par la présence d’un noyau, la vésicule germinative (GV, germinal vesicle). Cet arrêt est levé par une stimulation hormonale qui déclenchera indirectement la reprise de la méiose. Le premier évènement morphologique visible marquant l’entrée en maturation méiotique est la rupture de l’enveloppe nucléaire (GVBD, germinal vesicle breakdown). La chromatine se condense, le réseau de microtubules se réorganise et un fuseau de métaphase I se forme en position centrale. Ce fuseau migre vers le cortex de l’ovocyte, permettant, après séparation des chromosomes homologues, une première division asymétrique. Cette division donne lieu à une petite cellule -le globule polaire- et une grosse cellule -l’ovocyte. L’asymétrie de cette division permet l’accumulation de la majorité des réserves nécessaires au développement futur de l’embryon dans l’ovocyte. L’ovocyte entre en seconde division de méiose sans passer par une phase S intermédiaire, étape fondamentale à l’obtention d’un gamète haploïde. Il forme un fuseau de métaphase II en position sous-corticale et reste arrêté en métaphase II jusqu’à la fécondation grâce à une activité appelée CSF (cytostatic factor). Cet arrêt en métaphase de seconde division méiotique est caractéristique des ovocytes de vertébrés. Il est caractérisé par une forte activité MPF (M-phase promoting factor) et par la présence d’un fuseau de division stable avec des chromosomes alignés sur la plaque équatoriale. Le MPF est le facteur universel d’entrée en phase M de toutes les cellules eucaryotes, il est constitué de deux sous-unités, la Cycline B et Cdc2. L’activité CSF ralentit la dégradation de la Cycline B, maintenant ainsi une activité MPF forte qui empêche la sortie de métaphase. La fécondation déclenche la sortie de cette phase d’arrêt et entraîne l’achèvement de la méiose avec la séparation des chromatides sœurs et l’expulsion du second globule polaire (pour revue voir [ 4, 5]).

Régulation de la sortie de méiose I

Chez la femme, le risque d’erreurs lors de la méiose augmente avec l’âge. Le plus souvent il s’agit d’erreurs de ségrégation des chromosomes en méiose I, induisant l’aneuploïdie des ovocytes, et en conséquence celle des embryons. Une bonne revue a été publiée sur l’âge maternel et les anomalies chromosomiques dans les ovocytes humains [ 6]. Quand l’âge augmente, la ségrégation des chromosomes devient de moins en moins fidèle, ce qui peut être une conséquence de défauts de cohésion des chromatides sœurs [ 7], de défauts de recombinaison méiotique [3], mais peut-être aussi de défauts de la machinerie de ségrégation comme le fuseau de division, ou des mécanismes de régulation de la ségrégation. Des avancées récentes dans ces deux domaines ont permis de mieux appréhender la formation des fuseaux de division et la régulation de la sortie de méiose I, premier pas pour mieux comprendre et éventuellement traiter les aneuploïdies ovocytaires liées à l’âge chez la femme.

Le fuseau de méiose I : un outil essentiel pour assurer une division équivalente du matériel génétique à l’issue de la première division méiotique

Les fuseaux mitotiques et méiotiques sont des structures bipolaires très dynamiques formées de microtubules arrangés de façon symétrique et fusiforme. Au cours de la division, les chromosomes s’alignent progressivement sur la plaque équatoriale du fuseau, permettant à l’anaphase leur répartition égale entre les deux cellules filles. Il a été montré que deux voies participent et coopèrent à la formation des fuseaux en mitose. La première implique les centrosomes. Les centrosomes sont composés d’une paire de centrioles (eux-mêmes formés de cylindres de microtubules) entourés de matériel péri-centriolaire capable de nucléer les microtubules. Au cours de la division mitotique, la cellule possède deux centrosomes. Ces centrosomes nuclééent des microtubules astraux qui cherchent et capturent les chromosomes, définissant ainsi les deux pôles du fuseau mitotique et permettant l’alignement des chromosomes sur la plaque équatoriale du fuseau [ 8]. La seconde voie est dépendante du gradient de la GTPase Ran sous sa forme active couplée au GTP (pour revue voir [ 9]). La production de Ran-GTP dépend de l’activité de son facteur d’échange RCC1. RCC1 est lié à la chromatine en mitose, ce qui permet la formation d’un gradient de Ran-GTP autour des chromosomes (la plus forte concentration de Ran-GTP étant au niveau des chomomomes, et la moins forte dans le cytoplasme). Ran-GTP libère les SAF (spindle assembly factors) - des facteurs qui stimulent l’assemblage des microtubules - de l’effet inhibiteur des importines, et favorise donc ainsi la formation des microtubules et plus largement du fuseau à proximité des chromosomes (Figure 2).

Des études effectuées sur des ovocytes humains ont montré que les fuseaux de division méiotiques sont souvent aberrants chez les femmes âgées, pouvant ainsi contribuer aux aneuploïdies ovocytaires liées à l’âge chez la femme [ 10]. La formation des fuseaux de division méiotique a été décrite précisément chez la souris, mais les mécanismes moléculaires sont restés longtemps élusifs (pour revue voir [4]). Des analyses récentes en microscopie confocale quantitative haute résolution réalisées dans des ovocytes de souris ont montré que la nucléation des microtubules en méiose I se fait à partir de l’auto-assemblage de 80 centres organisateurs des microtubules, qui en quelque sorte remplacent les centrosomes en formant un réseau cytoplasmique de microtubules en prophase, permettant la formation d’un fuseau bipolaire [ 11]. Le fuseau est mis en place deux heures après la rupture de l’enveloppe nucléaire et reste en place tout au long de la très longue prométaphase (qui dure six heures chez la souris), jusqu’à l’anaphase qui a lieu six à sept heures plus tard [ 12]. Le fuseau de la seconde division de méiose se forme rapidement à partir des microtubules qui sont restés à proximité des chromosomes après la première division de méiose, et il est stable au cours de l’arrêt CSF [ 13]. Les fuseaux méiotiques sont dépourvus de centrioles, ce qui exclut donc la voie centrosomique active en mitose comme mécanisme permettant de former les fuseaux en méiose. La voie dépendante du gradient de la GTPase Ran paraît donc une bonne candidate pour expliquer la formation des fuseaux en méiose. Chez les vertébrés, cette voie a été largement étudiée in vitro dans des extraits d’ovocytes de xénope, mais son rôle n’avait pas été étudié in vivo en méiose. Récemment, il a été montré qu’un gradient de Ran-GTP est établi en méiose I, et qu’il perdure autour des chromosomes jusqu’en méiose II. Chez le xénope et la souris, la formation du fuseau de méiose I semble insensible à des modifications du gradient de Ran-GTP, et ce malgré l’absence de centrioles, donc en l’absence de la voie centrosomale. Il existe par conséquent un mécanisme autre que les deux voies classiques, capable de contribuer à la formation d’un fuseau de division en méiose I [11, 13]. La formation du fuseau de méiose II est sensible au gradient de Ran-GTP, et le fuseau a besoin d’être stabilisé dans le temps, via les protéines MISS (MAPK-interacting and spindle-stabilizing protein) et DOC1R (Deleted in oral cancer one related) [ 14, 15]. Une fois les fuseaux de division formés, les chromosomes s’alignent sur la plaque métaphasique, jusqu’à leur séparation à l’anaphase.

Le matériel génétique ségrégé en méiose I : les chromosomes homologues

Une différence essentielle entre la maturation méiotique et la mitose est que lors de la méiose I, les chromosomes homologues paternels et maternels sont ségrégés entre l’ovocyte et le globule polaire, alors qu’en mitose, les chromatides sœurs formant un chromosome sont séparées entre les deux cellules filles (Figure 3) [ 16]. En mitose, les deux chromatides sœurs composant un chromosome sont attachées au fuseau bipolaire par leurs kinétochores. Les kinétochores d’une paire de chromatides sœurs sont orientés vers les pôles opposés du fuseau bipolaire, permettant ainsi de générer la tension nécessaire à la séparation des chromatides sœurs entre les deux cellules filles à la transition métaphase-anaphase (Figure 3). Jusqu’à cette transition, les chromatides sœurs sont maintenues ensemble grâce aux cohésines, qui formeraient un anneau autour d’elles, leur permettant de rester appariées jusqu’à leur séparation à l’anaphase [ 17]. En méiose I, ce sont les chromosomes homologues qui sont appariés, et les deux kinétochores d’un chromosome (formé de deux chromatides sœurs) sont orientés vers le même pôle, contrairement à la mitose (Figure 3). En prophase de méiose, avant la maturation méiotique, les chromosomes homologues échangent du matériel génétique. Ce processus est appelé recombinaison méiotique et créé des liens physiques entre les chromosomes, au niveau des chiasmas. La séparation des chromosomes en méiose I requiert la disparition des cohésines reliant les deux chromosomes à l’endroit où la recombinaison a eu lieu, et plus largement sur les bras des chromatides sœurs. Les cohésines entourant les centromères de deux chromatides sœurs doivent être protégées afin de leur permettre de rester appariées jusqu’à la méiose II (Figure 3) [16]. Les protéines appelées Shugoshin sont responsables de cette protection [ 18]. La méiose II ressemble à une division mitotique, car ce sont des chromatides sœurs qui sont appariées et séparées à l’anaphase, comme en mitose. Les mécanismes contrôlant le cycle cellulaire mitotique sont-ils à l’œuvre en méiose I, division méiotique la plus éloignée d’une mitose en terme chromosomique ?

L’APC/C : le chef d’orchestre mitotique

Pour comprendre comment est contrôlé le cycle cellulaire méiotique, il est impératif d’introduire les mécanismes contrôlant le cycle cellulaire mitotique. Des étapes essentielles de la mitose sont contrôlées par un complexe multiprotéique, la E3 ubiquitine ligase ou APC/C (anaphase promoting complex/cyclosome), qui est requis pour ubiquitinyler certaines protéines dont la dégradation est nécessaire au déclenchement de l’anaphase. L’ubiquitinylation par l’APC/C dirige en effet les protéines ainsi étiquetées vers le protéasome 26S qui les dégrade. L’APC/C a la capacité d’ubiquitinyler des substrats variés à différentes phases de la mitose. Sa spécificité dépend de son association avec des activateurs et inhibiteurs spécialisés (Figure 4A). En pro-métaphase de la division mitotique, la Cycline A est ubiquitinylée et dégradée grâce à l’APC/C associé à l’activateur Cdc20, induisant la disparition de l’activité kinasique associée à la Cycline A. À ce stade, l’APC/C est sensible à l’inhibiteur Emi1. La progression de la division mitotique est accompagnée par l’accumulation de l’activité MPF. Une chute de l’activité MPF est observée juste avant l’anaphase. Cette chute est due à l’ubiquitinylation de la Cycline B, composante du MPF, par l’APC/C associé à l’activateur Cdc20, et elle est sensible à l’inhibiteur Mad2. Avant d’entrer en phase G1, toute activité kinasique associée au MPF doit disparaître. La cellule accomplit cette tâche via un deuxième activateur de l’APC/C, Cdh1. Cdh1 est inhibé par phosphorylation par le MPF ; la première vague de dégradation de la Cycline B suffit pour permettre l’activation de Cdh1, qui va ensuite cibler les molécules de Cycline B restantes. Un autre substrat clef de la transition métaphase-anaphase est la Sécurine, un inhibiteur d’une protéase, la Séparase. Après la dégradation de la Sécurine en métaphase, la Séparase est libérée et peut cliver sa cible, la sous-unité Scc1 du complexe de cohésines. Une fois Scc1 clivée, l’anneau de cohésines qui maintient les chromatides sœurs ensemble est détruit [ 19].

Au cours de la division mitotique, un mécanisme de contrôle appelé point de contrôle du fuseau empêche le déclenchement de l’anaphase tant que tous les chromosomes ne sont pas attachés au fuseau mitotique et alignés sur la plaque équatoriale sous tension [ 20]. Cela permet d’éviter une séparation précoce et anarchique des chromatides sœurs, et d’assurer que le contenu en ADN est bien séparé en deux fractions égales à l’issue de la division cellulaire. Durant la phase d’attachement et d’alignement des chromosomes, l’APC/C est inhibé par le point de contrôle du fuseau via Mad2. Le MPF reste donc actif et les chromatides sœurs restent liées entre elles. L’alignement du dernier chromosome sur la plaque métaphasique du fuseau va inactiver le point de contrôle du fuseau et ainsi activer l’APC/C. L’APC/C actif ubiquitinyle ses substrats (la Sécurine et la Cycline B), les ciblant pour dégradation par le protéasome 26S, et induit donc la séparation des chromatides sœurs, la chute de l’activité MPF, et la sortie de phase M (Figure 4B). Le point de contrôle du fuseau coordonne donc la phase de capture des chromosomes, l’activité du MPF et la séparation physique des chromatides sœurs.

En méiose, un chef d’orchestre controversé

En méiose I, des résultats contradictoires selon les espèces ont été publiés quant à l’existence d’un mécanisme de contrôle de type mitotique passant par l’inhibition de l’APC/C et contrôlant la séparation des chromosomes homologues. Chez des espèces comme la levure et le nématode, il a été montré que l’APC/C actif et la Séparase sont requis pour effectuer la première division de méiose, alors que chez le xénope, l’APC/C actif n’est pas requis (pour revue voir [ 21]). Chez la souris, la fonctionnalité d’un point de contrôle du fuseau était très controversée, notamment par le fait qu’il existe des souris XO ayant un seul chromosome X et cependant parfaitement fertiles [ 22] (au cours de la division mitotique, la cellule serait bloquée en métaphase en réponse à l’activation du point de contrôle du fuseau dans une situation similaire). Enfin il existe une forte corrélation entre l’âge des femmes et le pourcentage d’aberrations chromosomiques résultant d’erreurs au cours de la méiose I femelle, suggérant qu’aucun mécanisme de contrôle n’arrête la division méiotique chez l’homme en cas d’erreurs comme c’est le cas au cours de la division mitotique, ou bien que son efficacité diminue en fonction de l’âge [3]. Ces erreurs induisent l’aneuploïdie des ovocytes, et donc celle des embryons.

Un ensemble d’études récentes suggère que la dégradation induite par l’APC/C et un mécanisme de contrôle de type mitotique existent et seraient fonctionnels en méiose I chez la souris (Figure 4C). Tout d’abord la dégradation induite par le protéasome est requise pour la sortie de méiose I, comme l’a montré l’utilisation d’un inhibiteur du protéasome qui bloque les ovocytes en méiose I [ 23]. Plus précisément, la Cycline B et la Sécurine doivent être dégradées à la transition métaphase-anaphase, leur surexpression bloquant également les ovocytes de souris en méiose I [2325]. Ensuite, la dérégulation de modulateurs de l’APC/C compromet la sortie de méiose I. La surexpression de Mad2 entraîne un arrêt en méiose I, et l’expression d’une forme mutée dominante négative de Mad2 (mimant la forme phosphorylée de la protéine) entraîne la sortie de méiose I avec des défauts de ségrégation des chromosomes [ 26]. Le même résultat est obtenu après expression de siARN ciblant Mad2 : la Cycline B et la Sécurine sont dégradées précocement, et les ovocytes sortent de méiose I trop tôt [ 27]. De même l’expression de mutants dominants négatifs de protéines du point de contrôle du fuseau comme Bub1 et BubR1, de mutants de Cdc20 actifs, ou la perte d’un allèle de Mad2 dans les ovocytes issus de souris invalidées pour Mad2 de manière hétérozygote [ 28] accélèrent la transition métaphase-anaphase en méiose I ; en conséquence, les ovocytes ségrègent mal leurs chromosomes homologues [ 29]. Enfin, un des effecteurs du point de contrôle du fuseau, la Séparase, doit être correctement régulé pour sortir de méiose I. Un inhibiteur peptidique spécifique de la Séparase exprimé en méiose I induit des erreurs de ségrégation, visibles en méiose II par la présence de chromosomes homologues non disjoints [23]. La résolution de l’anneau de cohésines autour des chromosomes en méiose I semble donc dépendre de la Séparase. L’analyse de souris porteuses d’une construction permettant l’invalidation conditionnelle (knock-out conditionnel) de la Séparase sélectivement dans les ovocytes l’a montré de manière indiscutable [ 30]. Les cohésines présentes en méiose ont une sous-unité méiotique spécifique, Rec8, et c’est cette sous-unité qui est clivée le long des bras des chromosomes, mais pas autour des centromères en méiose I. Les ovocytes issus des souris invalidées pour la Séparase ne peuvent pas cliver Rec8 en méiose I, et n’expulsent pas de premier globule polaire ; ces souris sont stériles [30]. Contrairement à ce qui se passe au cours de la mitose, la Séparase semble aussi avoir un rôle au cours de la cytokinèse en méiose I, car, indépendamment de son activité protéasique, elle peut promouvoir l’expulsion d’un globule polaire sans séparation des chromosomes homologues [30, 31].

En résumé, l’inhibition de la dégradation induite par le protéasome, l’inhibition concomitante mais mutuellement indépendante de la dégradation de la Sécurine et de la Cycline B en particulier, la dérégulation de modulateurs de l’APC/C, et la dérégulation de l’activité de la Séparase, altèrent la transition méiose I/méiose II. Cela suggère que l’APC/C et le point de contrôle du fuseau sont fonctionnels et requis chez la souris pour orchestrer la transition méiose I/méiose II. Ce mécanisme de contrôle semble donc conservé entre les espèces, et entre la mitose et la méiose, à l’exception du xénope.

Questions ouvertes et paradoxes méiotiques

La régulation directe de l’APC/C en méiose I dans les ovocytes de mammifères reste cependant obscure. Les preuves montrant que l’APC/C est requis en méiose I sont indirectes, et aucun activateur de l’APC/C spécifique de la méiose n’a été mis en évidence chez les mammifères, comme cela a été le cas dans d’autres espèces [ 32]. Il semblerait que l’activateur requis pour l’entrée en méiose I soit Cdh1 [ 33]. Un rôle difficile à concilier avec le fait que Cdh1 est requis pour la sortie de mitose, et que des substrats de l’APC/C qui sont dégradés de manière dépendante de Cdh1 peuvent cependant s’accumuler à l’entrée en méiose I, comme par exemple Cdc20 et la kinase Polo. Une autre question intéressante concerne Mad2. Comme en mitose, Mad2 semble être impliquée dans la détection des attachements incorrects entre microtubules et kinétochores en méiose I. Il reste à déterminer comment Mad2 est capable de reconnaître un attachement correct en méiose I, sachant que le même type d’attachement (c’est-à-dire les deux kinétochores de deux chromatides sœurs attachés au même pôle du fuseau de division) est reconnu comme erroné en mitose par la même protéine. La formation atypique du fuseau de méiose I pourrait-elle lui conférer des propriétés intrinsèques lui permettant de reconnaître l’attachement des chromosomes homologues au même pôle (chromatides sœurs avec la même orientation) comme correct ? Quel serait alors le rôle de Ran en méiose I ? Chez la souris, il a été montré récemment que Ran pourrait jouer un rôle dans l’établissement de l’asymétrie de la première division méiotique [ 34]. Dans le futur, des études combinant la génétique et la biologie cellulaire permettront d’élucider ces questions importantes.

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Acknowledgments

Les auteurs s’excusent de ne citer qu’un nombre limité de publications en raison de restrictions de place. Nous remercions Marie-Hélène Verlhac, Khaled Hached et Jérémie Szeftel pour leurs commentaires sur le manuscrit. K.W. remercie C. Jessus pour son soutien. L’équipe de K.W. est soutenue par l’Inserm (subvention Avenir et PNRRE), l’ARC (subvention 3883), et le CNRS. M.E.T. est financée par une bourse NIH R01 CA107342 allouée à Prasad. V. Jallepalli.

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