III. Facteurs sociaux, culturels, économiques et inégalités sociales en matière de nutrition
2014
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Déterminants sociaux et culturels de l’alimentation
Les politiques et interventions publiques en matière d’alimentation se concentrent principalement sur les comportements au niveau individuel (Nestle et Jacobson, 2000

; Delormier et coll., 2009

). Elles reposent généralement sur l’idée qu’il suffit d’apprendre aux individus que leurs comportements alimentaires ne sont pas bons pour la santé ou de les en convaincre pour qu’ils abandonnent ces comportements (Fassin, 1996

). Or, les déterminants des pratiques alimentaires sont plus complexes. Le succès limité de ces politiques conduit à s’interroger sur les raisons pour lesquelles donner des ressources et des savoirs supplémentaires ne suffit pas toujours à modifier les comportements et à réduire les inégalités sociales en matière d’alimentation (Nestle et coll., 1998

). C’est dans cette perspective que l’analyse des déterminants sociaux et culturels de l’alimentation prend tout son sens. Il s’agit d’évaluer l’importance de la dimension collective et identitaire des comportements alimentaires.
De l’approche individuelle à l’approche collective
De nombreuses interventions dans le domaine de la nutrition s’appuient sur des théories fondées sur les caractéristiques psychologiques de l’individu, comme ses attitudes ou son sentiment d’efficacité personnelle (en anglais,
self-efficacy), c’est-à-dire les croyances qu’un individu a dans ses propres capacités d’action (Bandura, 1977

). Ces théories, comme la théorie sociale cognitive (Bandura, 1986

) ou la théorie du comportement planifié (Ajzen, 1991

), sont utilisées pour expliquer les choix alimentaires comme le produit d’une décision généralement rationnelle répondant à un certain nombre d’influences de l’environnement. Les chercheurs utilisant ces approches établissent des listes de facteurs corrélés avec les comportements alimentaires, en lien notamment avec les caractéristiques psychologiques individuelles des personnes.
Cette lecture des choix alimentaires a été critiquée par de nombreux auteurs en sociologie, en particulier parce qu’en exagérant la place des choix rationnels (Murcott, 1995

), elle surestime le poids de la dimension individuelle de ces comportements et sous-estime l’imbrication de l’individu au sein des différentes structures sociales auxquelles il appartient. Elle peut ainsi apparaître comme une conception désincarnée des aliments, du corps et de l’alimentation en général, trop coupée du contexte social dans lequel les gens évoluent (Warin et coll., 2008

). À l’opposé de ces approches, les approches sociologiques privilégient plutôt l’étude des modes de vie et des logiques collectives. Si ces deux approches sont souvent opposées dans la littérature (Delormier et coll., 2009

), elles apparaissent en réalité plutôt complémentaires. De nombreuses études soulignent ainsi la nécessité de mieux prendre en compte le contexte social pour comprendre les inégalités sociales en matière d’alimentation et améliorer l’efficacité des interventions (Frohlich et coll., 2001

; Williams, 2003

; Cockerham, 2005

). Dans cette perspective, l’objectif de ce chapitre est de faire le bilan des connaissances sur les déterminants sociaux, et donc collectifs, mais aussi culturels, en matière d’alimentation.
L’étude des connaissances relatives à l’influence du contexte social et culturel sur les comportements alimentaires est cependant loin d’être une tâche aisée. Tout d’abord, il est difficile d’étudier l’influence de ce contexte à partir de travaux portant sur d’autres cultures. Les structures sociales, les pratiques légitimes, les représentations des aliments ou des prises alimentaires, comme l’ensemble de l’environnement social et institutionnel, diffèrent d’un pays à l’autre. Et même si des similitudes existent, il reste difficile de s’assurer de la transposition des résultats et en particulier de la chaîne de causalité sous-jacente dans un autre environnement que celui du pays et du milieu d’étude. Or, la majeure partie des études portant sur l’influence du contexte social et culturel a été réalisée dans un contexte anglo-saxon, dont on sait par exemple que le rapport à l’alimentation est très différent (Rozin et coll., 1999

; Fischler et Masson, 2008

). Les travaux sur le contexte français sont très peu nombreux, ce qui rend très délicat la prise de recul nécessaire à l’analyse de la littérature se rapportant à d’autres pays.
Par ailleurs, la faiblesse de l’échantillon analysé dans de nombreuses études, combinée à l’utilisation de méthodes économétriques parfois inappropriées, conduit à relativiser de nombreux résultats et à ne se limiter qu’aux études les plus robustes. Il est frappant de constater, dans de nombreuses études, le manque d’informations sur les modalités d’échantillonnage ou sur la façon dont la non-réponse a été corrigée, opérations influant sur la variance des estimateurs utilisés et pouvant dans certains cas conduire à relativiser des conclusions trop hâtives. En outre, les données exploitées sont généralement transversales, ce qui rend difficile les interprétations et les conclusions en termes de causalité.
La dernière difficulté tient à la mesure du statut social, très variable selon les études, la discipline et le contexte national où elles sont menées. Il est très différent de s’intéresser aux inégalités sociales en se représentant la société sous la forme d’un continuum de positions sociales, en utilisant un indicateur du gradient social par exemple, ou d’avoir une lecture en termes de classes sociales opposées dont les positions ne peuvent pas toujours être ordonnées simplement. Il est encore différent de s’intéresser aux populations précaires, dont les situations, pratiques et représentations n’ont rien à voir avec celles des groupes défavorisés un peu moins démunis.
Nature sociale de l’alimentation
Alimentation : un enjeu de distinction sociale
L’acte alimentaire se déroule selon des protocoles imposés par la société. La définition de ce qu’est un repas, les plats qui le composent, la forme de la journée alimentaire (nombre de prises, horaires…), les modalités (lieu, contexte des prises alimentaires…), mais aussi les manières de manger varient énormément d’une culture à l’autre, et entre groupes sociaux au sein d’une même culture (Fischler, 1990

; Poulain, 2002a

).
Ainsi, aujourd’hui comme par le passé, les pratiques alimentaires sont très différenciées socialement et entretiennent un lien étroit avec le prestige social. Certains aliments ne sont pas consommés en haut de la hiérarchie sociale parce que perçus comme inférieurs, alors que d’autres sont considérés comme objets de prestige lorsqu’ils sont servis à table (Halbwachs, 1938

), comme c’est le cas de la viande et en particulier de certains animaux ou morceaux (Lepage, 2002

). La place même des mangeurs autour de la table peut signaler leur position sociale et être essentielle dans une gestion politique des liens et des statuts sociaux (Haroche, 1998

). Il existe également une différenciation sociale des lieux d’alimentation et d’achat alimentaire : par exemple, alors que les plus aisés sont proportionnellement plus nombreux en France à favoriser les petits commerces pour leurs achats alimentaires, les ménages ayant de bas revenus se tournent plus vers le maxi-discount : c’est le cas de 18 % des dépenses alimentaires pour le premier décile de niveau de vie
1
Le « niveau de vie » tient compte du nombre de personnes que le revenu fait vivre au travers des unités de consommation.
en 2006 contre 5 % pour le dernier (Bellamy et Léveillé, 2007

). La perception des lieux d’alimentation est aussi très segmentée socialement : les représentations sociales des
fast foods en France, par exemple, reposent notamment sur la vision des populations plutôt défavorisées qui s’y alimentent (Fantasia, 1995

). Derrière les différences de consommation entre milieux sociaux s’opèrent des stratégies de distinction, notamment des classes dominantes, qui visent ainsi à maintenir leur singularité par rapport aux autres groupes sociaux (Marenco, 1992

). Ainsi, on observe un lien entre l’évolution de la consommation de certains produits alimentaires et les catégories qui les consomment (Grignon et Grignon, 1999

). Les différences de consommation entre groupes sociaux reflètent ainsi des différences de modèles alimentaires qui tiennent aux
habitus de ces groupes (Warin et coll., 2008

), c’est-à-dire au système de règles, de conduites, de croyances, de valeurs propres à chaque groupe social et relayé par la socialisation propre à la classe sociale d’appartenance (Bourdieu, 1979

). Autrement dit, l’alimentation façonne l’identité et notamment l’identité sociale (Fischler, 1990

).
Cas des populations précaires
En plus des différences de consommation observées selon le milieu social dans les sociétés contemporaines, le cas des populations précaires est particulier. L’alimentation de ces populations répond à des logiques différentes. Par exemple, en raison des fortes contraintes pesant sur les populations précaires, l’alimentation n’assure plus dans un certain nombre de cas son rôle structurant et devient même un facteur d’isolement, reflétant l’ensemble des difficultés rencontrées par ces populations (Caillavet et coll., 2006

) : l’irrégularité de l’emploi du temps se traduit par exemple dans celle des horaires de repas, la désorganisation de la cellule familiale peut conduire à un désintérêt vis-à-vis des repas et amener le repas à perdre sa dimension de convivialité. Les conséquences de la pauvreté sur l’alimentation quotidienne semblent ainsi moins relever des contraintes économiques que de la déstructuration conjugale et sociale (Lhuissier, 2006

) : l’absence de conjoint par exemple fait perdre au repas son caractère symbolique de certification de la fiabilité du foyer et conduit à diminuer la préparation culinaire. Cette dernière étude réalisée dans le Nord de la France fait toutefois apparaître que l’alimentation peut également permettre à des personnes isolées de continuer à s’inscrire socialement par le biais de l’activité alimentaire, notamment par la diversification des réseaux d’approvisionnement et des relations qui y sont liées. Si les contraintes et logiques ne sont pas les mêmes que pour le reste de la population, la dimension sociale des pratiques alimentaires de ces populations reste essentielle : la précarité semble générer de nouveaux modèles alimentaires qui touchent à la fois les normes et les pratiques alimentaires (Poulain et Tibère, 2008

).
Déterminants collectifs des pratiques alimentaires
Les différences de pratiques alimentaires entre milieux sociaux traduisent des différences de revenus, telles que les économistes les mettent en lumière, mais elles traduisent également d’autres dimensions de nature plus sociale. L’âge, le niveau d’éducation, les habitudes familiales, ou encore l’influence de l’entourage (Nestle et coll., 1998

) et le temps consacré aux repas sont des facteurs déterminants pour comprendre les pratiques alimentaires.
Influence du genre
Les hommes et les femmes ne consomment généralement pas la même chose et de la même manière. Par exemple, l’analyse de l’enquête Budget de famille 2006 de l’Insee fait apparaître qu’au sein de la population des individus vivant seuls, l’alimentation représente 15 % des dépenses des hommes et 18 % de celles des femmes en France ; à âge, niveau de diplôme et niveau de vie égaux, cela correspond à un écart de 303 € par an en moyenne. Les hommes privilégient moins que les femmes, quand ils vivent seuls, l’achat de fruits et de légumes, mais achètent en revanche plus de viande et d’alcools (de Saint Pol, 2008

). Les hommes privilégient des produits demandant peu de préparation et l’alimentation des femmes apparaît plus favorable à la santé. On retrouve de telles différences chez les adultes à l’étranger, souvent liées avec un plus fort contrôle du poids et de plus fortes croyances dans les bienfaits d’une alimentation saine chez les femmes (Wardle et coll., 2004

). On les retrouve également chez les enfants et les adolescents, les filles étant par exemple plus nombreuses à manger des fruits et légumes, notamment en Europe (Rasmussen et coll., 2006

). Mais ces différences relèvent également de l’influence de l’entourage et de la construction des représentations des aliments.
Influence de l’entourage
La grande majorité des prises alimentaires a lieu en présence d’autres personnes, qu’il s’agisse de membres de la famille, d’amis ou encore de collègues : c’est le cas de 80 % des repas en France selon l’enquête CCAF (Comportements et consommations alimentaires des Français) 2007 du Crédoc
2
Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie
(Tavoularis et Mathé, 2010

). Le regard des autres, mais aussi le contrôle social qu’ils peuvent exercer en rapport avec les normes d’alimentation, ont des conséquences sur les pratiques alimentaires (Marshall et Anderson, 2002

). Ils vont ainsi soutenir ou au contraire être un frein au changement alimentaire. Le rôle de ce que les anglo-saxons appellent le «
social support », c’est-à-dire l’appui des proches, apparaît déterminant. Le soutien de la famille, des amis, des collègues dans le changement alimentaire joue par exemple dans l’augmentation de la consommation de fruits et légumes (Pearson et coll., 2009

). Dans cette perspective, la commensalité, c’est-à-dire le fait de manger avec d’autres personnes (Sobal et Nelson, 2003

), apparaît comme un facteur essentiel, en particulier en France, qui pourrait contribuer à limiter la prévalence de l’obésité et les pathologies liées à la nutrition (Fischler, 2011

).
Mais parmi l’ensemble des personnes que nous côtoyons, la famille joue un rôle particulier. Les pratiques alimentaires des enfants sont ainsi fortement influencées par celles des parents, par exemple pour la consommation de fruits et légumes (Pearson et coll., 2009

). L’accessibilité aux produits joue bien sûr, mais aussi la socialisation autour du repas qui se traduit notamment dans le fait que les individus se retrouvent massivement pour prendre leurs repas ensemble. Manger ensemble a ainsi comme effet immédiat de créer du lien entre les commensaux (Fischler, 2011

). C’est le cas en France notamment pour le dîner qui apparaît un des derniers refuges de la sociabilité familiale (Herpin, 1988

). Mais c’est aussi le cas à l’étranger : aux États-Unis, les personnes mangent généralement le petit déjeuner seul, le déjeuner seul ou avec des collègues et le dîner avec les membres du ménage, ces derniers étant ceux avec qui les repas sont le plus souvent pris en commun (Sobal et Nelson, 2003

).
Le choix de ce qui est mangé ou de l’environnement des repas (horaire, lieu, durée…) est le produit d’une décision qui n’est pas purement personnelle, mais dans laquelle entrent en jeu les différents personnes qui prennent part à ce repas (Bove et coll., 2003

). L’introduction d’aliments meilleurs pour la santé par les mères de famille rencontre souvent l’opposition d’autres membres du ménage qui refusent de les manger, plaçant ces dernières dans une situation qui peut être difficile (Connors et coll., 2001

). Or, les femmes de faible niveau éducatif semblent précisément avoir moins de contrôle sur les choix alimentaires de leur famille, mais aussi moins de soutien de la part des autres membres de leur famille pour manger sainement, d’après une étude réalisée à Southampton en Angleterre (Barker et coll., 2008

; Lawrence et coll., 2009

). Plus largement, les femmes les moins diplômées auraient plus de contraintes et moins de marge de manœuvre pour manger sainement que les femmes plus éduquées. Elles auraient également moins d’opportunités pour observer et apprendre des pratiques alimentaires meilleures pour leur santé. La manière dont se nourrit une famille se situe en effet dans un réseau de relations sociales complexe. Un changement de comportement alimentaire d’apparence simple est en réalité souvent complexe, en particulier parce qu’il nécessite des ressources supplémentaires (Nestle et coll., 1998

) : par exemple, une femme qui décide de remplacer un produit qu’elle consomme par un autre meilleur pour sa santé doit trouver un magasin qui le vend. Si son magasin habituel ne le vend pas, elle doit en trouver un autre ou demander à ce qu’il y soit vendu. Elle doit aussi chercher à convaincre les autres membres de sa famille de le manger et si certains préfèrent l’ancien produit, elle doit trouver de l’argent pour se procurer les deux produits ou encore de la place pour stocker les deux produits.
Rôle du cadre temporel des pratiques alimentaires
Les inégalités sociales face à l’alimentation ne se limitent bien évidemment pas à ce qu’il y a dans l’assiette : l’analyse des courses, de la préparation des repas et de la vaisselle est centrale pour la compréhension des pratiques alimentaires, notamment d’une famille. Le choix des aliments ne peut se comprendre qu’en interaction avec les autres activités des membres du ménage. L’alimentation doit être pensée comme s’intégrant au milieu des autres activités et de leurs contraintes (professionnelles, familiales, loisirs…), en particulier dans sa dimension temporelle. En effet, l’absence de certains repas, en particulier du petit déjeuner, semble avoir une influence sur la probabilité d’être obèse (Ma et coll., 2003

).
Depuis les années 1980, les études portant sur l’alimentation et les temps sociaux en France s’intéressent à ce qu’Aymard et coll. (1993

) appellent le « leitmotiv de la modernité alimentaire », à savoir la thèse de la « crise » des repas traditionnels et de leur « déstructuration », qui toucherait en particulier les plus défavorisés. Le « modèle » alimentaire français serait ainsi en voie de disparition, notamment du fait de l’augmentation de l’alimentation hors-repas. Si l’alimentation ne joue plus le même rôle qu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et si « une dévaluation progressive des pratiques alimentaires » a eu lieu au cours des années 1980 (Pynson, 1987

), plusieurs études témoignent cependant du maintien de la grille des repas quotidiens en France (Grignon, 1987

; Herpin, 1988

; Grignon, 1998

; Tavoularis et Mathé, 2010

), mais aussi dans des pays voisins comme par exemple la Belgique (Mestdag, 2005

). Ainsi, les enquêtes « Emploi du temps » réalisées par l’Insee font apparaître une forte synchronisation des pratiques alimentaires des Français autour de trois pics quotidiens (Larmet, 2002

) (figure 10.1

).
La question du temps, en particulier de celui nécessaire à la préparation des aliments, apparaît aujourd’hui encore essentielle dans les différences entre milieux sociaux (Inglis et coll., 2005

). En France, les ouvriers et les employés prennent par exemple leur repas du soir plus tôt que les cadres et professions intellectuelles supérieures et les activités l’encadrant ne sont pas les mêmes (de Saint Pol, 2007

). On observait par ailleurs traditionnellement en France que plus le revenu était bas, plus le temps consacré à la préparation des repas était élevé, mais plus celui consacré à manger était faible (Scholliers, 1993

). De telles différenciations sociales en termes de temps consacré à l’alimentation sont également observées à l’étranger (Cheng et coll., 2007

). De la même manière, l’évolution du temps consacré à l’alimentation par les ouvriers en Europe aux XIX
e et XX
e siècles reflète les changements d’organisation et les contraintes liées à l’activité professionnelle qui pèsent sur le temps consacré aux repas par les ouvriers et conduisent notamment à une plus forte différenciation avec l’alimentation des agriculteurs par exemple (Scholliers, 1993

). Les modifications du temps alloué à l’alimentation sont ainsi des indicateurs des changements de contraintes et normes sociales qui amènent les différents groupes sociaux à organiser leurs pratiques différemment.
Par ailleurs, la France se caractérise par un fort synchronisme alimentaire (de Saint Pol, 2007

) : à 12h30, 54 % des français sont en train de manger, contre 18 % des Britanniques (figure 10.1

). L’analyse des enquêtes « Emploi du temps » du Royaume-Uni, des États-Unis, de la Norvège et de la Hollande, en comparaison avec celle de la France fait apparaître des évolutions communes, comme le déclin du temps consacré à la préparation des repas (Warde et coll., 2007

). Toutefois, la France se distingue par l’importance du temps passé à manger à la maison : alors qu’il décroît dans les quatre autres pays étudiés, ce n’est pas le cas en France. Ainsi non seulement, les Français mangent en moyenne plus souvent à la même heure, à la maison, mais aussi ensemble (Poulain, 2002b

).
Représentations de l’alimentation et inégalités sociales
L’alimentation constitue également un langage social. Claude Lévi-Strauss soulignait que « la cuisine d’une société est un langage dans lequel elle traduit inconsciemment sa structure, à moins que sans le savoir davantage, elle ne se résigne à y dévoiler ses contradictions. » (Lévi-Strauss, 1968

). C’est vrai plus généralement de l’alimentation et de son organisation.
Ce qu’on exprime à travers la consommation alimentaire
L’Homme ne mange pas que des aliments mais aussi des symboles, de l’imaginaire (Corbeau et Poulain, 2002

). Les travaux des anthropologues ont mis en lumière cette dimension dans de nombreuses sociétés. Chez les Massaï par exemple, le fait que le lait soit considéré comme un aliment privé et la viande un aliment public qui peut être partagé et mangé en dehors du foyer renvoie aux différentes représentations sociales du féminin et du masculin et à leur place dans la société (Arhem, 1989

). Il en est de même en France du symbolisme du lait en lien avec la maternité, ou du rapport à la viande reliée à la force dans les milieux populaires. Ainsi, la perception des aliments pourrait jouer un rôle dans la compréhension des inégalités sociales face à l’alimentation. C’est le cas en particulier de la perception du caractère sain ou malsain des aliments consommés et de l’appréciation calorique qu’en font les mangeurs (Carels et coll., 2007

). Cette étude américaine qui repose sur l’évaluation par des étudiants de premier cycle du caractère bon ou non pour la santé de cinq aliments fait apparaître que l’apport calorique des aliments considérés comme malsains est surestimé alors que l’apport de ceux perçus comme sains est sous-estimé. Mais le rôle de la perception des aliments sur les choix alimentaires apparaît important de manière générale chez les adultes : les calories ingérées apparaissent sous-estimées lorsque les aliments sont perçus comme meilleurs pour la santé (Chandon et Wansink, 2007

).
Plus généralement, les représentations sociales, qui sont des manières institutionnalisées et validées par la collectivité, de juger les produits et de les utiliser, influencent notre alimentation. Ainsi, la consommation d’un produit, le beurre par exemple, est associée positivement à des modes d’utilisation pratique du produit (Lalhou, 1998

). À l’inverse, la non-consommation d’un produit répond à des associations négatives de ce produit. Ces associations peuvent évoluer dans le temps et être différentes selon les milieux sociaux. Un produit comestible dans une société peut devenir non comestible et même entraîner le dégoût lorsque les représentations évoluent. C’est le cas par exemple du lapin, dont la représentation a évolué, notamment par le biais des dessins animés et des peluches, et l’a transformé en animal de compagnie, trop proche pour être consommé (Merdji, 2002

).
Lorsque nous mangeons, nous utilisons ainsi des codes et des règles propres à notre culture et à nos sous-cultures (familiales, professionnelles, ethniques...). Ces codes définissent la quantité et la combinaison d’aliments choisis, mais aussi quels aliments sont acceptables et préférables ou encore comment on peut les manger. Par exemple, le fait que les enfants puissent ou non se servir dans le réfrigérateur ou que toute la famille mange ensemble ou non à table. De même, les tabous sur la consommation de divers produits sont fréquents et certaines préparations culinaires valorisées dans une culture suscitent le dégoût des autres. Les perceptions alimentaires changent ainsi non seulement dans le temps, entre groupes sociaux, mais aussi entre cultures.
Variété des codes culturels
Le lien que les personnes établissent entre alimentation et santé est très variable selon les cultures. L’étude de la France, de la Belgique flamande, du Japon et des États-Unis fait apparaître, selon les cultures, la prédominance des questions de santé dans l’alimentation ou des questions relatives au plaisir (Rozin et coll., 1999

). Les Français sont ainsi ceux qui privilégient le plus la dimension de plaisir dans leur alimentation et le moins les questions de santé, en revanche fortement privilégiées par les Américains, le Japon se situant entre ces deux pôles. Ainsi, l’alimentation aux États-Unis est pensée avant tout en termes nutritionnels, voire scientifiques (Fischler et Masson, 2008

). C’est beaucoup moins le cas en Europe. En Italie, bien manger, c’est généralement manger des produits frais et naturels avec une prédominance du rapport à la nature. En France, c’est l’importance des repas partagés et conviviaux, avec une prédominance des notions de sociabilité et de plaisir qui apparaît déterminante (Fischler et Masson, 2008

). Respecter les repas est ainsi perçu par les Français comme une des clés du « bien manger » (Lahlou, 1998

).
Ces différences culturelles observées à l’échelle d’une société se retrouvent d’ailleurs au sein de la population des médecins. Une étude conduite en France, en Allemagne, en Italie, au Royaume-Uni et aux États-Unis révèle que, du point de vue du lien entre alimentation et santé, les médecins ressemblent plus aux personnes de leur pays qu’aux médecins des autres pays (Leeman et coll., 2011

). Cela joue bien sûr dans la perception du bénéfice d’une bonne alimentation sur la santé, et donc le respect des normes nutritionnelles.
Perceptions différentes du lien entre alimentation et santé selon le milieu social
Si la France semble avoir une perception du lien entre alimentation et santé singulière, moins directement reliée à la santé que dans d’autres pays, y existe-t-il des différences entre groupes sociaux qui permettraient de mieux comprendre les inégalités sociales face à l’alimentation ?
Différences de perception entre les catégories aisées et modestes
Reposant sur 85 entretiens semi-directifs, l’étude réalisée par Régnier et Masullo est l’une des rares études sur lesquelles il est possible de s’appuyer pour analyser précisément les liens entre alimentation et santé selon le milieu social en France. Cette étude fait apparaître que la perception de ce lien varie fortement d’un milieu social à l’autre en France (Régnier et Masullo, 2009

). Il semble que les milieux favorisés considèrent le rapport entre alimentation et santé dans une optique préventive. La santé, reliée à l’alimentation, est pensée sur le long terme. Les choix alimentaires apparaissent guidés non pas par des impératifs économiques, mais « diététiques », avec l’idée que la mise en œuvre des recommandations nutritionnelles est nécessaire et qu’elles valent pour toute la famille. Dans les milieux les plus modestes
3
Par « modestes », leurs auteurs entendent dans cette étude les « employées, ouvrières, inactives mariées à un ouvrier, chômeurs et Rmistes », qui est distingué d’un groupe encore plus « précaire ».
en revanche, il semble que le rapport entre alimentation et santé est plus souvent pensé à court terme et dans une optique curative et la question de la santé apparaît moins associée aux pratiques alimentaires. Mais il existe également des différences de genre qui doublent les différences entre milieux sociaux : les femmes sont plus sensibles à la dimension de santé dans l’alimentation que les hommes, ces derniers privilégiant la dimension de plaisir, et cela aussi bien en France, qu’aux États-Unis ou au Japon (Rozin et coll., 1999

).
Différences de rapport aux normes nutritionnelles selon les milieux sociaux
Les univers de valeurs des divers groupes sociaux sont différents et les messages se référant à la santé sont reçus très différemment selon le milieu social. Par exemple, dans tous les milieux sociaux, la consommation de Coca Cola apparaît comme devant être limitée, mais pour les cadres cette consommation est perçue comme devant être exceptionnelle, alors que les employés fixent plus volontiers une limite de deux verres par jour (Régnier et Masullo, 2009

). Cela a des conséquences sur l’alimentation des enfants : chez les plus aisés, l’alimentation des enfants semble souvent faire partie intégrante de la démarche éducative, du rapport au corps et à la santé et ainsi de la surveillance de l’alimentation et de la corpulence de l’enfant (Régnier et Masullo, 2009

). Chez les familles plus modestes, il s’agit généralement de s’assurer que les enfants mangent en abondance et de satisfaire leurs envies, les préoccupations liées à l’alimentation des enfants visant avant tout leur croissance et la constitution d’un corps solide. Pour les plus modestes, l’alimentation apparaît aussi comme un moyen de faire plaisir à leurs enfants et de compensation face aux difficultés du quotidien. Certains auteurs voient également dans le rapport à l’alimentation des plus modestes une revanche sur les frustrations antérieures (Corbeau, 1995

).
Les normes nutritionnelles sont reçues très différemment selon le milieu social, avec en France des oppositions que traduit très schématiquement la figure 10.2

. Le rapport à l’alimentation des milieux populaires peut ainsi se trouver en contradiction avec le suivi des normes nutritionnelles. Ces normes semblent perçues comme trop nombreuses, contradictoires, et surtout déconnectées de leurs pratiques quotidiennes et de leurs savoirs (Régnier et Masullo, 2009

). L’alimentation constitue en effet un espace où se forgent les goûts et les identités collectives et il apparaît essentiel que les politiques publiques tiennent compte de ces différents rapports à l’alimentation.
Alimentation et représentations sociales du corps
Les différences de représentations et de pratiques alimentaires entre milieux sociaux se traduisent dans les corps et se donnent à voir quotidiennement dans l’apparence des individus, à la fois marqueur d’appartenance et instrument de distinction (Bourdieu, 1977

; Shilling, 2003

). C’est pourquoi une réflexion sur les pratiques alimentaires et leurs différenciations sociales ne peut faire l’économie de la question du corps et de ses représentations.
Différences sociales de représentations du corps
Lorsqu’un inconnu se présente à nous, ses premières apparitions nous permettent généralement d’identifier dans une large mesure la catégorie sociale à laquelle il appartient (Goffman, 1975

). On peut lire sur le corps d’un individu son identité sociale, ou du moins des éléments qui la symbolisent. L’ensemble de ses caractéristiques, parmi lesquelles on trouve bien sûr la corpulence, joue le rôle de marqueurs. Il existe un « code des apparences » (Le Wita, 1988

). Il ne s’agit alors plus seulement du corps dans sa réalité biologique, mais de l’image qu’il renvoie : son apparence.
Notre expérience quotidienne, mais aussi notre rapport aux autres, sont nécessairement véhiculés par notre corps. La manière dont le corps apparaît à soi-même et aux autres est ainsi un véritable enjeu social dans la mesure où il traduit ce que l’individu est pour la société (Shilling, 2003

). Depuis le XVII
e siècle, il existe par exemple en France une différenciation sociale des silhouettes, d’abord marquée par l’opposition entre « rectitude » et « relâchement » puis entre « maigreur » et « rondeur », qui trouve son pendant dans les pratiques alimentaires des différents milieux sociaux (Vigarello, 2004

). Ce qui est jugé désirable varie toutefois fortement en fonction de l’époque, de la culture et des milieux sociaux (Perrot, 1991

). Il n’y a pas si longtemps, en France au XIX
e siècle, c’est une corpulence élevée qui était généralement préférée, notamment par opposition à la minceur des plus pauvres qui rencontraient des difficultés pour se nourrir. La situation s’est inversée aujourd’hui et les classes populaires valorisent plutôt la « force », associé à une forte corpulence, tandis que les classes plus favorisées valorisent plutôt la « forme » (Bourdieu, 1979

) et donc la minceur, opposition que l’on retrouve aussi dans une certaine mesure entre hommes et femmes. De ces valeurs découlent différents usages du corps qui contribuent à le modeler, mais aussi différentes manières de s’alimenter. Parce qu’ils partagent les mêmes représentations et les pratiques qui en découlent, les individus d’un groupe social portent dans leur chair l’empreinte de cette identité commune.
L’activité professionnelle, par exemple, modèle et transforme le corps. C’est le cas bien sûr par la dimension physique de l’activité et par le développement musculaire qu’elle peut impliquer, et plus généralement par l’ensemble des conditions de travail (nature des tâches effectuées, posture, accidents, rôle de l’apparence...), ce qui a également des conséquences sur l’alimentation. En effet, non seulement le corps est marqué par le travail, mais le degré d’utilisation professionnelle du corps influence le rapport établi par l’individu à son corps et sa manière de s’alimenter. Ainsi l’expérience que les classes populaires ont de leur corps tient traditionnellement en France à l’expérience que ses membres ont de leur force physique, ce qui les amène à privilégier des aliments « nourrissants » et « fortifiants » (Boltanski, 1971

). Dans son étude du « monde privé » des ouvriers, Olivier Schwartz met en avant le statut « dénarcissisé » du corps qui caractérise selon lui les femmes de la population ouvrière en France (Schwartz, 1990

). Le corps apparaît d’abord comme un instrument de travail et est principalement utilisé comme tel, à la fois pour les hommes et pour les femmes. Ces dernières se préoccupent moins de le soigner ou de le mettre en valeur comme porteur d’une image ou instrument de séduction que les femmes situées en haut de la hiérarchie sociale, ce qui participe aux différenciations sociales des pratiques alimentaires et au rapport différent à la santé.
Inégalités de corpulence
Si l’obésité a des conséquences directes sur la santé et constitue aujourd’hui un enjeu majeur de santé publique, la corpulence des individus est un caractère physique très particulier, mêlant étroitement des questions d’apparence et de santé dans lesquelles l’alimentation tient une place prépondérante (Fischler, 1990

; Poulain, 2009

). La corpulence, parce que l’individu en apparaît généralement responsable, joue un rôle particulier dans les interactions et la construction des identités sociales. Si la corpulence a fortement augmenté en France depuis les années 1990, cette évolution n’a pas touché de façon égale tous les groupes sociaux (de Saint Pol, 2009

). En moyenne, plus un individu est diplômé, plus il est mince et par conséquent moins il a de risques d’être obèse. En 2008, 17 % des adultes sans diplôme ou ayant au plus un brevet des collèges sont obèses en France, contre seulement 6 % des diplômés du supérieur. Ces disparités selon les milieux sociaux se doublent d’un effet de genre : les inégalités sont plus fortes pour les femmes (de Saint Pol, 2010

). De plus, alors que pour les hommes une forte corpulence peut également aller de pair avec un statut social ou un revenu élevé, on constate que les femmes les moins bien payées ou vivant dans les milieux les plus défavorisés sont presque systématiquement les plus corpulentes. Ces inégalités plus fortes chez les femmes sont retrouvées dans de nombreux pays à différents âges, par exemple au Royaume-Uni pour des enfants entre 5 et 14 ans (Kinra et coll., 2000

) ou aux États-Unis chez les 18-60 ans (Zhang, 2004

).
Les choix alimentaires doivent également se comprendre en rapport avec les représentations du corps désirable, c’est-à-dire les idéaux corporels qui définissent ce qui est considéré comme un corps beau ou sain dans nos sociétés. La perception de la corpulence varie en effet fortement entre milieux sociaux, et entre hommes et femmes. En France, chez les cadres, il y a moins de tolérance du surpoids chez l’enfant, alors que chez les familles les plus modestes, les rondeurs enfantines apparaissent plus tolérées (Régnier et Masullo, 2009

). De la même manière, aux États-Unis, il apparaît que les femmes des minorités afro-américaines et hispaniques perçoivent leur enfant plus mince qu’il n’est en réalité (Killion et coll., 2006

).
Les ressources économiques et culturelles influencent les représentations et les pratiques corporelles, notamment alimentaires, mais le corps et ses formes jouent également sur le niveau de revenu ou le quotidien des hommes et des femmes. De nombreuses études font en effet apparaître la manière dont l’apparence physique influe sur la vie des individus et par exemple leur carrière professionnelle (Hamermesh et Biddle, 1994

). La beauté, et en particulier la minceur, peut ainsi apparaître aujourd’hui pour les femmes comme une sorte de diplôme supplémentaire que le marché du travail reconnaît financièrement (Amadieu, 2002

). À l’inverse, les discriminations dont sont victimes les obèses sont observées dans toutes les dimensions de la vie sociale (Sobal et Stunkard, 1989

), certaines populations cumulant des handicaps liés à leur santé, des handicaps sociaux (sur le marché du travail par exemple) et même des handicaps psychologiques liés par exemple à une mésestime de soi (Sargent et Blanchflower, 1994

; Myers et Rosen, 1999

; Paraponaris et coll., 2005

). Alimentation et corpulence constituent ainsi un mode de distinction entre groupes sociaux, mais aussi entre hommes et femmes. Ce critère de distinction sociale ne tient pas seulement aux différences économiques, mais également, et peut-être surtout, à la manière dont sont construites les inégalités sociales dans nos sociétés contemporaines.
En conclusion, il apparaît indispensable que les politiques et interventions publiques en matière d’alimentation ne se concentrent plus sur le seul niveau individuel des comportements, mais qu’elles prennent également en compte les dimensions collectives et identitaires des pratiques alimentaires qui font l’objet de « prescriptions sociales ». La pratique alimentaire varie d’une culture à l’autre, mais aussi d’un groupe social à l’autre au sein d’une même société. Les différences de consommation reflètent des différences de ressources économiques, mais aussi de niveau d’éducation ou de connaissances, de règles, de croyances, de valeurs, de représentations et de perceptions, notamment le lien entre alimentation et santé. Elles se doublent d’un effet de genre : hommes et femmes ne consomment pas en moyenne la même chose.
Il convient de ne pas oublier que les inégalités sociales face à l’alimentation portent aussi bien sur les aliments consommés que sur les modes d’alimentation (rythmes, horaires, lieu, préparation et contexte des prises alimentaires…) et qu’il est nécessaire de prendre en compte ces deux dimensions. Les études sur ces aspects sont peu nombreuses en France et restent à développer. Enfin, la question des inégalités sociales face à l’alimentation n’est pas qu’un problème de santé. Les questions de conditions de vie, de pauvreté, de sociabilité, d’apparence sont indissociables des questions d’alimentation. Les politiques publiques ne doivent pas se limiter à la question de l’alimentation, mais également prendre en compte et intervenir sur les dimensions associées.
Thibaut de Saint Pol
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