Activité physique et prévention des chutes chez les personnes âgées

2015


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Annexe 1

Expertise collective Inserm : principes et méthode

L’Expertise collective Inserm1 a pour mission d’établir un bilan des connaissances scientifiques sur un sujet donné dans le domaine de la santé à partir de l’analyse critique de la littérature scientifique internationale. Elle est réalisée à la demande d’institutions (ministères, organismes d’assurance maladie, agences sanitaires…) souhaitant disposer des données récentes issues de la recherche utiles à leurs processus décisionnels en matière de politique publique.
L’expertise collective est une mission de l’Inserm depuis 1994. Près de quatre-vingts expertises collectives ont été réalisées dans de nombreux domaines de la santé. L’Inserm est garant des conditions dans lesquelles l’expertise est réalisée (pertinence des sources documentaires, qualification et indépendance des experts, transparence du processus) en accord avec sa Charte de l’expertise qui en définit la déontologie2 .
Le Pôle Expertise collective Inserm rattaché à l’Institut thématique multi-organismes Santé publique d’Aviesan3 assure la coordination scientifique et technique des expertises selon une procédure établie comprenant six étapes principales.

Instruction de la demande du commanditaire

La phase d’instruction permet de préciser la demande avec le commanditaire, de vérifier qu’il existe une littérature scientifique accessible sur la question posée et d’établir un cahier des charges qui définit le cadrage de l’expertise (périmètre et principales thématiques du sujet), sa durée et son budget à travers une convention signée entre le commanditaire et l’Inserm. La demande du commanditaire est traduite en questions scientifiques qui seront discutées et traitées par les experts.

Constitution d’un fonds documentaire

À partir de l’interrogation des bases de données bibliographiques internationales et du repérage de la littérature grise (rapports institutionnels…), des articles et documents sont sélectionnés en fonction de leur pertinence pour répondre aux questions scientifiques du cahier des charges, puis sont remis aux experts. Ce fonds documentaire est actualisé durant l’expertise et complété par les experts selon leur champ de compétences.

Constitution du groupe multidisciplinaire d’experts

Pour chaque expertise, un groupe d’experts de 10 à 15 personnes est constitué. Sa composition tient compte d’une part des domaines scientifiques requis pour analyser la bibliographie et répondre aux questions posées, et d’autre part de la complémentarité des approches et des disciplines.
Les experts sont choisis dans l’ensemble de la communauté scientifique française et parfois internationale. Ce choix se fonde sur leurs compétences scientifiques attestées par leurs publications dans des revues à comité de lecture et la reconnaissance par leurs pairs. Les experts doivent être indépendants du partenaire commanditaire de l’expertise et de groupes de pression reconnus. Chaque expert doit compléter et signer avant le début de l’expertise une déclaration de lien d’intérêt conservée à l’Inserm.
La composition du groupe d’experts est validée par la Direction de l’Institut de santé publique d’Aviesan.
Le travail des experts dure de 12 à 18 mois selon le volume de littérature à analyser et la complexité du sujet.

Analyse critique de la littérature par les experts

Au cours des réunions d’expertise, chaque expert est amené à présenter son analyse critique de la littérature qui est mise en débat dans le groupe. Cette analyse donne lieu à la rédaction des différents chapitres du rapport d’expertise dont l’articulation et la cohérence d’ensemble font l’objet d’une réflexion collective.
Des personnes extérieures au groupe d’experts peuvent être auditionnées pour apporter une approche ou un point de vue complémentaire. Selon la thématique, des rencontres avec les associations de la société civile peuvent être également organisées par le Pôle Expertise collective afin de prendre connaissance des questions qui les préoccupent et des sources de données dont elles disposent.

Synthèse et recommandations

Une synthèse reprend les points essentiels de l’analyse de la littérature et en dégage les principaux constats et lignes de force.
La plupart des expertises collectives s’accompagnent de recommandations d’action ou de recherche destinées aux décideurs. Les recommandations, formulées par le groupe d’experts, s’appuient sur un argumentaire scientifique issu de l’analyse. L’évaluation de leur faisabilité et de leur acceptabilité sociale n’est généralement pas réalisée dans le cadre de la procédure d’expertise collective. Cette évaluation peut faire l’objet d’un autre type d’expertise.

Publication de l’expertise collective

Après remise au commanditaire, le rapport d’expertise constitué de l’analyse, de la synthèse et des recommandations, est publié par l’Inserm.
En accord avec le commanditaire, plusieurs actions de communication peuvent être organisées : communiqué de presse, conférence de presse, colloque ouvert à différents acteurs concernés par le thème de l’expertise (associations de patients, professionnels, chercheurs, institutions…).
Les rapports d’expertise sont disponibles en librairie et sont accessibles sur le site Internet de l’Inserm4 . Par ailleurs, la collection complète est disponible sur iPubli5 , le site d’accès libre aux collections documentaires de l’Inserm.


Annexe 2

Cahier des charges pour un programme d’exercices collectifs : proposition du groupe d’experts

Le cahier des charges proposé ne comprend pas une liste exhaustive des possibilités mais le contenu minimum de ce type de programme.
Le groupe d’experts préconise au minimum une évaluation initiale et une évaluation finale destinées à mesurer l’efficacité individuelle des différents aspects du programme.

Bases des exercices

La construction d’un programme d’exercices dans le cadre de la prévention de la chute doit s’appuyer sur les théories du contrôle moteur et de la posture. Elle repose sur l’adaptation des comportements posturaux, la compensation des déficits sensoriels par les autres entrées sensorielles et/ou des déficits moteurs par l’utilisation de synergies motrices nouvelles ou utilisées dans d’autres situations. L’adaptation des comportements posturaux permet la mise en place de nouvelles réponses à une même situation. Elle a pour but de favoriser l’élaboration de nouvelles stratégies se substituant aux fonctions déficitaires.
Les exercices doivent, en premier lieu, mettre l’accent sur l’amélioration de l’équilibre dynamique, lors de mouvements volontaires mais aussi dans le cas de perturbations imprévisibles. Ce volet a pour but de permettre de retrouver ou de préserver la palette des stratégies de réaction au déséquilibre en fonction du contexte (équilibre statique/dynamique, mouvement actif/passif, sol dur/mou, environnement visuel stable/en mouvement).
Un autre point essentiel consiste à favoriser les interactions et compensations sensorielles en activant simultanément les différentes entrées sensorielles par des mouvements du sujet et/ou de son environnement.
Pour compléter ce programme, les exercices de marche sous des formes variées et d’équilibre devront être exécutés en condition de double-tâche.
Enfin, le renforcement musculaire, fondé sur des exercices en puissance, doit être privilégié afin de favoriser des réponses rapides lors des déséquilibres.

Évaluation de la personne âgée

Il s’agit de tests cliniques simples, validés et fiables pouvant être réalisés sans équipement particulier.

Équilibre

Le test TUG (Timed Up and Go Test), la vitesse de marche et l’échelle de Berg sont cités ici à titre d’exemple. Le TUG et la vitesse de marche pourront être également réalisés en double-tâche, la mobilisation de l’attention entre deux tâches différentes correspondant à des situations très courantes dans la vie quotidienne. Pour cela, demander à la personne de raconter une histoire, de citer des noms de fleurs ou de compter à rebours tout en réalisant le test. La double-tâche repose sur le fait que les personnes qui présentent un risque de chute plus important ont des difficultés à partager leur attention entre deux tâches différentes, ce qui dans la vie quotidienne est très courant (par exemple, parler et marcher en même temps).

Fonction musculaire

Nombre d’assis-debout en 30 secondes : test de force et de puissance musculaire des membres inférieurs

Souplesse articulaire

Appréciation clinique de la mobilité de la tibio-tarsienne

Endurance

Test des 6 minutes : périmètre de marche parcouru en 6 minutes
Observation des signes de fatigue lors de la répétition d’exercices

Peur de tomber

Exemple : Falls Efficacy Scale International (FES-I)
Si la perspective est de s’inscrire dans des travaux de recherche, des évaluations plus élaborées devront être réalisées.

Contenu des séances et mise en Ĺ“uvre

Équilibre

Les axes principaux sont les suivants :
• optimiser le fonctionnement sensoriel afin de mettre en jeu l’aspect fondamentalement multisensoriel de l’équilibre et de favoriser la compensation des informations sensorielles déficitaires. Le maintien de l’équilibre pourra être réalisé sur différentes surfaces, dans différentes conditions visuelles, lors de mouvements volontaires ou en réponse à des mouvements imposés ;
• développer ou ré-adapter les stratégies posturales (hanche, cheville, pas de rattrapage...) et supprimer les stratégies inadaptées (par exemple : rigidification du corps sur un sol instable) ;
• déplacer volontairement le centre de masse ;
• résister à des forces extérieures ;
• favoriser les ajustements posturaux anticipés lors de mouvements rapides par exemple des membres supérieurs ;
• diversifier les exercices de marche : varier la vitesse et la direction, alterner petits pas et grands pas, tâches additionnelles (marcher en tournant la tête plus ou moins rapidement) ;
• réaliser des exercices de marche et d’équilibre (exemple sur trampoline) ou des ajustements posturaux anticipés en condition de double-tâche. Le but est d’induire un partage de l’attention sur chacune des deux tâches ;
• susciter l’intérêt et la motivation par des interactions (par exemple par la danse : valse, tango...).
Bien que l’effet/dose de l’ensemble de ces techniques ne soit pas précisément renseigné dans la littérature, on peut estimer qu’environ 50 h soit 2 heures par semaine sont nécessaires pour une bonne efficacité, pour une durée d’au moins 6 mois.

Souplesse articulaire

Échauffement de l’ensemble des articulations
Mobilisation active spécifique des articulations tibio-tarsiennes
Si possible, mobilisation de la tête dans l’espace en évitant les amplitudes extrêmes.

Fonction musculaire

Travail musculaire en puissance des muscles des membres inférieurs, quadriceps, stabilisateurs du bassin, fléchisseurs dorsaux et plantaires de la cheville

Endurance

Marche rapide, augmentation de la distance parcourue

Relever du sol

La capacité à se relever du sol se situe aux confins de la conservation des automatismes, des possibilités articulaires et musculaires, de l’adaptation à l’effort et de la peur de tomber.
La progression se fera en fonction des capacités individuelles.

Évaluation

Réévaluer périodiquement (tous les 3 à 6 mois) le suivi des séances, leur impact ; ce peut être :
• un questionnaire sur les incapacités. Cette intervention peut être faite par du personnel clinique ou des bénévoles entraînés ;
• un questionnaire de satisfaction des chuteurs eux-mêmes, sans oublier l’avis des aidants pour augmenter l’observance des séances ;
• des indicateurs simples (TUG, nombre d’assis-debout en 30 secondes, nombre de chutes/mois, peur de tomber, aide technique délaissée du fait d’une réassurance positive…).



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