Diabète
Pourquoi les artères font de la résistance

Les responsables des troubles vasculaires chez les diabétiques de type 2 viennent enfin d'être identifiés. Il s'agit des composés AGEs, fruits de l'alliance d'un sucre et d'une protéine. Des cibles de choix pour de nouveaux traitements prévenant les complications graves.

Diabéte de type 2.L’endothélium d’une artère de résistance contrôle son diamètre artériel en synthétisant des agents chimiques et pharmacologiques sur le muscle lisse. Le diabète induit la modification des enzymes ce qui empêche ainsi l’artère de s’adapter au débit sanguin.
Ⓒ Auteur inconnu/BNM/Unité 1083 Inserm/Inserm
Chez les diabétiques de type 2, l'excès de glucose dans le sang risque d'endommager progressivement les artères de résistance, ces petits vaisseaux qui irriguent nos tissus. Les problèmes de micro circulation qui en découlent peuvent détériorer certains organes et entraîner des complications graves comme une cécité ou une insuffisance rénale. Le risque de maladies cardio vasculaires s'en trouve également accru. Il est donc primordial de mieux comprendre l'effet du diabète sur ces artères pour développer de nouvelles approches thérapeutiques et prévenir ces complications.
C'est tout l'objet des travaux menés par l'équipe de Daniel HenrionDaniel Henrion
Unité 1083 Inserm/Université d'Angers
au laboratoire de Biologie neuro vasculaire et mitochondriale intégrée, à Angers. Les chercheurs se sont penchés sur la façon dont réagit l'endothélium - cette couche interne des vaisseaux - à une augmentation chronique de débit sanguin. En contact direct avec le sang, elle est sensible aux changements de débit et permet à l'artère de modifier sa taille et son épaisseur en cas de besoin. Si l'augmentation de débit est chronique, par exemple lors d'une activité physique quotidienne, les artères se dilatent de façon permanente. Pourtant les vaisseaux des diabétiques ne s'adaptent pas à cette augmentation chronique.
Pourquoi ? « Chez les diabétiques, l'excès de glucose dans le sang provoque des réactions de glycation des protéines, quelles qu’elles soient : un sucre s'accroche à leur structure et altère ainsi leurs propriétés, explique Daniel Henrion. Nous pensions que les composés qui en résultent, dénommés produits de glycation avancés (AGE), jouaient un rôle dans l'absence d'adaptation des artères des diabétiques. »
Pour vérifier cette hypothèse, son équipe a traité de jeunes rats diabétiques avec une molécule (ALT-711) qui dégrade ces AGEs. Résultat : en trois semaines, le fonctionnement normal des artères est restauré. « Pour modifier la structure de l'artère, l'endothélium libère des enzymes, les métalloprotéases, qui digèrent les protéines de la matrice extracellulaireMatrice extracellulaire
Structure complexe composée de macromolécules remplissant les espaces entre les cellules, et qui facilite leur adhésion et leur organisation en tissus.
. Or, les AGEs inhibent ces enzymes, ce qui pourrait expliquer l'adaptation vasculaire déficiente des diabétiques. Il est aussi possible que les protéines ciblées par ces enzymes soient plus difficiles à fractionner lorsqu'un sucre y est accroché »
, ajoute le chercheur.
Ces résultats confirment donc que les AGEs perturbent spécifiquement la capacité d'ajustement des artères de résistance au changement de débit sanguin, ce qui entraîne une détérioration importante de leur fonctionnement. Une découverte fondamentale qui permet d'envisager des traitements qui cibleraient ces composés et leurs actions sur les métalloprotéases afin de rétablir un fonctionnement vasculaire normal chez les diabétiques de type 2.

Simon Pierrefixe