Nous avions relaté l’an dernier dans ces colonnes la réponse d’Arnie (alias Arnold Schwarzenegger, gouverneur de Californie) à l’intransigeance du président des États-Unis de cette époque, G.W. Bush, qui interdisait toute utilisation de fonds fédéraux pour financer un travail sur les cellules souches embryonnaires humaines [ 1]. Arnie avait répondu en lançant en novembre 2004 un énorme emprunt (appelé proposition 71) de 3 billions de dollars (soit trois milliards de dollars pour les francophones) dans l’état de Californie pour soutenir cette recherche. C’est la mission du CIRM (California Institute for Regenerative Medecine 1) créé début 2005 de sélectionner et gérer les programmes soutenus par cet emprunt. Le premier plan stratégique publié avait pour objectif d’aboutir dans les 10 ans à au moins un essai clinique de phase I utilisant des cellules souches embryonnaires. Le CIRM alloue environ 300 millions de dollars par an à la recherche, et ce jusqu’en 2016, date à laquelle son contrat s’achève. La poursuite de l’aventure dépendra des industriels et du capital-risque, il faudra donc convaincre les financeurs des bénéfices acquis au cours de la première décennie. Il ne faut pas oublier que ce sont les habitants de Californie qui financent cet emprunt, ils attendent donc de pied ferme les traitements efficaces qu’on leur a promis et restent très insensibles au nombre d’articles publiés dans Nature ou Cell.
En décembre 2009, 328 projets avaient été financés pour un total de un milliard de dollars (ou un billion pour les anglophones). Ils incluaient des programmes de recherche dont certains dits « seed » (aventureux), des programmes d’enseignement, l’installation de nouvelles équipes en Californie, ou encore la construction de nouveaux bâtiments ou de plateformes technologiques (rappelons qu’en 2006, il était interdit d’utiliser une pipette payée avec des fonds fédéraux pour manipuler des CSEh, encore moins une paillasse d’un laboratoire financé par le NIH, ce qui compliquait singulièrement la vie quotidienne des chercheurs).
Pour accélérer le passage à la clinique, le CIRM lançait en octobre dernier un appel d’offres intitulé Disease Team Research Awards doté de 250 millions de dollars. L’appel d’offres s’adressait à des équipes multidisciplinaires, associant chercheurs académiques et industriels, dont le projet doit être « translationnel » et aboutir dans les 4 ans au dépôt à la FDA d’un dossier d’autorisation d’essai clinique. Pour cette opération, le CIRM s’est associé au Medical Research Council britannique et au Cancer Stem Cell Consortium canadien qui contribuent à hauteur de 8 M$ et 35 M$ respectivement. Il s’agit d’encourager « creative uses of stem cells and encouraged investigators to aim higher and bite off bigger chunks than in most grant applications ». Ce langage imagé et difficilement traduisible se doit de motiver les troupes.
Les résultats de l’appel d’offres sont commentés dans Cell [ 2] et accessibles sur le site du CIRM. Quatorze équipes multidisciplinaires (réunissant obligatoirement cliniciens, chercheurs et industriels) vont se partager le pactole (le plus petit financement est de 5,5 M$ et le plus important de 20 M$). Elles ont été sélectionnées en priorité sur l’adéquation de leur projet à l’exigence requise de la soumission à la FDA d’un protocole d’application clinique utilisant les cellules souches, ce qui est anticipé pour 75 % de projets. Comme pour tout programme à long terme financé par le CIRM, la progression des résultats est évaluée chaque année par un comité d’experts n’appartenant pas au CIRM, et des décisions « go/no-go » sont énoncées, dont certaines aboutissent à la cessation du financement si les progrès sont jugés insuffisants.