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Published online 2010 March 15. doi: 10.1051/medsci/2010263319.

Approche « vie entière » dans l’étude du vieillissement cognitif

Séverine Sabia,1 Joël Ankri,2,3 and Archana Singh-Manoux1,2,4*

1Inserm U687, Hôpital Paul Brousse, 16, avenue Paul Vaillant Couturier, bâtiment 15/16, 94807 Villejuif Cedex, France
2Centre de gérontologie, Hôpital Sainte-Perrine, AP-HP, Paris
3EA 2506, Université de Versailles, Saint-Quentin en Yvelines, France
4Department of Epidemiology and Public Health, University College London, Londres, Royaume-Uni
Corresponding author.
 

Dans les pays développés, la prévalence de la démence est de 1,5 % chez les personnes âgées de 65 ans, et cette proportion double tous les quatre à cinq ans pour atteindre plus de 30 % chez les personnes âgées de plus de 80 ans [ 1, 2]. Par conséquent, avec le vieillissement actuel de la population, on peut s’attendre à ce que le nombre de cas de démence dans le monde, aujourd’hui estimé à 24 millions, triple d’ici 2040 [2, 3]. La majorité des cas de démence survient chez les personnes âgées [ 4]. Parmi les facteurs de risque bien établis, l’âge est le facteur principal. La question est alors de déterminer si l’exposition aux facteurs de risques potentiels intervient seulement à un âge avancé ou tout au long du parcours de vie. Ce que nous comprenons actuellement de la démence tendrait plutôt à privilégier le second scénario. L’existence d’un déclin progressif des fonctions cognitives précédant le diagnostic de la démence a été mise en évidence [3, 57], d’où la nécessité de mieux étudier et de mieux comprendre ce qui se passe sur le plan cognitif en amont de l’état pathologique. Cet article a deux objectifs : (1) présenter les recherches sur la démence et le vieillissement cognitif qui ont transformé l’approche de l’étude du vieillissement cognitif ; (2) illustrer cette nouvelle approche à partir des résultats issus de la cohorte britannique Whitehall II.

L’étude du vieillissement cognitif
De la démence au vieillissement cognitif
Petersen [ 8] a caractérisé un état cognitif (essentiellement mnésique) prédémentiel sous le nom de MCI (mild cognitive impairment ou déficience cognitive légère). Celui-ci se caractérise par une plainte mnésique sans retentissement sur les activités quotidiennes ainsi que par des performances à des tests mnésiques situées entre 1,5 ou 2 écarts-types en dessous de la moyenne pour l’âge considéré. Les critères cliniques du diagnostic du MCI évoluent encore aujourd’hui. Dans la littérature, selon la cohorte étudiée et la définition du MCI utilisée, 20 à 50 % des individus présentant un MCI peuvent évoluer vers une démence dans les 5 ans suivant le moment où le diagnostic de MCI a été posé [ 9, 10]. Par ailleurs, une étude issue de la cohorte française PAQUID suggère même que les fonctions cognitives déclineraient plus fortement chez les personnes qui développeront une maladie d’Alzheimer dans les 12 années suivantes que chez celles qui n’en développeront pas [7].

Enfin, les résultats montrent aussi que le déclin cognitif lié à l’âge est variable d’un individu à l’autre [3, 6, 11]. Cette variabilité se traduit par une augmentation de l’hétérogénéité des scores cognitifs avec l’âge [3, 6]. Ainsi, les recherches sur la démence et sur le vieillissement cognitif mettent en évidence l’intérêt d’étudier le déclin des fonctions cognitives avant l’âge de survenue de la démence [3, 5, 6].

Importance des facteurs de risque tout au long de la vie
Plusieurs études montrent que les facteurs de risque, de type vasculaire par exemple, mesurés au début ou au milieu de la vie adulte sont associés à un risque de démence durant la vieillesse [3, 5, 12]. Ainsi, l’analyse de la cohorte finlandaise cardiovascular risk factors, aging, and dementia (CAIDE) a cherché à prédire, à partir de facteurs de risque mesurés en milieu de vie (midlife), le risque de survenue d’une démence plus de 20 ans après [ 13]. Les participants avaient un âge moyen de 50,6 ans (écart-type = 6,0 ans) à l’entrée dans la cohorte et de 71,6 ans (écart-type = 4,1 ans) lors de leur examen pour le diagnostic de la démence en 1998 [ 14]. Une série d’articles issus des données de cette cohorte [1417] a montré l’association entre les facteurs de risque constatés au milieu de vie et la survenue d’une démence, permettant ainsi la construction d’un score de risque incluant le sexe et les mesures de l’âge, du niveau d’éducation, de l’activité physique, de l’hypertension, de l’hypercholestérolémie et de l’obésité, établi en milieu de vie pour prédire la démence 20 ans plus tard [13]. Tous ces résultats considérés ensemble soulignent l’importance de l’approche « vie entière » dans l’étude des facteurs de risque de la démence.

Outre ces résultats, il existe aussi un large consensus préconisant l’utilisation d’une telle approche « vie entière » dans le domaine de la recherche sur le vieillissement cognitif [3, 5, 18]. Les travaux basés sur une épidémiologie du parcours de vie (life course epidemiology) [ 19] montrent l’existence de périodes critiques d’exposition aux différents facteurs de risque, d’effets variables de ces derniers selon la période de la vie considérée ou encore d’effets cumulés. Dans le cadre de la démence par exemple, un indice de masse corporelle (IMC) élevé en milieu de vie est associé à un risque accru de démence plusieurs années après, alors que chez des personnes âgées c’est un IMC faible qui est associé à la survenue de la démence [ 20]. Dans le premier cas, l’IMC au cours de la vie adulte est considéré comme un facteur de risque de démence tandis que dans le second cas, chez les personnes âgées, la démence préclinique entraîne des changements physiologiques et comportementaux qui se traduisent par une perte de poids [20]. Par conséquent, la mesure des facteurs de risque tout au long de la vie permet de comprendre l’évolution de leur association avec le vieillissement cognitif et ainsi de se prémunir de la confusion entre facteur de risque et symptôme préclinique de la démence.

En résumé, les résultats de la recherche sur le vieillissement cognitif et sur la démence ont mis en évidence non seulement l’existence d’une hétérogénéité dans le vieillissement cognitif mais aussi l’intérêt de considérer les facteurs de risque tout au long de la vie. Ces résultats ont transformé l’approche des études sur le vieillissement cognitif au cours de ces dernières années. Ainsi, de grandes cohortes, telles que la Framingham heart study, qui disposent de données sur différents facteurs de risque, principalement des facteurs vasculaires, recueillies prospectivement à plusieurs reprises, ont depuis ajouté à leur étude une analyse des fonctions cognitives [ 21]. Les cohortes de naissance comme la 1946 birth cohort du Medical research council ont également recueilli des données sur les fonctions cognitives des participants de la cohorte devenus maintenant adultes [ 22]. De façon générale, les résultats de ces études suggèrent que les facteurs de risque de démence seraient aussi associés aux fonctions cognitives [2128] et à leur déclin [ 25, 2934].

Résultats de la cohorte Whitehall II

Nous allons aborder maintenant les résultats issus de la recherche sur le vieillissement cognitif dans la cohorte Whitehall II. La spécificité de cette recherche est qu’elle porte sur l’étude du vieillissement cognitif à un âge moins avancé que celui pris en compte par la plupart des travaux réalisés à ce jour dans ce domaine [5]. En effet, les participants avaient entre 45 et 68 ans (âge moyen = 56 ans) lors du premier recueil de données sur les fonctions cognitives. Le schéma de la Figure 1 représente le cadre conceptuel dans lequel s’inscrit ce programme de recherche. Ce cadre conceptuel se compose de deux volets. Le premier consiste en l’étude étiologique des fonctions cognitives, c’est-à-dire des facteurs de risque associés aux performances cognitives et à leur déclin. Le second volet concerne l’étude des fonctions cognitives comme facteurs pronostiques de la perte d’autonomie, du fonctionnement physique et de la mortalité (Figure 1).

Les données
La cohorte Whitehall II a été mise en place en 1985. Il s’agit d’une enquête de cohorte prospective menée auprès de 10 308 fonctionnaires britanniques (6 895 hommes et 3 413 femmes) basés à Londres et âgés de 34 à 56 ans lors de leur inclusion dans la cohorte [ 35]. Le premier recueil de données en 1985-1988, appelé « phase 1 », était composé d’un questionnaire et d’un examen clinique. Le questionnaire permettait de relever les caractéristiques sociodémographiques, l’état de santé, les facteurs liés au mode de vie, les caractéristiques du travail et le soutien social des participants. Au cours de l’examen clinique, les données anthropométriques, la pression artérielle systolique et diastolique, ainsi que les marqueurs cliniques de maladies cardiovasculaires étaient recueillis. Les phases suivantes alternaient un questionnaire postal seul et un questionnaire postal accompagné d’un examen clinique (Figure 2). Les tests cognitifs ont été introduits lors des examens cliniques à partir de la phase 5.

Les études menées à ce jour reposent sur les fonctions cognitives qui ont été mesurées lors des phases 5 et 7 à des âges moyens respectifs de 56 et 61 ans selon 5 tests standard : un test de mémoire verbale à court terme constitué d’une liste de 20 mots de 2 ou 3 syllabes ; un test de raisonnement, le Alice Heim 4 - partie I (AH4-I) [ 36] ; un test de vocabulaire, le Mill Hill vocabulary test [ 37] ; deux tests de fluence verbale, un test de fluence phonémique et un test de fluence sémantique [ 38]. Lors de la phase 7, l’examen cognitif comprenait également un test de fonction cognitive globale, le Mini-mental status examination (MMSE) [ 39] (Figure 2).

Les facteurs de risque de vieillissement cognitif
Les résultats portant sur les facteurs de risque de vieillissement cognitif issus de la cohorte Whitehall II peuvent être décomposés en quatre parties : l’âge, la situation socioéconomique, les facteurs vasculaires et les comportements de santé.
L’âge Le principal facteur de risque de déficience cognitive est l’âge, facteur intrinsèque au vieillissement de l’individu [3]. Notre travail sur l’âge vise à souligner l’hétérogénéité du vieillissement cognitif dès l’âge de 45 ans, ce qui peut permettre de comprendre les déterminants de cette divergence. La Figure 3 représente l’évolution de la distribution des scores de raisonnement (AH4-I) lors de trois recueils d’évaluation des fonctions cognitives (1997-1999, 2002-2004, 2008) dans différents groupes d’âge (45-49, 50-54, 55-59, 60-64 ans en 1997-1999). Les participants avaient entre 45 et 64 ans lors du premier recueil et entre 55 et 74 ans lors du dernier recueil (phase 9 actuellement en cours). Il apparaît que, quel que soit le groupe d’âge, les scores cognitifs déclinent en moyenne avec le temps. D’autre part, on note que l’interquartile (intervalle entre le premier et le troisième quartile) s’accroît avec le temps (représenté pour les groupes d’âge 45-49 ans et 60-64 ans au premier recueil et vérifié pour les autres groupes d’âge). La Figure 3 illustre donc l’augmentation de l’hétérogénéité des fonctions cognitives avec l’âge de façon longitudinale dans tous les groupes d’âge examinés. La recherche sur les facteurs de risque qui permettrait d’expliquer cette augmentation de l’hétérogénéité est une de nos priorités ; elle est essentielle pour la compréhension du vieillissement cognitif (Figure 3).
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Les variables socioéconomiques : le niveau d’études et la position sociale Il a été montré qu’une position socioéconomique basse, le plus souvent mesurée par l’appréciation du niveau d’études, était un facteur de risque de démence et le concept de réserve cognitive est souvent avancé pour expliquer cette association [ 40, 41]. On suppose que les personnes présentant une réserve cognitive importante auraient plus de neurones et de connexions synaptiques disponibles et pourraient donc mieux supporter le processus de vieillissement [40, 41]. La réserve cognitive pourrait aussi permettre une utilisation plus efficace ou plus flexible des réseaux neuronaux, rendant ainsi les fonctions cognitives moins susceptibles à la perte neuronale due au vieillissement [40, 41]. Le niveau d’études et la position sociale sont utilisés en tant qu’indicateurs « proxy » de la réserve cognitive.

Dans la cohorte Whitehall II, la position sociale à l’âge adulte est déterminée à partir du classement des emplois des fonctionnaires britanniques, le British civil service, qui reflète à la fois le salaire, le statut social et le niveau de responsabilité au travail. Les résultats ont montré une association entre les trajectoires socioéconomiques de l’enfance à l’âge adulte et les fonctions cognitives à l’âge adulte : la position sociale dans l’enfance a un impact sur les fonctions cognitives via son association avec le niveau d’études et la position sociale à l’âge adulte [ 42]. En plus des effets principaux des mesures du niveau d’études et de la position sociale, l’étude Whitehall II examine également comment ils interviennent en tant que facteur de confusion et effet modérateur. Un exemple de l’effet de confusion des variables socioéconomiques concerne l’association entre les facteurs alimentaires et la cognition. Nous avons montré qu’après ajustement sur les variables démographiques, de comportements de santé et les mesures de santé, une plus grande consommation d’aliments whole food, c’est-à-dire non transformés (fruits, légumes, poissons, etc.) était associée à un risque réduit de déficit cognitif, défini pour chaque fonction cognitive par un score inférieur au premier quintile de la distribution du score cognitif [ 43]. Une consommation importante d’aliments processed food, c’est-à-dire transformés (quiches, biscuits, margarine, etc.) était quant à elle associée à un risque plus élevé de déficit cognitif. Cependant, l’ajustement sur le niveau d’études atténuait significativement la plupart des associations trouvées. Dans une autre étude, un effet modérateur de la position socioéconomique sur l’association entre l’épaisseur de l’intima media carotidienne, un marqueur du niveau d’athérosclérose de la carotide, et les fonctions cognitives a été trouvé. Ainsi, ce marqueur n’apparaissait associé aux fonctions cognitives que dans la catégorie de position sociale basse [ 44].

Les facteurs vasculaires L’association des facteurs de risque vasculaire avec tous les types de démence a renforcé l’hypothèse d’un rôle de ceux-ci dans le vieillissement cognitif [ 4548]. De nombreux facteurs de risque vasculaire, par exemple un niveau élevé de cholestérol, une pression artérielle élevée et la présence de maladies coronariennes ont une forte prévalence en milieu de vie et leur impact sur le vieillissement cognitif au niveau populationnel pourrait être important. Les données de la cohorte Whitehall II montrent que les indicateurs de pathologie vasculaire sont associés à des performances cognitives plus faibles [ 49]. Dans une autre analyse, un antécédent de maladie coronarienne a été trouvé associé à un risque plus élevé de déficit cognitif [ 27]. Chez les hommes, l’association était d’autant plus forte que la maladie coronarienne était plus ancienne (ce que mesure l’intervalle de temps entre la maladie et la mesure des fonctions cognitives). Une pression artérielle élevée, systolique et diastolique, a également été trouvée associée à des performances cognitives plus faibles, de façon plus marquée chez les femmes et concernant les fonctions cognitives de type exécutif (raisonnement et fluence verbale) [ 26]. Les personnes diabétiques avaient aussi un risque plus important de déficit de raisonnement [ 50]. Enfin, il a été montré qu’un faible niveau de cholestérol HDL (high density lipoprotein) était associé à un risque accru de déficit et de déclin de la mémoire [ 51]. La baisse du niveau de cholestérol HDL était plus particulièrement associée avec le déclin de mémoire.
Les comportements de santé Selon un rapport de l’OMS (organisation mondiale de la santé), les principaux facteurs de risque des maladies vasculaires sont les comportements de santé [ 52], ce qui suggère qu’ils pourraient jouer un rôle dans le vieillissement cognitif. Cette association a été étudiée au sein de la cohorte Whitehall II. L’étude de l’association entre la consommation d’alcool et les fonctions cognitives a montré qu’en comparaison avec une consommation occasionnelle, une consommation modérée d’alcool quotidienne réduisait le risque de déficit de raisonnement [ 53]. L’activité physique est également apparue bénéfique pour le raisonnement et la fluence phonémique : un effet à long terme, transversal ainsi que cumulé sur une période de dix ans, a été mis en évidence [ 54]. Par ailleurs, le fait de fumer était associé à un déficit de mémoire et à un déclin de raisonnement [ 55], mais l’arrêt du tabac s’accompagnait de l’amélioration d’autres comportements de santé et n’entraînait pas d’effet défavorable résiduel sur les fonctions cognitives. D’autre part, l’étude de l’association entre l’indice de masse corporelle au cours de la vie adulte et les fonctions cognitives en phase précoce de vieillissement (âge moyen = 61 ans) a montré qu’une obésité présente à différentes périodes de la vie adulte (à 25 ans, en milieu de vie - âge moyen = 44 ans - et en phase précoce de vieillissement) était associée à de plus faibles performances cognitives (globale, mémoire et fonction exécutive) [ 56]. Cette étude a montré un effet cumulé de l’obésité durant la vie adulte sur les fonctions cognitives. Un effet néfaste du sous-poids sur la fonction exécutive a également été mis en évidence. Enfin, des variations importantes de poids (forte augmentation et forte diminution) dans les 15 ans précédant le recueil des fonctions cognitives étaient associées à de faibles performances de fonction exécutive. En plus des comportements de santé, les résultats de la cohorte Whitehall II ont aussi montré un effet bénéfique des activités de loisirs sur les fonctions cognitives [ 57].
Les fonctions cognitives facteurs pronostiques de mortalité
Chez les personnes âgées, de faibles performances cognitives sont associées à un risque accru de mortalité et de mauvais fonctionnement physique [6] (Figure 1). Cependant, la réalité de cette association à des âges moins avancés, en milieu de vie par exemple, n’est pas clairement établie. Les résultats de notre étude [ 58] ont montré une association entre les fonctions cognitives, plus particulièrement la mémoire et le raisonnement, et la mortalité, et celle-ci se vérifie tout au long de la distribution des scores des fonctions cognitives et non pas seulement au sein des scores de fonctions cognitives les plus faibles, comme il a parfois été suggéré [ 59]. En comparant les facteurs comme le niveau d’études, les facteurs vasculaires et les comportements de santé, il apparaît que ces derniers expliquent le plus cette association. Dans une autre étude, les associations bidirectionnelles entre les fonctionnements cognitif et physique ont été examinées à partir de modèles structuraux. Les résultats ont montré qu’en milieu de vie, le sens de l’association était principalement des fonctions cognitives aux fonctions physiques : de faibles performances cognitives prédisant de faibles fonctions physiques [ 60].
Limites
L’approche « vie entière » est importante pour identifier les facteurs de risque de vieillissement cognitif. Néanmoins, l’application de cette approche se trouve confrontée aux problèmes rencontrés dans les enquêtes prospectives, c’est-à-dire la sélection des participants à l’entrée dans l’étude mais également la non participation des personnes les plus fragiles, ce qu’a montré la cohorte Whitehall II [ 61].
Conclusions

La recherche menée sur la cohorte Whitehall II contribue à la réflexion sur l’étude du vieillissement cognitif. D’une part, les résultats qui en émanent confirment l’intérêt d’étudier les fonctions cognitives avant l’âge de survenue de la démence, et ce en montrant que l’étude de l’hétérogénéité des fonctions cognitives et de leur déclin confirme le rôle de certains facteurs de risque de démence [4] dans le vieillissement cognitif et permet d’en identifier de nouveaux. D’autre part, il apparaît important d’utiliser l’approche « vie entière » dans ce domaine de recherche afin d’évaluer à partir de quel âge les facteurs de risque jouent un rôle dans le vieillissement cognitif. Par ailleurs, les résultats de la cohorte Whitehall II ainsi que ceux d’autres cohortes mettent en évidence l’importance des facteurs de risque vasculaire dans le vieillissement cognitif. Des études supplémentaires sont encore nécessaires pour confirmer le rôle joué par les facteurs de risque dès le plus jeune âge. Des études d’interventions visant à contrôler la pression artérielle, le cholestérol et le diabète, mais aussi à réduire les comportements de santé à risque tels que la consommation de tabac et l’inactivité, sont donc à envisager afin de confirmer ou non les hypothèses suggérées par les résultats des études observationnelles.

Conflit d’intérêts

A. Singh-Manoux est responsable du programme « vieillissement cognitif » dans la cohorte Whitehall II, cette recherche est soutenue par le National Institute on Aging, NIH (R01AGO13196 ; R01AGO34454).

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