La France, avec le réseau des Instituts Pasteurs, bénéficie d’un vecteur d’influence unique au monde. En effet, depuis la création du premier établissement, à Saigon, par Albert Calmette en 1891, ce réseau a acquis une reconnaissance internationale tant pour les communautés scientifiques les plus averties que pour les populations locales qui bénéficient directement des travaux et des soins diffusés par les 32 établissements qui le composent aujourd’hui. Mus par l’objectif prioritaire de répondre aux besoins des pays hôtes tout en travaillant à l’avancement de la recherche internationale, ces instituts ont pu se maintenir, depuis plus d’un siècle, par delà les vicissitudes politiques. À ce titre, le réseau des Instituts Pasteur est une composante fondamentale du rayonnement de la France à l’étranger et le témoin actif d’une diplomatie scientifique telle qu’elle est conçue et encouragée par le ministère des Affaires étrangères.
Le ministère des Affaires étrangères (MAE) s’appuie, dans le cadre de ses actions de coopération, sur un réseau de conseillers et d’attachés culturels, universitaires, scientifiques, mais aussi de conseillers régionaux en matière de santé, représentant un dispositif unique à travers le monde. En relayant les compétences et les actions des diverses administrations et organismes concernés, il veille à la cohérence de l’action scientifique extérieure de la France. La Direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats du MAE assure la coordination des instruments d’intervention pour permettre à la diplomatie française de mieux anticiper, identifier et répondre aux nouveaux défis économiques, environnementaux, sociétaux auxquels le monde est confronté.
Face à ces nouveaux défis, la science est l’une des clés de compréhension et d’analyse les plus opérantes. La création de groupes internationaux comprenant des experts scientifiques s’exprimant dans le langage universel de la science, afin d’éclairer les discussions des politiques, crée une relation inédite entre science et diplomatie.
Dans cette perspective, les différents services du ministère des Affaires étrangères, en lien avec les ambassades, mettent en œuvre des programmes, témoins de l’engagement français à faire de la coopération scientifique un instrument de rayonnement de la recherche française et un outil au service des objectifs du Millénaire pour le développement fixés par les Nations Unies.
S’agissant de coopération internationale en matière de recherche médicale, au moment où l’on observe une recrudescence des maladies infectieuses émergentes et ré-émergentes, liées bien souvent à la pauvreté, elle prend plus que jamais tout son sens pour apporter une réponse aux enjeux propres des pays du Sud, face à des défis de santé devenus globaux.
Nous nous y employons, en coordonnant les activités, à l’étranger, des différents organismes et institutions partenaires impliqués dans la coopération. L’expertise des grands organismes français de recherche, et en priorité de ceux engagés en faveur du développement, tels l’Institut Pasteur et son réseau international (RIIP), l’Institut de recherche pour le développement (IRD), le Centre international de recherche agronomique pour le développement (CIRAD), l’Agence nationale de la recherche sur le sida et les hépatites virales (ANRS), ainsi que l’Inserm ou encore le CNRS, est régulièrement sollicitée pour définir des priorités et mettre en œuvre des actions pertinentes et concertées.
Dans ce contexte, l’Institut Pasteur est un partenaire privilégié pour ce ministère. En effet, l’Institut Pasteur est mondialement connu pour son excellence scientifique, pour son expertise sur les maladies infectieuses, parasitaires, bactériennes ou virales, qui ont fait sa réputation. Au travers des instituts du RIIP à l’étranger, l’Institut Pasteur poursuit une expertise de terrain en médecine tropicale, établie de longue date. Conjuguée à ses activités dans les domaines de la recherche et de la formation, l’action internationale de l’Institut Pasteur en matière de santé publique constitue un vecteur majeur du rayonnement de la France dans le domaine scientifique et de la recherche au service du développement.
Face à la recrudescence des maladies infectieuses et parasitaires (épidémies, résistances aux médicaments, etc.) qui ignorent les frontières, le MAE contribue à une meilleure prise en charge des populations en soutenant l’Institut Pasteur dans ses activités :
- de recherches innovantes, en combinant lutte contre les maladies infectieuses et parasitaires (résistance aux antipaludiques, aux insecticides ; tuberculose et résistance aux antibiotiques) notamment au Cambodge, à Madagascar et au Sénégal et lutte contre les maladies émergentes (virus H5N1, SRAS, virus de la dengue) ;
- de prévention et de surveillance des infections d’origine alimentaire à Madagascar, de renforcement de la surveillance de la ceinture méningitique en Afrique Subsaharienne ou encore de l’amélioration du traitement des patients (campagnes de vaccination à Bangui, infection par le VIH au Cambodge, en lien avec l’ANRS) ;
- d’analyses biomédicales : en aidant les laboratoires à assurer la qualité des tests de diagnostics (paludisme, dépistage du VIH, etc.) au Sénégal, à Bangui et au Cambodge.
Le MAE et l’Institut Pasteur ont une relation privilégiée du fait de liens établis de longue date et du partage d’objectifs communs qui nous ont conduits à signer un protocole d’accord. Il s’agit par cette convention de mieux intégrer le réseau international des Instituts Pasteur à la politique d’aide au développement de la France et de renforcer la visibilité de l’aide française dans le domaine de la recherche médicale. Il s’agit notamment, dans ce cadre partenarial :
- d’élaborer, dans le contexte socio-économique local, des solutions appropriées de lutte contre les maladies qui freinent le développement des pays du Sud ;
- de rendre à la recherche la place qui lui revient dans l’amélioration de la santé des populations ;
- de contribuer à installer des systèmes de santé adaptés.
Notre appui au RIIP institutionnalise le soutien de la France aux actions internationales d’expertise, de recherche, de surveillance et d’alerte dans la lutte contre les grandes pandémies.
Depuis plusieurs années, le MAE a initié des projets dits mobilisateurs, financés sur le Fonds de solidarité prioritaire (FSP), et destinés à améliorer la recherche et la prise en charge des maladies infectieuses. Ces projets ont concerné de véritables enjeux en matière de santé publique, pour n’en citer que quelques uns, le projet portant sur les fièvres Ebola et Marburg ; la constitution d’un réseau de surveillance des résistances microbiennes dans la zone de solidarité prioritaire, la recherche sur les méningites bactériennes aiguës en Afrique sahélienne. L’Institut Pasteur s’est vu confier la mise en œuvre de certains de ces projets ou a participé activement à leur réalisation. De même, comme partenaire de la Fondation DNDI (drugs for neglected diseases initative), l’Institut Pasteur apporte son soutien aux actions comme, par exemple, la création en Afrique des deux plates-formes régionales de développement de médicaments pour les maladies négligées (trypanosomiase africaine et leishmaniose) dans le cadre du FSP 2006-83 DNDI.
Aujourd’hui le soutien du MAE au RIIP se traduit par la mise à disposition d’une assistance technique auprès des instituts locaux, qui participe au renforcement des capacités scientifiques et des structures de santé/recherche du Sud, visant toujours l’excellence scientifique. Ces experts techniques mobilisent la communauté scientifique et médicale française et européenne en vue d’installer durablement des liens avec leurs partenaires du Sud en transmettant savoir et savoir-faire, dans un objectif d’appropriation des connaissances par les pays. En effet, notre politique ne peut se résumer à l’accueil et à la formation d’une élite en France mais doit permettre la constitution de capacités de recherche endogènes avec la formulation de stratégies de recherche communes. L’existence de structures de coopération délocalisées, comme les Instituts Pasteur, où la France dispose d’une expertise mondialement reconnue permet à la fois d’assurer la stabilité des scientifiques au sein des équipes confirmées mais également à former une relève locale, permettant ainsi de lutter efficacement contre la délocalisation des équipes de recherche. Par ailleurs, ces formes d’intervention privilégient le continuum entre recherche et formation et permettent aux communautés scientifiques du Sud de disposer de centres de compétences d’envergure régionale et internationale.
Depuis sa création, l’Institut Pasteur fonctionne grâce à la mobilisation de nombreux acteurs autour des valeurs portées par cette fondation reconnue d’utilité publique : les chercheurs et l’ensemble des personnels de ces Instituts qui acceptent de travailler dans des conditions souvent difficiles, poursuivant leurs activités malgré les crises politiques, les mécènes qui permettent à l’Institut de conserver son autonomie grâce à leurs contributions renouvelées, les soutiens institutionnels qui témoignent de la reconnaissance française envers les actions menées par l’Institut Pasteur. Toutes ces énergies convergent autour d’un modèle fondé sur une éthique humaniste du partenariat et de l’excellence. C’est ce modèle pasteurien, différent de celui des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), qui constitue la spécificité française, contribuant, par la diffusion de ces valeurs, au rayonnement de notre pays.