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Med Sci (Paris). 2013 May; 29: 69–70.
Published online 2013 June 7. doi: 10.1051/medsci/201329s217.

Conclusions du colloque

Pierre-Benoît Joly1*

1Unité science en société (SenS), Inra, IFRIS (Institut francilien recherche innovation société), Université Paris-Est Marne-la-Vallée, Cité Descartes, 5, boulevard Descartes, Champs-sur-Marne, 77454Marne-la-Vallée Cedex 2, France
Corresponding author.

MeSH keywords: Congrès comme sujet, France, Sciences sociales, Sociétés savantes, Biologie synthétique

 

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J’adresse mes remerciements à Paul de Brem, qui a magnifiquement animé cette journée. Le sérieux avec lequel il prépare ses interventions nous procure un véritable confort. Je remercie également Nicole Chémali et son équipe pour tout le travail accompli. Mes vifs remerciements vont aussi aux intervenants pour la qualité de leur engagement et pour leur intervention, ainsi qu’à tous les participants.

Nous nous efforçons de construire un espace interdisciplinaire de débat autour des développements des sciences de la vie et de leurs applications. C’est une démarche qui revêt pour nous une très grande importance. Pierre Tambourin et Catherine Paradeise ont voulu créer cet espace sous la forme de cinq colloques, et nous achevons le troisième de la série. L’objectif de ces colloques est de partager les questionnements, de croiser les regards, d’articuler des perspectives différentes. Produire des questionnements communs, mais pluriels, permet d’enrichir nos approches de la coévolution des sciences de la vie et des sociétés.

Tout le monde ne considère pas que la création d’un tel espace de débat est importante, y compris parmi les chercheurs ou les institutions, qui estiment que notre travail est au mieux du temps perdu. Le tract distribué à l’entrée du colloque montre que certains considèrent que nous faisons de « l’acceptologie » et qu’en organisant ce type de débats, nous sommes du côté des promoteurs des « nécrotechnologies ». En organisant ces débats, nous ne cherchons pas à mettre tout le monde d’accord ni à promouvoir quoi que ce soit. Nous visons à aborder une question de différents points de vue, de façon à en saisir les enjeux sans réduire sa complexité. Catherine, Pierre et moi-même y attachons une très grande importance.

Quels enseignements retirer de ce troisième colloque consacré à la biologie de synthèse ?

Nous avons partagé des éléments importants concernant notamment la définition de la biologie de synthèse, qui est plurielle et hétérogène, ce qui est normal pour un domaine émergent. J’ai beaucoup aimé la manière dont plusieurs d’entre vous ont décrit la biologie de synthèse comme un changement d’état d’esprit, comme de nouvelles façons de voir, des promesses, ou même du rêve devenant réalité. Toutes les questions d’anticipation et de promesses sont essentielles dans cette dynamique. J’ai aussi particulièrement apprécié l’amorce de débat sur la pertinence de caractériser la biologie de synthèse comme un nouveau champ scientifique.

La question de l’émergence de la biologie de synthèse est réellement cruciale pour les chercheurs en sciences sociales que nous sommes. Pour la traiter, le recul historique est extrêmement important. La différence entre la biologie de synthèse de la fin du XIXe siècle et celle du début du XXIe siècle tient au fait que même dans l’esprit de ceux qui la font, il existe un questionnement sur ses avantages et ses inconvénients. Il existe une conscience de ce que les objets créés ou les systèmes mis en place sont critiquables et contestables. La question de la responsabilité anime l’ensemble de la communauté scientifique et représente un marqueur important de notre temps et de notre discipline. La question de la distinction entre DIY bio et biologie de synthèse, a priori évidente, mérite d’être travaillée compte tenu des proximités établies par la circulation de certains acteurs, des proximités concernant l’ingéniérie du vivant, et des proximités concernant la question de la responsabilité.

Le débat le plus difficile pour nous reste celui du rôle des sciences sociales. Ce colloque a montré que les sciences sociales jouent différents rôles. Le rôle de l’histoire est important, car celle-ci permet de resituer les évolutions très contemporaines dans une perspective longue, de façon à saisir réellement la nouveauté de ce que nous vivons. La sociologie des sciences et des techniques permet de caractériser les phénomènes d’émergence. Et je n’oublie pas la sociologie de nouveaux lieux d’interaction entre science et société. Les sciences sociales contribuent à éclairer les phénomènes essentiels caractéristiques du développement des sciences de la vie et de leurs applications.

La question la plus délicate fut abordée en fin de colloque et concerne les « sciences sociales embarquées ». J’ai été très intéressé par les interrogations soulevées car le sujet est d’une grande complexité. Il serait aventureux de conclure ici. Il existe aujourd’hui des expériences, qu’il faut traiter comme telles, car elles n’apportent aucune réponse quant à une solution idéale. Les témoignages ont été éclairants car, à partir d’expériences vécues, ils permettent de saisir les enjeux, les modalités, les possibilités mais aussi les limites et les risques de ce type de postures, à la fois pour les personnes concernées, en matière d’interaction entre disciplines, et plus largement d’interactions sciences-société.

Liens d’intérêt

L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.