2010
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Prévention de l’initiation à l’injection et transitions vers d’autres modes d’administration
Ce chapitre sur la prévention s’inscrit dans un contexte marqué par une forte prévalence de l’hépatite C parmi les usagers de drogues par injection. Cette forte prévalence est principalement liée au partage du matériel de préparation de l’injection qui constitue un risque majeur de transmission du VHC (Prithwish et coll., 2008

). Les données de la littérature indiquent que ces contaminations surviendraient tôt dans les trajectoires des usagers de drogues par injection, probablement dès les premières injections et dans un contexte à haut risque de contamination. Plusieurs études ont en effet montré que les injecteurs récents présentaient des taux de séroconversion pour le VIH et le VHC supérieurs aux usagers de drogues par injection plus expérimentés (Nicolosi et coll., 1992

; van Ameijden et coll., 1992

; Garfein et coll., 1998

). D’autres sources indiquent que les jeunes usagers de drogues par injection adopteraient des pratiques d’injection à risque plus fréquentes que les usagers de drogues par injection plus âgés (Thorpe et coll., 2002

; Des Jarlais et coll., 2003

).
En France, la problématique de la première injection et des transitions vers d’autres modes d’administration (TMA) a été peu investie. Mais l’évolution des pratiques et des profils d’usagers observée ces dernières années semble indiquer un renouvellement de la problématique de l’injection. Après une période marquée par une diminution des pratiques d’injection, différentes sources de données (Cadet-Taïrou et coll., 2008

et 2010

) suggèrent un accroissement du recours à l’injection chez certaines populations, notamment l’injection de stimulants qui n’atteignait pas auparavant les proportions observées aujourd’hui. On observe également une diversification des profils d’usagers d’héroïne avec l’apparition de sous-groupes de jeunes consommateurs en situation de précarité (dont certains en errance), des usagers ayant une consommation et/ou des pratiques d’injection occasionnelles, ainsi que des jeunes usagers plus intégrés socialement qui fréquentent le milieu festif (Reynaud-Maurupt et Verchere, 2002

). Or, même des passages courts par l’injection peuvent se révéler catastrophiques pour la contamination virale (Roy et coll., 2002

).
Plus récemment, une évolution des contextes d’initiation a été observée, notamment en milieu festif avec des circonstances d’initiations à l’injection qualifiées de « sauvages » (mauvaise hygiène, initiation solitaire ou avec des pairs à peine plus expérimentés). D’autres remontées du terrain témoignent de modes d’entrée dans l’injection plus solitaires qu’auparavant, notamment liés à l’accessibilité du Stéribox
®. Dans le contexte français marqué par l’arrivée et la diffusion massive des traitements de substitution, il a également été observé des usages du traitement de substitution directement par l’injection et à l’inverse, des modes d’entrée dans l’injection avec la buprénorphine (Guichard et coll., 2004

et 2006

).
Les outils développés en France dans le cadre de la politique de réduction des risques liés au VIH ont montré une moindre efficacité au regard de la forte contagiosité du VHC, notamment sur la poursuite des pratiques à risque lors des injections et sur leur capacité à atteindre les plus jeunes.
Des études menées antérieurement en lien avec la problématique du VIH soulignaient que la diminution à long terme de l’incidence du VIH parmi les usagers de drogues par injection dépendait de la capacité à limiter le nombre d’injections parmi les usagers de drogues et, en même temps, à réduire les pratiques d’injection à risques parmi les injecteurs récents (moins de 4 ans) (Chitwood et coll., 2001

; Kelley et Chitwood, 2004

). En pratique, c’est la stratégie de réduction des risques qui a prévalu et qui a, d’une certaine manière, « suffit » à contenir l’épidémie du VIH. Aujourd’hui, compte tenu de la plus forte contagiosité du VHC, il paraît raisonnable de penser que le développement de stratégies visant à réduire la fréquence d’injection, prévenir ou différer son initiation (pour qu’elle se déroule dans des contextes moins risqués) pourrait permettre d’infléchir l’épidémie de l’hépatite C (Lert, 2006

).
Dans ce contexte, les stratégies d’actions empruntant aux transitions vers d’autres modes d’administration offrent une piste d’action prometteuse à côté des outils existants. Elles se définissent comme « le passage d’un mode d’administration exclusif ou principal vers un autre mode d’administration ». Pour pouvoir être qualifié de transitoire, ce changement doit se maintenir sur une période d’au moins un mois (Griffiths et coll., 1992

; Darke et coll., 1999

). Initialement développées en contextes anglo-saxons autour de la problématique du VIH et du risque sexuel, les stratégies d’intervention liées aux transitions vers d’autres modes d’administration sont peu connues en France. Les données de la littérature font état de trajectoires d’usagers principalement marquées par le passage de la voie non injectable à l’injection (Swift et coll., 1997

). C’est pourquoi l’accent est mis dans la littérature sur le passage de la voie non injectable à l’injection. L’évolution des trajectoires de consommation est particulièrement complexe, mais globalement, parmi les jeunes polyconsommateurs, c’est dans la période qui se situe entre le début et la fin de l’adolescence que les usages s’intensifient (Maycock, 2005

). Compte tenu du contexte français, la présente analyse privilégiera la problématique de l’initiation à l’injection.
Première injection : bilan de la littérature
Avant d’aborder les programmes d’intervention, cette première partie de l’analyse tente de dégager les principaux facteurs de risque d’initiation à l’injection.
Dans la littérature, les études s’intéressent soit à l’initiation à l’injection, soit aux transitions vers l’injection. Il s’agit de deux concepts distincts qu’il importe de clarifier dès à présent. L’initiation renvoie au fait de « s’injecter au moins une première fois ». Comme l’ont souligné Lankenau et Sanders (2004

), le fait de s’injecter une première fois n’implique pas l’adoption de cette pratique ou de devenir un injecteur régulier. Alors que la notion de transitions, comme on l’a vu auparavant, implique le passage d’un mode d’administration vers un autre sur une période d’au moins un mois. Il s’agit donc alors d’une pratique plus « installée ». Si les études portant sur la première injection sont relativement nombreuses, peu se sont intéressées au fait de devenir un injecteur régulier.
Principaux facteurs associés à l’initiation à l’injection
Il convient de préciser que la plupart des études rapportées dans cette partie de l’analyse sont de nature épidémiologique, le plus souvent basées sur une méthodologie transversale ou cas-témoin. Ainsi, le protocole des études citées ne sera précisé que lorsqu’il s’agira d’études prospectives. Cette revue ne prétend pas à l’exhaustivité, seuls les principaux facteurs associés à l’injection sont rapportés. Précisons également que l’ordre de présentation de ces facteurs est non seulement indépendant de leur niveau d’importance mais que ces facteurs n’ont de sens que par leur mise en perspective et resitués dans les trajectoires des usagers de drogues par injection.
Parmi des usagers consommateurs, l’âge, plus exactement le jeune âge, est une variable qui semble être associée à l’initiation. Deux études de cohorte (Van Ameijden et Coutinho, 2001

; Roy et coll., 2003

) dégagent un risque d’initiation qui diminue significativement avec l’avancée en âge. Dans une cohorte new-yorkaise, ce risque n’apparaît que dans les analyses univariées (Neaigus et coll., 2006

). Une étude cas-témoins de Floride montre également que l’initiation à l’injection est significativement associée à un plus jeune âge (Sanchez et coll., 2006

).
Concernant les profils de consommation, plusieurs études de cohorte ont porté sur la consommation précoce de drogues. De façon générale, elles montrent que les usagers qui débutent leur consommation de façon précoce (<18 ans) présentent plus de risques de s’initier à l’injection, même si des résultats contradictoires sont à noter. L’étude conduite à New-York montre que l’entrée dans la consommation d’héroïne à un âge précoce est fortement associée à l’initiation de l’injection (Neaigus et coll., 2006

), alors que les dernières analyses de Roy et coll. (2007a

) ne dégagent aucun effet de cette variable avant l’âge de 14 ans. L’étude transversale de Baltimore montre une association entre la précocité de consommation d’alcool, d’inhalants et de cannabis et l’initiation à l’injection (Sherman et coll., 2005

) tandis que l’étude thaïlandaise montre que la consommation de substances psychoactives à partir d’un âge plus avancé (>16 ans) est protectrice de l’initiation (Cheng et coll., 2006

).
L’examen de l’association entre les différentes dimensions liées à la dépendance et l’initiation à l’injection montre que la polyconsommation (>4 substances), la consommation quotidienne d’alcool (Roy et coll., 2007a

) ou d’héroïne (Neaigus et coll., 2006

; Kuo et coll., 2007

), ainsi que l’usage prolongé ou intensif d’une drogue (Irwin et coll., 1996

; Van Ameijden et Coutinho, 2001

; Sherman et coll., 2005

) sont des facteurs associés à l’initiation à l’injection. Cependant, la seule étude de cohorte à avoir mesuré le niveau de dépendance (
severity of dependence scale) ne dégage aucun effet sur l’initiation (Neaigus et coll., 2006

). Il convient donc de rester prudent sur la relation entre dépendance ou usage intensif et entrée dans l’injection. En effet, plusieurs études ont montré qu’une proportion importante d’usagers d’héroïne ou d’amphétamines consommaient dès la première fois par injection (Stenbacka, 1990

; Neaigus et coll., 1998

; Day et coll., 2005

). L’étude de Roy et coll. (2003

) montre que 31 % des jeunes s’étaient initiés à l’injection avec un produit jamais consommé auparavant. Il a été établi que des usagers d’héroïne consommant par inhalation pouvaient également développer une dépendance sans jamais passer à l’injection (Sotheran et coll., 1999

).
L’influence du genre sur les pratiques d’initiation est un domaine d’étude récent qui montre des effets assez contradictoires sur les modes de transition. Les femmes consommatrices d’héroïne sont généralement considérées moins susceptibles de passer à l’injection que leurs homologues masculins (Griffiths et coll., 1994

; Strang et coll., 1999

). Deux études cas-témoins (Sanchez et coll., 2006

) et une transversale (Sherman et coll., 2005

) montrent une plus grande probabilité d’initiation parmi les hommes. Cependant, aucune des études longitudinales menées auprès des jeunes n’indique d’association avec le sexe. On observe toutefois que les adolescentes montréalaises ont une probabilité plus forte de s’initier à l’injection lorsque leurs amis injectent, résultat qu’on ne retrouve pas chez les jeunes garçons (Roy et coll., 2003

).
Il ressort de certaines études que les jeunes qui s’initient à l’injection sont plus souvent inscrits dans un mode de vie précaire (faibles revenus) ou fortement marginalisé que ceux qui consomment par voie non injectable. La vie dans la rue apparaît fortement associée à l’injection dans trois études longitudinales (Roy et coll., 2003

et 2007a

; Fisher et coll., 2006

; Neaigus et coll., 2006

) ainsi que l’appartenance à un réseau social plus ou moins impliqué dans des activités criminelles ou liées à des pratiques d’échanges de relations sexuelles contre de l’argent ou de la drogue (Fisher et coll., 2006

; Sanchez et coll., 2006

). À l’inverse, les usagers qui présentent un mode de vie plus intégré, notamment par l’emploi, sont moins enclins à s’initier à l’injection (Cheng et coll., 2006

), car ils jugent qu’ils ont trop à perdre (maison, travail, conjoint, relations sociales...) (Neaigus et coll., 1998

).
Il ressort de la littérature que l’initiation à l’injection est fortement associée à des antécédents carcéraux (Dinwiddie et coll., 1992

; De la Fuente et coll., 1997

; Cheng et coll., 2006

) ou à des démêlés avec la justice (Stenbacka et coll., 1993

). Dans l’étude d’Allwright et coll. (2000

), 1/5 des détenus irlandais interrogés déclare avoir commencé à s’injecter en prison.
Certains auteurs ont examiné l’association entre les antécédents personnels (comportements déviants, évènements de vie traumatisants) et l’initiation à l’injection de drogues. Ils remarquent que l’existence de conduites de décrochage, d’absentéisme scolaires, de violences à l’école, de fugues ainsi que des démêlés avec la justice survenus tôt dans l’adolescence sont plus fréquents parmi les jeunes qui se sont injectés que parmi les non injecteurs (Abelson et coll., 2006

). Parmi les évènements traumatisants analysés, les études montrent que le divorce des parents (Neisen, 1993

; Stenbacka et coll., 1993

), les violences physiques (Fuller et coll., 2001

; Cheng et coll., 2006

; Neaigus et coll., 2006

), les abus sexuels (Roy et coll., 2003

; Ompad et coll., 2005

; Cheng et coll., 2006

; Roy et coll., 2007a

;), et des situations d’institutionnalisation forcée (Martinez et coll., 1998

) survenus à un jeune âge sont plus fréquemment rapportés parmi les jeunes injecteurs que parmi les non injecteurs. L’injection serait un moyen de « faire face » à des problèmes émotionnels, à une perception positive du geste ou simplement au fait d’avoir la possibilité de le faire (Kelley et coll., 2004

).
Sur l’ensemble des facteurs et des études examiné, les influences du réseau social et du milieu de la drogue ressortent unanimement comme des déterminants de l’initiation à l’injection (Gamella, 1994

; Crofts et coll., 1996

; Irwin et coll., 1996

; Van Ameijden et Coutinho, 2001

; Roy et coll., 2002

; Roy et coll., 2003

; Day et coll., 2005

; Novelli et coll., 2005

; Sanchez et coll., 2006

; Kermode et coll., 2007

; Wood, 2007

). Plus précisément, avoir un partenaire sexuel qui s’injecte (Van Ameijden et Coutinho, 2001

), avoir un ami qui s’injecte (Roy et coll., 2003

), consommer en groupe (Kuo et coll., 2007

), avoir des amis qui perçoivent positivement l’injection ou fréquenter des injecteurs sont très corrélés à l’initiation.
L’histoire familiale et personnelle de consommation/d’injection de drogues constitue un autre groupe de facteurs auquel les chercheurs se sont intéressés. Les études s’y rapportant montrent des résultats contradictoires. Parmi les études de cohorte, deux études montrent qu’une consommation abusive de psychotropes par les parents est plus fréquemment observée parmi les injecteurs que les non injecteurs (Sherman et coll., 2005

). Aucun effet n’est relevé parmi les personnes comptant un membre de la famille injecteur dans la cohorte New Yorkaise (Neaigus et coll., 2006

), alors que dans l’étude d’Abelson et coll. (2006

), il apparaît qu’avoir un membre de sa famille qui injecte est associé de manière indépendante à un passage précoce à l’injection. Dans les autres études, on observe des fréquences d’initiation à l’injection par un membre de la famille variant de 6 à 21 %. Ces résultats peuvent indiquer que dans un réseau social aussi fermé que le cercle familial, l’implication des membres de la famille dans l’univers de la drogue peut agir de façon contraire (par incitation ou dissuasion) sur le jeune consommateur.
Enfin, certains facteurs socio-environnementaux, dont le marché de la drogue, ont une influence sur les modes de consommation. Plusieurs études écologiques ont documenté comment les variations du marché de la drogue (prix, qualité, forme) pouvaient déterminer les modes de consommation (De la Fuente et coll., 1997

). La disponibilité, la qualité ainsi que les variations de coût des produits sur le marché semblent pousser certains usagers à passer à l’injection (Bravo et coll., 2003

; Topp et coll., 2003

; Kuo et coll., 2007

). Parmi les études examinées, deux études de cohorte (Bravo et coll., 2003

; Kuo et coll., 2007

) montrent que la perception de changements sur le marché relativement au coût, à la disponibilité et à la qualité des produits était la principale raison avancée pour expliquer le passage à l’injection. Cependant, l’influence du marché de la drogue sur les modes d’initiation ou de transitions (initiation à l’injection ou au contraire sortie temporaire ou définitive de l’injection) semble revêtir une forte dimension locale et géographique (Day et coll., 2005

).
Contextes et circonstances entourant la première injection
Plusieurs études ont mis en évidence le caractère non programmé de la première injection (Crofts et coll., 1996

; Doherty et coll., 2000

; Kermode et coll., 2007

), résultat qui ne fait pas l’unanimité puisque dans l’étude de Frajzyngier et coll. (2007

), 60 % de l’échantillon affirment avoir planifié la première injection. Celle-ci apparaît, le plus souvent, administrée par quelqu’un d’autre, qu’il s’agisse d’un ami proche, d’une connaissance, du partenaire sexuel ou, plus rarement, d’un inconnu (Crofts et coll., 1996

; Stillwell et coll., 1999

; Diaz et coll., 2002

; Roy et coll., 2002

; Draus et Carlson, 2006

; Kermode et coll., 2007

; Kerr et coll., 2007

). Parmi les jeunes de la rue de Montréal (Roy et coll., 2002

), la première injection s’est déroulée par ordre de fréquence : dans un lieu public, chez un ami, à leur domicile ou celui de leurs parents ou encore chez une connaissance.
La première injection est un évènement qui s’inscrit dans le social et les sociabilités, qui implique le plus souvent d’autres personnes et se pratique rarement dans l’isolement. L’importance du rôle joué par le réseau social et le milieu de la drogue sur l’entrée dans l’injection et au cours des processus d’initiation a fait l’objet de plusieurs analyses socio-anthropologiques. D’une part, il a été montré que le comportement des usagers de drogues actuellement injecteurs pouvait inciter de façon plus ou moins directe le jeune consommateur non injecteur (Gamella, 1994

). D’autre part, dans l’étude de Roy et coll. (2007b

), les participants mentionnent différentes formes d’influence du réseau relationnel (pairs, famille) : être en contact et témoin régulier de scènes d’injection, se faire vanter les plaisirs et avantages de l’injection, se faire montrer comment faire ou être approvisionné en produit. Une autre influence plus diffuse est liée au milieu de la rue et à l’omniprésence des produits et de l’injection de produits dans l’entourage, ainsi qu’à une offre importante de produits dans certains quartiers. Stilwell et coll. (1999

) ont montré que dans un tel environnement et au contact répété d’usagers de drogues par injection, il pouvait se produire un processus de désensibilisation/normalisation de l’injection parmi des jeunes consommateurs initialement réticents à s’injecter, processus pouvant aboutir au fil du temps à un intérêt et une curiosité accrus pour cette pratique. L’injection semble par ailleurs mettre en jeu une problématique identitaire forte, socialement valorisée dans certaines micro-cultures de la drogue (Roy et coll., 2007b

; Girard et coll., 2009

).
Si les membres du réseau social apparaissent fortement impliqués dans les rituels d’initiation, les jeunes « initiés » se révèlent eux-mêmes souvent très actifs (Des Jarlais et coll., 1992

). Le type de produit initialement injecté dépend très largement du réseau social fréquenté et de la disponibilité des produits sur le marché (Parker et Egginton, 2002

).
Le plaisir, la quête d’un effet plus important et la curiosité de goûter au « flash » (Stenbacka, 1990

; Crofts et coll., 1996

; Roy et coll., 2002

; Giddings et coll., 2003

; Draus et Carlson, 2006

; Witteveen et coll., 2006

; Kermode et coll., 2007

), comptent parmi les raisons les plus fréquemment rapportées par les usagers eux-mêmes pour s’initier à l’injection. L’avantage économique de l’injection est également avancé quand la dépendance à l’héroïne grandit et que ce mode d’administration est perçu plus coût-efficace (Giddings et coll., 2003

; Sherman et coll., 2005

; Draus et Carlson, 2006

) et/ou en lien avec les fluctuations du marché (voir précédemment).
Parce que souvent non planifiée et pratiquée par quelqu’un d’autre, l’injection est à haut risque de contamination pour le jeune initié (partage de la seringue et du matériel de préparation) peu au fait de la pratique même d’injection et des risques encourus (infectieux notamment) (Doherty et coll., 2000

; Varescon et coll., 2000

; Frajzyngier et coll., 2007

). L’initiation à l’injection constitue donc une période sensible pour l’injecteur en devenir car la façon dont une personne est initiée tend à influencer sa pratique et sa prise de risque ultérieures (Crofts et coll., 1996

).
La variabilité des méthodologies d’enquête, des populations étudiées ainsi que l’hétérogénéité des définitions de variables et des modes de catégorisation des risques, limitent la comparaison des données tirées de cette analyse de la littérature.
Discussion sur le bilan de la littérature : un phénomène complexe aux dimensions multiples
Au terme de cette revue, l’injection apparaît comme un phénomène complexe aux dimensions multiples encore mal connues. Il existe très peu d’études prospectives, notamment sur les transitions vers l’injection (« devenir un injecteur régulier »), ce qui constitue un frein à la compréhension de ce phénomène. Les « transitions » d’un mode d’administration à un autre, notamment vers l’injection, ne se produisent pas au cours d’un évènement isolé (un premier
shoot ne fait pas basculer vers un mode d’administration exclusif par injection). Une fois l’injection expérimentée, l’usager peut retourner à un mode d’administration par sniff. Dans l’étude de Des Jarlais et coll. (1992

), on observe que parmi les usagers ayant déjà expérimenté l’injection, 12 % seulement poursuivaient dans une pratique régulière. Les processus de transition vers un mode d’administration exclusivement par voie intraveineuse sont longs à se mettre en place, ils peuvent prendre des mois voire des années. La plupart des expérimentateurs de l’injection ne deviendront jamais « confirmés », en revanche, l’expérience de l’injection augmente les probabilités d’injection ultérieure.
L’analyse des facteurs liés à l’initiation à l’injection a montré des résultats souvent contradictoires, à l’exception du rôle incontestable du réseau social et du milieu de la drogue. Ainsi, les éléments dégagés ne devraient pas être considérés de façon isolée. Il est non seulement difficile de distinguer l’importance de chacun, mais risqué de le faire sans compromettre la compréhension de ce phénomène d’initiation. Dans une optique d’intervention, il conviendrait plutôt de considérer ces facteurs multiples comme agissant dans une suite d’interactions et de conditions pour se réaliser sous la forme de trajectoires. Comme le souligne Stellamanns (2009

), un des résultats les plus intéressants de cette analyse est sans doute celui qui montre que la plupart des facteurs associés à l’initiation (intensité de l’usage de drogue, histoire d’incarcération, vie dans la rue, réseau social composé d’injecteurs, et existence d’abus au cours de l’enfance) sont également des marqueurs de la précocité de l’initiation.
La très grande majorité des études recensées a porté sur des publics en situation de relative précarité sociale, limitant ainsi notre compréhension d’un phénomène à l’Ĺ“uvre dans l’ensemble de la société, comme l’attestent les données observationnelles, et mettant probablement en jeu des mécanismes plus nuancés. Il n’existe pas de données étayées en France relatives à cette problématique de l’initiation et à sa déclinaison auprès des différents sous-groupes sociaux de jeunes consommateurs, que l’on a pu voir émerger au cours des dernières années.
Programmes d’intervention liés aux transitions vers d’autres modes d’administration
La seconde partie s’attarde sur l’analyse de l’efficacité des programmes d’intervention liés aux transitions vers d’autres modes d’administration.
Stratégies et types d’interventions
Les programmes d’intervention examinés dans le cadre de cette revue peuvent être regroupés autour de deux stratégies (Hunt et coll., 1999

).
La première vise à prévenir l’initiation à l’injection parmi les non injecteurs soit par des interventions auprès des non injecteurs pour limiter les risques de passage à l’injection, soit par des actions auprès des injecteurs actifs (initiateurs potentiels) pour tenter de réduire leur influence sur les non injecteurs.
La seconde vise à favoriser la diminution ou l’arrêt de l’injection parmi les injecteurs actifs. Mais dans les faits et dans un contexte épidémique, c’est plutôt la voie de la réduction des risques qui est privilégiée, selon deux modalités : la promotion des techniques et procédures d’injection à moindres risques ; la promotion de modes d’administration alternatifs à l’injection jugés à moindres risques.
Par souci de lisibilité, les interventions recensées dans ce chapitre ont été regroupées en deux grandes catégories d’intervention : information, éducation et communication (IEC) et interventions brèves (IB).
Information, éducation et communication (IEC)
En 1998, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) présentait cette catégorie d’intervention comme une composante essentielle de la stratégie de lutte contre le VIH parmi les usagers de drogues par injection. Les principes de l’IEC ont également été appliqués à un ensemble de problématiques de réduction des risques associés aux usages de drogues. L’IEC comprend un éventail d’approches et d’activités dont les plus connues, diffusées et utilisées sont probablement les supports papier (brochures, affiches, flyers...). Elles comprennent également le dépistage/
counselling des infections et une palette étendue d’outils, d’approches et de techniques comme les vidéos, les groupes de paroles, les plates-formes web, et autres matériels didactiques. Ces approches, techniques et outils d’IEC sont souvent produits par les structures de première ligne elles-mêmes (Hunt et coll., 2003

) et utilisés dans le cadre ou en complément d’autres programmes, comme les PES, les TSO ou les interventions de santé communautaire.
Dans cette catégorie d’intervention, l’utilisation des médias est fréquente allant des grandes campagnes médiatiques à caractère souvent très normatif et ciblant la population générale jusqu’à des interventions de proximité plus ciblées (comme par exemple la campagne de prévention du passage à l’injection ciblée décrite plus loin) incorporant ou non une stratégie de marketing social. Ces approches se déclinent également à un niveau plus individuel avec pour objectif le développement des compétences psychosociales.
Entre autres objectifs, l’IEC vise à informer et orienter les usagers vers les services de santé appropriés (par exemple : inciter au dépistage, favoriser la mise sous traitement...), informer et conseiller les usagers pour réduire la prise de risques liée à la consommation de drogues, soutenir la qualité des pratiques préventives, éducatives et de réduction des risques des professionnels de santé, agir sur les normes culturelles.
Interventions brèves (IB)
Face aux limites des outils existants (distribution de matériel stérile et IEC) pour lutter contre l’épidémie du VHC, les experts s’accordent sur l’importance de mettre en place des aides complémentaires incluant des interventions individuelles brèves de type comportemental (Hunt et coll., 2003

). De plus en plus reconnues et pratiquées, les interventions brèves se sont d’abord développées autour des pathologies mentales pour s’étendre à différentes problématiques de santé dont les addictions (surtout celles liées à l’alcool) puis la réduction des risques. Il est donc important de rappeler dès à présent que ce type de démarche n’a pas pour objectif de prévenir l’expérimentation ou l’usage de substances psychoactives, mais qu’il peut s’avérer pertinent pour prévenir le développement d’une dépendance ou simplement limiter les risques liés aux usages, notamment les risques infectieux (VIH/VHC). Fondées sur une démarche scientifique expérimentale, ces interventions s’attachent à une évaluation rigoureuse de leurs méthodes et de leurs résultats. Elles sont réputées pour leur bon rapport coût-efficacité et peuvent,
a priori, être conduites par des intervenants non spécialisés. Elles se démarquent également en ce qu’elles favorisent le maintien des changements de comportements dans le temps. Leurs indications sont très vastes, et offrent aux professionnels de la santé des outils efficaces et validés. En plus des techniques qu’elles emploient, elles ont en commun un support théorique tiré des théories de l’apprentissage social et de modèles plus éducatifs de traitement de l’information. Elles consistent à confronter progressivement les personnes à la problématique qui les amène, à renforcer la prise de conscience (des risques par exemple), puis à travailler les systèmes de pensées et les émotions qui freinent l’adoption d’un nouveau comportement ou la motivation à s’y engager pour
in fine appréhender la situation sous un jour plus favorable. Les techniques employées sont multiples et variables en fonction de l’objectif poursuivi mais chaque intervention suit normalement un enchaînement ordonné d’actions menées en individuel, en vue d’acquérir, d’organiser et de mettre en application un savoir dans un contexte donné.
Analyse des résultats des interventions liées aux TMA
Information, éducation et communication (IEC)
Selon la recension systématique de la littérature internationale menée par l’Institut national de santé publique du Québec en 2007 (Noël et coll., 2007

), il existe 34 publications portant sur les résultats d’interventions ciblant la prévention du VIH et du VHC chez les usagers de drogues par injection. Plus des deux tiers des études proviennent des États-Unis. L’IEC et le dépistage/
counselling des infections (généralement réalisé par des infirmières) constituent les principales stratégies de réduction des risques infectieux qui ont cours aujourd’hui et représentent plus de la moitié des interventions évaluées. En dépit de leur étendue, il existe peu de travaux de recherche sur leur efficacité. Ceci est probablement lié au fait que ces stratégies sont souvent intégrées dans des programmes plus étendus dont l’évaluation ne permet pas de dégager leur effet propre (Coyle et coll., 1998

). Il existe néanmoins un certain consensus dans la littérature pour dire que la seule délivrance d’informations n’est pas suffisante pour faire évoluer les comportements (Schaps et coll., 1981

; Sherr, 1990

; Des Jarlais et coll., 1992

; Treloar et Abelson, 2005

; Roy et coll., 2007b

; Treloar et coll., 2008

).
Treloar et coll. (2008

) soulignent un effet de lassitude et de saturation des usagers de drogues par injection autour des messages infectieux, effet auquel viennent s’ajouter de nombreuses croyances, désinformations, confusions, mythes autour de l’injection. Précédemment, l’auteur rapportait déjà des phénomènes de « résistance » des usagers de drogues par injection aux messages de cette nature (Treloar et Abelson, 2005

). Dans cette dernière étude qui examinait les sources et les modalités d’échanges d’information (sur les risques infectieux et les pratiques d’injection à moindres risques) des usagers de drogues par injection, les résultats indiquaient que si 90 % d’entre eux disaient avoir reçu de l’information via des sources formelles (brochures, programmes d’échanges de seringues et structures pour les jeunes) le niveau de connaissances (exploré qualitativement) des pratiques d’injection à moindre risque se révélait très faible. Les auteurs observent en outre parmi les usagers au fait des « bonnes pratiques », que celles-ci sont peu appliquées, celles-ci n’étant pas prioritaires dans le processus d’injection et pas appliquées en cas d’état de manque. Il convient de noter que les usagers n’ont souvent pas d’explication à donner sur le fait de ne pas appliquer les principes d’une injection à risques réduits (« C’est comme ça »). Sur la base d’un enregistrement vidéo des pratiques d’injection, les auteurs observent par ailleurs des routines tellement intégrées/ritualisées par les usagers que ces derniers sont convaincus de faire certains gestes alors que la vidéo montre qu’ils ne les font pas. Lors de l’initiation, peu d’usagers rapportent avoir cherché à obtenir (ou à avoir reçu) des informations sur les risques. Ceux qui ont tenté de s’informer disent s’être tournés vers leurs pairs et avoir reçu une information de « sens commun », couvrant principalement des aspects techniques (zones d’injection, effets...), le risque infectieux n’ayant quasiment jamais été abordé.
Dans un autre ordre d’idées, Strauss et coll. (2007

) constatent que si la majorité des centres de soins pour usagers de drogues délivrent une information/conseil sur le VHC sous différentes formes (groupes de discussion, vidéos, brochures, sessions individuelles), cette éducation se révèle souvent inadéquate, hétérogène, touchant peu d’usagers et finalement de faible portée. Les auteurs concluent que si les centres de soins sont bien placés pour délivrer cette information, les intervenants ont souvent des connaissances limitées sur le virus et les pratiques des usagers et s’avèrent peu équipés pour communiquer efficacement avec les usagers de drogues sur ces questions.
En 2003

, Van Beek faisait état de la poursuite de pratiques à risque même dans des environnements contrôlés comme les programmes supervisés d’injection qui rassemblent pourtant toutes les conditions d’hygiène et de mise à disposition d’informations sur les risques liés à l’injection. Plus récemment, une étude cas-témoin montre que si la distribution/mise à disposition de matériel (en l’occurrence du coton alcoolisé) n’est pas accompagnée de consignes et de conseils pratiques et répétés sur l’utilisation dudit matériel, alors elle ne suffit pas à elle seule à garantir des pratiques à moindre risque ; le matériel se révélant souvent utilisé de façon inappropriée (Grau et coll., 2009

).
Face à toutes ces limites dans la transmission d’informations sur les risques liés à l’injection, nombre d’auteurs recommandent d’explorer des interventions alternatives à l’apport d’information pour renforcer la prise de conscience des risques et le changement de comportement. Pour contrer l’effet de lassitude des usagers, l’abord de la pratique d’injection à moindres risques sous l’angle des dommages causés aux veines et de l’hygiène plutôt que par le risque infectieux pourrait être une piste intéressante pour susciter l’intérêt des usagers (Treloar et coll., 2008

).
Les programmes d’éducation par les pairs sont de plus en plus reconnus pour leur efficacité à faire évoluer les comportements, notamment ceux liés à l’usage de drogues (Aitken et coll., 2002

; Purcell et coll., 2007

; Treloar et coll., 2008

). Considéré comme une source « naturelle » d’information, le groupe de pairs peut se révéler un relais essentiel auprès des jeunes initiés qui ne sont pas encore en contact avec les sources/structures formelles de réduction des risques ou auprès des usagers de drogues par injection qui se sentent peu concernés et dont on sait qu’ils sont portés à faire confiance à leurs pairs sur ces questions sensibles. Les quelques évaluations de ce type d’interventions citées plus haut montrent que le conseil par les pairs est efficace pour réduire les comportements à risques (connaissances des risques, réduction du partage de seringues, usage d’une seringue neuve, meilleure hygiène/lavage de mains significativement plus élevés) sous réserve d’une formation et d’une supervision rigoureuses des pairs relais.
Face aux limites des messages informatifs, une autre piste d’éducation aux risques liés à l’injection s’appuyant sur des enregistrements vidéo a fait l’objet d’une publication (Treloar et coll., 2008

). Utilisée avec des usagers fréquentant un centre d’injection supervisé (CIS), l’intervention a consisté à filmer l’usager en train de s’injecter, puis à analyser et à discuter sa pratique sur la base de l’enregistrement. D’après les auteurs, cette technique constitue une voie particulièrement intéressante pour accéder aux « vraies » pratiques et travailler autour des « résistances » des usagers dans le cadre d’un accompagnement individualisé. Les discussions autour des vidéos témoignent d’un intérêt marqué des usagers pour ce
feed-back.
Toujours dans cette catégorie IEC, on trouve également les interventions ciblées de proximité incorporant le plus souvent une stratégie de marketing social (affiches, flyers,
guidelines...) et faisant la promotion de modes d’administration alternatifs jugés à moindres risques. Rarement publiées ou évaluées, ces interventions témoignent néanmoins d’une bonne acceptabilité/adhésion auprès des usagers. On citera pour exemple les campagnes anglaises, non évaluées à ce jour, «
Up your Bum » (
Healthy Option Team) faisant la promotion d’une administration de drogues par la voie anale ou
« The Chasing campaign » (
Exchange Supplies/LifeLine) qui s’est appuyée sur les principes de l’entretien motivationnel (voir plus bas) pour promouvoir la voie inhalée. En lien avec cette campagne de promotion de la voie inhalée, il convient de rapporter les résultats de l’expérience anglaise de distribution de feuilles de papier en aluminium dans le cadre de programmes d’échange de seringues (Pizzey et Hunt, 2008

). Les résultats indiquent que sur les 320 usagers fréquentant le programme d’échange de seringues, 54 % ont pris le pack de feuilles quand il était disponible. Le programme a enregistré une augmentation de 32 % de sa fréquentation au cours des dix mois de campagne, dont 32 nouveaux clients non injecteurs (sans contact préalable avec des structures de réduction des risques), venus spécialement pour obtenir ces feuilles. Parmi les 48 nouveaux injecteurs recensés, ils étaient 46 % à déclarer avoir inhalé dans le mois précédent l’introduction des packs. Au suivi, ils sont plus de 85 % à déclarer une consommation par inhalation à des occasions où ils auraient autrement injecté. En outre, la très grande majorité des répondants s’est montrée favorable à la diversification des services du programme d’échange de seringues et ont exprimé une grande satisfaction concernant la qualité des feuilles d’aluminium proposées. D’après les auteurs, la mise en place de ce type de stratégie est facilitée dans des contextes où préexiste une culture de l’héroïne inhalée (l’inhalation est une technique difficile à acquérir et dont les effets sont moins intenses que par voie injectable) ; elle peut être utilisée dans certains pays (Espagne, Pays-Bas) en vue de renforcer l’évolution « naturelle » (sous l’effet des fluctuations du marché) des modes d’administration de l’injection vers l’inhalation. La promotion de ce type de transition nécessite d’accompagner l’usager et différents outils de soutien (par exemple, les
guidelines).
Autour des stratégies IEC, citons la campagne de prévention du passage à l’injection de drogues parmi les jeunes de la rue non injecteurs de Montréal (Roy et coll., 2007b

). Cette campagne conduite pour la première fois à Montréal en 2005 visait à renforcer les résistances déjà présentes chez les jeunes de la rue vis-à-vis de l’injection. Elle reposait sur une stratégie d’affichage ciblé de posters conçus avec le concours des jeunes de la rue eux-mêmes. Les objectifs de l’évaluation, menée à partir d’une série d’entretiens semi-structurés, consistaient à mesurer la capacité de la campagne à atteindre les jeunes de la rue qui ne s’étaient jamais injectés, et à comprendre les effets de la campagne auprès de ce public. Les résultats indiquent un haut degré de visibilité et de compréhension de la campagne auprès du public cible. La majorité des jeunes ont été touchés par les messages et ont déclaré que la campagne les avait amenés à s’interroger sur leur pratique et leurs représentations de l’injection. Certains, surtout les usagers de drogues par injection, ont parfois trouvé les messages, envahissants, négatifs ou choquants. Aucun effet pervers n’a été noté (par exemple, susciter l’envie d’essayer). Les auteurs concluent que si ce type de campagne peut contribuer à influencer les attitudes et les perceptions, il doit nécessairement s’accompagner d’interventions plus spécifiques, comme les interventions brèves.
Interventions brèves (IB)
Si l’efficacité des interventions brèves est aujourd’hui largement reconnue pour faire évoluer les comportements liés à l’usage de différentes substances psychoactives (Tucker et coll., 2004

), notamment l’alcool (Kaner et coll., 2007

), elles restent peu développées dans leur application à la réduction des risques infectieux, notamment en lien avec la problématique de l’injection de drogues et du VHC. Ceci est probablement à mettre en relation avec une préoccupation relativement récente pour ce sujet. Il existe peu d’études sur l’efficacité de ce type d’intervention auprès des usagers de drogues par injection (Hunt et coll., 2003

; Noël et coll., 2007

; Stellamanns, 2009

). En effet, dans la catégorie des interventions brèves, moins d’une vingtaine d’études évaluées reposant sur les principes théoriques des interventions comportementales menées individuellement ou en atelier, ont été identifiées. La très grande majorité de ces études ont été développées autour de la problématique du VIH et des risques sexuels ou associés à l’injection. Des résultats positifs se traduisant en modification de comportements ont été observés dans la très grande majorité de ces projets. Plus précisément, les études montrent des résultats encourageants en termes de réduction du nombre d’initiations, de réduction du nombre d’injections (Des Jarlais et coll., 1992

; Hunt et coll., 1998

) et de diminution des pratiques à risque lors de la préparation de l’injection (Latka et coll., 2008

). D’autres projets évalués ayant intégré une approche par les pairs ont également rapporté des résultats positifs (Aitken et coll., 2002

; Côté et coll., 2006

).
Rompre le cycle de l’injection
Le programme Break the cycle (BTC) constitue sans doute le programme d’intervention sur les TMA le plus connu et le plus reconnu au niveau international, malgré le peu de données d’évaluation disponibles. Sa spécificité est de se focaliser sur les aspects sociaux de l’injection de produits, notamment au cours de la période d’initiation. Cet angle d’intervention est largement soutenu par la présente revue de littérature qui montre que le réseau social compte parmi les facteurs les plus influents de ce type de transition. D’abord développé dans un objectif de prévention du passage à l’injection, BTC est un programme qui s’adresse aux usagers de drogues par injection avec pour objectif de les encourager à travailler auprès de leurs pairs non injecteurs en vue de les dissuader de commencer à s’injecter. L’intervention est principalement fondée sur les aspects sociaux de l’injection, à savoir que :
• la plupart des personnes qui commencent à consommer des drogues ne pensent pas qu’elles s’injecteront un jour ;
• l’apprentissage de l’injection se produit en général au contact d’usagers qui injectent et qui en parlent ;
• les jeunes initiés demandent en général aux injecteurs de leur faire le premier shoot ;
• les injecteurs plus expérimentés se révèlent souvent réticents, mais démunis face à ce type de requêtes, ils sont peu préparés à y répondre.
À partir de ces constats, l’intervention BTC se fixe pour objectifs :
• d’encourager les injecteurs plus expérimentés à réfléchir à leur attitude par rapport à l’injection ;
• d’accroître chez eux la conscience des actions pouvant inciter les autres à commencer ;
• d’augmenter la capacité à résister aux demandes d’initiation ;
• et s’ils sont amenés à initier quelqu’un, de le faire de façon à limiter les risques (infectieux, notamment) liés à la pratique même, et à informer sur les dommages éventuels (physiques, infectieux, moraux, psychologiques, sociaux, légaux...) de l’injection.
Le programme BTC a d’abord été développé dans le cadre d’une intervention structurée en face à face (Hunt et coll., 1998

). L’évaluation du programme à trois mois (base déclarative) montre que l’intervention a permis de modifier les attitudes et comportements susceptibles d’influencer le non injecteur (réduction des contacts avec les non injecteurs, diminution du nombre d’injections devant un non injecteur, adoption d’un discours plus dissuasif), et de réduire le nombre de demandes d’initiation, ainsi que le nombre d’initiations. Malgré les limites du protocole d’évaluation – taille réduite de l’échantillon (86 sujets), absence de groupe contrôle, comportements déclarés – pour juger de son efficacité, ce programme connaît un grand succès parce qu’il s’agit d’une intervention brève pouvant se dérouler en moins d’une heure, peu coûteuse (à l’exception de la formation du personnel), qui permet d’accéder facilement aux usagers, et qui est aisément modulable, notamment en vue d’une approche par les pairs (Hunt et coll., 2003

). Autre point non négligeable, BTC bénéficie d’une forte adhésion et acceptabilité auprès des usagers de drogues par injection.
Le programme BTC est aujourd’hui adapté et implanté dans plusieurs régions d’Asie centrale (Ouzbékistan, Kirghizstan) en complément d’une campagne TV. Les premiers résultats montrent dans les deux régions une importante réduction du nombre d’initiations des usagers de drogues par injection (Hunt, 2010

). Au Vietnam, le programme a été adapté auprès d’un public de travailleurs sexuels. Aux États-Unis, BTC a été adapté pour des sessions de groupe conduites par des intervenants en réduction des risques et est actuellement en cours de validation au
Centre of Disease Control. Une adaptation de BTC est également en cours à Toronto (Canada). Plus récemment en Australie, BTC a été adapté au contexte local et mis en Ĺ“uvre dans le cadre d’un centre d’injection supervisé. Aucune donnée d’évaluation n’est disponible. En Australie, un article relatant l’intégration de ce type de programme à un PES souligne qu’un ensemble de précautions est à prendre, surtout autour de la stigmatisation des injecteurs, pour qu’une activité de prévention de l’injection trouve sa place au sein de ce type de structure (Brener et coll., 2010

).
Entretien motivationnel
L’entretien motivationnel figure parmi les interventions brèves et constitue aujourd’hui une piste d’intervention des plus prometteuses mais encore à l’étude dans son application aux pratiques d’injection à risques. Dérivé des théories humanistes et centré sur l’individu, l’entretien motivationnel est une technique d’intervention qui vise à augmenter la motivation intrinsèque au changement (Miller et Rollnick, 2002

). Les données de la littérature témoignent d’une efficacité significative de l’entretien motivationnel (tant au niveau statistique que clinique) au regard de problèmes de dépendance liés aux usages de cocaïne et d’héroïne (Bernstein, 2005

), d’alcool (Kaner et coll., 2007

), et d’autres problématiques de santé (Rubak et coll., 2005

). L’approche motivationnelle, qui se joue au cours d’une seule rencontre d’une durée de 30 à 60 minutes, est particulièrement recommandée pour des publics difficiles à mobiliser. D’autre part, les résultats des études évaluatives sur l’entretien motivationnel montrent que ce type d’intervention peut être mené efficacement, du moins en théorie, non seulement par des psychologues, mais aussi par des intervenants en toxicomanie et autres professionnels de santé (par exemple des infirmières). L’entretien motivationnel semble donc une approche particulièrement intéressante dans le contexte d’intervention des Caarud pour une population fréquentant irrégulièrement les programmes et peu intéressée pour s’engager dans un suivi à long terme. Cependant, des observations récentes suggèrent que la conduite de l’entretien motivationnel respectant rigoureusement les principes motivationnels requière une solide formation et expérience des intervenants (Chanut, 2010

).
Malgré l’intérêt et l’utilité démontrés de cette approche dans le domaine de la toxicomanie, seulement deux études randomisées et utilisant rigoureusement les principes de l’entretien motivationnel ont été publiées sur l’efficacité de cette approche en regard de la réduction des pratiques d’injection à risque de transmission du VIH ou du VHC chez les usagers de drogues par injection (Baker et coll., 1993

et 1994

). Seule la seconde étude a pu montrer une réduction significative des pratiques d’injection à risque, changement qui s’est maintenu à six mois. Les auteurs de la première étude interprètent l’absence de différences de résultats par le fait que la population étudiée était composée d’individus substitués et stabilisés dans leur traitement à la méthadone, engagés dans une démarche de soin et en conséquence, déjà motivés à cesser l’injection de drogues.
Un essai randomisé est en cours à Montréal. Il a pour but d’étudier les effets d’une intervention brève, strictement fondée sur les principes de l’entretien motivationnel, et ciblant les pratiques d’injection à risque des personnes qui s’injectent de la cocaïne. Cet essai comparera l’efficacité de l’entretien motivationnel versus une séance d’information « classique » sur les risques liés à l’injection.
Discussion sur les programmes d’intervention
Cette analyse montre que les stratégies d’IEC sont très largement utilisées pour réduire les risques associés aux usages de drogues par injection. Les évaluations d’implantation et de processus suggèrent une certaine efficacité, en tout cas en complémentarité d’interventions incluant des stratégies individuelles et environnementales, distales et proximales (Roy, 2010

). Néanmoins et compte tenu de leur diffusion, il est important de comprendre les résultats produits et les mécanismes d’intervention impliqués dans ces résultats.
Concernant les interventions brèves, il existe peu d’études sur leur efficacité auprès des usagers de drogues par injection. L’analyse montre néanmoins des résultats encourageants, suggérant qu’il est possible de réduire les pratiques d’injection à risque et de réduire le nombre d’initiations par des interventions psychosociales/comportementales auprès des usagers de drogues par injection. D’un point de vue pratique et méthodologique, les interventions qui nécessitent de mobiliser les usagers sur 4 à 6 séances sont plus difficiles à mettre en place et à évaluer.
Nous avons vu que les études publiées présentent une grande diversité d’approches. Elles ont été réalisées auprès d’usagers de drogues par injection, issus de sous-populations et de milieux extrêmement variés (femmes enceintes, afro-américains, personnes détenues ou sous traitement de substitution...), ce qui rend les résultats difficiles à généraliser. Certaines de ces interventions ont été menées auprès d’usagers de drogues par injection, relativement stables, captifs et/ou motivés, par exemple ceux en traitement de substitution aux opiacés ou en prison, favorisant ainsi une certaine assiduité. Dans ce contexte et dans une optique de travail avec les usagers les plus vulnérables et peu en contact avec les structures, les interventions brèves basées sur une seule rencontre semblent à privilégier. En outre, les processus par lesquels les interventions (en particulier les interventions brèves telles que l’entretien motivationnel) permettent d’obtenir des résultats positifs restent peu connus (Vasilali et coll., 2006

). C’est pourquoi il est recommandé de combiner des volets qualitatifs et quantitatifs aux méthodologies évaluatives des programmes en direction des usagers de drogues (Stahler et Cohen, 2000

).
Dans une optique de mise en place d’interventions autour des transitions vers d’autres modes d’administration, différentes réflexions sont à mener sur : les modes d’accès et de mobilisation des publics visés (souvent cachés), les connaissances des processus et des contextes d’initiation à l’injection, les cultures et pratiques locales autour des modes de consommation, les enjeux de mixité des publics (injecteurs et non injecteurs) et l’exposition sociale aux risques, les opportunités d’intégration dans les services existants, les priorités politiques, la consultation et la participation des usagers de drogues par injection et des associations de réduction des risques.
En conclusion, malgré un intérêt marqué dans la littérature pour les stratégies d’action en faveur des transitions vers d’autres modes d’administration, celles-ci demeurent encore peu développées. Les deux tiers des expérimentations recensées ont été menés aux États-Unis, aucune n’a été relevée en France. La complexité méthodologique inhérente à la mise en place de ce type d’intervention en contexte de réduction des risques est réelle, suscitant parfois ambivalence et réticences. L’évaluation est rendue d’autant plus difficile (dans les faits) que les interventions recensées combinent souvent différents outils et approches.
Au regard de la prévention et de la réduction des risques liés au VHC, la littérature dégage différentes caractéristiques communes aux interventions efficaces auprès des usagers de drogues par injection : les approches interdisciplinaires ou misant sur la complémentarité, le recours à des modèles théoriques pour structurer la démarche des interventions individuelles en relation d’aide ou de thérapie. Pour être efficaces, et par opposition aux approches top-down de type IEC, les approches, messages et outils se doivent d’être dynamiques, adaptés aux circonstances et aux pratiques individuelles, et prendre en compte les contextes sociaux et les modes de vie des usagers de drogues par injection.
Dans le contexte épidémique actuel, les stratégies d’actions des transitions vers d’autres modes d’administration – les interventions brèves en particulier – sont des programmes prometteurs dans le cadre d’une approche gradualiste et pragmatique de réduction des risques prenant en compte les besoins et les difficultés des usagers aux différents stades de leurs trajectoires.
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