III - Examens de santé et perspectives

2009


ANALYSE

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Du repérage aux soins : quelle organisation ?

Un des critères indispensables de réussite d’une procédure de dépistage ou de repérage est l’existence d’outils de diagnostic et de traitement validés et la disponibilité des moyens suffisants pour les mettre en Ĺ“uvre (« Principes et pratique du dépistage des maladies », OMS, 1970). Les moyens, quand ils existent, doivent aussi être connus et accessibles. Une action de dépistage ne se conçoit pas sans une réflexion sur l’intervention post-dépistage : diagnostic et prise en charge thérapeutique (accompagnement, traitement préventif et/ou curatif) sont indissociables de la procédure de dépistage. C’est pourquoi la question de l’organisation des soins en aval du dépistage doit être abordée, et plus particulièrement celle des étapes successives (dépistage, diagnostic, soins) logiquement articulées entre elles pour constituer une filière de soins. L’objectif principal est de réduire au maximum le nombre d’enfants perdus de vue après un dépistage positif. À cet objectif doit être associé celui de réaliser ce suivi sans stigmatisation des enfants et dans le respect de règles strictes de confidentialité.
Les structures et les professionnels en charge de la santé des enfants sont nombreux : médecins libéraux (généralistes et pédiatres, autres spécialistes), paramédicaux, service de protection maternelle et infantile, service de la promotion de la santé en faveur des élèves, hôpitaux et maternités, centres médico-psychologiques, centres de référence, centres médico-psycho-pédagogiques, centres d’action médico-sociale précoces, centres municipaux de santé. Les associations sont également des acteurs à ne pas négliger.
La définition de filières de soins de proximité, organisées autour des structures et réseaux déjà existants, doit permettre d’organiser une prise en charge adéquate des enfants dépistés et de leur famille. Ceci implique d’évaluer l’impact d’une procédure de dépistage en regard des données épidémiologiques de prévalence et d’incidence des troubles dépistés (prévision du nombre d’enfants qui nécessiteront une consultation en ophtalmologie ou en ORL par exemple), des variations de la natalité et de l’évolution de la démographie médicale et paramédicale. Ceci nécessite également que les différents acteurs se connaissent, se coordonnent et partagent leurs informations dans le respect des règles de confidentialité précédemment évoquées.
Les professionnels de première ligne, impliqués dans les démarches de dépistages collectifs ou individuels (médecins généralistes, pédiatres libéraux) devraient :
• savoir quoi dépister et à quels âges ;
• connaître et savoir utiliser les outils de dépistage ;
• savoir où et à qui adresser un enfant et ceci dans un délai court et à proximité du lieu de vie de la famille, en fonction des moyens dont ils disposent et du périmètre d’action que les spécialistes se donnent.
Toutefois, les filières de dépistage-diagnostic-soins constituent un domaine complexe, associant des structures et des techniques souvent très spécialisées et, de ce fait, parfois peu connu des médecins de première ligne, d’où la nécessité de documents pédagogiques partagés pour les professionnels.
La structuration de ces filières est de plus sujette à des modifications dans le temps. Ainsi, les compétences de certains professionnels, comme les orthoptistes (voir le décret de compétence du 2 juillet 2001), doivent permettre de pallier le déficit d’ophtalmologistes, à condition que ces compétences soient connues.
La continuité de la prise en charge des enfants dépistés serait par ailleurs facilitée par la transmission d’informations entre les professionnels (en veillant au respect du secret professionnel). Le carnet de santé est le support privilégié de ce partage d’informations. La nouvelle version (utilisée depuis janvier 2006) intègre les examens cliniques et tests simples de dépistage des troubles visuels, auditifs et du développement et les praticiens sont encouragés à noter les résultats à chaque consultation obligatoire. Il est également indispensable que les diagnostics posés par les spécialistes ainsi que les modalités envisagées de prise en charge (autres examens à prévoir, traitements) et les coordonnées des intervenants y figurent.
D’autre part, les parents qui ont des inquiétudes quant au développement de leur enfant ou qui ont reçu un résultat de dépistage positif ont besoin d’être accompagnés et guidés au sein du système mis en place1 . Une information sur l’importance et l’intérêt du dépistage, la signification des résultats, les ressources locales (établissements de soins, associations), le rôle et la compétences des acteurs médicaux et para-médicaux (qui sont nombreux et parfois mal identifiés) aiderait les parents à donner une suite à une demande de dépistage ou de diagnostic.

Propositions d’actions

Identifier les ressources et filières

Il apparaît nécessaire d’identifier et recenser les ressources et filières existantes au niveau local : praticiens libéraux, établissements de soins et autres structures, associations. Les spécificités de chacun en termes de compétences et de moyens matériels seront à préciser : par exemple, le repérage des médecins aptes à examiner des enfants très jeunes, le matériel disponible et les méthodes utilisées (appareils de mesure et cabine employés par les ORL et des ophtalmologistes par exemple). Ces recherches pourront s’appuyer sur des travaux déjà réalisés par des institutions (comme la PMI) ou des associations (Ane-camps par exemple).

Obtenir l’accord des différents professionnels concernés sur les outils à utiliser

Le problème central est celui de la validation. Dans le domaine des dépistages sensoriels, il existe, en France, des techniques et outils validés et largement répandus. De même, dans celui du dépistage des troubles des apprentissages, l’Éducation nationale a fait, en direction de ses personnels, un effort très important d’information, de formation et de mise à la disposition d’outils appropriés. En ce qui concerne les problèmes de santé mentale, la situation est plus problématique et des outils doivent être testés et validés afin d’être utilisés de façon consensuelle.

Informer les professionnels de santé et les parents de l’organisation des filières de soins

Cette information peut se faire par la diffusion :
• d’annuaires à destination des professionnels ;
• de guides à destination des parents, clarifiant le rôle des différents professionnels, comportant les coordonnées des ressources possibles (associations…) et des conseils d’orientation.
Les initiatives émanant d’associations, d’organisation de médecins ou d’institution sont à compléter et à relayer. Un exemple est la brochure « agir tôt » réalisée par l’Anecamps (en collaboration avec la Fondation de France), avec une volonté de diffusion nationale et accompagnée des adresses utiles recensées au sein de chaque département par les acteurs médico-sociaux locaux.
Un certain nombre de ces actions relèvent des compétences de l’Institut national de prévention et d’éducation à la santé (Inpes).

Évaluer l’efficacité du suivi après dépistage

Il est indispensable d’effectuer un état des lieux sur le devenir des enfants dépistés, de s’assurer du suivi des enfants dépistés (suivi du nombre de perdus de vue, rappel des perdus de vue) et de rechercher les obstacles à une prise en charge post-dépistage (sociologiques, économiques, psychologiques, organisationnels…).
L’objectif est de permettre que chaque enfant dépisté puisse bénéficier des examens nécessaires à un diagnostic rapide et à une prise en charge thérapeutique adaptée. Il ne faut pas perdre de vue en santé mentale tout particulièrement la nécessité d’améliorer l’accès aux soins pour les enfants et les adolescents souffrant de troubles cliniquement significatifs. En effet, des progrès conduisant à un meilleur dépistage des troubles affectifs ou comportementaux patents ou débutants restent un objectif vain si des soins adaptés et diversifiés ne peuvent être proposés dans des délais corrects. Pourtant, il en va de l’insertion sociale ultérieure de ces enfants. Le nombre insuffisant de professionnels en santé mentale est un obstacle à la réalisation de cette prise en charge.
Par ailleurs, pour atteindre cet objectif, un travail coordonné est indispensable avec les professionnels paramédicaux, les acteurs de l’Éducation nationale, les travailleurs sociaux et les membres des associations de parents et de patients.

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