Tolérance et rejet en transplantation
2009
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Tolérance d’allogreffe : des modèles expérimentaux à la clinique
Pour tous ceux qui ont vécu l’histoire de l’immunosuppression en transplantation clinique au cours des vingt cinq dernières années, le bilan est certainement moins optimiste que ce que l’on aurait espéré.
Jusqu’au début des années 1980, les seuls traitements disponibles étaient les corticostéroïdes, l’azathioprine et les sérums polyclonaux anti-lymphocytes. Au cours des deux décennies suivantes, sont progressivement apparus et sont devenus accessibles pour l’usage clinique toute une série d’immunosuppresseurs chimiques et biologiques dont l’action était de plus en plus sélective pour les populations de cellules immunitaires, en particulier les lymphocytes T, et pour leurs voies de signalisation intracellulaire. Cependant, ces approches thérapeutiques reposent essentiellement sur l’utilisation conjointe de plusieurs de ces médicaments immunosuppresseurs, administrés de manière chronique, dont l’effet est par définition non spécifique des antigènes impliqués dans les réactions de rejet, les alloantigènes. Par ailleurs, le fait même que la règle soit désormais devenue l’association thérapeutique a fait perdre tout le bénéfice d’une action immunopharmacologique sélective de chaque produit individuel. Aujourd’hui, on utilise de manière courante des protocoles d’immunosuppression souvent très lourds couvrant un large spectre d’actions qui sont certainement très efficaces pour la prévention du rejet aigu d’allogreffe (notamment en transplantation rénale, hépatique et cardiaque) mais demeurent sans effet évident sur le rejet chronique, qui reste la cause la plus importante de perte de fonction des greffons à long terme. De surcroît, ces traitements exposent les patients à bon nombre d’effets secondaires. Ils sont liés non seulement à la toxicité intrinsèque des produits mais également, du fait de leur manque de spécificité, à la dépression globale de l’immunité qu’ils entraînent ce qui explique le risque accru de survenue d’infections et de tumeurs (souvent secondaires à des infections virales). Enfin, ces thérapeutiques sont coûteuses comme le sont également celles utilisées dans la prophylaxie ou le traitement des effets secondaires engendrés.
Force est de constater que cet état de fait a complètement invalidé le dogme qui a prévalu pendant longtemps et suivant lequel le rejet aigu était la cause majeure de la survenue du rejet chronique, et a justifié le développement de protocoles d’immunosuppression de plus en plus agressifs. Face à un tel bilan, il semblerait judicieux d’admettre que même si des progrès majeurs ont été accomplis, la situation est loin d’être idéale. En théorie, envisager des stratégies d’induction de tolérance immunitaire opérationnelle représente la seule issue d’une situation aussi complexe. Tout le problème est de trouver la manière d’accomplir ce changement dans la pratique clinique tout en restant dans un contexte qui soit éthiquement acceptable et qui doit, par définition, tenir compte du fait que les traitements dits conventionnels permettent d’atteindre un taux très élevé de survie des greffons à un an avec une absence quasi-totale de rejet aigu chez les patients non immunisés.
Définition de la tolérance d’allogreffe
Au sens strict, la tolérance d’allogreffe est définie comme l’absence de réaction destructrice vis-à-vis des alloantigènes du greffon par le système immunitaire de l’hôte alors que sont préservées les réactions immunitaires spécifiques d’antigènes étrangers ou tumoraux.
Cette définition, tout à fait valable dans le contexte expérimental, doit cependant être nuancée lorsqu’il s’agit de transfert à la clinique. En effet, du fait de la difficulté, voire de l’impossibilité de tester de manière directe la réactivité immunitaire du receveur vis-à-vis des alloantigènes du donneur, on parle le plus souvent de « tolérance opérationnelle » à savoir, une situation où l’on constate une survie fonctionnelle du greffon à long terme en l’absence d’immunosuppression chronique (Waldmann, 1999

). Il semble évident que lorsqu’une stratégie thérapeutique donnée a permis d’induire une survie durable du transplant en l’absence totale de traitement immunosuppresseur, le receveur est bien tolérant aux alloantigènes même si pour des raisons pratiques (absence de disponibilité des cellules du donneur, absence de tests permettant de cibler de manière directe les mécanismes qui sous-tendent la tolérance…) il soit impossible de conclure de manière définitive.
Chez l’animal, différentes stratégies thérapeutiques ont permis d’aboutir à une tolérance opérationnelle. Les expériences séminales de Billingham, Brent et Medawar, qui leur ont valu le Prix Nobel, avaient établi, il y a plus de 50 ans, qu’une tolérance immunitaire durable vis-à-vis d’alloantigènes pouvait être obtenue, en l’absence de traitement (Billingham et coll., 1953

). Cependant, le transfert à la clinique d’une telle stratégie s’est avéré plus laborieux que prévu. Ainsi, divers problèmes d’ordre pratique et éthique ont jusque-là empêché un transfert à la clinique de la plupart des stratégies, avec quelques exceptions, dont le but ultime est la suspension totale de tout traitement immunosuppresseur. Néanmoins, au cours de la dernière décennie, toute la communauté de transplantation, consciente des enjeux, a été particulièrement sensibilisée à l’idée que les stratégies d’induction de tolérance en transplantation clinique ne pourront voir le jour que grâce à une démarche pas à pas.
La manière la plus efficace d’aboutir à une tolérance en transplantation consiste en la possibilité d’exploiter certains des mécanismes immunologiques qui sous-tendent la tolérance immunitaire physiologique, pour faire en sorte de « reprogrammer » le système immunitaire. Ainsi, tout en reconnaissant les alloantigènes du greffon, il ne génère pas à leur égard de réaction immunitaire « agressive » (Monaco et coll., 1966

; Brent et coll., 1967

; Wood et coll., 1971

; Cobbold et coll., 1992

). Il s’agit en tout état de cause de savoir comment aller de la tolérance au soi vers la tolérance en transplantation.
Pendant longtemps, ce dogme était que l’induction d’une tolérance immunitaire d’allogreffe ne pouvait s’établir que suite à la déplétion clonale, en grande partie dans le thymus, d’un nombre significatif des clones lymphocytaires T alloréactifs. En d’autres termes, il s’agissait de l’établissement d’une tolérance dite centrale (Sykes et coll., 1988

; Sykes et Sachs, 1990

). Cependant, des données solides ont été accumulées dans la littérature au cours de ces vingt dernières années démontrant qu’une tolérance d’allogreffe peut s’établir, chez l’individu adulte, grâce à des mécanismes de tolérance immunitaire dite périphérique et n’impliquant pas la déplétion des lymphocytes T alloréactifs (Qin et coll., 1993

; Cobbold et Waldmann, 1998

; Plain et coll., 1999

; Bushell et coll., 2003

; Cobbold et coll., 2006

; Waldmann et coll., 2006

; Wood et Sawitzki, 2006

). Ces mécanismes, que l’on a pu décrypter en analysant la tolérance physiologique ou tolérance au « soi », incluent l’anergie lymphocytaire et l’émergence de cellules T régulatrices ou, d’après l’ancienne terminologie, de cellules T suppressives. Ils assurent une tolérance active, transférable dénommée également « infectieuse » d’après le terme choisi par Gershon, le premier à avoir décrit le phénomène (Gershon et coll., 1971

).
Mécanismes de la tolérance au « soi »
Le système immunitaire de tout individu normal ne développe pas de réaction agressive vis-à-vis des tissus de l’hôte qui l’héberge bien qu’il soit désormais clairement établi que tout individu, indemne de pathologie auto-immune, héberge des lymphocytes autoréactifs dirigés contre divers autoantigènes ou antigènes du soi. L’existence de ces lymphocytes B et T autoréactifs est prouvée par la présence d’autoanticorps naturels et par la possibilité d’induire des lignées ou des clones de lymphocytes T autoréactifs à partir de sang humain normal. Chez l’animal, on peut provoquer une maladie auto-immune par simple administration d’autoantigènes à des animaux normaux, n’ayant pas de prédisposition particulière à développer une pathologie auto-immune spontanée (Nussenblatt et coll., 1990

; Miller et coll., 1992

; Williams et coll., 1992

). L’absence de maladies auto-immunes malgré la présence de lymphocytes B et T autoréactifs a été pendant longtemps un paradoxe central de l’immunologie. Ces mécanismes, que l’on comprend de mieux en mieux désormais, sont d’autant plus importants que lorsqu’ils sont déficients ou mal contrôlés on assiste à l’émergence des maladies auto-immunes.
Deux voies principales agissent de manière non mutuellement exclusive pour maintenir la tolérance au soi ; il s’agit des mécanismes de tolérance centrale et de tolérance périphérique.
Tolérance centrale
La tolérance centrale, comme son nom l’indique, prend place au niveau des organes lymphoïdes centraux où se déroulent l’ontogenèse et la différenciation des cellules lymphocytaires. Il s’agit chez l’homme de la moelle osseuse pour les lymphocytes B et du thymus pour les lymphocytes T.
Au cours de la différenciation, les lymphocytes autoréactifs les plus dangereux, car porteurs de récepteurs de très haute affinité pour les autoantigènes, sont en règle générale détruits par un phénomène de sélection « négative » (Kisielow et coll., 1988

; Nossal, 1983

et 1994

). Cette sélection négative implique une mort cellulaire par apoptose, c’est-à-dire une mort cellulaire programmée secondaire à la transduction de signaux intracellulaires aboutissant à l’activation d’enzymes spécialisées, les caspases, qui vont fragmenter l’ADN. Le filtre de la sélection négative qui concerne les autoantigènes exprimés par des cellules spécialisées dans le thymus et la moelle osseuse est cependant loin d’être parfait puisque l’on retrouve des lymphocytes auto-réactifs à la périphérie.
Tolérance périphérique
Il existe des mécanismes que l’on regroupe sous la dénomination de tolérance périphérique, qui permettent de contrôler le potentiel pathogène des effecteurs autoréactifs ayant échappé à la sélection négative. Nous allons nous intéresser plus particulièrement aux mécanismes de tolérance périphérique touchant les lymphocytes T, car ils sont les cibles privilégiées en matière de tolérance d’allogreffe, tout en sachant que des phénomènes identiques sont opérationnels pour les lymphocytes B.
Les cellules T autoréactives expriment des récepteurs spécifiques pour les autoantigènes, mais peuvent ne pas « reconnaître » les cellules présentant ces autoantigènes, par un phénomène dit « d’indifférence immunitaire » (Ohashi et coll., 1991

). Cette indifférence est due, du moins en partie, au fait que la plupart des cellules de l’organisme qui portent les autoantigènes ne les « présentent » pas de manière adéquate ou « professionnelle » aux cellules immunitaires, c’est-à-dire en présence de récepteurs spécialisés ou de molécules de « co-stimulation » qui sont en mesure d’apporter aux lymphocytes T tous les signaux indispensables à leur activation. Ainsi, seules les cellules dendritiques sont des cellules « professionnelles » de la présentation de l’antigène, capables de délivrer tous les signaux indispensables à la stimulation efficace du lymphocyte T naïf (Ohashi et coll., 1991

). On sait aujourd’hui que l’indifférence immunitaire fait intervenir également un manque de stimulation de récepteurs de l’immunité innée, les
Toll-Like Receptors ou TLR. Ainsi, un état d’indifférence immunitaire peut être rompu lorsque l’autoantigène est présenté aux lymphocytes T par des cellules portant des molécules de co-stimulation et en présence d’agents stimulant les TLR notamment lorsque les cellules cibles sont localisées au sein d’un site inflammatoire, par exemple induit par une infection virale (Lang et coll., 2005

).
Mais comment expliquer alors que la seule thymectomie réalisée chez une souris normale dans les jours suivant la naissance induit un syndrome polyauto-immun ? Il s’est avéré que cette thymectomie précoce prévient la dissémination à la périphérie d’une catégorie fonctionnelle particulière de lymphocytes T aux propriétés régulatrices qui suppriment l’autoréactivité physiologique (Sakaguchi, 2000

et 2005

). L’auto-immunité peut donc découler d’un défaut ou d’un débordement de mécanismes d’immunorégulation qui modulent l’intensité des réponses immunitaires (Bach et Chatenoud, 2001

; Bluestone et Abbas, 2003

).
Cellules T régulatrices
L’existence d’une immunorégulation est désormais bien prouvée. Elle fait intervenir deux grandes catégories de cellules T régulatrices, appelées également Treg, les Treg naturelles et les Treg induites ou adaptatives.
Cellules Treg naturelles
Les cellules Treg naturelles d’origine thymique constituent une lignée de thymocytes distincte, caractérisée par l’expression du marqueur CD25 (la chaîne a du récepteur de l’interleukine IL-2) et du facteur de transcription FoxP3 (Fontenot et coll., 2003

; Setoguchi et coll., 2005

). C’est de ces cellules Treg d’origine thymique dont il était question ci-dessus dans le cas de la thymectomie. Dans ce cas, l’absence de thymus induit un déficit profond en cellules Treg naturelles et génère un syndrome polyauto-immun incluant une gastrite, une thyroïdite, une orchite ou oophorite (suivant le sexe de la souris) et, plus rarement un diabète insulinodépendant. L’identification du gène FoxP3 est intervenue de manière tout à fait indépendante à l’étude des lymphocytes T régulateurs grâce aux recherches visant à identifier le gène responsable, chez l’homme, d’une maladie rare dénommée syndrome IPEX (pour
Immune dysregulation,
Polyendocrinopathy,
Enteropathy,
X linked) et décrite initialement en 1982. Comme son nom l’indique, ce syndrome regroupe un ensemble de manifestations auto-immunes et dysimmunitaires sévères (dont une colite inflammatoire ou entéropathie, un diabète de type 1 insulinodépendant) qui apparaissent très tôt dans la vie d’enfants de sexe masculin (Wildin et coll., 2002

). Un syndrome polyauto-immun analogue avait été identifié en 1959 chez une souris porteuse d’une mutation spontanée, la souris
scurfy (Lyon et coll., 1990

). Malgré cette description ancienne du syndrome humain et murin, ce n’est que récemment qu’il a été décrit que le même gène est muté dans ces deux situations et qu’il s’agit de
FoxP3. FoxP3 est un membre de la famille des facteurs de transcription
forkhead winged-helix qui en compte 40. Différentes mutations de FoxP3 ont été décrites chez les patients IPEX qui sont dans leur majorité localisées dans la région
forkhead qui se lie à l’ADN (Wu et coll., 2006

). Chez la souris
scurfy, la mutation entraîne la transcription d’une forme tronquée du facteur de transcription FoxP3, dépourvue du domaine
forkhead liant l’ADN.
De manière indépendante et simultanée en 2003, trois laboratoires différents ont démontré que l’expression de
FoxP3 était très nettement augmentée dans les lymphocytes Treg naturels CD4+CD25+ (Fontenot et coll., 2003

; Hori et coll., 2003

; Khattri et coll., 2003

). Par ailleurs, il s’est avéré que ces lymphocytes sont peu nombreux, voire totalement absents, chez les souris
scurfy ainsi que chez des souris invalidées par recombinaison homologue pour l’expression du gène
FoxP3 (souris FoxP3–/–) qui, elles aussi, présentent un syndrome polyauto-immun. Aussi bien chez la souris
scurfy que chez la souris FoxP3–/–, la maladie est contrôlée par l’infusion (ou transfert) de cellules régulatrices CD4+CD25+FoxP3+ provenant de souris normales.
Enfin, lorsque l’on transduit des lymphocytes T CD4+CD25– conventionnels non régulateurs avec des rétrovirus codant pour FoxP3, ces cellules, qui expriment le facteur de transcription en forte quantité, acquièrent des capacités régulatrices et expriment différentes molécules de surface typiques des lymphocytes régulateurs dont CD25, CTLA-4 et GITR. Par ailleurs, on note chez ces lymphocytes transduits, tout comme chez les lymphocytes T régulateurs naturels, une inhibition de la transcription de nombreux gènes codant pour des cytokines telles que l’IL-2, l’IL-4 ou encore l’IFN-γ. FoxP3 semble donc agir comme un répresseur de la transcription de ces gènes.
Quelles sont les bases moléculaires de l’action de FoxP3 qui expliquent que son expression soit associée à la fonction de régulation/suppression ? Il s’agit là d’une question fondamentale pour laquelle il n’existe à l’heure actuelle que des éléments très partiels de réponse.
Cellules Treg adaptatives
Les cellules Treg induites ou adaptatives sont, contrairement aux Treg naturelles, issues de lymphocytes T matures, en majorité CD4+, présents à la périphérie qui acquièrent leur fonction régulatrice lorsqu’ils sont activés par divers antigènes dans des conditions adéquates, notamment dans un environnement incluant des cytokines plus particulièrement l’IL-10, le TGF-b (
Transforming Growth Factor β) ou encore l’IL-4 (Chen et coll., 2003

; Roncarolo et coll., 2006

). Cette dépendance de cytokines des cellules Treg adaptatives pour leur différenciation et/ou leur fonction est une caractéristique majeure qui semble les distinguer des cellules Treg naturelles. Ces dernières peuvent exercer leurs actions en privilégiant le contact cellulaire de manière indépendante de toute cytokine immunorégulatrice (Bach et Chatenoud, 2001

; Bluestone et Abbas, 2003

).
De la tolérance au « soi » à la tolérance en transplantation
Au risque de paraître réductionnistes, nous allons nous concentrer sur deux des mécanismes sous-jacents à la tolérance au « soi », la tolérance centrale par déplétion ou sélection négative et la tolérance périphérique faisant intervenir des cellules Treg car ce sont là deux concepts qui sont le plus activement exploités à l’heure actuelle et qui semblent très prometteurs pour mettre en place des stratégies permettant d’aboutir à une tolérance en transplantation.
Greffe de moelle osseuse du donneur et tolérance d’allogreffe d’organe
Les stratégies basées sur la possibilité de « forcer » la sélection négative des lymphocytes T autoréactifs dans le thymus ont fait appel dans ce but à l’inoculation de moelle osseuse du donneur préalablement à la greffe d’organe.
Induction de tolérance chez la souris
Le groupe de Peter Medawar réalisa, dans les années 1950, les expériences qui lui valurent le Prix Nobel montrant que l’administration à des souriceaux nouveau-nés de moelle osseuse et de cellules allogéniques (exprimant des antigènes d’histocompatibilité distincts de ceux de l’hôte), en l’absence de tout autre traitement immunosuppresseur, induit un état de tolérance. Cet état de tolérance se manifeste par le fait que ces souris, une fois adultes, ne rejettent pas les allogreffes de peau provenant de donneurs totalement identiques (ou histocompatibles) avec le donneur des cellules de moelle osseuse injectées à la naissance alors qu’elles sont capables de rejeter une greffe de peau provenant d’une souris tierce (Billingham et coll., 1953

).
Deux mécanismes expliquent cet effet. Tout d’abord, à ce très jeune âge les lymphocytes T se différencient de manière très active dans le thymus. Les cellules allogéniques injectées qui migrent dans le thymus, à l’instar des cellules présentant les autoantigènes que nous avons citées précédemment, « forcent » la sélection négative par apoptose des lymphocytes T alloréactifs de haute affinité. On peut en effet prouver grâce à des techniques dites de dilutions limites que la fréquence des cellules T alloréactives chez les souris tolérantes est diminuée environ de moitié par rapport à celle de souris normales. En deuxième lieu, on retrouve chez les hôtes tolérants des cellules Treg, capables de transférer la tolérance d’allogreffe à des hôtes naïfs de tout traitement. En d’autres termes, ces souris nouveau-nées, dont le système immunitaire est encore immature, sont particulièrement sensibles à l’induction de la tolérance suite à l’injection de moelle osseuse ou de cellules allogéniques du donneur, et ce, par le biais de mécanismes immunitaires qui combinent des phénomènes de tolérance centrale et de tolérance périphérique (Abramowicz et coll., 1990

).
La question de fond qui se pose afin qu’une telle démarche puisse avoir une quelconque application thérapeutique en transplantation d’organes est de savoir s’il est possible de reproduire un tel phénomène chez un individu adulte.
D’une manière générale si l’on pratique chez un hôte receveur d’une greffe d’organe, une transplantation de moelle allogénique (l’organe et la moelle provenant du même donneur), le système immunitaire de l’hôte est éliminé et complètement remplacé par celui du donneur. C’est ce qui explique d’ailleurs la présence dans ce genre de situation d’un chimérisme complet à savoir, une fois que la reconstitution hématopoïétique est complète toutes les cellules hématopoïétiques du receveur sont de phénotype donneur. Dans ce cas, la greffe d’organe est parfaitement acceptée de manière durable en l’absence de tout traitement immunosuppresseur. Cependant, contrairement à la manipulation que nous avons discuté chez les souriceaux nouveaux-nés, la réalisation d’une greffe de moelle allogénique chez un receveur adulte pose deux problèmes majeurs qui empêchent son application clinique à la grande majorité des patients : tout d’abord cette stratégie implique un traitement de « conditionnement » drastique du receveur visant à l’élimination complète de tout son système hématopoïétique et, deuxièmement, suite à la greffe, la survenue fréquente d’une réaction du greffon contre l’hôte (GvH), situation souvent létale, est un risque totalement inacceptable. La situation au cours de laquelle ce processus a pu être appliqué chez l’homme est celle de patients ayant bénéficié d’une greffe de moelle allogénique pour une maladie hématologique et ayant présenté ultérieurement une insuffisance rénale terminale nécessitant une transplantation rénale. Chez ces patients ayant un macrochimérisme, la greffe de rein du même donneur que celui de la moelle peut se faire sans aucun traitement immunosuppresseur, démontrant ainsi que la tolérance peut être acquise en transplantation chez l’homme par l’injection préalable de cellules souches hématopoïétiques.
Vers une induction de tolérance en clinique
C’est donc dans ce contexte que se sont développées des stratégies que l’on peut définir « intermédiaires » qui consistent en l’inoculation de cellules de moelle du donneur chez un receveur chez qui le conditionnement n’implique pas une myéloablation complète.
Plusieurs laboratoires se sont penchés sur cette problématique. C’est certainement celui de Sachs et de Sykes à Boston qui a le plus contribué à développer cette voie en vue d’une application clinique, à laquelle ils ont d’ailleurs très récemment abouti. Le principe est simple. Il s’agit de pratiquer une myéloablation partielle grâce à une irradiation corporelle à faible dose associée à une irradiation de la loge thymique à plus forte dose suivie par un traitement de courte durée par un sérum polyclonal ou un anticorps monoclonal anti-lymphocytes (Sykes et coll., 1988

; Sykes et Sachs, 1990

; Wekerle et coll., 2002

; Spitzer et coll., 2003

). C’est sous couvert de ce dernier traitement que la transplantation de moelle osseuse du donneur suivie de la greffe d’organe a été pratiquée. Un traitement par ciclosporine est institué au moment de la greffe d’organe qui est appliqué pendant seulement quelques mois. Ce protocole, mis au point suite à des années d’études effectuées tout d’abord chez la souris puis chez le singe, permet des survies de greffes d’organe (peau chez la souris et rein chez le singe) à très long terme, voire indéfinies en l’absence de tout traitement immunosuppresseur (Pascual et coll., 2002

; Murakami et coll., 2009

).
Les mécanismes immunitaires sous-jacents varient quelque peu en fonction de l’espèce concernée. Chez la souris, à l’évidence, les cellules de moelle du donneur sont retrouvées dans le thymus du receveur où elles jouent un rôle important dans la sélection négative d’une certaine proportion des cellules alloréactives. Ceci se manifeste également par la présence d’un macro-chimérisme, c’est-à-dire que chez l’hôte reconstitué et tolérant on observe une proportion significative de cellules hématopoïétiques de phénotype don-neur (au moins 20 à 30 %) (Sykes et coll., 1988

; Sykes et Sachs, 1990

; Wekerle et coll., 2002

; Spitzer et coll., 2003

). En revanche, chez le singe la situation semble différente. Le macro-chimérisme existe dans les quelques jours qui suivent la greffe de moelle du donneur mais il disparaît très rapidement ce qui suggère que dans ce cas les phénomènes de tolérance périphérique, impliquant notamment des cellules Treg et donc vraisemblablement plutôt de type adaptatifs, sont essentiels dans le maintien de la tolérance d’allogreffe (Murakami et coll., 2009

).
De manière remarquable, cette approche a récemment fait l’objet d’un transfert à la clinique. Cinq patients receveurs d’allogreffes rénales à partir de donneurs vivants haplo-identiques ont été traités de la sorte (Kawai et coll., 2008

). Avec un recul maintenant de plus de un an après un arrêt total de l’immunosuppression, le bilan est que 4 des patients ont conservé une fonction rénale complètement normale. Chez un patient, à l’arrêt du traitement immunosuppresseur, un rejet humoral est survenu qui a été contrôlé par les traitements conventionnels. Chez l’homme, comme chez le primate, un macro-chimérisme est observé uniquement dans les tous premiers jours qui suivent la greffe de moelle allogénique (Kawai et coll., 2008

). Bien que ces résultats soient très encourageants, il faut encore se donner du temps pour savoir si les patients vont rester tolérants sur le long terme, et s’ils ne vont pas développer des anticorps dirigés contre le donneur, les stratégies utilisées ciblant davantage les lymphocytes T que les lymphocytes B.
Anticorps monoclonaux anti-lymphocytes T : des outils permettant de générer des cellules T régulatrices adaptatives inductrices de tolérance
Les travaux pionniers de Medawar, cités plus haut, ont été suivis par de très nombreuses tentatives visant à recréer, chez l’individu adulte, un statut immunitaire propice à l’établissement d’une tolérance immunitaire, analogue à celui du nouveau-né. Il est important de citer ici l’apport essentiel du groupe de Monaco au début des années 1970 qui fut le premier à démontrer qu’une administration de courte durée de certains immunosuppresseurs, en particulier de nature biologique tels que des anticorps polyclonaux anti-lymphocytes T, favorisait, chez la souris, l’induction d’une tolérance immunitaire vis-à-vis d’allogreffes de peau (Wood et coll., 1971

). L’avènement des anticorps monoclonaux vers le milieu des années 1970 a permis de confirmer qu’un « conditionnement » adéquat du receveur par administration d’anticorps ciblant des récepteurs de surface lymphocytaire fonctionnellement importants pouvait reproduire de manière satisfaisante les observations faites initialement avec les sérums anti-lymphocytes T polyclonaux. Fait essentiel, chez les rongeurs il a été bien démontré que la tolérance immunitaire peut être induite par ce type de stratégie chez des hôtes adultes thymectomisés prouvant ainsi que les mécanismes immunitaires sous-jacents relèvent bien d’une tolérance périphérique (Qin et coll., 1989

et 1993

).
On peut donc affirmer que, contrairement aux immunosuppresseurs conventionnels qui agissent soit en éliminant les cellules immunitaires soit en inhibant leurs capacités fonctionnelles, les anticorps monoclonaux spécifiques de certains récepteurs lymphocytaires ont la capacité singulière et remarquable d’induire, lorsqu’ils sont administrés de manière adéquate, une tolérance immunitaire vis-à-vis d’antigènes solubles ou tissulaires. Une tolérance peut être obtenue aussi bien vis-à-vis des alloantigènes, dans le cas de la transplantation, que des autoantigènes dans le cas de maladies auto-immunes établies.
D’une manière générale, les produits biologiques (anticorps monoclonaux, protéines de fusion) possèdent un spectre beaucoup plus large d’activités pharmacologiques et biologiques d’où leur capacité de « reprogrammer » les fonctions du système immunitaire. Ainsi, suivant leur spécificité fine, ces agents pourront non seulement éliminer leurs cellules cibles ou inhiber leur fonction, mais également agir comme des agonistes sur des sous-populations lymphocytaires spécialisées en transduisant des signaux d’activation ou encore neutraliser efficacement l’action de cytokines ou de chimiokines. Nombre de ces agents ont montré leur capacité d’induire la prolifération et/ou la différentiation des lymphocytes T régulateurs (Graca et coll., 2002

; Cobbold et coll., 2004

; Wood et coll., 2004

). Le problème reste posé de comprendre exactement si ces cellules T régulatrices sont issues des cellules naturelles suppressives ou s’il s’agit plutôt de lymphocytes T régulateurs de type adaptatif. Il est d’ailleurs fondamental de souligner à ce point qu’une déplétion lymphocytaire massive ne semble pas être un prérequis fondamental de l’induction de tolérance. Les sérums anti-lymphocytes polyclonaux sont de puissants agents déplétants ce qui n’est pas le cas de nombreux anticorps monoclonaux anti-lymphocytes T aux propriétés tolérogènes (anti-CD4 associés ou non à des anti-CD8, anti-CD3, agents ciblant les molécules de co-stimulation). Il n’en reste pas moins vrai que cette conclusion doit être modulée surtout en fonction d’histo-incompatibilité à laquelle on doit faire face : plus la disparité est grande entre donneur et receveur d’organe et plus il est important, du moins dans la période initiale post-greffe, d’agir de manière « agressive » en bénéficiant d’agents capables d’éliminer (du moins en partie) les cellules T alloréactives activées par la voie directe, c’est-à-dire par la reconnaissance du complexe formé par la molécule HLA et le peptide du donneur.
L’ensemble des données disponibles dans la littérature suggèrent que les mécanismes qui sous-tendent l’action tolérogène des produits biologiques relèvent, en proportion différente suivant les agents, d’une déplétion lymphocytaire (dont les mécanismes sont variés et distincts en fonction des agents) et d’une immunorégulation impliquant à la fois une déviation immune et/ou une induction de cellules T régulatrices.
Note pratique importante : les anticorps monoclonaux de première génération produits par des hybridomes de souris ou de rat ont été introduits en clinique il y a plus de 25 ans en transplantation d’organes. Ces anticorps suscitaient deux effets secondaires principaux à savoir, l’immunisation vis-à-vis de la protéine xénogénique et, pour certaines spécificités, une importante libération de cytokines du fait de leur pouvoir mitogénique/activateur, expliquant que leur utilisation se soit initialement limitée à la transplantation. La production d’anticorps monoclonaux humanisés, voire même humains, qui sont moins immunogènes et mieux tolérés a complètement modifié le panorama en permettant une utilisation beaucoup plus large de ces outils thérapeutiques (Riechmann et coll., 1988

).
Avant de s’intéresser au cas particulier des anticorps anti-CD3, il est intéressant de citer les produits biologiques ciblant les voies de co-stimulation. L’activation efficace des lymphocytes B ou T naïfs nécessite la transduction simultanée de deux signaux. Le premier signal est celui transduit par le récepteur pour l’antigène et le deuxième celui qui émane de la stimulation des récepteurs dits de co-stimulation. On comprend, dès lors, l’importance thérapeutique que pourraient revêtir des agents biologiques ciblant ces voies de co-stimulation. Dans le cas des lymphocytes naïfs, les signaux de co-stimulation sont essentiellement transduits par la stimulation du récepteur CD28 qui interagit de manière spécifique avec ses ligands, les molécules de la famille B7, B7.1 (CD80) et B7.2 (CD86), à la surface des cellules pré-sentatrices d’antigènes. Des protéines de fusion ont été produites utilisant la molécule CTLA-4 (pour «
cytotoxic T lymphocyte-associated antigen-4 » ou CD152) qui est un récepteur homologue de CD28 mais qui, à la différence de ce dernier, est exprimé, à de rares exceptions près, uniquement à la surface des lymphocytes T activés (Linsley et coll., 1991

). En effet, le récepteur CTLA-4 est également exprimé de manière constitutive par les cellules T régulatrices CD4+CD25+ dont nous avons parlé précédemment (Read et coll., 2000

; Takahashi et coll., 2000

). La protéine de fusion CTLA4-Ig inclue le domaine extracellulaire de CTLA-4 associé au domaine Fc d’une IgG1 humaine (Linsley et coll., 1992

). Elle est en mesure de bloquer de manière efficace de nombreuses réponses immunitaires pathogènes comme cela a été montré dans des modèles expérimentaux d’auto-immunité et de transplantation (Lenschow et coll., 1992

; Lin et coll., 1993

; Finck et coll., 1994

; Lakkis et coll., 1997

; Onodera et coll., 1997

). En transplantation cli-nique, cette molécule (CTLA4-Ig, bélatacept) a été utilisée avec succès comme immunosuppresseur dans la prévention du rejet d’allogreffe rénale (Vincenti et coll., 2005

). Des essais utilisant le bélatacept et visant à tester la possibilité d’induire une tolérance immunitaire sont en cours, non pas en transplantation mais en auto-immunité (polyarthrite rhumatoïde et psoriasis).
Une autre voie de co-stimulation très importante pour la coopération effi-cace entre cellules immunitaires concerne le couple CD40/ligand de CD40 (CD40L). CD40 est un membre de la superfamille des récepteurs du TNF exprimé de manière constitutive à la surface de nombreux types cellulaires dont les lymphocytes B et les cellules présentatrices de l’antigène. CD40 interagit avec son ligand, CD40L (CD154), un membre de la superfamille du TNF exprimé sélectivement à la surface des lymphocytes T activés. L’interaction CD40/CD40L est indispensable pour la coopération entre lymphocytes B et lymphocytes T, c’est d’elle que dépendent la formation des centres germinatifs et la commutation isotypique au cours de la différenciation des lymphocytes B, après leur rencontre avec l’antigène.
Aussi bien chez la souris que chez le singe, l’administration d’anticorps anti-CD40L, seuls ou en association avec CTLA4-Ig, avait suscité un grand intérêt en transplantation, pour prolonger la survie d’allogreffes, et en auto-immunité (Larsen et coll., 1996

; Larsen et Pearson, 1997

; Niimi et coll., 1998

; Kirk et coll., 1999

). L’enthousiasme est néanmoins rapidement retombé au vu des résultats des premiers essais cliniques utilisant un anticorps anti-CD40L, chez des receveurs d’allogreffe rénale et chez des patients atteints de lupus érythémateux disséminé, qui ont montré la survenue de complications thromboemboliques sévères (Boumpas et coll., 2003

). En fait, la molécule CD40L est également exprimée à la surface des plaquettes ce qui explique leur activation/agrégation suite à la fixation de l’anticorps. Un autre anticorps de même spécificité, IDEC-131, utilisé dans le lupus n’a pas suscité ces mêmes effets secondaires mais, malheureusement, n’a pas montré d’efficacité non plus (Davis et coll., 2001

; Kalunian et coll., 2002

; Kuwana et coll., 2004

).
Cas particulier des anticorps monoclonaux anti-CD3
L’histoire des anticorps monoclonaux anti-CD3 est totalement paradoxale. L’anticorps monoclonal OKT3, une IgG2a de souris, a été le premier monoclonal introduit en clinique au début des années 1980 avant même que la structure complexe de la molécule CD3 et son importance fonctionnelle ne soient connues (Clevers et coll., 1988

; Davis et Chien, 1999

). OKT3 a initialement été utilisé pour traiter et prévenir le rejet d’allogreffe rénale (Cosimi et coll., 1981 a

et b

; Vigeral et coll., 1986

; Debure et coll., 1988

) sans que des données précliniques ne soient disponibles du fait de leur très étroite spécificité d’espèce. En effet, les anticorps anti-CD3 humains n’ont de réactivité croisée qu’avec les lymphocytes T de chimpanzé. Au cours des années 1980, toute une série d’études contrôlées ont clairement démontré que OKT3 était un immunosuppresseur extrêmement puissant, très efficace pour le traitement des épisodes de rejet aigu d’allogreffe rénale (Cosimi et coll., 1981 a

et b

; Ortho, 1985

), une indication pour laquelle il fut rapidement commercialisé aux États-Unis et en Europe. Le suivi des patients traités par OKT3 a permis d’acquérir un énorme bagage de connaissances sur le mode d’action et les effets secondaires des anticorps monoclonaux murins. Au cours des dix dernières années, l’utilisation de OKT3 a été quasi complètement abandonnée du fait du problème de sa mitogénicité (Chatenoud et coll., 1986

, 1989

et 1990

; Cosimi, 1987

; Abramowicz et coll., 1989

; Eason et Cosimi, 1999

; Chatenoud, 2003

) et de la disponibilité de nouveaux immunosuppresseurs biologiques bien mieux tolérés (dont les anticorps anti-CD25).
Le travail expérimental conduit dans différents modèles de rat et de souris a rapidement suggéré qu’au-delà de leur puissante activité immunosuppressive, les anticorps anti-CD3 pouvaient induire une tolérance vis-à-vis d’alloantigènes et d’autoantigènes (Hayward et Shreiber, 1989

; Nicolls et coll., 1993

; Plain et coll., 1999

). De plus, de manière plus surprenante, pouvaient également restaurer la tolérance au « soi » dans le contexte de pathologies auto-immunes établies (Chatenoud et coll., 1994

et 1997

; Belghith et coll., 2003

; Chatenoud, 2003

). Sur la base de ces derniers résultats, les anticorps anti-CD3 ont été réintroduits en clinique, en auto-immunité, sous la forme d’anticorps humanisés non mitogéniques (Bolt et coll., 1993

; Alegre et coll., 1994

) pour une utilisation comme agents tolérogènes.
C’est en auto-immunité que les essais sont conduits à l’heure actuelle chez des patients présentant un diabète insulino-dépendant (de type 1) d’origine récente. Ces études cliniques sont fondées sur les résultats obtenus, il y a de nombreuses années, dans le modèle du diabète auto-immun spontané chez la souris NOD pour «
non obese diabetic ». Ainsi, un traitement de courte durée, seulement cinq jours consécutifs, et à faible dose d’anticorps anti-CD3, induit une rémission complète de la maladie en restaurant la tolérance immunitaire vis-à-vis des antigènes des cellules d’îlots de Langherans (Chatenoud et coll., 1994

et 1997

; Belghith et coll., 2003

; Chatenoud, 2003

). L’effet est durable et spécifique des autoantigènes des cellules b pancréatiques (Chatenoud et coll., 1994

et 1997

). Les mécanismes immunitaires qui sous-tendent cet effet se développent en deux phases distinctes et consécutives (Chatenoud, 2003

). La rémission est déclenchée par la disparition de l’infiltrat de cellules T des îlots (ou insulite) mais cette disparition est transitoire et n’est donc pas impliquée dans l’effet thérapeutique à long terme. Dès 2 semaines après la fin du traitement, l’insulite récidive mais sous forme d’un infiltrat périphérique qui n’envahit pas les îlots et ne détruit pas les cellules b résiduelles (Chatenoud, 2003

; Chatenoud et coll., 1994

). L’effet thérapeutique initial est relayé par la différenciation de cellules Treg appartenant à la catégorie des Treg adaptatives et qui dépendent étroitement de la production du TGF-b (You et coll., 2007

) et qu’elles dépendaient étroitement de la production du TGF-b (Chatenoud, 2003

; Belghith et coll., 2003

; You et coll., 2006

). L’anticorps induit bien un état de tolérance (du moins opérationnelle) puisque les lymphocytes T des souris protégées du diabète ne répondent pas de manière pathogène vis-à-vis des cellules d’îlots alors qu’elles récupèrent une capacité absolument normale de rejeter des greffes de peau allogéniques (Chatenoud et coll., 1994

).
Le transfert à la clinique de cette stratégie a débuté en 2000. Dans une étude de phase I/II utilisant l’anticorps humanisé non mitogénique OKT3γ1 Ala-Ala, 24 patients ont été inclus (12 traités par l’anticorps et 12 témoins non traités) (Herold et coll., 2002

). Les résultats ont confirmé la bonne tolérance du produit tout en suggérant la présence d’un effet thérapeutique favorable un an après le traitement. Cette tendance a été récemment confirmée par les résultats du suivi à deux ans d’un nombre plus important de patients (24 traités par l’anticorps et 24 témoins) (Herold et coll., 2005

).
Une deuxième étude de phase II contrôlée, randomisée contre placebo, incluant un total de 80 patients et utilisant un autre anticorps monoclonal anti-CD3 humanisé non mitogénique dénommé ChAglyCD3 a été menée en Europe. Huit mg d’anticorps ou de placebo ont été administrés par jour pendant 6 jours consécutifs seulement (Keymeulen et coll., 2005

). Les résultats ont montré que le traitement par l’anticorps préserve très efficacement la production d’insuline endogène (évaluée par la mesure du peptide C après stimulation par du glucose intraveineux) à 6, 12, 18 et même 48 mois (Keymeulen et coll. soumis pour publication) après le traitement. Cet effet se traduit également par une diminution significative des doses d’insuline exogène nécessaires au maintien d’un bon contrôle métabolique (Keymeulen et coll., 2005

).
La possibilité de restaurer la tolérance vis-à-vis des antigènes du soi grâce aux anticorps anti-CD3 représente une étape importante du développement de l’immunothérapie à visée « pro-tolérogène ». Les données expérimentales indiquent clairement que les anticorps anti-CD3 suscitent un effet thérapeutique lié à l’activation par l’antigène, comme le montre leur capacité de stimuler sélectivement des cellules Treg adaptatives dépendantes du TGF-β.
Au vu de ces résultats, l’utilisation des anticorps anti-CD3 pourrait s’étendre rapidement à d’autres indications et en particulier à la transplantation où il est désormais envisageable de les utiliser non plus comme simples immunosuppresseurs, comme cela avait été fait dans les années 1980, mais comme agents inducteurs de tolérance immunitaire.
Stratégies de thérapie cellulaire
La culture in vitro de sous-populations spécialisées de cellules immunitaires pouvant être injectées chez les patients transplantés dans un but de conditionnement représente une thérapeutique émergeante qui a grandement bénéficié de l’expérience acquise en immunothérapie des tumeurs. Les deux types cellulaires qui suscitent le plus grand intérêt sont les cellules dendritiques tolérogènes et les cellules Treg.
Les cellules dendritiques ont une très forte capacité de stimuler les réponses immunitaires mais lorsqu’elles sont manipulées in vitro de manière adéquate, elles peuvent exprimer de puissantes capacités tolérogènes qui se traduisent par une capacité à supprimer in vivo les réponses auto-immunes. Nombreux sont les facteurs qui influencent la capacité tolérogène des cellules dendritiques à savoir, le type de cellule dendritique considérée (cellule dendritique myéloïde ou plasmacytoïde), leur degré de différenciation/maturation (les cellules dendritiques immatures ou « semi-matures » sont tolérogènes alors que les cellules dendritiques matures sont immunogènes) et le type de mani-pulation utilisée. Parmi les procédés in vitro les plus étudiés permettant de dériver des cellules dendritiques tolérogènes, on retrouve entre autres le traitement par le CTLA-4Ig, l’IL-10, la vitamine D3 ou le TGF-β. Les mécanismes cellulaires et moléculaires qui sous-tendent la capacité des cellules dendritiques tolérogènes de moduler les réponses immunes varient en fonction du modèle. Ils incluent essentiellement la capacité des cellules dendritiques de stimuler des mécanismes de tolérance périphérique tels que l’anergie lymphocytaire, la déviation immune ou encore l’induction de cellules Treg. Fait important à souligner : si la plupart des études se sont concentrées sur l’utilisation des cellules dendritiques provenant du donneur, il existe également des données montrant la forte capacité immunorégulatrice de cellules dendritiques de phénotype receveur lorsqu’elles sont prétraitées de manière adéquate.
Une autre option est la culture et la multiplication des cellules T régulatrices. Ainsi, des données récentes montrent que des cellules Treg naturelles ou adaptatives peuvent être cultivées in vitro dans le but d’augmenter le nombre de ces cellules tout en conservant leurs capacités de suppression.
En conclusion, les progrès accomplis au cours de ces dernières années dans la compréhension des mécanismes immunitaires qui sous-tendent la tolérance au « soi » sont gigantesques. C’est en exploitant ces mêmes mécanismes, que le système immunitaire utilise chaque jour pour nous protéger de la survenue de pathologies auto-immunes, qu’il est possible d’induire une tolérance immunitaire vis-à-vis d’antigènes étrangers tels que les alloantigènes. Dans le domaine expérimental, y compris chez les primates non humains, l’induction d’une tolérance d’allogreffe n’est plus un mythe et les premiers résultats cliniques, bien que préliminaires, sont désormais disponibles. Des outils thérapeutiques permettant de franchir ce cap important sont accessibles. Il faut maintenant investir de manière beaucoup plus importante et rationnelle sur la mise en place et, surtout, la validation de marqueurs immunologiques permettant de détecter la tolérance immunitaire. C’est l’accès à de tels marqueurs qui nous permettra de réaliser à plus grande échelle des protocoles thérapeutiques visant une tolérance d’allogreffe incluant des patients sélectionnés et dans un contexte éthique adéquat.
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