Origine et maîtrise des complications chez le receveur d’organe

2009


ANALYSE

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Complications chirurgicales, infectieuses et métaboliques après transplantation d’organes

La transplantation d’organes reste une intervention source de complications nombreuses. Bien que les progrès aient été considérables, l’immunosuppression utilisée pour prévenir le phénomène du rejet augmente le risque et la sévérité des complications liées à l’intervention chirurgicale, augmente le risque d’infections, favorise l’émergence d’infections opportunistes et de complications spécifiques aux différents immunosuppresseurs utilisés.
Les complications peuvent se différencier en complications précoces et tardives.

Complications précoces

Les complications précoces sont principalement liées à l’acte de transplantation (prélèvement du greffon) et sont représentées majoritairement par les complications chirurgicales, et les complications infectieuses.

Non-fonction du greffon ou dysfonction du greffon

Le prélèvement expose le greffon au risque de lésions de préservation. Les lésions peuvent être majorées par la durée de la période d’ischémie froide (durée entre le moment du prélèvement du greffon et sa revascularisation chez le receveur) et par la survenue d’une période d’ischémie chaude (arrêt cardiaque ou collapsus chez le donneur sans protection du greffon par la perfusion d’un liquide de préservation). Les lésions secondaires à l’ischémie froide sont limitées par la perfusion d’un liquide de préservation lors du prélèvement et la conservation du greffon en hypothermie. Cependant, la survenue d’une non-fonction ou d’une dysfonction du greffon est possible dans toutes les transplantations.
En greffe rénale, la non-fonction du greffon se manifeste par une absence de reprise de la diurèse souvent conséquence d’une tubulopathie. Habituellement, cette complication est réversible et le plus souvent la diurèse et la fonction rénale reprennent au bout de 2 à 3 semaines. Cependant, cette complication a un impact immédiat nécessitant la poursuite de l’hémodialyse jusqu’à normalisation de la fonction rénale, et peut avoir un impact plus tardif sur la fonction rénale à long terme. Les causes de non-fonction peuvent être la mauvaise qualité du greffon, l’âge du donneur, la durée d’ischémie froide et la survenue d’une période d’ischémie chaude, des difficultés techniques chirurgicales per-opératoires.
En greffe hépatique, dans la majeure partie des cas il s’agit plus d’une dysfonction que d’une non-fonction et le greffon hépatique repart après quelques jours. Cependant en cas de longue dysfonction du greffon, le risque infectieux chez le transplanté est très augmenté et donc la morbidité post-opératoire plus élevée. La non-fonction du greffon peut avoir des conséquences dramatiques. Elle est caractérisée par une élévation forte des transaminases, une chute du taux de prothrombine, une élévation des lactates, et elle peut être accompagnée en per-opératoire d’un syndrome de relargage de cytokines, provoquant un état de choc systémique. La non-fonction du greffon se manifeste donc comme une insuffisance hépatique aiguë dans un contexte post-opératoire. Cette complication peut entraîner le décès du patient par insuffisance hépatique ou dans un contexte de défaillance multiviscérale. La non-fonction du greffon peut être transitoire et la fonction hépatique peut s’améliorer rapidement. La difficulté est de décider si le patient doit être retransplanté. En effet, la survie après retransplantation pour non-fonction du greffon est seulement de 50 % au lieu de 90 % après une première transplantation (rapport annuel 2007 de l’Agence de la biomédecine1 ).
Le « small for size » syndrome est observé en cas de greffon trop petit pour le receveur. Cette complication est observée après transplantation de lobe gauche ou de foie gauche chez un adulte (transplantation à don familial ou foie partagé). Le foie souffre d’un afflux trop important de sang portal et la masse hépatique est insuffisante, le foie est habituellement congestif et cette complication peut être cause de non-fonction du greffon hépatique.
La non-fonction du greffon est la hantise en greffe cardiaque et en greffe pulmonaire et explique la nécessité d’une ischémie froide très courte pour ces deux organes.

Autres complications chirurgicales

Après transplantation rénale, les complications vasculaires sont possibles. La sténose de l’artère rénale est une complication rare mais sévère. La thrombose de la veine cave ou de la veine rénale peut favoriser une insuffisance rénale ou une protéinurie. Les autres complications chirurgicales sont les sténoses de l’anastomose urétéro-urétérale ou les sténoses de l’anastomose urétéro-vésicale. Ces sténoses peuvent entraîner une anurie par obstacle. On peut aussi observer des nécroses de l’uretère qui se manifestent par une fuite urinaire. Les complications hémorragiques, telles que l’hématome rétropéritonéal, l’hémorragie et l’hématome péri-rénal font partie des complications opératoires de la transplantation rénale. Enfin, on peut observer des lymphocèles qui peuvent comprimer le greffon ou les voies excrétrices et qui nécessitent parfois une cure chirurgicale par marsupialisation.
Après transplantation hépatique, les complications les plus fréquentes sont les complications vasculaires d’origine artérielle : la thrombose de l’artère hépatique est la complication principale, plus fréquente après technique de foie partagé (split) ou de don intra-familial ou de greffon pédiatrique (Clavien et coll., 2007renvoi vers). Elle doit être prévenue par la qualité de la suture ; certaines équipes utilisent des techniques de microchirurgie pour l’éviter. L’échographie doppler réalisée dans les premiers jours permet de détecter les ralentissements du flux artériel et d’entraîner une intervention préventive en cas de suspicion de sténose ou de thrombose. En cas de thrombose artérielle hépatique, si le diagnostic est précoce une réintervention chirurgicale de thrombectomie est possible, sinon la retransplantation hépatique est habituellement la règle à court terme car la thrombose de l’artère hépatique peut entraîner une nécrose hépatique ou une nécrose des voies biliaires.
Les autres complications vasculaires artérielles sont la rupture de l’artère hépatique, plus fréquente après infection sévère, parfois secondaire à un pseudo-anévrysme de l’artère hépatique. Les thromboses de la veine porte ou de la veine cave inférieure sont beaucoup plus rares.
Concernant les complications biliaires en transplantation hépatique (Keegan et coll., 2007renvoi vers; Saliba et coll., 2007renvoi vers), les complications fréquentes sont les sténoses anastomotiques biliaires, la fuite biliaire avec fistule biliaire externe, le cholépéritoine, la cholangite ischémique du greffon secondaire à une ischémie artérielle.
Les complications hémorragiques sont encore fréquentes après transplantation, elles peuvent nécessiter une réintervention chirurgicale en cas d’hémopéritoine ou un drainage percutané ou chirurgical en cas d’hématome intra-abdominal.
Les collections intra-abdominales liquidiennes sont fréquentes et traitées par drainage, le risque est leur surinfection.

Complications infectieuses

Les complications infectieuses représentent les principales complications après transplantation (Fishman, 2007renvoi vers). Elles surviennent essentiellement dans les trois premiers mois post-greffe. Les facteurs favorisant la survenue de complications infectieuses sont la condition du patient au moment de la transplantation, la durée de l’opération, les difficultés opératoires, le nombre d’unités sanguines transfusées, l’absence de reprise de fonction du greffon, l’intensité et le type d’immunosuppression (Halloran, 2004renvoi vers), le statut bactériovirologique du donneur et du receveur. Les fortes doses de corticoïdes et l’utilisation d’anticorps polyclonaux ont été particulièrement associées au risque infectieux bactérien ou viral.

Principales infections

Les infections bactériennes sont extrêmement fréquentes dans les premiers jours post-opératoires, que ce soit sous forme de collections infectées, de septicémie, de bactériémie, d’infections urinaires, d’infections pulmonaires. Le site d’infection peut être lié au type de transplantation.
Les infections fongiques sont moins fréquentes depuis quelques années et les modifications de l’immunosuppression (Singh, 2003renvoi vers). Elles sont très souvent associées à la durée de la réanimation et au fonctionnement du greffon. Les principales sont les candidoses, les aspergilloses. Le pronostic des aspergilloses diffuses autrefois catastrophiques reste grave, mais s’est amélioré suite à l’arrivée de nouveaux anti-fongiques.
Les complications virales sont également fréquentes et pour certaines très caractéristiques de la transplantation d’organes, plusieurs virus sont les plus en cause.
L’infection à cytomégalovirus (CMV) (Gane et coll., 1997renvoi vers; Rubin et coll., 2000renvoi vers; Humar et coll., 2005renvoi vers; Kalil et coll., 2005renvoi vers; Hodson et coll., 2005renvoi vers) est soit la conséquence d’une primo-infection, soit la conséquence d’une surinfection ou d’une réactivation virale post-transplantation. Les primo-infections sont les plus sévères, elles se rencontrent dans un contexte ou le donneur est séropositif et le receveur séronégatif. Pour éviter cette complication, une prophylaxie anti-CMV est recommandée, soit de façon systématique, habituellement avec du ganciclovir ou du valganciclovir, soit une prophylaxie de type préemptive (traitement par ganciclovir ou valganciclovir en cas d’apparition d’une virémie CMV ou d’une PCR (Polymerase Chain Reaction) CMV positive avant la survenue de manifestations). La durée de cette prophylaxie est minimum de 3 mois. La primo-infection CMV nécessite absolument un traitement, elle peut être grave, entraînant une dysfonction du greffon, une pneumopathie, voire une infection généralisée. En 2008, elle menace rarement le pronostic vital, elle peut cependant faciliter la survenue de rejet aigu et de rejet chronique. L’amélioration du pronostic est due à l’amélioration des techniques de dépistage virologiques (PCR notamment) et à l’efficacité des traitements antiviraux.
Les infections à Epstein Barr Virus (EBV) sont surtout sévères en cas de primo-infections (donneur séropositif, receveur séronégatif) et ces primo-infections sont plus fréquentes chez les enfants (Newell et coll., 1996renvoi vers; Green et Webber, 2002renvoi vers). Les infections à EBV peuvent faciliter l’émergence de lymphoproliférations post-transplantation, pouvant elles-mêmes évoluer vers un lymphome. La prévention de la primo-infection est donc extrêmement importante et le monitorage de l’EBV par PCR est primordial. Le traitement des lymphoproliférations en post-transplantation peut aller de la simple baisse de l’immunosuppression associée à un traitement anti-viral à une chimiothérapie en cas de lymphome avéré.
Les infections Herpès Simplex 1 et 2 sont rares et exceptionnellement sévères. Les infections Herpès 6 sont encore mal connues mais les techniques de détection de ce virus ont progressé. Ces infections peuvent être associées à des hépatites en post-transplantation et favoriser l’émergence de rejet. Les primo-infections Herpès 8 ou les réactivations Herpès 8 peuvent être associées à l’émergence de sarcome de Kaposi et sont rares.

Importance des hépatites

L’impact des virus de l’hépatite B (VHB) et de l’hépatite C (VHC) est plus important en transplantation hépatique qu’en transplantation rénale ou d’autres organes. En transplantation hépatique, le virus de l’hépatite B se manifeste essentiellement par la récidive de ce virus chez les patients transplantés pour hépatopathie chronique due au virus de l’hépatite B. En l’absence de prophylaxie contre le VHB, la récidive virale B était de 80 %. L’immunoprophylaxie par les immunoglobulines anti-HBs à hautes doses au long cours a permis de réduire de façon significative le taux de récidive virale B à 30 % et a permis une amélioration significative de la survie (Samuel et coll., 1993renvoi vers; Shouval et Samuel, 2000renvoi vers). Des progrès majeurs ont été effectués ces dernières années et l’association d’analogues nucléosidiques ou nucléotidiques avec des immunoglobulines anti-HBs au long cours a permis de réduire la récidive virale B à moins de 10 % des patients greffés (Shouval et Samuel, 2000renvoi vers; Terrault et coll., 2005renvoi vers; Samuel et coll., 2006renvoi vers; Roche et Samuel, 2007renvoi vers). Le risque de récidive virale B est plus élevé en cas de réplication virale forte au moment de la transplantation. L’hépatite B acquise post-transplantation hépatique est possible lorsque le greffon provient d’un donneur porteur de l’anticorps anti-HBc (donneur ayant eu une hépatite B) (Roque Afonso et coll., 2002renvoi vers). Dans ce contexte, une prophylaxie antivirale B par antiviraux et/ou immunoglobulines anti-HBs peut être nécessaire. Le risque de transmission de l’hépatite B est majoré si le receveur est naïf de l’infection par le VHB (absence d’anticorps anti-VHB). Après transplantation rénale, cardiaque ou pulmonaire, des réactivations du virus de l’hépatite B chez le receveur sont possibles lorsque celui-ci a eu l’hépatite B dans le passé. La présence de l’anticorps anti-HBc ou de l’AgHBs chez un receveur de rein, de cœur, ou de poumon doit entraîner une surveillance virologique spécifique et dans certains cas un traitement antiviral préventif. L’immunosuppression post-transplantation peut provoquer la réactivation du virus. L’acquisition d’une hépatite B péri-transplantation est heureusement devenue très rare. Cependant dans tous les cas, la vaccination anti-VHB des candidats à la transplantation est un élément majeur de prophylaxie.
Après transplantation hépatique, la récidive virale C est constante lorsque le patient est transplanté pour une cirrhose due au virus de l’hépatite C avec présence du virus dans le sang ce qui est le cas dans 90 % des cas (Feray et coll., 1999renvoi vers; Forman et coll., 2002renvoi vers; McCaughan et coll., 2004renvoi vers; Samuel et coll., 2006renvoi vers). Les méthodes de prophylaxie de cette récidive sont actuellement peu efficaces. Le traitement de la récidive virale C par l’interféron pegylé et la ribavirine peut entraîner la disparition du virus dans 30 % des cas (Berenguer et coll., 2006renvoi vers; Carrion et coll., 2007renvoi vers). Cependant, cette récidive virale va entraîner l’apparition d’une hépatite chronique puis d’une cirrhose sur le greffon dans des délais plus brefs que dans une population non transplantée (20-25 % de cirrhose à 5 ans) et donc pénaliser la survie à long terme des patients transplantés pour hépatite C. La récidive C est plus sévère chez les patients transplantés pour co-infection VIH-VHC (Duclos Vallée et coll., 2008renvoi vers). Les hépatites C acquises post-transplantation sont devenues extrêmement rares.
En transplantation rénale, les patients déjà infectés par le virus de l’hépatite C peuvent avoir une réactivation de leur infection virale et une progression plus importante de leur hépatite chronique C vers la cirrhose. La mauvaise tolérance et le risque de rejet secondaire au traitement antiviral par interféron après une greffe rénale poussent à effectuer ce traitement antiviral avant la transplantation.

Complications liées au donneur

Le donneur n’est pas vierge d’infection et peut transmettre de très nombreuses infections. Les virus, bactéries ou parasites peuvent en effet être localisés dans les cellules du greffon ou dans les cellules ganglionnaires ou lymphocytaires qui accompagnent le greffon. Les infections virales les plus couramment transmises sont le cytomégalovirus, l’Epstein Barr virus, l’Herpès virus 8 (HHV8), les autres virus, plus rarement le virus de la rage, le West Nile Virus (Iwamoto et coll., 2003renvoi vers; Srinivasan et coll., 2005renvoi vers) et les virus des hépatites. Parmi les infections bactériennes, le bacille de la syphilis peut être transmis et parmi les infections parasitaires, l’infection la plus fréquente transmise est la toxoplasmose. La prévention de ces infections doit être faite par des sérologies bactériennes, virales, parasitaires chez le donneur et le receveur afin de réaliser le meilleur appariement et surtout la meilleure prévention de ce risque d’infection acquise. Ce risque doit être également évalué dans une notion de bénéfice/risque pour le receveur. À long terme après la transplantation, les complications infectieuses sont plus rares.

Prévention des infections

L’un des grands principes pour réduire la morbidité post-transplantation est la prévention des complications infectieuses.
La prévention des complications bactériennes passe par la préparation du candidat receveur à la transplantation, la réduction des complications chirurgicales, la bonne utilisation des antibiotiques, et une modulation adéquate des immunosuppresseurs (Fishman, 2007renvoi vers).
Les complications virales quant à elles doivent être prévenues par l’appariement des donneurs/receveurs, notamment pour le cytomégalovirus et l’EBV, par l’utilisation d’anti-viraux à titre préventif et thérapeutique et également par la modulation de l’immunosuppression. En cas de greffe appariée entre donneurs et receveurs CMV négatifs avec utilisation de produits sanguins labiles CMV négatifs, il n’y a pas d’acquisition de l’infection à CMV. Cependant, les règles actuelles de répartition des organes rendent difficile cet appariement, de même les tentatives d’appariement entre donneurs et receveurs séronégatifs pour EBV font courir le risque d’un allongement délétère des délais d’attente de la transplantation.

Complications tardives

Les complications tardives sont davantage en liaison avec l’immunosuppression.

Complications infectieuses

Plus on s’éloigne de la transplantation et moins le risque infectieux est important. Cela ne veut cependant pas dire qu’il n’existe pas. Il peut y avoir des complications infectieuses secondaires à des complications tardives (thromboses tardives de l’artère hépatique ou angiocholite post-transplantation hépatique). Ces complications peuvent être favorisées par une immunosuppression forte sur le long terme ou par un traitement de rejet aigu tardif. En greffe rénale, les infections à virus BK posent un problème et peuvent entraîner une néphropathie à virus BK et une insuffisance rénale terminale. Elles semblent liées à l’intensité de l’immunosuppression. Les différents traitements antiviraux (cidofovir, leflunomide, quinolones et immunoglobulines polyvalentes) n’ont pas fait leur preuve et la baisse de l’immunosuppression peut favoriser l’émergence d’un rejet chronique (Bohl et Brennan, 2007renvoi vers).

Complications cardiovasculaires et métaboliques

Concernant les complications cardiovasculaires et métaboliques (John et Thuluvath, 2002renvoi vers; Johnston et coll., 2002renvoi vers; Heisel et coll., 2004renvoi vers; Khalili et coll., 2004renvoi vers; Neal et coll., 2005renvoi vers), le risque cardiovasculaire global après transplantation est augmenté par rapport à la population générale. Tout doit être fait pour prévenir cette complication : prévention de la dyslipidémie, du diabète, arrêt du tabac, mesures diététiques, exercices physiques. En effet, ces complications cardiovasculaires apparaissent comme les premières causes de décès sur le long terme après transplantation rénale et hépatique. Elles ont souvent été sous-estimées notamment en transplantation hépatique et il est maintenant très important d’évaluer ce risque cardiovasculaire avant la transplantation puis de le suivre et de le prévenir après la transplantation. Le renforcement autour des centres de transplantation de spécialistes des complications dysmétaboliques et de cardiologues spécialisés dans les problèmes post-transplantation devrait permettre de diminuer la morbidité et la mortalité liées à ces complications.
La fréquence de l’hypertension artérielle varie de 20 à 50 % en transplantation hépatique à 70 % en transplantation rénale. L’hypertension est favorisée par les traitements immunosuppresseurs et notamment l’utilisation de corticoïdes et d’inhibiteurs de la calcineurine. L’hypertension artérielle a un impact en transplantation sur le risque global cardiovasculaire à long terme. Cette complication doit être prévenue et traitée en modifiant les immunosuppresseurs ou en modifiant leur dose et par l’utilisation d’anti-hypertenseurs.
Concernant les complications métaboliques, la plus fréquente est le diabète. Le diabète de novo post-transplantation hépatique est fréquent. Il existe également des aggravations de diabètes pré-existants à la transplantation. Il faut différencier les déséquilibres glycémiques précoces des premières semaines post-transplantation et les diabètes préxistants et se développant sur le long terme. Les facteurs de risque sont l’utilisation des corticoïdes, d’inhibiteurs de la calcineurine et particulièrement le tacrolimus par rapport à la ciclosporine, la présence du virus de l’hépatite C, l’obésité et toutes les affections dysmétaboliques. Ces complications peuvent avoir des conséquences sur la survie du greffon notamment pour le greffon rénal par le biais d’atteintes artérielles et sur la survie du patient rentrant dans le cadre plus général de la morbidité d’origine cardiovasculaire et dysmétabolique. La prévention des complications métaboliques repose sur une immunosuppression sans ou avec des doses faibles de corticoïdes, la diminution ou l’arrêt précoce des corticoïdes, la modification de l’immunosuppression. Le traitement du diabète doit toujours être entrepris pour obtenir un équilibre de la glycémie et des résultats adéquats sur le long terme.
La dyslipidémie est un problème fréquent. Les facteurs de risque sont le type de transplantation, la présence d’une obésité, les habitudes diététiques, les facteurs génétiques, l’utilisation de fortes doses de corticoïdes, l’utilisation également d’inhibiteurs de mTOR (sirolimus, évérolimus). La prévention et le traitement reposent sur des modifications diététiques essentiellement et dans certains cas l’utilisation de statines est indispensable.
L’obésité est une complication qui devient fréquente. Dans les suites de la transplantation hépatique, on note une prise de poids avec une augmentation de l’IMC (indice de masse corporelle). Les patients ayant un IMC supérieur à 30 représentent 14 % des patients transplantés.

Récidive de la maladie initiale

En transplantation hépatique, beaucoup de maladies peuvent récidiver, l’impact sur le devenir du greffon et du patient est variable. La récidive virale B est maintenant bien prévenue par la combinaison des immunoglobulines anti-HBs et des antiviraux (voir plus haut). La récidive virale C a un impact majeur sur la survie des patients et des greffons (voir plus haut). Les maladies auto-immunes comme la cirrhose biliaire primitive (CBP), l’hépatite auto-immune et la cholangite sclérosante primitive peuvent récidiver. La récidive de la CBP reste essentiellement histologique et a peu d’impact sur la survie du greffon. La récidive de l’hépatite auto-immune conduit souvent à maintenir une immunosuppression assez forte et est habituellement contrôlée par la corticothérapie. La récidive de cholangite sclérosante peut dans certains cas entraîner des angiocholites. La récidive de l’alcoolisme touche 20-25 % des patients transplantés pour cirrhose alcoolique, la récidive massive de l’alcoolisme n’est cependant observée que dans 10 % des cas. Une prise en charge pré- et post-transplantation des conduites addictives s’avère indispensable.
La récurrence de la néphropathie initiale après transplantation rénale est une cause majeure de dysfonction du greffon et d’échec de greffe. Les glomérulonéphrites sont à l’origine de près de 80 % de ces récidives mais ces chiffres doivent être interprétés avec précaution dans la mesure où des investigations extensives (immunofluorescence, microscopie électronique) sont souvent nécessaires pour confirmer une récidive et ainsi préciser la prévalence réelle de telles complications. Parmi ces glomérulonéphrites, les étiologies les plus fréquemment retrouvées sont dans l’ordre décroissant la hyalinose segmentaire et focale (HSF, jusqu’à 30 % des cas), la néphropathie extra-membraneuse et la néphropathie à dépôts d’IgA et les néphropathies membrano-prolifératives, alors que les néphropathies secondaires aux anticorps anti-membrane basale glomérulaire et au lupus érythémateux disséminé sont moins fréquemment impliquées (< 10 %). Hors du champ des glomérulopathies, les récidives de syndrome hémolytique et urémique (SHU) liées à des déficits héréditaires en facteurs impliqués dans le contrôle de l’activité du complément représentent une cause fréquente de perte du greffon. Jusqu’à présent, aucune stratégie immunosuppressive n’a permis de démontrer son efficacité réelle dans la prévention des récidives, quelle qu’en soit la cause et ce dernier point doit faire l’objet d’investigations cliniques spécifiques.
En conclusion, la transplantation d’organes reste source de nombreuses complications immédiates et tardives par rapport à une intervention chirurgicale classique pour de nombreuses raisons :
• l’état général des receveurs souvent dégradé au moment de la transplantation, particulièrement en transplantation hépatique ;
• la lourdeur de l’intervention chirurgicale notamment en transplantation hépatique ;
• les conséquences propres à l’ischémie/reperfusion du greffon ; la qualité du greffon qui peut exposer au risque de dysfonction du greffon ;
• l’utilisation d’immunosuppresseurs pour prévenir le rejet de greffe majorant le risque infectieux et exposant aux complications propres aux immunosuppresseurs ;
• le rejet de greffe qui altère le fonctionnement du greffon, et expose à la majoration du traitement immunosuppresseur.
Cependant, ces dernières années ont connu une diminution significative de la morbidité et de la mortalité post-transplantation grâce aux progrès effectués à tous niveaux. Une plus grande attention doit être portée sur les complications à long terme en raison de l’allongement des durées de survie post-transplantation afin d’améliorer encore cette survie mais également afin de diminuer les complications propres à la transplantation et à son environnement.

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