2008


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Communications

Promotion de l’activité physique : définir des stratégies intégrées en Europe

L’impact de l’activité physique sur la santé est bien établi à la fois au niveau individuel et populationnel (Centers for Disease Control and prevention, 1996renvoi vers ; Oja et Borms, 2004renvoi vers ; Bouchard et coll., 2007renvoi vers) et son importance, en terme de santé publique, a été reconnue par des documents récents de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de la Direction générale de la santé et de la protection des consommateurs (DG Sanco) de la Commission européenne (OMS, 2004renvoi vers ; Branca et coll., 2007renvoi vers ; CE, 2007renvoi vers). Cependant, les experts dans le domaine de la promotion de l’activité physique sont encore peu nombreux et, parmi les décideurs, l’attitude qui consiste à affirmer, en matière d’activité physique, que « tout le monde peut en faire, ce n’est qu’une question de motivation » reste fréquente.
Même les experts en promotion de la santé en sont souvent convaincus : avec des moyens suffisants, il serait aisé d’avoir un impact considérable sur l’activité physique de la population. La Suisse a vécu un échec retentissant dans ce domaine en 2002. Il s’agissait de mettre en place une intervention de promotion de l’activité physique à grande échelle (Martin et Schlatter, 2003renvoi vers) : le « Défi-santé » créé par des experts en communication et en santé publique avec des organisations partenaires. Ce programme visait les personnes physiquement inactives, c’est-à-dire celles qui font moins d’une demi-heure d’activité physique d’intensité modérée 5 jours par semaine ou d’intensité élevée 3 jours par semaine. Elles étaient encouragées, par l’intermédiaire de la télévision et de la presse écrite, à augmenter leur activité physique et à la maintenir au-delà de 3 mois. Malgré des cadeaux très attractifs (loterie, année gratuite de souscription à une assurance complémentaire santé et assurance santé...), ce programme fut un échec. Alors que les organisateurs attendaient entre 1 000 et 10 000 participants seulement 55 personnes se sont inscrites. À la fin de l’intervention, seulement 8 personnes indiquaient être parvenues aux objectifs fixés !
Différentes raisons pour expliquer cet échec ont été évoquées : l’intervention n’avait pas été suffisamment remarquée par le grand public et le message n’avait pas atteint la population cible (personnes inactives physiquement) ; l’intervention n’avait pas été comprise ; les éléments de motivation utilisés étaient inappropriés. En fait, d’après les différentes enquêtes réalisées pour mieux analyser cet échec, il semble qu’une part importante des personnes insuffisamment actives physiquement ne se sont pas senties comme faisant partie de la population ciblée par le Défi-santé. Cette expérience a donc mis en lumière les limites d’une approche fondée sur une communication isolée et la nécessité d’une approche intégrée pour promouvoir l’activité physique.

Vers un modèle de promotion de l’activité physique

Il existe un certain nombre de pays dans lesquels existe une tradition de promotion de l’activité physique et ces démarches ont été décrites et analysées par différents auteurs (Foster, 2000renvoi vers ; Edwards, 2004renvoi vers ; Cavill et coll., 2006arenvoi vers). La Finlande a été le premier pays européen à développer une approche intégrée de la promotion de la santé à travers l’activité physique (HEPA pour Health-Enhancing Physical Activity). Un modèle utilisé par l’Institut Finlandais de la santé publique pour illustrer les rôles respectifs de l’individu et de la société dans les comportements de santé peut être adapté aux comportements d’activité physique (figure 1Renvoi vers).
Figure 1 Rôle des facteurs intrapersonnels et de l’environnement social et physique sur les comportements d’activité physique
Bien que les facteurs intrapersonnels (attitudes, valeurs, attentes, capacités, compétences...) jouent un rôle au niveau individuel, une importance croissante est accordée aux facteurs d’environnement social et physique. Les changements opérés au sein des familles, de l’offre de sports, des infrastructures de transport ou des conditions de logement sont susceptibles d’avoir une influence sur l’activité physique, non seulement au niveau individuel mais également des groupes (figure 2Renvoi vers).
Figure 2 Effets des changements de l’environnement social et physique sur les profils d’activité physique au niveau de la population
Dans une approche systématique fondée sur les preuves, la question clé est non seulement la compréhension des déterminants des comportements d’activité physique, mais aussi la communication sur les principes et les mécanismes de la promotion de la santé à travers l’activité physique. Le réseau européen pour la promotion de la santé par l’activité physique (HEPA Europe network) a développé un cadre pour la promotion de l’activité physique inspiré d’autres modèles (Martin-Diener et coll., renvoi vers soumis). Les deux éléments de base du cadre proposé sont d’une part un enchaînement de différents niveaux de promotion de la santé par l’activité physique qui commence par un processus politique et qui se termine avec l’effet sur la santé et d’autre part une structure globale cyclique avec l’évaluation comme lien essentiel entre les éléments du système (figure 3Renvoi vers).
Figure 3 Schéma du modèle HEPA Europe pour la promotion de l’activité physique
Le lien causal entre le comportement d’activité physique et la santé peut être mis en lumière afin de souligner que l’activité physique a des effets sur les dimensions biologiques, psychologiques et sociales de la santé. Le comportement d’activité physique peut être appréhendé comme une activité spécifique telle que la marche, une discipline sportive ou une activité de loisir (comme le tennis par exemple), mais il peut être également appréhendé dans son ensemble comme l’activité physique globale ou totale. Les différents types d’activité physique concernent les activités de loisir (incluant les sports), l’activité physique durant le travail (ou à l’école chez les enfants), l’activité physique dans l’environnement domestique et celle liée aux transports. Dans le contexte de la santé, l’activité physique est généralement définie par sa durée, sa fréquence et son intensité. Pour certains effets sur la santé, par exemple les effets sociaux ou psychologiques, le contexte de l’activité physique constitue une dimension supplémentaire de grande importance.
Différents facteurs peuvent être corrélés ou être des déterminants du comportement d’activité physique. Les facteurs « non modifiables » (c’est-à-dire sur lesquels aucune action peut intervenir) incluent l’âge, le sexe et les facteurs héréditaires mais aussi l’appartenance ethnique et le climat. Les facteurs « modifiables » peuvent être répartis en trois groupes : les déterminants intrapersonnels, les facteurs liés à l’environnement social et ceux liés à l’environnement physique (figure 2Renvoi vers). Ces différents facteurs peuvent aussi dépendre les uns des autres et certains d’entre eux peuvent avoir des effets sur un type spécifique d’activité physique et pas sur un autre. Alors que les programmes et les activités doivent tenir compte des facteurs « non modifiables » des groupes cibles, ils ont généralement pour objectif de changer les facteurs de comportement modifiables. Il existe une large gamme de schémas pour caractériser les interventions de promotion de l’activité physique. Selon le schéma proposé par le groupe HEPA Europe, on peut distinguer les 4 groupes suivants : des activités structurées telles que des classes d’éducation physique et sportive (EPS), des activités dans des environnements attrayants, du conseil et du coaching, des campagnes et de l’événementiel. La mise en place de ces mesures implique différentes phases telles quele développement et la coordination, la formation de médiateurs ou incitateurs, un réel soutien financier ou technique. Les interventions peuvent être décrites par secteur impliqué (tel que la santé, le sport ou le secteur des transports...) et en fonction du niveau géographique (du local à l’international). Bien que cela ne soit pas toujours le cas, les programmes et activités sont idéalement fondés sur un processus de décision politique correspondant à « des codes formalisés écrits, des régulations ou décisions soutenues par l’autorité légale, des standards écrits aidant au choix tels que des guidelines ou des normes sociales non écrites » (Schmid et coll., 2006renvoi vers).
Afin de fournir un retour des informations et d’éviter les situations où l’activisme prédomine, l’évaluation est essentielle. Les expériences pratiques et les preuves les plus facilement disponibles doivent être collectées systématiquement à tous les niveaux. Elles doivent être mises à disposition non seulement des experts et décideurs des politiques concernées, mais également des acteurs impliqués dans les programmes. Finalement, nous devons prendre en compte le fait que dans la vie quotidienne, non seulement nos politiques et interventions, mais aussi d’autres facteurs tels que le climat social, l’économie et les interventions dans d’autres secteurs influencent le succès des actions de santé publique. Le rôle de ces facteurs est reconnu comme élément du contexte sociétal et devrait idéalement être pris en considération dans le planning et l’implantation de politiques d’interventions.
Le schéma proposé par le réseau HEPA Europe donne une vue d’ensemble des relations générales, des facteurs potentiellement causaux et des mécanismes de promotion d’une activité physique favorable à la santé (HEPA). Il a déjà été utilisé avec succès en matière de communication en direction de publics variés et il illustre le fait que la base de connaissances (« evidence base ») doit jouer un rôle central pour assurer l’utilisation des preuves disponibles et pour l’utilisation optimale des ressources. Afin de mettre en lumière des aspects plus précis de la promotion de l’activité physique, des niveaux ou des relations sélectionnés peuvent être « zoomés » et discutés en détail en utilisant d’autres modèles spécifiques.

Rôle des sports

Le rôle des activités spécifiquement sportives est souvent discuté dans la promotion de la santé par l’activité physique. Il y a des différences culturelles considérables dans la définition du « sport » qui peut aller des « disciplines olympiques exclusivement » aux « sports organisés à l’école et en clubs », et « toute activité sans but utilitaire » jusqu’à « toute activité physique incluant la marche ou le vélo comme moyen de transport ». Ces différences de contextes historiques et culturels se reflètent dans les différences importantes de participation au sport rapportées dans l’enquête Eurobaromètre 2004 où la proportion de personnes ne faisant ni exercice ni sport varie de 4 % à 66 % dans 25 pays membres de l’Union Européenne (Commission européenne, 2004renvoi vers).
Ces dernières années, la participation à certains sports traditionnels a diminué et certains clubs de sport ont constaté une diminution du nombre d’inscription chez les jeunes. Ces observations peuvent souvent être expliquées par des changements démographiques, par l’importante augmentation du nombre de disciplines sportives et par la tendance à recruter des membres de club toujours plus jeunes. Dans le même temps, l’offre commerciale telle que les clubs de « fitness », les activités organisées en dehors des clubs traditionnels telles que les « nuits du skate » et de nombreuses autres activités individuelles se sont largement développées. L’éducation physique à l’école diffère des sports pratiqués en club et de ceux pratiqués dans un contexte commercial ou individuel dans le sens où elle concerne tous les élèves et pas seulement ceux qui sont particulièrement intéressés. Malheureusement, elle n’est souvent pas prioritaire par rapport à d’autres matières scolaires et l’éducation physique est plus vulnérable aux contraintes budgétaires.
Dans les quelques pays où le niveau habituel d’activité physique a augmenté au cours des dernières années, le phénomène a souvent été attribué au sport et aux activités de loisir alors que des améliorations au niveau des activités de la vie quotidienne étaient moins souvent observées.
Une des questions qui se pose fréquemment est la contribution potentielle des sports dans l’amélioration de la santé par l’activité physique. Une analyse des données de l’enquête suisse sur la santé 2002 (Lamprecht et Stamm, 2005renvoi vers) montre que dans un pays où le sport s’entend dans le sens utilisé en Europe, il existe une forte corrélation entre le sport et les comportements d’activité physique favorables à la santé (HEPA). Mais, même parmi les personnes qui disent ne pas faire de sport, 26 % suivent les recommandations minimales d’activité physique favorables à la santé et 40 % suivent seulement les recommandations de durée hebdomadaire totale mais pas la fréquence recommandée par semaine (figure 4Renvoi vers).
Les perspectives pour le développement futur du secteur du sport dépendent évidemment des situations spécifiques propres à chaque pays. Dans les pays qui ont déjà connu un fort développement du sport pour tous dans le passé, l’enjeu sera de maintenir le niveau élevé de participation, l’accès aux infrastructures et le système de travail bénévole qui accompagne généralement ce développement. Dans d’autres pays au passé culturel et historique différent, une augmentation réelle du sport et une contribution supplémentaire de celui-ci semblent possibles pour promouvoir l’activité physique.
Figure 4 Comportement d’activité physique selon le comportement sportif dans l’enquête suisse sur la santé 2002
Le rôle du secteur du sport dans la promotion de l’activité physique peut prendre différentes formes. Il peut s’agir d’un développement indépendant avec peu de coopération entre sport proprement dit et promotion d’une activité physique favorale à la santé (HEPA), ou d’un partenariat réel entre les deux secteurs dans lequel les sports peuvent apporter leur important pouvoir de motivation et leur investissement volontaire traditionnellement fort, et dans quelques pays le secteur du sport a même un rôle majeur dans la promotion de l’activité physique favorable à la santé. Dans tous les cas, le principal défi reste d’atteindre la partie de la population qui n’est traditionnellement pas impliquée dans le sport. Pour la promotion de l’activité physique favorable à la santé, la contribution des sports et de la culture est de toute évidence essentielle, mais ces deux secteurs ne peuvent pas représenter isolément « la » solution.

Rôle du niveau national illustré par l’exemple de la Suisse

Alors que la plupart des mesures de promotion de l’activité physique deviennent opérationnelles au niveau local, l’approche nationale reste d’une grande importance pour le soutien politique, mais aussi pour coordonner les campagnes et les programmes. La Finlande et plus récemment le Royaume-Uni et les Pays-Bas ont été les premiers pays européens à développer des stratégies nationales de promotion de l’activité physique pour la santé (Foster, 2000renvoi vers). D’autres les ont rejoint depuis et leurs rapports sont répertoriés dans l’inventaire des documents des politiques de promotion établi par le réseau HEPA Europe1 . Parmi ces pays, la Suisse a défini sa conception d’une politique du sport avec comme objectif pour 2000 « plus de personnes actives physiquement ». Un des documents de suivi de cette politique se rapporte à la composante activité physique de la stratégie nationale suisse sur la nutrition, l’activité physique et la santé (figure 5Renvoi vers) développée au premier semestre 2007. Les paragraphes suivants sont basés sur les éléments centraux de ce document. Ils prennent en compte les récentes discussions et développements engagés dans les secteurs du sport et de la santé à la fois aux niveaux national et local.
Figure 5 Relation entre activité physique, activité physique pour la santé HEPA et sports au sein de la composante activité physique de la stratégie nationale de nutrition, de l’activité physique et de la santé en Suisse
Comme le document a été élaboré conjointement par l’Office fédéral de santé publique et par celui des sports, une approche commune de l’activité physique a d’abord été définie en premier. L’activité physique pour la santé HEPA répond aux exigences minimales de fréquence, de durée et d’intensité selon les recommandations nationales, avec le minimum d’effets indésirables et de risques pour la santé. Les sports comme certaines activités quotidiennes peuvent répondre à ces critères.
Les documents décrivent ensuite la situation en Suisse. Le sport pour tous est bien développé, les infrastructures pour les sports aussi bien que pour la randonnée sont satisfaisantes, et la majorité des enfants vont à l’école à pied ou en vélo. Néanmoins, environ les deux tiers des adultes suisses sont considérés comme insuffisamment actifs physiquement et l’impact économique correspondant est estimé à au moins 2 900 morts prématurées (pour une population de 7,1 millions) tandis que les coûts directs de santé atteindraient 1,6 milliard d’euros par an. Comme dans beaucoup d’autres pays, les données concernant le comportement d’activité physique des enfants ne sont pas encore disponibles, mais il existe un intérêt croissant pour l’activité physique de ce groupe d’âge. Il y a des indications en faveur d’une augmentation récente des comportements sportifs, mais l’activité physique dans la vie de tous les jours semble diminuer (Office fédéral suisse des sports, 2006renvoi vers). Ceci peut indiquer que non seulement la santé, le sport et l’éducation mais également d’autres secteurs comme les transports, la planification urbaine et l’environnement ont un impact sur le comportement d’activité physique.
Globalement les défis sont multiples : les forces existantes consacrées à l’activité physique et au sport en Suisse doivent être maintenues et adaptées aux changements de la société. En même temps, il est nécessaire d’identifier les groupes pour lesquels il faut mettre en place des programmes et développer de nouvelles approches.
Dans la vision de la stratégie nationale, tous les sous-groupes de la population ont l’opportunité de faire des activités physiques et du sport au quotidien et peuvent être motivés pour les pratiquer. L’environnement est un soutien pour les activités à la maison, au travail, à l’école, dans les transports et pendant les loisirs. Des priorités pour des groupes d’âge spécifiques ont été proposées par un groupe d’experts à l’Office fédéral suisse des sports (tableau Irenvoi vers).
Les différents niveaux d’activité sont discutés sur la base du cadre conceptuel du groupe HEPA Europe présenté plus haut. Au niveau politique, les bases légales ou même constitutionnelles existent concernant l’éducation physique à l’école, le programme national de formation des coachs Sport et Jeune et le soutien financier pour les clubs de sport (Office fédéral suisse des sports et coll., 2006renvoi vers). D’importantes bases légales concernent également le droit d’accès aux forêts et prairies, aux sentiers piétons et aux chemins de randonnée. La législation des pistes cyclables ou de la planification urbaine pourrait apporter d’autres progrès. Dans la promotion des sports et de l’activité physique, l’implication du secteur privé et des bénévoles joue un rôle très important. Par exemple, au sein des 22 000 associations sportives qui comptent 1,5 million de membres actifs, on compte 300 000 bénévoles. C’est également le cas pour beaucoup d’organisations qui ont des liens étroits avec l’activité physique comme les scouts, les Amis de la nature, ou l’association cycliste « Pro Vélo » mais également pour les associations de parents ou les groupes de citoyens qui peuvent avoir une influence positive pour la création d’un environnement favorable aux activités physiques. L’activité physique et les sports ont d’autres effets positifs que ceux concernant la santé : l’école, les employeurs, le secteur commercial, les organisations touristiques deviennent des promoteurs actifs non pas à cause de la législation, mais du fait de leur propre initiative. La réussite des offres et des mesures en matière d’environnement favorable à l’activité physique est souvent liée à la collaboration entre les institutions publiques et leurs partenaires pour encourager et faciliter l’initiative privée.

Tableau I Priorités pour un comportement favorable à l’activité physique et aux sports dans des groupes d’âge spécifiques proposées par un groupe d’experts à l’Office fédéral suisse des sports

Groupes d’âge
Priorités proposées
Petits enfants (0-5 ans)
Les personnes en charge des petits enfants fournissent un environnement optimal pour l’activité physique et le jeu
Enfants (5-12 ans)
Le sport et les activités physiques régulières font partie de la vie quotidienne comme se brosser les dents. Une grande variété d’offres touche tous les enfants
Adolescents (12-18 ans)
Les institutions éducatives soutiennent activement les sports et l’activité physique. Le temps de loisir actif et les transports actifs sont encouragés
Jeunes adultes (18-30 ans)
Une grande variété de possibilités de sports et d’activités physiques donne l’opportunité d’augmenter et de maintenir les performances et d’atteindre les buts personnels
Adultes actifs
Les offres et les possibilités se focalisent sur les comportements quotidiens, la santé et l’équilibre vie-travail
Adultes retraités
L’activité physique et le sport réguliers sont une importante ressource pour fonctionner dans la vie quotidienne, pour le bien-être et pour l’autonomie. Ils donnent des opportunités de contacts sociaux
Les quatre catégories de programmes et d’activités du schéma de promotion proposé par le réseau européen HEPA sont également introduites, commentées, et illustrées par des exemples nationaux. Le conseil et le coaching ont pour but l’amélioration des déterminants individuels de l’activité physique ; ils peuvent permettre aux individus de mieux utiliser leur environnement social et physique. Les activités structurées jouent un rôle très important dans le sport, dans l’industrie du « fitness » ou, par exemple, dans les cours de sécurité pour le cyclisme. Dans ce domaine, les connaissances et les compétences peuvent être enseignées et les attitudes peuvent être influencées. L’offre d’activités structurées représente une part de l’environnement physique. Une part importante de l’environnement favorable à l’activité physique est l’environnement construit qui est généralement plus influencé par les autres secteurs que ne le sont la santé ou les sports. Pour un effet optimal sur les comportements de santé, les changements au niveau de l’environnement physique sont combinés avec des mesures qui influencent aussi des facteurs intrapersonnels et l’environnement social. Les campagnes et l’événementiel peuvent avoir une influence sur les connaissances, les attitudes et l’environnement social. Néanmoins, pour avoir un effet à long terme sur les comportements d’activité physique, ils doivent généralement être combinés à d’autres mesures. Pour concevoir les campagnes d’information et l’événementiel, il est nécessaire de prendre en compte le fait que dans beaucoup de groupes de population l’attitude vis-à-vis de l’activité physique est déjà très positive, que l’activité physique est bien acceptée comme une source de santé importante, et que les campagnes doivent être très spécifiquement ciblées pour garantir une utilisation optimale des ressources. Dans toutes les mesures de la promotion de l’activité physique et du sport, la prévention des accidents est un aspect central. Elle permet non seulement de réduire les risques potentiels, mais également d’amplifier l’efficacité des interventions sur les changements de comportements en réduisant les risques perçus.
Un certain nombre d’aspects méritent d’être discutés du fait de leur rôle dans la promotion de la santé et dans la promotion HEPA en particulier. L’implantation familiale est essentielle à la fois pour les enfants et pour les adultes non impliqués dans le monde du travail. Toutefois, elle peut être difficile à mettre en œuvre en particulier dans les populations démunies. L’école présente le grand avantage de pouvoir atteindre les enfants (et indirectement leur famille) de tous les groupes socioculturels, mais les institutions éducatives doivent souvent gérer une pléthore d’interventions qu’elles sont supposées mettre en œuvre dans les buts les plus variés. Le lieu de travail présente les mêmes avantages pour les personnes intégrées dans le monde du travail. Cependant, à ce niveau les recommandations d’activité physique peuvent avoir besoin d’être adaptées aux exigences physiques du travail en question et peuvent amener à rendre le travail plus difficile. Les groupes communautaires ont le potentiel non seulement d’atteindre un grand nombre de personnes, mais également d’utiliser le processus politique pour changer l’environnement social et physique. Tous les habitants ne peuvent pas être atteints par des voies officielles de la même façon, et des mesures spécifiques peuvent être nécessaires pour certains sous-groupes. Les clubs et associations peuvent être des lieux de mise en œuvre importants pour les communautés que ce soit des clubs de sport, des associations culturelles ou de migrants. Pour atteindre les personnes inactives, les soins de santé primaire avec le médecin de famille ont un rôle essentiel. Dans les pays où l’offre et les structures pour le public général sont déjà bien installées, les mesures visant à atteindre de nouveaux groupes cibles devront être de plus en plus spécifiques.
Même dans les pays ayant une multitude d’activités physiques et une tradition fédéraliste forte, il est nécessaire de pouvoir accéder aux résultats et expériences, d’évaluer les programmes et les modèles d’intervention, d’identifier les lacunes et d’initier de nouveaux programmes et ainsi de garantir une utilisation optimale des ressources. C’est le rôle du réseau national HEPA Suisse qui est piloté conjointement par l’Office fédéral du sport et de la santé publique, par la Fondation de promotion de la santé et par le Bureau fédéral suisse de la prévention des accidents et qui compte maintenant plus de 100 organisations membres. Un autre élément important dans ce contexte est la mise en place d’un système de suivi de l’activité physique et des comportements sportifs comme il en existe déjà un pour les adultes suisses. La mise en place d’un système similaire pour les enfants représente un besoin urgent pour le futur.

Rôle de la coopération internationale

Le nombre de congrès et de publications portant sur l’activité physique et la santé a considérablement augmenté au cours des dernières années et les organisations internationales ont joué un rôle essentiel pour promouvoir le concept d’activité physique régulière pour la santé. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a joué un rôle important avec l’initiative globale OMS pour une vie active, la journée « bouger pour la santé », la stratégie globale pour la nutrition, l’activité physique et la santé ainsi que la conférence ministérielle européenne de 2006 de lutte contre l’obésité.
L’organisation non gouvernementale Agita Mundo et l’Alliance globale pour l’activité physique (GAPA, Global Alliance for Physical Activity) fournissent une plateforme globale qui facilite les échanges et soutient le développement de stratégies nationales pour la promotion de l’activité physique. Des ressemblances à la fois pratiques et culturelles ont favorisé une structure européenne et de 1996 à 2001, le premier réseau européen pour la promotion de la santé par l’activité physique a existé en tant que programme financé par l’Union Européenne (Vuori, 2005renvoi vers). Les productions spécifiques du réseau ont été influentes du fait de leurs contenus et à cause du processus qui a permis leur développement. Par exemple, l’inclusion de « Allez Hop ! » dans les analyses pour le « Guideline pour les programmes de promotion de la santé par l’activité physique » a eu un impact politique à l’échelle nationale en Suisse et a apporté d’autres soutiens pour le projet (Foster, 2000renvoi vers).
Après l’arrêt en 2001 du financement du premier réseau européen de promotion de la santé par l’activité physique, il n’y avait plus de plateforme européenne pour le développement de stratégies nationales de promotion du concept HEPA. En même temps, de nombreuses expériences étaient menées et de nouvelles informations accumulées mais ces informations n’étaient souvent pas disponibles pour les acteurs de la promotion de la santé sur le terrain ou dans les administrations nationales concernées.
Ainsi, HEPA Europe, le nouveau réseau européen pour la promotion de la santé par le sport a été créé à l’Académie danoise d’éducation physique et sportive de Gerlev en mai 2005. HEPA Europe travaille étroitement avec le bureau régional européen de l’OMS et contribue au développement de preuves fondées à la fois sur les effets de l’activité physique sur la santé et sur l’efficacité des approches de promotion de l’activité physique. Le réseau travaille à faciliter l’accès à ces données et à fournir des expertises spécifiques aux autres partenaires afin de contribuer au développement et à la mise en place de politiques nationales et de stratégies de promotion de l’activité physique favorable à la santé en Europe. Ce réseau vise à développer, soutenir et diffuser les stratégies efficaces, les programmes, les approches et autres exemples de bonne pratique. Il le fait en organisant des colloques annuels du réseau pour ses membres et en animant un site Internet2 .
L’utilisation pratique de la promotion de l’activité physique et les approches intersectorielles représentent des priorités pour le réseau HEPA Europe. Certains projets du réseau incluent des études de cas de collaboration entre le secteur de la promotion de l’activité physique et le secteur des transports (Thommen Dombois et coll., 2006renvoi vers), une plaquette de recommandations sur l’activité physique et la santé (Cavill et coll., 2006brenvoi vers), une revue critique des effets de l’activité physique sur la santé à partir de l’analyse des investissements (en terme de coût-bénéfice et de coût-efficacité) en infrastructures et en politiques de transport. Une liste détaillée des projets et activités de HEPA Europe est disponible sur le site Internet du réseau.
Le rôle de l’activité physique dans la prévention du surpoids et de l’obésité est un aspect très important et la « Stratégie globale de l’OMS sur la nutrition, l’activité physique et la santé » (OMS, 2004renvoi vers) affirme : « L’alimentation et l’activité physique influencent la santé à la fois de façon conjuguée et séparée. Bien que les effets de l’alimentation et de l’activité physique sur la santé interagissent souvent, particulièrement en relation avec l’obésité, il existe des effets bénéfiques additionnels qui peuvent être obtenus à partir de l’activité physique indépendamment de la nutrition et de l’alimentation. De plus, il existe des risques nutritionnels indépendants de l’obésité. L’activité physique est un moyen fondamental pour améliorer la santé physique et mentale des personnes ».
Du fait que l’activité physique peut réduire substantiellement le risque de nombreuses pathologies, HEPA Europe reconnaît l’importance du problème de l’obésité, mais ne se limite pas à ce seul domaine de la promotion de l’activité physique.

En conclusion,

ces différentes considérations montrent que la promotion de l’activité physique en Europe au XXIe siècle est un sujet complexe. Cependant, l’activité physique et les sports sont des ressources pour la santé qui sont reconnues très facilement et la pratique de la promotion de l’activité physique en tant que telle est très gratifiante. La démarche au niveau de la population demande plus d’efforts qu’au niveau individuel, mais les expériences de la Finlande et du Canada en particulier montrent qu’une approche intégrée sur le long terme de promotion de l’activité physique peut être un succès au niveau national (Craig et coll., 2004renvoi vers).

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Brian W. Martin, Eva Martin, Walter Mengisen

Institut fédéral Suisse du sport, Magglingen, Suisse

Promotion de l’activité physique dans la vie quotidienne : une opportunité pour le secteur des transports

Cette présentation reprend les principaux points de la publication de l’OMS (2006a) concernant les défis de la promotion de l’activité physique à travers une approche large de santé publique et met en lumière les développements les plus récents dans le domaine. Un exemple de collaboration avec le secteur des transports illustre les opportunités qu’offre une synergie entre le développement des politiques de transport urbain et la promotion de l’activité physique. Certains plans d’action récents comme la Charte européenne sur la lutte contre l’obésité1 et des initiatives comme le réseau européen pour la promotion de la santé et de l’activité physique (HEPA Europe2 ) sont des supports pour d’autres développements de la promotion de l’activité physique en Europe.

Promotion de l’activité physique : un défi

Plusieurs études issues de différents pays montrent qu’une grande partie de la population adulte, enfants et adolescents, ne pratique pas le niveau d’activité physique recommandé pour le maintien de la santé. Pour les adultes, ces recommandations consistent en une demi-heure par jour d’activité physique d’intensité modérée (OMS, 2006brenvoi vers). Pour les enfants et les adolescents, il est recommandé d’atteindre au total un minimum de 60 minutes d’activité physique d’intensité modérée chaque jour. Cela doit inclure deux fois par semaine des activités qui améliorent le capital osseux, la force musculaire et la souplesse (Department of Health, 2004renvoi vers).
En Europe, une enquête récente montre que les deux tiers des adultes n’atteignent pas le niveau recommandé d’activité physique (Sjöström et coll., 2006renvoi vers). Seulement 34 % des jeunes âgés de 11, 13 et 15 ans, répondant à une enquête en 2001-2002 (HBSC, Health Behavior in School-aged Children, Currie et coll., 2004renvoi vers) sur les comportements de santé, rapportent une activité physique suffisante par rapport aux recommandations courantes pour les enfants et adolescents (Currie et coll., 2004renvoi vers).
Dans beaucoup de pays, les garçons sont plus actifs que les filles. L’activité diminue avec l’âge pour les deux sexes. L’activité varie largement d’un pays à l’autre : en France, 11 % des filles et 25 % des garçons pratiquent une activité conforme aux recommandations ; en Irlande, ils sont 51 % et 61 % respectivement (figure 1Renvoi vers).
Figure 1 Proportion d’enfants âgés de 11 ans atteignant les recommandations d’activité physique modérée à vigoureuse (d’après Currie et coll., 2004 HBSC 2001-2002 ; OMS, 2004)
Ainsi en Europe (près de 900 millions d’habitants), le secteur de la santé publique sera confronté à la nécessité d’augmenter le niveau d’activité physique de plusieurs centaines de millions de personnes.
Les estimations des coûts directs (soins) et indirects (impact économique des maladies, maladies professionnelles et morts prématurées) sont également alarmantes. Des études anglaises (DCMS, 2002renvoi vers) et suisses (Martin et coll., 2001renvoi vers) indiquent des coûts compris entre 150 et 300 euros par personne et par an. Néanmoins, il n’y a pas de consensus sur les méthodes d’estimation des coûts liés à l’inactivité physique. D’autres travaux s’avèrent nécessaires sur ce sujet.
Les stratégies utilisées traditionnellement en matière de promotion de la santé ne suffiront pas à résoudre un problème d’une telle ampleur même si, souvent intégrées dans le secteur des sports et de l’éducation, elles conservent leur importance. Ces approches ont pour objectif de convaincre les individus de modifier leur comportement en augmentant l’activité physique pendant les temps de loisirs à travers la pratique de sports et d’activités de plein air et de renforcer l’éducation physique à l’école.
Réintroduire l’activité physique au niveau requis pour la population générale nécessite d’agir sur les déterminants environnementaux et socioéconomiques qui jouent un rôle majeur sur les styles de vie. C’est ainsi que des possibilités peuvent être offertes aux personnes pour être plus actives physiquement dans leur vie quotidienne. Modifier ces déterminants va bien au-delà de la sphère d’influence et de responsabilité du secteur de la santé. Il faut agir sur l’environnement urbain pour le rendre plus propice à un mode de vie actif et à offrir aux personnes des opportunités d’être actives pendant les trajets, le travail et à l’école. En fait, le défi pour le secteur de la santé consiste à nouer de nouveaux partenariats avec d’autres secteurs qui ont une influence directe sur l’aménagement urbain, les transports, les politiques du travail, de l’éducation, du logement, des loisirs et des sports.

Opportunités pour une nouvelle approche de la promotion de l’activité physique

Deux publications récentes de l’OMS (2006arenvoi vers et crenvoi vers) évoquent le changement de paradigme qui est nécessaire pour agir sur les déterminants de l’activité physique à tous les niveaux. Les principaux éléments de ce changement conceptuel peuvent être résumés de la façon suivante :
• utiliser une définition large de l’activité physique qui va au-delà du sport et de l’exercice physique ;
• développer une approche santé publique en population et mettre en place des programmes fondés sur l’état des besoins d’une population ;
• engager des secteurs multiples et travailler à différents niveaux, de l’international au local ;
• développer des environnements favorables à l’activité physique ;
• favoriser l’équité dans les opportunités d’être actif ;
• se fonder sur les meilleurs travaux disponibles ayant fait leurs preuves.
Un autre principe implicite de la promotion de l’activité physique consiste à modifier l’équilibre des responsabilités entre les individus et la société. Cette dernière doit avoir un rôle plus important pour lever les barrières qui sont des obstacles au choix des individus d’être physiquement actifs dans la vie quotidienne. Ceci est particulièrement important compte tenu des inégalités sociales en matière d’activité physique. Les personnes issues des groupes socioéconomiques les moins favorisés sont moins actives physiquement que celles issues des groupes aux revenus les plus élevés parce qu’elles ont moins de temps libre ou moins d’accès aux équipements de loisir ou encore parce qu’elles vivent dans un environnement moins favorable à l’activité physique.
Face à cette situation, le secteur de la santé doit encourager des actions coordonnées à différents niveaux pour développer la participation à des activités physiques favorables à la santé comme par exemple :
• intégrer l’activité physique dans la prévention primaire ;
• documenter les interventions efficaces et diffuser les résultats des recherches ;
• montrer les bénéfices économiques de l’investissement dans l’activité physique ;
• connecter entre eux les différents plans d’action ;
• préconiser, échanger l’information et montrer l’exemple.

Développer de nouveaux partenariats : l’exemple du secteur des transports

Un exemple de partenariat potentiel qui apparaît particulièrement intéressant est celui du secteur des transports. Il peut jouer un rôle important dans la promotion d’un mode de vie physiquement actif, à travers les trajets quotidiens en vélo ou à pied pour les déplacements ou les loisirs. Plus de 30 % des trajets en voiture dans les villes européennes couvrent une distance inférieure à 3 km et pour 50 % d’entre eux une distance inférieure à 5 km (Commission européenne, 2000arenvoi vers). Ces distances pourraient être couvertes en 15-20 minutes à vélo ou en 30-50 minutes de marche rapide, ce qui correspond à la dose journalière recommandée d’activité physique (30 minutes minimum). En fait, la moitié de ces petits trajets en voiture pourraient être remplacée par un déplacement à vélo ou de la marche (Commission européenne, 2000brenvoi vers). Ces trajets « actifs » peuvent permettre d’intégrer l’activité physique dans la vie quotidienne, et cela indépendamment des commodités et équipements de sport. Il n’est pas nécessaire de réserver du temps disponible pour accomplir ces trajets actifs, ce qui est l’obstacle souvent rapporté par les personnes qui ne pratiquent pas d’activité physique. Il s’agit d’une solution « équitable », facile à choisir, accessible au plus grand nombre, qui peut être d’un rapport coût-efficacité intéressant, qui nécessite seulement un investissement faible par rapport au revenu des ménages, et pour finir, elle peut être source de plaisir.
En dépit de ces possibilités encore largement inexploitées, l’évolution semble aller dans la direction opposée : de moins en moins de personnes sont physiquement actives durant les trajets par rapport à la situation d’il y a quelques décennies.
Par exemple, des données britanniques sur le transport scolaire des enfants montrent qu’entre le début des années 1990 et le début des années 2000, le nombre d’enfants se rendant à l’école à vélo ou à pied a diminué, alors que le nombre de ceux qui sont conduits en voiture a augmenté (National Travel Survey, 2004).
D’après les données de plusieurs pays européens, le citoyen européen parcourt en moyenne 0,5 km/jour à vélo, 1 km/jour à pied, 27 km/jour en voiture (Commission européenne, 2002renvoi vers ; figure 2Renvoi vers).
Figure 2 Pratique du cyclisme en Union européenne avant 2004 (kilomètres par personne et par an) (Commission européenne, 2002)
Pour renverser cette tendance, il sera nécessaire de s’attaquer aux principaux obstacles qui empêchent les personnes d’être physiquement actives. En tout premier lieu, la question de la sécurité routière est posée en Europe où les accidents de la route représentent la première cause de mortalité chez les enfants de 5 à 14 ans et chez les jeunes de 15 à 24 ans, avec près de 22 000 morts survenues en 2002 (OMS, 2005renvoi vers et 2007arenvoi vers).
En effet, les craintes liées au trafic automobile peuvent dissuader les parents de laisser leurs enfants marcher ou faire du vélo pour aller à l’école ou jouer dehors, en particulier dans les zones difficiles. Par exemple, en Grande-Bretagne, les enfants des milieux les moins privilégiés au niveau socioéconomique ont quatre fois plus de risque que ceux des milieux les plus aisés de mourir d’un accident de la route. Parmi ces enfants, les piétons ont cinq fois plus de risque (Roberts et Power, 1996renvoi vers). La différence entre les milieux socioéconomiques les plus élevés et les plus faibles a augmenté en Grande-Bretagne. Edwards et coll. (2006renvoi vers) ont montré que les enfants de 0 à 15 ans dont les parents sont au chômage ont 5,5 fois plus de risque de mourir en tant que passager d’une voiture que les enfants de cadre et ce ratio dépasse 20 pour les marcheurs et les cyclistes. Ces différences de risque sont dues à des différences d’exposition plutôt que de comportement (Laflamme et Diderichsen, 2000renvoi vers). Les enfants des milieux défavorisés habitent dans le voisinage de routes non sécurisées avec un trafic intense (Institute of Public Policy Research, 2002renvoi vers). Cette situation renforce la nécessité de s’attaquer à la sécurité routière dans ce type d’endroit (Sonkin et coll., 2006renvoi vers). Au total, les trajets de longues distances, qui sont associés à la peur de la circulation dans des zones urbaines étendues ainsi que les normes sociales qui associent la marche, le vélo et l’utilisation des transports publics à un faible statut social et au manque de prestige, concourent à décourager les personnes d’être physiquement actives au cours des trajets quotidiens.
Obtenir l’appui du secteur des transports et l’engagement dans le développement de l’activité physique nécessite l’identification d’approches « gagnant-gagnant » dans lesquelles le secteur des transports peut mieux atteindre ses propres objectifs. Par exemple, la promotion du cyclisme et de la marche lors des trajets peut permettre une moindre émission de polluants atmosphériques, de gaz à effets de serre et de bruit, moins d’embouteillages, moins d’accidents de la route, moins d’investissement dans des infrastructures coûteuses relatives à la voiture, et en fin de compte améliorer la qualité de la vie urbaine. En outre, la promotion de l’activité physique au cours des déplacements peut aller de pair avec l’amélioration des véhicules et des carburants.
Le secteur de la santé peut jouer un rôle important en mettant en place de nouveaux partenariats avec certaines actions :
• fournir au secteur des transports des arguments pour soutenir l’activité physique incluant la présentation d’interventions efficaces ;
• développer des recherches et l’évaluation des interventions ;
• développer des outils qui peuvent aider à démontrer l’intérêt d’investir dans l’activité physique, tels que des outils d’analyse de coûts-bénéfices, l’inclusion des effets sur la santé dans l’évaluation des interventions sur les transports, l’identification de synergies avec d’autres domaines politiques ;
• soutenir l’activité physique et faciliter les échanges d’expériences et la dissémination de l’information en particulier à travers l’identification d’études de cas pertinentes (OMS, 2007b).

Politiques supports et initiatives internationales

La charte européenne de lutte contre l’obésité (OMS, 2006drenvoi vers) a été adoptée par la conférence ministérielle de l’OMS sur la lutte contre l’obésité (Istanbul, 16-18 novembre 2006) suivie par 48 états membres, des organisations intergouvernementales et des ONG.
La charte a souligné l’importance de l’activité physique, la nécessité d’établir des stratégies synergiques impliquant différents secteurs de la société aux niveaux local et national et de s’attaquer aux inégalités en s’intéressant aux groupes vulnérables. La charte souligne également l’importance de l’utilisation de différents outils et instruments tels que l’évaluation de l’impact sanitaire et environnemental, de la législation concernant la sécurité des piétons et cyclistes, des mesures incitatives et fiscales, des campagnes d’information et de sensibilisation. Enfin, la charte encourage le développement de guidelines opérationnels pour promouvoir l’activité physique dans la vie quotidienne. Elle préconise un suivi et une évaluation de l’efficacité des interventions. D’autres articulations entre différents secteurs politiques pour la promotion de l’activité physique ont été présentées dans un document d’accompagnement de la conférence des ministres (OMS, sous presse) :
• la commission économique pour l’Europe des Nations Unies, le programme pan-européen de l’OMS sur les transports, la santé et l’environnement, fournissent un cadre aux actions dans les domaines prioritaires qui inclut la promotion de la sécurité pour les cyclistes et piétons dans les zones urbaines (ONU et OMS, 2006renvoi vers) ;
• le plan européen pour l’environnement et la santé des enfants qui contient l’obligation pour les pays membres de protéger la santé des enfants sur des aspects prioritaires incluant la promotion de l’activité physique à travers des environnements propices (OMS, 2004) ;
• la plateforme européenne sur l’alimentation, l’activité physique et la santé doivent catalyser les actions réalisées en Europe sur la base du volontariat par les acteurs économiques, de la société civile et du secteur public (Commission européenne, 2005renvoi vers).

Réseau européen de promotion de la santé par l’activité physique

Le réseau européen de promotion de la santé par l’activité physique (European Network for the Promotion of Health-Enhancing Physical Activity, HEPA) est un projet collaboratif international qui travaille pour une meilleure santé à travers l’activité physique en proposant une plateforme support pour des changements d’approche de la promotion de l’activité physique (OMS, 2006erenvoi vers).
HEPA Europe rassemble différentes institutions et organisations de différents pays européens et facilite les approches multisectorielles. Ce réseau promeut et diffuse des stratégies innovantes, programmes, approches et bonnes pratiques ainsi que les résultats des recherches dans le domaine. Il est ouvert aux membres des gouvernements, aux institutions académiques et de recherche, ainsi qu’aux organisations non gouvernementales qui ont en commun l’objectif de développer des stratégies de promotion de la santé par l’activité physique fondées sur les preuves. Les activités sont supervisées par un comité de pilotage et ses membres se rencontrent chaque année. Les projets du programme de travail de HEPA Europe incluent :
• la contribution à la préparation de la Conférence ministérielle sur la lutte contre l’obésité (Istanbul, novembre 2006) ;
• l’édition d’une brochure « Activité physique et santé : preuves pour l’action » (OMS, 2006arenvoi vers) ;
• le recueil de 50 études de cas sur les collaborations entre les transports et la promotion de l’activité physique (OMS, 2007brenvoi vers) ;
• le développement d’une base de données Internet des instruments existants pour les plans d’actions. Cette base donne accès aux documents, approches et cibles de la promotion de l’activité physique dans la région Europe (environ 400 documents). Dans une version test en ligne, 50 documents sont présentés (OMS, 2006frenvoi vers).

En conclusion,

il est constaté qu’une grande partie de la population adulte, enfant et adolescent en Europe, n’atteint pas le niveau d’activité physique recommandé pour un avoir un effet sur la santé et la qualité de vie. La santé publique sera donc confrontée à la nécessité d’augmenter le niveau d’activité physique de plusieurs centaines de millions de personnes. Les approches traditionnelles de promotion de l’activité physique fondées sur les changements de comportements tendant à développer l’activité physique pendant les temps de loisirs et à renforcer l’éducation physique à l’école s’avèreront vite insuffisantes. Il faut donc agir sur les déterminants environnementaux et socioéconomiques qui jouent un rôle majeur sur les styles de vie. Modifier ces déterminants va bien au-delà de la sphère d’influence et de responsabilité du secteur de la santé. De nouveaux partenariats doivent être développés qui auront une influence directe sur l’aménagement urbain, les transports, les politiques du travail, de l’éducation, du logement, des loisirs et des sports.
Le réseau européen de promotion de la santé par l’activité physique (HEPA) a déjà entamé ce travail en proposant une plateforme support pour des changements d’approche de la promotion de l’activité physique.

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Francesca Racioppi

Bureau régional de l’OMS pour l’Europe,
Centre européen pour l’environnement et la santé, Rome

Promotion de l’activité physique aux Pays-Bas : coût-efficacité des programmes d’intervention1

Le ministère de la Santé publique, du Bien-être et des Sports des Pays-Bas a démarré en 2006 l’implantation du Plan national d’action pour les sports et l’activité physique. L’objet de la présente étude est d’étayer à la fois les objectifs et le contenu de ce plan d’action.
Les questions spécifiques de recherche étaient :
• dans quels groupes de population peut-on attendre les bénéfices les plus importants d’une politique en matière d’activité physique ?
• quelles sont les conditions déterminantes pour la réussite d’un programme d’intervention en faveur du développement de l’activité physique ?
• quelles sont les méthodes d’interventions disponibles au sein du ministère de la Santé publique, du Bien-être et des sports des Pays-Bas ? Quels sont les coûts et les effets attendus ? Quelle est la faisabilité de ces méthodes d’interventions auprès de la population néerlandaise ?
• quelle serait une ambition politique réaliste en faveur du développement de l’activité physique ? Quels sont les bénéfices attendus en terme de santé ? Ces bénéfices sont-ils suffisamment importants proportionnellement aux dépenses engagées ?

Méthodes

Plusieurs méthodes ont été employées. Les sources de données existantes ont été analysées pour identifier au sein de notre population les groupes dans lesquels la prévalence de l’inactivité physique est élevée et/ou la prévalence d’adhésion aux recommandations en matière d’activité physique est faible. Une revue de littérature a été faite afin de lister les méthodes et interventions disponibles incluant les coûts et effets attendus. Les conditions déterminantes pour la réussite d’une intervention sur l’activité physique ont également été identifiées à partir de la revue de la littérature. En outre, plus de 80 experts ont été interrogés et des comparaisons ont été faites avec les plans d’actions nationaux d’autres pays.
D’abord, les interventions qui ont montré leur efficacité à long terme (un an et plus) ont été identifiées et analysées de façon à estimer pourraient être les objectifs réalistes concernant le développement de l’activité physique et la lutte contre le surpoids. Ensuite, les bénéfices attendus en terme de santé, dans le cas où ces objectifs seraient atteints, ont été évalués ainsi que le rapport coût-efficacité des mesures nécessaires pour les atteindre.

Résultats

Population-cible

La population visée par le Plan national pour le sport et l’activité physique correspond à la partie de la population des Pays-Bas qui présente une prévalence élevée d’inactivité physique et dont l’adhésion aux recommandations d’activité physique est faible. L’analyse secondaire des données a montré que ces critères correspondaient aux jeunes, aux personnes âgées (et atteintes de maladies chroniques), aux personnes ayant un faible niveau de qualification, aux individus au chômage (et à certains groupes professionnels particuliers) et aux personnes d’origine immigrée. C’est donc une partie importante de la population néerlandaise qui est concernée.

Conditions importantes pour la réussite des programmes d’interventions sur l’activité physique

L’approche doit être intégrée, appuyée par des partenaires, personnes ou organisations, appropriées. Dans le cadre d’un programme, un ensemble d’interventions différenciées doit être proposé aux différents groupes cibles. Un budget suffisant et une bonne coordination des actions sont essentiels, de même que la prise en considération des résultats des recherches scientifiques.

Méthodes d’intervention disponibles

D’après une publication de Kahn et coll. (2002renvoi vers), les méthodes d’interventions peuvent être regroupées en 3 catégories : des approches informatives (pour changer les connaissances et les attitudes portant sur les bénéfices et les opportunités d’activité physique au sein d’une communauté) ; des approches comportementales et sociales (pour apporter aux personnes les compétences en matière de comportements et pour créer un environnement social qui facilite et potentialise les changements comportementaux) ; des approches environnementales et politiques (pour changer la structure de l’environnement physique afin de fournir des espaces sécurisés, attractifs et pratiques pour la pratique de l’activité physique).
La probabilité de réussite des différentes approches identifiées a été évaluée sur la base de la prise en compte des effets, des coûts et des possibilités de mise en œuvre des programmes adaptés à l’action individuelle ou en direction des groupes aussi bien que des messages prescripteurs.
En résumé, on constate que les coûts, l’impact et les effets de ces mesures sont étroitement intriqués. Les campagnes médiatiques et les informations sur la santé peuvent être considérées comme un soutien des interventions et les approches environnementales et politiques apparaissent prometteuses. Au sein d’un plan d’action national, les différents types de mesures devraient être mis en œuvre conjointement. Au niveau local, ceci pourrait être réalisé dans le cadre d’une approche locale. Une telle approche a montré son efficacité à long terme. Le tableau Irenvoi vers donne une vue d’ensemble des effets et des coûts des approches et interventions existantes.

Tableau I Vue d’ensemble des effets et des coûts des méthodes d’intervention existantes

 
Effets
Coûts*
Approche informative
Campagnes médiatiques
Messages prescripteurs
Information sur la santé

Soutien
Efficace (< 1 an)
Soutien

130 000 e/an** Faible
1 e-150 e/participant
Approches comportementales et sociales
Programmes adaptés aux individus
Programmes de groupe

Efficace (≥ 1 an)
Efficace (< 1 an)

50 e-750 e/participant
5e-1 900 e/ participant
Approches environnementales et politiques
Facilitations des déplacements
Accessibilité des installations
Infrastructures pour l’activité physique


À confirmer
À confirmer
À confirmer


Informations insuffisantes
Informations insuffisantes
Informations insuffisantes
Approches territoriales
Efficace (≥ 1 an)
200 e-40 000 e/intervention
 

* Du fait du manque d’information, les coûts varient fortement
** Basé sur une seule observation

Ambition des programmes d’interventions

Une ambition politique réaliste pour la promotion de l’activité physique peut être fondée sur deux types d’intervention qui ont montré une certaine efficacité sur le long terme : une approche locale et un programme intensif de modification du style de vie. Un objectif réaliste consiste en la réduction du taux de prévalence des personnes physiquement inactives de 1 à 2 % sur 5 ans. En plus, de ce fait, le taux de prévalence de personnes en surpoids peut diminuer de 1 à 3 % durant la même période.

Bénéfices en terme de santé et rapport coût-efficacité

Réaliser ces objectifs politiques peut permettre de prévenir des milliers de cas de maladies dans les 20 prochaines années, à condition que les interventions efficaces mentionnées ici soient largement mises en œuvre. Le rapport coût-efficacité pour chaque année de vie gagnée est estimé à 6 000 à 6 500 euros et à environ 5 600 à 6 100 euros par année de vie en bonne santé gagnée (QALY pour Quality-Adjusted Life Year). Ces taux restant compris dans des limites socialement acceptables, ils peuvent être considérés comme d’un bon rapport coût-efficacité.

En conclusion,

une politique intégrée de promotion de l’activité physique, reposant sur la mise en œuvre d’une large palette d’interventions, devrait, au moins en partie, limiter l’évolution négative attendue en matière d’augmentation du surpoids et de diminution de l’activité physique.

Bibliographie

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Wanda Wendel-Vos,

Centre for Prevention and Health Services Research,
National Institute for Public Health and the Environment,
Bilthoven, The Netherlands

Promotion de l’activité physique au Québec : lutte contre l’obésité dans un contexte de mondialisation

L’industrialisation et plus récemment l’informatisation ont relégué l’activité physique au rang des rubriques facultatives de l’activité humaine. Pour une majorité d’individus, de tels développements ont été source d’un grand soulagement puisqu’à toutes les époques de l’évolution de l’humanité, le labeur physique souvent excessif a fort probablement favorisé une fatigue indue et un vieillissement prématuré. De nos jours, il semble que « le pendule ait basculé à son autre extrémité » puisque la sédentarité observée dans les pays industrialisés prive une majorité d’individus d’une stimulation physique optimale et nécessaire au bon fonctionnement de l’organisme. Une des conséquences de cette sédentarité est le risque accru d’obésité qui est considérée depuis quelques années comme une épidémie par l’Organisation mondiale de la santé (World Health Organization, 1998renvoi vers). À cet égard, cette communication présente un certain nombre d’observations démontrant que l’activité physique interagit avec le contrôle de l’appétit. Une attention particulière est accordée à l’impact de facteurs environnementaux, comme le sommeil et le travail intellectuel (travail du « savoir »), jusqu’à présent peu considérés et dont l’influence est vraisemblablement accentuée dans un contexte de mondialisation. Ce document est complété par une brève description de quelques initiatives en santé préventive qui sont actuellement en cours dans la Province de Québec.

Interaction entre l’activité physique et la prise alimentaire : impact sur le bilan d’énergie

L’augmentation de la dépense d’énergie causée par l’activité physique a traditionnellement représenté le principal argument justifiant un mode de vie actif afin de prévenir et même traiter l’obésité. Cette vision est d’ailleurs corroborée par la littérature disponible qui tend à démontrer une certaine proportionnalité entre le coût calorique d’un programme d’activité physique et la perte de poids qui peut en résulter. Il est également établi que l’activité physique influence plusieurs mécanismes de régulation dans lesquels des hormones et des neurosystèmes sont impliqués. Ces effets peuvent donc théoriquement modifier l’équilibre entre l’apport et la dépense d’énergie, indépendamment des variations du coût calorique de l’activité physique. Comme le montre le tableau Irenvoi vers, les travaux réalisés au sein de notre équipe de recherche1 ont démontré que pour une dépense d’énergie donnée, une augmentation de l’intensité de l’exercice physique induit une série d’adaptations qui accentuent à court terme un bilan énergétique négatif et à plus long terme une augmentation de la perte pondérale.

Tableau I Effets de l’intensité de l’exercice physique sur les variables du bilan d’énergie chez l’humain

Effets de l’intensité
Références
Accentuation de l’effet réducteur de l’exercice sur l’adiposité sous-cutanée
Tremblay et coll., 1990renvoi vers et 1994arenvoi vers
Augmentation du potentiel oxydatif du muscle squelettique
Tremblay et coll., 1994arenvoi vers
Diminution de la compensation post-exercice en apport énergétique
Imbeault et coll., 1997renvoi vers
Augmentation du métabolisme de repos et de l’oxydation lipidique post-exercice
Yoshioka et coll., 2001renvoi vers
Augmentation de la stimulation β-adrénergique post-exercice
Yoshioka et coll., 2001renvoi vers
L’interaction entre l’activité physique et la prise alimentaire est également significative lorsque l’on considère l’impact potentiel de la composition du régime alimentaire sur les variations du bilan énergétique induit par l’exercice. Ainsi, le jumelage d’une alimentation « santé » aux propriétés rassasiantes facilite l’atteinte d’un bilan énergétique négatif dans le cadre d’un programme d’activité physique. En contrepartie, un régime riche en lipides peut induire une augmentation de l’apport en énergie susceptible de compenser complètement l’effet de l’activité physique sur le bilan d’énergie (Tremblay et coll., 1994brenvoi vers).
En résumé, l’activité physique est porteuse d’une stimulation corporelle qui affecte significativement le bilan d’énergie. Si l’intensité de cette stimulation augmente, il est alors plus vraisemblable d’anticiper un bilan calorique négatif qui résulte en une certaine perte de masse grasse corporelle. Le bilan énergétique résultant dépend également de la qualité du régime alimentaire dont la composition peut modifier considérablement l’apport énergétique spontané.

Sédentarité et bilan d’énergie à l’heure de la mondialisation

La mondialisation des marchés impose une pression accrue envers la performance, la productivité et le profit des entreprises. Puisque cette réalité est de plus en plus susceptible de se concrétiser dans un contexte économique du « savoir », il est vraisemblable que l’être humain sera désormais exposé à des stimuli qui s’apparentent davantage au stress neurogénique qu’à une grande sollicitation physique, comme cela pouvait être le cas par le passé. Ce contexte impose de reconsidérer la notion de sédentarité qui inclut différentes activités dont l’impact sur le bilan d’énergie est très variable.

Sommeil, bilan d’énergie et composition corporelle

Un certain nombre d’études épidémiologiques ont fait ressortir un risque accru de surpoids chez le petit dormeur (Hasler et coll., 2004renvoi vers ; Taheri et coll., 2004renvoi vers ; Chaput et coll., 2007renvoi vers). Cette observation a été renforcée par les résultats d’expériences consistant à réduire expérimentalement la durée du sommeil. En effet, Spiegel et ses collaborateurs (2004renvoi vers) ont rapporté une baisse de la concentration plasmatique de leptine (hormone favorisant une réduction de la prise alimentaire) et une augmentation de la concentration de ghreline (hormone favorisant une augmentation de la prise alimentaire) chez des sujets dont on avait écourté la nuit de sommeil. En conformité avec ces résultats, les sujets ont également déclaré ressentir une augmentation de la sensation de faim et du désir de manger suite à la privation de sommeil.
Dans le cadre de l’Étude des Familles de Québec, les hommes et les femmes petits dormeurs étaient caractérisés par une adiposité substantiellement plus élevée que celle mesurée chez des dormeurs moyens, c’est-à-dire 7-8 heures de sommeil par nuit (Chaput et coll., 2007renvoi vers). Chez l’enfant, une accumulation corporelle de graisse plus prononcée (Chaput et coll., 2006arenvoi vers), et préférentiellement localisée au niveau abdominal (Chaput et Trembay, 2007renvoi versarenvoi vers), a été observée chez les sujets du projet « Québec en forme ». Comme le montre la figure 1Renvoi vers, plusieurs facteurs s’avéraient des prédicteurs statistiquement significatifs d’un état de surpoids, mais c’est le nombre d’heures de sommeil réduit qui possédait dans le cadre de cette étude le plus grand potentiel de prédiction du risque de surpoids.
Figure 1 Risque relatif de présenter un surpoids ou d’être obèse chez l’enfant en fonction de différents facteurs (d’après Chaput et coll., 2006arenvoi vers)
Malgré le fait que le sommeil constitue la plus sédentaire des activités, une réduction du temps qui y est alloué semble favoriser un gain plutôt qu’une perte de poids. Ce constat est de haute pertinence dans un contexte de modernité puisque, par exemple, aux États-Unis d’Amérique, le temps alloué quotidiennement au sommeil depuis quelques décennies a diminué de plus d’une heure (National Sleep Foundation, 2006renvoi vers). Sur la base des quelques données actuellement disponibles, il semble réaliste de postuler que le sommeil contribuerait à restaurer un profil hormonal facilitant le contrôle de l’appétit et ainsi favoriser la prévention du surpoids.

Travail intellectuel (« du savoir ») et contrôle de la prise alimentaire

Le travail intellectuel (« du savoir ») représente un fleuron de l’activité humaine dans un contexte de modernité et constituera vraisemblablement la pierre d’assise de la compétitivité économique dans un environnement dominé par les règles de la mondialisation. Pour le physiologiste, cette modalité du travail se distingue du travail physique, notamment en ce qui a trait aux cellules corporelles qui la supportent et au(x) substrat(s) que ces cellules utilisent. Il est en effet bien établi que les neurones qui sont sollicités par le travail intellectuel utilisent le glucose comme seul substrat énergétique dans des conditions d’alimentation normale. Ceci contraste avec les cellules musculaires qui produisent le travail physique et qui constituent le principal site d’oxydation des acides gras dans l’organisme humain.
Notre équipe de recherche a récemment publié des données préliminaires suggérant que le travail intellectuel (du savoir) est une activité sédentaire particulière dont les effets ressemblent à ceux du stress neurogénique et qui sont susceptibles de favoriser l’hyperphagie (Tremblay et Therrien, 2006renvoi vers). Cette initiative a été suivie d’une étude plus formelle dans le cadre de laquelle des étudiantes de l’Université Laval ont été aléatoirement testées lors d’une session de travail mental et une session de repos servant de témoin (Chaput et Tremblay, 2007renvoi versbrenvoi vers). Comme l’illustre la figure 2Renvoi versA, la dépense d’énergie mesurée par calorimétrie indirecte lors de la session de travail mental n’a pas été augmentée quantitativement de manière significative en comparaison à la session témoin. En revanche, l’apport calorique spontané, mesuré lors d’un repas de type buffet servi après chacune des sessions, était considérablement augmenté après la session de travail mental (figure 2Renvoi versB). Ce constat est important puisqu’il permet de faire ressortir l’effet opposé de l’exercice physique vigoureux (Imbeault et coll., 1997renvoi vers) et du travail du savoir (Chaput et Tremblay, 2007brenvoi vers) en ce qui a trait à leur impact à court terme sur le bilan énergétique. À notre avis, ceci marque un tournant dans l’évolution de l’humanité relativement à la nature des stimuli influençant le bilan d’énergie et auxquels les individus sont majoritairement exposés dans un contexte de vie habituel.
Figure 2 Dépense énergétique (A) et prise alimentaire spontanée lors du buffet à volonté (B) pour la session de travail mental en comparaison à la session de repos (d’après Chaput et Tremblay, 2007brenvoi vers)
Le gain de masse grasse pourrait devenir nécessaire au maintien de l’homéostase psychologique dans pareil contexte. Nous avons récemment tenté de documenter cette hypothèse en testant des hommes obèses chez qui une série de mesures étaient effectuées à chaque perte de poids de 5 kg, jusqu’à l’avènement d’un état de résistance à maigrir (Chaput et coll., 2005renvoi vers et 2006brenvoi vers). Dans cette étude, un régime alimentaire et un programme d’activité physique étaient les deux modalités utilisées afin d’induire un bilan énergétique négatif. La figure 3Renvoi vers présente les variations du score de dépression, tel que mesuré par le Beck Depression Inventory (BDI) (Beck et coll., 1961renvoi vers) tout au long du programme. Après une perte de poids de 5 kg, le score au BDI a légèrement diminué, ce qui semble concordant avec la littérature pertinente qui tend à démontrer une amélioration du bien-être psychologique avec la perte de poids. En revanche, une accentuation de la perte de poids s’est avérée contreproductive, particulièrement lorsque les sujets devenaient résistants à perdre davantage de poids. En effet, la figure 3Renvoi vers indique que pour certains sujets, le score au BDI s’approchait de façon inquiétante du seuil de diagnostic clinique de dépression.
Figure 3 Évolution des symptômes de dépression, mesurés à l’aide du Beck Depression Inventory (BDI), durant le programme de perte de poids jumelant l’activité physique à une diète restrictive (d’après Chaput et coll., 2005renvoi vers et 2006brenvoi vers)
En résumé, il semble bien que le travail intellectuel (« du savoir ») puisse induire un bilan calorique positif en raison d’une augmentation de la prise alimentaire, sans compensation de la dépense d’énergie. Un tel effet, qui peut être qualifié de biopsychologique, représente une réalité qui pourrait bien gagner en importance dans un contexte de mondialisation et pour laquelle le gain de masse grasse pourrait devenir une nécessité. Cette observation, tout aussi fascinante qu’inquiétante, soulève la question suivante : quoi faire pour maintenir le meilleur équilibre de vie possible dans un contexte de modernité et de mondialisation ?

Promotion de saines habitudes de vie et lutte contre l’obésité : l’expérience récente du Québec

À l’instar des autres provinces canadiennes, le Québec a été touché par la hausse de la prévalence de surpoids et d’obésité au cours des dernières années. Ce phénomène a entraîné une mobilisation des professionnels et des organisations de santé qui ont initié un certain nombre d’études et de programmes visant notamment l’atteinte des objectifs suivants :
• documenter et caractériser les pratiques et les milieux de vie ;
• informer et sensibiliser la population ;
• mettre en place des mesures favorisant l’adhésion à un mode de vie sain.

Documenter et caractériser les pratiques et les milieux de vie

Au-delà des enquêtes nationales qui sont périodiquement réalisées afin d’évaluer le profil de santé et de certains indicateurs du mode de vie de la population québécoise, des projets plus ciblés sont réalisés en guise de pré-requis à certaines interventions afin d’avoir une juste perception du contexte d’implantation éventuel. À titre d’exemple, la Direction de la santé publique de Québec vient de terminer une étude qui avait pour but de décrire l’offre alimentaire dans les différents points de service (restaurants, machines distributrices....) de la ville de Québec. Ce travail a permis une caractérisation précise de l’offre alimentaire actuelle et a également représenté une opportunité privilégiée de sensibilisation des autorités compétentes. Ce projet a également fourni de l’information fort utile concernant les contraintes et barrières avec lesquelles il sera éventuellement nécessaire de composer lors d’une réorganisation de l’offre alimentaire dans la ville de Québec.

Informer et sensibiliser la population

Dans un passé récent, la dissémination d’informations pertinentes s’est effectuée à plus d’un niveau. Ainsi, par l’intermédiaire de son programme Kino-Québec, le gouvernement du Québec a récemment publié un avis scientifique portant sur « L’activité physique et le poids corporel », destiné aux professionnels de l’activité physique. Par ce type d’initiative, le Québec vise à maintenir le meilleur niveau de savoir et de savoir-faire de ses professionnels de la santé afin de prendre en charge de manière compétente les besoins de la population.
Le gouvernement du Québec est également préoccupé par l’information et la sensibilisation de la population en utilisant des stratégies qui captent l’attention d’un nombre maximal d’individus. Un des bons exemples de ce type de stratégie est le programme 0-5-30 qui met l’emphase sur de saines habitudes de vie. À cet effet, le chiffre 0 sert de point de référence afin d’encourager la non-consommation de tabac. Le chiffre 5 réfère à 5 portions de fruits et légumes recommandées quotidiennement tandis que le chiffre 30 sert de cible en ce qui a trait au temps minimal, exprimé en minutes, d’activité physique suggérée sur une base quotidienne. Ce programme a fait l’objet jusqu’à présent d’une vaste dissémination, en partie grâce à un support significatif des médias.

Mettre en place des mesures favorisant l’adhésion à un mode de vie sain

Le programme « Québec en forme » est probablement l’intervention qui a la plus grande envergure actuellement au Québec. Ce vaste projet qui cible les communautés de milieux économiques les moins favorisés bénéficie du support financier de la Fondation Lucie et André Chagnon dont la mission est orientée vers la lutte contre la pauvreté et la bonne santé chez les populations de faible niveau socioéconomique. Le projet « Québec en forme » s’appuie sur l’activité physique comme véhicule de développement personnel. Ainsi, en plus de compter sur les effets bien connus de l’exercice sur la condition physique et la santé, ce projet a été développé de manière à influencer favorablement la réussite scolaire et le développement optimal de l’enfant. Il s’agit d’un programme dont l’unité de base est le comité d’action locale qui agit en synergie avec les organismes d’aide du milieu en procurant des ressources de différentes natures. Ce projet comporte également un volet évaluatif qui offre à des chercheurs la possibilité de réaliser des études contribuant à l’innovation scientifique. Le projet « Québec en forme » compte également sur les écoles pour remplir une partie de son mandat qui couvre toutes les années d’apprentissage de l’enfant au niveau élémentaire. Les développements les plus récents étant survenus dans le cadre du projet « Québec en forme » laissent présager un partenariat élargi avec les directions de santé publique afin de maximiser la contribution du projet en santé préventive.

En conclusion,

l’examen de l’évolution du mode de vie de différentes communautés à travers le monde fait bien ressortir le fait que l’activité physique est une dimension du mode de vie qui, bien qu’essentielle au bon équilibre et à la santé de l’humain, continue de faire l’objet d’un abandon progressif dans les pratiques professionnelles courantes. En fait, les travaux de recherche de notre équipe suggèrent que ces nouvelles façons de faire, en plus de promouvoir la sédentarité, contribuent à l’influence accrue de stimuli favorisant un bilan calorique positif et le phénomène de surpoids à plus long terme. Ce phénomène est tellement émergent qu’il incite à considérer que le surpoids deviendra le profil morphologique habituel d’une personne pleinement engagée dans un mode de vie typique de ce qui est favorisé par la mondialisation. Bien que ce constat soit plutôt alarmant, les professionnels de la santé doivent continuer d’investir temps et argent dans le développement de stratégies ciblant différents niveaux d’intervention. Au Québec, les choix d’intervention actuels couvrent toute une gamme de préoccupations, allant de l’éducation et la sensibilisation auprès du public jusqu’à l’intervention directe auprès des populations scolaires. Bien que ces projets aient théoriquement le potentiel d’être performants, leur impact réel sur les habitudes de vie, le bien-être et la santé de la population reste à démontrer.

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Angelo Tremblay et Jean-Philippe Chaput

Division de kinésiologie (PEPS),
Département de médecine sociale et préventive,
Faculté de médecine, Université Laval, Québec, Canada

Effets de l’activité physique sur le sommeil

Les troubles du sommeil et les pathologies associées représentent un véritable enjeu de santé publique. En France, par exemple, 19 % de personnes sont atteints d’insomnie et 9 % sont médicamentés. Les coûts directs de l’insomnie en France ont été estimés à 2,5 milliards d’euros en 1995 (Leger et coll., 1999renvoi vers). Selon une récente étude australienne, les coûts indirects des troubles du sommeil comprenant accidents du travail, accidents automobiles et pertes de productivité ont été chiffrés à 3 965 millions $ US et cela pour une population d’environ 20 millions d’habitants (Hillman et coll., 2006renvoi vers).
Parallèlement, il semble de bon sens d’admettre que l’exercice physique influence le sommeil, et des revues de synthèse récentes s’en font l’écho (Postolache et coll., 2005renvoi vers). De même, au plan clinique, de nombreuses personnes décrivent le fait qu’elles dorment mieux en ayant effectué une marche dans la journée ou après s’être dépensées physiquement lors d’une activité sportive ; inversement, la pratique d’une activité physique intensive en fin de journée ou en soirée est souvent la cause d’un trouble de l’endormissement.
Des questions se posent alors :
• l’exercice physique pourrait-il être une alternative non médicamenteuse visant à diminuer l’impact des troubles du sommeil ?
• quels sont les mécanismes qui pourraient suggérer une influence de l’exercice physique sur la quantité du sommeil mais également sur sa qualité (% de sommeil lent profond, % de sommeil paradoxal, latence d’endormissement...) ?
• quand on parle d’exercice physique, parle-t-on de sport de compétition à haute dépense physique et mentale ou d’activité physique d’intensité moyenne s’apparentant à la vie quotidienne ?
• en d’autre termes, y a-t-il un effet dose de l’activité physique sur le fonctionnement du sommeil et quels en sont la posologie et le mode d’administration ?
• l’exercice physique a-t-il un rôle aigu ou chronique sur le fonctionnement du sommeil ?
• le rôle de l’exercice physique est-il le même sur des populations de bons dormeurs versus insomniaques chroniques de type psychophysiologique ?
Une revue de littérature et quelques articles de synthèse récents présentent des données épidémiologiques et des études expérimentales sur l’effet potentiellement inducteur du sommeil par de l’exercice physique aigu ou chronique.

Mécanismes de l’impact de l’exercice physique sur le sommeil

Différentes études ont recherché les effets de l’exercice physique sur les différentes composantes du sommeil ainsi que sur les troubles du sommeil dans les états dépressifs et anxieux.

Effets circadiens

Le rythme veille-sommeil et l’exercice physique sont étroitement liés et toute modification de l’un va modifier le niveau de l’autre. On sait, par exemple, l’importance de la lumière sur la synchronisation de l’horloge interne qui pilote l’alternance veille-sommeil.
L’effet de l’exercice physique sur les rythmes circadiens serait ainsi comparable à celui de la lumière à haute intensité en particulier sur les décalages de phase (Youngstedt et coll., 2002renvoi vers). L’exercice retarde le système circadien quand il est réalisé la nuit, avec un maximum d’effet de retard de phase quand la température est minimum, vers 3-4 heures du matin. En revanche, les effets d’avance de phase se produisent après le minimum de température et jusqu’à 5 heures après. L’exercice produirait des retards et des avances de phase selon qu’il est pratiqué avant ou après le minimum de température corporelle.
Van Reeth et coll. (1994renvoi vers) ont montré que 2,5 heures d’exercice d’intensité légère (50 % du VO2 max) produisaient les mêmes effets sur les rythmes circadiens que 3 heures d’exposition à la lumière à haute intensité. Ces effets pourraient donc être utiles pour traiter les troubles de l’horloge biologique. Par exemple, les syndromes d’avance de phase ou de retard de phase pourraient être traités en pratiquant de l’exercice physique le soir ou le matin respectivement.
De même, l’exercice physique diminue les symptômes liés à la désynchronisation en cas de décalage horaire ou de travail posté par exemple, en fonction de son horaire de pratique (Edwards et coll., 2002renvoi vers).
L’amplitude des rythmes biologiques, notamment celui de la température, est augmentée par l’activité physique (Atkinson et coll., 1993renvoi vers). Par ailleurs, l’équipe de Barger et coll. (2004renvoi vers) a montré que l’exercice physique (45 minutes d’ergocycle) pratiqué dans l’obscurité afin de s’affranchir des effets de la lumière, décalerait la sécrétion de mélatonine.

Effet thermique

Horne et coll. (1985renvoi vers) montrent que l’augmentation du SLP (sommeil lent profond) après exercice physique est médiée par l’élévation de la température. Ils affirment que le SLP est la forme la plus récupératrice du sommeil. Cette affirmation est remise en cause par les études de Rechtschaffen et coll. (1999renvoi vers) montrant que le sommeil REM (de l’anglais Rapid Eye Movement, appelé sommeil paradoxal) est aussi récupérateur que le SLP. D’après ces auteurs, les augmentations de SLP dans les études de Horne étaient associées à des diminutions du REM sans modification du temps de sommeil total (TST). D’autres auteurs (Driver et coll., 1994renvoi vers) ont rapporté des corrélations négatives entre la quantité de sommeil profond et la qualité subjective du sommeil après l’exercice. Il n’empêche que la pratique d’un exercice physique a vraisemblablement un effet positif sur le processus d’entrée dans le sommeil par son effet de régulation efficace de la baisse de température. Il est donc vraisemblable que la diminution de la température du corps entre 0,5 et 1°C la nuit, favorable à la bonne qualité du sommeil, est plus facile à obtenir après la pratique d’un exercice physique chronique, c’est-à-dire un exercice physique pratiqué régulièrement avec un minimum de 3 séances d’activité par semaine, chaque séance durant au minimum 1 heure (Murphy et Campbell, 1997renvoi vers).

Effets anti-dépresseurs

Les troubles du sommeil constituent un facteur de risque pour le développement d’une dépression en même temps qu’ils sont un des symptômes de la dépression. Les effets anti-dépresseurs de l’exercice physique sont bien établis notamment sur des populations de personnes âgées (Morgan, 2003renvoi vers). Une des hypothèses sur ces effets est que la pratique d’un exercice physique, notamment aigu, c’est-à-dire la pratique d’un exercice physique considéré isolément, diminue le sommeil REM. Or, la diminution expérimentale du REM a un effet significativement anti-dépresseur après quelques semaines (Cartwright et coll., 2003renvoi vers).

Réduction de l’anxiété

Les troubles du sommeil sont un des marqueurs de l’anxiété, et l’insomnie chronique est associée à un état d’éveil élevé (Bonnet et coll., 2000renvoi vers). Or, l’exercice physique aigu réduit l’état d’anxiété (anxiété-état) et la pratique de l’exercice chronique réduit les traits anxieux (anxiété-trait) (O’Connor et coll., 2000renvoi vers).

Études épidémiologiques

La plupart des études épidémiologiques montrent une corrélation positive significative entre l’exercice auto-évalué et un meilleur sommeil subjectif (Youngsted et coll., 1997renvoi vers ; Morgan, 2003renvoi vers). Cependant, ces études présentent de nombreuses limitations et biais et les explications pour cette corrélation positive entre exercice physique et sommeil peuvent diverger :
• un bon sommeil est associé à une volonté et une aptitude à pratiquer de l’exercice physique (Weaver et coll., 1997renvoi vers) ;
• un meilleur sommeil et une aptitude ou une inclinaison à pratiquer de l’exercice physique sont corrélés avec une meilleure santé et moins de stress ;
• les pratiquants réguliers d’exercices physiques présentent des styles de vie moins à risques et favorables à un meilleur sommeil (moins de fumeurs, de consommateurs d’alcool ou de caféine parmi les pratiquants) (Sun et coll., 2002renvoi vers) ;
• le rôle de l’activité physique pratiquée à l’extérieur est difficile à dissocier de celui de la lumière à haute intensité qui favorise de meilleurs rythmes circadiens donc un meilleur sommeil (Youngsted et coll., 1999renvoi vers) ;
• il existe de nombreuses IDées préconçues sur les relations entre sommeil et activité physique. Par exemple, l’idée que la somnolence est associée à la fatigue physique, ce qui est inexact. Le fait également que les pratiquants d’exercice physique décrivent un sentiment de grande énergie qui peut être le reflet d’une adaptation physiologique cardio-respiratoire liée à l’entraînement et non une meilleure capacité de récupération liée au sommeil (Hong et Dimsdale, 2003renvoi vers).

Études expérimentales

Des études expérimentales ont recherché l’effet des différentes caractéristiques de l’exercice physique (horaires, durée, intensité...) en aigu ou en chronique sur le sommeil.

Effet de l’exercice physique aigu

La plupart des études expérimentales ont examiné l’influence de l’activité physique aiguë en comparaison avec des sédentaires témoins. Ces études se sont concentrées sur des mesures objectives du sommeil en laboratoire utilisant des polysomnographies et des scores de sommeil.
Les résultats d’une méta-analyse (Youngsted et coll., 1997renvoi vers) incluant des études effectuées chez de bons dormeurs concluent que :
• l’exercice physique aigu n’a pas d’effet sur la latence d’endormissement (Sleep Onset Latency) ou la durée des éveils nocturnes après le début du sommeil (WASO ou Wake After Sleep Onset) ;
• le temps total de sommeil (TTS) est statistiquement augmenté mais en petite quantité (durée moyenne 10 minutes) ;
• le sommeil lent profond (SLP) est statistiquement augmenté mais peu (1,6 minutes) ;
• la latence d’apparition du sommeil paradoxal (SP) est augmentée (11,6 minutes) ;
• la quantité de SP est diminuée (6 minutes) ;
• le niveau de condition physique a peu d’influence sur le résultat et le niveau d’intensité n’a pas besoin d’être élevé pour obtenir un effet positif sur le sommeil (Youngsted et coll.,1997renvoi vers).

Horaire des pratiques

Les effets les plus positifs se produisent après un exercice physique pratiqué entre 4 heures et 8 heures avant de se coucher. Par opposition, les effets les moins positifs se produisent après un exercice physique pratiqué à plus de 8 heures ou moins de 4 heures de l’heure du coucher. On peut cependant noter que l’affirmation « qu’un exercice pratiqué en fin de soirée perturbe le sommeil » est fortement battue en brèche. La pratique d’activité physique moins de 4 heures avant le coucher augmente le temps total de sommeil, diminue la durée des éveils nocturnes et augmente seulement légèrement la latence d’endormissement (Youngsted, 2005renvoi vers).
L’intensité physique de la séance d’exercice physique n’a pas montré d’effets notables, que les sujets soient entraînés ou sédentaires (O’Connor et coll., 1998). Ce point mérite d’être souligné : l’activité physique en soirée est tout à fait réalisable et pratique notamment pour les gens qui travaillent. Ce fait est de plus particulièrement vrai pour les activités physiques d’endurance (King et coll., 1997renvoi vers).

Durée de l’exercice

Si la durée de la séance est de moins de 1 heure, les effets sont négligeables sur la quantité du sommeil (2 minutes). Pour une durée de 1 à 2 heures, la quantité de sommeil augmente de 11 minutes en moyenne. Pour une durée supérieure à 2 heures, l’effet est de 15 minutes. L’effet est donc maximum pour des athlètes d’endurance qui s’entraînent sur des temps notablement longs (Youngsted et coll., 1997renvoi vers). Pour les sédentaires ou les pratiquants réguliers, un minimum d’une heure ou plus est donc recommandé.

Intensité de l’exercice

Les études montrent que l’intensité de l’exercice ne joue pas sur les effets positifs sur le sommeil. Des effets similaires sur le sommeil ont été rapportés que l’exercice soit modéré, léger ou intense. Une différence significative est cependant constatée sur la durée des éveils nocturnes. La pratique d’un exercice léger est associée à une diminution de la durée des éveils nocturnes (approximativement 16 minutes) ; en revanche, la pratique d’un exercice physique à haute intensité montre une tendance à l’augmentation de la durée des éveils nocturnes (4 minutes) (Youngsted et coll., 1997renvoi vers).

Régularité de la pratique

Les études montrent qu’il n’y a pas de rapport entre les fluctuations de l’exercice physique d’un jour à l’autre et le sommeil objectif et subjectif. En revanche, un nombre de 3 à 4 séances d’activité physique par semaine amènerait les meilleures améliorations sur le sommeil subjectif et objectif (TTS, SOL latence du début du sommeil).
En résumé :
• les effets d’un exercice aigu sur le sommeil semblent modestes ;
• la légère diminution du SLP est à noter car il est généralement admis que l’exercice physique augmente la quantité de SLP ce qui est représentatif d’une bonne qualité de sommeil ;
• quand certaines études montrent une augmentation du SLP, c’est au détriment du SP. Et il n’est pas évident que le SLP soit meilleur que le SP ;
• il n’a jamais été montré que les modifications du SLP après un exercice physique aigu soient corrélées à un meilleur sommeil subjectif ou un meilleur dynamisme dans la journée.

Effet de l’exercice physique chronique

La grande majorité des études sur les effets de l’exercice physique ont été réalisées sur des dormeurs normaux. La comparaison avec des groupes témoins pratiquant le stretching n’a pas montré de différences significatives chez ces bons dormeurs (Tworoger et coll., 2003renvoi vers).
En revanche, plusieurs études ont eu pour objectif de savoir si la pratique d’une activité physique pouvait améliorer le sommeil des personnes âgées. Seule une étude (King et coll., 1997renvoi vers) a sélectionné une population d’adultes de plus de 60 ans avec un diagnostic d’insomnie primaire et l’absence de dépression ou de démence. Quarante trois sujets se plaignant de leur sommeil ont effectué un entraînement de 16 semaines, 3 à 4 fois par semaine, à composante aérobie et à une intensité entre 60 et 75 % de leur capacité aérobie. Ils ont été comparés à une population témoin :
• la qualité subjective du sommeil a été grandement améliorée ;
• la latence d’endormissement a diminué de 11,5 minutes versus témoin ;
• le TST a augmenté de 42 minutes.
Une autre étude (Singh et coll., 1997renvoi vers) a été réalisée chez des adultes âgés dépressifs (60-84 ans, n=32) en comparant un entraînement à base de renforcement musculaire et musculation versus un groupe témoin bénéficiant d’une éducation thérapeutique sur la santé. L’entraînement a duré 10 semaines à raison de 3 séances par semaine. Une amélioration significative du sommeil et une diminution de la dépression ont été observées dans le groupe musculation versus le groupe témoin et ces effets étaient significativement corrélés à l’entraînement.
Guilleminault et coll. (1995renvoi vers) ont réparti de manière aléatoire 30 sujets adultes insomniaques (44 ans de moyenne d’âge) pendant 4 semaines de traitement. Un groupe témoin suivait une éducation thérapeutique sur le sommeil, le 2e groupe bénéficiait de cette formation sur l’hygiène du sommeil plus une marche d’allure vive pendant 45 minutes par jour, et enfin un groupe était sous traitement à la lumière à haute intensité (30 minutes par jour). Le sommeil était évalué par actimétrie (mesure des mouvements), questionnaires et échelles de sommeil. L’actimétrie a montré chez le groupe témoin une augmentation moyenne de 1 minute dans la SOL et une diminution moyenne de 3 minutes du TST, là où le groupe exercice a présenté des augmentations au niveau de la SOL et du TST respectivement de 7 minutes et de 17 minutes. Le groupe lumière à haute intensité a présenté une diminution de la SOL de 8 minutes, et une augmentation du TST de 44 minutes. Le sommeil subjectif a montré des tendances équivalentes. Bien que ces résultats n’étaient pas statistiquement différents entre les traitements notamment à cause du petit nombre de sujets, ces mesures renforcent la notion que l’exposition à la lumière à haute intensité pourrait être une importante composante, donc un biais, dans ces études sur l’exercice physique.
Enfin, une étude randomisée (Li et coll., 2004renvoi vers) a montré l’efficacité d’un excercice physique d’intensité modérée (8 mouvements de tai-chi) versus stretching et respiration profonde sur 118 hommes et femmes âgés de 60 à 92 ans se plaignant de troubles modérés de leur sommeil. Les séances duraient 1 heure, 3 fois par semaine, pendant 24 semaines consécutives. Les résultats ont montré des améliorations significatives dans 5 composantes du questionnaire de Pittsburgh (PSQI, Pittsburgh Sleep Questionnaire Index), qualité du sommeil, SOL, TST, efficacité du sommeil et perturbations du sommeil dans le groupe tai-shi. Le score global du PSQI et l’échelle de somnolence d’Epworth étaient significativement également améliorés.
En résumé :
• les études sur les effets de l’exercice chronique n’ont pas montré une évidence irréfutable que l’exercice facilite le sommeil ;
• ces études ont été limitées soit à des bons dormeurs la plupart du temps, soit à des personnes âgées se plaignant de leur sommeil ;
• des études contrôlées avec des insomniaques ou des dépressifs ont montré des effets significatifs de l’influence positive de l’exercice sur le sommeil, mais ces effets n’ont été mesurés très souvent qu’avec des mesures subjectives ;
• étant donné l’attente du grand public sur les alternatives non médicamenteuses au traitement de l’insomnie, des études comprenant des mesures objectives semblent nécessaires.

Pathologies organiques du sommeil et exercice physique

Le syndrome d’apnées du sommeil toucherait entre 2 et 4 % de la population adulte. Des études récentes montrent que la sévérité du syndrome d’apnées du sommeil est inversement proportionnelle au nombre d’heures d’exercice par semaine, indépendamment de l’IMC (Peppard et Young, 2004renvoi vers). L’hypothèse d’une action préventive de l’exercice physique sur les muscles glosso-pharyngiens est émise.
De même, des études épidémiologiques sur la pathologie des mouvements des jambes sans repos (MJSR) menées sur une population nord-américaine montre que la sédentarité est significativement associée au MJSR (De Mello et coll., 2004renvoi vers). Une étude préliminaire réalisée en 2004 montre également une diminution des symptômes du MJSR après la pratique d’un exercice physique aigu ou chronique. Des études complémentaires seraient à promouvoir.

En conclusion,

il est communément admis que l’exercice physique est un des facteurs importants de la promotion du sommeil. Les études expérimentales ont cependant globalement échoué pour démontrer formellement quel type d’exercice physique pratiquer (aigu ou chronique), mais ces études ont été réalisées pour la plupart chez des bons dormeurs. Les premières études sur des populations d’insomniaques chroniques montrent des résultats prometteurs. Les relations entre sommeil et exercice physique ouvrent des perspectives en terme de santé. Toutes les études convergent pour montrer que la sédentarisation diminue l’amplitude des rythmes circadiens. Par voie de conséquence, le sommeil normal (et récupérateur) ne pourrait être obtenu que chez des sujets actifs. L’instauration d’un cercle vertueux serait ainsi à promouvoir (Davenne, 2006renvoi vers).
Par l’exercice physique, il y aurait une meilleure transition de l’état de sommeil vers l’éveil, une motivation et une envie d’être actif tout au long de la journée, donc de renforcer les rythmes biologiques, de prévenir les accidents et d’augmenter la durée du sommeil et sa qualité.
Des études avec des mesures objectives seraient à entreprendre permettant d’inclure l’exercice physique comme une alternative à la prise médicamenteuse et d’en définir la prescription en fonction de différentes populations (pathologies, âge...).

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François Duforez et Damien Leger

Centre du sommeil et de la vigilance,
Hôtel-Dieu, AP-HP, Paris


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